Grand témoin : Delphine O, ambassadrice et autrice de « La diplomatie féministe est un sport de combat » (Tallandier)
GRAND DÉBAT / Éric Dupond-Moretti : les raisons d'une relaxe
« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski
Mercredi 29 novembre 2023, la Cour de Justice de la République (CJR) a relaxé Éric Dupond-Moretti et l'a jugé non coupable. Le Garde des Sceaux était accusé de « prise illégale d'intérêts ». Il lui était reproché, dans deux affaires distinctes, d'avoir usé de sa fonction de ministre pour régler ses comptes avec quatre magistrats qu'il avait publiquement critiqués lorsqu'il était avocat. Jacqueline Laffont, l'avocate du Ministre de la Justice, a souligné qu'il s'agissait selon elle d'une « victoire du droit et de la séparation des pouvoirs ». La situation de conflit d'intérêts a bien été reconnue par la CJR mais il n'a pas été prouvé que le Ministre en avait connaissance. La Première ministre, Elisabeth Borne, a indiqué dans un tweet se « réjouir » qu'Éric Dupond-Moretti puisse poursuivre ses activités au sein du gouvernement. Éric Dupond-Moretti est-il pour autant lavé de tous soupçons ? Ce verdict est-il une preuve qu'il faut supprimer la CJR ?
Invités :
- Alexis Izard, député Renaissance de l'Essonne
- Charles de Courson, député LIOT de la Marne
- Mathieu Delahousse, grand reporter à l'Obs
- Anne-Charlène Bezzina, constitutionnaliste, maître de conférences en droit public à l'Université de Rouen
GRAND ENTRETIEN / Delphine O : la diplomatie féministe, une arme pour défendre les droits des femmes ?
La diplomatie féministe a pour objectif de placer la question des droits des femmes au coeur de l'action internationale des Etats. Delphine O fait un état des lieux de celle-ci en décrivant le combat diplomatique de haute intensité autour de la liberté de la femme. En partant d'un pays, d'une organisation ou d'une personnalité, elle expose trois combats pour le droit des femmes : la liberté à disposer de son corps, leur place dans les conflits et leur rôle dans la protection de l'environnement. Le combat pour ces droits sera long : « il faudra encore 286 ans avant que toutes les discriminations légales envers les femmes soient supprimées des cadres juridiques nationaux ». Le terme « diplomatie féministe » apparaitra-t-il un jour dans une Convention ou un traité international ?
Grand témoin : Delphine O, ambassadrice et autrice de « La diplomatie féministe est un sport de combat » (Tallandier)
LES AFFRANCHIS
- Cécilia Gabizon, directrice des rédactions de « ETX - Majelan »
- Thomas Lestavel, journaliste indépendant, spécialiste des questions économiques
- « Bourbon express » : Stéphanie Dépierre, journaliste LCP
Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font en
GRAND DÉBAT / Éric Dupond-Moretti : les raisons d'une relaxe
« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski
Mercredi 29 novembre 2023, la Cour de Justice de la République (CJR) a relaxé Éric Dupond-Moretti et l'a jugé non coupable. Le Garde des Sceaux était accusé de « prise illégale d'intérêts ». Il lui était reproché, dans deux affaires distinctes, d'avoir usé de sa fonction de ministre pour régler ses comptes avec quatre magistrats qu'il avait publiquement critiqués lorsqu'il était avocat. Jacqueline Laffont, l'avocate du Ministre de la Justice, a souligné qu'il s'agissait selon elle d'une « victoire du droit et de la séparation des pouvoirs ». La situation de conflit d'intérêts a bien été reconnue par la CJR mais il n'a pas été prouvé que le Ministre en avait connaissance. La Première ministre, Elisabeth Borne, a indiqué dans un tweet se « réjouir » qu'Éric Dupond-Moretti puisse poursuivre ses activités au sein du gouvernement. Éric Dupond-Moretti est-il pour autant lavé de tous soupçons ? Ce verdict est-il une preuve qu'il faut supprimer la CJR ?
Invités :
- Alexis Izard, député Renaissance de l'Essonne
- Charles de Courson, député LIOT de la Marne
- Mathieu Delahousse, grand reporter à l'Obs
- Anne-Charlène Bezzina, constitutionnaliste, maître de conférences en droit public à l'Université de Rouen
GRAND ENTRETIEN / Delphine O : la diplomatie féministe, une arme pour défendre les droits des femmes ?
La diplomatie féministe a pour objectif de placer la question des droits des femmes au coeur de l'action internationale des Etats. Delphine O fait un état des lieux de celle-ci en décrivant le combat diplomatique de haute intensité autour de la liberté de la femme. En partant d'un pays, d'une organisation ou d'une personnalité, elle expose trois combats pour le droit des femmes : la liberté à disposer de son corps, leur place dans les conflits et leur rôle dans la protection de l'environnement. Le combat pour ces droits sera long : « il faudra encore 286 ans avant que toutes les discriminations légales envers les femmes soient supprimées des cadres juridiques nationaux ». Le terme « diplomatie féministe » apparaitra-t-il un jour dans une Convention ou un traité international ?
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LES AFFRANCHIS
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- Thomas Lestavel, journaliste indépendant, spécialiste des questions économiques
- « Bourbon express » : Stéphanie Dépierre, journaliste LCP
Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
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00:00:00 ...
00:00:05 -Bonsoir et bienvenue.
00:00:07 Très heureuse de vous retrouver.
00:00:09 Dans "Ça vous regarde", ce soir,
00:00:11 la diplomatie féministe.
00:00:13 Bonsoir, Delphine O. -Bonsoir.
00:00:15 -Merci d'être notre grand témoin.
00:00:17 Vous êtes ambassadrice itinérante
00:00:19 pour le Quai d'Or,
00:00:20 chargée de défendre le droit des femmes dans le monde.
00:00:23 C'est une action méconnue qui mérite une explication
00:00:27 que vous expliquez dans votre premier livre.
00:00:29 "Sport de combat" chez Taillandier,
00:00:32 tableau géopolitique des droits des femmes
00:00:34 dans le monde attaqué de toutes parts.
00:00:36 Dans la deuxième partie,
00:00:38 "Relaxer", c'est notre grand débat ce soir.
00:00:41 Eric Dupond-Moretti a été blanchi
00:00:43 par la Cour de justice de la République
00:00:45 après 15 jours de procès intenses.
00:00:47 Les juges, en majorité des parlementaires,
00:00:50 n'ont pas suivi l'accusation de prise illégale d'intérêt.
00:00:53 La justice est donc passée,
00:00:55 mais la neutralité même de cette Cour
00:00:57 est toujours contestée ce soir.
00:00:59 On en parle dans un instant sur ce plateau.
00:01:01 Enfin, nos affranchis ce soir,
00:01:03 le billet "Société" de Cécilia Gabizon,
00:01:06 "L'économie" avec Thomas Lestavelle
00:01:08 et "Bourbon express" de Stéphanie Despierres.
00:01:10 Voilà pour le menu.
00:01:12 On y va, Daphné ? -Oui.
00:01:13 -C'est tout de suite.
00:01:14 Musique rythmée
00:01:17 ...
00:01:25 L'horizon politique s'éclaircit pour Eric Dupond-Moretti,
00:01:28 le garde des Sceaux a été reçu ce soir par Emmanuel Macron.
00:01:33 Les juges, principalement des parlementaires
00:01:36 de la Cour de justice de la République,
00:01:38 n'ont pas retenu l'accusation de prise illégale d'intérêt
00:01:41 portée contre lui par des syndicats de magistrats.
00:01:44 Il est donc relaxé.
00:01:45 On va revenir dans le détail
00:01:47 sur cette décision extrêmement attendue
00:01:50 et sur les leçons qu'on peut tirer
00:01:52 de ce procès hors normes pour l'avenir.
00:01:55 Bonsoir, Alexis Isard. -Bonsoir.
00:01:57 -Vous êtes député renaissance de l'Essonne,
00:01:59 porte-parole de votre groupe parlementaire
00:02:02 à l'Assemblée nationale.
00:02:04 Charles de Courson,
00:02:05 ravi de vous accueillir, député Lyot de la Marne,
00:02:08 ancien membre de la Cour de justice de la République,
00:02:11 ce qui nous aidera à comprendre le secret des délibérés.
00:02:14 Comment ça se passe ? Qu'est-ce qu'on vote ?
00:02:16 Comment ça se passe concrètement ?
00:02:18 Anne-Charlene Bézina, merci d'être avec nous.
00:02:21 Vous êtes constitutionnaliste et maître de conférences
00:02:24 en droit public à l'université de Rouen.
00:02:26 Mathieu Delahousse, merci d'être là.
00:02:28 Vous êtes grand reporter à l'Obs
00:02:30 et vous avez suivi l'intégralité de ces 15 jours de procès
00:02:33 inédits pour un ministre de la Justice en exercice.
00:02:36 Vous nous direz s'il y a eu un moment de bascule
00:02:39 ou pas pour les juges.
00:02:41 Delfinaud, vous intervenez quand vous voulez,
00:02:44 si vous le souhaitez.
00:02:45 On commence par ce jugement,
00:02:47 ausculté de très près par Stéphane Blakowski.
00:02:50 C'est le chrono Blakow.
00:02:51 ...
00:02:54 Je me retourne pour vous accueillir.
00:02:56 - Je vous invite à faire la même chose.
00:02:59 - A toutes et tous.
00:03:00 J'avais prévu une accroche en disant "acquittator" a été acquitté.
00:03:03 Ca ne marche pas, parce qu'il a été relaxé.
00:03:06 J'ai appris qu'on était acquitté devant une cour d'assises.
00:03:09 Quand c'est la Cour de justice de la République
00:03:12 qui reconnaît votre innocence, vous êtes relaxé.
00:03:14 Petit rappel des faits, pour ceux qui auraient oublié,
00:03:17 Eric Dupond-Moretti était accusé de prise illégale d'intérêt.
00:03:21 C'est-à-dire d'avoir profité d'être nommé ministre de la Justice
00:03:24 pour être en conflit avec un ministre extra
00:03:26 lorsqu'il était avocat.
00:03:28 Lors du procès, vous voyez que le procureur
00:03:31 avait demandé au juge de reconnaître coupable
00:03:34 le ministre de la Justice.
00:03:35 Il avait même requis un an de prison avec sursis.
00:03:38 Il a donc été désavoué par les juges,
00:03:40 15 juges dont 12 sont des parlementaires.
00:03:43 On aura peut-être l'occasion de reparler
00:03:45 de la composition de la CGR.
00:03:47 Mais en attendant,
00:03:48 quand on lit les motivations du jugement,
00:03:52 on se rend compte que la décision de la CGR
00:03:54 est assez subtile, en tout cas à mes yeux.
00:03:57 En effet, les juges ne contestent pas
00:03:59 qu'il y ait eu une prise illégale d'intérêt,
00:04:01 mais ils n'ont pas condamné le ministre de la Justice
00:04:04 parce qu'il n'avait pas fait exprès.
00:04:06 Je dis ça comme ça, c'est pas le bon terme.
00:04:08 Comment c'est formulé par la justice,
00:04:11 c'est jamais clair.
