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Grand témoin : Sibyle Veil, PDG de Radio France et autrice de « Au commencement était l'écoute » (L'Observatoire)

GRAND DÉBAT / Loi « bien vieillir » : à la hauteur du défi démographique ?

« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski

Déjà débattue en avril dernier, la proposition de loi pour « bâtir la société du bien vieillir en France » revient à l'Assemblée nationale depuis le lundi 20 novembre. Encore discuté et amendé, ce texte est un prélude à la loi de programmation promise par Aurore Bergé en 2024. Si une vingtaine de mesures sociales sont examinées au palais Bourbon, le coût exact de cette PPL reste à préciser. Le texte prévoit des mesures pour lutter contre l'isolement et la maltraitance. Il a également pour but de favoriser le maintien à domicile des personnes âgées qui le désirent, notamment en facilitant le recours à l'aide sociale d'hébergement (ASH). Il vise aussi à harmoniser les salaires des aides à domicile. Comment la société peut-elle s'adapter au grand âge ?

Invités :
- Laurence Cristol, députée Renaissance de l'Hérault,
- Jérôme Guedj, député PS de l'Essonne,
- Raphaëlle Martin, directrice du pôle « accueil de jour et accompagnement des aidants » au sein de l'association Delta 7,
- Édouard Prono, directeur d'un établissement pour personnes âgées et correspondant régional AD-PA.

GRAND ENTRETIEN / Sibyle Veil : l'écoute plutôt que le clash !

Nous vivons désormais dans ce que Sibyle Veil appelle une « société du défouloir ». Aujourd'hui, plus personne ne s'écoute et tout le monde s'exprime. Au travers ses expériences personnelles et professionnelles, l'autrice aborde l'écoute en évoquant les réseaux sociaux, la nouvelle génération, l'intelligence artificielle, le management, etc. Ce puissant ciment invisible pour la société est également un gage de transmission entre les générations. L'écoute est-elle l'unique moyen pour vaincre cette société du défouloir ?

Grand témoin : Sibyle Veil, PDG de Radio France et autrice de « Au commencement était l'écoute » (L'Observatoire)

LES AFFRANCHIS

- Richard Werly, correspondant France/Europe à « Blick »,
- Carole Barjon, journaliste à l'Obs,
- « Bourbon express » : Stéphanie Dépierre, journaliste LCP.

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00 *Musique*
00:06 Bonsoir, bienvenue, très heureuse de vous retrouver dans "Ça vous regarde" ce soir.
00:10 Éloge de l'écoute avec la patronne de Radio France.
00:14 Bonsoir, Cybille Veil.
00:15 Bonsoir.
00:16 Et merci d'être notre grand témoin ce soir.
00:18 Au commencement était l'écoute, c'est votre premier essai aux éditions de l'Observatoire.
00:23 L'écoute comme antidote à la fureur des réseaux sociaux et au règne des écrans.
00:29 On va en parler longuement tout à l'heure.
00:31 Vous réagirez également au baromètre annuel sur la confiance des médias.
00:35 Baromètre de nos confrères Lacroix paru aujourd'hui.
00:38 Notre grand débat ce soir, a-t-on les moyens de bien vieillir dans notre pays ?
00:43 L'Assemblée a repris cette semaine l'examen de la proposition de loi de la majorité sur le sujet.
00:49 Est-elle à la hauteur des enjeux du vieillissement de la population ?
00:53 Le défi démographique est immense.
00:55 Mais où sont les moyens ?
00:56 Nous en débattons dans un instant sur ce plateau avec mes invités.
01:00 Enfin, nos affranchis ce soir.
01:02 Le parti Prix politique de Carole Barjon.
01:05 Le regard européen de Richard Verli.
01:07 Et puis Bourbon Express, l'histoire du jour à l'Assemblée signée Stéphanie Despierres.
01:11 Voilà pour le menu. On y va, Sibyle Deuil.
01:13 Savourgarde, c'est parti.
01:16 (Générique)
01:27 C'est un sujet qui mériterait mieux qu'un débat parlementaire main de foi avorté.
01:31 Comment une société doit s'adapter au grand âge ?
01:34 Qu'est-ce que signifie bien vieillir dans notre pays ?
01:37 Alors on est près de deux ans après le scandale Orpea,
01:41 après un début de lecture interrompu en avril
01:44 et revoici donc la proposition de loi de la majorité sur le sujet.
01:48 C'est vous qui en êtes la rapporteure.
01:50 Bonsoir, Laurence Christol.
01:51 Bonsoir.
01:52 Merci d'être là. Vous êtes députée Renaissance de l'Hérault.
01:55 Vous retrouvez votre collègue de l'opposition, Jérôme Gage,
01:58 avec qui vous débattez ce soir et qui ne quitte pas l'hémicycle depuis le début de la semaine.
02:02 Députée socialiste de l'Essonne, spécialiste de ces questions du grand âge.
02:07 Bonsoir, Edouard Prono.
02:08 Bonsoir.
02:09 Bienvenue sur ce plateau.
02:10 Vous êtes directeur d'établissement pour personnes âgées,
02:12 correspondant régional à DPA,
02:14 Association des directeurs des services pour personnes âgées.
02:17 Enfin, bonsoir, Raphaël Martin.
02:19 Bonsoir.
02:20 Bienvenue, directrice du pôle accueil de jour et accompagnement des aidants.
02:24 Ce sont souvent les familles au sein de l'association Delta S
02:27 vous accompagner, notamment les familles qui ont décidé d'héberger chez elles leurs parents dépendants.
02:33 On en parlera, apparemment,
02:35 elles sont de plus en plus nombreuses depuis le Covid.
02:38 Sibyl Veil, c'est un sujet qui nous concerne tous.
02:40 Je n'oublie pas que dans une vie antérieure,
02:42 vous étiez conseillère technique à la Solidarité en 2007.
02:45 Alors n'hésitez pas si vous souhaitez interroger nos invités.
02:48 On commence par planter le décor, comme chaque soir.
02:50 Qu'est-ce qu'il y a dans ce projet de loi ?
02:52 C'est le chrono de Blakow qu'on accueille tout de suite.
02:54 Bonsoir, Stéphane.
02:57 Bonsoir, Myriam.
02:58 Bonsoir à toutes et tous.
03:00 Alors, je vous invite à vous retourner pour la chronique de Stéphane Blakowski.
03:03 Cette loi...
03:04 Je ne vous apprends rien, ni à vous, Myriam, ni aux autres.
03:06 Gouverner, c'est prévoir.
03:07 Or, si le gouvernement est régulièrement confronté à des situations imprévisibles,
03:11 il y a au moins un domaine où on est tout à fait capable de prévoir l'avenir,
03:14 c'est la démographie.
03:16 On sait qu'en 2030, il y aura 30 % de Français qui auront plus de 60 ans.
03:20 Et donc, nécessairement, ça entraîne le fait que le nombre de personnes âgées dépendantes
03:25 est amené à augmenter à l'avenir.
03:28 Donc, évidemment, le président Macron est bien conscient du problème.
03:31 Regardez, il avait déjà promis une loi pour financer la dépendance du grand âge.
03:35 En 2019.
03:37 Bon, cette promesse, il n'a pas pu la tenir, mais qu'à cela ne tienne.
03:40 Deux ans plus tard, il renouvelle la promesse en parlant à nouveau de ce projet de loi sur le grand âge.
03:45 Et puis, la loi passe de nouveau aux oubliettes.
03:47 Ça, c'était le premier quinquennat.
03:49 Mais pour se faire réélire, Emmanuel Macron s'était engagé à recruter 50 000 infirmiers,
03:56 surtout des aides-soignantes, d'ailleurs, pendant 5 ans.
03:59 Donc, ça veut dire 10 000 par an.
04:00 Et pour cette première année 2023, seulement 3 000 postes ont été créés.
04:05 Donc, on s'interroge.
04:07 Comment sait-il qu'un problème aussi clairement identifié et aussi important ne soit pas la priorité ?
04:14 Donc, la question est posée par Léa Salamé à Aurore Berger.
04:17 J'essaie de comprendre comment un sujet aussi brûlant passe en dessous de la pile.
04:22 Si on est un peu lucide, il est passé un peu en dessous de la pile de beaucoup de gens,
04:25 y compris même médiatiquement.
04:27 Il y a une forme peut-être de déni individuel face à notre propre vieillissement,
04:31 de déni collectif parce que c'est extrêmement violent et brutal de voir vieillir ceux qu'on aime,
04:35 de voir vieillir ses proches.
04:37 Et donc, finalement, on l'a assez peu traité.
04:39 Cela dit, les choses commencent à bouger.
04:41 Puisque, vous le disiez, on examine cette semaine à l'Assemblée une proposition de la majorité sur le bien vieillir.
04:48 Le texte comprend d'assez nombreuses mesures, notamment pour lutter contre la maltraitance et l'isolement des personnes âgées.
04:55 Pour la maltraitance, par exemple, un dispositif va être mis en place de manière à faire mieux remonter plus rapidement les alertes ou les signalements.
05:02 Pour ce qui est de l'isolement, il y a la création de deux nouveaux organismes.
05:06 Une conférence nationale de l'autonomie, c'est pour évaluer la situation.
05:11 Et puis, par ailleurs, un autre organisme, le Centre national de preuve de prévention de la perte d'autonomie et de ressources géorontologiques.
05:17 Et ça, c'est pour pointer les innovations, essayer de trouver des innovations.
05:21 Alors, je ne veux pas du tout présager de l'efficacité de ces deux organismes, mais ça donne le sentiment d'une réponse un peu technocratique.
05:27 Alors qu'on sait bien que le problème de fond, c'est de trouver un financement.
05:31 Le gouvernement a commandé un rapport en 2019 qui disait qu'il faudra 10 milliards de plus d'ici 2030.
05:37 Ce qui fait que quand Aurore Berger, cette semaine, dit "le gouvernement apporte 100 millions supplémentaires pour les auxiliaires de vie",
05:45 François Ruffin sort sa calculette et dit "le compte n'y est pas, on l'écoute".
05:50 Vous ne pouvez pas dire "100 millions" comme ça en insistant sur "millions", en disant que c'est une vraie avancée, en disant que c'est un signal très fort.
06:00 100 millions, 500 000 auxiliaires de vie = 200 euros = moins de 20 euros par mois, 16 euros par mois à peu près.
06:08 Voilà ce que vous proposez aujourd'hui.
06:10 Bref, ce que tout le monde attend, c'est donc cette fameuse loi de programmation promise depuis si longtemps,
06:15 sur plusieurs années, pour se donner enfin les moyens d'affronter la question de l'indépendance des personnes âgées.
06:20 Bonne nouvelle, Aurore Berger s'est engagée, elle a promis que cette loi de programmation, elle serait votée, en tout cas examinée l'année prochaine.
