• il y a 10 mois
Maya Lauqué reçoit Abdelhalim Bensaidi, praticien en diabétologie à l'hôpital Max Forestier de Nanterre. Il a manifesté la semaine dernière devant le ministère de la Santé car il risque aujourd'hui l'expulsion étant donné qu'il n'a pas eu son diplôme en France. 

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Transcription
00:00 L'association Ipadec, c'est l'intégration praticien à diplôme étranger engagée contre la crise.
00:05 Bonjour Abdelalim Benzaïdi.
00:07 Bonjour.
00:07 Merci d'être avec nous ce matin.
00:09 Vous avez manifesté cette semaine aux côtés de vos confrères devant le ministère de la Santé,
00:12 car vous êtes plusieurs milliers de médecins étrangers à risquer licenciement et expulsion.
00:17 On va en parler.
00:18 Dans un instant d'abord, on voudrait entendre votre histoire.
00:21 Vous faites partie de ces PADU, c'est Praticiens à Diplôme hors Union Européenne en France.
00:26 Vous avez 31 ans, vous êtes arrivé d'Algérie en 2019 pour exercer ici. Dans quel contexte ?
00:31 Je suis arrivé après la fin de mes études afin d'exercer la médecine en France et évoluer dans plusieurs domaines.
00:38 On a été accueillis au début comme stagiaires associés, mais par la suite, vu la crise sanitaire,
00:43 on a vu nos contrats se renouveler parce qu'il y avait besoin de renforts.
00:49 Sauf que quelques années après, aujourd'hui, on a l'impression qu'on ne veut plus de nous
00:53 alors qu'on continue à servir le système de santé.
00:56 Notre revendicatif est clair, c'est d'être sécurisé sur le plan d'exercice afin de continuer à exercer notre métier.
01:01 Pour qu'on comprenne bien, vous avez été employé en renfort,
01:06 vous n'avez pas de diplôme obtenu en France ou dans l'Union Européenne,
01:10 ça veut dire que je ne peux pas vous appeler docteur ? Je ne peux pas dire médecin ?
01:14 Au niveau des hôpitaux, c'est ce qui se fait.
01:18 On nous appelle médecin, on est docteur.
01:20 Sur le terme administratif, on continue à nous reprocher de ne pas avoir fait nos études en Europe.
01:26 Et sur le plan vraiment ?
01:28 Malgré avoir fait plusieurs diplômes universitaires de sous-spécialisation en France,
01:32 on est diplômé de plusieurs universités.
01:34 La plupart des paduys ont 3, 4, 5 diplômes universitaires.
01:37 C'est ça, parce que vous, depuis 2019, vous continuez à vous spécialiser,
01:42 vous continuez à évoluer en France avec ces diplômes supplémentaires.
01:46 Et dans le quotidien, est-ce que vous pratiquez les mêmes actes qu'un spécialiste,
01:52 qu'un diabétologue qui a eu son diplôme en France ou en Union Européenne ?
01:56 Je tiens à saluer nos chefs de service qui nous sont très reconnaissants de notre manière de servir.
02:02 Ils sont très reconnaissants.
02:05 On a l'appui de l'intersyndicale de tous les médecins hospitaliers aujourd'hui
02:08 qui nous soutiennent, les internes de France, les urgentistes.
02:11 Tout le monde a apporté son soutien et on fait exactement le même travail.
02:14 On est sur les mêmes tableaux de garde, on est sur les mêmes tableaux d'astreinte,
02:17 on sert de la même manière.
02:19 Tout le monde est satisfait de ça sur le plan au niveau de nos services,
02:23 le personnel soignant, nos patients sont satisfaits de ça,
02:26 sauf qu'administrativement, on n'est pas sécurisé.
02:29 Vous êtes considéré comme quoi ? Vous avez un statut particulier
02:32 et vous êtes considéré comme des internes ou comme des...
02:35 C'est ce qu'on dit, praticien. C'est extrêmement vague pour nous.
02:38 Il y a plusieurs cas de figure.
02:39 Il y en a certains qui sont considérés comme des internes,
02:41 il y en a certains qui sont considérés comme des chefs, qui est mon cas,
02:44 et il y en a certains qui n'arrivent pas à accéder et qui n'ont pas de poste
02:47 parce que les hôpitaux ne peuvent pas les engager du fait d'avoir fait
02:50 leurs études à l'étranger malgré qu'ils sont français.
02:53 Dans votre hôpital, typiquement, est-ce que vous êtes beaucoup de padus ?
02:58 Une dizaine. Dans mon service, on est cinq.
03:02 Sur un service de combien ? Sept.
03:04 Ah, cinq padus sur sept. Donc vous pratiquez les mêmes actes.
03:08 Est-ce que vous n'avez pas le même statut administratif ?
03:11 J'imagine que le salaire n'est pas le même non plus qu'un médecin
03:14 à poste équivalent qui a eu son diplôme en Union européenne ?
03:17 Le salaire n'est pas le même, mais l'exercice est le même,
03:19 voire des fois un peu plus.
