David Cormand, eurodéputé normand EELV

  • il y a 9 mois

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00:00 Vous écoutez le 6/9, France Bleu Normandie.
00:05 8h16, la colère des agriculteurs ne s'éteint pas. Malgré les annonces de simplification des normes de Gabriel Attal, ils veulent bloquer Paris.
00:15 Qu'en pense l'eurodéputé écologiste normand David Cormand ? Il répond à vos questions, Marianne Nacké.
00:20 Bonjour David Cormand. Vous aimez les agriculteurs ?
00:24 Oui, on les aime et on les aime depuis longtemps. Et ce qu'on déplore politiquement, c'est que les dirigeants politiques successifs ont fait beaucoup pour détruire l'agriculture dans notre pays.
00:35 C'est le plus grand plan social qu'on a connu depuis l'après-guerre. C'est plus de 4 millions de paysans et de paysannes qui ont abandonné leur métier.
00:43 C'est des exploitations qui disparaissent et c'est des paysans qui se suicident tous les deux jours. Donc on les aime et on est un peu seul à les aimer parfois j'ai l'impression.
00:51 Parce que si on en croit Gabriel Attal, les écologistes considèrent les agriculteurs, je cite ces mots à l'Assemblée Nationale la semaine dernière,
00:58 comme des bandits, des pollueurs de nos terres, des tortionnaires de leurs animaux.
01:03 Gabriel Attal, comme toujours, fait diversion. La réalité c'est que les politiques qui sont menées depuis 7 ans, M. Macron et son équipe sont en pouvoir depuis 7 ans.
01:12 C'est une politique qui est au service de leur clientèle. Leur clientèle c'est qui ? Ce sont les géants de l'agroalimentaire, la grande distribution et les géants de l'agrochimie.
01:21 C'est ça qui fait disparaître les agricultrices et les agriculteurs. Mais c'est toujours la même technique.
01:25 Vous savez, en politique, ou ailleurs d'ailleurs, il y a toujours un moyen de détourner sa responsabilité, c'est de trouver ce qu'on appelle un bouc émissaire.
01:33 Et l'écologie est souvent désignée comme le bouc émissaire des malheurs du monde.
01:38 La réalité c'est que les politiques qui sont menées par ce gouvernement, elles font deux victimes. Le monde agricole et l'écologie.
01:44 Et nous on pense qu'il n'y a pas d'écologie sans agriculture et il n'y a pas d'agriculture sans écologie, bien sûr.
01:49 Puisque c'est l'activité de faire pousser ou d'élever des animaux, c'est évidemment un lien avec la nature.
01:55 Et c'est cette volonté politique d'ailleurs de séparer l'activité agricole des réalités écologiques qui font qu'on est dans cette situation aujourd'hui.
02:03 Mais l'Europe par exemple est axée de multiplier les normes environnementales, qu'est-ce que vous répondez à cela ?
02:09 L'Europe, elle fait les politiques en matière agricole qui sont souvent d'ailleurs dictées par la France.
02:14 Depuis des décennies, la France pèse beaucoup, d'ailleurs c'est un des dossiers sur lequel elle pèse le plus au niveau européen.
02:20 Avec la PAC notamment ?
02:21 Alors la PAC c'est la politique agricole commune qui est le navire amiral de la politique,
02:25 puisque c'est la manière dont on dépense les autour de 50 milliards d'euros au niveau européen chaque année pour l'agriculture.
02:33 À quoi doit servir cette subvention ?
02:36 Pas à faire la charité aux agricultrices et aux agriculteurs,
02:39 à compenser les contraintes, les consignes qu'on donne en disant "il faut faire des efforts en matière d'écologie,
02:47 il faut faire des efforts pour préserver les paysages, la biodiversité, donc en échange de ça on vous subventionne".
02:53 Or, cet argent n'est pas utilisé pour faire ça.
02:56 Elle est fait pour maintenir un modèle qui détruit l'agriculture, qui détruit le nombre d'exploitations.
03:01 C'est là qu'il y a une mauvaise foi.
03:02 D'ailleurs, on est le seul groupe, nous les Verts au Parlement européen, à avoir voté contre cette PAC.
