Découvrez la conférence "Devenir parent et rester couple" en replay, avec Audrey Ndjave-Sulpizi, Mathilde Bouychou et Guillaume Fosko !
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00:00:00 [Musique]
00:00:09 Bonjour à tous, je me présente rapidement.
00:00:12 Vous m'entendez bien ? Oui.
00:00:14 Je m'appelle Nelly De Flisque, je suis journaliste pour Parents.
00:00:17 Et je suis très heureuse aujourd'hui et je suis ravie de vous retrouver
00:00:21 autour de cette table ronde qui est consacrée au Baby Clash.
00:00:23 Alors le Baby Clash, on en a tous entendu parler, je vais le rappeler rapidement.
00:00:27 C'est ce phénomène un peu magique qui consiste à transformer un jeune couple d'amoureux transi
00:00:31 en un couple parental avec les cheveux en pétard, les cernes de panda
00:00:35 et surtout qui compte les points à chaque levée la nuit pour savoir qui a donné le dernier biberon.
00:00:40 Donc ça peut être délétère et les statistiques nous le prouvent aussi.
00:00:43 Il y a entre 20 et 25 % des parents aujourd'hui qui se séparent après l'arrivée d'un enfant.
00:00:47 Là aujourd'hui, on va essayer de décrypter ensemble ce qu'est le Baby Clash,
00:00:51 les enjeux qu'il recouvre, on va notamment aborder la fameuse question de la charge mentale.
00:00:56 Et puis savoir comment on peut le surmonter, si on peut le surmonter.
00:00:59 Et enfin, on fera un focus aussi très spécifique avec Audrey qui nous vient tout droit du Canada
00:01:04 pour aborder comment la parentalité est prise en charge aussi là-bas
00:01:08 pour continuer à rester un couple tout en devenant parent.
00:01:11 Alors je fais un petit tour de table rapidement pour vous présenter.
00:01:14 Alors Mathilde Buissoux, vous êtes psychologue clinicienne, psychothérapeute,
00:01:20 animatrice du podcast Parentalité, éduquer, c'est comprendre
00:01:23 et autrice de Désir d'enfant, 15 histoires pour questionner et mieux vivre son rapport à la parentalité.
00:01:29 Bienvenue. Merci Nelly.
00:01:30 Guillaume Fosco, qui est avec nous et qui a pris au pied levé.
00:01:35 Je suis remplaçant officiel. Super, bienvenue.
00:01:37 La ressemblance est frappante. Oui, j'imagine.
00:01:41 Alors vous êtes humoriste, passionné de parentalité.
00:01:43 Vous allez nous partager d'habitude vos aventures de papa.
00:01:46 Vous êtes également fondateur du podcast 3 Pères
00:01:49 et vous êtes actuellement au Point Virgule avec un spectacle qui est aussi consacré à la parentalité.
00:01:54 Oui, j'en parle beaucoup. Donc on a hâte d'échanger avec vous aussi sur votre regard de papa.
00:01:57 Idem. Et enfin Audrey Javes-Tulpizi, qui est avec nous aussi,
00:02:01 qui est infirmière clinicienne, qui nous vient donc tout droit du Canada
00:02:05 et qui est autrice de Et tu deviendras mère.
00:02:07 Voilà. Bienvenue à vous trois. Merci à vous d'être présents.
00:02:10 Je commence ma première question à Mathilde.
00:02:13 Lors de la préparation du sujet, vous nous disiez que le baby clash
00:02:18 n'était pas forcément un terme qui vous paraît approprié. Pourquoi?
00:02:22 Alors, c'est pas qu'il n'est pas approprié. C'est souvent, je trouve qu'il est réducteur.
00:02:26 C'est à dire que pour moi, dans le baby clash, on le résume,
00:02:29 on le raccourcit vite aux questions de la charge mentale.
00:02:32 Alors et Anna Roy en parlait tout à l'heure. Oui, la charge mentale,
00:02:36 elle explose au moment de l'arrivée d'un enfant.
00:02:38 Mais le baby clash, ça ne parle pas que de ça.
00:02:41 Ça parle aussi de choses à différents niveaux.
00:02:46 Le premier niveau, je dirais, c'est avant tout devenir parent.
00:02:49 C'est un bouleversement identitaire individuel majeur.
00:02:52 C'est une crise. C'est un état de transformation.
00:02:55 Souvent, on parle de la grossesse du point de vue physiologique,
00:02:59 mais il y a une autre face qui est la grossesse psychique,
00:03:02 c'est à dire psychiquement tous les bouleversements qui amènent
00:03:05 à un réaménagement de l'identité et à l'émergence, à la construction de l'identité de parents.
00:03:11 Et donc ça, ces transformations là, elles sont parfois un peu chaotiques.
00:03:16 Et puis ensuite, il y a le bouleversement du couple.
00:03:19 Comment on va passer du couple conjugal au couple parental?
00:03:22 Et là aussi, on va avoir à nouveau des réajustements nécessaires.
00:03:28 Souvent, je prends cette image qu'il y a des sables mouvants qu'on va devoir traverser.
00:03:35 Et donc, c'est souvent un moment qui est très inconfortable,
00:03:37 à la fois autant au niveau individuel qu'au niveau du couple.
00:03:42 Donc, quand les deux, finalement, ces deux bouleversements se rencontrent,
00:03:46 il y a un truc qui est un peu explosif.
00:03:49 Et ce qui me semble aussi important de dire, même si ça peut faire peur,
00:03:53 c'est que souvent le baby clash, il vient mettre en lumière parce que finalement,
00:03:58 ces ajustements, ces bouleversements, ils peuvent être vécus facilement
00:04:03 ou plus difficilement ou parfois un peu les deux.
00:04:06 C'est un effet de montagne russe.
00:04:09 Quand ça se fait facilement, assez facilement, on va retrouver des ressources,
00:04:14 mobiliser des relais, retrouver un peu de stabilité dans tout ça,
00:04:21 même si ça nécessite toujours un peu de temps quand même.
00:04:24 Ça ne se fait pas en un claquement de doigts.
00:04:27 Et quand ça se fait plus difficilement et que ça dure et que ça s'installe,
00:04:32 souvent, c'est que ça met en lumière des difficultés qui étaient déjà là auparavant.
00:04:39 Souvent, moi, ce que j'entends dans mon cabinet, les femmes, les hommes et les couples,
00:04:44 je suis thérapeute de couple que j'accompagne,
00:04:47 il y a souvent cette question de la communication, des difficultés de communication.
00:04:52 Elles sont mises en lumière par l'arrivée de l'enfant,
00:04:55 mais elles étaient déjà là préalablement.
00:04:57 Elles ne sont pas apparues comme ça.
00:04:59 Sauf qu'avant qu'il y ait un enfant, finalement, ça posait un peu moins de problèmes
00:05:04 parce qu'on était moins fatigué, on avait d'autres ressources,
00:05:09 chacun avait le temps de s'occuper de soi, de prendre soin de soi.
00:05:12 Une fois qu'il y a l'enfant, on n'a plus tout ça, on est épuisé,
00:05:17 on a moins de ressources, on a moins d'énergie et donc ça flambe.
00:05:21 Mais les difficultés, elles sont là déjà au préalable.
00:05:24 Et ça, c'est important parce que le baby clash, oui, il passe.
00:05:28 En tout cas, j'ai plein de choses.
00:05:30 On y reviendra tout à l'heure à partager sur comment on peut traverser
00:05:33 cette période-là de réaménagement et de bouleversement.
00:05:38 Mais les difficultés préalables, elles, elles ne vont pas disparaître.
00:05:43 Et ça, c'est important de le savoir parce que s'il y a une mise en lumière
00:05:46 de difficultés qui sont déjà là préalablement,
00:05:49 c'est important de pouvoir déjà l'identifier pour pouvoir le prendre en charge.
00:05:53 Et moi, je vois les couples qui se séparent, c'est souvent ces situations-là de couple
00:05:57 où l'arrivée de l'enfant ou des enfants met en lumière des dysfonctionnements
00:06:04 déjà présents préalablement, mais qui ne regardent pas.
00:06:08 Alors pour plein de raisons, ce n'est pas toujours de leur faute,
00:06:10 mais ces choses-là ne sont pas prises en charge, ne sont pas accompagnées.
00:06:15 Et donc, on arrive parfois à cette issue fatale d'une séparation.
00:06:19 Alors que si on prend en charge, si on se fait aider, accompagner,
00:06:22 si on mobilise des ressources pour soigner ou prendre soin,
00:06:29 et essayer de changer, de sortir de ces dysfonctionnements,
00:06:33 eh bien, ça va mieux.
00:06:36 Ça ne veut pas dire que le couple ne doit pas avoir de problèmes avant d'avoir un enfant.
00:06:40 On a tous des problématiques spécifiques, c'est juste la manière de les appréhender
00:06:44 et de le savoir qu'elles existaient auparavant, qui nous permettent ensuite de...
00:06:50 Oui, parce que souvent on dit "ça passe".
00:06:52 Oui, ça passe. Il y a plein de choses qui passent. Tout passe dans la vie.
00:06:56 Mais si juste on attend que ça se passe, parfois, avec la fatigue,
00:07:02 tous les bouleversements liés au postpartum, les difficultés s'aggravent aussi.
00:07:09 Et donc parfois, non, ça ne va pas passer tout seul.
00:07:11 Ce n'est pas juste le temps qui va faire les choses.
00:07:13 C'est "qu'est-ce qu'on va mettre en place pour...?".
