Le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, poursuivi pour prise illégale d'intérêts, a été relaxé par la Cour de justice de la République. Le décryptage de notre journaliste Marie-Amélie Lombard-Latune.
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00:00 La Cour déclare M. Dupont-Moretti non coupable et le relaxe.
00:04 C'est par ces mots que le président de la Cour de justice de la République
00:10 a conclu la lecture du jugement cet après-midi.
00:12 À la barre, mains croisées dans le dos,
00:14 le ministre de la Justice avait écouté sans ciller
00:16 face aux magistrats et aux parlementaires.
00:18 Il s'est avancé ensuite lentement vers ses avocats,
00:20 a longuement posé ses mains sur celles de M. Jacqueline Laffont.
00:23 On n'entendait pas ce qu'il disait, mais on percevait vraiment l'émotion.
00:25 Parce que Jacqueline Laffont, c'est une amie proche,
00:27 la femme de l'avocat Pierre Haït qui est mort cette année.
00:29 Puis, le garde des Sceaux a quitté la salle sans déclaration,
00:32 attendu à l'Elysée pour être reçu par Emmanuel Macron.
00:34 Alors bien sûr, la communication n'est pas absente de cette séquence.
00:37 Le président manifeste son soutien immédiat.
00:40 La première ministre déclare que le ministre garde sa place au gouvernement
00:43 et ils le font savoir.
00:45 Au palais de justice cet après-midi,
00:46 il y avait clairement la volonté de la jouer modeste.
00:49 Pas de triomphalisme chez les avocats qui ont appelé à la concorde.
00:53 Aucune manifestation de joie, aucune once de revanche.
00:55 On fait exprès nos poker face, me disait juste avant l'audience
00:58 un membre de l'équipe Dupont-Moretti.
01:00 Alors le ministre, il a eu cette épée de Damoclès sur lui quasiment
01:02 depuis son entrée au gouvernement il y a trois ans.
01:04 Il feignait de l'ignorer, mais il l'a très mal vécu.
01:07 À chaque fois qu'il avait une annonce à faire,
01:09 une mauvaise nouvelle pour lui arrivait de la cégière.
01:11 Les accusateurs le faisaient exprès, a-t-il dit au procès.
01:13 Malgré tout, il a obtenu de très bons budgets pour la justice,
01:16 des embauches, de magistrats, de greffiers.
01:18 Il a un bon bilan, au point qu'un politique de la majorité me disait récemment,
01:21 pour ce quinquennat, finalement, il n'y a plus grand chose à faire pour la justice.
01:24 Il faudra surtout gérer l'existant et peut-être, pourquoi pas,
01:27 lancer un projet de loi sur un sujet de fond.
01:29 Sa place politique dans le dispositif Macron, c'est autre chose.
01:32 On l'a beaucoup vu comme le pitbull présidentiel contre l'ERN.
01:35 Il a marqué des points, il a le sens de la formule populaire au cœur des émeutes,
01:38 il conseille aux parents de tenir leurs gosses,
01:40 il fait un coup d'éclat lundi à l'Assemblée nationale,
01:42 accusant l'ERN de tenir des propos incendiaires sur Crépol.
01:45 Mais il faut se rappeler que sa campagne dans le Nord pour les régionales de 2021
01:48 n'avait pas été un franc succès.
01:50 Bref, il a certes été pris par le virus de la politique,
01:52 mais n'a encore jamais été élu.
01:55 Alors les passes d'armes de la LCGR ont encore accentué la fracture entre juges et politiques.
01:58 Ce fossé, on le sait, il se creuse depuis longtemps.
02:01 Mais cette fois, il s'est personnalisé,
02:03 c'est devenu le match entre Éric Dupond-Moretti et le procureur François Mollins.
02:06 Alors que du temps de Nicolas Sarkozy,
02:08 les petits pois, comme disait le président, n'avaient pas de visage particulier.
02:11 Depuis trois ans, il est plaint des syndicats de magistrats contre le garde des Sceaux.
02:14 Chacun a finalement choisi son camp.
02:16 Des deux côtés, c'est la défiance amplifiée.
02:18 La critique sur le gouvernement des juges ne cesse de monter.
02:21 Aujourd'hui, les syndicats de magistrats qui avaient déclenché la guerre contre le ministre
02:25 sont obligés de faire profil bas.
02:26 Ils vont avoir la gueule de bois pendant un moment, prédit-on.
02:29 Mais personne ne sait jusqu'à quand.
02:31 Sous-titrage ST' 501
02:33 [Musique entraînante diminuant jusqu'au silence]