Le philosophe Bernard-Henri Lévy était l'invité de BFMTV pour évoquer l'accord conclu entre Israël et le Hamas prévoyant la libération de 50 otages retenus à Gaza contre 150 prisonniers palestiniens et une trêve de quatre jours.
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00:00 Bonsoir Bernard-Henri Lévy.
00:01 Merci beaucoup d'être avec nous.
00:02 Ulysse Gosset est également de retour sur ce plateau.
00:04 Libération prévue dans une poignée d'heures,
00:07 dans dix heures précisément,
00:08 pour une partie des otages retenus par le Hamas.
00:11 On attend ce soir de connaître la liste de ces otages.
00:14 On verra le détail de l'accord qui a été passé
00:15 entre Israël et le Hamas via le Qatar.
00:18 D'abord, une déclaration ce soir, celle de Benjamin Netanyahou,
00:21 le Premier ministre israélien.
00:22 Il vient de prendre la parole, je vous propose de l'écouter.
00:24 -Mas est salal etaderech le mitvea nochechi ?
00:27 -Ce qui nous a menés à cette libération,
00:29 ce sont les efforts.
00:31 Le premier effort, c'est une pression militaire massive,
00:35 incessante, contre le Hamas.
00:37 Et j'aimerais dire un mot à Tsaïl sur les efforts incroyables
00:43 qu'ils font pour créer cette pression.
00:46 Le deuxième effort, c'est la pression diplomatique
00:48 pour la libération.
00:49 Nous avons négocié durement.
00:51 Nous avons tout fait pour trouver un meilleur accord.
00:58 -Ulysse, en quelques mots, Benjamin Netanyahou défend
01:00 cet accord ce soir.
01:01 Qu'est-ce qu'il y a dans cet accord ?
01:02 Qu'est-ce qu'il va se passer dans les heures qui viennent ?
01:04 -L'essentiel, c'est que demain, pour la première fois
01:07 depuis le début de l'opération, il pourrait y avoir
01:09 une pause dans les combats, une trêve, souhaitent certains,
01:13 qui durera peut-être quatre jours, si elle est respectée
01:16 par les deux parties.
01:17 Et surtout, demain, un premier groupe d'otages israéliens,
01:20 surtout des femmes et des enfants, un groupe de dix personnes,
01:24 pourrait enfin être libéré et remis à la Croix-Rouge,
01:27 qui serait à l'intérieur du territoire de Gaza,
01:29 et qui serait en mesure d'accompagner ces otages
01:32 vers le sud, vers le point de passage entre Gaza et l'Égypte,
01:35 pour qu'ils soient ramenés enfin en Israël.
01:38 En échange, l'accord prévoit que 30 détenus palestiniens
01:43 qui sont actuellement emprisonnés en Israël seraient libérés.
01:46 Ça, c'est la première étape.
01:47 Si tout se passe bien, il pourrait y avoir une répétition
01:50 de ce scénario, dix par dix, pour arriver à une cinquantaine
01:54 de libérations d'otages, à nouveau essentiellement
01:57 des femmes et des enfants, dont peut-être trois enfants français,
02:00 contre 150 détenus palestiniens.
02:04 Et si tout se passe bien, si la trêve est respectée,
02:07 si la pause est respectée, s'il n'y a pas de bombardements,
02:09 s'il n'y a pas de tirs de roquettes du Hezbollah, du Hamas,
02:12 du djihad islamique, eh bien on pourrait même aller au-delà
02:15 et arriver in fine, c'est ce qui est envisagé,
02:18 à la libération de 100 otages contre 300 prisonniers palestiniens
02:24 qui sont actuellement dans les prisons en Israël.
02:26 Voilà le scénario.
02:29 Netanyahou dit ce soir que la Croix-Rouge sera autorisée
02:32 à rendre visite aux otages qui ne seront pas libérés,
02:35 car c'est, je dirais, le hiatus de cet accord,
02:37 c'est qu'il y a seulement, entre guillemets,
02:40 une centaine d'otages au total qui pourraient être libérés,
02:42 mais il y en a encore beaucoup d'autres.
02:44 Et donc la Croix-Rouge pourrait leur rendre visite
02:46 si l'accord est respecté, et ça, c'est évidemment très important.
02:49 Mais il ajoute, nous continuerons la guerre,
02:51 elle n'est pas terminée et nous irons jusqu'au bout
02:54 pour éliminer le Hamas.
02:56 – Bernard-Henri Lévy, est-ce que c'est un bon accord ?