06:30 Alors bon, il y a eu tant de promesses que forcément on reste un peu prudent, mais si vous avez des solutions, des bonnes idées, il faut en parler ce soir.
06:37 Alors on commence avec vous, Laurence Christol.
06:39 Déjà, sur le calendrier, ça a été reporté, ça a été avorté, on niait.
06:44 Mais en fait, le gros du gros, c'est encore dans un an avec cette loi grantage.
06:49 Qu'est-ce que vous dites à tous les professionnels qui vous disent "tout ça est insuffisant" ? Attendez encore ?
06:55 Non, pas du tout. Nous, dès le début du mandat, on a été plusieurs députés de la majorité à s'investir dans ce projet de loi,
07:02 et cette proposition de loi, et je suis très heureuse aujourd'hui parce qu'en fait on a eu des avancées significatives.
07:07 Certes, au printemps, lorsque nous l'avions déposée, nous avions beaucoup d'opposition et beaucoup de remarques sur le fait qu'elle n'était pas à la hauteur.
07:15 Au point que votre collègue de la majorité, c'était madame Imora à l'époque, claque la porte et dit "j'arrête, j'arrête le job, c'est pas à la hauteur".
07:23 Aujourd'hui, cette proposition de loi qui faisait 14 articles en fait 49, on a accepté, on a mis en avant beaucoup d'amendements de tous bords,
07:31 que ce soit du gouvernement, de notre groupe parlementaire, mais également des oppositions.
07:36 On se retrouve avec une proposition de loi qui comprend trois grands axes, donc la prévention de la perte d'autonomie,
07:42 afin de pouvoir anticiper justement sur cette transition démographique dont vous parliez,
07:47 et qui est qu'aujourd'hui nous devons nous préparer à avoir une société de demain qui sera différente de celle d'aujourd'hui,
07:52 avec plus de personnes de 65 ans et plus que de moins de 15 ans. C'est une transition démographique.
07:58 - Ah oui, ça c'est sûr. On n'est pas du tout que sur les Ehpad, aujourd'hui c'est 700 000 personnes et on est près de 20 millions de personnes de plus de 60 ans dans le pays.
08:07 - Mais totalement, c'est une préoccupation sociétale. Deuxièmement, la maltraitance, effectivement après le scandale européen,
08:13 la deuxième partie comprend effectivement tout un volet sur la prévention de la lutte contre la maltraitance,
08:18 et le troisième, le virage domiciliaire, c'est-à-dire ouvrir des perspectives justement à une avancée en âge avec un choix domiciliaire qui nous soit propre.
08:27 - Donc pour ça il faut aussi du personnel, des auxiliaires de vie, des aides à domicile.
08:32 Alors vous, vous avez beaucoup bataillé, vous êtes un député dit médiatique, Jérôme Gage, et on vous entend beaucoup sur le sujet.
08:38 C'est quand même pas rien, ça y est, enfin, c'est peut-être un peu tard, mais enfin le gouvernement s'engage. C'est une victoire pour vous ?
08:45 Il s'engage pour 2024 avec des financements à la carte.
08:48 - Je ne boute pas mon plaisir en entendant la Première Ministre cet après-midi fixer enfin un calendrier 2024.
08:55 Alors en même temps, chat et chaudé, crin l'eau froide.
08:57 Christophe Bieloski a rappelé 2019-2021, Edouard Philippe disait, j'aime beaucoup Edouard Philippe, mais là il disait "ce sera le grand marqueur social du quinquennat".
09:07 Bon, tout ça s'est fracassé, bien sûr il y a eu la crise Covid, mais c'est toujours, les vieux, ça passe toujours derrière.
09:13 Et pour être tout à fait objectif, cette malédiction procrastinatrice, et bien c'est pas propre à Emmanuel Macron.
09:20 Ses deux présidents prédécesseurs avaient aussi promis des réformes.
09:23 Sauf que plus on avance, plus les baby-boomers, parce que c'est d'eux dont on parle, arrivent aux âges des fragilités.
09:30 - Alors qu'est-ce qu'il y a de bien déjà dans cette proposition de loi ?
09:33 - Alors attendez, parce qu'en fait, vous voyez, là il y a plusieurs briques qui se mettent en place.
09:36 Pareil, mes collègues députés Renaissance, qui en avaient à peu près autant marre que moi de ne pas voir venir les choses, décident de déposer une proposition de loi.
09:44 Une proposition de loi, ça ne peut pas appréhender tous les sujets, c'est les règles de la Ve République.
09:49 Il y a des articles sympathiques, utiles, qui vont dans le bon sens, mais qui ne répondent pas aux défis principaux.
09:56 Les défis principaux, c'est les moyens pour avoir plus de personnel humain pour accompagner dans les EHPAD, mais aussi dans les services à domicile.
10:04 Des moyens pour baisser le reste à charge des familles, ce qui est payé dans les maisons de retraite.
10:09 Mais au-delà de la question de la dépendance, des moyens pour adapter la société au vieillissement.
10:13 Parce que, vous voyez, la transition démographique, je reprends cette expression, c'est comme la transition écologique.
10:18 Il y a des gens qui pensent que ce n'est pas un problème. Vous vous rappelez Jacques Chirac qui disait "la maison brûle et on regarde ailleurs".
10:23 Moi, aujourd'hui, avec d'autres, je dis "la maison vieillit et on regarde ailleurs", alors que c'est totalement prévisible.
10:27 Et ça suppose d'adapter plein de politiques. Les logements, les transports, la place des personnes âgées dans les médias...
10:33 - Alors, justement, il y a eu ce qu'on appelle une stratégie interministérielle.
10:39 - Alors, je vous dis un mot sur ça.
10:41 - Attendez, aménagement des logements, accessibilité des gares, des enceintes sportives, accès à la culture.
10:47 Ça va dans le bon sens ?
10:49 - Je vous dis un mot. J'applaudis la loi pour 2024. Je trouve que ça va dans le bon sens, cette PPL, cette proposition de loi.
10:57 La stratégie qu'a présentée Aurore Berger vendredi dernier, c'est une opération de communication qui met des bullet points.
11:04 On va adapter les logements, on va ouvrir les EHPAD sur leur extérieur, mais une stratégie, ça suppose des fiches opérationnelles, des moyens, etc.
11:13 Donc la vraie stratégie, ce sera la loi de programmation grand âge.
11:17 Pour cela, il faudra traiter la question qui fâche. Il y a deux questions qui sont importantes.
11:23 D'abord, écouter la place des personnes âgées elles-mêmes. On ne peut pas définir une politique...
11:27 Ce week-end, il y avait un truc super, c'était le Contre-salon des vieux, organisé par le Conseil national autoproclamé de la vieillesse.
11:34 C'est les 68ards, pour faire simple, autour d'Ariane Nouchkine...
11:37 - Les boomers.
11:38 - Les boomers qui ont dit "nous, on est la génération qui a révolutionné le regard de la société sur la jeunesse".
11:43 C'était mai 68 et on se rend compte qu'on va avoir besoin de révolutionner le regard de la société sur la vieillesse.
11:49 On ne veut pas être mis dans un coin, on ne veut pas être invisibilisé, on veut que notre parole compte.
11:53 Leur slogan, c'est "rien sans les vieux pour les vieux".
11:55 Donc ça, c'est le premier enjeu. Et puis le deuxième, il faut dégager des financements.
11:59 Ça a été très bien dit tout à l'heure. Et ça, c'est un choix de société.
12:02 Il faut qu'il ait lieu, c'est pour ça qu'en préparant la loi, il faut qu'on ait une conférence du financement.
12:06 C'est affreusement techno, mais où est-ce qu'on prend ? Est-ce qu'on augmente les impôts ?
12:09 - Attendez, vous parlez beaucoup, là. On va y venir, on sait que vous êtes habité par le sujet.
12:15 Où on trouve l'argent ? On connaît l'ampleur de nos déficits.
12:18 Edouard Prono, vous travaillez dans les EHPAD, donc il y a Orpea, on a tout ça en mémoire.
12:24 La lutte contre la maltraitance, c'est un des objectifs de ce texte.
12:28 Qu'est-ce qui s'est passé, tiens, depuis deux ans ?
12:31 On a parlé de contrôle du gouvernement, plus nombreux. Est-ce que vous les avez vus sur le terrain ?
12:36 Est-ce que vous avez mieux rémunéré vos personnels aussi, pour éviter la difficulté au quotidien de voir partir ces gens-là ?
12:44 - Les deux à la fois. À la fois, effectivement, mieux rémunérer le personnel avec tout ce qui est de l'ordre du Ségur,
12:49 mais qui n'est pas équitablement réparti à la fois sur le privé et le public.
12:54 Les fonds qui ont été versés pour le personnel, il faut qu'ils soient vraiment à l'ensemble du secteur aussi,
13:00 puisque ça nous fait, entre guillemets, en nous mettant en concurrence déloyale,
13:04 et quand on voit le défi démographique... - Le privé a été pénalisé, c'est ça ?
13:08 - Après, dans le cadre de l'établissement public que je dirige, et dont la DEPA représente,
13:16 c'est vrai que la maltraitance, depuis deux ans et demi, en tant que directeur, on a toujours en tête cette thématique-là.
13:26 En tant que directeur, il faut savoir qu'en tant qu'institution, on fait une mécanique pour la maltraitance,
13:32 les protections, les biscuits, les repas insipides...
13:37 - Est-ce que tout ça, c'est fini ?
13:40 - Oui, mais c'est ce qu'on disait quand on lisait le livre de Christophe Cassel et je parle d'Orpéa.
13:44 - Oui, c'est ça. C'est peut-être que le secteur a été injustement versé avec tous ces excès qui ont dû être dénoncés
13:52 et qui devaient être dénoncés. Après, maintenant, les repas, tout ce qui est protection, c'est vrai qu'on y accorde
14:01 beaucoup d'importance pour le bien-être de la personne, c'est évident.
14:05 - Et les contrôles ?
14:07 - Effectivement, il y en a pour l'île de France, la région où je suis correspondant régional.
14:13 La directrice de l'ARS a déclaré en deux ans que l'ensemble des contrôles seront faits.
14:18 Plusieurs collègues me disent soit contrôles sur pièces ou soit ils se rendent sur les épades.
14:24 Mais on sent bien qu'en face, il faut nous mettre également les moyens de pouvoir fonctionner.
14:29 - On va en parler tout de suite des moyens, puisque c'est le nerf de la guerre dans ce dossier.
14:33 Je voulais qu'on dise un petit mot avant de vous donner la parole, Raphaël Martin,
14:38 sur le changement sociétal que vous appelez de vos vœux, le regard sur les vieux qui change.
14:43 C'est un reportage qui a été tourné à Douai, dans une structure qui propose une sorte de colocation pour personnes âgées.
14:49 Regardez ce que ça donne, on en parle juste après.
