Igor Garncarzyk

  • l’année dernière
L’éducation nationale peine à recruter. Le ministère a choisi de repousser la date butoir pour l’inscription au concours, pour tenter d’attirer davantage de candidats. Il faut réagir pour rendre le métier d'enseignant plus attractif selon Igor Garncarzyk, secrétaire général FSU des personnels de direction de l'éducation nationale

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Transcription
00:00 Bienvenue, sous l'infonil, 8h15 sur France 3 et France Bleu Normandie.
00:04 Notre invité d'Idy Sherpin ce matin est Igor Garn-Karzyk, secrétaire général du Syndicat des Personnels de Direction de l'Education Nationale FSU.
00:12 Il est avec nous en studio, bonjour Igor Garn-Karzyk.
00:15 Bonjour.
00:16 Vous êtes principal au collège Monod à Caen. Emmanuel Macron avait fait cette promesse à un professeur devant chaque classe à la rentrée scolaire. Promesse tenue ou pas ?
00:24 Non, la promesse n'a pas été tenue. Selon les enquêtes qui ont été faites, à peu près un établissement sur deux était avec au moins un professeur manquant à la rentrée.
00:35 C'est votre cas par exemple à Monod ?
00:36 Ça a été le cas pendant quelques semaines à Monod, effectivement.
00:39 Alors comment on pallie ? Comment on s'adapte ?
00:42 On s'adapte au mieux en expliquant aux parents, en faisant patienter et surtout avec des heures de cours qui ne sont pas assurées pour les élèves parce que l'adaptation ne peut pas remplacer 18 ou 20 heures de cours bien évidemment sur une semaine.
00:59 Le gouvernement avait proposé ce pacte enseignant pour inviter des enseignants volontaires à faire davantage d'heures pour remplacer des collègues absents.
01:07 Ça ne fonctionne pas visiblement, seulement 30% des établissements n'ont pas souscrit ce pacte. Je ne sais pas si c'est votre cas d'ailleurs ?
01:14 Ça ne fonctionne pas pour plusieurs raisons. La première raison c'est une présentation fallacieuse du dispositif.
01:21 C'est-à-dire que le remplacement de courte durée existe depuis 2005.
01:27 Depuis 2005, il existe du remplacement de courte durée dans les établissements, payé avec ce qu'on appelle des heures supplémentaires effectives, c'est-à-dire que les enseignants étaient rémunérés.
01:36 Donc ce sont des choses qui existaient. Même chose pour les missions qui rentrent dans le cadre du pacte, elles existaient préalablement.
01:44 Elles pouvaient être payées également par ce qu'on appelle des indemnités de mission particulière, des IMP.
01:50 Est-ce que les professeurs les font ces heures ? On ne va pas rentrer dans le langage administratif, mais est-ce qu'ils les font ? Et s'ils ne les font pas, pourquoi ?
01:57 Les professeurs les faisaient, par exemple sur notre établissement, et comme beaucoup, nous utilisions ces heures.
02:07 C'était fait, ça a toujours été fait sur le principe du volontariat.
02:11 Pour que ça fonctionne, il faut qu'un grand nombre de professeurs s'impliquent dans le dispositif.
02:18 Le pacte lui propose un contrat à 18 heures de remplacement. Si on regarde par exemple des collèges ou des lycées, très peu d'enseignants étaient sur 18 heures.
02:30 Le pacte propose et impose qu'il y ait des plages sur lesquelles les enseignants ne peuvent pas refuser ce remplacement de courte durée.
02:38 Concrètement dans l'établissement, ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Les emplois huit ans, lorsqu'il y a un professeur qui est absent,
02:43 les emplois huit ans bougent, les plages de remplacement bougent, et il nous faut de la souplesse, ce qui est contradictoire avec le pacte.
02:51 Et enfin, un mensonge du gouvernement, parce que quand ça a été présenté comme une revalorisation de la rémunération des enseignants,
02:58 en fait ce n'est pas une revalorisation, c'est du travail supplémentaire rémunéré dans un cadre contractuel.
03:03 Et là, les enseignants, très majoritairement, s'y sont opposés.