02:59 – Écoutez, d'abord, j'espère qu'il sera respecté,
03:05 et moi je ne le croirai que lorsque je verrai vraiment
03:10 les otages libérés demain.
03:12 J'ai vu tout à l'heure en ligne un message d'une maman israélienne,
03:18 Mme Hadass Calderon, qui disait "je ne croirai à tout ça,
03:24 à tout ce marchandage, que lorsque je pourrais serrer
03:27 mes deux enfants dans mes bras".
03:29 Ça, c'est la première chose, et je crois qu'il faut imaginer,
03:32 essayer d'imaginer la souffrance de ces mères, de ces pères,
03:36 de ces frères, de ces sœurs d'otages,
03:39 qui sont dans l'effroi et dans l'attente la plus absolue,
03:44 qui ne savent pas s'ils sont sur la liste,
03:46 et il faut, non pas s'y imaginer, mais constater
03:49 l'extraordinaire cruauté de ces marchands de chair
03:54 que sont les gens du Hamas.
03:57 Ce, Ulysse Gosset parlait, "dix par dix", "si ceci, si cela",
04:01 ce goût à goût... - Ça peut durer des semaines,
04:03 ce goût à goût. - Ce goût à goût de l'espérance,
04:06 cette façon de jouer avec les nerfs des familles,
04:10 il y a là quelque chose d'ignoble, surtout quand on sait
04:14 que rien ne dit qu'ils tiendront parole,
04:18 parce que non des plaises à l'AFP et à M. Mélenchon,
04:22 on a affaire à des terroristes, le Hamas,
04:25 ce n'est pas des interlocuteurs normaux.
04:28 On fait tous comme si, depuis ce matin,
04:29 parce qu'évidemment, on espère tous,
04:31 on fait tous comme si c'était une négociation normale.
04:34 - Mais c'est ce qu'a cherché le Hamas.
04:36 - C'est ce que cherchait le Hamas, voilà.
04:38 Et je crois qu'en effet, il faut jouer ce jeu-là,
04:40 parce que quand on est en face de barbares
04:42 et qu'on peut sauver quelques vies, bien sûr qu'il faut le faire,
04:46 mais il ne faut pas être dupe.
04:48 Et encore une fois, jusqu'à la dernière minute,
04:50 moi, je ne sais pas comment résonnent des terroristes.
04:53 Et j'ai beaucoup de mal à me mettre dans la tête
04:56 de ces calculateurs et de ces tacticiens horribles.
05:00 - Mais la question, c'est de savoir quel poids accorder à leur parole.
05:02 - C'est ce que je vous dis,
05:03 quel poids accorder à la parole d'un terroriste.
05:06 Ce n'est pas des belligérants.
05:08 J'entendais parler toute la journée,
05:11 certains ont parlé d'échanges de prisonniers.
05:14 Ce n'est pas un échange de prisonniers,
05:15 c'est d'un côté, il y a des prisonniers,
05:18 et de l'autre côté, il y a des civils, des bébés, des vieilles dames,
05:22 des gens, des innocents, et certainement pas des prisonniers.
05:25 Alors quel sera, quel crédit accorder à la parole du Hamas ?
05:29 Prions jusqu'à demain matin pour qu'en effet, les libérations adviennent.
05:34 - Anna ?
05:35 - Mais là, ce qu'on voit même avec cette sémantique,
05:36 c'est qu'en effet, on dit de moins en moins terroristes
05:39 et de plus en plus les combattants du Hamas.
05:42 En effet, on renvoie dos à dos, si vous voulez, les deux narrations,
05:46 c'est-à-dire que le Hamas exige d'Israël la libération de prisonniers,
05:50 mais de prisonniers qui ont été mis dans des prisons en Israël
05:52 parce qu'ils avaient commis des crimes ou allaient le faire,
05:56 si vous voulez, ou étaient suspects de participer à des entreprises terroristes.
06:00 Donc si vous voulez, on va avoir un goutte à goutte,
06:02 une forme de supplice où vous aurez,
06:05 si le cessez-le-feu est respecté des deux côtés, dit...
06:09 - La pause.
06:10 - Voilà, mais la pause.
06:11 - Le mot "cessez-le-feu" fait aussi partie des sémantiques.
06:15 - C'est important.
06:16 - Mais bien sûr, mais donc si c'est avéré,
06:19 il y aura 10 otages civils qui ont été kidnappés
06:24 dans la barbarie, dans la terreur, dans des kibbouts,
06:27 versus des 30 prisonniers palestiniens
06:31 qui ont été donc mis en prison pour des faits et des crimes commis
06:37 ou qui n'en passent d'être commis sur le territoire israélien.
