• l’année dernière
Alors que l’image d’Arletty s’estompe dans la mémoire des nouvelles générations, Nicolas d’Estienne d’Orves, écrivain et journaliste, a pris le parti de se mettre dans la peau de la célèbre artiste et comédienne dans une biographie romancée intitulée : "Arletty, un cœur libre". Avec cette voix si reconnaissable et un rire "en cascade comme des rivières de perles", l’auteur s’attache à la vie de l’artiste, à la femme amoureuse mais aussi à la femme défiant toutes les conventions et les conformismes. Arletty est une femme d’origine populaire, naturelle, audacieuse. Elle a surtout été le symbole de la liberté de cœur et de l’indépendance d’esprit. Avec ce roman à succès, Nicolas d’Estienne d’Orves fait entrer l’immense comédienne dans la légende et la rend tout simplement immortelle. Redécouvrez Arletty, un modèle de rebelle.
Transcription
00:00 Madame, Mademoiselle, Monsieur, en donnant à TVL avant le 31 décembre,
00:04 vous construisez le budget de la chaîne pour les 365 jours à venir
00:09 et pour, au-delà, conforter notre indépendance éditoriale et notre indépendance économique.
00:15 Cette indépendance économique s'acquiert face au mur de 6 milliards d'euros et plus
00:20 que perçoit la caste médiatique, le système médiatique que nous combattons.
00:24 6 milliards et plus d'aides publiques, d'argent ponctionné, dérobé.
00:29 Dans nos poches.
00:30 Pendant ce temps, vous le savez, pour défendre nos idées,
00:33 nous ne disposons d'aucune aide ou subvention.
00:35 TVL avance, avance en se battant continuellement pour trouver ses financements pour sa survie.
00:42 Tel est le prix à payer pour la liberté.
00:44 Oui, la liberté a un prix.
00:46 Si avant le 31 décembre, chacun des 6 millions de téléspectateurs mensuels de la chaîne,
00:51 chacun des 1,1 million d'abonnés de TVL sur les plateformes vidéo et les réseaux sociaux
00:56 participent à l'effort en faisant un don, même d'une toute petite somme, le budget est bouclé.
01:02 TV Liberté est à nouveau plus solide et plus fort.
01:07 Au moment où je m'adresse à vous, nous sommes loin, très loin de notre objectif de budget pour 2024.
01:12 Oui, la liberté a un prix, celui de votre engagement concret,
01:15 celui d'une contribution financière défiscalisée qui vous permette de donner volontairement votre impôt à TVL,
01:22 qui vous informe, qui vous défend, qui vous représente, qui vous respecte.
01:27 Il ne reste que quelques jours. Est-ce que nous pouvons compter sur vous ?
01:30 [Musique]
01:53 Écrivain et journaliste, je suis heureux d'accueillir Nicolas Destiendorf pour son nouveau roman
01:58 consacré à un monstre sacré, Arletty, Arletty au cœur libre.
02:03 C'est chez Calman Levy et c'est en vente sur TVL.fr, dans la boutique de TVL.fr.
02:10 Vous êtes habitué de vous retrouver sur cette boutique où vous trouvez les meilleurs livres à acheter pour ces fêtes de Noël.
02:16 Bonjour Nicolas Destiendorf. Bonjour.
02:18 Alors que l'image d'Arletty s'efface dans la mémoire des nouvelles générations,
02:22 vous avez pris le parti de vous mettre dans la peau de la grande comédienne. Audacieux ou présomptueux ?
02:29 Audacieux, présomptueux, ambitieux. En fait, moi je suis surtout romancier.
02:34 J'aime raconter des histoires, j'aime me faire découvrir des personnages.
02:37 Et j'avais fait une biographie de Marc Richard chez Calman Levy il y a cinq ans,
02:41 en prenant ce même principe. Et là, ça s'est imposé.
02:45 C'est-à-dire que je voulais faire découvrir Arletty aux gens, comme vous le disiez, les gens ne savent plus.
02:49 Quand je demande autour de moi, quand on me demande sur quoi je travaille et que je dis Arletty,
02:53 les moins de 40 ans me regardent avec un oeil rond.
02:55 Donc voilà, je voulais l'incarner, la ressusciter et en fait la faire vivre,
03:00 pour qu'elle existe encore plus, disons de façon plus charnelle, que juste un personnage de récit ou de livre historique.
03:11 Vous intéressez au cinéma votre dernier grand roman "Ce que l'on sait de Max De Pa"
03:16 évoquait ce cinéma français, premier cinéma français.
03:20 Vous avez fait donc là le choix d'une autobiographie, pardon, romancée.
03:24 Qu'est-ce qui est juste et vrai dans l'ouvrage ?
03:27 Qu'est-ce qui appartient à l'imagination de l'auteur ?
03:30 Difficile de juger le vrai du faux ?
03:33 Alors en fait, contrairement à Max De Pa, où vraiment tout était une sorte d'écran de fumée,
03:37 là, tout est vrai. J'ai lu toutes les biographies existantes d'Arletty,
03:41 il n'y en a pas beaucoup mais elles sont très précises et pour le coup c'est des vrais travaux d'historiens, de journalistes.