00:04:12 "La connaissance de l'existence de situations objectives
00:04:15 "de conflits d'intérêt par les différentes autorités
00:04:18 "appelées à le conseiller
00:04:20 "ne déplace pas la conscience suffisante
00:04:22 "qu'il pouvait avoir de commettre un délit."
00:04:25 Je traduis ça.
00:04:26 On lui a dit à plusieurs reprises
00:04:28 qu'il y avait des risques de conflits d'intérêt,
00:04:30 mais il n'en était pas conscient,
00:04:32 donc on ne saurait le condamner.
00:04:34 C'est ce qui est dit plus formellement
00:04:36 par la suite dans les mêmes motivations.
00:04:39 "À défaut de caractérisation de l'élément intentionnel
00:04:42 "de délit de prise illégale d'intérêt,
00:04:44 "les infractions ne sont pas constituées,
00:04:46 "puisque c'est pas intentionnel,
00:04:49 "et c'est pas un délit d'intérêt."
00:04:50 On imaginait qu'après cette bonne nouvelle,
00:04:53 Eric Dupond-Moretti viendrait devant la presse,
00:04:56 se réjouir, et vous verrez que ce n'est pas le cas.
00:04:58 On a été un peu surpris, alors que sa sortie...
00:05:01 C'était un peu lent, parce que...
00:05:03 On imagine qu'il va se précipiter sur les micros,
00:05:06 et pas du tout, en réalité.
00:05:08 Il passe royalement devant la presse
00:05:10 sans jeter un regard au journaliste.
00:05:12 Il sera ce soir aux 20h de France 2,
00:05:14 mais à la sortie de l'audience,
00:05:16 son avocate s'exprimait en l'écoute.
00:05:18 -C'est évidemment une satisfaction,
00:05:20 et je dirais même une émotion énorme.
00:05:23 La Cour de justice de la République a jugé
00:05:27 que le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti,
00:05:30 était innocent.
00:05:32 -De leur côté, l'avocat qui défendait
00:05:34 les syndicats de magistrats qui ont porté plainte
00:05:37 contre le ministre à l'origine,
00:05:39 cherchait un motif de satisfaction dans la décision du tribunal.
00:05:42 Ils constatent que les juges ont reconnu
00:05:44 qu'il y avait une prise illégale d'intérêt,
00:05:47 un conflit d'intérêt entre le ministre et les magistrats,
00:05:50 contre lequel il a ouvert une enquête.
00:05:52 S'il n'a pas été condamné, c'est que la Cour de justice
00:05:56 fonctionne mal.
00:05:57 -La procédure devant la Cour de justice de la République
00:06:00 est une procédure imparfaite.
00:06:03 Nous souhaitons pour l'avenir
00:06:05 que cette imperfection de notre système juridique
00:06:08 pour une Cour de justice qui est essentielle
00:06:10 au fonctionnement de la République soit corrigée.
00:06:13 -Bref, voilà.
00:06:14 Le dossier sur la suppression de la Cour de justice
00:06:17 de la République refuse son apparition.
00:06:19 Elle avait déjà été envisagée par François Hollande
00:06:22 et par Emmanuel Macron.
00:06:24 Est-ce que le débat est relancé ?
00:06:25 -Evidemment qu'il est relancé.
00:06:27 Et dès ce soir, merci beaucoup, Stéphane.
00:06:30 Je vais commencer avec vous, Mathieu Delahousse.
00:06:32 Vous avez suivi ce procès de près.
00:06:34 Déjà, est-ce que vous êtes surpris par ce jugement ?
00:06:37 -Non, on n'est pas surpris par le jugement pour deux raisons.
00:06:41 Il y avait une forme d'accusation
00:06:43 qui était soutenue de façon très forte
00:06:45 contre Eric Dupond-Moretti,
00:06:47 mais lui avait une stratégie de défense très efficace
00:06:50 qui se résume par un seul élément,
00:06:52 "j'ai suivi mon administration",
00:06:54 une phrase qu'il a répétée à plusieurs reprises,
00:06:57 et qui, en termes de responsabilité pénale,
00:06:59 était une forme d'évidence...
00:07:02 -"J'ai suivi mon administration",
00:07:04 pour bien comprendre, l'administration judiciaire
00:07:07 lui demandait de diligenter ces enquêtes
00:07:09 contre les 4 magistrats.
00:07:11 -Le deuxième aspect, qui fait partie
00:07:13 de l'une des particularités de la Cour de justice de la République,
00:07:17 c'est qu'effectivement, dans la salle,
00:07:19 nombreuses étaient les personnes qui avaient eu des rumeurs
00:07:23 qui faisaient que ce jugement commençait
00:07:26 à transpercer par les murs de cette maison,
00:07:29 par les murs du palais du Luxembourg,
00:07:31 également, sur une décision qui serait favorable
00:07:35 aux ministres.
00:07:36 Donc la surprise n'a pas été une stupéfaction énorme
00:07:39 dans la salle. -Deux semaines.
00:07:41 Il peut se passer beaucoup de choses.
00:07:43 On a parlé du procureur
00:07:45 près la Cour de cassation, Rémietz,
00:07:47 on a parlé de Jean Castex, qui est venu aussi.
00:07:49 Est-ce qu'il y a eu un moment de bascule ?
00:07:52 Est-ce qu'il y a eu un tournant
00:07:53 qui ont emporté les décisions des juges ?
00:07:56 -Le...
00:07:57 La construction de l'audience, en réalité,
00:08:00 a montré ce qui s'était déroulé au niveau des magistrats
00:08:03 qui ont été la cible de ces poursuites disciplinaires
00:08:06 et qui l'ont été, effectivement,
00:08:08 avec le sentiment très fort,
00:08:10 et que personne ne pourra leur enlever,
00:08:12 que ces poursuites étaient diligentées
00:08:14 en raison de ce qu'ils avaient fait
00:08:16 contre l'avocat Eric Dupond-Moretti
00:08:18 ou contre ses clients.
00:08:20 Mais la deuxième partie,
00:08:21 ça a été la défense d'Eric Dupond-Moretti.
00:08:24 Il s'était peu exprimé jusque-là.
00:08:26 Comme je l'ai écrit dans les comptes rendus dans l'Obs,
00:08:30 on présente souvent cette affaire comme binaire.
00:08:32 C'est soit un règlement de compte des magistrats
00:08:35 contre leur ministre, soit, au contraire,
00:08:38 un ministre qui aurait tout manipulé à sa main.
00:08:40 Il y a une troisième voie, plus complexe,
00:08:43 qui est peut-être moins sédivisante
00:08:45 dans la dramaturgie romanesque
00:08:46 qui entoure Eric Dupond-Moretti,
00:08:48 mais c'est, finalement, une forme d'incompétence,
00:08:51 d'impréparation que lui-même a revendiquée
00:08:54 et que l'on retrouve dans le jugement d'aujourd'hui.
00:08:57 -Ca, il faut comprendre. -Bien sûr.
00:08:59 Je veux juste la raconter. -Allez-y.
00:09:01 -Celle de dire, j'étais avocat,
00:09:04 j'arrive ministre de la Justice
00:09:07 de façon assez surprenante pour chacun,
00:09:09 mais y compris pour moi-même,
00:09:11 et je n'ai pas eu le temps de me préparer
00:09:13 à cette discipline gouvernementale sur les conflits d'intérêts,
00:09:16 raison pour laquelle je n'ai pas pris de précaution,
00:09:19 pas pris de décret de déport.
00:09:21 -Décret de déport qui voudrait dire qu'il aurait pu,
00:09:25 il aurait pu ne pas décider lui-même
00:09:27 en tant que garde des Sceaux,
00:09:29 parce qu'il avait porté plainte avant de l'être
00:09:32 garde des Sceaux pour cette affaire d'écoute,
00:09:34 il était... -Absolument.
00:09:36 -Ces factures détaillées avaient été demandées
00:09:39 par les magistrats, et donc, il aurait dû,
00:09:41 et ça, il l'a reconnu, plutôt se déporter,
00:09:44 demander à Matignon de prendre la décision à sa place.
00:09:47 -Voilà. Le raisonnement qui est, encore une fois,
00:09:50 le raisonnement de la défense, qui était assez nouveau,
00:09:53 mais qui a été suivi par la Cour de justice de la République,
00:09:56 c'est de mettre en avant cette forme d'ignorance
00:09:59 du danger du conflit d'intérêts qui pouvait se présenter
00:10:03 et ne pas avoir pris de précaution.
00:10:05 Quand on l'entend à l'audience, on peut s'en étonner.
00:10:08 L'accusation, qui est portée par le procureur général Rémy Haïtz,
00:10:13 ne croit pas du tout à cette hypothèse.
00:10:15 On est au ministère de la Justice,
00:10:17 on est avec l'un des avocats les plus talentueux du moment,
00:10:20 on est avec un secrétariat général du gouvernement,
00:10:23 on est avec une autre autorité de la transparence
00:10:26 de la vie politique qui existe depuis 10 ans,
00:10:29 malgré tout, la Cour de justice de la République
00:10:32 a reconnu ce raisonnement comme étant celui
00:10:34 qui devait arriver et aboutir à la relax.
00:10:37 -Charles de Courson, le conflit,
00:10:39 la situation de conflit d'intérêts a bien été reconnue
00:10:42 par la justice, mais pas la prise illégale d'intérêts,
00:10:45 parce qu'Éric Dupond-Moretti n'aurait pas profité
00:10:48 de cette situation pour régler ses comptes
00:10:51 avec les quatre magistrats qu'on a vus,
00:10:53 trois du PNF, un juge d'instruction,
00:10:55 en tout cas preuve de l'intentionnalité,
00:10:58 n'a pas été faite.
00:10:59 -C'est même plus compliqué que ça.
00:11:01 Puisque ce qui est incompréhensible
00:11:03 par un citoyen de base,
00:11:05 c'est de reconnaître que le conflit d'intérêts
00:11:09 a été constitué,
00:11:10 mais le fait qu'il n'avait pas suffisamment conscience
00:11:16 de la prise illégale d'intérêts,
00:11:19 il est relaxé.
00:11:21 Vous avouerez qu'expliquer ça à l'opinion publique,
00:11:25 c'est quand même pas simple.
00:11:27 Et je pense que cette affaire,
00:11:29 quelle que soit son issue,
00:11:32 affaiblit encore un peu plus l'image de la justice
00:11:36 dans notre pays
00:11:37 et affaiblit la République.
00:11:40 Et je suis de ceux qui ont toujours plaidé
00:11:44 pour la suppression de la CGR,
00:11:46 puisque qu'est-ce que va dire l'opinion publique ?
00:11:49 C'est un arrangement entre amis politiques,
00:11:51 comme d'habitude, et on a entendu ça
00:11:54 sur X décisions de la CGR.
00:11:59 -On a envie de savoir, et je continue le tour de table,
00:12:02 comment se passent les délibérations.
00:12:04 Vous avez siégé de nombreuses années
00:12:06 dans cette cour de justice de la République
00:12:09 comme député magistrat.
00:12:10 Il y a des votes à la fin pour décider de ce qu'est le jugement.
00:12:14 Comment ça se passe concrètement ?
00:12:16 -Ca se passe en deux temps,
00:12:18 c'est-à-dire il y a les accusations qui sont portées.
00:12:21 Donc on fait un premier vote sur ce qu'on appelle...
00:12:25 Est-il responsable de ce dont on l'accuse ?