06:40 - Et on a pour le coup ce soir la liste de ces 300 prisonniers potentiellement libérables.
06:44 - Mais on est tous pris en otage, tous, nous, commentateurs,
06:47 les politiques, l'opinion publique internationale,
06:50 de cette guerre de la communication, de cette guerre des mots,
06:53 de cette guerre sémantique, de cette guerre des récits.
06:56 Et au fond, il n'y a pas de bonne façon de s'en sortir,
06:58 parce que de facto, le Hamas a créé une situation de terreur
07:04 et de sidération qui nous oblige tous à épouser en partie,
07:09 même en s'en défendant, même en disant qu'on n'est pas dupes,
07:12 une part de cette narration.
07:13 Et c'est ce qu'on fait, et c'est ça, en fait, l'enfer de ce goût à goutte
07:20 auquel on assiste ce soir.
07:22 Parce qu'on est content, bien sûr qu'on est content de se dire que peut-être demain,
07:26 et en même temps, c'est l'enfer.
07:28 - Férico ?
07:29 - Oui, Anna, bien sûr, et Bernard Henry, l'abomination est encore au-delà,
07:33 puisqu'on est dans la bourse humaine, on échange 3 palestiniens contre...
07:37 On est dans un marché absolument abominable.
07:39 Pour autant, et c'est très douloureux à reconnaître,
07:42 sans la pression des États-Unis, de l'Europe certainement et des familles,
07:48 Benjamin Netanyahou n'aurait jamais consenti à l'échange ni au frontage.
07:52 Il avait une résolution qui était de nettoyer le Hamas de la bande de Gaza.
07:56 Ça ne tiendrait qu'à lui.
07:58 Nous avons de bonnes raisons de croire, sans aucune preuve scientifique,
08:02 nous avons de bonnes raisons de croire qu'il serait allé
08:04 et qu'il avait peut-être mis une croix sur les 240 otages ou non.
08:07 - Est-ce que vous êtes d'accord avec ça, M. Henry ?
08:09 - Vous en savez... Non.
08:10 - Les déclarations qu'il a faites, le chef de guerre qu'il est,
08:13 et la façon d'escamoter qu'il a, la responsabilité qu'il a dans la situation actuelle.
08:18 - Je n'en sais rien.
08:19 - Beaucoup de gens le savent dans la rang-de-liste.
08:21 - Beaucoup de gens le savent dans la culture d'Israël.
08:22 Il y a dans la culture d'Israël un principe à quoi aucun dirigeant d'Israël
08:28 n'a jamais dérogé, qui est sauver les otages à tout prix.
08:32 - Vous ne croyez pas qu'il est un peu à part, lui tout seul ?
08:34 Je parle bien de la personnalité de Benjamin Netanyahou.
08:36 - Je ne parle pas de Sharon, je parle de lui.
08:37 - Je n'en sais rien.
08:38 Je sais que le plus spectaculaire des échanges, c'est lui qui y a procédé,
08:45 je crois, à l'époque du soldat Chalit, un otage, un Israélien,
08:50 échangé contre 1027 Palestiniens.
08:52 Donc ce que je veux dire, je ne veux pas entrer dans tel ou tel,
08:54 et on ne va pas faire ici de la politique israélienne,
08:56 les Israéliens s'en chargent très bien tout seuls,
08:59 et ils s'en chargeront encore mieux quand cette guerre sera terminée.
09:02 - Il y a des otages français dedans.
09:04 - Ce que je sais, c'est qu'il y a en effet au cœur de l'ADN
09:09 et de la culture d'Israël, cette idée que chaque vie est sacrée.
09:13 Et je dirais même, chaque vie y compris au-delà de la mort.
09:18 En Israël, on échange les dépouilles de soldats morts
09:22 contre des prisonniers ou contre des terroristes.
09:28 - D'ailleurs, ça fait partie de l'accord Bernard-Henri Lévy,
09:29 les dépouilles potentielles, c'est-à-dire que ça fait partie des termes
09:33 de l'accord qui ont été négociés.
09:34 - C'est quelque chose de très singulier.
09:36 Nous avons en Occident et en Europe ce débat.
09:39 Est-ce qu'on négocie avec les preneurs d'otages ?
09:41 Est-ce qu'il faut négocier avec les terroristes ?
09:43 Il y a des pays qui ne le font jamais, la Grande-Bretagne,
09:45 il y a des pays comme la France qui le font mais sans le dire.