03:45 J'ai écouté à peu près toutes les interviews qu'on peut trouver sur internet ou sur le site de l'INA,
03:49 j'ai regardé toutes les interviews qu'elle a données et j'ai établi une sorte de chronologie biographique
03:55 des origines de sa naissance quasiment jusqu'à sa mort
03:58 et je me suis plongé dans sa vie de façon très très méthodique, jour après jour.
04:03 Et en fait je me suis glissé dans sa vie mais je n'ai rien inventé.
04:06 C'est-à-dire que tout comme dans un biopic un metteur en scène met en image la vie d'un personnage,
04:12 moi je l'ai mise en mots. C'est-à-dire qu'effectivement les dialogues ne sont pas d'une précision diamantaire,
04:17 je n'étais pas là pour reproduire exactement ce qui s'est passé parce que je n'étais pas présent.
04:22 Mais je pense qu'elle a dû quand même un petit peu parler comme ça
04:26 parce qu'au bout d'un moment je me suis presque identifié à mon personnage
04:30 et j'ai vécu par, dans et pour Arletty pendant des mois.
04:34 C'est important ce que je veux dire, c'est que quand on sort de Max Topard,
04:37 où on est allé sur la fiche Wikipédia à la fin pour voir qui était vraiment Max Topard
04:41 et qu'on découvre qu'il est issu de l'imagination exclusive de Nicolas Dessiendorf,
04:45 là Arletty ce que vous racontez de sa vie, de son parcours professionnel, amoureux,
04:51 on est au plus proche de la réalité.
04:53 C'est vrai en fait, tout est vrai.
04:55 C'est un peu comme les biographies que faisait Max Gallo ou que faisait Henri Troya,
04:59 cette tradition de la biographie mise en scène, mise en mots, mise en espace,
05:03 qui permet vraiment d'incarner un personnage et c'est moins froid qu'un récit d'historien.
05:10 Je veux que les gens aient l'impression d'être avec Arletty, de l'entendre parler.
05:14 Alors allons avec Arletty, c'est avant tout Léonie Batia, née en 1898 à Courbevoie,
05:20 c'est à côté de Paris, aujourd'hui dans les Hauts-de-Seine, née dans un milieu populaire.
05:24 Vous lui faites dire "j'étais une petite fille mal élevée, je pense surtout que je me suis élevée toute seule".
05:30 En fait ses parents venaient d'un milieu très modeste, c'était des immigrés si je puis dire,
05:35 Auvergnat arrivait quelques années plus tôt à Courbevoie, son père travaillait à la TPDS,
05:39 c'est à dire l'ancienne de la RATP, il travaillait dans les tramways,
05:42 et sa mère était fine lingère, elle avait un petit frère,
05:44 et c'est un milieu très très modeste de gens qui regardaient Paris depuis l'autre côté de la Seine,
05:48 ils voyaient les lumières de la ville de loin, et il y avait un côté assez zolien,
05:51 assez naturaliste dans cette atmosphère d'ouvrier où la mère disait à sa fille "mais n'espère pas,
05:56 traversez la Seine, n'espère pas, allez dans le grand monde".
05:59 Il y avait une sorte de déterminisme social et toute sa vie elle a lutté contre ce déterminisme,
06:03 avec énergie, volonté, non pas une ambition professionnelle,
06:07 mais juste un désir de liberté et d'aller ailleurs.
06:10 - On n'est pas chez Zola, il n'y a pas le déterminisme, au contraire.
06:13 Elle a raconté sa jeunesse dans son livre, qu'elle a écrit la défense vers la fin de sa vie,
06:17 ses origines modestes et sans le sou dans un milieu ouvrier,
06:20 est-ce que ça explique, pour bien la définir, la Gouaille,
06:24 ce ton de voix qui va l'identifier au cinéma ?
06:27 Est-ce que c'est de cette origine, de cette extraction sociale,
06:30 qu'elle détient cette possibilité de Gouaille qui va faire son succès ?
06:34 - Sans doute, bien sûr.
06:37 Ensuite, cette Gouaille va lui coller à la peau.
06:40 Dès qu'elle va faire du cinéma, elle va systématiquement jouer des rôles,
06:44 soit de femme de chambre, soit de pute au grand cœur, pour généraliser.
06:47 Et c'est enfin ces carnets préverts qui lui donneront des rôles à la mesure de son talent.
06:52 Mais cette Gouaille, elle incarne, c'est vraiment une parisienne,
06:56 quoique Néa Courbevoie, c'est une femme qui a passé presque toute sa vie à Paris,
06:59 même si parfois elle est allée acheter des maisons ailleurs en province.
07:03 Et puis c'était une époque aussi, où je sais même, elle le dit dans d'autres textes,
07:07 où chaque quartier de Paris avait son argot.
07:10 Il y avait l'argot des Batignolles, il y avait l'argot de la Butte aux Cailles.
07:12 Elle avait l'accent de Courbevoie.
07:15 On n'imagine pas à quel point toutes ses parlaient étaient vernaculaires.