00:12:28 Voilà, premier vote.
00:12:30 Alors, grande discussion, chacun donne son opinion,
00:12:33 on tourne en les 15, donc ça prend du temps,
00:12:35 et après, on vote.
00:12:37 Voilà.
00:12:38 S'il y a une majorité, il est reconnu coupable.
00:12:41 S'il y a une majorité en sens inverse,
00:12:43 on va pas plus loin.
00:12:44 S'il est reconnu coupable, deuxième phase de la manoeuvre,
00:12:47 le quantum de la peine.
00:12:49 Alors, comme il y a plusieurs peines,
00:12:51 l'inégibilité, la prison,
00:12:55 des amendes, voilà,
00:12:57 alors pour chacune d'entre elles, on discute
00:12:59 et après, on vote en décroissant de mémoire,
00:13:03 et dès qu'il y a une majorité, voilà,
00:13:06 on arrête le curseur.
00:13:07 Par exemple, on dit qu'on va le condamner à la prison,
00:13:12 alors discussion avec sursis ou sans sursis,
00:13:14 et donc, on dégrade, certains disent un an,
00:13:17 donc on fait le tour de table.
00:13:19 -Donc c'est des votes,
00:13:20 il y a pas une sorte de consensus qui doit émerger ?
00:13:23 C'est intéressant de le savoir.
00:13:25 -Non, mais le délibérer, il est secret.
00:13:27 -Bien sûr. -Et on fait le tour,
00:13:29 dès 15, chacun donne son opinion.
00:13:31 Ce qui est drôle, c'est que parfois,
00:13:33 les opinions des uns rétroagissent après sur les autres
00:13:37 lors des votes successifs, et on vote comme ça.
00:13:39 -Celui qui a parlé avant peut avoir une influence
00:13:42 sur celui d'après. -Il y a toute la rédaction.
00:13:45 Là, ça prend du temps, on se reunit pour bien vérifier
00:13:48 que c'est bien ce qu'a décidé la CGR.
00:13:50 -Avec Sidi Bizarre.
00:13:52 C'est la justice qui a gagné,
00:13:54 c'est la présomption d'innocence qui a gagné, aujourd'hui,
00:13:57 pour vous ? C'est le soulagement de la Macronie.
00:13:59 -La présomption d'innocence s'est regrandie de cette affaire-là
00:14:03 parce que pendant de nombreux mois, il y a eu une pression
00:14:06 pour faire démissionner ce ministre qui ressort relaxé.
00:14:09 Il faut rappeler ce que c'est que cette affaire.
00:14:12 C'est un ministre qui est alors qu'un simple avocat,
00:14:15 qui subit de la part du PNF,
00:14:18 qui, d'ailleurs, un rapport vient après dire
00:14:21 que la manière dont ils ont agi... -Le PNF.
00:14:23 -Le PNF, dont ils ont agi était, si ce n'est illégal, anormal,
00:14:27 pour récupérer ce qu'on appelait les FADED,
00:14:29 ces relevés téléphoniques.
00:14:31 Savoir ce que faisait le ministre pour suivre une affaire.
00:14:34 Le ministre porte plainte quand il découvre ça.
00:14:37 -Il est avocat à l'époque. -Il est avocat,
00:14:39 on est en juin 2020. Un mois après,
00:14:41 il devient gardé, ce que vous l'avez dit,
00:14:44 peut-être à la surprise de l'opinion publique.
00:14:46 Il devient ministre. Il se demande
00:14:48 si c'est bien raisonnable de garder la plainte.
00:14:51 Il se demande de retirer sa plainte.
00:14:53 Il s'avère qu'il récupère sur son bureau ce rapport,
00:14:56 qu'il n'avait pas demandé, mais il dit qu'effectivement,
00:14:59 il était victime d'une affaire assez anormale.
00:15:02 Ce qu'on lui reproche, ici, et on lui demandait
00:15:05 de démissionner pour ça, c'est qu'il était victime
00:15:08 d'un corps de magistrat qui voulait le faire tomber.
00:15:10 Il faut le dire, parce que pendant de nombreux mois,
00:15:13 on a voulu faire tomber le garde des Sceaux.
00:15:16 Aujourd'hui, il est relaxé. C'est une bonne chose,
00:15:19 comme son innocence, de dire que cet arrêt,
00:15:21 cette décision, elle était importante,
00:15:24 et aujourd'hui, elle est importante pour les Français.
00:15:27 -Mon cher collègue, c'est tout à fait inexact,
00:15:29 ce que vous dites, pour une raison très simple,
00:15:32 c'est que les magistrats intéressés ont été...
00:15:35 reconnus absolument pas coupables de ce dont le garde des Sceaux,
00:15:41 du temps où il était avocat, les a accusés.
00:15:44 -C'est une autre histoire. -Non.
00:15:46 -Le rapport dit bien... -Vous dites que c'est un complot
00:15:49 contre les magistrats. -Je n'ai pas dit "complot".
00:15:52 C'est pas ce que j'ai dit. Le rapport sur le PNF visait bien
00:15:55 et montrait bien qu'il y avait un dysfonctionnement
00:15:58 dans les méthodes utilisées à l'emploi de Dupond-Moreti.
00:16:01 -Alors, Anne-Charlene Benizat,
00:16:03 Madina, pardon, est-ce que vous avez l'impression
00:16:06 que cette justice, qui est bien expliquée
00:16:08 dans son fonctionnement par Charles de Courson,
00:16:11 sort grandie, sort gagnante de cet épisode ?
00:16:13 -Je crois que c'est un des problèmes ontologiques
00:16:17 de la CJR et peut-être que si on remonte dans l'histoire
00:16:20 et dans le droit constitutionnel, c'est presque un problème
00:16:23 épistémologique avec cette idée de juger le politique.
00:16:26 On est dans quelque chose qui, de toute façon,
00:16:29 aux yeux de l'opinion, a beaucoup de choses
00:16:31 qui peuvent apparaître insatisfaisantes,
00:16:33 notamment parce qu'il y a ce problème
00:16:35 d'accessibilité au droit.
00:16:37 Ici, on nous parle d'éléments intentionnels.
00:16:40 Tout le monde ne sait pas qu'un délit est constitué
00:16:43 d'un élément matériel, la situation de fait,
00:16:45 un élément intentionnel, est-ce que, moralement,
00:16:48 vous avez l'intention de commettre le délit ?
00:16:51 Cette complexité apparaît dans ce système de justice.
00:16:54 Mais il y a autre chose. Le problème de la CJR,
00:16:56 c'est de faire une place aux politiques dans le jugement.
00:16:59 Vous avez employé tout à l'heure, et désigné,
00:17:02 monsieur de Courson, le mot "magistrat député"
00:17:05 ou "député magistrat".
00:17:06 On voit bien dans cette coloration
00:17:08 à quel point on a quelque chose qui peut apparaître
00:17:11 pour les citoyens un peu anormal, à deux vitesses, etc.
00:17:15 Je crois que la justice en sort grandit aujourd'hui
00:17:17 par rapport au fait qu'une décision de justice
00:17:20 a été rendue et on pourra apaiser les esprits sur cette question,
00:17:23 mais la vie politique ne l'est pas.
00:17:26 Déjà, c'est une atteinte à l'honneur,
00:17:28 il y a quelque chose qui fait qu'aujourd'hui,
00:17:30 cette affaire a existé.
00:17:32 On a vu un ministre en justice,
00:17:34 et quelle que soit la décision...
00:17:36 -Elle laissera des traces pour vous.
00:17:38 -Notamment parce qu'on est dans quelque chose
00:17:40 de feuilletonesque. Le délit de prise illégale d'intérêt,
00:17:44 un avocat qui devient ministre de la Justice,
00:17:46 il faut savoir que c'est un ministère particulier
00:17:49 comme celui de l'Education,
00:17:50 où vous avez à diriger les juges, mais aussi les avocats,
00:17:53 et que les deux familles ne s'entendent guère.
00:17:56 L'un joue toujours le jeu contre l'autre.
00:17:58 -La situation a été ubule.
00:18:00 Le procureur général de la Cour de cassation
00:18:03 qui va porter l'accusation à son ministre de tutelle,
00:18:06 sachant qu'il... -Qu'il l'a nommé.
00:18:08 -Il l'a nommé, qu'il a un pouvoir de décision
00:18:11 sur les nominations. On n'avait jamais vu ça.
00:18:13 Déjà, démocratiquement, ça ne pose pas un problème.
00:18:16 -Ca posait un problème dès le départ,
00:18:18 et ça en pose un sur la légitimité
00:18:20 de la Cour de justice de la République.
00:18:22 Il ne faut pas forcément s'égarer
00:18:24 sur toutes les sous-affaires qu'on a voulu exploiter
00:18:27 comme des écrans de fumée
00:18:29 pour la défense des règles du Pomerétie
00:18:31 dans ce dossier.
00:18:33 Il faut aussi reconnaître que c'est une décision
00:18:36 qui doit s'imposer à nous tous.
00:18:38 Les magistrats plaignants,
00:18:40 blanchis par le Conseil supérieur de la magistrature,
00:18:43 ont accepté de participer, entre guillemets,
00:18:45 à ce jeu judiciaire.
00:18:46 La décision a été rendue par un ministre
00:18:49 qui a accepté de jouer sur ce jeu judiciaire.
00:18:51 La décision qui a été rendue,
00:18:53 vous le connaissez, vous avez occupé ce poste
00:18:55 par les juges parlementaires,
00:18:57 qui se mettaient en robe, ça a été votre cas.
00:19:00 -Qui prêtaient serment. -Qui ont prêté serment
00:19:02 et sont désignés par les bureaux du Sénat.
00:19:05 Cette décision a été rendue.
00:19:06 Pour terminer, cette idée est importante.
00:19:09 La Cour de justice de la République a été contestée
00:19:12 par les magistrats. La décision, ce soir, est rendue,
00:19:15 et c'est comme ça qu'elle est rédigée par le magistrat
00:19:18 et qu'elle a été adoptée lors du vote
00:19:20 par les parlementaires et les magistrats,
00:19:23 au nom du peuple français, avec des tas d'imperfections.
00:19:26 Elle s'impose dans son côté binaire.
00:19:28 Aujourd'hui, on était soit relaxé, soit condamné, soit ministre.
00:19:31 -Elle est légale, inscrite dans nos textes constitutionnels.
00:19:35 -C'est vrai que dans ces particularités multiples,
00:19:38 au-delà de ce constat que la décision s'impose,
00:19:41 on est obligé de s'interroger sur...
00:19:43 -Sur cette Cour. -La décision qui a été rendue,
00:19:46 sur cette composition de la Cour, et cette situation totalement
00:19:49 inédite et ubuesque d'avoir un ministre qui est venu
00:19:53 en exercice répondre avec des avocats
00:19:55 face à un procureur général qu'il avait choisi.
00:19:58 C'est lui qui l'a choisi, Eric Dupond-Moretti,
00:20:01 le procureur généraliste, pas lui qui a signé le décret
00:20:04 parce qu'il y avait une décision de déport sur Matignon,
00:20:07 mais on est dans quelque chose
00:20:09 qui est dans une anormalité fascinante,
00:20:11 mais tout le monde a accepté de jouer le jeu,
00:20:14 le prévenu, les plaignants, la magistrat,
00:20:16 qui n'avaient même pas le droit d'être parti civil,
00:20:19 donc ils étaient dans une place... -C'est les règles de jeu
00:20:22 particulière de la Cour de justice. -On était dans un jeu inédit,
00:20:25 mais tout le monde a accepté. Cette décision s'impose à tous
00:20:29 au nom du peuple français, avec mille imperfections
00:20:31 qu'il faut débattre pour ce jugement.