09:48 - Là, ça se vit à le Qatar.
09:49 - Là, oui, mais Israël même, la position d'Israël depuis sa fondation,
09:57 c'est qu'en effet, on négocie avec le diable
10:00 si ça permet de sauver un enfant, si ça permet de ramener à la maison un soldat
10:05 ou si ça permet de ramener la dépouille d'un soldat.
10:08 C'est comme ça, ça fait partie de la culture du pays,
10:10 ça fait partie d'ailleurs de la pensée des pères fondateurs
10:14 et même de la pensée juive beaucoup plus anciennement.
10:17 - Simplement, de ce que l'on comprend là, et Ulysse me corrigera,
10:20 les premiers otages à être libérés pourraient être des binationaux.
10:23 On parlait des Américains, on parlait des Français, etc.
10:27 Est-ce qu'après plusieurs libérations, plusieurs salves de libération,
10:31 ce ne sera plus qu'un tête-à-tête entre Israël et le Hamas ?
10:35 Et quel danger il y a dans ce tête-à-tête-là ?
10:37 - Le danger déjà, c'est cette division, cette ségrégation, ce tri, c'est affreux.
10:44 C'est affreux et je ne suis pas sûr d'ailleurs que nous devrions nous y prêter.
10:52 Et il y a quelque chose que je trouve très digne dans la société civile israélienne d'aujourd'hui,
10:58 chez les familles d'otages, c'est justement de refuser d'entrer dans cette histoire.
11:03 Et moi, j'étais en Israël dès le 8 octobre, j'ai rencontré des familles d'otages,
11:08 je suis en contact avec elles, je les ai revues à Paris, ce qui est magnifique.
11:12 Bien sûr, chacun et chacune au-dedans de soi rêve que c'est les siens qui seront libérés.
11:18 Mais la solidarité, la fraternité entre les familles est totale.
11:23 Et si dans le secret de leur cœur, ils ont ce réflexe humain de dire
11:27 "pourvu que ce soit ma petite fille ou mon petit garçon",
11:30 ils font aussi le serment tous les jours, dans les manifestations qu'ils organisent,
11:35 devant la résidence de Netanyahou, etc., le serment de rester solidaires quoi qu'il arrive,
11:40 même s'ils ont cet affreux privilège d'être en tête de liste.
11:45 – On verra dans un instant qui sont les prisonniers palestiniens libérables avec vous,
11:49 Lise, mais d'abord, vous vouliez réagir Géraldine.
11:50 – Oui, parce qu'il y a aussi une dimension atroce et internationale à tout cet épisode.
11:59 Le Hamas est en train de gagner sur tous les plans,
12:03 dans la trajectoire qui s'était tracée, avec le rôle que reprend le Qatar
12:08 dans cette négociation et sur la scène internationale.
12:11 C'est-à-dire que le Qatar a toujours eu des relations à la fois chaleureuses
12:16 avec les Occidentaux qu'il finance lourdement, mais avec tous les pays paria.
12:23 Il accueille depuis 10 ans la branche politique du Hamas,
12:28 il paye les fonctionnaires du Hamas, il avait accueilli les talibans pendant des années,
12:33 avant qu'ils puissent retourner en Afghanistan,
12:36 et il se démarque finalement de la position saoudienne
12:41 qui lui demandait de rompre les liens avec les terroristes.
12:44 Et là, non, c'est cette ligne qu'attarie d'extrême complaisance
12:51 avec ce qu'il y a de pire dans l'idéologie islamique,
12:54 qui revient sur le devant de la scène et qui est en quelque sorte légitimée
12:58 par ce qu'on est en train de vivre.
12:59 C'est utile à court terme, à très court terme, dans l'hyper court terme,
13:02 à long terme, on risque d'avoir très longtemps la nausée.
13:06 – La nausée ? – Oui, bien sûr la nausée, mais…
13:09 – La nausée parce que le Qatar notamment ?
13:11 – Oui, le fait que le Qatar soit dans cette position de médiation,
13:17 le fait qu'il puisse peut-être demain se draper dans le rôle de sauveur d'otages,
13:23 de faiseur de paix, il y a quelque chose là également d'affreux,
13:30 mais est-ce qu'on en est si dupe que cela ?
13:34 Et est-ce que vous croyez que les opinions occidentales
13:36 sont dupes de ce double jeu du Qatar ?
13:39 Si le Qatar était sérieux, ça fait longtemps qu'ils auraient arrêté Ismaël Agnier par exemple.
13:45 – Qui est le patron du Hamas.