14:52 - Quand les mamies font de la colocation, le jeu de société, c'est une affaire sérieuse.
15:06 - On peut le mettre comme ça ?
15:09 - Eh oui, c'est parfait.
15:11 - Il faut qu'on fasse bien attention quand même.
15:14 - Et pour se détendre un peu quand il n'y a pas trop de temps, on joue au dada, aux chevaux.
15:21 Nicole, Josiane et Janina vivent ensemble dans cette grande demeure de Douai,
15:27 sous l'œil attentif de Dolorès, la responsable de maison.
15:31 - J'ai appris qu'hier soir, vous étiez couchée tard.
15:34 - Oui.
15:35 - Bon, c'était un beau film apparemment.
15:37 - C'était un beau film.
15:38 - Vous avez le droit de faire ce que vous souhaitez.
15:41 Si tous les soirs, vous voulez veiller, vous avez le droit.
15:43 Et vous préférez regarder la télé en bas ou dans votre chambre alors ?
15:46 - En bas.
15:47 - En bas, pourquoi ?
15:49 - Pour ne pas être seule.
15:52 - Pour ne pas être seule, ouais.
15:54 Parce qu'en bas, le soir, on port une tisane, on discute, on refait le monde.
15:58 Quand il n'y a rien à la télé, on parle.
16:01 Dolorès et trois auxiliaires de vie se relaient ici pour assurer une présence permanente
16:06 et organiser les activités.
16:08 Les colocataires partagent le salon, la cuisine et le jardin.
16:12 - Je trouve qu'on est bien ici.
16:14 - Vous vous sentez chez vous ?
16:16 - Oui.
16:17 On peut discuter ensemble et tout ça.
16:20 On ne dispute pas.
16:22 Aux étages, chacun sa chambre.
16:26 Janina, 98 ans, doyenne de la maison, nous ouvre les portes de son petit royaume.
16:32 - Ma table, une lampe pour m'éclairer, pour lire,
16:37 une petite bouloir pour faire ma tisane le soir.
16:41 Là, c'est pour le petit bébé.
16:44 Oui, oui, pour mon arrière-petite-fille.
16:46 Mais surtout, beaucoup d'amour pour toujours.
16:50 - Oh, c'est beau !
16:52 - À l'abri des regards dans sa chambre, Janina aime aussi s'adonner à sa grande passion de toujours, le tiercer.
16:59 - Il s'affiche d'une louable régularité, mais moi, je regarde la fin.
17:04 Il garde son mot à dire.
17:06 Alors, qu'est-ce que je vais mettre ? Un point d'interrogation.
17:10 - La maison de Janina et ses complices comptent 10 chambres.
17:14 Il reste donc de la place, et pourquoi pas, pour un homme.
17:19 - Raphaël Martin, on voit que ça peut être une solution,
17:23 mais en discutant avec Clément Perrault, le reporter qui s'est rendu à Douai pour tourner dans cette structure,
17:30 il explique que le restage-charge, si on enlève toutes les aides, s'élève à plus de 2 000 euros par mois.
17:36 - Il faut se le permettre. Tout le monde ne peut pas.
17:38 - Exactement, tout le monde n'a pas les moyens de se le permettre.
17:40 Et puis, en plus, quand on perd en autonomie dans ce type de résidence,
17:43 il y a des frais supplémentaires pour être aidé au quotidien.
17:46 Donc, c'est une solution, mais ce n'est pas non plus la solution.
17:48 - Sur les aides, contrairement, vous vous accompagnez les aidants.
17:52 Est-ce que c'est simple de savoir à quoi ont droit les personnes aujourd'hui ?
17:55 - Alors, c'est un vrai parcours du combattant, ça, c'est sûr.
17:57 Les aidants doivent être informés, être orientés sur tous les dispositifs existants.
18:01 On a la chance en France d'avoir quand même pas mal d'aides financières qui existent.
18:06 Encore faut-il y avoir droit, encore faut-il oser les demander aussi,
18:09 parce que beaucoup ne les demandent pas par ignorance de leur existence.
18:13 Et puis ensuite, ces aides ne couvrent malheureusement pas toutes les dépenses,
18:17 les dépenses qui augmentent, et donc il y a encore des choses à faire à ce niveau-là.
18:22 - Si bien que certaines familles décident de garder ou d'accueillir, plutôt,
18:27 chez elles, un certain nombre de personnes âgées.
18:29 Est-ce que c'est un phénomène que vous voyez ?
18:31 - Oui, alors, ce n'est pas un phénomène nouveau,
18:33 parce qu'il y a déjà tout d'abord une dimension culturelle
18:35 qui peut être très importante chez certains aidants
18:37 qui n'imaginent pas confier leur proche et qui se font un "devoir" de l'accueillir chez eux,
18:41 parce que c'est leurs parents, donc ils veulent aussi leur rendre
18:44 ce qu'ils ont pu recevoir quand ils étaient plus jeunes.
18:47 Ensuite, pendant le Covid, on a constaté que beaucoup d'aidants
18:50 soit s'installaient chez leurs proches, soit accueillaient leurs proches chez eux.
18:53 Et cela s'est amplifié avec la possibilité de télétravail,
18:57 ce qui fait qu'aujourd'hui, beaucoup d'aidants continuent de travailler,
19:00 concilient vie professionnelle et rôle d'aidant grâce au télétravail.
19:04 Mais ça implique une organisation...
19:06 - Ah oui, non, mais c'est zéro répit, parce que souvent, c'est des personnes,
19:09 souvent des femmes, d'ailleurs, j'ai vu un reportage,
19:12 qui ont à leur charge leurs ados, leurs grands ados,
19:15 et leurs parents ou un parent.
19:17 - Cette fameuse génération sandwich, exactement.
19:19 Et effectivement, il y a zéro répit, puisqu'on n'a plus son espace à soi,
19:22 on accueille son proche chez soi,
19:24 donc on n'a plus son espace où déposer ses émotions,
19:27 on n'a plus son espace où pouvoir souffler un peu.
19:29 - Et puis, il faut avoir un grand logement.
19:31 - Et puis, il faut avoir l'espace.
19:33 Effectivement, nous, on accompagne plus de 1300 aidants par an,
19:36 on a peut-être des témoignages d'aidants qui ont pris leurs parents chez eux
19:39 alors qu'ils vivaient dans un studio.
19:41 En plus, vous rajoutez l'intervention d'auxiliaires de vie,
19:43 d'infirmières à domicile, ça devient extrêmement compliqué,
19:46 extrêmement anxiogène, parfois une cocotte minute.
19:49 Les dantes qu'on accompagnait avaient vraiment besoin
19:52 de son sas de décompression auprès de nos professionnels.
19:55 Dans d'autres situations, ce sont des parents
19:57 qui ont laissé leur chambre pour que les enfants
20:00 continuent leur scolarité.
20:02 - Et qui ne peuvent plus parfois travailler à plein temps.
20:04 - Alors, ça, c'est une autre question.
20:06 Parce qu'effectivement, il existe des congés de proches aidants,
20:08 mais qui sont encore limités dans le temps
20:10 et qui sont insuffisamment rémunérés pour beaucoup d'aidants.
20:13 - Et ces solutions, pour bien comprendre, c'est plus économique ?
20:16 Même si c'est un peu cynique comme question, mais ça compte ?
20:18 - C'est sûr que l'économique a son mot à dire là-dedans, ça c'est sûr.
20:22 - La société, elle prend un peu le relais d'un grand manque de moyens.
20:26 Est-ce que c'est bien, ce genre de solutions-là ?
20:29 Est-ce qu'il faut les mettre en amont ?
20:31 - Pour l'accompagnement des personnes âgées,
20:33 il faut remercier indépendamment les solidarités familiales,
20:35 et fort heureusement.
20:37 Mais elles ont besoin d'être prolongées, amplifiées,
20:39 par la solidarité nationale, pour la simple raison,
20:41 c'est que quand vous avez une personne en perte d'autonomie,
20:44 avec un besoin d'accompagnement médicalisé,
20:46 qu'il soit à domicile ou en établissement,
20:48 là, pour le coup, il faut des professionnels.
20:50 On ne va jamais demander aux aidants familiaux
20:52 de faire un change, de poser une perfusion, etc.
20:57 Donc, solidarité familiale, oui, elles ont leur importance,
21:00 mais il ne faut pas oublier qu'il y a aussi des personnes âgées
21:02 qui n'ont pas ou qui n'ont plus de famille.
21:04 Mais il faudra la solidarité nationale.
21:06 Et c'est ça, le grand défi, c'est de voir comment
21:08 ce risque de la perte d'autonomie, on l'intègre
21:10 dans ce à quoi les Français sont très attachés,
21:12 qu'est la logique de la sécurité sociale,
21:14 à chacun selon ses moyens, en fonction de ses besoins.
21:17 Et on n'a pas encore tout à fait franchi...
21:20 Et le refus d'obstacles de tous les gouvernements,
21:22 c'est évidemment que ça va nécessiter
21:25 de mobiliser des financements,
21:27 et pour ça, il faut qu'il y ait un rapport de force.
21:29 - On y va sur les financements, mais peut-être
21:31 sur le regard, est-ce qu'il change ?
21:33 Vous le voyez changer, vous ?
21:35 - Nous, on le voit changer, et surtout,
21:37 le terme d'invisibilisation, je crois qu'il était
21:39 très intéressant, là, tout à l'heure, dans le reportage,
21:41 on voyait ces femmes, on entendait leur voix,
21:43 et c'est des voix qu'on entend trop peu.
21:45 Et ça, c'est quelque chose qui est important.
21:47 On a fait une consultation, lors de la dernière élection
21:49 présidentielle, qui s'appelait "Ma France"
21:51 avec France Bleu, sur les préoccupations des Français.
21:53 Et alors que tous les médias traitaient
21:55 des sujets de sécurité,
21:57 d'hiver, d'économie,
21:59 le sujet qui était remonté en premier,
22:01 et qui s'est amplifié au moment, évidemment,
22:03 où il y a eu le scandale d'Orpéa,
22:05 ça a été l'aide
22:07 et les personnes âgées,
22:09 comment est-ce que, dans une famille,
22:11 on les porte,
22:13 la problématique des aidants et des aînés.
22:15 Donc c'est un sujet qui est très peu traité,
22:17 mais qui, en réalité, est une préoccupation
22:19 qu'on voit beaucoup monter, et qu'il faut
22:21 leur donner la parole, il faut les faire connaître,
22:23 les faire voir, et on a fait une collection
22:25 de podcasts qui s'appelle "Essentiel",
22:27 qui a donné la parole notamment à une auxiliaire
22:29 de santé. C'est des voix qu'on entend très peu,
22:31 et quand on entend la difficulté
22:33 de leur métier, c'est assez rare
22:35 de l'entendre, ça s'appelle "Essentiel",
22:37 et cette femme racontait la difficulté,
22:39 ils ont très peu de temps, ils ont pas le temps
22:41 d'écouter, d'être à l'écoute de ces personnes-là,
22:43 donc ils font que des soins, très rapides.