03:07 Jordan Bardella a voté la PAC.
03:09 Président du Rassemblement national, eurodéputé.
03:11 Le Rassemblement national, la droite, la majorité de M. Macron, les députés de M. Macron ont voté la PAC.
03:15 Nous, on est conscient du fait que si on veut préserver une agriculture qui fait attention à la fois à l'alimentation,
03:21 à l'environnement et qui permet surtout d'avoir de nombreux emplois de paysans et de paysans,
03:26 et bien ça demande un effort budgétaire de la collectivité, mais pas pour encourager l'agro-business.
03:31 Mais David Cormand, vous qui êtes eurodéputé,
03:34 normalement la France, par exemple, selon une mission parlementaire, n'a transféré que 7% du budget de la PAC
03:40 aux aides agro-environnementales et aides à la conversion biologique.
03:44 C'est ça que vous dénoncez en fait ?
03:45 Bien sûr. Aujourd'hui, sur ces 50 milliards à niveau européen dont je vous parle,
03:50 80% de cet argent va aux 20% des exploitations les plus importantes.
03:55 Comment voulez-vous que ça marche ?
03:56 Mais est-ce que ça n'est pas en termes de rémunération ? Est-ce que c'est pas aussi ça le nerf de la guerre ?
04:00 Alors, c'est le deuxième aspect, vous avez raison.
04:02 C'est la rémunération de nos agriculteurs ?
04:03 Vous avez raison, c'est qu'aujourd'hui on a développé par ailleurs un modèle économique.
04:06 En fait, on a voulu appliquer les règles du libéralisme économique à l'agriculture.
04:10 Et donc on a signé, quand je dis "on", pas "moi", mais ceux qui sont au pouvoir,
04:14 avec l'accord de la FNSEA, ce qu'on appelle des accords de libre-échange,
04:17 où on échange nos denrées et tout un tas de choses avec d'autres zones du monde,
04:23 qui n'ont pas les mêmes règles, notamment, pas seulement environnementales d'ailleurs,
04:27 y compris sanitaires, parce que quand on parle de règles environnementales,
04:30 90% c'est des normes sanitaires.
04:32 Moi je suis pas contre les normes sanitaires, c'est la santé.
04:34 Et donc, à la fois on donne des contraintes aux agriculteurs,
04:39 mais on continue à faire du business, dont le patron du groupe Avril,
04:43 qui est aussi le patron de la FNSEA actuellement,
04:45 qui, avec son entreprise, fait du business avec le Brésil,
04:49 et qui vient verser des larmes de crocodile sur les paysans français et européens.
04:53 Il faut sortir de cette hypocrisie.
04:54 Il y a une hypocrisie selon vous ?
04:55 Bien sûr, il faut sortir de cette hypocrisie.
04:57 Si on veut un modèle agricole européen et français, et surtout français,
05:00 parce qu'on a une spécificité, c'était la petite taille de nos exploitations,
05:05 de nos exploitations familiales.
05:06 D'un côté, on fait les grandes cérémonies au Salon de l'Agriculture,
05:10 où on fait cette espèce de...
05:12 où on donne l'image qu'on est attaché à cette agriculture-là,
05:14 de proximité, qui respecte les bocages.
05:17 Et tout l'argent, toutes les décisions politiques qui sont prises,
05:20 c'est pour l'anéantir.
05:21 Donc nous, les écologistes, ça fait 40 ans qu'on dit,
05:23 nous pensons qu'un pays a besoin de plein d'activités,
05:27 mais aussi et surtout une activité qui est en lien avec la terre.
05:31 Vous avez raison de parler des revenus.
05:32 Les paysans, ils ont besoin de pouvoir vendre au juste prix ce qu'ils produisent.
05:36 Or, on crée un marché mondial qui les empêche de vendre au juste prix.
05:41 Donc pour vous, il faut une vraie politique agricole,
05:44 un vrai cap agricole auquel il faut penser.
05:46 Merci beaucoup, David Cormand,
05:48 eurodéputé écologiste normand, d'être venu nous voir.
05:51 Bonne journée à vous.
05:52 Bonne journée.
05:53 Une interview à retrouver, à réécouter sur francebleu.fr
05:56 et notre appli ici.

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