Décès de Beckenbauer : "Il était le succès de l'Allemagne", l'hommage de Breitner pour le Kaiser

  • il y a 7 mois
La légende du football Franz Beckenbauer s'est éteinte ce lundi à l'âge de 78 ans. Polo Breitner et l'After Foot se rappellent du Kaiser et de son impact sur le football.
Transcript
00:00 - Il s'est donc éteint à l'âge de 78 ans. Franz Beckenbauer n'est plus le plus grand joueur de l'histoire du football allemand,
00:06 le plus grand défenseur de l'histoire, ça peut être un débat d'ailleurs.
00:09 En tout cas l'homme qui a révolutionné le poste de libéraux, double ballon d'or, champion du monde en tant que joueur et sélectionneur,
00:14 vainqueur de trois Coupes d'Europe, des clubs champions, vainqueur d'un euro aussi.
00:17 On va raconter son histoire. Paulo, on savait depuis plusieurs jours que sa santé était précaire.
00:22 - Ouais, j'ai presque envie de dire depuis quelques années. Il apparaissait de moins en moins dans les médias allemands,
00:27 il s'était réfugié un peu comme d'habitude en Autriche. On va la faire très courte, depuis le décès de son fils,
00:34 atteint d'une tumère au cerveau en 2015, il n'était plus le même, il a eu beaucoup d'opérations.
00:39 Et puis lui qui avait phagocyté, j'ai envie de dire, la télé allemande pendant quasiment 40 ans,
00:45 eh bien il n'apparaissait plus du tout. Aussi bien on ne lui demandait plus son avis,
00:48 vous regardez les derniers reportages sur la télé du FC Bayern, bon la façon dont il s'exprime, c'est pas terrible terrible,
00:56 et c'était même assez dramatique de le voir dans cet état-là. Donc la surprise, elle n'est pas là, c'est une demi-surprise en fait.
01:03 - Comment réagit en Allemagne ? J'imagine même pas la dimension de l'hommage, c'est énorme.
01:07 - Bah écoutez, il y a deux ans malheureusement, on a parlé de Gerd Müller qui est un petit peu rehaussé aujourd'hui
01:13 dans la hiérarchie du football allemand, en considérant qu'il est un bis avec Beckenbauer,
01:18 mais c'est pas du tout. Aujourd'hui tu vois que le vrai numéro un en Allemagne, c'est Franz Beckenbauer,
01:24 ce qu'il a représenté sur le terrain et en dehors du terrain, en tant que businessman aussi,
01:29 en tant que joueur de football extraordinaire, en tant que tête du football et d'un poste qu'il a complètement révolutionné, tu l'as dit.
01:36 Moi il y a une phrase que j'adore, c'est Zepp Mayer, l'ancien grand gardien du Bayern Munich qui dit
01:41 "si Beckenbauer tombait d'une fenêtre, il tomberait vers le haut".
01:46 Et donc il s'envolerait quoi. - Il s'envolerait, très très beau.
01:51 - Donc c'est un peu ce qu'on retient de Beckenbauer. Et là, et moi je vais dire aussi par rapport à nos éditeurs,
01:56 moi je suis né en 1971 et donc Beckenbauer je ne l'ai pas suivi, c'est pas directement ma génération ou les joueurs que j'ai connus.
02:02 Et donc tout ce que je raconte c'est par rapport aux livres, aux documentaires que j'ai vus, aux matchs que j'ai vus,
02:06 a posteriori évidemment et qu'on va parler je pense de la demi-finale historique de 1970, le match du siècle.
02:13 - Extraordinaire. - Et donc c'est tout ça qui ressort, c'est-à-dire c'était l'ami de la famille, c'était un beau gosse,
02:19 disons-le très très simplement, qui était marié à l'âge de 20 ans, donc qui correspondait à une image d'une Allemagne
02:26 rayonnante qui se relevait d'un drame évidemment du nazisme entre 1933 et 1945, comme par hasard il est né en 1945.
02:33 - Dans les ruines de Munich il est né, un ami pauvre. - Voilà, ils sont beaucoup comme ça, ce qu'on oublie beaucoup d'ailleurs
02:39 donc pourquoi les Allemands sont comme ça dans les années 70 et les années 80, c'est-à-dire qu'ils sont...
02:43 ils en veulent beaucoup à leurs parents par rapport à ce qui s'est passé, ils sont très bien qu'ils sont...
