Que reprochent les Gabonais à leur ex-Première dame ? Ecrouée depuis le 12 octobre, Sylvia Bongo Ondimba, inculpée pour faux, usage de faux et blanchiment de capitaux, concentre toutes les animosités. Accusée d’accaparer le pouvoir au détriment du président Ali Bongo Ondimba, affaibli par son accident vasculaire cérébral, elle voyait en son fils Noureddin Bongo Valentin le digne successeur de son époux. Un fils qui a lui aussi été incarcéré après le coup d’État du 30 août.
François Soudan, directeur de la rédaction de Jeune Afrique, revient au micro de RFI sur l'ascension puis la chute de Sylvia Bongo Ondimba.
Retrouvez son portrait signé Georges Dougueli sur JA : https://www.jeuneafrique.com/1504783/politique/sylvia-bongo-ondimba-le-pouvoir-jusqua-la-chute/
François Soudan, directeur de la rédaction de Jeune Afrique, revient au micro de RFI sur l'ascension puis la chute de Sylvia Bongo Ondimba.
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00:00 Bonjour François Soudan.
00:04 Bonjour Marion.
00:05 Le journal revient sur deux personnages au Gabon qui, dites-vous, ont joué un rôle
00:10 clé dans la déchéance de l'ancien président, son épouse Sylvia et son fils Nourédine.
00:14 Dans le fond, François Soudan, qu'est-ce que les Gabonais reprochent à leur ancienne
00:18 première dame ?
00:19 De cette crise pour la vice-présidente, ou plutôt la présidente-pisse du Gabon, tout
00:23 simplement, c'est ce qui ressort en tout cas de ce portrait signé Georges Nouguéli.
00:27 Sylvia Bongo-Ondimba, elle était crouée depuis le 12 octobre à la prison centrale
00:31 de Libreville, inculpée pour usage de faux blanchiment de capitaux, autant d'apputations
00:36 d'ailleurs qu'elle conteste.
00:37 C'est une personnalité complexe, Sylvia, fille d'un universitaire et d'un assureur
00:41 établi au Gabon, tout proche d'Omar Bongo, qui a fait la connaissance d'Ali à la fin
00:46 des années 80, qui l'a épousée en 2000 après des années de vie commune souvent
00:50 tumultueuses et qui apparaît réellement sur le devant de la scène politique à partir
00:54 du second mandat d'Ali Bongo-Ondimba.
00:56 Jusque-là, de 2009 à 2016, Sylvia se contente de gérer à la fois sa propre fondation humanitaire
01:02 et le palais du bord de mer, d'où elle bannie les groupes dans ce traditionnel d'ailleurs
01:06 pour les remplacer par des majordomes britanniques, ainsi que les biens achetés par son mari
01:10 à l'étranger, comme le palais Pozzo di Borgo à Paris, acquis pour 100 millions d'euros
01:14 et qu'elle rénove à très grands frais.
01:15 Alors en août 2016, Ali Bongo-Ondimba est réélu dans des conditions qu'on connaît,
01:19 calamiteuses, et s'il vient prendre l'importance, elle deviendra incontournable après le
01:24 l'AVC qui frappe son mari deux ans plus tard.
01:26 Depuis et jusqu'au 30 août dernier, c'est elle qui régulait d'une main de fer tous
01:30 les accès au président, n'hésitant pas à rabrouer, voire à humilier, ministres,
01:35 premiers ministres et même généraux.
01:36 C'est cette griserie du pouvoir, alors qu'une première dame n'est pas une élue du peuple,
01:41 qui fait qu'elle concentre aujourd'hui sans doute avec excès tant d'animosité,
01:45 surtout de la part de ceux qui ont plié devant elle et qui parfois ont chanté ses louanges.
01:49 Sylvia avait un vrai côté progressiste sur les sujets de société, comme l'égalité
01:54 des hommes-femmes, les droits des homosexuels, mais les Gabonais ne retiennent d'elle que
01:57 son côté.
01:58 Imelda, Marcos, Marion, ils attendent avec impatience son procès.
02:02 Et alors est-ce que Sylvia Bongo préparait son fils pour la succession, comme on l'a
02:07 dit ?
02:08 En fait, le système Sylvia a mis en place à partir de 2018 était avant tout dédié
02:12 à son fils, effectivement Nourdine, qu'elle voyait manifestement au successeur de son
02:16 père.
02:17 Nourdine, c'est un jeune trentenaire, un golden boy, qui a fait de bonnes études en
02:21 Grande-Bretagne, puis a commencé sa vie professionnelle au sein du groupe singapourien OLAM, avant
02:26 de rejoindre la présidence en 2019 avec le titre de coordinateur des affaires présidentielles.
02:30 Très vite, là aussi, Lubris, le vertige du pouvoir et de l'argent facile, le rattrape.
02:34 Lui et son équipe de collaborateurs qu'on appelle à Libreville, à Young Team, alors
02:39 profitant de l'impotence de son père et des faveurs de sa mère, il convoque les ministres,
02:43 il malmène le premier d'entre eux, il se permet même d'apostropher devant ses hommes
02:48 le chef de la garde républicaine, un certain général, Brice Oligine Gueva, qui on le
02:52 sait maintenant, ne lui pardonnera pas ses affronts.
02:54 Tout ça sur fond de cantines pleines de billets de banque, stockés dans des villas, et dit-on,
02:58 mais cela reste à prouver, de falsification de la signature du chef de l'État.
03:02 Nourdine, comme sa mère, est à la fois craint, détesté par la famille Bongo et les caciques
03:06 du régime, pour qui l'un et l'autre ont en quelque sorte pris le président en otage.
03:10 C'est lui et ses proches qui, lors de l'élection présidentielle d'août dernier, imposent
03:14 des résultats contraires au verdict des urnes et ordonnent au général Oligine Gueva de
03:18 se tenir prêt à réprimer les contestations.
03:20 C'est la goutte d'eau de trop et on connaît la suite Marion.
03:23 Merci François Soudan, directeur de la rédaction de Jeune Afrique.