00:07:16 Et en effet, les couples, aucun couple n'est parfait,
00:07:20 donc on a tous des choses qui ne vont pas, qui fonctionnent plus ou moins bien.
00:07:25 Mais au-delà de ces dysfonctionnements, parfois, il y a des choses qui sont quand même plus problématiques aussi.
00:07:31 Et qui, de fait, vont être...
00:07:33 Le temps du postpartum ou de l'arrivée d'un enfant va être un accélérateur de difficultés déjà présentes.
00:07:41 Si ces difficultés sont, je ne sais pas comment dire, classiques,
00:07:45 ou qu'on a déjà mobilisé des ressources, ça va aller.
00:07:50 Mais si ce sont des choses qui sont plus problématiques au sein du couple,
00:07:55 qu'est-ce qu'on va mettre en place pour pouvoir les traverser ?
00:08:01 - Vous parliez de la fatigue...
00:08:03 - Non, je voulais juste dire, on peut les traverser.
00:08:06 Ce n'est pas une fatalité, loin de là.
00:08:08 Il y a plein de choses qu'on peut faire pour que ça se passe bien,
00:08:13 et pour que le couple aille mieux.
00:08:15 - On verra ça ensemble.
00:08:17 La fatigue, le remaniement identitaire, et aussi un bouleversement physiologique.
00:08:22 C'est ça, Audrey, qui explique comment on traverse aussi ce baby-clash avec son corps.
00:08:27 - Effectivement, en fait, il y a déjà de bas sur ce que tu disais,
00:08:32 souvent aussi quand on est en couple, il y a une chose essentielle qu'on oublie,
00:08:36 c'est qu'on est une identité, on est un individu à part entière d'abord,
00:08:39 et on s'associe un peu avec quelqu'un pour avancer ensemble sur le même chemin.
00:08:43 Mais déjà, si on ne va pas bien soi-même, c'est difficile de fonctionner avec quelqu'un d'autre.
00:08:47 Donc souvent, comme tu disais, dans les couples, le travail passe aussi parfois par soi-même.
00:08:51 On se prépare à être en couple, on se prépare à être parents soi-même,
00:08:54 puis après ensemble.
00:08:56 Et souvent, c'est le reflet, comme tu disais, le clash.
00:08:59 Moi aussi, je ne parle pas de baby-clash, on en a parlé dans les thérapies,
00:09:03 on ne parle pas de baby-clash, mais du coup, ça se travaille effectivement après,
00:09:07 mais de manière aussi individuelle.
00:09:09 Et du coup, pour les bouleversements, il y a des choses qu'on ne peut pas changer.
00:09:12 On ne pourra pas faire en sorte que dans une grossesse, il n'y ait pas d'oestrogène,
00:09:15 de progestérone, de prolactine.
00:09:18 Les hormones vont réguler beaucoup l'humeur d'une personne.
00:09:22 Puis quand une femme est enceinte, il y a tout ce bouleversement hormonal.
00:09:26 Moi, j'en parle beaucoup au papa quand je fais de la préparation prénatale.
00:09:30 Il y a un rendez-vous obligatoire avec les papas,
00:09:33 parce que je veux qu'il soit au fait qu'il y a des choses qui vont se passer chez la maman,
00:09:37 qui sont complètement indépendantes de sa personnalité.
00:09:39 Elle n'est pas en train de changer, c'est temporaire.
00:09:41 Donc soit on peut avoir le côté oestrogène, par exemple,
00:09:44 qui va faire en sorte qu'on est vraiment un peu shooté,
00:09:47 tout est beau, tout est rose, la vie est magnifique.
00:09:49 Et c'est souvent au deuxième trimestre, vraiment, on est dans une plénitude.
00:09:52 Ou alors on peut être complètement irritable, ne plus supporter personne,
00:09:56 vraiment avoir divorcé tous les jours parce qu'on ne supporte rien.
00:09:59 On a vraiment tous les défauts, on va dire,
00:10:02 toutes les choses qu'on tolère habituellement chez son partenaire.
00:10:04 Là, ce n'est plus possible, on ne voit que le noir.
00:10:06 Et ça, c'est hormonal, en fait, on n'y peut rien.
00:10:08 Donc on ne pourra pas faire en sorte que dans une grossesse,
00:10:11 il n'y ait pas ces bouleversements physiologiques.
00:10:13 Par contre, le conjoint peut se dire "Ok, je le sais,
00:10:17 je prends mon mal en par excellence, je sais que c'est temporaire,
00:10:24 ça ne va pas durer dans le temps, c'est l'histoire de 9-15 mois,
00:10:29 on va dire, le postpartum, mais je sais que c'est temporaire,
00:10:31 je vais retrouver la personne que je connais, elle va me supporter à nouveau,
00:10:34 puis nous aussi on le sait, c'est-à-dire que c'est temporaire.
00:10:36 Je ne sais pas si vous connaissez un peu le syndrome prémenstruel.
00:10:38 On en parle beaucoup, on libère beaucoup la parole dessus,
00:10:41 c'est un peu pareil, sauf que c'est 9 mois.
00:10:43 Du coup, on a un peu de 9 mois en SPM, et du coup, ça peut aussi arriver avec les enfants.
00:10:48 On le voit, il y a des odeurs qu'on ne supporte plus,
00:10:50 il y a des aliments qu'on ne mange plus, il y a des pathologies qui se développent
00:10:53 comme le reflux, qui sont temporaires, on revient normal après,
00:10:57 mais on passe un peu tout ça.
00:11:00 Et c'est hormonal, donc j'ai pris l'oestrogène, mais il y a la prolactine aussi
00:11:03 qui peut entronner pas mal d'irritabilité de l'humeur.
00:11:06 On a la progestérone qui, elle, peut vraiment rendre dingue.
00:11:10 Du coup, quand on est boosté à la progestérone,
00:11:13 c'est le contraire un petit peu de l'oestrogène,
00:11:15 qui va nous rendre un petit peu moins bien, on peut avoir des maux de tête.
00:11:18 Il y a tous ces changements physiologiques qui sont normaux,
00:11:22 sur lesquels on ne pourra pas travailler.
00:11:24 Donc c'est OK si notre grossesse, on ne la vit pas super bien,
00:11:27 de s'isoler un petit peu, de se dire "OK, là, je ne suis pas capable,
00:11:31 il y a des choses dont je n'ai plus envie,
00:11:33 des discussions que je n'ai pas envie d'avoir maintenant,
00:11:35 des choses que je n'ai plus envie de faire non plus,
00:11:37 aller au cinéma, je n'ai pas envie parce que je suis fatiguée".
00:11:39 Donc on peut le dire aussi à son partenaire,
00:11:41 puis lui peut l'entendre s'il est au fait de tous ces changements-là
00:11:44 et qu'il ne vous les met pas dans votre cours en disant
00:11:47 "T'as changé, t'es plus la même" et que vous allez répondre
00:11:49 "Oui, je suis enceinte, allez un petit peu plus loin sur le côté
00:11:52 je suis enceinte, il se passe ça dans mon corps, je ressens ça".
00:11:54 Et c'est réel, je ne l'invente pas, c'est toutes les femmes comme ça,
00:11:57 on n'y échappe malheureusement pas.
00:11:59 Moi si je peux rebondir là-dessus, c'est exactement ça.
00:12:01 J'ai bien aimé ce que tu as dit sur les sables mouvants.
00:12:04 Pour moi c'est exactement ça.
00:12:06 Allô ? Ouais.
00:12:07 C'est exactement ça, moi je vois ça comme une épreuve en fait.
00:12:10 On a vécu ça comme une épreuve,
00:12:11 mais ce que tu dis est extrêmement intéressant.
00:12:13 Dès lors qu'on est préparé à cette épreuve,
00:12:15 en fait dès qu'il y a une difficulté,
00:12:17 on l'a tellement anticipé
00:12:19 que ça ne devient pas de manière épidermique
00:12:21 une épreuve qui va être insurmontable,
00:12:23 c'est juste une étape naturelle, difficile mais naturelle,
00:12:26 qu'il va falloir passer.
00:12:27 Et personnellement,
00:12:29 moi je vais moins être dans l'expertise
00:12:31 mais plus dans le ressenti aujourd'hui,
00:12:33 de beaucoup lire, de beaucoup parler
00:12:35 en amont de ce qui allait se passer,
00:12:37 ça marche pas ici ?
00:12:39 Ça m'a aidé, et ça nous a aidé en tant que couple à se dire
00:12:42 là ça va être le bordel, là ça va être compliqué,
00:12:45 là ça va être le deuxième trimestre,
00:12:47 effectivement une zone un peu plus calme,
00:12:49 d'euphorie etc.
00:12:50 Et après ça va repartir en sucette.
00:12:52 De le savoir en amont,
00:12:53 ça nous a extrêmement aidé à passer cette épreuve
00:12:55 et heureusement pour l'instant on ne fait pas partie des couples
00:12:57 qui ont explosé en vol,
00:12:58 mais en partie grâce à ça.
00:13:00 Mais là ce que tu dis sur cette question de la préparation,
00:13:03 et je crois que c'était une de tes questions Nelly,
00:13:05 en effet il y a plein de choses qu'on peut faire
00:13:07 pour se préparer et cette communication,
00:13:10 de pouvoir nommer les choses,
00:13:12 nommer ce qu'on vit soi,
00:13:14 le nommer à son partenaire ou sa partenaire
00:13:17 qui n'imagine pas tout ce qui peut être vécu.
00:13:21 Ce que tu disais Audrey sur la participation
00:13:25 des conjoints, des conjointes à la préparation,
00:13:29 tout ça, ce savoir, il est essentiel.