22:45 - Vous disiez tout à l'heure, hors antenne,
22:47 c'était cash, allez-y, parce que je trouve que c'est très fort.
22:49 - Elle a dit quelque chose d'ailleurs qui était très fort,
22:51 elle disait "en fait, on a 16 toilettes à faire,
22:53 on a très peu de temps, et la seule chose qu'on fait,
22:55 c'est VMC". Est-ce que vous savez ce que c'est,
22:57 VMC ? C'est visage,
22:59 main, cul. C'est-à-dire qu'on n'a pas le temps
23:01 de faire plus. Donc quand on a le temps de faire que ça,
23:03 on n'a pas le temps de prêter l'attention à la personne.
23:05 Et je pense que ça, c'est l'un des défis.
23:07 - Alors, on est au cœur du sujet. On y va.
23:09 Laurence Christol, il y a un
23:11 énorme problème d'aide
23:13 à domicile, il y a un manque de bras,
23:15 aussi bien d'ailleurs dans les
23:17 EHPAD que en ambulatoire
23:19 chez les personnes.
23:21 Les auxiliaires de vie, plus personne ne veut faire
23:23 ce travail-là. Mal rémunéré,
23:25 peu reconnu, beaucoup
23:27 de transports, qu'est-ce qu'on fait ?
23:29 - Déjà, moi, ce qui m'a
23:31 beaucoup interpellée dans votre
23:33 prise de parole, c'est effectivement ce regard
23:35 de la société qu'on a sur l'avancée en âge.
23:37 Et c'est vrai qu'aujourd'hui,
23:39 tous les métiers autour
23:41 de la personne âgée sont
23:43 en souffrance. En souffrance parce que ce sont...
23:45 C'est pas une question financière, on est bien d'accord,
23:47 Jérôme. On a,
23:49 et on a, grâce à la Première ministre
23:51 qui aura embergé cette loi de programmation
23:53 qui arrive. Donc, on va donner les moyens.
23:55 - Des milliards à trouver d'ici 2030.
23:57 - Oui, mais il faut que toute la société change
23:59 son regard. Tout à l'heure,
24:01 on parlait des "biboum-boum",
24:03 oui, ces hommes et ces femmes,
24:05 aujourd'hui, ce sont
24:07 ceux qui ont vécu mes 68.
24:09 Dans leur tête, moi qui suis
24:11 médecin, quand je leur parle à mes patients,
24:13 je ne regarde jamais leur âge chronologique,
24:15 c'est leur âge physiologique qui m'intéresse.
24:17 Aujourd'hui, le regard de la société doit changer
24:19 et je pense que ce congrès, ce week-end,
24:21 a pu peut-être faire avancer les choses
24:23 et la façon dont vous en parlez aussi
24:25 est effectivement importante parce que
24:27 ce que vous dites sur la VMC, c'est terrifiant.
24:29 Moi, je l'ai vu... - Visage vaincu,
24:31 je le répète, pour ceux qui prennent l'antenne en cours d'Europe.
24:33 - Le 17 mars, c'est la première journée
24:35 des aides à domicile et moi,
24:37 j'avais reçu à ma permanence
24:39 les associations et les aides
24:41 à domicile et elles ont exprimé
24:43 toute leur inquiétude,
24:45 toute leur difficulté.
24:47 - Il y a eu déjà beaucoup de propositions.
24:49 François Ruffin et M. Bonnel,
24:51 qui est de la majorité, Bruno Hedel,
24:53 ont travaillé sur le sujet.
24:55 Ce sont des horaires fractionnés.
24:57 Comment on fait ?
24:59 Est-ce qu'on rémunère le trajet ?
25:01 Est-ce qu'on fait un statut ?
25:03 Comment on fait pour que, enfin,
25:05 ce métier-là soit valorisé et pour qu'on arrive
25:07 à embaucher, tout simplement, à rendre attractif
25:09 ce travail-là ? Jérôme Gage.
25:11 - Hier, sur un autre plateau télé,
25:13 mon ami Luc Broussier a eu cette jolie formule,
25:15 il dit que tant qu'une influenceuse
25:17 qui vit à Dubaï sera plus reconnue
25:19 et valorisée qu'une aide-soignante
25:21 à Mont-de-Marsan, la société tournera
25:23 à l'envers. Ces métiers, c'est les premières
25:25 lignes, c'est des vrais métiers d'utilité
25:27 sociale.
25:29 Or, vous l'avez dit, leur statut,
25:31 les conditions de travail ne sont pas adaptées.
25:33 C'est le Moyen Âge, notamment parce que c'est
25:35 un des rares métiers pour lesquels il y a une tarification
25:37 à l'heure qui subsiste. Donc moi, je me félicite
25:39 qu'on commence à mettre un gros coup
25:41 de canive dans ce principe pour les salariés
25:43 à temps plein. - Alors, Aurore Berger,
25:45 donc, veut expérimenter dans les départements pilotes
25:47 une tarification forfaitaire.
25:49 - La dotation globale ou la dotation forfaitaire.
25:51 C'est-à-dire qu'on n'est plus sur une tarification
25:53 à l'heure, ce qui fait qu'elle est même surveillée
25:55 à la minute, quand une aide à domicile arrive
25:57 pour faire... Il peut même y avoir des
25:59 interventions de 15 ou de 30 minutes.
26:01 Il n'y a pas de lien social dans ces conditions.
26:03 Il n'y a pas le temps. Voilà. La personne
26:05 âgée, c'est le temps de la lenteur, c'est le temps de l'écoute,
26:07 c'est le temps de l'empathie.
26:09 Et si vous êtes minuté parce que vous avez de la télégestion,
26:11 un système où vous arrivez, vous décrochez le téléphone,
26:13 vous faites un numéro pour dire "je suis arrivé
26:15 à 12h43" et quand vous repartez,
26:17 vous faites la même chose.
26:19 On marche sur la tête. On industrialise
26:21 ce qui est de la pâte humaine et ce qui est du lien
26:23 direct.
26:25 Voilà. Donc ça, il faut renverser la table,
26:27 mais encore une fois, tout ça ne pourra
26:29 pas se faire à moyen constant. Je ne veux pas
26:31 à nouveau tendre la perche, mais c'est le choix
26:33 de société qu'on doit organiser
26:35 pour se dire,
26:37 eh bien, les postes qui sont à créer,
26:39 leur reconnaissance, leur valorisation.
26:41 - Ce qui est bien avec la ministre Remberger, c'est qu'elle dit
26:43 "cette loi Grand âge, c'est la société qui va la faire".
26:45 On va la co-construire avec
26:47 les parlementaires, les représentants de la nation,
26:49 mais aussi avec les personnes âgées
26:51 elles-mêmes, avec les professionnels.
26:53 Qu'est-ce que vous attendez et quelles ressources
26:55 vous pourriez trouver, puisque
26:57 c'est ça qu'il faut trouver aujourd'hui,
26:59 c'est des moyens.
27:01 - En tout cas, moi je confirme effectivement que vous évoquiez
27:03 la souffrance des personnels. Vous évoquiez
27:05 ce week-end un congrès sur Paris,
27:07 il y en avait un même lundi-mardi
27:09 dans l'Hérault à Montpellier,
27:11 l'ADPA, et effectivement,
27:13 il était évoqué les mêmes choses, la souffrance
27:15 à tous les nouveaux, y compris les personnels de direction
27:17 que je représente ici. - Qui doit payer
27:19 pour cette grande réforme-là ? Est-ce que ce sont les retraités,
27:21 les personnes âgées elles-mêmes, ou est-ce que c'est
27:23 toute la nation, la solidarité ? - C'est un choix
27:25 de société, et on est bien d'accord qu'il y a quelque chose
27:27 de civilisationnel là-dedans, il y a quelque chose
27:29 de prendre soin des plus faibles, des plus
27:31 fragiles, des personnes âgées.
27:33 Il y a quelque chose qui doit être effectivement
27:35 peut-être décidé ensemble, mais
27:37 ça ne veut pas évacuer également
27:39 le problème du financement, ça c'est certain.
27:41 Il y a quelque chose à voir là-dedans. En tant que professionnel,
27:43 par contre, c'est peut-être une simplification,
27:45 c'est vrai que, voilà,
27:47 ma dernière réunion au niveau régional,
27:49 beaucoup de personnes, beaucoup de directeurs
27:51 du domicile étaient présents,
27:53 et je les sentais un peu à bout.
27:55 - Au bout du relot, oui. - Un peu ça,
27:57 où là, je sais pas si la loi du bien-vieillir
27:59 va vraiment répondre aux objectifs,
28:01 ou en tout cas, les objectifs
28:03 très concrets qu'ils ont,
28:05 et la complexité entre, effectivement,
28:07 du tarif horaire, du forfait,
28:09 du tarif à l'acte, peut-être une
28:11 simplification très certaine serait heureuse
28:13 au niveau de l'aide à domicile. - Je me demande qui a pu inventer
28:15 un tel système que vous décriviez à la minute.
28:17 Laurence Christolle, il y a pas mal de propositions
28:19 parce qu'il a déjà, Jérôme Ghel,
28:21 comme il a beaucoup parlé, je vais prendre ses propositions,
28:23 vous nous dites si c'est possible.
28:25 Augmenter la fiscalité sur les grosses successions,
28:27 limiter les exonérations patronales
28:29 accordées aux personnes âgées
28:31 qui emploient une personne à domicile,
28:33 diviser par deux l'actuel
28:35 crédit d'impôt employeur.
28:37 Vous dîtes quoi ? Ce sont des bonnes pistes ou pas ?
28:39 - Mais toutes les pistes sont intéressantes,
28:41 le problème n'est pas là. On va faire justement
28:43 une loi qui va mettre tout le monde autour de la table,
28:45 vous venez de le dire à l'instant,
28:47 on peut pas, nous, seuls, parlementaires,
28:49 décider. On a des pistes, il faudra...
28:51 - Mais lesquelles sont les vôtres ?
28:53 - Moi, aujourd'hui, je veux que tout le monde soit
28:55 sur la table pour vraiment
28:57 décider. C'est un problème sociétal. Ceux que je disais
28:59 en préambule,
29:01 aujourd'hui, ça concerne tout un chacun.
29:03 Je pense que toute la nation doit
29:05 prendre part au fait que nous avançons
29:07 en âge et que nous devons avoir une solidarité
29:09 entre les générations. Je voudrais revenir sur ce que
29:11 vous avez dit il y a
29:13 quelques minutes sur le fait que,
29:15 et vous l'avez également exprimé, madame,
29:17 que les personnes étaient perdues.