00:20:34 -On y va, sur l'avenir, puisqu'on a tous bien compris,
00:20:37 c'est la Cour de justice de la République
00:20:39 qui est pointée du doigt par l'opposition.
00:20:41 Des réactions avec Elsa Mondin-Gavay.
00:20:44 On reprend le débat.
00:20:45 ...
00:20:49 -Dès l'annonce de la relaxe du garde des Sceaux,
00:20:52 la gauche réclame la suppression
00:20:54 de la Cour de justice de la République.
00:20:56 -Cette juridiction est suspecte par nature, par construction.
00:21:00 C'est une forme de gigantesque prise illégale d'intérêt en soi.
00:21:03 -Le jugement a été donné, il sera respecté,
00:21:06 mais est-ce qu'il rétablit la confiance ? J'en doute.
00:21:09 -Des parlementaires qui jugent un ministre,
00:21:11 ça renvoie à l'entre-soi.
00:21:13 -Principal Grieve, donc, sa composition même,
00:21:15 trois magistrats et 12 parlementaires,
00:21:18 députés et sénateurs.
00:21:20 Pour la droite, pas de décision active,
00:21:22 mais une réflexion plus globale.
00:21:24 -Faut-il, comme ça, à chaud,
00:21:26 décider qu'il faut mettre à terre
00:21:28 la Cour de justice de la République ?
00:21:30 Je n'en suis pas certain. Qu'il faille travailler
00:21:33 profondément à restaurer la confiance
00:21:35 entre les citoyens et les institutions,
00:21:37 y compris l'institution judiciaire, c'est évident.
00:21:40 -Dans la majorité, on considère que c'est la décision
00:21:43 de la Cour de justice de la République
00:21:45 que les oppositions n'acceptent pas.
00:21:48 -On n'aurait pas eu le même son de cloche
00:21:50 si Eric Dupond-Moretti avait été condamné.
00:21:52 On a face aux oppositions des mauvais joueurs.
00:21:56 -Pour autant, on rappelle que la suppression
00:21:58 de la Cour de justice de la République
00:22:00 était une promesse d'Emmanuel Macron.
00:22:03 -La Constitution a été prévue en 2018,
00:22:05 mais les équilibres politiques n'ont pas été trouvés.
00:22:08 À l'avenir, peut-être que ce sujet peut revenir sur la table.
00:22:11 Si tel est le cas, je ferai partie de ceux
00:22:14 qui plaideront pour changer le système.
00:22:16 -Emmanuel Macron, François Hollande avant lui,
00:22:18 tous les deux avaient promis de supprimer
00:22:21 la Cour de justice de la République sans y arriver.
00:22:24 Pour le faire, il faut une réforme de la Constitution
00:22:27 et donc un large accord politique.
00:22:28 -Alexis Isard, promesse présidentielle.
00:22:31 C'est pas le premier Emmanuel Macron.
00:22:33 Tous ont voulu quasiment la supprimer.
00:22:35 Personne ne l'a fait.
00:22:37 Honnêtement, c'est peine perdue d'ouvrir ce chantier ?
00:22:40 C'est trop tard ? -Non, je pense ni que ce soit trop tard
00:22:43 ni que ce soit peine perdue.
00:22:44 Il faut faire attention à la Cour de justice de la République.
00:22:48 Il y a une séparation des pouvoirs.
00:22:50 Il faut faire attention à ne pas déséquilibrer
00:22:52 cette séparation. -Mais même le président
00:22:55 estime que sa composition avec les parlementaires
00:22:58 jette le soupçon sur la partialité.
00:23:00 -De quel soupçon on parle ?
00:23:01 On parle d'une composition de 15 magistrats,
00:23:04 dont 12 parlementaires.
00:23:05 -On va revoir la composition.
00:23:07 -6 sont à l'Assemblée nationale, 6 sont au Sénat.
00:23:10 Dans ces 12 parlementaires, 5 sont de la majorité
00:23:13 que je représente, c'est-à-dire que la majorité
00:23:16 est extrêmement minoritaire dans cette Assemblée.
00:23:19 -Un peu moins de la moitié.
00:23:20 -Vous avez des magistrats français insoumis,
00:23:23 des magistrats Rassemblement national,
00:23:25 dont on ne peut pas dire que le garde des Sceaux
00:23:28 soit en besoin de s'entenduer avec eux.
00:23:30 -On pourrait imaginer que l'opposition,
00:23:32 uniquement par opposition partisane,
00:23:35 soit impartiale. -Je peux vous dire que oui.
00:23:37 -Est-ce qu'il n'est pas là, le vice ?
00:23:39 -On voit bien que là, malgré les oppositions,
00:23:42 les magistrats parlementaires et les magistrats
00:23:44 ont jugé sur le fond cette affaire-là.
00:23:47 Je trouve qu'elle a bien fonctionné.
00:23:49 Je suis du côté de la majorité et je suis plutôt heureux
00:23:52 de la relax de notre garde des Sceaux,
00:23:54 mais force est de constater que nous n'avions pas
00:23:57 de réaction dans ces 15 magistrats,
00:23:59 et pour autant, ils ont jugé la relax d'un ministre
00:24:02 qu'ils décriaient. -Charles de Courson,
00:24:04 s'il faut la supprimer, on sait que vous militez,
00:24:07 par quoi la remplacer ? -Il faut rappeler
00:24:09 qu'elle a été créée en 93.
00:24:11 Elle a été créée en 93 sur l'affaire du sang contaminé.
00:24:15 Jusqu'à l'époque, les ministres n'étaient responsables
00:24:18 que devant la haute cour de justice.
00:24:20 Et la haute cour de justice,
00:24:22 elle n'était condamnable que si elles avaient commis
00:24:25 un crime de haute trahison. La haute cour,
00:24:28 elle n'a jamais fonctionné, elle ne peut pas fonctionner.
00:24:31 Donc on a créé, pour le Premier ministre
00:24:33 et les ministres, sept cours de justice de la République,
00:24:37 après beaucoup de débats.
00:24:39 Moi, j'ai participé. J'ai fait partie des premiers
00:24:42 sur le sang contaminé, mais j'étais juge suppléant.
00:24:45 Je peux en parler, car j'ai prêté serment
00:24:47 de ne jamais révéler le secret des délibérés.
00:24:50 Mais je n'ai pas participé aux délibérés,
00:24:52 car j'étais juge suppléant.
00:24:54 Et ce qui m'a frappé tout de suite,
00:24:56 c'est le caractère politique.
00:24:58 Et moi, ma conviction... -Exemple ?
00:25:02 -Elle est faite... -Pour le reprendre ?
00:25:04 -Non, mais je n'irai rien.
00:25:05 Je pourrais vous raconter qu'en 93,
00:25:08 elle est constituée, on se réunit pour le débat,
00:25:13 qui était quand même une affaire très difficile,
00:25:15 du sang contaminé,
00:25:17 et des collègues de la minorité de l'époque
00:25:21 nous disant, à tous,
00:25:23 "De toute façon, on votera contre la responsabilité
00:25:26 "et vous serez bien contents, quand ce sera votre tour,
00:25:29 "qu'on fasse la même chose."
00:25:31 C'est pas une justice.
00:25:33 Et de toute façon, oui, je peux en témoigner.
00:25:36 -Précisément. -Je suis le dernier survivant
00:25:38 de la cour de justice de 93.
00:25:41 Il n'y en a pas d'autre.
00:25:42 Je peux le dire aujourd'hui.
00:25:44 Je ne trahis pas le secret des délibérés.
00:25:46 On n'était même pas encore rentrés,
00:25:49 j'allais dire, dans l'hémicycle, à l'époque.
00:25:52 Et donc, moi, ma position, elle n'est pas celle-là.
00:25:56 Elle est la composition.
00:25:58 Le problème, c'est la composition.
00:26:00 Je pense qu'il faut que les ministres y soient jugés
00:26:03 dans des conditions de droit commun,
00:26:05 c'est-à-dire de conserver les deux mécanismes...
00:26:08 -Classiques. -...de tri,
00:26:10 pour éviter...
00:26:12 Parce que si tout le monde...
00:26:14 Il peut y avoir des milliers de recours.
00:26:16 Qu'on maintienne les deux institutions
00:26:18 qui sont faites pour trier
00:26:22 les vraies questions, voilà,
00:26:24 et qu'on renvoie ça devant les tribunaux de droit commun.
00:26:27 En plus, on a un problème dont on n'a pas parlé,
00:26:30 parce que dans le cas présent, il ne se posait pas,
00:26:33 c'est le problème des membres des cabinets ministériels
00:26:36 par rapport aux ministres.
00:26:38 Les membres des cabinets ministériels
00:26:40 relèvent du droit commun,
00:26:41 et on a vu parfois des décisions contradictoires
00:26:44 entre les décisions de la juridiction de droit commun,
00:26:47 qui allait condamner le directeur de cabinet
00:26:50 à signer des actes irréguliers, etc.,
00:26:52 et devant la Cour de justice,
00:26:55 relax du ministre.
00:26:57 Ca, c'est pas possible.
00:26:58 -Il faut une réforme constitutionnelle
00:27:01 pour changer cette Cour,
00:27:03 autant dire un peu "mission impossible"
00:27:05 dans l'état de la composition de l'Assemblée nationale,
00:27:08 mais quelles sont les pistes ? -Pas forcément.
00:27:11 -On peut faire consensus.
00:27:12 -Sur ce seul problème, vous voyez...
00:27:14 -Sur ce seul problème, on pourrait trouver
00:27:17 une 3/5 des parlementaires.
00:27:19 -Il y a beaucoup de corans politiques
00:27:20 qui pensent qu'il ne faut plus qu'il y ait
00:27:23 de juge parlementaire. -Anne-Charlene Bézina.
00:27:26 -La Cour de justice de la République
00:27:28 fait l'unanimité contre elle.
00:27:29 Néanmoins, il faut pas non plus avoir le sentiment
00:27:32 qu'on est passé de tout ou rien.
00:27:34 Vous rappelez l'existence de la haute Cour de justice,
00:27:37 composée exclusivement en parlementaire.
00:27:40 -Et qui n'a jamais fonctionné. -Voilà.
00:27:42 -Et qui était faite pour ne pas fonctionner.
00:27:44 -On est partis de rien, on a eu pas grand-chose,
00:27:47 et peut-être qu'on pourra avoir quelque chose.
00:27:50 -De quel pays pourrait-on s'inspirer ?
00:27:52 On pourrait éviter qu'on tombe dans la judiciarisation.
00:27:55 -Il faut avoir en tête que la France ait une histoire
00:27:58 particulière avec la responsabilité politique
00:28:01 et pénale de ses gouvernants.
00:28:03 C'est 1791, c'est une autre manière de faire de la politique,
00:28:07 à l'idée que les mandats ne soient pas protégés.
00:28:09 Vous avez les systèmes latino-américains
00:28:12 où le président de la République est attrait en justice.