00:13:32 Quand on sait ce qui va se passer dans son corps,
00:13:35 dans sa tête, émotionnellement,
00:13:37 quand on a quelques repères,
00:13:38 même si après ça va être différent pour chacun,
00:13:41 quand les choses arrivent,
00:13:43 on les appréhende un peu différemment
00:13:45 et un truc qui peut apparaître être un truc énorme,
00:13:48 là du coup le ballon va se dégonfler un peu plus rapidement.
00:13:52 Le savoir c'est quand même le pouvoir.
00:13:54 Et quand on peut se dire en amont,
00:13:57 là je pense par exemple à la question de la fatigue,
00:14:00 on va être fatigué, comment on va faire ?
00:14:02 Qu'est-ce qu'on va mettre en place ?
00:14:04 Moi quand je ne supporte pas,
00:14:06 je deviens dingo quand je manque de sommeil.
00:14:10 Quand on est dedans, on peut en rire.
00:14:14 On sait, même si on ne peut pas tout prévoir,
00:14:17 même si le fait de se parler,
00:14:19 on ne va pas pouvoir anticiper toutes les situations,
00:14:21 mais quand ça arrive,
00:14:22 on a déjà déminé un certain nombre de sujets,
00:14:25 ouvert la parole,
00:14:26 donc c'est plus facile de se parler et de se réadapter,
00:14:30 même si les solutions qu'on avait imaginées
00:14:32 ne vont pas du tout fonctionner.
00:14:34 Comme on y a déjà réfléchi,
00:14:35 on a déjà fait une partie du chemin
00:14:37 et ça, ça aide beaucoup.
00:14:40 Et toi Guillaume, en tant que papa,
00:14:42 comment tu as vécu ?
00:14:45 Comment tu penses que les hommes aussi,
00:14:47 en tant que représentant de la jeunesse masculine ?
00:14:49 Il y en a quelques-uns quand même,
00:14:51 on est dix, il faut prendre la parole.
00:14:55 Comment tu as appréhendé ce bouleversement identitaire
00:14:58 en tant que papa ?
00:15:01 Comment tu t'es retrouvé à devenir papa ?
00:15:04 Qu'est-ce que ça a changé chez toi ?
00:15:06 Et dans ton couple ?
00:15:07 Énormément de choses.
00:15:08 J'ai quitté mon job,
00:15:10 je me suis recentré sur mes passions,
00:15:14 ça a changé beaucoup de choses,
00:15:16 mais avant même d'être père,
00:15:18 on a eu une petite particularité,
00:15:20 c'est qu'on l'a attendu cinq, six ans,
00:15:22 la première, avant qu'elle arrive,
00:15:24 donc j'ai eu le temps de maturer beaucoup
00:15:26 ce que c'était d'être père.
00:15:28 Je suis même passé par une phase
00:15:30 d'avoir peur de ne pas l'être,
00:15:32 puisque on est passé par tout un processus
00:15:35 pour y arriver médicalement.
00:15:37 Donc au moment où c'est arrivé,
00:15:39 on était plus que prêt,
00:15:41 puisque ça faisait des années déjà
00:15:43 qu'on voulait l'être.
00:15:45 Personnellement, comment je me suis construit
00:15:48 par rapport à ça,
00:15:49 ou comment j'ai réagi,
00:15:51 ce que ça a changé, c'est que ça a donné
00:15:54 une bonne raison de me dire...
00:15:56 Comment exprimer ça ?
00:15:58 C'est pas que ça m'a donné une raison d'être,
00:16:00 puisque j'étais déjà sur Terre avant,
00:16:02 mais que ça m'a donné une espèce de cap
00:16:04 en me disant, plus tard,
00:16:06 qu'est-ce que j'aimerais leur raconter
00:16:08 comme histoire à ces enfants.
00:16:10 Et donc ça a été un point de départ pour moi,
00:16:13 d'une réorientation de ma vie,
00:16:15 à la fois professionnelle, à la fois en tant qu'homme,
00:16:18 comme un but, comme une espèce de bouée
00:16:20 que je voyais au loin pour me dire
00:16:22 "Ok, maintenant que j'ai des enfants,
00:16:24 j'ai envie de leur raconter une certaine histoire,
00:16:26 là où avant je me posais moins de questions,
00:16:28 je me posais plus dans le moment présent".
00:16:30 Là j'essaie plus de me dire "Ok, j'ai une certaine responsabilité,
00:16:33 non pas que à les éduquer, mais aussi à leur dire
00:16:35 "Voilà moi en tant qu'homme,
00:16:37 ce que j'ai fait de ma vie, et voilà ce que je vous laisse".
00:16:39 Il y avait un petit côté...
00:16:41 Je sais pas si c'est clair quand je parle...
00:16:43 N'hésitez pas à m'interrompre si c'est n'importe quoi,
00:16:46 mais voilà ce que ça a changé.
00:16:48 On a eu beaucoup de temps pour se préparer à ça,
00:16:50 et une fois que c'était là, ça m'a donné
00:16:52 une espèce de raison d'avancer moi en tant qu'homme.
00:16:54 Voilà, c'est ça que j'essaye de dire.
00:16:56 - Merci pour ton témoignage Guillaume,
00:16:58 moi j'accompagne énormément de personnes en parcours de PMA,
00:17:01 et quand on le vit et on le traverse,
00:17:03 on est beaucoup dans la douleur,
00:17:05 parfois dans les échecs,
00:17:07 cette angoisse si dérente de "peut-être que je ne serai jamais parent",
00:17:12 et que finalement dans tout ce parcours,
00:17:15 il y a aussi des choses à gagner.
00:17:17 Et là tu viens d'en témoigner,
00:17:19 c'est que finalement on se prépare différemment,
00:17:22 on mature, on construit cette nouvelle identité,
00:17:26 qui fait que moi les parents que j'accompagne,
00:17:28 qui traversent tout ça,
00:17:30 quand l'enfant arrive, il y a quelque chose aussi,
00:17:33 ils ont maturé cette identité,
00:17:35 il y a quelque chose,
00:17:37 je ne sais pas si je peux dire que c'est plus fort,
00:17:39 ce n'est pas une question de comparaison,
00:17:41 mais il y a vraiment quelque chose,
00:17:43 et souvent d'ailleurs les parents me disent
00:17:45 "on a galéré, on a attendu,
00:17:47 mais on est mieux préparé".
00:17:50 Souvent il y a quelque chose,
00:17:52 les difficultés,
00:17:54 il y a quelque chose où ils y font plus facilement face.
00:17:57 En fait ça devient des difficultés
00:17:59 beaucoup plus légères.
00:18:02 Le manque de sommeil,
00:18:04 les clashs dans le couple, etc.
00:18:06 A chaque fois, ce qui est plus simple,
00:18:08 c'est de se dire "ouais mais on a failli pas le vivre,
00:18:11 et on l'a tellement voulu que maintenant on ne peut pas s'en plaindre".
00:18:14 Et inconsciemment il y a beaucoup de ça,
00:18:16 donc ça nous a nous personnellement,
00:18:18 on a eu des preuves,
00:18:20 parce que les preuves étaient en amont.
00:18:22 Une fois que c'est là, c'est là, c'est un bonheur, un miracle,
00:18:24 et on se dit "bon oui, on a tellement galéré avant
00:18:26 que maintenant on ne peut que kiffer le moment".
00:18:28 C'est beaucoup ça.
00:18:30 Je vais reprendre sur ce que vous dites,
00:18:34 parce qu'en fait,
00:18:36 souvent on voit l'enfant,
00:18:38 la naissance d'un enfant, l'arrivée d'un enfant dans une vie,
00:18:40 comme la finalité de quelque chose.
00:18:42 On a vraiment des étapes dans la vie
00:18:44 qu'on doit remplir, des cases qu'on remplit,
00:18:46 et de côté, je rencontre quelqu'un,
00:18:48 je me marie, j'ai des enfants.
00:18:50 Alors le mariage, on a un peu cassé
00:18:52 les codes, il y a de moins en moins de mariages,
00:18:54 mais le bébé, c'est un peu la finalité
00:18:56 de ce couple. On le voit comme le bonheur
00:18:58 absolu, l'aboutissement d'une relation,
00:19:00 alors que ce n'est pas ça.
00:19:02 Moi je ne suis pas d'accord avec ça, vraiment.
00:19:04 Ce n'est pas le bonheur absolu. Je m'en mets trois enfants,
00:19:06 je suis très heureuse, mais ce n'est pas le bonheur absolu.
00:19:08 C'est juste qu'on a entrepris
00:19:10 quelque chose, ensemble, la création
00:19:12 d'une famille. Et en fait on ne le voit pas comme
00:19:14 le fait d'entreprendre quelque chose. C'est-à-dire qu'on est deux,
00:19:16 on s'est dit "Ok, on est rendu
00:19:18 à un moment de notre vie où on a envie d'entreprendre
00:19:20 quelque chose ensemble, un projet,
00:19:22 donc celui d'avoir un enfant, mais c'est un peu comme celui
00:19:24 d'avoir une maison, c'est juste qu'il y a un peu plus de responsabilité.
00:19:26 Mais on entreprend quelque chose ensemble.
00:19:28 Et quand on entreprend quelque chose
00:19:30 ensemble, il faut qu'on soit un peu dans le même
00:19:32 bateau, c'est-à-dire qu'on va le préparer,
00:19:34 on va dire "Ok, c'est quoi,
00:19:36 où on s'en va, où est-ce qu'on va avec cet enfant-là ?
00:19:38 Comment est-ce qu'on peut le préparer ?"
