• l’année dernière
Geneviève Darrieussecq, députée "Démocrate (MoDem et Indépendants)" des Landes.

Elle a fait ses gammes à droite, d'abord dans le syndicalisme étudiant, puis avec Alain Madelin et Alain Juppé. Désormais membre de Renaissance, Marie Guévenoux a été élue première questeure de l'Assemblée, un des postes les plus stratégiques au palais Bourbon.

Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00 Elle s'est lancée en politique à 48 ans,
00:02 sans aucune expérience, mais ça ne l'a pas empêchée
00:05 d'enchaîner les succès, jusqu'à être élue députée en 2017.
00:09 Pendant 6 ans, elle n'a pas siégé.
00:11 Elle avait une bonne raison à cela.
00:13 Musique intrigante
00:16 ...
00:27 -Bonjour, Geneviève Dariussec.
00:29 -Bonjour. -Quand vous vous êtes engagée
00:31 en politique aux côtés de François Bayrou,
00:33 beaucoup de gens, à Mont-de-Marsan, vous connaissaient déjà,
00:37 mais pas pour vos idées politiques ou un engagement politique.
00:40 Ils vous voyaient sur le bord du terrain tous les dimanches
00:43 au Stade Montoie, le club de rugby de la ville,
00:46 parce que vous étiez le docteur chargé de soigner les joueurs.
00:49 On va revoir un extrait d'une prise de parole de vous à cette époque.
00:53 -Je crois que souvent, les joueurs ont besoin, surtout,
00:57 c'est d'être entourés, effectivement,
00:59 de sentir que personne ne baisse les bras autour.
01:02 Euh...
01:04 Alors, dans le club, mais aussi à l'extérieur du club.
01:07 Je crois qu'il faut sentir qu'on est soutenus par le public,
01:11 qu'on est soutenus par la ville dans laquelle on vit.
01:15 -Au début, c'était difficile pour le club.
01:18 On a l'impression que vous étiez plus la psy des joueurs
01:21 que la médecin.
01:22 -Ecoutez, les médecins, ils sont toujours là,
01:25 dans les clubs en particulier,
01:27 pas que pour soigner le physique,
01:29 ils sont aussi là pour soigner le moral,
01:32 pour écouter les joueurs,
01:34 écouter quelques fois les détresses, les questions.
01:37 Donc, ça fait partie du job.
01:39 J'ai fait ça de façon bénévole pendant dix ans,
01:42 en structurant l'équipe médicale d'un club professionnel,
01:46 devenu professionnel.
01:47 Donc, c'était très passionnant,
01:49 et en plus de mon activité de médecin, par ailleurs,
01:53 allergologue, je faisais ça, et ça a été très passionnant.
01:57 -Alors, dans une ville comme Mont-de-Marsan,
01:59 j'imagine que...
02:01 Il faut savoir qu'à Mont-de-Marsan, le rugby, c'est pas rien.
02:04 Soigner un peu les héros de la ville,
02:06 c'est un peu la rampe de lancement idéale
02:08 quand on veut faire de la politique.
02:11 -Ecoutez, oui, vous avez de la notoriété,
02:13 ça aide, effectivement,
02:15 et puis, la notoriété, c'était pas que moi,
02:18 c'était aussi mon mari, ancien joueur...
02:20 -Ancien joueur, figure locale.
02:23 -Une grande figure locale.
02:24 Donc, si vous voulez, il a aussi participé avec moi
02:28 à toute cette aventure,
02:30 ou j'ai participé avec lui à toute cette aventure.
02:33 Et en définitive... -On vous voit
02:35 au milieu des joueurs. -Oui.
02:36 En définitive, ça, c'est l'esprit festif,
02:39 et c'est toujours quand on gagne.
02:41 C'est une montée en top 14, ça,
02:43 que nous avions gagnée contre Pau, d'ailleurs, en 2012.
02:46 -En plus. -Donc, on était...
02:47 Moi, j'étais très heureuse. François Bayrou n'était pas heureux.
02:51 -François Bayrou est venu vous chercher en 2004,
02:54 à l'occasion des régionales.
02:55 Il vous a proposé d'être tête de liste de l'UDF
02:58 dans votre département des Landes.
03:00 Vous n'aviez jamais fait de politique,
03:02 vous n'aviez jamais mis les pieds dans une salle de meeting politique.
03:06 Quand on y réfléchit, c'est assez incroyable
03:09 qu'il vous ait fait cette proposition.