07:18 Maintenant, il y a une espèce de grand parler neutre et un peu sans grand relief.
07:24 Mais elle, voilà, elle vient d'un milieu extrêmement populaire et a conservé cette Gouaille.
07:28 Et au bout d'un moment, elle a contenu, quand vous entendez des interviews d'elle à la fin de sa vie,
07:33 elle a un parler assez pointu, elle vivait dans le XVIe,
07:36 et tout à coup, il y a une petite remarque qui sort, et puis elle a ce rire,
07:39 ce rire de petite fille émerveillée, où on retrouve toute l'espèce d'angélisme enfantin.
07:45 Oui, c'est parce qu'elle a cette voix si reconnaissable, ça joute aussi, bien sûr,
07:48 un rire qui est gravé à jamais dans les morts de ceux qui connaissent Arletty.
07:51 Vous dites un rire en cascade comme des rivières de perles.
07:54 Voilà, exactement ça. Comme ça, ça fusait.
07:57 Allez, vous allez vous attacher à Arletty, artiste, mais aussi à la femme amoureuse.
08:02 Elle prend beaucoup de place dans l'ouvrage.
08:04 La femme qui se lance dans de grandes aventures amoureuses.
08:07 Vous mettez en exergue de l'ouvrage cette phrase "on m'a prêté tant d'aventures
08:11 qu'il m'aurait fallu trois siècles pour les vivre".
08:13 Et pourtant, le premier grand amour va être surnommé "Ciel", comme le ciel.
08:18 Et vous allez nous expliquer pourquoi.
08:20 Et c'est un amour platonique et qui va marquer l'artiste à vie.
08:25 Presque toute sa vie. On est l'été 1914.
08:29 Ciel est un fils d'immigré italien d'une communauté qui vivait à Courbevoy, près de chez elle.
08:37 Il a les yeux bleus comme le ciel. Il est beau comme l'amour naissant.
08:42 Ils ont une bluette absolument merveilleuse.
08:44 Le bal du 14 juillet, ils se retrouvent sur le pont des Arts.
08:47 On est presque dans la littérature pour jeunes filles.
08:50 Et là, en fait, elle découvre l'amour.
08:52 Et évidemment, les premiers jours du mois d'août 1914,
08:58 il est envoyé sur le front de l'Est.
09:00 Enfin, il est envoyé sur le front et il meurt en quelques jours.
09:03 Et elle ne s'en remettra jamais vraiment.
09:05 Et de cette expérience tragique, elle dira "je ne serai ni veuve de guerre,
09:08 ni mère de soldat et toute sa vie, elle s'y tiendra".
09:11 On lui proposera de se marier plusieurs fois, elle refusera.
09:13 Et elle tombera deux fois enceinte, elle se fera avorter deux fois.
09:16 - C'est-à-dire pas de mariage et pas d'enfant. - Absolument.
09:18 - Et elle s'y tiendra toute sa vie. - Toute sa vie.
09:20 Même parfois son corps défendant, une partie de lui-même,
09:23 "non, je devrais sortir de ce carcan".
09:26 Mais non, elle s'y tiendra, elle avait une volonté de faire.
09:29 Elle était têtue, elle était obstinée.
09:31 Parfois jusqu'à une forme de...
09:34 Comment dire...
09:36 Enfin, ça allait contre ce qu'elle aurait dû faire.
09:38 Mais voilà, elle voulait jusqu'au bout dans ses convictions.
09:41 - Y compris même dans le pas d'enfance,
09:43 les avortements qu'elle vit de manière très douloureuse.
09:46 - C'est-à-dire se faire avorter pendant le tournage des "Enfants du paradis",
09:49 dans des conditions un petit peu...
09:52 Dans un pays occupé.
09:54 Alors qu'en plus elle était en train de tourner, qu'elle a des malaises.
09:56 On ne se rend pas compte quand on voit les "Enfants du paradis",
09:58 mais il y a certaines scènes où en fait elle souffrait énormément.
10:01 - Après Ciel, il y a Edelweiss,
10:04 genre que Georges Lévy, la chance de sa vie.
10:07 Un banquier suisse et juif face à la bienséance,
10:10 face à sa fille, le nouveau trait de sa personnalité d'Arletty,
10:13 se dessine, c'est véritablement l'indépendance.
10:16 Parce que là encore, c'est très audacieux à cette époque.
10:19 - En fait c'est un jeune homme, fils de banquier suisse-juif,
10:22 vivant une jolie vie là dans l'ouest parisien,
10:25 qu'elle rencontre dans la rue.
10:27 Elle a rencontré toujours les hommes de sa vie dans la rue,
10:29 toujours dans des conditions un peu inattendues.
10:31 Mais c'est une époque où on pouvait aborder les jeunes femmes dans la rue
10:33 sans se prendre un procès.
10:36 Et ce jeune homme, Edelweiss, parce que c'est sa fleur favorite,
10:39 va être son Pygmalion.
10:41 Il va lui faire lire des livres, il va l'emmener au théâtre pour la première fois,
10:44 il va lui faire découvrir des tableaux, il va lui faire découvrir la culture.