00:28:15 C'est un système que la France n'a jamais souhaité faire sien.
00:28:18 Il y a une très forte conception de la séparation des pouvoirs.
00:28:22 Néanmoins, cette séparation des pouvoirs a aussi
00:28:25 un autre corollaire constitutionnel,
00:28:27 le principe d'égalité devant la justice.
00:28:29 La Cour de justice de la République,
00:28:31 quand elle a été créée en 93,
00:28:33 a été créée pour satisfaire l'opinion pour des besoins
00:28:36 de transparence.
00:28:38 On nous a parlé de la haute autorité de la transparence
00:28:41 pour la vie politique.
00:28:42 Elle n'a qu'un chef de compétences fin,
00:28:44 les patrimoines, les conflits d'intérêts,
00:28:47 et encore lorsqu'ils sont déclarés.
00:28:49 -C'est tout le problème, d'ailleurs, dans cette affaire.
00:28:52 On se demande à qui la faute.
00:28:54 La haute autorité n'a pas mentionné ce conflit ?
00:28:57 -Il faut se poser la question de la moralisation
00:28:59 de la vie politique. Emmanuel Macron a été élu sur ce programme.
00:29:03 François Bayrou, son Premier ministre de la Justice,
00:29:06 devait mener cette campagne de la moralisation
00:29:09 par une réforme constitutionnelle
00:29:11 et il a été élu. Le problème est bien plus large.
00:29:13 Il faut accepter, peut-être,
00:29:15 que des tribunaux de droit commun jugent les ministres,
00:29:18 mais il a fallu un cheminement intellectuel.
00:29:21 Vous parliez de l'existence des deux fites,
00:29:23 je crois qu'elles sont nécessaires.
00:29:26 Une commission des requêtes vient déjà filtrer
00:29:28 les recours contre les parlementaires,
00:29:30 contre les ministres, et ce filtrage-là
00:29:33 a quelque chose d'important.
00:29:34 Le droit commun ne sera pas du droit commun,
00:29:37 eu égard à cette particularité historique.
00:29:40 -Il y a une réaction à l'hyperjudiciarisation
00:29:42 des responsables politiques, le risque pénal,
00:29:45 la pandémie, tout ça doit se régler dans les urnes,
00:29:48 par les citoyens et pas par la justice.
00:29:50 Je voudrais, Mathieu Delahousse,
00:29:52 que vous nous expliquiez, tout à l'heure,
00:29:54 que les règles ne sont pas exactement les mêmes.
00:29:57 Il n'y a pas de parti civil, c'est ça ?
00:29:59 -Oui, ça rejoint exactement ce qui vient d'être expliqué
00:30:03 de façon très claire sur, effectivement,
00:30:05 l'équilibre des partis.
00:30:06 On a l'habitude, quand on traite
00:30:08 les affaires judiciaires, d'avoir un accusateur
00:30:11 et quelqu'un qui se défend, mais on a aussi
00:30:13 toute cette phase spectaculaire, la phase de l'enquête.
00:30:16 La phase de l'enquête, on est dans une opposition
00:30:20 entre, effectivement, la justice et l'exécutif
00:30:23 de façon très nette, et sur les droits,
00:30:26 on pourra parler des partis civils,
00:30:28 mais il y a eu un aspect presque souterrain
00:30:30 de cette Cour de justice de la République
00:30:33 qu'on évoque peu, c'est la phase d'enquête,
00:30:35 qui n'est pas aux mains des parlementaires,
00:30:38 qui a traumatisé, sans excès et sans ironie,
00:30:40 l'exécutif, ce sont les perquisitions
00:30:43 menées au ministère de la Justice
00:30:45 au mois de juillet 2021,
00:30:47 à la même période dans la crise sanitaire
00:30:49 chez Olivier Véran, chez Edouard Philippe,
00:30:52 qui venait de quitter Matignon,
00:30:54 où une perquisition s'est déroulée.
00:30:56 Cet aspect-là, finalement, est vécu par le politique
00:30:59 comme une grande violence,
00:31:01 comme des enquêtes extrêmement intrusives.
00:31:03 Je termine par ce point,
00:31:05 c'était votre débat à l'instant,
00:31:07 que, en fait, on a l'impression qu'on redescend,
00:31:09 qu'après avoir des moyens d'enquête exceptionnels,
00:31:12 on redescend et qu'on est jugé,
00:31:14 pardonnez-moi cette expression, à la papa,
00:31:17 avec des parlementaires... -Très intéressant.
00:31:19 -Sur des peines... -Le décalage
00:31:21 entre les moyens de la justice avant le procès.
00:31:24 -Enquête très monumentale.
00:31:26 Vous étiez dans plusieurs Cours de justice
00:31:28 de la République récente,
00:31:30 on est dans l'affaire Lagarde,
00:31:32 il y a eu des relaxes dans l'affaire Baladur,
00:31:35 pour la nation, qui a été prononcée avec sursis,
00:31:37 on est sur quelque chose de plus faible.
00:31:40 Ce contraste entre ce qui est vécu
00:31:42 comme une grande violence judiciaire
00:31:44 et ensuite un jugement qui paraît
00:31:46 beaucoup plus teinté de bienveillance,
00:31:48 montre qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas,
00:31:51 mais c'est votre illustration sur l'équilibre du pouvoir
00:31:54 et l'équilibre des méthodes.
00:31:56 -Pour terminer ce débat,
00:31:57 l'ONG Transparency International
00:32:00 appelle à créer aussi un déontologue
00:32:03 du gouvernement pour examiner systématiquement
00:32:05 les conflits d'intérêts potentiels
00:32:07 des ministres nouvellement nommés.
00:32:10 Je pensais à le rôle de la fameuse haute autorité,
00:32:13 mais est-ce qu'il n'y a pas un petit problème
00:32:16 de moyens pour, véritablement,
00:32:18 à l'américaine, à chaque nomination,
00:32:21 vérifier le patrimoine, mais aussi les intérêts ?
00:32:24 -Je crois très sincèrement
00:32:25 que les organes existent déjà et on les a déjà.
00:32:28 Il ne faut pas réinventer la roue à chaque fois qu'il y a une affaire.
00:32:32 C'est tout à fait normal de voir s'il existe des conflits ou non
00:32:35 chez les membres du gouvernement.
00:32:37 Cet organe, il existe.
00:32:39 Il faut peut-être regarder s'il est assez efficace.
00:32:41 Je crois qu'il fonctionne.
00:32:43 En tant que parlementaire, je suis soumis
00:32:45 à la haute autorité de la transparence de la vie politique.
00:32:49 -Le mot de la fin, Charles de Courson,
00:32:51 l'homme d'expérience que vous êtes.
00:32:53 -Je crois qu'on a vécu, pendant presque deux siècles,
00:32:57 sur l'idée de la Révolution française,
00:33:01 contre le gouvernement des juges, comme on disait.
00:33:04 Du temps de la royauté,
00:33:06 qui s'opposait à l'absolutisme royal ?
00:33:09 C'étaient les magistrats,
00:33:11 qui disaient que le roi n'a pas le droit de faire cela,
00:33:14 c'est contraire aux lois dites fondamentales.
00:33:17 -Il faudrait revenir à une séparation des pouvoirs.
00:33:19 -Et donc, en réaction, on a dit,
00:33:22 les élus, les ministres, etc., ne relèvent plus.
00:33:25 C'est pour ça que la Réforme de 93, c'est un vrai progrès
00:33:29 par rapport à ce qui existait avant.
00:33:31 Il faut l'achever en disant qu'on va vers le droit commun.
00:33:34 -Droit commun. -Il n'y aura plus d'accusation.
00:33:37 -Les arguments sont sur la table.
00:33:39 Je suis sûre qu'il va avoir des conséquences, ce débat,
00:33:42 là-bas et dans vos camps, à vous deux,
00:33:44 puisque vous dites que c'est possible.
00:33:46 Merci beaucoup. Merci d'être venu débattre sur LCP.
00:33:49 Vous restez avec moi, Delphine O.
00:33:51 Dans une dizaine de minutes, les partis prides
00:33:54 nous affranchissent.
00:33:56 Faut-il quitter Twitter ?
00:33:57 Il y a Gabizon dans le sillage de la décision d'Anne Hidalgo.
00:34:01 L'afflombée des SUV qui fait tâche à la veille de la COP28,
00:34:04 ce sera avec Thomas Lestaval.
00:34:06 De quoi nous parlez-vous ?
00:34:08 Stéphanie Despierre, dans Bourbon Express ?
00:34:10 -De la ligne dure choisie par les Républicains
00:34:13 dans le débat sur l'immigration.
00:34:15 -A tout de suite, les amis.
00:34:16 D'abord, on va plonger dans votre combat,
00:34:19 la diplomatie féministe,
00:34:20 que vous comparez donc à un sport de combat.
00:34:23 C'est votre premier livre,
00:34:25 c'est taillant dit, Delphine O,
00:34:27 ambassadrice du droit des femmes dans le monde.
00:34:29 Qu'est-ce que ça veut dire ?
00:34:31 Ca mérite une explication.
00:34:33 C'est l'invitation de Clément Perreault.
00:34:35 On en parle après.
00:34:36 Musique dynamique
00:34:38 -Si on vous invite, Delphine O,
00:34:40 c'est pour parler de ce que vous appelez un sport de combat.
00:34:44 Non, ce n'est pas la boxe,
00:34:46 pas plus que la lutte,
00:34:48 ou le sumo,
00:34:49 encore moins le MMA.
00:34:51 -C'est de la folie !
00:34:53 -Non, le sport de combat que vous pratiquez,
00:34:55 c'est la diplomatie féministe.
00:34:58 -If you do not yet have those freedoms,
00:35:00 fight for them.
00:35:02 -Ces rings, les estrades et les couloirs
00:35:04 des grandes institutions.
00:35:06 Votre livre explique comment les droits des femmes
00:35:09 sont attaqués et défendus sur la scène internationale,
00:35:12 un terrain de lutte que vous connaissez bien.
00:35:15 Ambassadrice du Quai d'Orsay depuis 2019,
00:35:17 vous avez, dans votre carrière, parcouru le monde
00:35:20 d'institutions publiques en think tank privé,
00:35:23 d'associations locales en grandes ONG,
00:35:25 de New York à Téhéran et Kaboul,
00:35:27 en passant par l'hémicycle de l'Assemblée nationale,
00:35:30 juste après la première élection d'Emmanuel Macron.
00:35:33 -Que pouvons-nous faire, nous, la France,
00:35:36 l'Union européenne, face à ce défi ?
00:35:38 -Militante En Marche de La Première Heure,
00:35:41 vous faites partie de celles et ceux
00:35:43 qui ont lancé en France le concept de diplomatie féministe,
00:35:46 lancé en Suède en 2014
00:35:48 par la ministre des Affaires étrangères,
00:35:51 Margot Wachter.
00:35:52 -La France porte une diplomatie féministe ambitieuse
00:35:55 dans toutes les enceintes et sur tous les terrains.
00:35:58 -La diplomatie féministe, pratiquée aujourd'hui
00:36:00 par 12 pays dans le monde, consiste à toujours prendre en compte
00:36:04 la question des droits des femmes dans les relations diplomatiques
00:36:08 et la résolution des conflits.
