Christophe Bouchet, ex-président OM, sur les droits TV de la Ligue 1 : "Dans la course, il ne reste que DAZN mais c'est une entreprise qui perd un milliard d'euros par an."
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00:00 Alors Christophe, on voulait faire un point sur les fameuses négo de gré à gré.
00:03 Oui, parce qu'on est en janvier.
00:04 On est en janvier.
00:06 Le 13 août, le championnat reprend.
00:07 Pour l'instant, on ne sait pas où.
00:08 À la Ligue, on nous a dit d'ailleurs d'entrée que, attention, tout ça pouvait aussi très bien se décider dans les derniers jours.
00:16 Pourquoi faire durer ce suspens ?
00:17 C'est histoire de dire qu'ils n'ont pas le couteau sur la gorge.
00:19 C'est ce qu'ils veulent nous dire.
00:20 Ah bon ?
00:21 Et donc tu fais exprès de faire durer le suspens ?
00:23 Tu trouves ça rigolo de te faire attendre ?
00:24 Je ne sais pas, c'est peut-être une stratégie de faire monter les enchères.
00:28 Ah, ben, on va demander à Christophe si les enchères montent.
00:30 Alors, Christophe, est-ce que les tendances que vous avez vont plutôt vers des bonnes nouvelles ou des mauvaises nouvelles ?
00:38 Pour l'instant, on est toujours dans le même système.
00:41 On va le résumer rapidement.
00:43 On a un acteur qui est la Ligue de football qui cherche à vendre ses droits.
00:46 Et de l'autre côté, on a un diffuseur national important qui est Canal+ qui n'en veut pas.
00:52 Bon, en fait, déjà, c'est ça le match.
00:56 Donc il faut se rabattre sur d'autres qui le voudraient bien pour pouvoir le diffuser.
01:01 Or, vous l'avez dit tout à l'heure, le championnat de France de football aujourd'hui, c'est un championnat de deuxième zone.
01:09 Ce n'est pas la priorité des diffuseurs internationaux.
01:14 Ce n'est pas la priorité des plateformes qui jouent un jeu aujourd'hui important dans les droits.
01:18 Donc ce n'est pas la priorité.
01:20 Et puis, en plus, comme les articles se succèdent les uns après les autres pour évoquer un éventuel départ d'Mbappé,
01:28 évidemment, ça ne renchérit pas les droits du football français,
01:32 puisqu'on en est un peu arrivé, et c'est quand même ça le malheur,
01:37 on est un peu suspendu finalement à un seul joueur,
01:41 ce qui est quand même un peu catastrophique pour un championnat où il y a quand même 18 clubs.
01:44 Alors, Christophe, actuellement, les choses qu'on entend,
01:48 et il suffit de regarder ce qui se passe dans l'actualité économique et sportive,
01:52 c'est que celui qui tient la corde, c'est Dazone, puisqu'il se positionne sur...
01:57 On voit bien qu'il prépare une grille à remplir.
02:00 Ils ont pris deux matchs de national.
02:02 Ils ont pris deux, trois choses à droite, à gauche.
02:04 Ils sont en train de construire quelque chose, comme si du plus gros allait tomber dessus.
02:09 On est bien d'accord que Dazone, s'il tienne la corde, ils seront distribués par Canal+.
02:15 C'est à prendre en compte, ça aussi, on n'en parle pas.
02:17 - Il y a déjà un accord, d'ailleurs.
02:18 Mais il y a un accord de distrib' qui devra perdurer.
02:21 Donc, finalement, il y aura quand même Canal derrière cet éventuel diffuseur, si c'est lui.
02:25 - Alors, il y a deux sujets.
02:27 Le premier, c'est qu'il ne reste finalement en course que Dazone.
02:31 Alors, Dazone, il faut expliquer un petit peu à tout le monde ce que c'est,
02:34 parce que c'est une plateforme qui s'appelle OTT, Over the Top.