29:19 Les aidants familiaux, les personnes âgées,
29:21 aujourd'hui, dans cette proposition de loi,
29:23 nous instaurons un guichet unique, ce fameux
29:25 guichet unique qui va permettre, par
29:27 exemple, à notre département d'avoir
29:29 un lieu unique où on pourra se renseigner,
29:31 avoir les pistes qui permettront
29:33 de pouvoir prendre en charge notre
29:35 personne, nos parents,
29:37 et pouvoir aussi avoir
29:39 une coordination des actions.
29:41 Nous avons aussi la prévention de la perte
29:43 d'autonomie, parce que ça, c'est important,
29:45 aujourd'hui. Je pense vraiment qu'on est
29:47 à un tournant de notre société. 90 %
29:49 des personnes interrogées
29:51 veulent rester à leur domicile,
29:53 veulent rester autonomes, et en France,
29:55 on a un problème, c'est que nous avançons
29:57 en âge, mais nous ne gardons pas notre
29:59 autonomie, nous n'avons pas une qualité de vie
30:01 qui est au rendez-vous. Nous sommes un pays
30:03 dans lequel il y a énormément de travail à faire.
30:05 Donc, c'est la prévention de la perte d'autonomie,
30:07 afin de pouvoir proposer à tout un chacun,
30:09 à vous, à moi, demain,
30:11 de pouvoir faire notre propre choix.
30:13 Nous sommes autonomes, nous avons un parcours
30:15 domiciliaire, nous avons besoin d'aide,
30:17 nous avons des EHPAD qui seront différents,
30:19 qui seront plus médicalisés. Ca aussi,
30:21 ça peut répondre à la crise éthique.
30:23 - On a tous rendez-vous, quelque part,
30:25 dans les mois qui viennent, parce que l'enjeu
30:27 de société est fondamental.
30:29 Raphaël Martin, qu'attendez-vous des pouvoirs
30:31 publics, concrètement, à l'heure de la grande
30:33 consultation et des arbitrages ?
30:35 - Déjà, qu'ils remettent la lumière sur la beauté
30:37 du métier. Je constate,
30:39 mes équipes sont extrêmement engagées,
30:41 extrêmement appliquées. Elles ont beaucoup souffert
30:43 avec le confinement, avec tout le bataille
30:45 médiatique, même si on est que des centres d'accueil
30:47 de jour, en tant qu'institution.
30:49 On a aussi été assez ébranlés.
30:51 C'est un métier qui a du sens,
30:53 qui est source de frustration et de souffrance
30:55 pour nous, professionnels, parce que
30:57 on sait tout ce qui existe sur le papier.
30:59 Quand on en parle aux aidants,
31:01 beaucoup disent "sur le terrain, on n'arrive pas à faire appel
31:03 à des infirmières, à des aides à domicile, etc."
31:05 Mais voilà, c'est vraiment
31:07 mettre les moyens sur la table pour que derrière,
31:09 les aidants ne soient plus obligés
31:11 de faire le change. Tout à l'heure, monsieur Getsch parlait,
31:13 il y a des aidants qui sont obligés de changer leurs parents,
31:15 de changer la protection de leurs proches,
31:17 parce qu'il n'y a plus d'infirmières au domicile.
31:19 - Monsieur Getsch, vous avez des propositions,
31:21 vous avez réfléchi depuis longtemps,
31:23 le levier fiscal, mais est-ce que vous pourriez
31:25 voter ensemble cette future loi de grand âge ?
31:27 - Moi, j'ai toujours considéré que ça pouvait être
31:29 un sujet transpartisan, parce que
31:31 tout le monde est concerné.
31:33 Après, le choix de société, sur les besoins
31:35 auxquels il faut répondre, d'ailleurs, pour alimenter le débat,
31:37 il y a quelques mois, j'ai écrit ma loi de grand âge idéale,
31:39 elle est mise au pot commun
31:41 et on peut l'amender. Après, le choix d'organisation
31:43 du partage des richesses, des crédits
31:45 qu'on mobilise, là, en effet, ce sont des choix politiques.
31:47 Je suis content, on a un cadre dans lequel
31:49 on va avoir ces choix, mais on peut avoir
31:51 des gros désaccords, par exemple, une des propositions,
31:53 c'est, est-ce qu'il faut de nouveau un jour
31:55 férié, voilà, qu'on ferait travailler, comme ça avait été
31:57 fait après la canicule de 2003 ?
31:59 Bon, c'est une proposition sur la table.
32:01 - C'est un super sujet de débat, je vous réjouis.
32:03 - Moi, je préfère qu'on augmente les droits de succession
32:05 sur les plus hautes successions, voilà, je pense
32:07 que c'est une mesure de solidarité qui permet
32:09 de dégager des moyens. - Donc, il y a encore un vrai
32:11 débat sur droite-gauche, sur cette question de la dépendance.
32:13 On s'arrête là, on va l'avoir, ce débat,
32:15 il ne fait que commencer. Je vous remercie beaucoup d'être
32:17 venu sur ce plateau. Vous restez avec moi,
32:19 Sibylle Veil. Dans une dizaine de minutes,
32:21 les partis prides nous affranchis. Ce soir,
32:23 réveillez-vous, Carole Barjon revient
32:25 sur l'injonction présidentielle aux chefs d'entreprise
32:27 face au chômage qui redémarre.
32:29 Comment Georgia Melloni sous-traite
32:31 les migrants en Albanie ?
32:33 Ce sera le billet européen de Richard Verdi.
32:35 Et puis, ce soir, de quoi nous parlez-vous,
32:37 Stéphanie Despierres, dans Bourbon Express ?
32:39 - De députés qui parrainent des otages du Hamas.
32:41 - A tout à l'heure, les amis.
32:43 Mais d'abord, on va plonger dans votre livre,
32:45 Sibylle Veil. Le commencement était
32:47 l'écoute aux éditions de l'Observatoire.
32:49 C'est un essai stimulant.
32:51 Vous disséquez ce que vous nommez
32:53 la société du défouloir,
32:55 sans garde-fou ni pudeur,
32:57 dans laquelle les réseaux sociaux nous ont plongés.
32:59 Revenir à l'écoute,
33:01 regardez, c'est dans "L'Invitation" d'Hélène Bonduelle,
33:03 et on en parle toutes les deux juste après.
33:05 ...
33:09 Si on vous invite, Sibylle Veil,
33:11 c'est parce que chacun fait le constat
33:13 qu'il est de plus en plus difficile
33:15 d'échanger sans violence,
33:17 en particulier sur les réseaux sociaux.
33:19 Asséner, insulter,
33:21 menacer sont la règle.
33:23 Écouter et comprendre, l'exception.
33:25 Cette société du défouloir,
33:27 Sibylle Veil, présidente-directrice générale
33:29 de Radio France,
33:31 depuis 2018,
33:33 vous l'a décortiquée dans votre essai,
33:35 au commencement était l'écoute.
33:37 - Que ce soit la mécanique
33:39 à l'oeuvre sur les réseaux sociaux,
33:41 que ce soit les algorithmes de ces grandes plateformes,
33:43 ils conduisent inexorablement
33:45 à ce que chacun soit dans son couloir de nage,
33:47 et pire encore, qu'il soit dans son bassin,
33:49 et que dans ce bassin dans lequel il est,
33:51 ce qui circule le plus,
33:53 ce sont les contenus qui font le buzz,
33:55 les contenus les plus trash.
33:57 - A travers vos expériences personnelles et professionnelles,
33:59 vous diagnostiquez cette société du défouloir.
34:01 En janvier dernier,
34:03 cela vous vaudra d'ailleurs un échange salé
34:05 avec Cyril Hanouna,
34:07 animateur sur la chaîne C8.
34:09 Suite à l'un de vos tweets,
34:11 l'animateur s'en prend publiquement à vous
34:13 dans son émission.
34:15 - Mon visage est affiché en gros plan
34:17 derrière l'animateur qui exhibe mon prétendu salaire.
34:19 Je me sens un peu
34:21 comme ces bandits dont la tête est mise à prix
34:23 dans les westerns.
34:25 Mon tort, avoir relevé sur Twitter
34:27 la virulence de sa charge sans nuance
34:29 contre l'audiovisuel public
34:31 dans l'émission de la veille.
34:33 - Un débat public dégradé.
34:35 Mais face à cela,
34:37 quel remède ? Face à la colère,
34:39 l'indignation, vous faites une ode
34:41 à l'écoute, la radio comme antidote.
34:43 Et pour cela,
34:45 il faut embarquer la jeunesse.
34:47 Une jeunesse trop souvent confrontée
34:49 aux écrans.
34:51 - Quand tu parles, t'as pas trop le même esthétisme que tes amis.
34:53 - Personne n'a ce bon temps pour les garder.
34:55 - En 5 ans,
34:57 La Maison Ronde a développé
34:59 2 500 podcasts jeunesse.
35:01 Une façon de lutter aussi contre l'écran
35:03 à tout va, ce doudou des temps modernes
35:05 comme vous l'appelez.
35:07 Sibyl Veil, vous érigez vos stations
35:09 en modèle de l'écoute.
35:11 Mais Radio France n'est pas exempte
35:13 des dérapages, comme la mauvaise blague
35:15 de Guillaume Meurice, qui n'a pas
35:17 vraiment plu à vos auditeurs.
35:19 - En ce moment, il y a le déguisement Netanyahou
35:21 qui marche pas mal pour faire peur. Vous voyez qui c'est ?
35:23 Une sorte de nazi, mais sans prépuce.
35:25 - Alors, puisque personne n'est à l'abri,
35:27 Sibyl Veil, nous avons une question.
35:29 Comment Radio France peut-elle
35:31 se prémunir de l'ère du clash ?
35:33 - Réponse, Sibyl Veil.
35:37 - Alors, vous avez là montré
35:39 une polémique, effectivement, qui a
35:41 démarré il y a 3 semaines.
35:43 C'est l'exception
35:45 par rapport à tout ce qui se passe sur nos antennes.
35:47 D'ailleurs, c'est une polémique
35:49 quelque part qui reflète quelque chose
35:51 que j'ai voulu montrer dans le livre,
35:53 qu'on vit de polémiques qui montent sur les réseaux,
35:55 qui sont ensuite développées
35:57 et qui contaminent les médias, retombent dans les réseaux.
35:59 Donc, en fait, au lieu de traiter
36:01 de sujets de fond comme ceux qu'on a vus ce soir,
36:03 on est dans l'ère des polémiques.
36:05 Et sur Radio France, les différentes antennes,
36:07 que ce soit France Inter, France Info,
36:09 France Bleu, France Musique, on essaie au contraire
36:11 de rentrer dans les sujets de fond
36:13 et de pas suivre les polémiques du jour.
36:15 - Ça vous a déçu ? C'est quoi ? C'est un dérapage ?
36:17 Vous l'avez sanctionné.