00:36:09 -Face au coup de boutoir des forces régressives,
00:36:12 une action concertée, systématique et mobilisatrice est nécessaire.
00:36:16 Les gouvernements progressistes doivent remonter
00:36:19 les droits des femmes dans l'agenda de leurs priorités stratégiques.
00:36:23 -Dans votre livre, vous dénoncez le "backlash",
00:36:25 ou "retour de bâton" en français.
00:36:27 On appelle ainsi l'alliance des gouvernements antiféministes
00:36:31 qui voudraient revenir sur certains droits.
00:36:33 Vous insistez sur le rôle que peut jouer la lutte
00:36:36 pour les droits des femmes pour résoudre certains conflits,
00:36:39 comme au Libéria ou en Colombie.
00:36:41 Ce soir, les conflits s'intensifient en Ukraine et au Proche-Orient.
00:36:45 La paix, peut-elle venir des femmes ?
00:36:47 -Réponse d'Elphicine.
00:36:51 Elles sont moins belliqueuses,
00:36:53 elles sont plus aptes à maintenir et à construire la paix des femmes ?
00:36:57 -Pas par essentialisme biologique,
00:36:59 rien dans nos gènes fait que nous sommes plus prédisposées à la paix.
00:37:03 En revanche, un certain nombre d'études le montrent,
00:37:06 lorsque les femmes sont assises à la table des négociations,
00:37:09 dont elles ont été historiquement exclues,
00:37:12 la durabilité des accords de paix est supérieure
00:37:15 à celle des hommes.
00:37:16 Ce n'est pas une prédisposition biologique,
00:37:18 c'est uniquement parce que les femmes sont sociologiquement
00:37:22 construites, éduquées, formées pour se projeter dans le long terme,
00:37:25 pour, dans la plupart des sociétés, y compris occidentales,
00:37:29 s'occuper des enfants et avoir une vision plus de long terme.
00:37:32 Je donne l'exemple de la Colombie,
00:37:34 le seul exemple au monde, dans l'histoire du monde,
00:37:37 où les femmes ont été associées au processus de paix
00:37:40 entre le gouvernement colombien et les femmes,
00:37:43 entre le gouvernement colombien et les Farc.
00:37:46 Il y avait une sous-commission
00:37:48 dans ces négociations.
00:37:49 Les femmes ne sont pas seulement les victimes des conflits,
00:37:52 mais elles en sont aussi des combattantes.
00:37:55 Dans le cas de la Colombie, il y avait 40 %
00:37:57 des guerriers roses colombiens des Farc,
00:38:00 qui étaient des guerriers race. -Qui sont donc des femmes.
00:38:03 Pendant des années, les diplomates ont parlé des droits de l'homme
00:38:07 ou des droits humains, plus récemment,
00:38:09 dans chaque rencontre internationale.
00:38:11 Les droits des femmes, en tant que telles,
00:38:14 deviennent un véritable objet
00:38:16 dans les discussions,
00:38:19 dans les conventions entre Etats.
00:38:21 -C'est effectivement beaucoup plus récent
00:38:23 que la création des Nations unies,
00:38:25 à la fin des années 40, à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
00:38:29 C'est à partir de la fin des années 70
00:38:31 et vraiment la décennie d'or, c'est la décennie 80,
00:38:34 les décennies 90, où on va avoir
00:38:36 une grande série de conférences internationales
00:38:39 qui vont avoir pour objectif principal
00:38:41 de promouvoir les droits des femmes,
00:38:43 de réduire les inégalités politiques, sociales et économiques,
00:38:47 et qui vont aboutir à un corpus
00:38:49 de grandes conventions internationales,
00:38:51 qui sont aujourd'hui le fondement de notre droit international,
00:38:55 qui va d'ailleurs déteindre sur notre droit national
00:38:58 ou notre droit européen.
00:38:59 Mais aujourd'hui, ces grandes conventions internationales,
00:39:03 ce socle de droits fondamentaux,
00:39:05 ils sont remis en question, en cause,
00:39:07 et directement attaqués par un certain nombre de pays,
00:39:10 de partis politiques, de mouvements,
00:39:12 certains d'inspiration religieuse, d'autres plus politiques,
00:39:16 qui vont batailler,
00:39:17 et c'est l'objet de ce sport de combat diplomatique,
00:39:20 à l'ONU, dans l'Union européenne,
00:39:22 dans toutes les organisations multilatérales,
00:39:24 pour faire régresser ces droits.
00:39:26 -C'est très frappant de voir que tous les ultraconservateurs,
00:39:30 les réactionnaires, et pas seulement dans les pays du Sud,
00:39:34 les pays plus pauvres que le Nord occidental,
00:39:37 sont présents.
00:39:38 C'est le fameux backlash, le retour de bâton,
00:39:42 post-MeToo, révolution rétrograde,
00:39:45 on peut le dire comme ça, anti-progrès, anti-femmes,
00:39:48 anti-minorités, anti-LGBT,
00:39:50 et vous montrez très bien qu'ils sont très puissants,
00:39:53 ces mouvements-là, qu'ils financent à coup de milliards
00:39:56 aussi bien leur propre pays,
00:39:58 on pense à la Pologne, aux Etats-Unis,
00:40:00 mais aussi la lutte contre le droit à l'avortement
00:40:03 dans les pays du Sud.
00:40:05 -Effectivement, c'est un sujet peu connu du grand public,
00:40:08 c'est la raison pour laquelle j'ai voulu écrire ce livre,
00:40:11 c'est tirer la sonnette d'alarme,
00:40:13 on voit des émergences de ce mouvement,
00:40:15 tout le monde a été choqué de l'arrêt Roe v. Wade
00:40:18 aux Etats-Unis, la suppression du droit constitutionnel
00:40:21 à l'avortement, on sait ce qui s'est passé en Pologne,
00:40:24 en Hongrie, on a vu ce qui s'est passé au Brésil,
00:40:27 dans d'autres pays, mais on ne se rend pas compte
00:40:30 que tout ça, ce ne sont pas des phénomènes
00:40:33 qui sont arrivés par hasard, de manière indépendante.
00:40:35 En réalité, justement, à la fin des années 90,
00:40:38 il y a une frange de la population,
00:40:40 notamment des partis politiques et des organisations religieuses,
00:40:44 inspirées en partie par le Vatican
00:40:46 et les églises évangistes nord-américaines,
00:40:49 qui ont décidé de rentrer dans cette guerre des cultures,
00:40:52 en disant qu'on allait trop loin,
00:40:54 c'est contraire à nos valeurs patriarcales, réactionnaires,
00:40:57 qui ont financé des mouvements politiques,
00:41:00 aux Etats-Unis, c'est comme ça qu'on est arrivés
00:41:03 avec une cour suprême, avec une majorité très réactionnaire.
00:41:06 Quand on voit ce qui se passe dans un certain nombre de pays,
00:41:09 en Afrique, les pays du Sud, récemment, en Ouganda, au Ghana,
00:41:13 où on a des lois qui ont été votées,
00:41:15 qui répriment par la peine de mort l'homosexualité,
00:41:18 ou des personnes qui auraient connaissance
00:41:20 d'autres personnes homosexuelles, tout cela a été financé
00:41:23 par des églises évangélistes nord-américaines.
00:41:26 -Il y a des passerelles entre Nord et Sud
00:41:28 pour protéger le droit des femmes.
00:41:30 -Il y a des flux financiers qui ont été traqués
00:41:33 par un certain nombre de rapports que je cite dans le livre.
00:41:36 Il y a aussi des grandes fondations philanthropiques françaises,
00:41:40 espagnoles, européennes, d'inspiration en général catholique.
00:41:43 -Exemple ? -Je ne les cite pas dans le livre,
00:41:46 mais vous pouvez vous référer notamment
00:41:48 au rapport du Forum parlementaire européen
00:41:51 pour les droits sexuels et reproductifs.
00:41:53 Si c'est trop long, vous pouvez le trouver dans le livre,
00:41:56 mais c'est ce qui a créé, a dessiné cette constellation.
00:41:59 Il y a eu, pendant un certain moment,
00:42:01 aussi des financements de riches milliardaires orthodoxes russes
00:42:07 qui venaient aussi financer ces mouvements antidroits en Europe.
00:42:10 -L'Europe a les moyens de se défendre.
00:42:12 On aimerait comprendre, concrètement,
00:42:15 quels sont nos résultats de cette diplomatie féministe
00:42:19 qui n'est définie nulle part, dans aucun traité,
00:42:22 mais qui, pays après pays, crée des groupes
00:42:26 pour essayer de faire avancer les droits.
00:42:28 Quels sont vos résultats ?
00:42:30 Qu'est-ce que fait la France ?
00:42:32 Qu'obtient-elle pour défendre ces droits-là ?
00:42:34 -La diplomatie féministe,
00:42:36 c'est pour ça que je souhaitais que le titre soit dans le titre du livre,
00:42:40 car je sais que c'est un concept abscond,
00:42:42 bizarre ou incompréhensible pour le grand public.
00:42:45 C'est simplement reconnaître, pour nos diplomaties,
00:42:48 donc nos gouvernements, que les droits des femmes
00:42:51 sont un enjeu géopolitique, stratégique, politique,
00:42:53 de premier plan.
00:42:55 C'est pas juste un enjeu de développement.
00:42:57 Il y a aussi l'accès à la santé, l'éducation, etc.
00:43:00 Mais aujourd'hui, on a été entraînés, en fait,
00:43:02 sur ce terrain de lutte, véritablement,
00:43:05 qui est une lutte diplomatique,
00:43:07 qui n'est pas armée et militaire, qui pourrait l'être un jour,
00:43:10 mais on a perdu du terrain sur les droits
00:43:13 qui avaient été acquis dans les années 80, 90, 2000,
00:43:15 et il faut qu'on se mobilise.
00:43:17 -La France, par exemple,
00:43:19 est-ce qu'elle peut aider des femmes en danger,
00:43:22 être extradée, les protéger ?
00:43:23 La France peut, par exemple, conditionner ses aides financières
00:43:27 à un pays et l'obliger à avancer sur les droits sociaux,
00:43:30 les droits politiques, les droits élémentaires des femmes ?
00:43:33 -C'est ce qu'a fait, à contrario, un certain nombre de pays,
00:43:37 notamment les Etats-Unis, sous Donald Trump,
00:43:39 qui ont coupé intégralement leur aide publique au développement
00:43:43 à toutes les organisations qui ne seraient que mentionnées
00:43:46 soit le droit à l'avortement, soit le droit à la contraception.
00:43:50 Il faut arrêter d'être naïf, être réaliste et pragmatique.
00:43:53 On mène un travail à l'ONU,
00:43:55 dans les grandes organisations internationales,
00:43:57 pour défendre ces droits, et on mène un travail de terrain.
00:44:01 Je voudrais citer un certain nombre d'initiatives
00:44:04 qu'on a pu lancer récemment, l'initiative Marianne
00:44:07 pour les défenseurs des droits de l'homme,
00:44:09 qui sélectionne une promotion, une quinzaine de défenseurs
00:44:12 des droits humains chaque année.
00:44:14 La première promotion en 2021 était intégralement féminine,
00:44:18 c'est des militantes féministes de terrain
00:44:20 qui venaient d'un peu partout,
00:44:22 avec une bourse, des programmes de soutien,
00:44:24 un logement, à qui on facilite aussi le droit d'asile en France.