00:19:40 Donc le voir comme une finalité,
00:19:42 on ne le prépare pas. On se dit "C'est juste,
00:19:44 c'est la nature, c'est comme ça, on a un couple,
00:19:46 il faut qu'on ait des enfants. C'est la vie, mais on ne s'est pas
00:19:48 posé la question "Est-ce que je veux vraiment cet enfant-là ?
00:19:50 Et toi, est-ce que tu veux vraiment cet enfant-là ?"
00:19:52 Des fois on a même l'impression, j'en suis aussi des familles,
00:19:54 "Moi je l'ai plus voulu que toi."
00:19:56 "Ok, mais parce que vous n'avez jamais discuté de ça avant,
00:19:58 du coup." "Mais non,
00:20:00 ils n'ont pas discuté de ça avant, de se dire
00:20:02 "C'est quoi toi, comment tu te sens,
00:20:04 comment tu te vois avec cet enfant,
00:20:06 c'est quoi que tu vois, c'est quoi tes représentations ?"
00:20:08 Et c'est quelque chose que je reproche,
00:20:10 mais qui m'a beaucoup manqué
00:20:12 dans ma vie en France,
00:20:14 et quelque chose que j'ai trouvé
00:20:16 quand je suis partie en Amérique, où vraiment
00:20:18 la famille est
00:20:20 une étape, on entreprend.
00:20:22 On entreprend quelque chose, on crée quelque chose ensemble,
00:20:24 mais ce n'est pas le bonheur absolu.
00:20:26 Et là, dans ce que tu viens de dire,
00:20:28 comment on partage
00:20:30 en effet sur son désir,
00:20:32 ce projet, comment on le voit,
00:20:34 comment on se voit père et mère,
00:20:36 qu'est-ce que c'est pour soi
00:20:38 être père ou être mère,
00:20:40 qu'est-ce que c'est qu'une famille, et ça,
00:20:42 pouvoir le partager ensemble,
00:20:44 ça permet de parler beaucoup des attentes
00:20:46 qu'on a, parce que bien souvent, il y a plein
00:20:48 d'attentes implicites,
00:20:50 où pour soi, une mère, ça doit
00:20:52 faire ci, ça, un père, ça doit faire ci, ça,
00:20:54 mais si on ne s'en est pas parlé,
00:20:56 ça va créer plein d'incompréhensions,
00:20:58 d'attentes et de déceptions,
00:21:00 puisque du coup, comme c'est pas nommé,
00:21:02 nos attentes ne sont pas comblées.
00:21:04 Donc ça, c'est souvent aussi
00:21:06 quelque chose que je recommande
00:21:08 pendant la grossesse, pour moi, la grossesse
00:21:10 est vraiment un temps privilégié
00:21:12 pour se préparer, moi je dis souvent
00:21:14 remplir le sac à dos du couple,
00:21:16 on va mettre
00:21:18 plein de choses dedans, et une fois
00:21:20 que ce sac à dos est rempli,
00:21:22 on va pouvoir traverser les sables mouvements,
00:21:24 et ça, ça fait partie du sac à dos
00:21:26 de partager sur ses représentations
00:21:28 et sur ses attentes.
00:21:30 Et pour rebondir là-dessus,
00:21:32 au-delà même de comment on va s'organiser quand ça arrive,
00:21:34 c'est même la vision des choses
00:21:36 sur l'éducation. Nous, le principal
00:21:38 clash, il est sur
00:21:40 la vision des choses, c'est quoi sa philosophie d'éducation,
00:21:42 c'est quoi la mienne,
00:21:44 on ne s'est pas mis d'accord, pour le coup, là-dessus,
00:21:46 et les clashes qu'on a eues, c'était là-dessus,
00:21:48 c'était, il y en a un qui veut créer
00:21:50 une espèce de cocon, l'autre qui veut plus exposer
00:21:52 les enfants parce qu'il sent que le monde est dur
00:21:54 et qu'il faut les préparer à ça, c'est deux philosophies
00:21:56 qui s'opposent, et se mettre d'accord là-dessus,
00:21:58 ça peut être un clash sur
00:22:00 le jeu que tu achètes, sur comment
00:22:02 on réagit face à une difficulté
00:22:04 à l'école quand la petite
00:22:06 se fait un peu bouger,
00:22:08 c'est des petites choses au quotidien qui fait
00:22:10 que les gros clashs,
00:22:12 c'est comme une philosophie de vie, en fait,
00:22:14 et se mettre d'accord là-dessus, c'est
00:22:16 clair, en réalité.
00:22:18 Mais ça prend du temps, c'est-à-dire que les questions
00:22:20 elles émergent aussi au fur et à mesure de l'âge
00:22:22 de l'enfant, et que ce couple parental
00:22:24 il va se construire tout au long de la vie
00:22:26 des parents, parce que les questions, les problématiques,
00:22:28 les difficultés,
00:22:30 elles évoluent.
00:22:32 Ça commence dès le projet
00:22:34 d'avoir un enfant, la construction
00:22:36 de ce couple parental, et dans cette construction-là
00:22:38 il y a vraiment cet enjeu
00:22:40 en effet de comment on va
00:22:42 construire ensemble
00:22:44 notre parentalité,
00:22:46 on vient chacun avec son histoire, son éducation,
00:22:48 des choses qu'on a envie
00:22:50 de reproduire ou non,
00:22:52 mais en effet, comment on va
00:22:54 co-construire ensemble,
00:22:56 et il ne s'agit pas "on va prendre
00:22:58 ma valise plutôt que la tienne, la tienne est mieux que
00:23:00 la mienne", c'est comment on va
00:23:02 construire ensemble une nouvelle valise.
00:23:04 Et justement Mathilde, est-ce que tu peux nous rappeler
00:23:06 un peu les grandes challenges que les parents
00:23:08 rencontrent à l'arrivée d'un enfant ? Toi tu les vois en
00:23:10 cabinet de thérapie ?
00:23:12 Oui, je les vois.
00:23:14 Alors je dirais qu'il y en a 5,
00:23:16 donc il y a celui-là,
00:23:18 qu'on vient de dire, qui rejoint,
00:23:20 j'appelle souvent l'enjeu autour de
00:23:22 la construction du rôle et de la place
00:23:24 de parent.
00:23:26 Donc ça c'est ce qu'on vient de dire,
00:23:28 ce que tu viens de dire Guillaume, sur
00:23:30 la construction de la parentalité,
00:23:32 et de l'éducation,
00:23:34 de la vision autour de l'éducation.
00:23:36 Il y a, dans
00:23:38 cette question-là, on parlait tout à l'heure, partagé
00:23:40 sur les représentations, mais
00:23:42 en tout cas quand il y a un couple,
00:23:44 la manière dont on regarde
00:23:46 son partenaire en tant que père
00:23:48 ou en tant que mère, et le regard
00:23:50 qu'on reçoit, il est fondamental.
00:23:52 On dit d'ailleurs que ce regard-là, il est
00:23:54 au-delà du regard de l'enfant,
00:23:56 l'enfant fait de ses parents, des parents,
00:23:58 mais aussi entre partenaires,
00:24:00 on peut se faire parent.
00:24:02 Et quand on regarde son conjoint ou sa
00:24:04 conjointe, en voyant chez
00:24:06 lui ses compétences,
00:24:08 ses forces, ce qui
00:24:10 fait de lui un bon parent,
00:24:12 ça aide beaucoup
00:24:14 aussi dans la construction, dans ce
00:24:16 bouleversement identitaire, quand on
00:24:18 voit chez son partenaire qu'il voit en nous
00:24:20 une bonne mère, sécurisante,
00:24:22 affectueuse,
00:24:24 douce, ça fait du bien.
00:24:26 Voilà, ça c'est quelque chose de très important.
00:24:28 Autour de la place, alors ça c'est
00:24:30 un sujet dans les consultations
00:24:32 de couple, la question de la place
00:24:34 des familles d'origine, parce que ça
00:24:36 c'est quand même souvent un point
00:24:38 de tension majeure.
00:24:40 Moi je dis souvent, quand
00:24:42 la famille se construit, construise
00:24:44 une forteresse.
00:24:46 Il y a les parents, l'enfant
00:24:48 ou les enfants dans la
00:24:50 forteresse, mais il n'y a pas les familles d'origine.
00:24:52 Alors c'est vrai, souvent on dit oui, il faut
00:24:54 couper avec ses parents quand on construit
00:24:56 sa famille. Couper ça ne veut pas
00:24:58 dire plus se voir.
00:25:00 C'est comment on réaménage les liens.
00:25:02 C'est-à-dire que les familles d'origine, elles n'ont pas à être
00:25:04 dans la forteresse. De temps en temps,
00:25:06 elles vont venir visiter la forteresse
00:25:08 et voilà, il y a un pont-levis,
00:25:10 il y a des accès, et puis,
00:25:12 mais elles ne restent pas dans la forteresse.
00:25:14 Si les familles d'origine restent dans la forteresse,
00:25:16 généralement, là, c'est le début
00:25:18 des emmerdes.
00:25:20 Donc, voilà, il y a
00:25:22 vraiment toutes ces questions aussi, et là aussi,
00:25:24 comment on va se parler ? Comment tu vois
00:25:26 la place des grands-parents ? De quoi nos
00:25:28 parents sont capables ou pas ? Quelle place
00:25:30 on a envie de leur donner ? Qu'est-ce qui est important
00:25:32 pour moi ? Comment je le vis ? Est-ce que ça
00:25:34 me menace ? Voilà, tous ces sujets-là.