36:19 Guillaume Meurice a reçu un avertissement.
36:21 D'ailleurs, il était entendu en audition libre aujourd'hui
36:23 par la justice.
36:25 Ça vous a choqué ? Ça vous a ébranlé ?
36:27 Ou au fond, on peut rire de tout,
36:29 mais pas avec n'importe qui ?
36:31 - Je me suis déjà beaucoup exprimé dessus.
36:33 Ça fait trois semaines.
36:35 La polémique est derrière nous.
36:37 On essaie plutôt de tourner la page.
36:39 Il faut savoir que Guillaume Meurice
36:41 et d'autres personnes de l'émission
36:43 reçoivent des menaces de mort,
36:45 ce qui montre à quel point il y a une disproportion.
36:47 C'est la phrase d'un humoriste dans une émission d'humour.
36:49 C'est pas un journal, c'est pas un activité
36:51 qui soit un politique.
36:53 Mais ça a déclenché une polémique,
36:55 des menaces de mort, à tel point qu'aujourd'hui,
36:57 mon rôle, c'est plutôt de protéger.
36:59 - De le protéger.
37:01 Et de protéger Charline Vanhoenacker et l'équipe.
37:03 On va revenir à votre constat,
37:05 avant d'arriver aux solutions,
37:07 parce que c'est aussi un livre optimiste.
37:09 "L'écoute victime de la société du défouloir".
37:11 Est-ce qu'on en est vraiment là, aujourd'hui ?
37:13 Est-ce que notre société est à ce point polarisée
37:15 que plus personne ne s'entend ?
37:17 - Vraiment, dans ce livre,
37:19 j'essaie d'apporter un antidote
37:21 à quelque chose qu'on ressent tous,
37:23 et je pense qu'on ressent tous une sorte de grande fatigue
37:25 face à ce brouhaha permanent,
37:27 que ce soit sur les réseaux,
37:29 sur certains plateaux de télévision,
37:31 dans la rue, dans les violences qu'on peut voir
37:33 dans certaines arènes médiatiques ou politiques.
37:35 Ce que j'ai essayé de nommer
37:37 "société du défouloir",
37:39 c'est quelque chose qui s'incarne
37:41 par des paroles de plus en plus virulentes.
37:43 On n'écoute que ceux qui crient plus fort,
37:45 on entend des injures,
37:47 à la fois pour des vrais sujets,
37:49 mais aussi pour des sujets beaucoup plus dérisoires.
37:51 C'est l'indignation permanente.
37:53 Tous les jours, il y a une cause nouvelle
37:55 sur laquelle on s'indigne,
37:57 sur les réseaux sociaux,
37:59 il faut choisir un camp.
38:01 Pourquoi ? Parce que derrière,
38:03 il y a un fonctionnement de ces réseaux-là.
38:05 - Les fameux algorithmes qui nous enferment
38:07 dans un entre-soi.
38:09 - Qui nous enferment, mais qui conduisent
38:11 à valioriser les propos les plus extrémistes,
38:13 ce qui implique plusieurs actions,
38:15 donc les plus extrêmes.
38:17 - Savoir écouter l'autre.
38:19 Je vous pose la question,
38:21 vous en parlez dans le livre,
38:23 vous êtes fille de psychologue,
38:25 vous avez grandi dans une atmosphère
38:27 particulièrement propice à ça,
38:29 à créer le lien par l'écoute.
38:31 - Vous rappelez, ma mère était psychologue,
38:33 je pense que ça m'a accompagnée
38:35 dans une grande partie de mon enfance,
38:37 de ma vie, puisque j'entendais parler
38:39 de ces gens qui vont voir quelqu'un
38:41 pour être écoutés.
38:43 Ca veut dire qu'il y a des gens
38:45 qui ne peuvent pas tout dire
38:47 ou qui ne se sentent pas suffisamment écoutés.
38:49 C'est vrai que c'est quelque chose
38:51 que dans mon mode de management,
38:53 j'essaie de porter.
38:55 - Ca s'apprend, ça s'enseigne, l'écoute ?
38:57 - Je pense que c'est déjà ce qu'il y a
38:59 de plus républicain, parce que tout le monde
39:01 a la capacité d'écouter, c'est ce qu'il y a
39:03 de plus égalitaire. Contrairement à l'art oratoire
39:05 dans lequel il faut comprendre les codes,
39:07 il faut savoir parler et l'apprendre,
39:09 je pense que l'écoute, ça se développe
39:11 très facilement et qu'il faut davantage
39:13 valoriser les gens qui écoutent.
39:15 Ca, je le fais dans mon mode de management,
39:17 parce que ce sont des gens qui créent du lien,
39:19 là où ceux qui parlent beaucoup sont moins
39:21 dans le lien avec les autres.
39:23 - C'est intéressant, cette question du management par l'écoute.
39:25 On pense aux pays du Nord, aux pays scandinaves,
39:27 aux femmes d'ailleurs, qui ont pu diriger ces pays.
39:29 C'est quoi l'écoute trampoline ?
39:31 - L'écoute trampoline, c'est une expression
39:33 que je cite dans mon livre.
39:35 C'est ce moment où vous avez une discussion
39:37 avec quelqu'un, un peu comme on peut avoir là
39:39 toutes les deux, où je rebondis sur votre phrase
39:41 pour la compléter, et quelque part,
39:43 l'échange qu'on a en s'écoutant l'une et l'autre
39:45 fait qu'on est plus créatifs et qu'on va arriver
39:47 progressivement à finir une solution.
39:49 Moi, j'ai le souvenir de réunions avec mes équipes,
39:51 et je pense que tous ceux qui travaillent
39:53 avec des équipes vivent ça, de réunions où
39:55 il y a une sorte de créativité qui se développe
39:57 parce qu'on est ensemble, qu'on rebondit
39:59 les uns sur les autres, et justement,
40:01 en le faisant, on va plus loin.
40:03 Il y a des grandes idées que j'ai mises en oeuvre
40:05 ces dernières années qui ont été liées
40:07 à des séances comme ça où on discutait,
40:09 et il y a eu une discussion de créativité collective.
40:11 - C'est un sujet aussi très intime pour vous,
40:13 et ça aussi, vous en parlez,
40:15 parce que vous avez eu peur, à un moment,
40:17 pas n'importe lequel, le Covid,
40:19 de ne plus entendre. - C'était une expérience
40:21 assez dure pour moi.
40:23 Très jeune,
40:25 j'avais déjà eu des problèmes
40:27 de... - D'oreille interne.
40:29 - J'avais été opérée pour ça étant très jeune.
40:31 Oui, j'avais sept ans,
40:33 et au moment du Covid,
40:35 j'ai eu une variante qui, en fait,
40:37 a touché mon oreille interne.
40:39 C'est le variant Delta
40:41 qui a touché mon oreille interne,
40:43 et je me souviens, j'ai eu peur de ne plus entendre.
40:45 Je me suis dit, diriger
40:47 une grande maison de radio, qui est un média d'écoute,
40:49 et je suis d'autant plus heureuse,
40:51 d'y être, car c'est un média qui porte cette valeur-là,
40:53 comment je vais faire si je n'entends plus ?
40:55 Je me vois encore donner cette phrase-là
40:57 à mon mari,
40:59 ça m'avait saisi,
41:01 et à ce moment-là, c'est ce dans lequel
41:03 on se rend compte à quel point
41:05 l'écoute, c'est quelque chose
41:07 d'absolument fondamental,
41:09 qui nous construit, qui fait qu'on est ce qu'on est.
41:11 - Alors, les principaux responsables
41:13 du basculement dans cette société du défouloir,
41:15 ce sont les réseaux sociaux. Vous citez
41:17 Pascal Bruckner dans "Le sacre des pantoufles",
41:19 "L'homme affalé dans sa cage sensorielle",
41:21 "Sentiment d'impunité
41:23 qui règne absolument",
41:25 les algorithmes, on en a parlé.
41:27 Vous pourriez être tout à fait contre
41:29 et marquer les esprits dans ce livre en disant
41:31 "Il faut fermer X d'Elon Musk,
41:33 il faut faire
41:35 quelque chose de très fort parce que la démocratie
41:37 est en danger", et c'est pas ce que vous dites.
41:39 Vous n'allez pas jusque-là,
41:41 vous dites la modération avant tout,
41:43 mais pas, on va dire,
41:45 la suppression.
41:47 - Alors,
41:49 déjà, vous citez Pascal Bruckner, pourquoi j'en parle ?
41:51 Parce que je pense que dans ce grand brouhaha,
41:53 il y a beaucoup de gens qui sont fatigués,
41:55 et que la tentation qui peut exister, c'est la tentation
41:57 du repli sur soi.
41:59 Donc, de plus de fermer
42:01 la formation, de s'extraire
42:03 de ce grand brouhaha, de ces polémiques permanentes,
42:05 et ça, c'est quelque chose,
42:07 moi, qui me fait peur,
42:09 parce que je pense que ce jour-là, on ne fait plus société
42:11 si les gens ne s'intéressent plus à la vie.
42:13 Ensuite, les collectifs se replient sur eux
42:15 parce qu'elle devient trop dure.
42:17 - Mais est-ce que vous trouvez que les bénéfices, aujourd'hui, des réseaux sociaux
42:19 sont toujours plus importants que leurs dérives
42:21 ou leurs dangers ? - Alors, je raconte une anecdote
42:23 dans le livre pour en parler.
42:25 Je rappelle un conte que tout le monde connaît,
42:27 qui est le conte de Pinocchio.
42:29 À un moment donné, on voit ce jeune
42:31 pantin qui va dans l'île au plaisir,
42:33 qui est un endroit où tous les excès sont permis.
42:35 On peut fumer, on mange,
42:37 on joue, on fait ce qu'on veut.
42:39 Et qu'est-ce qu'il y apprend ?
42:41 Que l'excès ne permet pas de conduire
42:43 à la liberté, mais au contraire, asservie.
42:45 Et ce que je vois aujourd'hui dans les réseaux sociaux,
42:47 pour moi, c'est une sorte
42:49 d'île au plaisir pour adultes
42:51 où on se retrouve confrontés...
42:53 On pense qu'on a la liberté de parler,
42:55 et c'est un peu la promesse de Régine, la liberté d'exprimer
42:57 ses opinions, ses idées,
42:59 de revendiquer des choses,
43:01 encore une fois, de s'indigner.
43:03 Et on voit à quel point, aujourd'hui, ça a servi,
43:05 parce que les algorithmes
43:07 ne mettent en avant que ce qui est excessif,
43:09 ce qui est le plus extrême.
43:11 - Il faudra prendre des mesures drastiques, un jour,
43:13 où vous pensez que la régulation,
43:15 la modération sera suffisante.
43:17 - Moi, je... - Vous ne l'est pas ?
