Défi ultime : "Les hommes se révèlent" selon Thomas Coville
À l'arrivée, il y aura six personnes transformées.
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SportTranscription
00:00 À l'arrivée, il y aura six personnes transformées.
00:03 Le navigateur Thomas Coville est le seul parmi les marins engagés dans l'ultime challenge
00:08 à avoir déjà réalisé un tour du monde en solitaire à bord d'un maxitrimaran.
00:12 Avant le départ de la course dimanche à 13h30 à Brest,
00:16 il est revenu auprès de l'AFP sur ses précédentes aventures autour du globe
00:20 et sur les défis qui les attendent, lui et ses cinq concurrents,
00:23 Charles Caudrelier, Armène Le Cleac'h, Tom Laperche, Anthony Marchand et Éric Perron.
00:28 Question, comment en arrive-t-on à faire un tour du monde à la voile ?
00:33 Réponse, c'est en voyant mon père, qui pouvait être quelqu'un d'assez austère,
00:38 ému en écoutant à la radio le départ de la Whitbread en 1977,
00:42 course à la voile autour du monde en équipage et par étapes, note de la rédaction.
00:47 Je pense que lui aussi il a rêvé de faire le tour du monde
00:50 et c'est un peu son imaginaire qui m'a emmené à réaliser toutes ces aventures.
00:54 Q, vous avez désormais huit circomnavigations à votre actif,
00:58 trois en solitaire dont un record, que retenez-vous de votre premier périple autour du monde ?
01:04 R, j'ai embarqué avec Olivier de Kersauson en 1997 pour un trophée Jules Verne,
01:09 tentative de record autour du monde en équipage, note de la rédaction.
01:14 Cela a été extrêmement initiatique.
01:17 L'ambiance était tendue car il y avait une grosse pression pour réussir,
01:21 c'était très difficile, mouvementé et éprouvant.
01:24 Mais à l'arrivée je suis choqué et abasourdi par ce que je viens de vivre
01:28 et je n'ai qu'une envie, y retourner.
01:31 Au bout de vingt jours en solitaire, on devient un animal.
01:34 Q, pourquoi ?
01:36 R, je pense que c'est un peu comme les Himalayistes qui tombent nez à nez avec le sommet d'une montagne.
01:42 Ils reviennent différents.
01:44 Je me suis dit, plus si je veux prétendre à être un bon marin un jour,
01:49 c'est là qu'il faut aller, point plus les hommes se révèlent entre le cap de bonne espérance et le caporne.
01:54 Q, au-delà de cette approche philosophique, il y a aussi le défi physique ?
01:59 R, cela fait partie des choses qui m'attirent car, avant de gagner un tour du monde, il faut le finir.
02:05 C'est presque une bagarre contre soi-même.
02:08 La fatigue, la gestion d'un engin complexe.
02:12 Au bout de vingt jours en solitaire, il y a toujours la même sensation,
02:16 on devient un animal, en symbiose avec le voilier.
02:19 Je ne ressens pas ça sur les autres courses car elles durent moins longtemps.
02:23 On sera les seuls à savoir ce que les autres ont traversé.
02:27 Q, pour la première fois, des maxi trimarans vont faire le tour du globe ensemble lors d'une course,
02:32 cela change votre approche ?
02:35 R, il n'y a aucun imposteur parmi les marins qui partent.
02:39 Ce sont tous des mecs brillants.
02:41 On va partager quelque chose ensemble d'absolument unique.
02:45 À l'arrivée, il y aura six personnes changées et on sera les seuls à savoir ce que les autres ont traversé.
02:51 Mais pour moi, la course va commencer au cap-horne,
02:54 avant cet impossible d'être dans le comptable et la stratégie, ce sera du dosage et de la gestion.
03:00 Q, quelles sont les étapes marquantes d'un tel périple ?
03:04 R, il y a toujours les deux nuits avant le départ,
03:07 ou si tu affirmes avoir bien dormi c'est que tu es un bon menteur.
03:11 Et puis l'arrachement au coup de canon avant plusieurs jours de tension,
03:14 on a toujours peur de l'erreur de montage sur le bateau.
03:17 Ensuite c'est plus jouissif, car on s'approprie petit à petit la machine et les éléments.
03:22 Q, ce tour du monde doit durer un peu plus d'une quarantaine de jours,
03:26 il y a encore du temps pour se sentir seul, s'ennuyer et contempler ?
03:31 R, non, pour la solitude et l'ennui.
03:34 Dès que tu as un moment de répit, c'est que tu peux faire quelque chose, dormir, manger ou réparer.
03:40 C'est une épreuve assez bestiale au final.
03:43 La contemplation, parfois mais ce n'est pas vraiment des moments carte postale
03:47 comme on peut se l'imaginer avec un beau coucher de soleil.
03:50 C'est plutôt de se satisfaire quelques minutes d'un bon réglage de voile
03:54 ou d'une longue session de vol au-dessus de l'eau.
03:57 Des instants plus fugaces, mais dont tu te souviens toute une vie.
04:01 Propos recueillis par François Dastier