10:47 Et il va la façonner. Ils vont rester ensemble pendant deux ans.
10:50 Ça va être l'objet d'une brouille terrible avec sa mère.
10:53 Elle n'en verra quasiment que le soir de sa mort.
10:56 Mais il fait partie de ces hommes qui vont former, façonner,
11:00 la psyché d'Arletty.
11:03 - Est-ce que c'est une femme à hommes ?
11:06 Ou est-ce que c'est une femme qui s'attache à des hommes,
11:08 mais de manière très sérieuse, très forte ?
11:12 Ou est-ce que c'est une femme qui collectionne des hommes ?
11:15 On m'a dit qu'il y a des hommes qui collectionnent des femmes.
11:17 - Non, en fait, elle a besoin d'être amoureuse.
11:19 C'est une femme passionnée.
11:21 Elle est passionnée beaucoup plus par les hommes que par son métier.
11:24 Elle est arrivée au théâtre un peu par hasard.
11:26 Comme les gens de sa génération, le cinémaste, elle aura l'argent de poche.
11:29 À la limite, elle aura la passion de son métier à partir de la guerre et même après-guerre.
11:33 Mais c'est juste qu'elle a besoin d'être dans un état de tension amoureuse.
11:36 Elle a besoin de passion, elle a besoin de déferlement.
11:39 Elle a besoin d'être ravagée par la passion pour un homme.
11:42 Donc, il y a eu beaucoup d'hommes, mais il y a eu quelques hommes importants
11:45 et quelques femmes aussi, peut-être qu'on en parlera.
11:48 Et donc, c'était une femme dont la vie était guidée par, je vous dis, par ses passions,
11:52 par ce besoin d'absolu.
11:55 - On ne la voit pas dans l'ouvrage, on ne la voit pas guidée par le souci de l'argent, par exemple.
12:00 - Non.
12:02 - Elle en a, mais quand elle n'en a plus...
12:04 - Elle en a, elle vient d'un milieu très modeste, mais elle n'a pas...
12:07 En fait, il n'y a pas de désir de revanche, contrairement à d'autres personnes
12:10 qui viennent d'un milieu assez modeste.
12:12 Elle n'a pas de désir de revanche sociale.
12:14 Comme il n'y avait pas d'ambition, il n'y avait pas besoin de gagner
12:18 contre une injustice de la vie au début, en fait,
12:21 elle a presque été tellement anesthésiée à la mort de ciel que,
12:24 quoi qu'il arrive, le sentiment d'être une survivante.
12:27 Donc, elle profite de la vie de toutes les manières possibles.
12:30 - De toutes les manières possibles, elle a toujours cette notion de liberté
12:33 qui sera vraiment associée à sa vie.
12:36 On le retrouve donc dans le choix de ses amours d'homme,
12:39 mais aussi de femme, jusqu'à l'incroyable passion pour Faune.
12:43 Alors, Faune, c'est un homme, c'est Hans, qui est officier de la Wehrmacht
12:46 en plein cœur de tout Paris, en plein cœur de l'occupation,
12:49 une transgression qui aurait pu lui coûter la vie.
12:52 Vous dites, avec Hans, Arletty est allé trop loin dans son amour.
12:55 - C'est-à-dire que, en 1939-1940, Arletty est,
13:00 au fait de sa célébrité, au fait de sa notoriété,
13:02 c'est la plus grande star du cinéma français,
13:04 et en fait du cinéma européen, parce qu'elle était très populaire
13:07 en Allemagne, en Italie, c'était une actrice extrêmement populaire.
13:10 - Sans être allée en Allemagne.
13:13 - Sans être allée en Allemagne, pendant la guerre.
13:15 Elle est tournée en Allemagne, avant la guerre,
13:18 comme tous les comédiens français à peu près.
13:21 Et à un dîner, pendant l'occupation, elle rencontre un beau jeune homme
13:25 de 10 ans de moins qu'elle, avec des oreilles pointues,
13:28 ce qui fait qu'elle le surnommera Faune, et lui, il l'appellera Biche.
13:31 Et en fait, ce jeune homme la fascine.
13:33 Et puis ils vont commencer à se tourner autour.
13:35 Il se trouve qu'effectivement, il est officier de la Luftwaffe,
13:37 il est assesseur au conseil de guerre à Paris,
13:39 et sa famille, les Sörings, sont des proches des Görings.
13:42 Donc voilà, donc effectivement, il fait partie un peu de l'establishment,
13:46 mais c'est un homme qui n'a pas d'ambition militaire particulière.
13:50 Il est officier parce qu'à l'époque, il n'y avait pas le choix.
13:52 Lui, il veut être écrivain, il est passionné de littérature, de cinéma,
13:56 et il se retrouve devant l'actrice la plus connue du moment,
13:59 et c'est un coup de foude, un coup de foudre qui va mettre du temps
14:01 à se mettre en place parce que lui est un petit peu embarrassé.
14:06 Normalement, un officier n'a pas le droit de sortir avec une femme
14:10 dans un pays occupé, contrairement aux simples soldats.