43:19 - C'est pas que je ne le sais pas,
43:21 c'est que je pense qu'il y a des mesures qui sont prises.
43:23 - Plus en Europe qu'aux Etats-Unis.
43:25 - Plus en Europe qu'aux Etats-Unis.
43:27 Depuis qu'Elon Musk a repris Twitter,
43:29 qui est devenu X, ça change à une vitesse
43:31 qui est considérable, et ça devient
43:33 de plus en plus toxique.
43:35 Nous, en tant que médias de service public,
43:37 je me pose régulièrement la question
43:39 jusqu'à quand on va pouvoir rester dessus.
43:41 Et pourquoi est-ce qu'on y reste ?
43:43 Pourquoi on y reste ? Pour une seule raison,
43:45 c'est qu'aujourd'hui, c'est un réseau
43:47 dans lequel il y a encore beaucoup de personnes qui le suivent.
43:49 Il est très prescripteur. D'ailleurs, la preuve,
43:51 c'est qu'on en parle. Il ne serait pas important,
43:53 mais il est très prescripteur, ce qui veut dire
43:55 que pour beaucoup de personnes, il s'informe sur les réseaux.
43:57 On parlait des aînés, il y a beaucoup de personnes...
43:59 - Mais il n'est pas éternel.
44:01 S'il avait une alternative, vous iriez ?
44:03 - Bien sûr, bien sûr. Mais aujourd'hui, tant que les gens sont dessus,
44:05 il faut qu'on y apporte de la lutte
44:07 contre les fausses informations, la lutte contre la manipulation,
44:09 le nombre de fausses informations,
44:11 de manipulations qu'on voit sur ces réseaux-là,
44:13 mais c'est terrible.
44:15 - Le baromètre annuel, on aura commencé à en parler
44:17 à partir de la fatigue informationnelle.
44:19 C'est la Croix qui fait ce travail
44:21 chaque année, la confiance dans les médias.
44:23 C'est vrai qu'il y a une forme de contradiction,
44:25 parce que d'un côté,
44:27 les Français massivement, plus de 70 %,
44:29 suivent l'actualité avec grand intérêt,
44:31 on voit les résultats s'afficher,
44:33 et en même temps, ils ressentent
44:35 pour moitié d'entre eux une très grande fatigue
44:37 ou une forme de rejet par rapport à l'information,
44:39 soit parce que les sujets se répètent,
44:41 l'Ukraine, le Covid,
44:43 soit parce qu'ils s'en sont angoissés.
44:45 Vous voyez un paradoxe
44:47 ou au contraire une forme de cohérence ?
44:49 - Je pense que c'est un paradoxe
44:51 sur lequel il faut que les médias travaillent.
44:53 En effet,
44:55 les chiffres qui ont été présentés aujourd'hui
44:57 montrent bien que les Français
44:59 ont de l'intérêt pour l'information,
45:01 mais que c'est la manière
45:03 dont elle est traitée qui pose problème.
45:05 Si on prend un peu de recul dans l'histoire,
45:07 il y a eu beaucoup de moments où on avait des tensions.
45:09 Il y a eu les années 30 avec des grandes tensions,
45:11 les années 60 avec le péril nucléaire,
45:13 dans les années 80, on a connu les Balkans.
45:15 Donc ce n'est pas la nature de l'activité
45:17 qui conduit à avoir ce sentiment
45:19 de fatigue par rapport à l'actualité.
45:21 En fait, ce qui conduit à ça,
45:23 c'est la manière dont aujourd'hui elle existe,
45:25 où on se sent bombardés
45:27 de tas de contenus,
45:29 où on sait qu'il y a des fausses informations
45:31 parce que les Français ne sont pas dupes.
45:33 Ils savent que sur les réseaux,
45:35 il y a des choses qui sont fausses.
45:37 Ils n'ont pas forcément aujourd'hui
45:39 tous les outils pour pouvoir les détecter.
45:41 Je pense que l'écoute, quelque part,
45:43 c'est aussi une manière de les détecter
45:45 en essayant d'entendre des points de vue contradictoires.
45:47 - Le temps d'écoute est considérablement
45:49 plus important en radio,
45:51 quelle qu'elle soit, d'ailleurs,
45:53 sur Radio France,
45:55 sur les chaînes d'information en continu,
45:57 ou même sur les réseaux sociaux.
45:59 Pour terminer, un petit mot sur la musique.
46:01 - On cultive les valeurs d'écoute.
46:03 - La musique, dont vous écrivez qu'on ne soupçonne
46:05 pas toujours la puissance sur nos corps,
46:07 elle a une place, la musique, dans votre vie.
46:09 Elle peut changer la vie, parce que c'est ça aussi, l'écoute.
46:11 - Je pense que la musique,
46:13 c'est un moment de partage d'émotions.
46:15 On a tous des souvenirs de concerts
46:17 où il y a une musique qui nous transporte,
46:19 et on sent qu'en fait,
46:21 on partage cette émotion-là
46:23 avec tous ceux qui sont autour de nous.
46:25 Et c'est ça qui est absolument merveilleux dans la musique,
46:27 c'est quelque chose qui transmet une émotion
46:29 qui est la même, qui est partagée,
46:31 quelle que soit la sociologie,
46:33 quelle que soit l'origine nationale.
46:35 - Il y a des moments racontés, d'ailleurs,
46:37 dans la musique, de partage.
46:39 - C'est vrai, il y a des trucs qui montrent ça,
46:41 des émotions de grande communication,
46:43 et pour moi, ça montre encore une fois que ce qu'on écoute,
46:45 ça développe aussi un imaginaire,
46:47 ça développe aussi une capacité à imaginer les choses,
46:49 à aller plus loin,
46:51 et c'est une des grandes vertus de ce que l'écoute apporte.
46:53 - Merci beaucoup, Sibylle Veil.
46:55 Au commencement, l'écoute,
46:57 c'est à lire aux éditions de l'Observatoire.
46:59 C'était Rudy, mais des références
47:01 aussi éclectiques que Relson ou Angèle,
47:03 en passant par Plutarch,
47:05 qui vous a inspiré votre titre.
47:07 Vous restez avec moi, c'est l'heure d'accueillir
47:09 les gens franchis pour leur parti pris.
47:11 On les accueille tout de suite.
47:13 On termine comme chaque soir avec les partis pris.
47:15 Ce soir, signé Carole Barjon de L'Obs,
47:17 c'est Richard Verly du quotidien suisse Blic.
47:19 Installez-vous, les amis.
47:21 On démarre par Bourbon Express,
47:23 l'histoire du jour à l'Assemblée nationale.
47:25 C'est vous, Stéphanie Despierre,
47:27 qui nous racontez.
47:29 Bonsoir, Stéphanie.
47:31 - Bonsoir. C'est l'histoire de députés
47:33 qui parrainent des otages détenus par le Hamas.
47:35 Séance photo cet après-midi dans les jardins
47:37 de la Salle nationale, avec une cinquantaine
47:39 de députés à l'initiative de Caroline Yaddan,
47:41 parlementaire Renaissance,
47:43 très engagée dans le soutien aux Israéliens
47:45 depuis l'attaque barbare du 7 octobre.
47:47 Alors, chacun d'eux avait en main
47:49 un portrait d'une des personnes kidnappées
47:51 avec ses affiches au bandeau rouge
47:53 qu'on a vu placardées en Israël,
47:55 mais aussi dans les rues des grandes villes françaises.
47:57 Alors, sur les 240 otages
47:59 encore détenus par le Hamas,
48:01 il y a des adultes, des enfants
48:03 et même des bébés, plusieurs nationalités.
48:05 Il y aurait au moins huit Français.
48:07 Alors, ces députés, dont certains sont allés
48:09 en Israël depuis le drame, voulaient se mobiliser.
48:11 Le maître mot de cette opération,
48:13 c'est "il faut libérer les otages"
48:15 et surtout, on ne les oublie pas
48:17 jusqu'à la libération
48:19 du dernier, sain et sauf.
48:21 Moi, j'ai parrainé quelqu'un
48:23 qui était tout simplement dans la Rêve-Partie
48:25 qui était dans le désert.
48:27 Alors, je sais qu'il y a des gens
48:29 qui n'aiment pas que des jeunes s'amusent,
48:31 mais de là à aller massacrer des jeunes qui font ça,
48:33 je sais légèrement ce qui s'est passé au niveau du Bataclan.
48:35 Le droit de jeunes à, je dirais,
48:37 s'exprimer par le biais de la musique,
48:39 tout simplement, ne semble pas être du goût
48:41 d'un certain nombre de personnes.
48:43 Il faudra toujours le dénoncer.
48:45 Voilà, Stéphanie, ce parrainage
48:47 d'otages intervient alors
48:49 qu'un accord aurait été trouvé,
48:51 je n'ose dire a été trouvé,
48:53 pour libérer une cinquantaine d'entre eux.
48:55 Alors, cette initiative de parrainage
48:57 était en fait en préparation depuis
48:59 plusieurs jours parmi les participants.
49:01 Il y a eu une majorité de députés du camp présidentiel,
49:03 mais aussi quelques élus les républicains
49:05 et des non-inscrits.
49:07 Beaucoup appartiennent au groupe d'amitié
49:09 France-Israël. Alors, sur la photo,
49:11 il n'y a pas de députés de gauche,
49:13 mais il y a quelques élus socialistes
49:15 qui ont donné leur parrainage.
49:17 Et pour les autres parlementaires,
49:19 certains n'étaient pas au courant et d'autres n'étaient pas conviés.
49:21 Est-ce que vous aviez proposé
49:23 à tous les députés de tous les groupes politiques
49:25 de parrainer un otage ?
49:27 Non, on n'avait pas proposé ni au Rassemblement national
49:29 ni à la France Insoumise.
49:31 Le Rassemblement national, parce qu'on a fait
49:33 le choix depuis le début de ne pas travailler
49:35 avec eux et on ne souhaite en aucun cas
49:37 travailler avec eux. Et puis la France Insoumise,
49:39 parce que je crois que quand on est
49:41 incapable de qualifier de terroriste
49:43 des gens qui emmènent un bébé de 9 mois
49:45 en otage loin de ses parents,
49:47 je pense qu'on est totalement disqualifiés
49:49 pour participer à cette opération.
49:51 Alors, des sénateurs,
49:53 mais aussi des députés européens sont
49:55 engagés dans ce parrainage qui concerne environ
49:57 250 élus. Alors, ils s'engagent à communiquer
49:59 le plus souvent possible
50:01 sur le sort des otages.
50:03 Certains vont contacter les familles,
50:05 d'autres, déjà, ont été contactés par les familles
50:07 d'otages en espérant que l'accord
50:09 dont on parlait débouche vraiment
50:11 rapidement sur la libération des otages.
50:13 Merci beaucoup Stéphanie Despierre.
50:15 Ces empathies sélectives,
50:17 Cybille Veil, on en a beaucoup parlé.