00:44:28 Il y a le prix Simone Veil de la République.
00:44:30 Il y a aussi des actions très importantes
00:44:33 qui sont menées sur les victimes de violences sexuelles
00:44:36 dans les conflits.
00:44:37 On y viendra peut-être,
00:44:38 car il y a une résurgence des conflits.
00:44:40 -On y reviendra. -On a soutenu
00:44:42 le Fonds mondial pour les survivantes
00:44:44 de violences sexuelles dans les conflits,
00:44:47 qui avait été lancé en 2019 par le docteur Mukwege.
00:44:50 -Le docteur qui recoue les femmes excisés.
00:44:52 Vous parlez aussi du féminisme dans l'écologie.
00:44:55 On connaît l'écoféminisme,
00:44:57 popularisé par Sandrine Rousseau, entre autres.
00:44:59 Vous faites un lien entre femmes et réchauffement climatique.
00:45:03 En quoi sont-elles plus vulnérables que les hommes ?
00:45:06 -Les femmes, c'est à la fois les premières victimes
00:45:09 du réchauffement climatique et ce sont les premières actrices
00:45:12 de la résilience contre le réchauffement climatique.
00:45:15 Pourquoi les premières victimes ?
00:45:17 Il faut se projeter dans des pays du Sud
00:45:19 où il y a encore 70 % des agricultrices,
00:45:21 c'est-à-dire qu'elles travaillent la terre,
00:45:24 les ressources naturelles,
00:45:25 les récoltent, vont chercher le bois
00:45:27 pour le chauffage, pour la cuisine, etc.,
00:45:30 et qui sont donc touchées de plein fouet
00:45:32 par les conséquences de la désertification,
00:45:34 de l'augmentation des températures, des tsunamis,
00:45:37 de l'augmentation des océans, etc.
00:45:39 Elles représentent 80 % des réfugiés climatiques
00:45:42 dans le monde, c'est énorme,
00:45:44 et on sait que lorsqu'il y a une catastrophe naturelle,
00:45:47 un huracan, etc., en fait, elles meurent
00:45:50 à des pourcentages de 14 fois plus...
00:45:52 Elles sont 14 fois plus susceptibles de mourir
00:45:54 ou d'être touchées par une catastrophe climatique
00:45:57 parce qu'elles n'ont pas les moyens économiques,
00:46:00 elles n'ont pas de voiture, elles ne peuvent pas se déplacer,
00:46:03 elles doivent rester sur place pour s'occuper des enfants,
00:46:06 des personnes âgées, dans beaucoup de pays,
00:46:09 on n'accepte pas qu'elles soient seules
00:46:11 dans un lieu d'accueil des réfugiés
00:46:13 parce qu'elles doivent être accompagnées par un homme.
00:46:16 C'est un réchauffement climatique.
00:46:18 En même temps, ce sont elles qui ont les solutions.
00:46:21 -Je voudrais qu'on parle des femmes victimes des conflits,
00:46:24 puisque l'actualité en témoigne,
00:46:26 victime de viols comme arme de guerre,
00:46:29 le 7 octobre, dans les massacres du Hamas en Israël.
00:46:32 Il y a eu un crime particulier
00:46:35 sur les femmes israéliennes.
00:46:38 On va regarder cette image.
00:46:39 C'est un crime dans le crime
00:46:41 qui a été dénoncé par le collectif Nous Vivrons,
00:46:44 qui était Place de la Nation.
00:46:46 On les voit avec leur pancarte, violées, mutilées,
00:46:49 tuées par le Hamas.
00:46:50 Qu'attendez-vous pour agir ?
00:46:52 Elles s'adressent aux féministes bien silencieuses,
00:46:55 qui n'ont pas véritablement permis de défiler
00:46:57 avec les autres collectifs.
00:46:59 C'était dimanche dernier pour la grande marche
00:47:02 contre les violences sexuelles et sexistes,
00:47:04 car leur sécurité n'était pas garantie.
00:47:06 Vous le voyez à New York, devant le siège de l'ONU,
00:47:09 peut-être que ça n'a pas été choisi par hasard,
00:47:12 ce silence des féministes dénoncé après le 7 octobre.
00:47:15 -Shame on Sima ! Shame on Sima !
00:47:18 Shame on...
00:47:20 -Unless you are a Jew,
00:47:21 me too !
00:47:23 Unless you are a Jew,
00:47:25 me too !
00:47:26 -Voilà. Des femmes qui crient "shame on you".
00:47:30 Est-ce qu'il y a eu un silence coupable
00:47:33 des grandes voix féministes,
00:47:35 des organisations féministes, ONU-Femmes,
00:47:38 après le 7 octobre, sur les crimes sexuels
00:47:40 commis sur les Israéliennes ?
00:47:42 -Effectivement, c'est vrai que le conflit en Israël
00:47:45 et en Palestine, et les massacres du Hamas du 7 octobre,
00:47:48 ont créé un certain nombre de divisions
00:47:50 au sein du mouvement féministe.
00:47:52 C'est pas le premier sujet qui crée des divisions.
00:47:55 Ce qui est intéressant de noter, c'est qu'assez rapidement,
00:47:59 les rapports qui ont été faits par l'armée israélienne
00:48:02 ont permis d'identifier l'utilisation
00:48:04 des violences sexuelles, et notamment du viol
00:48:06 comme arme de guerre. Pendant longtemps,
00:48:09 ça a été un sujet totalement inaperçu,
00:48:11 qui passait comme normal dans les guerres.
00:48:14 -Ca, ce sont les faits, mais le silence des féministes.
00:48:16 -D'abord, je voudrais revenir sur la marche du 25 novembre.
00:48:20 La plupart des grandes organisations féministes
00:48:22 se sont exprimées, notamment la Fondation des Femmes,
00:48:25 par la voix de sa présidente, qui avait,
00:48:28 dès les premiers jours d'octobre, réagi de manière très vive
00:48:31 par rapport à ça. La question qu'on se pose,
00:48:34 nous, en tant que diplomates, c'est lutter contre l'impunité,
00:48:37 ce qu'on fait notamment en Ukraine,
00:48:39 puisque vous citiez aussi l'Ukraine,
00:48:41 donc on soutient l'action de la Cour pénale internationale
00:48:44 pour recueillir des preuves le plus rapidement possible
00:48:47 des femmes ukrainiennes victimes de violences par des soldats russes.
00:48:51 On soutient aussi le Fonds mondial du docteur Mukwege
00:48:54 pour donner des réparations psychologiques et économiques.
00:48:57 -Sur les femmes israéliennes, avez-vous le sentiment
00:49:00 que ces crimes par les féministes ont été, de façon un peu vocale,
00:49:04 dénoncés ou pas suffisamment ?
00:49:06 -Ca dépend évidemment des organisations.
00:49:08 Ca a été en tout cas par les Etats et par les gouvernements,
00:49:11 et on essaie d'avoir une action particulière sur ce sujet.
00:49:14 De l'autre côté aussi, sur la crise humanitaire
00:49:17 qui a lieu à Gaza en ce moment,
00:49:19 on essaie d'intensifier notre soutien aux femmes et aux enfants
00:49:22 qui sont les premières victimes civiles de la guerre
00:49:25 qui a lieu en ce moment.
00:49:27 En tout cas, ce que je veux montrer dans le livre,
00:49:30 et il a été écrit avant ce qui s'est passé,
00:49:32 c'est qu'il y a un certain nombre de conflits oubliés,
00:49:35 comme le Yémen, la Libye, l'Afghanistan, etc.
00:49:38 Où les femmes ont été totalement absentes
00:49:40 aussi des négociations de paix.
00:49:42 -La diplomatie féministe est un sport de combat,
00:49:45 les droits des femmes, un enjeu mondial.
00:49:47 Merci beaucoup, Delphine Ho, c'est à lire aux éditions Taillandier.
00:49:51 Je suis sûre que la jeune génération
00:49:53 trouvera plein d'idées pour son avenir
00:49:57 en vous lisant. Merci, vous restez avec moi.
00:50:00 C'est l'heure de retrouver les Affranchis.
00:50:02 On les accueille tout de suite.
00:50:04 Cécilia Gabizon, pour son billet Société,
00:50:07 directrice des rédactions du groupe Media ETX Magellan.
00:50:10 Bienvenue. Thomas Lestavelle,
00:50:12 journaliste économique, on vous retrouve avec plaisir.
00:50:15 On commence, comme chaque soir, par Bourbon Express,
00:50:18 l'histoire du jour à l'Assemblée.
00:50:20 C'est Stéphanie Despierres qui nous l'a racontée.
00:50:23 -Bonsoir. La stratégie de fermeté des Républicains
00:50:26 sur l'immigration. En pleine discussion
00:50:28 de la loi d'Armanin, les députés de la commission des lois
00:50:31 ont ouvert une parenthèse de quelques heures
00:50:34 pour étudier un autre texte, celui d'Éric Ciotti,
00:50:37 qui propose de réviser la Constitution,
00:50:39 impréalable, essentielle pour lutter contre l'immigration,
00:50:43 à entendre le patron des Républicains.
00:50:45 -Les 29 lois immigration
00:50:48 qui se sont succédées depuis 1981
00:50:51 n'ont rien changé.
00:50:53 Plus il y a d'immigration, plus il y a de lois.
00:50:57 Plus il y a de lois, plus il y a d'immigration.
00:51:00 Il est donc impératif
00:51:03 de changer de cadre juridique,
00:51:05 de changer de modèle, de changer de méthode.
00:51:08 -En face, les trois groupes du camp présidentiel
00:51:11 refusent de toucher à la Constitution.
00:51:14 La gauche pilonne une proposition mortifère
00:51:16 pour les droits fondamentaux.
00:51:18 Le Rassemblement national aussi,
00:51:20 qui préfère ses idées à la copie, ce sont leurs mots,
00:51:24 des Républicains. Sans surprise, le texte a échoué,
00:51:27 mais les Républicains restent inflexibles.
00:51:29 Pas de révision de la Constitution,
00:51:32 pas de vote de droite pour la loi immigration.
00:51:34 -Cette stratégie de l'Etat-major des Républicains
00:51:37 est loin d'être partagée par toute la droite.
00:51:40 -Après les divisions sur la réforme des retraites,
00:51:43 les Républicains espéraient afficher un visage uni sur l'immigration.
00:51:47 C'est raté, tout a déjà volé en éclats.
00:51:49 C'est le retour de la droite façon puzzle,
00:51:52 avant même que le débat ne commence dans l'hémicycle.
00:51:55 L'intrésigence d'Olivier Marlex et d'Eric Ciotti
00:51:58 vis-à-vis du gouvernement est très contestée.
00:52:01 -Une partie des députés est mal à l'aise.
00:52:03 Comment justifier de voter contre une loi
00:52:05 qui contient des mesures de fermeté pour réguler l'immigration,
00:52:09 alors que ça plaît à certains électeurs LR ?
00:52:11 Dimanche, 17 députés ont publié une tribune
00:52:14 pour montrer qu'ils étaient constructifs,
00:52:16 bancaux pour la loi immigration,
00:52:18 à condition que la version du Sénat
00:52:20 ne soit pas trop détricotée.