02:47 que l'Allemagne ait mis au pilori de l'histoire par rapport à ce qui s'est passé, etc. Et donc eux ils veulent exister.
02:53 Et Franz Beckenbauer c'est extraordinaire parce que quand tu écoutes les joueurs de sa génération,
02:59 il disait déjà c'est le gars qui voyait plus vite que les autres, ce qui est la marque des grands joueurs,
03:04 c'est aussi quelqu'un qui te disait "mais le scénario du match ça va être ça, ça va être ça" et c'est exactement ce qui se passait,
03:10 en tout cas lorsqu'on parle avec des légendes qui disent ce qui se passait avec Beckenbauer lorsqu'il était entraîneur, sélectionneur
03:16 ou évidemment joueur au Bayern Munich. Mais si tu veux, t'as l'impression que c'est l'ami de la famille qui est parti.
03:22 C'est celui qui représentait l'Allemagne esthète, une Allemagne aussi dominante, je le dis toujours,
03:28 l'Allemagne post-45, ses trois valeurs, c'est la Coupe du monde 1954, c'est le secteur secondaire en industrie et c'est le Deutschmark.
03:37 Et qui représentait le football ? C'était Franz Beckenbauer, double ballon d'or. Donc tout ça, si tu veux, aujourd'hui,
03:43 quel que soit les... J'ai vu plein de papiers en Allemagne et quel que soit les obédiences, les éditorialistes des journaux que je lis,
03:51 les mecs disent "on a perdu quelqu'un". C'est le gars qui était là tout le temps pendant 40 ans.
03:56 Et j'ai l'impression que c'est encore plus grave pour les gens qui avaient plus de 50 ans, 60 ans.
04:02 C'est toute une histoire du pan de l'Allemagne, via le sport évidemment, qui disparaît.
04:07 Et ensuite, il est le symbole, le messager de la "nouvelle Allemagne", de la RFA, disons-le très clairement, qui a disparu.
04:17 Et voilà, c'est bizarre. Il y a de très belles phrases en ce moment. Je disais souvent qu'en 2021, quand Gerd Müller est mort,
04:25 il y avait les stylos qui saignaient. Là, c'est pire. T'as l'impression que c'est quelqu'un qui... Il était le succès de l'Allemagne.
04:32 - D'ailleurs, Polo, son surnom, c'est l'histoire d'une photo, en fait. Il l'avait posé un peu par hasard à côté du bus de l'empereur Franz Josef d'Autriche.
04:38 - Ouais, en Vienne. À Vienne, évidemment. Alors en fait, il avait deux surnoms. Celui qui est le plus connu mondialement, évidemment, le Kaiser.
04:45 Et il y en a un autre qui s'appelait Lichtgestalt, qui était la légèreté, en fait, le portilégé.
04:52 Et il y avait quelque chose comme ça qui tient un peu moins. C'est-à-dire qu'il faut bien se rendre compte que l'histoire du football allemand,
04:59 les gens techniques, les gens qui sont doués, ce ne sont pas les Allemands. Les Allemands eux-mêmes disent "nous, on est des besogneux".
05:05 C'est comme ça qu'ils gagnent la Coupe du monde 1954 avec beaucoup de chance. Et quand Beckenbauer arrive, c'est autre chose.
05:12 Et on ne se rend pas compte. Et on dit en Allemagne, d'ailleurs, "il n'est pas allemand, il est brésilien".
05:17 Et Beckenbauer, c'est d'autant plus rare que, comme tu l'as dit, Nico, ce n'est pas un milieu de terrain offensif.
05:23 Ce n'est pas un hélier qui va dribbler 3-4 joueurs, etc. Ce n'est pas Maradona. C'est quelqu'un qui est défenseur,
05:29 enfin, milieu défensif au départ, et qu'on va repositionner au poste de libéraux où il va révolutionner ce poste en y apportant une volonté offensive.
05:39 Parce qu'il avait deux références, en fait. Fritz Walter, le capitaine de la sélection de 1954, se voyait une destinée.
05:48 Il voulait être le capitaine champion du monde de 1974. Et il avait une autre référence qui était un Italien, qui était Facchetti.
05:54 C'était évidemment le grand inter, qui était très offensif. Et donc Beckenbauer va...
05:59 Il faut rappeler ce que ça veut dire que le mot "libéraux". Donc c'est libre. Mais ce n'est pas libre tel qu'on l'entend comme ça.