03:11 Pourquoi vous a-t-il choisi ?
03:12 -Tout simplement parce qu'il cherchait un profil,
03:15 quelqu'un qui était connu dans sa ville,
03:18 qui était engagé dans le mouvement
03:20 associatif et puis, voilà,
03:22 qui avait une profession médecin, c'est souvent...
03:26 -Il cherchait une femme ? -Il cherchait une femme.
03:29 Pour être tête de liste dans les Landes.
03:31 Donc, je devais cumuler un petit peu tout cela
03:34 et, bon, les choses ont fait que nous nous sommes rencontrés
03:37 et que je n'ai pas pu résister à sa demande.
03:40 -Vous aviez une petite notoriété liée au rugby,
03:42 mais vous avez été surnommée par vos adversaires
03:45 pendant cette élection, Mme X. -Oui, Mme X, bon...
03:49 Et puis, une femme, forcément, elle sait pas faire.
03:53 Elle a pas de compétences.
03:54 Si elle n'a jamais été là, elle va pas y arriver.
03:57 -C'est ce qui s'est passé pour vous quatre ans après.
04:00 Vous êtes attaquée à la mairie de Mont-de-Marsan,
04:03 un bastion de la gauche depuis presque un demi-siècle,
04:06 aux mains du même homme politique depuis...
04:09 -24 ans. -Philippe Labéry.
04:10 Vous l'avez emportée contre toute attente.
04:13 Après votre élection, vos adversaires étaient convaincus
04:16 que vous alliez pas réussir, que vous alliez démissionner.
04:19 C'est vrai, ça ? -Oui, mais...
04:21 Parce que, très simplement,
04:23 mes adversaires, c'était le Parti socialiste.
04:26 Ils étaient très machos.
04:28 Ils pensaient qu'une femme ne pouvait pas y arriver
04:31 et qu'une femme sans expérience dans le domaine
04:34 n'y arriverait pas.
04:36 Moi, je dis à tous et à toutes ceux qui veulent s'engager
04:39 qu'il faut beaucoup travailler.
04:41 Il faut pas croire que les choses sont arrivées comme ça.
04:44 C'est aussi beaucoup de travail, d'investissement,
04:47 peut-être des capacités à comprendre les situations
04:50 et à faire les choses, mais en tout cas,
04:52 bien sûr que j'y suis arrivée et j'ai été réélue en 2014
04:56 au premier tour.
04:57 -A quel moment, vos adversaires ont commencé à changer de regard
05:01 sur vous ? -Bah, écoutez,
05:02 je pense que M. Emanueli,
05:04 qui était président du Conseil départemental
05:07 et la figure tutélaire du Parti socialiste dans les Landes,
05:11 a reconnu que j'avais bien travaillé
05:15 quand j'ai été réélue au premier tour en 2014,
05:18 donc j'ai fait mes preuves.
05:20 -Il a dit de vous, "Elle est sans doute plus tranchante que moi",
05:24 et dans la bouche d'Henri Emanueli, on peut se dire
05:27 que c'est un compliment.
05:28 -Je ne sais pas si c'est un compliment.
05:31 Oui, peut-être. -Parce que lui,
05:33 il avait la réputation d'avoir un très fort caractère
05:36 et c'était sa façon de faire de la politique.
05:38 -C'est un compliment, mais je ne fais pas de la politique
05:41 comme lui, par contre.
05:43 -Vos différences ?
05:44 -Bah, écoutez, lui, c'était un petit peu de la coercition
05:48 au niveau du département, qui existe encore un peu,
05:51 bien qu'il ne soit plus là,
05:53 de la coercition vis-à-vis des élus, des maires,
05:57 tous liés automatiquement au Conseil général
06:01 ou au Conseil départemental aujourd'hui
06:04 et ne pouvant pas dévier des trajectoires
06:07 qui leur étaient dictées.
06:08 Moi, c'est exactement l'inverse.
06:10 Je pense que chacun, dans une démocratie,
06:13 à partir du moment où il est élu, il est légitime,
06:16 il peut s'exprimer et il faut que les personnes travaillent
06:19 ensemble dans une bonne intelligence.
06:21 -En 2017, à peine élu député, tout s'est accéléré pour vous.
06:25 Là encore, de façon un peu imprévue, on va dire,
06:28 personne n'avait vraiment misé sur votre entrée au gouvernement,
06:31 pas même vous.
06:32 Racontez-nous un peu l'histoire.