14:12 Et Arletty devrait quand même faire attention
14:14 parce qu'elle est sous le feu des projecteurs,
14:16 mais elle se dit...
14:17 - Elle n'aime pas les Boches.
14:18 - Voilà.
14:19 - Elle n'aime pas les Boches.
14:20 - Elle n'aime pas les Boches, mais lui, c'est pas un Boche.
14:21 Lui, c'est Hans.
14:22 Et c'est ça la différence.
14:23 Et donc, elle tombe folle amoureuse de lui,
14:25 et en fait, elle va s'en foutre, si je puis dire, de tout.
14:29 Elle va s'afficher son amour.
14:30 Elle est tellement fière d'être dans la rue,
14:32 au bras de ce beau garçon, et il se promène.
14:34 Il y a tellement de lumière qui émane de ce couple
14:36 qu'elle se dit "mais le reste, on s'en fiche".
14:37 Qu'il ait un uniforme, qu'il ait un brassard, qu'il ait une croix gammée,
14:39 qu'est-ce que ça change ?
14:40 C'est l'homme que j'aime, c'est l'homme qui me rend heureuse.
14:42 Pourquoi est-ce que je devrais m'arrêter,
14:44 si je puis dire, à des détails vestimentaires ou politiques ?
14:47 Elle n'a jamais été aussi heureuse, aussi amoureuse,
14:49 et aussi comblée de sa vie, donc...
14:50 Et ça, ça va passer avant tout, et ça va lui coûter...
14:53 Et sa carrière, et sans doute sa vue.
14:55 - Ça va lui coûter très cher, elle va être arrêtée.
14:58 - Absolument.
14:59 Elle est arrêtée.
15:00 Elle est...
15:02 En fait, il n'y a pas eu de procès.
15:04 En fait, il n'y avait rien, véritablement, au contraire,
15:07 à part le fait qu'elle a été la maîtresse d'un Allemand,
15:09 mais contrairement à d'autres comédiens ou comédiennes,
15:11 contrairement à Dario, Vivienne Roman, Salbert, Préjean,
15:14 étant d'autre, elle n'est pas allée en Allemagne,
15:16 elle n'a pas travaillé pour la Continentale.
15:18 Les Allemands auraient bien voulu la faire travailler pour eux,
15:20 mais elle a toujours refusé.
15:22 Simplement, c'était la femme la plus connue de son moment,
15:25 de l'époque, et elle avait cette liberté de ton
15:28 qu'à la fin de la guerre, les gens avaient envie un peu de...
15:31 entre guillemets, de se payer Arletty,
15:32 tout comme ils se sont payés Guitry.
15:34 C'est-à-dire des gens qui les avaient tellement énervés pendant des années,
15:36 hop, c'était haute toile à coche mimette,
15:38 et en fait, elle va subir pas mal d'humiliations,
15:40 elle va être envoyée à Drancy, à la conciergerie,
15:42 et ensuite, à la suite d'une dénonciation pas très claire
15:46 de la part d'un malfrat qui l'aurait croisée
15:48 à la prison du Cherchemidi dans les années 43-44.
15:52 En fait, c'est une histoire pas très claire,
15:55 mais on met ça de côté, on se dira "bon, on s'occupera de ça plus tard",
15:58 mais en attendant, mettons-la au verre,
16:00 et en fait, elle est assignée à résidence pendant deux ans,
16:02 le temps que cette histoire soit réglée,
16:04 ça aboutit à un non-lieu, en fait, il se trouve que le témoin s'était trompé,
16:07 que ça n'était pas Arletty, mais elle passe deux ans
16:09 dans un château dans la banlieue parisienne,
16:11 à être en fait une sorte de belle captive pour ses propriétaires,
16:14 et tous les week-ends, le tout pareil vient déjeuner le dimanche
16:17 dans le château de la Houssay, en Seine-et-Marne,
16:19 donc voir Arletty, et ensuite, le soir, il rentre chez eux,
16:22 ce qui fait que, par exemple, elle n'assiste pas
16:24 à la première des "Enfants du paradis".
16:26 Son nom n'est pas sur l'affiche, les articles ne la mentionnent pas,
16:29 ils mentionnent "Garance", ce qui paraît inimaginable aujourd'hui,
16:31 et donc, ça va créer en elle une amertume évidemment très profonde,
16:35 et surtout une lucidité sur le genre humain
16:37 dont elle ne se départira jamais.
16:39 – Voilà, toute la presse ignorera son nom,
16:41 c'est déjà le politiquement correct qui se met en place.
16:43 On connaît ça maintenant.
16:45 Arletty est une femme d'origine populaire,
16:47 naturelle, indépendante, libre, sans attaches,
16:49 on arrive déjà maintenant, grâce à vous, à la dessiner,
16:51 mais c'est aussi et surtout une comédienne dans l'âme, bien évidemment,
16:54 et en lisant le livre, on découvre que si le public connaît,
16:56 comme moi, l'artiste Paul Pony de très très grands rôles,
16:59 son vrai métier, c'est la scène, c'est le théâtre où elle commence,
17:03 et d'ailleurs finit sa carrière avec, en point d'orgue,
17:07 une pièce bascule, "Frick-frack".