00:25:36 Donc ça c'est un défi.
00:25:38 Le défi de la fatigue,
00:25:40 on l'a un peu dit, voilà, je pense que ça
00:25:42 c'est quand même... Il ne faut pas oublier que la fatigue
00:25:44 c'est le premier élément dépressogène.
00:25:46 C'est utilisé comme moyen
00:25:48 de torture. Donc, voilà,
00:25:50 si on ne prend pas soin
00:25:52 de sa fatigue, et en tout
00:25:54 cas de soi, et de comment je
00:25:56 retrouve de l'énergie, c'est quand même
00:25:58 compliqué.
00:26:00 Ensuite, il y a la question de la complémentarité.
00:26:03 Moi, j'entends, c'est un peu
00:26:05 caricatural de le dire comme ça, mais beaucoup
00:26:07 de femmes qui vont dire "oui, mais
00:26:09 je veux que le père de mon
00:26:11 enfant ou le coparent
00:26:13 fasse comme je fais.
00:26:15 Il fait mal, il ne met pas
00:26:17 la couche comme il faut, ça déborde,
00:26:19 il y a des fuites."
00:26:21 Et souvent, il y a cette idée que les parents
00:26:23 doivent faire pareil.
00:26:25 Mais si un enfant, il a deux parents,
00:26:27 c'est une chance extraordinaire et c'est
00:26:29 une chance de richesse et de différence.
00:26:31 Et heureusement qu'il n'a pas
00:26:33 deux parents clones, sinon ça ne sert strictement
00:26:35 à rien d'avoir deux parents.
00:26:37 Donc c'est vraiment important
00:26:39 de se voir dans le couple
00:26:41 vraiment comme complémentaire et de voir
00:26:43 cette complémentarité comme une richesse.
00:26:45 Et puis de pouvoir se dire
00:26:47 "toi, ta force, c'est que la nuit
00:26:49 finalement, tu te réveilles facilement,
00:26:51 ça ne te dérange pas. Bon, ok, on va
00:26:53 utiliser cette force-là parce que moi,
00:26:55 j'ai plutôt besoin de dormir à ce
00:26:57 moment-là." C'est un exemple parmi d'autres.
00:26:59 Mais vraiment voir les choses
00:27:01 comme de la complémentarité parce que si
00:27:03 on est tout le temps derrière son conjoint en disant
00:27:05 "tu fais mal la couche, tu l'as mal mise,
00:27:07 laisse-moi faire", il y a
00:27:09 de fortes chances qu'au bout d'un moment, il va
00:27:11 finir par arrêter de faire.
00:27:13 Donc, voilà, là on voit
00:27:15 bien, vous avez déjà tous en tête
00:27:17 le cercle vicieux dans lequel
00:27:19 on rentre. Et puis
00:27:21 je pense à un dernier enjeu autour de la question de la
00:27:23 sexualité. Alors tout à l'heure,
00:27:25 dans la première table ronde, il en a été
00:27:27 question. Par rapport
00:27:29 à cette question-là de la sexualité,
00:27:31 elles ont souligné, Anna
00:27:33 et Camille, vraiment l'importance
00:27:35 du temps de
00:27:37 mettre de côté un peu les stéréotypes
00:27:39 et les idées un peu reçues.
00:27:41 Et puis,
00:27:43 ce qui me semble aussi...
00:27:45 Alors évidemment une grossesse, tous ces
00:27:47 bouleversements physiques,
00:27:49 ils peuvent éloigner au sein du couple.
00:27:51 Mais la sexualité, c'est pas que la
00:27:53 pénétration non plus, c'est aussi le toucher,
00:27:55 la tendresse,
00:27:57 tout ce qu'il y a autour. Et ça, on peut
00:27:59 et c'est important de nourrir
00:28:01 ça. C'est ce qui quand même définit le couple
00:28:03 conjugal, sinon on est juste
00:28:05 des copains qui avons un enfant.
00:28:07 Donc ça, c'est important
00:28:09 de nourrir ça. Et puis,
00:28:11 la sexualité,
00:28:13 ça n'est ni naturel ni spontané.
00:28:15 Souvent, il y a cette idée-là.
00:28:17 Et souvent, on me dit, oui, mais au début,
00:28:19 quand je dis ça aux couples que j'accompagne, ils me disent,
00:28:21 au début, on faisait tout le temps l'amour.
00:28:23 Oui, mais au début, vous aviez rendez-vous,
00:28:25 vous saviez que vous aviez rendez-vous
00:28:27 et que vous alliez avoir
00:28:29 un rapport sexuel. Ou en tout cas, que vous alliez
00:28:31 vous rencontrer d'une manière ou d'une autre.
00:28:33 Donc, vous êtes préparé, vous avez fait attention
00:28:35 à comment vous êtes habillé, vous êtes rendu
00:28:37 disponible psychiquement.
00:28:39 Donc, vous avez,
00:28:41 vous êtes mis en disponibilité de pouvoir
00:28:43 rencontrer l'autre.
00:28:45 Et une fois qu'on vit ensemble et qu'on a des enfants,
00:28:47 on ne prend plus ce temps de préparation.
00:28:49 Moi, souvent, un de mes conseils, c'est de dire,
00:28:51 donnez-vous rendez-vous. Souvent, ils me disent,
00:28:53 on a un vieux couple, c'est horrible,
00:28:55 on ne va pas se donner rendez-vous, c'est l'angoisse.
00:28:57 Mais quand ils le font
00:28:59 et qu'ils l'expérimentent, le fait de se donner rendez-vous,
00:29:01 il n'y aura peut-être pas de sexualité
00:29:03 ou de rapport sexuel, de pénétration,
00:29:05 mais on se donne rendez-vous,
00:29:07 on se rend disponible pour l'autre.
00:29:09 Et ça, ça va nourrir
00:29:11 vraiment le couple.
00:29:13 Voilà.
00:29:15 J'aimerais aborder...
00:29:17 Si elle peut venir juste chez moi après une heure,
00:29:19 on discute avec ma femme et on fait ça bien.
00:29:21 Ça ne va pas prendre longtemps.
00:29:23 Je suis d'accord avec tout ce que tu viens de dire.
00:29:25 Je joue le soir, donc ça a été
00:29:27 un peu plus compliqué dans le sens où
00:29:29 les rendez-vous, en plus, le soir, je suis souvent
00:29:31 dans les théâtres.
00:29:33 Le rendez-vous, ça peut être à 10h du matin.
00:29:35 Oui, il faut être du matin.
00:29:37 Mais tu as raison, ça peut...
00:29:39 Ce n'était pas mon cas.
00:29:41 Mais on a essayé ça aussi.
00:29:43 Une fois qu'on s'est dit ça,
00:29:45 ça veut dire que, personnellement,
00:29:47 j'ai enlevé des dates de jeu
00:29:49 et on s'est dit,
00:29:51 une, deux, trois fois par mois,
00:29:53 ce soir-là, c'est sûr, je ne joue pas.
00:29:55 C'est sûr qu'il y a une baby-sitter qui arrive
00:29:57 ou un baby-sitter.
00:29:59 Et on le met en avance. On ne se laisse pas avoir
00:30:01 par le quotidien du...
00:30:03 On a un agenda commun,
00:30:05 évidemment, et on sait...
00:30:07 Là, je peux te dire la prochaine...
00:30:09 Et je l'attends avec impatience.
00:30:11 Non, non.
00:30:13 Ne me la gaffe pas.
00:30:15 C'était hier soir, typiquement. C'est pour ça que j'ai très peu
00:30:17 dormi, mais que j'ai le sourire.
00:30:19 Non, non.
00:30:21 Carrément.
00:30:23 Non, non. Hier soir, typiquement,
00:30:25 je jouais à 18h,
00:30:27 tout de suite après, on s'est dit,
00:30:29 on bloque un autre spectacle, on va le voir ensemble,
00:30:31 on va faire un resto derrière,
00:30:33 et on s'est fait garder les petits.
00:30:35 Et oui, ça marche. C'est très simple à faire,
00:30:37 en réalité. C'est très, très simple.
00:30:39 Mais ces moments pour nourrir le couple conjugal,
00:30:41 moi, je ne sais pas si on a le temps,
00:30:43 mais je prends souvent
00:30:45 cette image de la coquille d'œuf.
00:30:47 Quand on construit son couple conjugal, on construit une coquille d'œuf.
00:30:49 Une coquille d'œuf,
00:30:51 si elle est pleine, s'il y a un caillou
00:30:53 qui va sur la coquille d'œuf,
00:30:55 l'œuf est plus solide.
00:30:57 Si la coquille est vide,
00:30:59 l'œuf est plus fragile.
00:31:01 Et donc, c'est qu'est-ce qu'on va mettre
00:31:03 dans sa coquille d'œuf
00:31:05 pour rendre l'œuf solide.
00:31:07 Et qu'il ne faut pas oublier,
00:31:09 les enfants ont surtout besoin
00:31:11 de parents heureux.
00:31:13 Et donc, le couple, pas au détriment,
00:31:15 évidemment, des besoins de l'enfant, mais
00:31:17 nourrir son couple, c'est vraiment
00:31:19 remplir sa coquille d'œuf, c'est fondamental.
00:31:21 Et là,
00:31:23 tu nous as donné un super
00:31:25 exemple. On peut se donner rendez-vous
00:31:27 juste pour passer du temps de couple.
00:31:29 Et là,
00:31:31 souvent il y a aussi cette idée, oui, mais il faut des relais,
00:31:33 il faut pouvoir sortir.