50:19 C'est un peu la continuité
50:21 de votre livre. On n'arrive pas, finalement,
50:23 à avoir l'empathie pour les deux camps
50:25 aujourd'hui. - En tout cas,
50:27 c'est un des sujets émotionnels très forts
50:29 et c'est vrai qu'il y a des situations très humaines
50:31 dans lesquelles sortir des postures,
50:33 écouter ceux qui ne pensent pas comme vous
50:35 pour partager des valeurs
50:37 humaines et humanistes, je pense
50:39 que c'est important. Et l'écoute amène à ça aussi,
50:41 entendre des gens qui ne pensent pas comme vous.
50:43 - Carole Barjon, c'est à vous.
50:45 Réveillez-vous, a lancé
50:47 Emmanuel Macron. Pas vous, vous êtes
50:49 toutes en forme ce soir, mais c'est le président
50:51 qui a dit ça hier soir devant
50:53 des chefs d'entreprise. Qu'a voulu-t-il dire ?
50:55 - Eh bien, il s'exprimait
50:57 hier à l'Elysée devant
50:59 un parterre de chefs d'entreprise
51:01 qui étaient réunis
51:03 pour soutenir les PME
51:05 et Emmanuel Macron en a profité
51:07 pour signifier que
51:09 le temps de l'effort pour les patrons
51:11 comme pour les salariés est
51:13 devant nous et pas derrière.
51:15 D'autant qu'il estime, lui,
51:17 évidemment, avoir fait des efforts
51:19 et il ne s'est pas privé de rappeler
51:21 qu'il avait réussi
51:23 à réduire significativement
51:25 le chômage,
51:27 contribuer à augmenter
51:29 le nombre de créations d'emplois,
51:31 qui est l'une de ses promesses phares
51:33 depuis 2017. Mais
51:35 cette apostrophe, ou plutôt cette
51:37 injonction, témoignait
51:39 aussi d'un grand énervement de sa part.
51:41 - Ah bon ? Pourquoi ? Il était énervé ?
51:43 - Eh bien, parce que ce
51:45 "réveillez-vous", qui n'est pas agressif,
51:47 mais enfin, voilà,
51:49 c'est véhément,
51:51 visait d'abord le MEDEF,
51:53 qui est coupable, selon lui,
51:55 d'avoir décidé, avec les syndicats,
51:57 de revaloriser les retraites
51:59 complémentaires
52:01 à Arco
52:03 de 4,9 %.
52:05 Alors que l'exécutif
52:07 y était opposé et qu'il voulait
52:09 au contraire ponctionner les réserves
52:11 de cette caisse pour financer
52:13 un dispositif de solidarité
52:15 en faveur des petites pensions.
52:17 Cet accord a donc été
52:19 vécu par Emmanuel Macron,
52:21 pour qui il n'est plus temps, je cite,
52:23 "de redistribuer et de
52:25 revenir en arrière", comme un véritable
52:27 affront.
52:29 Avec ce "réveillez-vous",
52:31 le président voulait aussi parler d'autres
52:33 choses que de politique internationale
52:35 et du Proche-Orient,
52:37 d'autres choses que
52:39 de la violence qui s'exprime partout
52:41 en France, là, on vient d'en parler
52:43 avec le meurtre du jeune Thomas,
52:45 alors que forcément,
52:47 le sentiment d'insécurité des Français
52:49 s'accroît, d'après la plupart des sondages.
52:51 Avec ce coup de gueule,
52:53 le président voulait enfin attirer
52:55 l'attention sur l'économie,
52:57 montrer qu'il demeurera un réformateur
52:59 jusqu'à la fin de son
53:01 quinquennat et que les efforts
53:03 pour parvenir au plein emploi
53:05 en 2027 et réduire
53:07 la dépense publique sont toujours nécessaires.
53:09 - C'est une bonne guerre, on connaît l'état
53:11 de nos finances publiques. - Évidemment,
53:13 tenu de l'ampleur de la dette de la France
53:15 et des déficits, il y a évidemment urgence
53:17 à remettre de l'ordre dans les finances publiques,
53:19 ce que réclament du reste Bercy,
53:21 Accor et Acry. Mais attention
53:23 au boomerang ! L'injonction
53:25 de Macron pourrait se retourner
53:27 contre lui, car il s'agit de remettre
53:29 l'économie au centre,
53:31 mais il faudrait qu'il y ait
53:33 une trajectoire lisible pour tous.
53:35 Se réveillez-vous,
53:37 visant parti, les chefs d'entreprises
53:39 qui sont enjoints à augmenter les salaires,
53:41 et c'est heureux, en cette période d'inflation.
53:43 - Mais il se parlait aussi à lui-même ?
53:45 - Il faudrait qu'il y ait
53:47 une trajectoire plus lisible.
53:49 Or, un jour,
53:51 on nous dit que c'est la fin de l'abondance,
53:53 le lendemain, on distribue
53:55 les chèques.
53:57 Bref, Emmanuel Macron prend le risque,
53:59 on lui rétorque. Vous aussi, pour nous
54:01 fixer enfin un cap clair,
54:03 réveillez-vous, monsieur le président.
54:05 - Merci beaucoup, Carole, et pardon de vous avoir
54:07 sucré la chute ! Je vous voyais
54:09 venir ! Merci beaucoup.
54:11 Alors, il vous reste un peu moins de 3 minutes,
54:13 Richard, pour nous dire
54:15 le projet de Giorgia Meloni,
54:17 sous-traiter ces migrants,
54:19 qui sont en Italie,
54:21 en Albanie. Et vous nous dites, attention,
54:23 il faut pas caricaturer, ça mérite
54:25 mieux qu'un rejet de principe ? - Absolument.
54:27 Alors, d'abord, ce n'est pas un projet, c'est un accord
54:29 que le gouvernement de droite
54:31 dur de Giorgia Meloni a conclu
54:33 avec le gouvernement albanais. Ce sont
54:35 deux centres de personnes déplacées
54:37 que l'Italie s'est engagée à construire.
54:39 Le premier dans un port, Schengen,
54:41 et le deuxième sur un ancien
54:43 aéroport dans la ville voisine de Gjader.
54:45 Alors, l'objectif, c'est d'y transférer,
54:47 dès leur arrivée sur les côtes
54:49 italiennes, des milliers
54:51 de migrants, en attente d'examens
54:53 de leur demande d'asile. Ces installations,
54:55 elles seront construites par les autorités italiennes,
54:57 gérées par elles, avec, on l'imagine,
54:59 une main-d'oeuvre locale albanaise pour tous les services
55:01 indispensables, le ravitaillement,
55:03 la maintenance ou l'ordre public. Alors, d'emblée,
55:05 l'idée peut choquer. Avec cet accord,
55:07 il est évident que Rome cherche, bien sûr,
55:09 à se débarrasser des nouveaux
55:11 migrants. Vous savez que Giorgia Meloni, c'était un
55:13 thème récurrent de sa campagne.
55:15 Mais regardons bien les choses en face, et là, je vais faire
55:17 une petite liste de cinq points.
55:19 Premier point, l'Albanie est un pays candidat
55:21 à l'Union européenne depuis 2014
55:23 et demandeur d'aide et de réforme.
55:25 Deuxièmement, son gouvernement est démocratiquement élu.
55:28 Troisièmement, ses centres gérés par l'Italie
55:30 permettront aux Albanais à la fois
55:32 de partager le fardeau migratoire européen
55:34 et sans doute d'intégrer de manière anticipée
55:36 l'Agence de gestion de l'asile
55:38 de l'Union. Enfin, quatrième point,
55:40 est-il plus inacceptable de transférer
55:42 ces personnes en Albanie
55:44 ou bien, dans les rues, de les laisser
55:46 à la portée des mafias ? Et enfin,
55:48 cinquièmement, doit-on oublier que de toute
55:50 façon, le mot d'ordre européen, c'est
55:52 celui de la "bunkérisation" du continent,
55:54 derrière des murs de barbelés
55:56 et l'accélération du renvoi des étrangers
55:58 déboutés. Bref, si on applique ces
56:00 cinq critères, l'Albanie peut être une solution.
56:02 - Ah oui, la moue du bitatif
56:04 de Carole en dit non ?
56:06 - Non, pas du tout. - Non ? Allez,
56:08 est-ce que ça veut dire pour vous que c'est la même chose
56:10 que voulait faire le Royaume-Uni avec le Rwanda,
56:12 qui a dû y renoncer, hein,
56:14 le britannique ? - Alors, absolument pas.
56:16 Première différence, le Rwanda n'est pas sur le continent
56:18 européen et il sera donc beaucoup plus
56:20 compliqué d'y inspecter des centres de migrants
56:22 dans un pays de surcroît non-démocratique
56:24 et très sourcilleux de sa
56:26 souveraineté, sur lequel les Européens
56:28 ont très peu, sinon pas du tout, d'influence.
56:30 Deuxième différence, l'option albanaise
56:32 aux portes de l'Union européenne
56:34 peut être élargie demain à d'autres pays
56:36 des Balkans occidentaux en attente d'adhésion,
56:38 voire peut-être à la Moldavie ou à l'Ukraine,
56:40 bien évidemment, après la guerre.
56:42 Ces pays veulent entrer dans l'UE, ils y parviendront,
56:44 c'est logique, c'est normal,
56:46 et bien qu'ils épaulent les 27 et soient
56:48 aidés pour le faire, ça a du sens. Alors, enfin,
56:50 parlons de ce qui fâche, c'est les
56:52 inévitables retours forcés
56:54 dans les pays d'origine ou de transit,
56:56 eh bien, posons-nous la question, est-ce que le faire
56:58 à partir de l'Albanie, je vous ai dit que ce sera dans un ancien
57:00 aéroport, l'un des centres, eh bien, ça ne permettrait pas
57:02 de diminuer l'intensité
57:04 de ce débat particulièrement explosif,
57:06 bref, face au drame de la migration,
57:08 l'option albanaise, elle doit être
57:10 étudiée, mais sûrement pas rejetée.
57:12 - Voilà un parti pris, merci beaucoup.
57:14 La coopération
57:16 européenne avec les futurs
57:18 adhésions de l'Albanie.
57:20 Merci beaucoup, merci Richard,
57:22 merci Carole, merci Stéphanie,
57:24 et merci à vous, Sybille Veil,
57:26 d'être passées sur le plateau
57:28 de la chaîne parlementaire, au commencement,
57:30 c'est-à-dire aux éditions
57:32 de l'Observatoire, pour en finir
57:34 avec la société
57:36 du défouloir, c'est la fin de cette émission.
57:38 Merci à vous de l'avoir suivie. Pour la voir ou la revoir,
57:40 il y a la chaîne YouTube d'LCP. Bien sûr,
57:42 très belle soirée. A demain.
57:44 (Générique)

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