"Voilà pourquoi j’aime la galette, c’est vraiment un truc sacral et familial." À l’occasion de l’Épiphanie, Akim Bouhadda, artisan boulanger et lauréat de la "Meilleure galette du Grand Paris 2023", est venu nous parler de la grande tradition de la galette des rois.
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00:00 Donc là, on coupe la frangipane.
00:01 Donc frangipane, galette plus consommée de France.
00:04 C'est celle-là qu'on retrouve partout.
00:05 Je crois qu'on parle de plusieurs dizaines de millions
00:07 qui se vendent au moment de l'épiphanie.
00:08 Donc ça, c'est le best-seller.
00:10 Théoriquement, elle va être bien chargée dedans.
00:11 Elle va être bien gourmande.
00:12 Et c'est la Nutella.
00:14 Je me suis planté.
00:15 Salut, je m'appelle Hakim Bouada.
00:17 Je suis artisan boulanger.
00:18 Et je viens vous parler de la grande tradition de la galette des rois.
00:20 Le 6 janvier, c'est l'épiphanie.
00:22 Donc c'est le jour de la galette des rois.
00:23 Aujourd'hui, je vous ai ramené quatre galettes.
00:25 Donc la galette primée crème d'amande feuilletage.
00:27 Galette frangipane, telle qu'on la consomme généralement.
00:30 Les variantes, donc galette aux pommes.
00:32 Et galette frangipane Nutella, pour les plus jeunes et les plus gourmands.
00:35 Alors du coup, galette frangipane,
00:37 je ne sais pas si on entend le bruit, mais il y a un bon feuilletage.
00:40 Toujours intéressant à entendre parce que c'est révélateur.
00:43 Et après, bien sûr, la dernière chose avant de manger qui ne trompe pas,
00:45 c'est la prise en main.
00:46 Donc ce qu'il faut, c'est qu'elle tienne bien au moment où je la retire.
00:50 Et hop, et voilà.
00:51 Et en plus, comme j'ai de la chance, je suis tombé sur la fève.
00:54 Et ce n'est pas fait exprès.
00:55 Je suis le roi de la journée, le roi de la galette 2023 surtout.
00:59 La recette que j'ai, moi, historiquement, c'est une recette qui vient d'un orment
01:02 qui était mon maître d'apprentissage et qui me l'a transmis.
01:04 Et moi, la tendance que j'ai, c'est que la galette, je la travaille sur six jours.
01:07 Le moment où on va mettre la farine dans le pétrin,
01:09 jusqu'au moment où elle va rentrer au four,
01:11 il va s'écoler six jours.
01:12 Ça veut dire qu'on la travaille, on la sort tous les jours une dizaine de minutes,
01:15 on la travaille et on la remet au frais.
01:16 Ça permet au sucre de se mélanger,
01:18 d'avoir une pâte bien reposée et un maximum d'arôme.
01:20 Euh...
01:24 Je passe.
01:25 J'en vends, je ne peux pas les critiquer.
01:28 Il y en a qui mettent Nutella, il y en a qui mettent des fruits, encore une fois.
01:32 C'est des variantes qu'on fait pour que tout le monde puisse avoir accès à ça.
01:35 Il y en a qui n'aiment pas la crème d'amandes, il y en a qui sont si allergiques.
01:38 Et il faut savoir aussi une chose, c'est que historiquement,
01:40 la galette des rois, elle n'est pas fourrée.
01:42 Elle est vide, c'est une galette sèche.
01:44 Si vous remontez dans le temps où on mettait le haricot,
01:45 il n'y avait aucune crème dedans.
01:46 Ça veut dire qu'elle faisait un centimètre d'épaisseur.
01:48 Aujourd'hui, dans notre boulangerie, on a des gens qui ont 75-80 ans
01:52 qui ne mangent pas de la galette des rois comme ça,
01:54 mais qui mangent la galette d'époque.
01:56 Donc sans crème d'amandes, sans rien, une galette sèche.
01:58 Ah oui, donc déjà, la crème d'amandes, ce n'est même pas la tradition.
02:00 Non, la crème d'amandes, ce n'est même pas la tradition.
02:02 La frangipane, encore moins,
02:04 parce que c'est venu plusieurs siècles après la crème d'amandes.