17:10 – En fait, elle commence le théâtre, combien de temps ?
17:13 Par hasard, elle se promène sur le boulevard des Capucines,
17:15 on est en 1920-1921, elle se promène sur le boulevard des Capucines,
17:19 elle est abordée par Paul Guillaume,
17:21 qui était un marchand d'art très connu à l'époque,
17:23 qui voit passer cette très jolie demoiselle,
17:25 et qui lui dit, bon qu'il la dragouille un petit peu,
17:27 elle se laisse faire, et puis il comprend qu'il n'y avait pas grand chose à faire de plus,
17:31 mais il dit "Mademoiselle, vous devriez faire du théâtre,
17:33 vous avez jamais pensé à ça ?" Elle n'avait jamais pensé à ça.
17:35 Il lui donne son bristol, il lui traverse le boulevard,
17:37 en face de la ville théâtre des Capucines, "Allez voir le directeur de ma part,
17:40 il s'occupera de vous". Elle n'avait rien d'autre à faire de sa journée,
17:43 elle y va, elle donne le bristol, le directeur lui dit "Vous savez chanter ?"
17:46 "Non." "Vous savez jouer à la comédie ?" "Non."
17:48 "Vous savez danser ?" "Non." "Eh ben on va essayer."
17:50 Il la fait monter sur scène, il lui dit "Chantez quelque chose",
17:53 et à cette époque-là, on était en pleine anglomanie,
17:55 donc elle dit "Je vais chanter Tipper Harry",
17:57 et donc elle chante Tipper Harry, et avec une totale absence de talent,
18:01 mais avec un abattage, une présence et un charme incroyable,
18:03 et donc elle est engagée. C'était l'époque où il y avait des revues,
18:06 c'était un espèce de spectacle qui mélangeait des sketches, des chansons,
18:09 des numéros d'illusionnistes, ce genre de choses,
18:12 et en fait, très rapidement, elle passe d'une utilité à un second rôle,
18:17 un second rôle à un premier rôle, et elle joue des revues constamment
18:20 pendant des années, et tout à coup ça devient du théâtre,
18:23 ou elle se met à jouer au théâtre, le cinéma arrive, le cinéma parlant,
18:26 et il y a une espèce d'interpénétration entre tous ces genres artistiques,
18:29 ce qui fait qu'elle est constamment en train de tourner, jouer, chanter,
18:33 tout ça jusqu'à ce "Frick Prax", cette pièce de théâtre d'Edouard Bourdet
18:36 à la fin des années 30, qui est un succès énorme,
18:38 qui est de la bascule de sa carrière, qu'elle joue avec Michel Simon et Victor Boucher,
18:41 s'ensuit un film très fameux, où Boucher est remplacé par Fernandelle,
18:45 et après la rencontre capitale avec Marcel Carnet,
18:48 et les grands films qu'on connaît, "Hôtel du Nord", "Le jour soleil", "Les enfants du paradis".
18:51 - "Hôtel du Nord", c'est la vedette qui devient star, star de l'écran,
18:54 c'est bien sûr donc "Hôtel du Nord", Marcel Carnet,
18:56 vous venez de le dire, avec Louis Jouvet notamment,
18:59 et elle joue une prostituée, Madame Raymond,
19:02 et vous vous gardez bien d'écrire le mot "atmosphère",
19:07 pourtant ce mot-là il est lié à Arletty, c'est sa gueule d'atmosphère
19:10 qui va faire tout dans le film, et qui va la faire rentrer dans la postérité.
19:15 Ce mot "atmosphère", il n'est pas noté.
19:17 - Disons que je voulais éviter d'enfoncer les portes ouvertes.
19:19 Il y a toute une série de citations qui ont été prêtées à Arletty,
19:23 qu'elle n'a souvent pas prononcées, qu'on lui a prêtées, enfin on ne prête qu'aux riches.
19:27 Donc je ne voulais pas faire une sorte d'Arletty caricaturée.
19:33 C'est simplement la petite musique d'Arletty, c'est sa voix,
19:36 ce n'était pas la peine d'insister là-dessus.
19:39 Mais "atmosphère", c'est le film qu'elle préférait, "Hôtel du Nord",
19:42 dialogue de janson et non pas dialogue de prévère d'ailleurs,
19:45 parce que le préféré était aux Etats-Unis à l'époque.
19:47 Et ce qui est amusant c'est que Arletty et Jouvet sont des second rôles,
19:50 les premiers rôles c'est Jean-Pierre Romand et Annabella,
19:52 et vous demandez aux gens, personne ne se souvient des deux premiers rôles,
19:55 qui étaient les jeunes premiers, Jean-Pierre Romand, star de l'époque,
19:57 puisqu'il avait joué dans la Coda, mais Annabella était une star aux Etats-Unis aussi.
20:00 Et le film ne vaut essentiellement que par les scènes merveilleuses d'Arletty et de Jouvet,
20:05 qui ont demandé dix jours de tournage, alors que le tournage a duré sur des mois.