06:35 -Ecoutez, ça, j'y ai pas pensé une seconde.
06:37 C'était très simple.
06:39 Je venais m'inscrire à l'Assemblée nationale,
06:42 j'avais fait la moitié du chemin, c'était un 21 juin,
06:46 j'avais fait la moitié du chemin et puis, à 13h,
06:49 j'ai un message du cabinet d'Edouard Philippe
06:53 qui me demandait de passer à Matignon
06:55 parce qu'Edouard Philippe voulait me rencontrer.
06:58 Donc j'ai rencontré Edouard Philippe
07:00 et le soir, j'ai été nommée secrétaire d'Etat
07:02 auprès de la ministre des Armées
07:05 et je vous avoue que j'étais partie de chez moi
07:07 avec un sac à main pour la journée
07:09 et que j'ai dû rester quelques jours
07:13 et tout ça était totalement imprévu.
07:16 -C'était imprévu parce qu'en fait, à l'origine,
07:18 il était prévu que François Bayrou et Marielle de Sarnez
07:21 soient au gouvernement, les choses n'ont pas pu se faire.
07:25 On a l'impression que c'est l'effet papillon
07:27 appliqué à la politique, c'est-à-dire que deux petits événements
07:31 ont des répercussions en chaîne et finissent par déterminer
07:34 le déclin pour six ans.
07:35 -Oui, mais je reconnais qu'il y a eu un concours de circonstances.
07:40 Un concours de circonstances, pour moi, c'est incroyable
07:44 et qui m'a propulsée
07:47 dans un dégouvernement définitif pendant six ans.
07:50 Eh bien, voilà, donc, j'ai donné tout ce que j'avais,
07:54 tout ce que je pouvais faire
07:57 et j'étais à la fois très honorée,
07:59 très fière de servir mon pays
08:03 et aussi très concentrée dans la tâche,
08:07 dans le quotidien, mais aussi dans l'avenir
08:09 qu'il faut que l'on dessine quand on est dans un gouvernement.
08:13 Je trouve, bien entendu, que tout cela a été passionnant.
08:16 -Passionnant, pendant six ans, d'abord, vous l'avez dit,
08:19 secrétaire d'Etat auprès de la ministre des Armées,
08:22 ministre délégué en charge de la mémoire des anciens combattants,
08:26 puis des personnes handicapées.
08:28 Quand l'aventure a pris fin, qu'est-ce qui a dominé chez vous ?
08:32 La faute de la tête, de ne pas pouvoir aller au bout ?
08:34 Ou une part de soulagement ?
08:36 Peut-être une fatigue ?
08:37 -Ni l'un ni l'autre. -Non ?
08:39 -Frustration...
08:40 Peut-être parce que, par exemple, pour les personnes handicapées,
08:46 j'ai mis en oeuvre la Conférence nationale du handicap,
08:50 toutes les annonces qui ont été faites par le président de la République,
08:54 et maintenant, il faut les décliner sur les cinq ans à venir.
08:57 Je me dis que c'est bien, la feuille de route a été écrite
09:01 et j'ai pu le faire. -Vous avez fait le plus important.
09:03 -Je ne sais pas, il faut le mettre en oeuvre.
09:06 C'est ça, le plus important dans les politiques.
09:09 Mais au moins, nous avons fait ce travail.
09:11 Ensuite, fatiguée, oui, c'est usant.
09:13 C'est usant d'être dans les gouvernements,
09:16 de faire beaucoup de déplacements, voilà, les choses sont usantes.
09:20 Mais bon, donc, ni l'un ni l'autre,
09:22 je crois que j'ai pris ça comme je prends toutes les choses
09:25 dans ma vie. Je me dis que j'ai eu la chance
09:28 de faire ce que j'ai fait et que maintenant,
09:30 je suis là pour mes objectifs. -Vous avez pris beaucoup de plaisir
09:34 dans vos fonctions de maire, puis de membre du gouvernement.
09:37 Tout ça, c'est l'exécutif. Vous êtes à l'Assemblée,
09:40 du côté du pouvoir législatif.
09:42 Est-ce que ça correspond autant à votre tempérament ?
09:45 -Beaucoup moins. -Mais est-ce que ça...
09:48 -Beaucoup moins dans... L'exécutif est très passionnant.
09:52 Beaucoup moins, mais en définitive,
09:54 ce qui peut être intéressant, c'est la bataille politique.
09:57 Parce que c'est là qu'elle se joue.