00:31:35 On l'a beaucoup vu pendant le confinement,
00:31:37 les couples que j'accompagnais, j'ai bien vu
00:31:39 ceux qui étaient vraiment en difficulté,
00:31:41 c'est ceux qui nourrissent, qui remplissent
00:31:43 la coquille à l'extérieur du foyer.
00:31:45 Donc quand on va au ciné, au resto,
00:31:47 faire un spectacle, voir des copains, etc.
00:31:49 Pendant le confinement, on ne pouvait plus faire
00:31:51 tout ça et dans le postpartum, on ne peut plus
00:31:53 faire tout ça non plus. C'est une forme de confinement
00:31:55 forcée, oui,
00:31:59 organisée différemment.
00:32:01 Mais dans la maison,
00:32:03 on peut faire plein de choses. On peut faire
00:32:05 restaurant chez soi, des trucs tout bêtes,
00:32:07 allumer des bougies,
00:32:09 on ne va pas dîner dans la cuisine,
00:32:11 mais sur la table du salon. Voilà, c'est comment
00:32:13 on va réapprendre à se réinventer
00:32:15 et se dire, bon, là,
00:32:17 les enfants sont couchés, on n'a peut-être que
00:32:19 une demi-heure, mais
00:32:21 on va se regarder dans le blanc des yeux
00:32:23 ou juste se prendre dans les bras
00:32:25 ou des choses qui paraissent
00:32:27 débiles, presque,
00:32:29 qui semblent tellement anodines et qui pourtant
00:32:31 sont tellement importantes.
00:32:33 Il y a plein de petites choses qu'on peut faire
00:32:35 et puis dans le postpartum aussi, on peut se dire
00:32:37 "Ah là, il me manque mon couple conjugal,
00:32:39 il me manque, j'ai vraiment envie
00:32:41 et tout. Bon, là, c'est pas possible, on ne peut pas
00:32:43 aller au resto". Mais juste,
00:32:45 déjà, de se le dire,
00:32:47 ça permet,
00:32:49 déjà, de dire "Allô, j'y pense,
00:32:51 je n'ai pas oublié, c'est important pour moi"
00:32:53 et
00:32:55 puis de se le dire, on se dit "Bon, bah,
00:32:57 là, aujourd'hui, ce n'est pas possible,
00:32:59 mais il y a un moment où ce sera possible".
00:33:01 Et que de prendre soin de son couple
00:33:03 conjugal, ça demande du travail,
00:33:05 ce n'est pas
00:33:07 le temps qui passe, ça demande une attention,
00:33:09 c'est un travail.
00:33:11 Le couple, c'est une énième personne,
00:33:13 1+1=3,
00:33:15 c'est un très célèbre thérapeute de couple
00:33:17 qui dit ça, Philippe Cayet,
00:33:19 et donc ça demande
00:33:21 aussi une volonté. Qu'est-ce que je vais faire
00:33:23 pour prendre soin de mon couple ?
00:33:25 - Et ça ne repose pas uniquement
00:33:27 sur les épaules d'une seule personne.
00:33:29 Parce que, tu sais, on a tendance,
00:33:31 malheureusement, des fois, de penser que ça
00:33:33 ne repose que sur les épaules d'une personne, puis on n'ose pas
00:33:35 demander. On a des attentes
00:33:37 qui ne sont pas remplies et
00:33:39 complicitement, je ne sais pas en France,
00:33:41 mais je pense que oui aussi, ça repose
00:33:43 souvent aussi sur les épaules de la maman,
00:33:45 alors que ce serait
00:33:47 le contraire, normalement. Parce que justement,
00:33:49 on disait, le post-partum, charge mentale,
00:33:51 tu es en plein remaniement psychique,
00:33:53 tu n'y penses pas, en fait.
00:33:55 Tu n'y penses pas, puis du coup, on va te reprocher
00:33:57 de ne pas y penser, on va te reprocher de ne pas avoir fait certaines
00:33:59 choses, alors que tu es à 10 000
00:34:01 lieux d'imaginer que l'autre est en souffrance,
00:34:03 admettons, et qu'il demande de l'attention.
00:34:05 Donc, en fait, ne pas hésiter, il n'y a pas beaucoup
00:34:07 de papa, mais du coup, passez le message
00:34:09 à la maison. Prenez les devants, en fait,
00:34:11 les conjoints, les coparents, celui qui n'est
00:34:13 pas en état de post-partum,
00:34:15 de prendre les devants, de prendre des
00:34:17 initiatives, c'est fortement
00:34:19 recommandé aussi, parce que d'avoir des attentes
00:34:21 qui ne sont pas comblées, ça peut creuser,
00:34:23 ça peut vider la coquille aussi. Donc,
00:34:25 devenez acteur, en fait,
00:34:27 du couple, devenez acteur de votre famille,
00:34:29 et tout ne repose pas sur une seule personne
00:34:31 de famille, c'est plusieurs personnes.
00:34:33 Là, c'est hyper important ce que tu dis, Audrey,
00:34:35 ça me fait penser à quelque chose que je n'ai pas dit
00:34:37 autour de la sexualité, souvent on reproche aux femmes
00:34:39 de "elle vient d'avoir un bébé,
00:34:41 elle n'a plus de libido". Moi,
00:34:43 la sexualité dans un couple,
00:34:45 c'est à deux, donc il n'y a pas que
00:34:47 Madame, il y a aussi Monsieur ou la partenaire.
00:34:49 Qu'est-ce que fait l'autre aussi
00:34:51 pour se rendre désirable,
00:34:53 pour susciter le désir ? La question,
00:34:55 elle se pose des deux côtés.
00:34:57 Tu m'accuses de ne plus avoir de libido,
00:34:59 mais de ton côté, qu'est-ce qui se passe
00:35:01 à toi aussi ? - C'était l'une de mes
00:35:03 questions un peu plus militante,
00:35:05 on parle de ce "baby clash",
00:35:07 mais ça ne relève pas
00:35:09 des inégalités de genre ?
00:35:11 Est-ce que cette charge mentale
00:35:13 qu'on endosse en tant que femme,
00:35:15 ce n'est pas aussi
00:35:17 une des raisons du "baby clash" ?
00:35:19 On ne pourrait pas prendre la chose avec
00:35:21 aussi un peu
00:35:23 de militantisme, d'engagement ?
00:35:25 - Moi, je suis
00:35:27 maintenant québécoise après neuf ans,
00:35:29 je ne suis pas militante.
00:35:31 Moi, c'est une culture,
00:35:33 c'est une société, je pense qu'on doit
00:35:35 accepter aussi qu'on a une société qui
00:35:37 est patriarcale, qui est
00:35:39 avec l'homme au centre,
00:35:41 et ça, c'est culturel, c'est ce qui fait aussi
00:35:43 qu'on aime notre culture aussi.
00:35:45 Donc en fait, inégalités
00:35:47 de genre, moi je ne partage pas
00:35:49 cet avis forcément,
00:35:51 je pense que c'est une question de responsabilité.
00:35:53 Il y a des inégalités
00:35:55 dans le sens où, implicitement, il y a des choses
00:35:57 qui reposent sur les épaules des hommes,
00:35:59 sur les épaules des femmes, etc.
00:36:01 Mais pour moi, on se cache aussi
00:36:03 derrière la responsabilité d'une société dans laquelle on vit.
00:36:05 De remettre ça que sur
00:36:07 les épaules des parents, pour moi,
00:36:09 on n'est pas dans la
00:36:11 bonne direction. Pourquoi je dis ça ?
00:36:13 C'est parce que j'ai vraiment moyen de comparaison,
00:36:15 parce que je compare et que ça fait neuf ans
00:36:17 que je vis en Amérique du Nord, et que
00:36:19 j'ai vu autre chose, j'ai vu une autre société,
00:36:21 j'ai vu une autre façon de faire, qui est aussi une société patriarcale
00:36:23 de toute façon, mais avec
00:36:25 une répartition des rôles,
00:36:27 avec une répartition des responsabilités partagées,
00:36:29 mais pas que dans la maison,
00:36:31 dans la société. C'est-à-dire que
00:36:33 tous les... ça part
00:36:35 de détails, mais les formulaires
00:36:37 à la maternité ne sont pas
00:36:39 "maman", il n'est pas marqué "maman", il est marqué
00:36:41 "parent 1", "parent 2".
00:36:43 Donc déjà, il y a une inclusion
00:36:45 qui est faite dès la maternité,
00:36:47 dès même, je vous dirais, le suivi.
00:36:49 Quand on fait des suivis à la clinique,
00:36:51 en consultation
00:36:53 prénatale, pareil,
00:36:55 l'inclusivité, elle est
00:36:57 autant sur les genres que sur l'origine,
00:36:59 que sur tout ce qui
00:37:01 est aussi
00:37:03 LGBTQ, etc.
00:37:05 En fait, l'inclusion, elle est de
00:37:07 partout, et je pense que c'est aussi
00:37:09 de la responsabilité, pour moi, de le pays
00:37:11 dans lequel on vit, de la société dans laquelle on vit,
00:37:13 qui devrait, du coup, inclure
00:37:15 de manière égale,
00:37:17 ne pas s'adresser toujours aux maires.
00:37:19 On l'a vu, enfin, je ne sais pas si vous avez vu, j'ai fait une vidéo
00:37:21 récemment, puis ça me tient à cœur.