00:52:22 Dans cette tribune, il y a aussi un autre message plus subliminal,
00:52:26 comme me l'a racontée une des signataires.
00:52:28 -Si je signe la tribune, ça ne veut pas dire
00:52:31 que je vote forcément le texte d'immigration,
00:52:33 mais ça veut dire que je ne signe pas une motion de censure.
00:52:36 Or, la motion de censure, c'est la menace,
00:52:39 brandie depuis septembre par Olivier Marlex,
00:52:42 patron des députés, mais l'hypothèse se dégonfle.
00:52:44 On voit mal comment il arrivera à trouver 58 signataires
00:52:48 sur ses 62 députés pour la déposer.
00:52:50 -Il y en a un qui se délecte de la tribune des constructifs LR,
00:52:53 c'est Gérald Darmanin, j'imagine.
00:52:55 -Le ministre de l'Intérieur voit un encouragement,
00:52:58 il imagine qu'il peut convaincre des députés LR
00:53:01 et passer sa loi 149-3.
00:53:02 Alors, il accentue la pression sur ses anciens collègues
00:53:06 et active ses relais au sein du groupe LR.
00:53:08 Ses conseillers font pareil.
00:53:10 Cet après-midi, on a croisé Grégory Canal
00:53:12 dans les couloirs de l'Assemblée nationale.
00:53:15 C'est le conseiller parlementaire du ministre de l'Intérieur,
00:53:18 lui aussi ancien Républicain.
00:53:20 Il était en pleine discussion avec une députée LR.
00:53:23 -Merci, Stéphanie.
00:53:24 Je ne suis pas sûre que ça vous manque trop,
00:53:27 mais je vous enchaîne, vous, l'ancienne députée d'Elfinaud.
00:53:30 On enchaîne avec vous, Cécilia Gabizon.
00:53:32 Vous voulez revenir sur cette affaire Anne Hidalgo.
00:53:35 La nouvelle n'est pas du tout passée inaperçue,
00:53:38 puisque la maire de Paris a décidé de claquer haut et fort
00:53:41 la porte de X, ex-Twitter,
00:53:42 devenue, selon elle, un vaste égoût mondial.
00:53:46 Elle n'est d'ailleurs pas la seule à avoir déserté le réseau social.
00:53:50 -Alors, j'ai pris la décision de quitter Twitter,
00:53:53 pas moi, Anne Hidalgo,
00:53:54 car loin d'être l'outil révolutionnaire
00:53:56 qui, au départ, permettait un accès à l'information
00:53:59 au plus grand nombre, est devenu, ces dernières années,
00:54:02 l'arme de destruction massive de nos démocraties.
00:54:05 Elle a écrit dans une tribune,
00:54:07 peut-être une façon de changer le sujet après Tahiti,
00:54:10 mais aussi un vrai choix, puisqu'elle fait une croix
00:54:13 sur 1,5 million d'abonnés, et dans la classe politique,
00:54:16 beaucoup s'interrogent sur que faire.
00:54:18 Si les politiques hésitent, les marques,
00:54:21 en tout cas un certain nombre de marques américaines,
00:54:24 ont décidé de suspendre leur budget publicitaire sur Twitter,
00:54:27 IBM, Apple, Disney, Werner Bros, notamment.
00:54:30 Pourquoi ?
00:54:31 Entre tout le chahut autour de Twitter,
00:54:34 mais c'est surtout le dernier fait d'Elon Musk,
00:54:36 qui a soutenu un tweet carrément antisémite,
00:54:39 qui disait, en gros, que les Juifs manœuvraient
00:54:42 pour promouvoir la haine des Blancs,
00:54:44 et Elon Musk n'a rien trouvé de mieux que d'écrire
00:54:47 "et c'est la vérité".
00:54:48 Après ça, ça a été un tolé,
00:54:50 car c'est un classique de l'antisémitisme,
00:54:52 et ces marques ont retiré leur budget pub
00:54:55 depuis Elon Musk est en Israël,
00:54:57 ils essayent d'arranger les choses,
00:54:59 mais Twitter reste... Twitter X reste dans la tourmente.
00:55:02 -Oui, alors, il faut dire que c'est
00:55:04 évidemment depuis son rachat par Elon Musk en avril 2020 d'eau
00:55:08 qu'à la fois les internautes se sentent moins bien,
00:55:11 que le réseau lui-même est dans la tourmente.
00:55:13 -Ca, c'était le dernier épisode de beaucoup de changements sur Twitter,
00:55:17 à commencer par le changement de nom.
00:55:19 Il y avait ce nom, Twitter, un verbe, "tweeter",
00:55:22 qui est devenu X, mais c'est un nom tellement ridicule
00:55:25 qu'on est obligés de dire "extweeter".
00:55:27 Ensuite, il a limogé une grande partie des équipes
00:55:30 qui faisaient la modération.
00:55:32 Or, sur ces plateformes sans modération,
00:55:34 ça concentre finalement des complotistes,
00:55:37 des radicaux, des fondamentalistes,
00:55:40 et donc c'est devenu un forum où prévalent pas mal,
00:55:43 évidemment, il y a d'autres choses,
00:55:45 mais de messages haineux.
00:55:46 -Le défouloir massif de la haine,
00:55:48 mais pourtant, on n'observe pas un départ massif du réseau.
00:55:52 -Non, comme on l'avait vu avec d'autres réseaux sociaux,
00:55:55 on a construit des habitudes, une sociabilité,
00:55:57 des amitiés sur ces réseaux.
00:55:59 C'est difficile de faire une croix
00:56:01 sur 15 ans d'amitié et de communication.
00:56:03 20 minutes à poser la question aux députés,
00:56:06 ils ont dit qu'on a tous nos abonnés,
00:56:08 donc on a du mal à perdre un canal de communication,
00:56:11 mais certains médias ont commencé à lâcher Twitter,
00:56:14 notamment la radio publique américaine NPR,
00:56:17 et en fait, ils n'ont pas perdu de trafic,
00:56:19 et donc, ça a été minime,
00:56:21 d'autant qu'aujourd'hui, le trafic des médias
00:56:23 qui vient de Twitter a énormément diminué
00:56:25 de par ces allers-venus, changements sur Twitter,
00:56:28 donc c'est plus la porte que c'était.
00:56:30 Ce que ça dit, quand même, c'est qu'aujourd'hui, en France,
00:56:34 on passe en moyenne 57 minutes par jour sur Twitter.
00:56:37 Ce ne sont pas les jeunes, mais surtout les boomers,
00:56:39 les plus de 50 ans, qui sont sur Twitter
00:56:42 et qui écrivent des tweets, mais que pour les gens
00:56:45 qui ont arrêté les réseaux sociaux,
00:56:47 c'est un thème qui revient régulièrement,
00:56:49 et qui est plus important, plus.
00:56:51 Les études sont variées sur le sujet,
00:56:53 ce que ça montre, c'est que ça leur fait du bien,
00:56:56 et un point important, il va devenir de plus en plus important
00:56:59 de contrôler à qui et à quoi vous donnez votre temps de cerveau.
00:57:03 J'aimerais remercier la personne qui fait les tweets du LCP,
00:57:06 qui est encore excellente. -Quelle chute !
00:57:09 On lui dit merci. Vous êtes sur Twitter,
00:57:11 je vais vérifier, on verra si vous quittez ou pas.
00:57:14 Thomas, il nous reste un peu moins de temps,
00:57:17 mais on va faire une décision. Vous aviez poussé un coup de gueule
00:57:20 contre les trottinettes, dans la capitale,
00:57:22 cette fois, Anne Hidalgo propose aux habitants
00:57:25 un stationnement plus cher pour les SUV.
00:57:27 -SUV, oui, tout à fait. Je ne suis pas fan d'Anne Hidalgo,
00:57:31 mais je crois que je vais voter pour.
00:57:33 Les SUV, on connaît, c'est un type de voiture
00:57:35 qui est très populaire. Ca représente la moitié
00:57:38 du marché français et bientôt deux tiers en 2030.
00:57:41 C'est des véhicules comme la Peugeot 3008, le Qashqai
00:57:44 ou le BMW X5.
00:57:45 C'est des modèles, ça se justifie pour une famille
00:57:48 qui a plusieurs enfants, mais pour les autres,
00:57:51 c'est un non-sens écologique. -Pourquoi ?
00:57:53 -Le problème, c'est que beaucoup d'automobilistes
00:57:56 en achètent des SUV alors qu'ils sont seuls à bord.
00:57:59 Le taux de natalité continue de décliner,
00:58:01 mais il y a une chose qui n'arrête pas d'augmenter depuis 10 ans,
00:58:05 c'est le poids des véhicules. Ils prennent 10 kg en moyenne
00:58:08 chaque année, un phénomène qu'on appelle l'autobésité.
00:58:11 Plus de carburant pour les déplacer, c'est plus 20 % en moyenne
00:58:15 et l'association WWF a sorti un rapport très éclairant
00:58:18 sur le sujet et la conclusion est sans appel.
00:58:20 La France n'atteindra pas ses objectifs climatiques
00:58:23 si elle ne réduit pas les ventes de SUV.
00:58:26 La COP 28, la grande messe de la transition écologique,
00:58:29 ça commence demain. Ils ont à peine prévu d'en parler.
00:58:32 Si on additionnait tous les SUV, ça donnerait le 6e pays
00:58:35 le plus polluant au monde. -L'électrification,
00:58:38 ça va tout régler ? -C'est l'argument phare,
00:58:40 mais non, c'est pas une solution magique.
00:58:43 Si on la règle, elle va consommer plus.
00:58:45 Greenpeace a sorti aujourd'hui une étude super intéressante
00:58:48 là-dessus. Ils ont analysé trois grands constructeurs,
00:58:52 Hyundai, Volkswagen, Toyota, et ils ont conclu que la croissance
00:58:55 de leur vente de SUV annulait les gains climatiques
00:58:58 qui provenaient de leurs véhicules électriques.
00:59:01 -C'est inquiétant, ce que vous nous racontez.
00:59:04 Est-ce que ces véhicules modernes sont plus sûrs ?
00:59:07 -Ils donnent une impression de sécurité pour ceux à bord,
00:59:10 mais en réalité, ils sont plus dangereux.
00:59:12 Un piéton a deux fois plus de chances d'être tué
00:59:15 en cas de collision avec un SUV.
00:59:17 D'après le journal of safety research,
00:59:19 le risque est multiplié par huit pour un enfant.
00:59:22 Si on résume, le SUV, c'est une aberration écologique
00:59:25 et sociale pour les familles, mais pour les autres,
00:59:28 il faut dissuader. C'est pour ça que je voterai
00:59:30 pour l'interdiction. -En voilà,
00:59:32 vous faites au moins une heureuse, Anne Hidalgo, ce soir.
00:59:36 Merci beaucoup, non, au SUV, mais vous restez sur X.
00:59:39 Merci, Lisa Franchi, merci pour vos parties prises.
00:59:42 A très vite, Stéphanie. Merci à vous, Delphineaux,
00:59:45 d'être passées sur le plateau de LCP.
00:59:47 La diplomatie féministe est un sport de combat,
00:59:50 c'est à lire chez Tailleandier.
00:59:52 Belle soirée documentaire avec Jean-Pierre Gratien.
00:59:55 A demain.
00:59:56 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
00:59:58 Générique
01:00:00 ...