06:04 C'est libre par rapport aux défenseurs qui eux ont marquage individuel. Et en fait, lui, il corrigeait. Il couvrait, il corrige les erreurs de ses défenseurs.
06:13 C'est ça, il voulait être libre. Il avait dit, j'ai lu ça aujourd'hui, "je ne voulais pas qu'on me coure pendant 90 minutes et me faire taper dans les pattes".
06:19 Ce n'était pas ma conception du football. Il voulait observer le jeu, être libre et en fait faire ce qu'il voulait.
06:24 Et j'allais dire "quand il sentait".
06:26 Exactement. Bon, petit pause avec Paulo. Avec vous, tiens Fred, qu'est-ce que ça t'inspire, toi, France-Beckenbauer ?
06:31 C'est-à-dire que pour moi, alors moi je suis né en 1970 et pour moi, c'est une image que j'ai vue bien après, bien entendu, qui se passe en Coupe du Monde 70, la demi-finale contre l'Italie.
06:42 C'est quand il se blesse le bras, il fait une fracture de la clavicule et il joue avec le bras en échappe.
06:49 C'est une image incroyable.
06:50 Et cette image-là, pour moi, elle reste... Quand je vois aujourd'hui des joueurs qui ont les touches à peine, ils font trois triple sauts et on a l'impression qu'ils sont morts.
06:59 Je me dis, voilà, c'était quand même des joueurs qui étaient durs au mal quand même.
07:03 Voilà, ça, j'aimais ça.
07:04 Mais surtout pour moi, moi qui aime, et je me fatigue ici de le dire, que j'aime le football élégant.
07:11 Moi, j'aime l'élégance.
07:12 C'est ce que j'aimais avant tout chez France-Beckenbauer.
07:17 C'était le fait de jouer la tête haute.
07:20 Le port haltier tout le temps.
07:22 Ça, j'aime vraiment beaucoup.
07:25 Messi est un joueur exceptionnel, mais je n'aime pas Messi parce qu'il baisse la tête quand il joue au foot.
07:29 Ce que j'aimais vraiment, et Kaka avait un peu de ça aussi, c'est ce port de la tête et de jouer sans regarder la balle.
07:40 On avait l'impression qu'il regardait toujours l'après et la balle suivait son regard et suivait son intention intellectuelle.
07:48 Et donc, cette élégance-là.
07:50 Et moi, j'aime le foot pour le mouvement, pour l'élégance.
07:53 Pour moi, j'aime beaucoup comparer le foot avec la danse, parce que j'adore la danse.
07:57 Et dans la gestuelle de Beckenbauer, il y avait quelque chose d'élégant où le ballon faisait partie de la chorégraphie.
08:07 Et j'aime l'intelligence de jeu, etc.
08:09 Donc, je ne l'ai jamais vu jouer dans un stade, etc.
08:13 Mais pour moi, c'est cette image qui va toujours me rester de ce joueur.
08:18 C'est-à-dire que tu me dis "foot allemand", pour moi, c'est Beckenbauer.
08:21 Mais pourtant, il n'est pas là.
08:23 Moi, je découvre vraiment le foot, la fameuse demi-finale.
08:26 On en parle souvent de France-Allemagne, Séville 82.
08:29 Il n'est pas sur le terrain.
08:30 Mais pourtant, ce n'est pas ces joueurs-là dont je me souviens, à part Schumacher.
08:34 Moi, le football allemand, c'est Franz Beckenbauer.
08:37 Et puis, c'est surtout tout ce qu'il a fait derrière après.
08:39 C'est-à-dire qu'il est resté omniprésent comme image du football.
08:43 Et je me disais, et j'en termine là-dessus, quand on a appris son décès tout à l'heure,
08:48 je lui ai dit "ce soir, on va en parler dans l'after".
08:50 Et c'est bien parce qu'on a beaucoup de très jeunes auditeurs
08:53 qui, peut-être aujourd'hui,
08:55 entendent parler de Franz Beckenbauer pour la première fois.
08:57 Et je trouve ça bien aussi qu'on puisse partager avec eux
09:01 ce que ce monsieur a représenté dans l'histoire du foot,
09:04 même s'il était peut-être un peu moins connu qu'un Pelé à Maradona.
09:07 - C'est-à-dire qu'il est moins légendaire que Pelé, il est moins populaire que Cruyff,
09:11 il faut en parler aussi, moins iconique que Maradona aussi.
09:13 - Moi, il était aussi important que cela.
09:15 Sous-titrage ST' 501
09:18 Merci à tous !

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