13:46 – Le patron du Hamas, qui réside au Qatar, assis sur sa fortune, dans ses palais.
13:57 Les Qataris, si vraiment ils disaient la vérité,
14:01 auraient lancé un mandat d'arrêt contre lui.
14:05 Non, ils se pavanent à Doha, capitale du Qatar,
14:08 ou dans la région, comme si de rien n'était.
14:10 Donc bien sûr qu'on a la nausée, mais je crois qu'on l'a tous,
14:14 et qu'à l'arrivée, vous savez, moi je ne suis pas aussi sûr que vous,
14:19 que le Hamas ait gagné sur toute la ligne.
14:21 Il y a déjà une chose sur laquelle ils ont perdu, c'est les tunnels.
14:25 Aujourd'hui, on a vu des images sur une autre chaîne que la vôtre,
14:30 on voit, ou peut-être aussi ici d'ailleurs,
14:32 les tunnels qui étaient sous l'hôpital…
14:35 – Ce sont les images que vous voyez là.
14:39 – Ce sont les images que vous voyez là.
14:40 – Voilà, ont été brisés, démantelés, leur architecture a été cassée, et voilà.
14:48 – Ça ce sont les dernières images données ce soir, notamment par l'armée israélienne.
14:52 Là, le Hamas a perdu, et là les parrains du Hamas,
14:55 c'est-à-dire l'Iran, le Qatar et peut-être la Russie,
14:59 ont perdu, là, dans les images que nous voyons.
15:01 – Christophe.
15:02 – C'est parce qu'il perd sur ce plan-là qu'il a décidé de changer de terrain
15:05 et de venir sur cette négociation.
15:06 Le Hamas ne tiendra pas sa parole parce qu'un mouvement terroriste
15:09 n'a pas de parole, mais il a des intérêts.
15:10 L'intérêt du Hamas aujourd'hui, il est double,
15:12 c'est d'amolir les opinions internationales par ce goût à goût de délibérations,
15:16 cette clepsydre qui fait que par tranche de 10, on les libère,
15:19 donc chaque jour, on demandera une pause supplémentaire
15:22 pour en avoir 10 autres.
15:23 Et à ce moment-là, à un moment donné, les opinions diront
15:25 "Attendez, vous n'allez pas reprendre la guerre, vous les Israéliens,
15:28 passez de la pause reconduite au cessez-le-feu".
15:30 Et ils se seront, en ce moment-là, peut-être réarmés, réorganisés, réalimentés.
15:35 La deuxième raison, c'est qu'au bout de la libération des otages civils,
15:38 femmes, enfants, où on aura dit aux Occidentaux "on a libéré les vôtres",
15:41 vous voyez, on est un mouvement sympathique,
15:43 on peut discuter avec le Hamas, il restera les militaires, les soldats israéliens.
15:46 Et là, ça sera une autre paire de manches, Gilad Shali de 5 ans.
15:49 Et là, ils diront "Mais c'est prisonniers contre prisonniers,
15:51 ils se reconstitueront en légitimité politique, nous le Hamas-État,
15:55 face à Israël-État, prisonniers de guerre contre prisonniers de guerre".
15:58 Et là, on aura reculé de plusieurs cases.
16:00 Moi, je pense que les Israéliens ne sont pas dupes,
16:02 que pendant que la pause sera en surface, le nettoyage des tunnels va continuer,
16:06 et que les terroristes qui pourront profiter de la pause pour s'évader par l'Égypte
16:10 seront retrouvés comme ceux qui, à Munich, ont tué les athlètes israéliens en 2012.
16:14 - C'est la raison pour laquelle personne en Israël ne parle de cessez-le-feu,
16:18 et cette distinction sémantique, c'est ça qu'elle veut dire,
16:20 c'est qu'en effet, il n'y aura plus de bombardements,
16:22 que les drones cesseront peut-être de voler...
16:24 - Mais on surveille sans drone, on surveille autrement...
16:26 - Mais que les opérations dans les tunnels, la neutralisation de ces machines de guerre
16:31 qui étaient installées sous les écoles et sous les hôpitaux, continuera.
16:35 - Ulysse, en échange des otages, il y a donc des prisonniers.
16:39 Il y a déjà une liste de 300 prisonniers palestiniens libérables dans les jours qui viennent,
16:44 en fonction de la manière dont les échanges vont pouvoir s'opérer,
16:47 et en fonction de la manière dont tout le monde respectera le deal qui a été passé.
16:50 Qui sont ces prisonniers-là ?