02:38 C'est celle que vous pouvez recevoir comme chez vous, comme Netflix, et qui fait du sport.
02:43 Bon, seulement, il y a un petit sujet avec Dazone.
02:45 On a encore la mémoire assez fraîche de ce qui s'est passé avec Médiapro.
02:49 Dazone, aujourd'hui, c'est une entreprise qui perd un milliard d'euros par an.
02:56 Donc, c'est quand même pas le partenaire idéal pour avoir un deal très sécurisé, notamment,
03:04 puisque, vous le savez, les droits ont été augmentés.
03:06 Ils ne sont plus sur 3 ans, mais ils sont sur 5 ans.
03:08 Déjà, donc, et ils sont seuls.
03:11 Grosso modo, si on veut aller rapidement, ils sont seuls.
03:15 Donc, bon, eux, ils disent, je ne sais pas, la Ligue veut un milliard.
03:19 Tout le monde le sait.
03:20 Ça a été répété mille fois.
03:21 Et le championnat, qu'est-ce qu'il vaut aujourd'hui ?
03:24 Il vaut, si on fait une division pour avoir le nombre de gens qui regardent et avoir les montants,
03:31 c'est un championnat qui vaut entre 5 et 600 millions d'euros.
03:34 Donc, évidemment, on est très loin les uns des autres.
03:36 Donc, la partie de poker a commencé.
03:39 Ça, c'est le premier sujet.
03:40 Le deuxième sujet, Daniel, évidemment, c'est qu'on a en France un opérateur
03:44 qui est Canal+.
03:45 Pour que chacun comprenne, Canal+, en fait, ils ont deux casquettes très importantes et très différentes.
03:50 La première, c'est que c'est une chaîne.
03:52 C'est la chaîne que tout le monde connaît, que tout le monde, ou plus ou moins que tout le monde reçoit.
03:56 Et puis, par ailleurs, ils ont une plateforme de distribution des autres chaînes.
04:00 Et donc, c'est eux qui, quelque part, ouvrent ou ferment le robinet pour les autres chaînes.
04:07 Et c'est ce qui était arrivé avec...
04:09 Mais on revient sur l'affaire Médiapro.
04:11 C'est ce qui est arrivé avec Médiapro, qui avait acheté des droits fort chers du championnat de France
04:16 et qui était allé voir Canal en disant "bon, ben voilà, vous allez nous distribuer".
04:19 Et Canal+ a dit "bah non, je ne vais pas vous distribuer".
04:21 Et donc, Canal...
04:22 - Et là, je t'interromps et je te pose une question.
04:24 Sachant à quel point Bolloré est fâché avec Labrune,
04:30 et on connaît le tempérament de Vincent Bolloré quand il est en guerre éco,
04:35 il veut juste la mort de son adversaire.
04:39 Est-ce qu'il peut mettre des bâtons dans les roues ou dire
04:44 "je ne distribue pas" ou "pas comme ça" ou "pas à ces conditions-là"
04:48 ou "vous ne mettez pas autant d'argent".
04:50 On ne peut pas imaginer quelque chose comme ça,
04:52 parce que Bolloré, l'aliguin, il n'en veut pas.
04:54 Et ce n'est pas qu'il n'en veut pas, c'est qu'il veut la guerre.
04:56 - Alors, oui, Vincent Bolloré et le patron de Canal+
05:03 qui respecte les consignes de Bolloré, Maxime Sahada,
05:06 ils sont...
05:07 Je crois qu'ils sont vraiment fâchés.
05:10 - Eh oui !
05:10 - Et là encore, ils sont fâchés, fâchés.
05:13 - Ça veut dire qu'il n'y a aucune possibilité d'un retour de Canal
05:19 à un moment donné dans les négociations, c'est totalement exclu.
05:22 - Il faut que ce soit eux qui le décident et à leurs conditions.