02:07 Et je veux même aller plus loin, la crème d'amandes.
02:09 La galette crème d'amandes, ça s'appelle un pétivier.
02:11 Donc on a tendance à mettre du kirsch, on appelle ça un pétivier.
02:14 Et la galette des rois telle qu'on la connaît aujourd'hui,
02:17 c'est crème d'amandes et crème pâtissière.
02:18 Sinon, c'est un pétivier.
02:19 Non, c'est compliqué.
02:20 En fait, la galette, c'est marrant parce que c'est facile à faire,
02:23 en même temps, c'est très technique.
02:24 Et ça a un peu rapporté à son histoire.
02:26 Son histoire, elle est très compliquée, alors qu'elle a l'air simple aujourd'hui.
02:29 Mais quand on remonte, on trouve 4, 5, 6,
02:31 ou même 7 histoires différentes sur le même produit,
02:33 ce qui est très rare en pâtisserie.
02:34 - Toi, comment tu fais chez toi ?
02:36 Est-ce que tu as une tradition pour couper la galette ?
02:38 - En fait, il y a deux façons de faire.
02:39 Il y en a qui mettent un enfant sur la table pour dispatier les parts.
02:42 On disait, tel part, c'est un tel et un tel.
02:44 Et la deuxième chose, il y en a qui sont un peu plus taquin,
02:46 ils connaissent un peu l'histoire.
02:47 Ils choisissent une personne de qui ils se moquent un peu toute la journée
02:50 ou à qui on demande de faire des blagues ou des jeux de rôle comme ça.
02:52 Voilà, il y a deux façons de faire.
02:53 Et dans les grandes, grandes galettes, on met le roi, la reine, le prince et la princesse.
02:57 - Ah bon ?
02:58 - Là, on fait la galette de Matignon au mois de janvier.
03:00 C'est une galette qui va représenter 100 personnes, qui fera 1,30 m de largeur.
03:03 Pour la galette de Matignon, il n'y aura pas de fèves dedans.
03:05 Il n'y a jamais de fèves quand on s'adresse à l'État, que ce soit les ministres ou l'Élysée.
03:08 Il n'y a pas de fèves parce qu'il n'y a pas de roi à Matignon.
03:10 Comme il n'y a pas de roi à l'Élysée, ça, il faudra demander à M. Macron
03:13 pourquoi on ne met pas de fèves dans la galette, mais c'est comme ça.
03:15 C'est d'usage, en fait, de ne pas mettre de fèves.
03:17 Pour eux, il n'y a pas de roi, donc s'il tombe dessus, ce serait polémique.
03:20 - Allez, on les coupe ? - Ouais. Alors, ça, c'est la pomme.
03:24 Alors, on voit ici les lamelles de pomme. On voit les sucres. On voit que c'est caramélisé.
03:28 Le but du jeu, quand on mange une part de galette, c'est réussi quand la personne veut une deuxième.
03:31 Par contre, si on fait des trucs hyper chargés, qui sont à la limite...
03:35 Des fois, on dit écœurant, mais en fait, ce n'est pas écœurant, c'est juste que c'est trop chargé.
03:38 Là, ce n'est pas bon. Donc, nous, on veut toujours qu'il manque une bouchée.
03:40 Donc là, on a un super feuilletage. On a la pomme qui est bien caramélisée.
03:43 On voit les morceaux et franchement, j'ai envie de la manger, mais bon, je me retiens.
03:49 Je peux ?
03:51 Elle est très bonne. Très bonne, pas sucrée. On sent bien la pomme.
03:55 On dirait que c'est mon métier.
03:58 Et puis après, il y a un truc sur la galette aussi qu'on oublie.
04:00 La galette, aujourd'hui, c'est un truc qui est vachement sacral.
04:02 On ne va pas acheter une galette au hasard. Généralement, il y a même une discussion autour.
04:05 Où c'est qu'il y a une bonne galette ? Que se t'en pense ?
04:07 Et à table, il y a vraiment la discussion de c'est bon, c'est pas bon.
04:10 Quand on va acheter des pâtisseries, quand on va acheter du pain, ce n'est pas tout à fait pareil.
04:13 Donc voilà pourquoi j'aime la galette. C'est vraiment un truc sacral et familial.
04:15 [Musique]