16:52 - Alors il faut rappeler qu'en Israël, il y a plus de 7000 détenus palestiniens, 7600,
16:58 en trois catégories, d'abord ceux qui ont été condamnés
17:01 pour des crimes qu'ils ont commis, certains à perpétuité, ils sont à peu près 2300.
17:05 Il y en a d'autres qui sont en attente d'un jugement, ils sont environ 2300 aussi,
17:08 puis il y en a 2000 qui sont en détention administrative et qui n'ont pas été jugés.
17:14 Parmi tous ceux-là, Israël va d'abord libérer des femmes et des jeunes mineurs de 18 ans ou moins.
17:22 Et là effectivement, ce qui est important, c'est que dans les quelques 300 noms
17:27 qui sont publiquement donnés par Israël, et qui font peut-être l'objet
17:31 d'un recours de la Cour suprême israélienne, pour savoir si on peut effectivement
17:35 donner l'autorisation au gouvernement de les libérer,
17:38 il y a des détenus du Hamas, des détenus du djihad islamique,
17:44 des détenus du FATA, le mouvement de l'autorité palestinienne,
17:47 et puis des détenus sans appartenance.
17:49 Donc il y a un mix, si vous voulez, des différentes catégories de Palestiniens.
17:54 Il faut dire aussi qu'Israël a une politique de détention qui est extrêmement dure,
18:00 puisque certains sont détenus sans jugement depuis des mois, pour ne pas dire des années.
18:05 Ce sont ceux-là qui vont bénéficier les premiers, et avec une précision importante,
18:09 pas de détenus qui ont commis des crimes, des assassinats,
18:13 des crimes de sang ou des attentats, et ça c'est très important.
18:15 Mais parmi effectivement les 300, il y a notamment 49 membres du Hamas.
18:19 Détruire le Hamas, anéantir le Hamas, en libérant une partie de ses membres,
18:24 on ne voit pas comment Israël peut y arriver ?
18:26 C'est tout l'enjeu de cette horrible tragédie, et c'est le dilemme
18:32 face auquel les Israéliens sont depuis le premier jour.
18:36 Je l'avais raconté dans un reportage chez vos confrères de match,
18:40 les premières unités arrivaient au bord de la bande de Gaza,
18:45 on ne parlait pas de vengeance, on ne parlait pas de tout ça,
18:48 on parlait de comment faire les deux à la fois.
18:51 Comment ramener les enfants à la maison,
18:54 et comment faire que le Hamas, que personne ne recommence,
18:57 que cette horreur du 7 octobre ne reprenne pas.
19:00 C'est l'opération de libération d'otages probablement la plus difficile de l'histoire,
19:06 il n'y a pas de précédent, il y a eu des prises d'otages de cette ampleur,
19:10 il y en a eu au Nigeria, il y en a eu en Colombie à l'époque d'Ingrid Betancourt,
19:15 c'était des situations très différentes.
19:18 Une telle énormité, dans une situation aussi complexe,
19:23 avec cette double obligation de sauver les vies,
19:26 et de casser les reins aux assassins, personne n'a jamais été confronté à cet âge.
19:31 Mais vous y croyez encore ? Casser les reins, c'est votre expression,
19:34 anéantir le Hamas, vous y croyez encore aujourd'hui ?
19:36 Oui, parce que je crois qu'il y a des unités du Hamas qui déjà à ce jour ont été décimées,
19:40 il y a eu une brigade notamment, d'après ce que disent les Israéliens renseignés,
19:47 une brigade dite d'élite du Hamas qui a perdu la moitié de ses effectifs,
19:52 parce que ces histoires de tunnels, ce n'est pas un jeu de pistes,
19:57 c'est une infrastructure militaire extraordinairement sophistiquée,
20:00 et dont on a de bonnes raisons de penser qu'elle est en train d'être brisée,
20:05 donc j'y crois. Mais bien sûr que c'est, encore une fois, jamais...
20:09 On a vu, NTB, il y a 40 ans, 50 ans, en 1974,
20:15 libération d'otages extraordinairement difficile,
20:18 rien ne fut aussi difficile que ce à quoi les mamans, les pères,
20:26 les Israéliens, aujourd'hui, sont confrontés avec cette prise d'otages massive.
20:30 Il y a juste une information qui est importante,
20:33 c'est qu'au-delà de l'échange, d'otages contre détenus,
20:36 il y a la possibilité, pendant ces jours de pause ou de trêve, comme on voudra,
20:40 d'amener des vivres, des médicaments aux populations palestiniennes.