03:20 C'est ça. Le salaire, vous pouvez nous donner un ordre d'idée
03:24 sur la différence de salaire entre vous et ceux qui ont obtenu leur diplôme ?
03:29 Deux fois, voire trois fois moins ?
03:30 Deux fois, voire trois fois moins.
03:32 Et donc, en cardiologie, il y a des urgentistes qui pratiquent,
03:35 encore une fois, le même nombre de gardes, le même rythme de travail.
03:39 Exactement.
03:40 Quelle est votre situation, vous, aujourd'hui ?
03:42 Administrative, on parle de risque de licenciement
03:45 pour 2 000 à 3 000 praticiens diplômés hors Union européenne.
03:49 Il y a des risques de licenciement depuis quand ?
03:52 Et pourquoi, depuis 2019, vous n'avez plus travaillé,
03:54 et aujourd'hui, ce n'est plus possible ?
03:56 Alors, on nous impose de passer les examens d'équivalence.
03:59 C'est un concours et non pas un examen, comme on l'explique.
04:02 On la voit comme une procédure administrative
04:06 qui met des bâtons dans les roues,
04:08 parce qu'aujourd'hui, ce n'est pas un examen
04:10 qui permet de juger de la compétence des médecins.
04:12 Les seules autorités compétentes, je pense, à mon sens,
04:16 de juger de nos compétences, c'est nos chefs de service
04:18 qui sont satisfaits de notre manière de servir.
04:20 C'est le Conseil de l'Ordre, c'est les chefs de Pôle,
04:23 et c'est pour ça qu'on a demandé, au niveau du ministère,
04:25 de réunir toutes ces personnes-là autour de la table
04:27 afin d'ouvrir un terrain de négociation
04:29 pour trouver un vecteur législatif
04:31 qui nous permettrait d'exercer la médecine
04:33 avec des autorisations pérennes.
04:35 - Parce qu'aujourd'hui, on vous demande
04:37 de passer cet examen d'évaluation des connaissances.
04:39 C'est un processus qui peut prendre plusieurs années,
04:41 parce qu'une fois qu'on a passé ce concours,
04:43 qui est très difficile, on doit en plus être validé
04:46 en commission, et vous, vous demandez
04:48 une prise en charge plus globale, et qu'on regarde
04:50 juste votre expérience aussi, c'est ça ?
04:51 - Qu'on prenne l'expérience en considération,
04:53 surtout que les chefs de service sont satisfaits de ça,
04:56 tout le personnel soignant, et je pense que de là
04:59 dépend la survie de nos malades, de nos familles,
05:01 de nos enfants, mais aussi d'un système de santé
05:03 qui est le nôtre aujourd'hui.
05:05 Et toute personne qui a mis une fois les pieds
05:07 dans des urgences, il sait ce que c'est qu'une survie.
05:09 Et c'est ce qu'on demande aujourd'hui.
05:11 - Vous êtes aujourd'hui toujours sous contrat, ou pas ?
05:14 - Aujourd'hui, je suis toujours sous contrat.
05:16 Il arrivera échéance fin semaine,
05:18 mais qui sera prolongé en début de semaine.
05:20 - Et vous avez des confrères qui travaillent
05:22 sans contrat aujourd'hui à l'hôpital ?
05:24 - Dans certains hôpitaux, oui.
05:26 - Qui aujourd'hui ne travaillent pas légalement
05:28 à l'hôpital ?
05:30 - Il y a certaines administrations,
05:32 elles ne savent pas quoi faire, elles n'ont pas de texte.
05:34 C'est pour ça que le président de la République,
05:36 je le salue d'ailleurs, il nous a soutenus,
05:38 mais aujourd'hui, on n'a aucun texte,
05:40 on n'a pas de vecteur législatif qui permet
05:42 de nous maintenir en poste et en toute sécurité,
05:44 avec des autorisations pérennes, et non pas
05:46 des autorisations provisoires comme on a eu l'habitude.
05:48 - Parce que vous avez multiplié des CDD depuis...
05:50 - À chaque fois, on nous donne des autorisations
05:52 provisoires jusqu'à nouvel ordre, et à chaque fois,
05:54 c'est des 6 mois, des 6 mois et des 6 mois.
05:56 - Je rappelle qu'Emmanuel Macron, mardi, a indiqué
05:58 qu'il souhaitait régulariser ses médecins étrangers
06:00 qui tiennent parfois, a-t-il dit, à bout de bras
06:02 nos services de soins.
06:04 Vous croyez en ces promesses ?
06:06 - Honnêtement, je crois en ces promesses,
06:08 mais on attend à ce qu'il y ait un texte.
06:10 - Vous avez rencontré la nouvelle ministre de la Santé ?
06:12 - Pas encore.
06:14 On a rencontré un responsable du ministère,
06:16 qui n'avait pas de réponse d'ailleurs pour nous,
06:18 mais on attend les propos de la ministre,
06:20 et on a appelé à une négociation à la table
06:22 avec le bureau de la ministre,
06:24 afin de voir ce qu'il en serait
06:26 dans les prochains jours.
06:28 - Merci beaucoup d'avoir été avec nous ce matin.

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