03:07 - Les rémunérations ont été augmentées, notamment pour les enseignants au début de carrière, avec ce seuil symbolique, aucun d'entre eux, à moins de 2000 euros.
03:14 Il y a eu des efforts quand même de fait ?
03:16 - Des efforts, effectivement, ont été faits sur les débuts de carrière, mais la révalorisation des enseignants nécessiterait un plan global qui englobe l'ensemble de la carrière,
03:29 afin qu'on reste véritablement dans une fonction publique de carrière.
03:33 - Vous voulez dire qu'il y a un tassement ? C'est-à-dire que 2000 euros c'est symbolique, mais derrière ça n'avance plus ?
03:37 - Ça veut dire que, un, c'est de l'indemnitaire, qui amène à ces 2000 euros.
03:41 Deuxièmement, il n'y a pas d'augmentation du point d'indice, qui est la base de la rémunération des enseignants,
03:46 ce qui amène effectivement à un tassement entre les salaires du début de carrière et ceux du milieu de carrière,
03:52 et aucune revalorisation pour les enseignants milieu et fin de carrière.
03:57 Donc ça amène les enseignants à ne pas pouvoir se projeter sur l'ensemble d'une carrière.
04:03 Et, a contrario, des décisions ministérielles dernièrement, par exemple sur les fins de carrière,
04:09 qui rendent les choses plus opaques et plus inquiétantes dans le déroulé de carrière,
04:14 c'est par exemple la suppression des barèmes pour l'accès à la hors classe,
04:17 qui constitue une véritable valorisation de fin de carrière du parcours des enseignants.
04:22 - L'Éducation nationale est face à ce problème de pénurie d'enseignants, de pénurie de vocation.
04:27 328 000 enseignants partiront à la retraite d'ici 2030, c'est à peu près 40% des effectifs.
04:32 Il faut rendre ce métier attractif, sinon on va dans le mur ?
04:35 - C'est indispensable. Et pour le rendre attractif, il y a effectivement la partie rémunération dont on parlait tout de suite,
04:41 mais il y a également, et peut-être surtout, les conditions de travail, et la conception même du métier d'enseignant.
04:47 - Alors quelles seraient les solutions espérées ?
04:49 - Les solutions espérées... Toutes les statistiques montrent qu'un enseignant travaille plus de 40 heures par semaine.
04:55 Donc tout ce qui amène à accroître encore la charge de travail, c'est à contrario du fait d'attirer.
05:03 C'est aussi la conception même du métier, lorsqu'on voit des thèses qui sont passées en CM1, en CM2, en 6ème, en 4ème, en 2ème,
05:11 un ministère qui est de plus en plus impératif sur les modalités d'organisation des enseignements,
05:20 sur les contenus d'enseignement, sur les modalités de pratique.
05:23 Il faut que le métier redevienne un métier de conception.
05:27 Lorsqu'on est formé à Bac+5, ça veut dire qu'on est responsable de son activité, de son organisation au sein de la classe.
05:35 Ça veut dire qu'il faut améliorer les conditions dans lesquelles les enseignants exercent,
05:39 exercer par exemple dans des classes à 30 en collège, ou 35, 37 en lycée,
05:45 c'est bien évidemment des conditions qui sont insupportables.
05:47 C'est poser aussi les conditions de l'efficacité de différents dispositifs,
05:52 et je prendrais comme exemple l'inclusion des élèves qui relèvent du handicap par exemple.
05:57 - Où on ne se donne pas les moyens de les accueillir.
06:00 - Clairement, on ne se donne pas les moyens parce qu'accueillir des élèves qui relèvent de troubles
06:05 dans des classes à 30, dans des locaux inadaptés, bien évidemment,
06:10 ça met chacun en position difficile, que ce soit les élèves ou les enseignants.
06:15 - Et donc vous avez mis beau à bout ce matin différentes raisons qui rendent ce métier finalement peu attractif, métier d'enseignant.
06:21 Igor Garnkarzik, secrétaire général du syndicat des personnels de direction de l'éducation nationale,
06:26 merci beaucoup, vous étiez notre invité, France Bleu, ce matin.
06:28 - Merci à vous. - Bonne journée.
06:29 - Merci, interview retrouvé bien sûr sur votre application, ici.

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