10:00 Et la bataille politique, aujourd'hui, elle est rude.
10:03 Elle est rude parce que nous sommes en majorité dite relative
10:07 et puis que nous avons des oppositions extrêmes
10:10 qui sont excessivement virulentes,
10:12 qui sont très...
10:14 Même très violentes, à mon avis, dans leurs expressions.
10:18 Je crois qu'il faut pas se laisser faire.
10:20 Il faut pas se laisser faire parce que, d'abord,
10:23 c'est bien injuste, bien entendu,
10:25 et ensuite, je pense que dans ces moments troublés,
10:28 la France aurait besoin d'un peu plus de modération
10:31 que de radicalité et de propos violents.
10:36 Donc, il ne faut pas se laisser faire.
10:39 -Vous êtes prête à mener cette bataille politique ?
10:42 Un sujet dont on n'a pas encore parlé,
10:44 c'est votre attachement aux traditions du Sud-Ouest.
10:47 Ca peut être la feria, mais pas seulement.
10:49 Il y a aussi la défense de la corrida,
10:52 le gavage des oies, les canards, les chasses locales.
10:55 Ca peut faire débat, tous ces sujets-là, dans la société ?
10:58 -Tout peut faire débat.
11:00 Ce que j'ai plus de mal à comprendre,
11:02 c'est une espèce d'acharnement
11:04 sur, tout simplement, les habitants de nos régions.
11:08 -Ca cible les habitants ? -Oui, bien sûr.
11:10 Bien sûr. Ils sont discriminés.
11:13 On les prend pour des ploucs, excusez-moi,
11:16 pour des gens qui n'ont pas de cervelle,
11:19 avec une cruauté... Bon, c'est pas ça du tout.
11:21 Notre coin est un pays des cocagnes,
11:25 avec ses traditions, certes, avec ses modernités,
11:28 avec ses évolutions, également,
11:30 et je m'inscris en faux quand on décrit
11:33 la façon dont sont décrites les choses.
11:35 -Vous dites qu'il profiche la paix aux gens.
11:38 Vous avez peur que ça nourrisse un vote populiste ?
11:41 -Absolument. -D'interdire la corrida ?
11:43 -C'est une accumulation, si vous voulez,
11:45 des accumulations d'interdictions,
11:47 ou de projets d'interdiction,
11:51 sur des pratiques locales,
11:52 qui sont, en fait, tout simplement des pratiques traditionnelles
11:56 ou des pratiques culturelles locales.
11:58 Les cultures locales, il faut les maintenir.
12:01 Si on fait tous la même chose, si on mange tous la même chose,
12:04 eh bien, le monde n'aura plus beaucoup d'intérêt.
12:08 -On va passer à notre quiz.
12:09 Je vais commencer des phrases, vous allez devoir les terminer.
12:13 On y va.
12:14 Redevenir maire de Mont-de-Marsan en 2026,
12:16 c'est quelque chose... -De possible.
12:19 -Que vous envisagez, sérieusement. -Pourquoi pas ?
12:22 -Très bien, c'est noté.
12:23 J'ai l'air austère, mais...
12:25 En fait, je le suis pas du tout.
12:28 -Je me marre, comme disait Jospin, un austère qui se marre.
12:31 -Je trouve qu'on se marre pas assez, d'ailleurs.
12:34 Ici. -Enfin, jaune et noir
12:36 sont nos couleurs. -Vos supporters
12:38 sont là, debout. -Oui.
12:40 -Voilà, Mont-de-Marsan est dans nos cœurs.
12:43 C'est l'hymne du Stade Montoît. -Nos supporters seront là.
12:46 On voit la réponse affichée.
12:48 C'est l'hymne du club du Stade Montoît.
12:51 Vous y êtes tous les week-ends, non,
12:53 mais à chaque match, vous y allez ?
12:55 -Bah, j'essaie, mais pendant mes six ans de gouvernement,
13:00 j'ai loupé beaucoup de matchs.
13:02 -Vous allez pouvoir vous rattraper. -Oui.
13:05 -Merci, Geneviève Dariussecq, d'être venue dans "La Politique et moi".
13:08 -Merci à vous.
13:10 Musique rock
13:12 -Nos supporters sont là, debout
13:15 -Joseph, c'est gata !
13:17 -Mont-de-Marsan est dans nos cœurs
13:21 Nos supporters seront là jusqu'au bout
13:26 ♪ ♪ ♪

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