05:25 - Vous savez, les Canals, ils réagissent de façon industrielle.
05:30 Ce qu'il faut, je vais revenir, ça va être un petit peu technique,
05:33 mais je vais essayer de le résumer le mieux possible.
05:34 Fut un temps où, quand vous achetiez des droits,
05:38 vous achetiez aussi un ticket stratégique pour essayer d'écraser l'adversaire.
05:42 Donc c'est pour ça que les droits montaient,
05:44 parce que Canal voulait plus les droits que TPS,
05:46 Canal voulait plus les droits qu'Orange,
05:48 Canal voulait toujours plus les droits.
05:50 Donc il y avait une prime stratégique.
05:52 Aujourd'hui, il n'y a plus d'acteurs sur le marché, il n'y a plus que Canal+.
05:55 Et aujourd'hui, Canal+, eux, ils rentrent les chiffres dans des tableurs.
06:00 Ils disent "nous, on veut payer les droits à tel niveau,
06:03 mais comme on n'aura jamais plus,
06:06 grosso modo, d'un million et demi de personnes qui vont suivre le championnat de France,
06:09 le championnat, il vaut...
06:11 Non, c'est pas beaucoup.
06:12 Et le championnat, il vaut, pour nous, il vaut 550, 600, 650.
06:17 Voilà, ils font...
06:19 - Et encore, c'est beaucoup par rapport à l'Arenta.
06:21 Et quand on sait, Christophe, et tu le sais mieux que nous,
06:23 les audiences hors PSGOM, c'est catastrophique.
06:27 Ça, on ne le sait pas assez, on ne le dit pas assez,
06:30 mais les audiences du foot, elles sont nulles.
06:34 - Et d'ailleurs, Prime ne communique pas ses audiences.
06:36 - Mais si t'as pas le PSG ou l'OM, c'est cata !
06:39 - Alors, moi, je me souviens, quand il y avait eu l'affaire Médiapro, encore elle,
06:42 que Jean-Michel Aulas avait eu une idée géniale, à la Aulas,
06:46 qui était de dire "on va faire payer les gens au match".
06:49 Mais heureusement qu'il y a quelqu'un qui l'a rattrapé par les bretelles,
06:52 parce qu'on ne se rend pas compte aujourd'hui que...
06:55 Allez, je vais offenser personne,
06:57 mais qu'un Strasbourg-Rennes, c'est 100 000 spectateurs,
07:00 100 000 téléspectateurs.
07:03 Donc si vous voulez, c'est pas avec ça,
07:04 les chiffres qu'il faut que vous ayez pour atteindre les droits...
07:08 - Je sais même pas sûr, mais bon.
07:09 - C'est même pas sûr.
07:11 Personne ne communique les droits,
07:13 mais sachez qu'un match en moyenne,
07:15 en moyenne, c'est grosso modo 400 000.
07:18 En moyenne, c'est-à-dire avec tous les matchs du PSG,
07:22 avec tous les matchs de l'OM.
07:23 C'est-à-dire tous les matchs du PSG et OM qui, eux,
07:26 font entre 800 000, 900 000,
07:28 voire jusqu'à 1,7 million, 1,8 million de téléspectateurs.
07:33 Donc quand vous êtes à 400 000 de moyenne,
07:34 ça veut dire que quand vous avez tous les autres matchs,
07:37 ils sont extrêmement bas.
07:38 Or ça, tout le monde...
07:39 Enfin aujourd'hui, tout le monde l'a un peu compris.
07:41 Tout le monde le sait.
07:42 Donc un opérateur qui arrive sur le marché français,
07:45 bon, il veut bien acheter le PSG, il veut bien acheter l'OM, d'accord.
07:48 Bon, ça, on est tous d'accord.
07:50 Mais après, le reste, il s'en fiche un petit peu, quoi.
07:53 - Merci. - Merci à vous.
07:54 Merci d'avoir regardé cette vidéo !