20:43 Et Gaza en a besoin, les Gazaouis en ont besoin,
20:45 et désespérément besoin d'une trêve aussi.
20:47 - Voilà, mais la situation des hôpitaux est catastrophique,
20:50 on le sait, la situation des enfants qui sont à l'intérieur est catastrophique,
20:54 donc les organisations humanitaires, qui ont été très critiquées,
20:57 et les Nations Unies vont pouvoir rentrer dans Gaza,
21:00 et pas simplement avec 500 camions,
21:03 mais peut-être avec des milliers de tonnes de vivres et de médicaments
21:05 qui sont absolument indispensables.
21:07 Ça ne va pas rétablir l'eau courante, etc.,
21:09 mais ça va être extrêmement important,
21:11 et ça explique aussi que s'il y a eu cet accord,
21:15 et cette pression qui a été extrêmement forte des Américains,
21:19 trois fois le président Biden, dans les derniers jours,
21:22 a appelé Netanyahou pour lui dire qu'il fallait accepter cet accord,
21:26 parce que la guerre de Gaza est devenue un problème de politique intérieure
21:29 pour les Américains,
21:31 ce qui risque de remettre en cause même
21:34 la prochaine élection de Joe Biden aux États-Unis.
21:37 Et c'est cela qui explique aussi, et donc dans ce contexte,
21:40 le fait qu'il y ait une pause qui permette d'acheminer des vivres
21:43 aux populations civiles, qui sont les boucliers humains du Hamas,
21:47 est extrêmement importante.
21:48 - À l'instant, information importante, le bureau de Ben Amein Netanyahou
21:51 annonce que la libération des otages ne se ferait pas avant vendredi.
21:55 Information donnée à l'instant, on n'a pas les outils.
21:57 - La raison pour laquelle je vous disais en commençant
21:58 qu'il fallait être très prudent et attendre de le voir pour y croire.
22:02 - Absolument, vous avez raison.
22:03 - Ça s'appelle un supplice, et dans le même temps,
22:06 Netanyahou est obligé de venir dire devant les membres de son gouvernement
22:11 et devant les Israéliens que ce n'est pas la fin de la guerre.
22:14 Il dit "j'entends beaucoup de bêtises selon lesquelles,
22:17 après avoir fait une pause, nous arrêterions la guerre.
22:20 Je voudrais clarifier, nous sommes en guerre et nous continuerons à nous battre".
22:24 On est vraiment dans cet écartèlement-là,
22:27 et dans la classe politique israélienne, dans la société israélienne.
22:29 C'est-à-dire qu'à la fois, il y a eu une pression incroyable
22:32 de la société israélienne pour la libération des otages
22:36 et pour en faire la priorité numéro un.
22:38 Et en même temps, aucun membre de la classe politique israélienne,
22:43 quel que soit le parti, ne veut l'arrêt de la guerre.
22:46 C'est là qu'est Israël.
22:47 - En un mot, Péricault ?
22:48 - On pourra éradiquer autant que l'on voudra, sans cesse et sans cesse.
22:51 On pourra nettoyer tout ce qu'on veut.
22:52 Cette dynamique abominable se reconstituera
22:55 tant qu'Israël n'aura pas évacué les territoires conquis
22:58 depuis les accords d'Oslo.
22:59 Je dis bien depuis les accords d'Oslo.
23:01 Et là, il faut sauver l'urgence.
23:03 L'urgence aujourd'hui est de sauver Israël, peut-être contre elle-même.
23:06 - La solution sine qua non pour qu'on trouve un début de solution.
23:08 L'armée française, Bernard-Henri avait gagné en 1962 contre le FLN.
23:12 L'Algérie est toujours une indépendante.
23:13 - Le territoire dont nous parlons ce soir et dont nous parlons depuis le 7 octobre,
23:16 c'est-à-dire Gaza, avait été libéré de toute occupation.
23:20 Il n'y a plus un Israélien à Gaza depuis 2005.
23:26 Or, c'est ce territoire-là qui a été transformé
23:30 en une immense base de lancement de missiles et de roquettes
23:34 par les terroristes du Java.
23:36 - Les millions de dollars du Qatar véhiculés sous le cadre de l'armée israélienne.
23:38 - C'est la raison pour laquelle...
23:39 - Dites tout, Bernard-Henri. Dites tout.
23:41 - Avec les milliards de dollars de l'aide humanitaire...
23:44 - Transférés grâce au gouvernement israélien sous protection de l'armée israélienne.
23:47 C'est un fait, ça a été vu.