00:37:23 C'est qu'en fait, on considère aujourd'hui, par exemple,
00:37:25 que le fait que les femmes
00:37:27 prennent un congé parental les éloigne
00:37:29 du travail, en fait. Enfin, moi, c'est des propos
00:37:31 qui m'ont choqué, parce qu'en fait, c'est-à-dire que
00:37:33 on cible encore une fois la femme
00:37:35 et la famille, en fait. C'est-à-dire qu'on parle
00:37:37 pas de... Il y a des hommes aussi qui prennent des congés
00:37:39 parentaux, il y a des hommes aussi qui restent à la maison
00:37:41 avec leur enfant, puis ils sont complètement écartés
00:37:43 d'un discours, et on fournit pas
00:37:45 d'outils à la famille d'être égalitaire,
00:37:47 en fait. Donc, plus loin qu'une inégalité
00:37:49 de genre implicite,
00:37:51 on va dire, et culturelle, elle est sociétale.
00:37:53 Et ça passe, pour moi, en donnant des outils
00:37:55 aux familles de pouvoir être égaux
00:37:57 dans la répartition,
00:37:59 dans la possibilité, en tout cas, de partager
00:38:01 à 50/50
00:38:03 la possibilité d'être avec son enfant.
00:38:05 Et en fait, souvent, dans
00:38:07 ces congés parentaux qui ciblent essentiellement
00:38:09 du coup la gente féminine,
00:38:11 on la crée, cette inégalité.
00:38:13 Donc, c'est même pas que c'est pas le papa et la maman
00:38:15 qui sont inégalitaires et
00:38:17 culture, mais c'est qu'on a créé cette inégalité.
00:38:19 Ce que tu veux dire, c'est que c'est politique, en fait.
00:38:21 Pour moi, oui. Les mesures politiques ne sont pas à la hauteur
00:38:23 aujourd'hui. Et justement, toi, tu peux nous
00:38:25 parler un petit peu de ce qui se passe au Canada
00:38:27 sur la notion de répit parental, dont on
00:38:29 parle beaucoup aujourd'hui.
00:38:31 Tu es responsable d'une
00:38:33 unité en maternité qui
00:38:35 accompagne les parents dans leur
00:38:37 nouvelle parentalité. Il y a des mesures, il y a des
00:38:39 fonds, il y a de l'argent qui est mis sur la table
00:38:41 pour accompagner ces jeunes parents. Tu peux nous
00:38:43 en dire plus un peu sur ça ? Oui, je pense
00:38:45 que tu as dit un point essentiel. Il y a de l'argent
00:38:47 qui est mis. Il y a de l'argent, c'est-à-dire qu'on
00:38:49 a une politique qui est très familiale. Et moi,
00:38:51 c'est aussi pour cette raison que je suis partie,
00:38:53 parce que j'ai une famille nombreuse, considérée
00:38:55 comme nombreuse en France. J'ai trois enfants
00:38:57 et je n'ai jamais trouvé de
00:38:59 place pour la famille.
00:39:01 Je dis nous parce que je me
00:39:03 considère comme québécoise maintenant.
00:39:05 On a des philosophies qui sont
00:39:07 inclusives et qui incluent la
00:39:09 famille. On parle de famille en général. On parle
00:39:11 de parents 1, comme je dis,
00:39:13 parents 2, de la famille. Et en fait, on déjà, dès la
00:39:15 maternité, on favorise ça.
00:39:17 On inclut le coparent
00:39:19 dans les chambres. Dans la chambre, il y a
00:39:21 une place pour le coparent. Il y a un
00:39:23 canapé de lit dans lequel il peut s'allonger.
00:39:25 Il dort pas dans un siège. Non.
00:39:27 Il dort dans un matelas et il peut
00:39:29 rester. C'est-à-dire qu'on ne lui dit pas
00:39:31 "Monsieur, les visites, c'est jusqu'à minuit, vous devez
00:39:33 quitter à minuit". Non, c'est "Monsieur" ou d'ailleurs, il n'y a pas
00:39:35 de nombre limite. C'est-à-dire que même s'il y a une doulade,
00:39:37 mettons, d'accompagnement de périnatale,
00:39:39 il y a de la famille qui vient,
00:39:41 on n'est pas limité. Ça m'est arrivé de faire
00:39:43 des accouchements.
00:39:45 Au Canada, les infirmières font les accouchements.
00:39:47 Ça m'est arrivé de faire des accouchements avec
00:39:49 4-5 personnes dans la pièce.
00:39:51 C'est comme...
00:39:53 On limite pas, on dit "Vous pouvez sortir
00:39:55 si vous voulez". Non. Il y a cette inclusion de la
00:39:57 famille et on essaye de
00:39:59 favoriser vraiment la triade.
00:40:01 Donc en fait, la famille, la maman arrive,
00:40:03 elle accouche dans la chambre
00:40:05 où elle va séjourner,
00:40:07 dans la chambre où elle va donner naissance.
00:40:09 Donc vous arrivez, vous êtes en phase de travail,
00:40:11 ça y est, on vous a dit... Enfin, on a dit "Ok,
00:40:13 c'est bon, vous partez pour accoucher".
00:40:15 On vous atteint dans une chambre et vous n'en bougez plus.
00:40:17 Vous avez la même infirmière jusqu'à ce que vous quittiez
00:40:19 l'hôpital 48 heures après.
00:40:21 On reste 48 heures à l'hôpital, encore une fois,
00:40:23 pour favoriser la triade vraiment.
00:40:25 On fait les suivis à domicile après.
00:40:27 Donc on se déplace à la maison. On a des infirmières
00:40:29 relées avec vraiment un gros travail
00:40:31 de relève, etc.
00:40:33 Où nous, on va relever les choses à surveiller.
00:40:35 Un allaitement qui démarre mal, par exemple,
00:40:37 c'est noté dans le cahier de liaison.
00:40:39 Et donc, à domicile, il va y avoir la continuité
00:40:41 des soins qui va être assurée
00:40:43 toujours à la maison. Parce qu'on considère
00:40:45 que la famille est mieux chez elle qu'à l'hôpital.
00:40:47 Ça évite aussi les discours
00:40:49 clivants des fois de souvent les parents quand ils vont dire
00:40:51 "Moi j'ai vu 10 professionnels,
00:40:53 10 qui n'avaient pas le même discours, qui n'étaient pas la même chose".
00:40:55 Donc en fait, on limite. On limite vraiment
00:40:57 les professionnels. On favorise aussi la formation,
00:40:59 elle est obligatoire. Si tu n'es pas formé,
00:41:01 tu ne peux pas travailler. Et il y a cette
00:41:03 politique du coup de congé,
00:41:05 de congé parentaux,
00:41:07 où le deuxième parent a 5 semaines
00:41:09 déjà d'emblée. Il a 5 semaines qui peuvent rester
00:41:11 et qui sont payées
00:41:13 à 100% de son salaire. Puis après,
00:41:15 il y a 55 semaines qu'on peut partager
00:41:17 avec les parents. Donc en fait,
00:41:19 en gros, moi je peux prendre
00:41:21 admettons 35 semaines,
00:41:23 puis papa peut prendre 35 semaines.
00:41:25 Non, ça fait 70. Il prend le reste.
00:41:27 Il prend le reste.
00:41:29 On peut partager en fait.
00:41:31 Donc déjà, juste les 5 semaines,
00:41:33 ça nous a changé la vie. J'ai mon troisième
00:41:35 enfant là-bas. Et après, ce qu'on
00:41:37 a fait, c'est qu'en fait, il a pris une semaine
00:41:39 pendant l'année
00:41:41 qui a suivi la naissance du
00:41:43 troisième. Il y a des ressources aussi.
00:41:45 Et puis, la petite chose aussi
00:41:47 qui est cool, c'est qu'en fait, tu peux reprendre le travail
00:41:49 mais avec une partie sans solde. Pendant les
00:41:51 deux années qui suivent ton congé, c'est-à-dire
00:41:53 tu reprends bébé, il a un an à peu près,
00:41:55 si tu as pris tout ton congé.
00:41:57 Et en fait, tu vas pouvoir
00:41:59 admettons, moi j'étais à temps
00:42:01 complet, c'est l'équivalent d'une 10 jours
00:42:03 par deux semaines,
00:42:05 35 heures par 5.
00:42:07 Je peux reprendre à temps partiel.
00:42:09 En fait, je peux reprendre, j'ai l'ouverture
00:42:11 de reprendre 6 jours, 3 jours.
00:42:13 Je dis juste, je reprends
00:42:15 un congé à temps partiel parce que je reviens de
00:42:17 maternité. C'est moi qui finance tout seul.
00:42:19 Mais je peux reprendre à la hauteur de
00:42:21 ce que je veux. Je peux reprendre une journée par semaine si je veux.
00:42:23 Deux, trois, comme je veux.
00:42:25 Et au niveau des finances,
00:42:27 parce que du coup, c'est aussi ça, c'est qu'on perd
00:42:29 quasiment pas de salaire.
00:42:31 Je crois qu'on a les trois derniers mois de
00:42:33 congé qui sont à 70%
00:42:35 du salaire, genre vraiment,
00:42:37 t'as moins que d'habitude, mais sinon t'es quand même
00:42:39 à un taux assez élevé
00:42:41 au niveau des finances.
00:42:43 Et les enfants ne vont pas à l'école avant 5 ans.
00:42:45 Donc du coup,
00:42:47 c'est ça. Donc niveau système
00:42:49 de garde aussi,
00:42:51 on doit trouver, on va dire, mais
00:42:53 ils ne vont pas à l'école en fait.
00:42:55 T'as pas d'obligation de scolariser
00:42:57 son enfant à 3 ans, ce qui te laisse
00:42:59 la possibilité si tu veux de rester avec lui
00:43:01 jusqu'à 5 années.