20:08 Mais voilà, c'est aussi une sorte d'acmé de ce qu'était le cinéma français,
20:12 où les second rôles avaient plus de caractère que les premiers rôles.
20:15 - Cher cher cher, Annabella, vous avez raison.
20:17 Madame Raymond va faire face à un autre personnage, Garance, dans Les Enfants du Paradis,
20:23 alors là c'est le chef-d'oeuvre absolu du cinéma français,
20:25 je pense qu'on ne me contredirait pas sur ce point,
20:28 tourné dans La Tourmente, avec une Arletty plongée, elle aussi, dans La Tourmente.
20:33 - Les conditions de tournage, et des Enfants du Paradis, et avant des Visiteurs du Soir,
20:39 c'est absolument extravagant d'avoir pu monter des films aussi ambitieux,
20:43 avec autant de personnages, pendant l'occupation, en ne travaillant pas pour la continentale.
20:47 C'est-à-dire qu'ils n'avaient pas les moyens allemands pour tout mettre en place,
20:50 et Carnet et Prévert y sont arrivés.
20:53 Et d'ailleurs, Arletty le disait, on voit surtout dans les carnets de Josette Chambrain,
20:58 la fille de Pierre Laval, quand parfois il y avait des petits problèmes pendant un tournage,
21:01 Carnet disait à Arletty "est-ce que tu peux appeler ta copine Josette, qu'elle appelle papa,
21:05 papa c'était Pierre Laval", et souvent les choses se débloquaient,
21:08 parce que Laval passait un coup de fil trois secondes pour débloquer l'arrivée d'un train,
21:12 ou un camion qui était bloqué.
21:15 Mais c'est des films qui étaient incroyablement bricolés,
21:17 qui étaient construits avec des bouts de ficelle,
21:20 et c'est parfois aussi comme ça que naissent les chefs-d'oeuvre,
21:23 et comme sont nés tant de chefs-d'oeuvre à cette période de complexité,
21:26 à tout point de vue, où tant de choses extraordinaires sont nées de ces années noires.
21:30 - Nicolas Desseneur, vous êtes cinéphile, comment vous interprétez l'idée
21:35 qu'on arrive dans Les Enfants du Paradis à extraire Arletty,
21:40 comme quelque chose d'un moment magique, alors qu'elle est entourée de très grands artistes,
21:44 que ce soit Baptiste, Frédéric Vélelé, que ce soit Pierre Brasseur, Jean-Louis Barraud,
21:50 et tant d'autres, elle est une parmi les grands artistes,
21:54 et pourtant elle domine par son éclat.
21:56 - Par son éclat, par le génie de Prévert, qui a construit intégralement son scénario
22:00 autour du personnage de Garance, parce que pour le coup c'est un film
22:03 qui a été intégralement écrit et pensé pour les comédiens qui le jouent.
22:06 Le casting était fait même avant l'écriture, et Garance c'est le personnage central,
22:11 et surtout c'est le seul personnage imaginaire d'une pléiade de personnages
22:15 qui ont vraiment existé, Frédéric le Maître, De Bureau, Laster, ils ont tous existé,
22:19 sauf Garance, qui incarne l'esprit de Paris, la femme française, la liberté,
22:25 pour ce film tourné dans des conditions extravagantes, à la Victorine, à Paris,
22:30 avec un tournage interrompu à cause des débarquements en Méditerranée,
22:34 et qui miraculeusement est le dernier grand film tourné sous l'occupation,
22:39 et le premier grand film de la Libération.
22:42 - Un film de plus de 3 heures, un chef-d'oeuvre absolu, vous signez le terme ?
22:47 - Ça fait partie de mes films favoris, moi je suis un Renoirien,
22:53 donc je mettrais toujours les films de Renoir au-dessus des films de Carnet,
22:56 mais "Le jour se lève", "Les éditeurs du soir" et "Les enfants du paradis"
23:01 sont des films où il y a un miracle, surtout c'est le résultat d'une équipe,
23:06 les films de Renoir reposent sur Renoir, là c'est une équipe, c'est une magie.
23:11 - Il y a les lumières, il y a des textes, il y a mille choses.
23:14 - Il y a les décors, il y a la musique de Cosma, il y a les décors de Tronnerre,
23:18 c'est le travail d'équipe, c'est la symbiose, c'est une bande,
23:21 et c'est une bande de copains, qui pourtant était de tous horizons,
23:25 Robert Le Vigan devait jouer le personnage de Géricault au début,
23:29 donc il y avait des collaborationnistes, des communistes, des juifs,
23:33 il y avait tout et tout ça s'entendait pour défendre l'art,
23:36 et c'est ce qui fait le miracle de ce film,
23:39 qui tourne entièrement comme les planètes autour du soleil, autour de Garance.
23:44 - L'éternité, Arletty l'a acquise avec un regard, une réplique qui fait mouche,
23:47 une voix, une liberté, une goye, et par un talent bien sûr extraordinaire.
23:51 Vous ne parlez pas de l'art, Arletty chanteuse, pourtant elle reste encore dans les mémoires.