23:49 - Bien sûr, mais que vouliez-vous que fît d'autre le gouvernement israélien,
23:53 quel qu'il soit ?
23:55 On l'aurait accusé de laisser les gazés au bouillon mourir de faim.
23:59 On l'aurait accusé de les empêcher d'accéder à l'eau courante, à l'électricité.
24:05 Bien sûr que dès lors que les Palestiniens ont fait ce choix...
24:09 - Je ne pense pas que ce soit mieux aujourd'hui.
24:10 - Mais dès lors que les Palestiniens de Gaza ont fait ce choix suicidaire
24:15 d'élire le Hamas et de s'y rallier massivement,
24:21 en effet, les voisins n'avaient pas d'autre choix que de faire avec, naturellement.
24:26 - Bernard-Henri Lévy, je voulais vous entendre ce soir sur un point encore,
24:29 cette tribune d'anciens de HEC, l'école de commerce HEC,
24:33 qui dénonce notamment les propos d'un prof de cette école de commerce
24:38 qui a expliqué sur les réseaux sociaux que ce qui s'était passé le 7 octobre
24:43 c'était un soulèvement des colonisés qui parlent d'Israël
24:47 comme d'un État coupable de génocide, d'apartheid.
24:50 Ces anciens d'HEC demandent à la direction de réagir
24:55 en expliquant qu'ils ne veulent pas qu'il y ait des dérives dans les universités françaises
24:58 comme ça a pu être vu aux États-Unis.
25:01 Est-ce que c'est votre crainte aussi ?
25:02 Qu'est-ce que vous demandez ce soir après ces propos-là ?
25:04 - C'est des propos abjects et idiots.
25:08 C'est des propos abjects parce que transformer un pogrom en révolution de colonisés
25:16 c'est une insulte aux colonisés, c'est une insulte aux révolutions
25:20 et c'est une insulte naturellement aux victimes
25:22 et c'est idiot parce qu'il n'y a rien dans cette relation,
25:28 dans cette guerre qui ressemble en quoi que ce soit avec un paradigme colonial.
25:34 Et il faut arrêter avec cette histoire d'Israël état colonisateur,
25:38 il faut arrêter avec cette idée que les Palestiniens participeraient
25:44 d'une lutte anti-impérialiste.
25:46 Tout ça est absurde.
25:48 L'impérialisme d'aujourd'hui, le colonialisme d'aujourd'hui,
25:52 il est incarné à Téhéran, à Moscou, en Chine.
25:58 C'est ça les impérialistes d'aujourd'hui.
26:00 Le minuscule petit Israël, il est impérialiste de quoi ?
26:03 Il est colonisateur de quoi ?
26:05 Quelle était la présence coloniale à Gaza ?
26:09 - Il y a des colons sur le territoire en Cisjordanie.
26:12 - Il y a en effet des colonies ou des implantations selon...
26:16 on peut les appeler des deux manières en Cisjordanie
26:19 mais que je sasse, la Cisjordanie n'a pas été annexée, elle n'est pas colonisée.
26:24 Une immense majorité des Israéliens aujourd'hui, de gauche et de droite.
26:30 Tous ceux et toutes celles qui défilaient avant le 7 octobre
26:34 tous les samedis contre la réforme judiciaire.
26:36 Qu'est-ce qu'ils disent ?
26:37 Ils disent "faites ce que vous voulez de la Cisjordanie,
26:42 créez un État palestinien dès lors qu'il ne servira pas
26:46 de rampe de lancement à des roquettes".
26:48 Donc l'État contre la paix, c'est aujourd'hui le désir
26:53 d'une très grande masse d'Israéliens et probablement la majorité.
26:59 - Pour conclure, vraiment pour conclure...
27:00 - En un mot, il y a un temple juif à Jérusalem depuis des millénaires,
27:03 il n'y avait pas une trace française en Algérie avant que Bujo mette le pied là-bas.
27:07 Donc parler de colonisation pour cette terre d'Israël,
27:09 c'est juste stupide historiquement.
27:11 Ça ne règle en rien la complexité du problème politique et géopolitique
27:15 mais c'est un abus de langage qui évidemment veut retourner la charge
27:19 de la victime contre le bourreau et vice-versa.
27:21 - Pas de libération d'otages avant vendredi,
27:23 c'est ce que dit ce soir le cabinet de sécurité national israélien.
27:25 Merci beaucoup Bernard-Henri Lévy d'avoir été notre invité.
27:28 Merci Ulysse Gosset d'avoir été également avec nous ce soir.