23:56 - Elle chantait bien, mais parce qu'il fallait faire un tri,
23:59 moi je suis plus cinéphile, j'adore l'histoire du musical,
24:02 mais il n'y avait pas tant de choses que ça à développer,
24:04 si ce n'est parler de toutes les revues dans lesquelles elle a chanté,
24:07 citer des chansons, le risque c'était de faire du catalogue,
24:11 comme je ne parle pas trop de la comédienne de théâtre,
24:14 j'en parle, mais on est surtout, je parle de l'Arletty femme,
24:18 de l'Arletty amoureuse, de l'Arletty passionnée, de la femme blessée,
24:23 c'est une biographie, je n'aime pas le mot sentimental,
24:26 mais c'est une biographie intime d'Arletty.
24:28 - Ce n'est pas une femme heureuse ?
24:30 - Non, elle le disait, elle a connu des moments de bonheur,
24:34 mais en fait elle était très lucide, dès la mort de ciel,
24:37 elle a su ce qu'il fallait penser du genre humain,
24:40 elle a toujours été pacifiste, elle avait une méfiance,
24:46 mais aussi elle avait le sentiment d'être une survivante quoi qu'il arrive,
24:49 donc elle profitait, profitait, profitait,
24:51 mais elle avait toujours l'une de mien,
24:53 elle savait comment les choses allaient se terminer,
24:55 mais la destinée était assez rosse avec elle.
24:58 - Il y a plein de mystères bien évidemment, il faut lire le livre,
25:01 mais il reste un grand mystère quand même,
25:04 que pensait Arletty en matière politique ?
25:06 Alors on la découvre pacifiste et viscéralement anti-Bosch dans les années 30,
25:10 et pourtant traitée de collabo et de pute à Bosch,
25:12 pardonnez-moi le désespression, mais c'est cela,
25:14 on sait qu'elle n'a participé à aucun voyage de propagande,
25:16 elle n'a jamais fait de déclaration politique au moment de la seconde guerre mondiale,
25:19 mais elle va soutenir quand même Céline, Bardèche et quelques autres au pire moment,
25:23 c'est-à-dire au moment de l'épuration,
25:25 elle va sauver Tristan Bernard pourtant des griffes nazis,
25:28 puisque Tristan Bernard est juif,
25:30 elle va être blâmée par le comité d'épuration,
25:33 que pense la vraie Arletty ?
25:35 - Je pense qu'elle n'avait pas vraiment de conscience politique,
25:38 en fait là, comme beaucoup de proscrits de 1944-1945,
25:42 elle s'est un peu retrouvée poussée dans le camp des maudits,
25:45 elle a rencontré Céline pendant la guerre,
25:47 mais c'est vraiment après la guerre qu'ils sont devenus proches,
25:50 et puis elle avait surtout ce… voilà,
25:52 elle a toujours détesté hurler avec les loups,
25:54 donc il y avait aussi une forme de provocation,
25:56 comme un pied de nez à assumer ses amitiés incorrectes,
25:59 elle était… voilà, elle était…
26:01 elle était amie avec Maurice René…
26:03 - Elle aimait le scandale quand même.
26:05 - Oui, elle aimait le scandale, elle aimait déranger,
26:07 elle aimait provoquer, elle adorait le voir dans le regard de l'autre,
26:10 une sorte de rester, elle aimait perturber,
26:13 c'était une emmerdeuse au sens le plus noble du terme,
26:16 elle détestait le consensus,
26:18 mais il n'y a pas vraiment de conscience politique,
26:21 c'est pas ce qui la caractérise,
26:23 elle, elle aimait la liberté à tout craint.
26:26 - Arletty, Nicolas Dessine, donc ce personnage,
26:30 vous avez réussi à le quitter ou vous êtes toujours avec ?
26:32 - En fait, ce livre a été écrit il y a pas mal de temps,
26:35 parce que c'est le décalage des publications,
26:37 je l'ai écrit pendant le confinement,
26:39 où je me perds dans la Drôme Provençale,
26:41 et donc j'ai vécu complètement en vase clos avec elle,
26:43 pendant deux mois, à ne vivre que par, dans et pour elle,
26:46 et oui, j'ai mis un peu de temps,
26:48 mais bon, il suffit que je regarde "Les enfants du paradis"
26:51 avec mes enfants, et je suis de nouveau plongé dans ce monde assez merveilleux.
26:55 - Vous l'aviez rencontrée ?
26:56 - Arletty, non, hélas, elle est morte quand j'avais 18 ans,
26:59 j'avais déjà vu "Les enfants du paradis",
27:01 mais très franchement, à l'époque, je pensais qu'elle était déjà morte.
27:03 Donc j'ai appris aux actualités, et là je me suis dit, zut,
27:06 et en plus ce convoi qui a l'été 1992,
27:09 fait un détour par l'Hôtel du Nord,
27:13 avant d'aller au cimetière de Courbevoie, où elle est enterrée.
27:16 - Vous lui avez donné une postérité, une éternité ?
27:20 - Gageons !
27:21 - Merci à vous.
27:22 - Merci beaucoup.
27:23 Merci beaucoup.
27:24 [Musique]

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