00:43:03 Et le petit truc aussi qui pour moi fait
00:43:05 énormément de différence, c'est qu'on pense souvent que
00:43:07 quand on part en Amérique, on dit adieu
00:43:09 à la sécurité sociale, on dit adieu
00:43:11 aux allocations familiales. Pas au Québec.
00:43:13 Du coup, ça continue les allocations,
00:43:15 enfin il y a des allocations familiales pour aider les familles.
00:43:17 Et sincèrement, j'étais choquée des montants.
00:43:19 Même quand tu gagnes
00:43:21 relativement bien ta vie, que tu passes une classe moyenne,
00:43:23 admettons, t'as quand même entre
00:43:25 800 à 1500 dollars
00:43:27 mensuels, que même si tu
00:43:29 travailles, enfin je veux dire, il n'y a pas
00:43:31 de condition en fait. Au moment que t'as des enfants
00:43:33 jusqu'à leur 18 ans, tu as
00:43:35 du coup des montants qui sont dégressifs,
00:43:37 mais t'as toujours un montant,
00:43:39 une aide en fait.
00:43:41 L'argent qui est mis sur la table, c'est celui-là,
00:43:43 parce que... - Ça fait rêver là.
00:43:45 - Ça fait rêver, on va tous
00:43:47 partir, on va tous ensemble.
00:43:53 En fait, c'est les familles qui consomment,
00:43:55 faut pas se leurrer, je veux dire, si vraiment on regarde
00:43:57 de manière transparente, une
00:43:59 famille, elle consomme. Si tu donnes de l'argent à une
00:44:01 famille, elle te fait rentrer des sous.
00:44:03 Quoi qu'il en soit, c'est pas genre
00:44:05 ils se sont dit "oh, voilà, c'est les 15%
00:44:07 de taxes, vu qu'on
00:44:09 consomme de la nourriture, des choses,
00:44:11 des choses, les 15% qu'on
00:44:13 consomme, on les redonne à l'État, donc c'est...
00:44:15 - Bon, bah tous au Québec.
00:44:19 Pour terminer,
00:44:21 parce qu'on va passer à la phase
00:44:23 d'échange, rapidement,
00:44:25 est-ce qu'il y a un
00:44:27 horizon positif à ce Baby Clash ?
00:44:29 Est-ce que vous me disiez, Mathilde, que ça peut être
00:44:31 aussi un levier de transformation personnel ?
00:44:33 C'est pas forcément
00:44:35 qu'une séparation à la clé, d'ailleurs c'est pas non plus
00:44:37 majoritaire, mais de quelle manière
00:44:39 on peut le voir comme ça ?
00:44:41 - Dans tous ces bouleversements,
00:44:43 c'est l'occasion aussi
00:44:45 de mieux se connaître soi,
00:44:47 de mieux connaître l'autre,
00:44:49 c'est une découverte de soi et de l'autre,
00:44:51 et cette découverte dans le couple,
00:44:53 et individuelle, elle peut être
00:44:55 extraordinaire.
00:44:57 Tout à l'heure aussi, Anna et Camille en parlaient,
00:44:59 en tout cas je l'ai entendu
00:45:01 un peu comme ça, de finalement les femmes
00:45:03 aussi, elles se découvrent beaucoup
00:45:05 au moment où elles deviennent mères,
00:45:07 c'est un moment un peu d'assertivement,
00:45:09 voilà, on se
00:45:11 connaît mieux, on se sent plus
00:45:13 forte, on se sent plus forte parce qu'on défend nos
00:45:15 enfants aussi, donc voilà, c'est un
00:45:17 moment aussi d'épanouissement, de prise
00:45:19 de confiance en soi,
00:45:21 et donc je pense qu'il y a aussi
00:45:23 beaucoup à découvrir sur soi, sur l'autre,
00:45:25 et puis
00:45:27 voilà, ça passe, mais
00:45:29 ça prend du temps, l'importance
00:45:31 de se donner du temps, et puis que si
00:45:33 on identifie des choses qui étaient déjà
00:45:35 dysfonctionnantes avant,
00:45:37 peut-être aussi, c'est pas toujours simple
00:45:39 d'avoir l'humilité de se dire "bon, ça, ça
00:45:41 n'allait déjà pas avant, bon, on va peut-être faire
00:45:43 quelque chose, il y a plein de
00:45:45 ressources qui existent, il y a plein de professionnels
00:45:47 aussi qui existent, il ne faut pas
00:45:49 hésiter à se faire aider, parfois, moi, il y a plein
00:45:51 de couples que j'accompagne, je vais les rencontrer
00:45:53 trois, quatre fois, et après,
00:45:55 tout rentre dans l'ordre, mais il vaut mieux trois, quatre
00:45:57 fois, qu'au bout de deux
00:45:59 ans, arriver quand le couple est
00:46:01 déjà en train de se séparer,
00:46:03 et où là,
00:46:05 les choses, c'est beaucoup plus compliqué,
00:46:07 voilà.
00:46:09 Il faut, moi, j'ai même pas
00:46:11 hésité, il faut se faire aider, en fait,
00:46:13 moi, c'est, même s'il n'y a pas de problème,
00:46:15 même s'il n'y a pas de problème, allez
00:46:17 consulter des professionnels, même, je sais qu'il y a
00:46:19 des PMI, il y a des, vous avez toujours
00:46:21 un pédiatre, un médecin, enfin, quelqu'un,
00:46:23 alors, si ce qu'on vous dit ne vous convient
00:46:25 pas, allez chercher ailleurs, mais
00:46:27 allez, n'attendez pas,
00:46:29 on n'attend pas, enfin, moi, c'est pareil, encore une fois,
00:46:31 j'ai une vision américaine,
00:46:33 désolée, mais du coup,
00:46:35 je l'ai adoptée, la prévention,
00:46:37 en fait, faites de la prévention, n'attendez pas
00:46:39 d'être malade pour aller voir le médecin, en fait,
00:46:41 n'attendez pas de clasher avec votre
00:46:43 conjoint, on peut juste consulter pour dire
00:46:45 est-ce que tout va bien dans notre couple,
00:46:47 est-ce que tout va bien,
00:46:49 c'est quelque chose que j'ai découvert aussi,
00:46:51 nous, moi, on me consulte, mais juste
00:46:53 pour savoir si tout va bien, en fait,
00:46:55 mais complètement,
00:46:57 ne pas attendre d'être malade, ouais.
00:46:59 - Il ne faut pas oublier que
00:47:01 en vrai, rien ne nous prépare
00:47:03 à ça, c'est-à-dire qu'on n'est pas formé à l'école,
00:47:05 on n'est pas, donc, on improvise,
00:47:07 en fait, au final, moi, j'ai beaucoup tendance
00:47:09 à penser que mon rôle de père, c'est
00:47:11 de faire semblant de savoir ce que je fais, mais d'improviser
00:47:13 constamment, et c'est une réalité.
00:47:15 Nous, on a consulté
00:47:17 effectivement une pédopsychiatre, il n'y avait
00:47:19 pas de sujet majeur,
00:47:21 mais rapidement,
00:47:23 pour revenir à ce que tu disais, c'est quoi
00:47:25 le, comment dire, qu'est-ce qu'on en tire,
00:47:27 ou qu'est-ce qu'il y a de positif là-dedans,
00:47:29 elle nous a très rapidement dit "la petite, ça va,
00:47:31 vous, restez un peu, on va parler, parce que..."
00:47:33 Et très souvent,
00:47:35 le sujet, c'est nous, en tant que, effectivement,
00:47:37 en tant que personne, en tant que qui on est,
00:47:39 nous, on bosse beaucoup maintenant avec ma femme sur c'est quoi
00:47:41 nos ancrages, d'où on vient en tant que
00:47:43 nos origines familiales respectives,
00:47:45 et qu'est-ce qu'on essaye de changer,
00:47:47 qu'est-ce qu'on veut changer, qu'est-ce qu'on veut pas
00:47:49 reproduire, et ce travail-là,
00:47:51 j'ai l'impression, moi, d'être un meilleur homme
00:47:53 depuis que je suis père, c'est une évidence, et elle,
00:47:55 pareil, c'est sûr et certain,
00:47:57 même. - Oui, il y a
00:47:59 quelque chose qu'on n'a pas dit, c'est qu'en effet,
00:48:01 quand on devient parent, on est réactivé
00:48:03 dans sa propre histoire de naissance,
00:48:05 on est réactivé,
00:48:07 le bébé qu'on a été, comment nous aussi
00:48:09 on a été porté,
00:48:11 accueilli au monde, dont on s'est
00:48:13 occupé de nous les premiers temps, et tout ça,
00:48:15 ça laisse des empreintes qui sont réactivées
00:48:17 au moment où on devient parent.
00:48:19 Et quand il y a eu des choses difficiles,
00:48:21 douloureuses, ces choses-là,
00:48:23 elles sont réactivées, ça remonte.
00:48:25 Et là,
00:48:27 vraiment, n'hésitez pas à aller en parler,
00:48:29 à vous faire accompagner, parce que là aussi,
00:48:31 il y a eu quelques consultations,
00:48:33 l'importance de nommer les choses, de se sentir
00:48:35 moins seul, de comprendre
00:48:37 là, ce qui se réactive malgré soi
00:48:39 et qui nous dépasse,
00:48:41 de mettre des mots sur tout ça,
00:48:43 c'est vraiment important.
00:48:45 - Si ça peut juste...
00:48:47 On a fait deux séances, nous, en deux séances,
00:48:49 j'ai l'impression d'avoir avancé de quatre ans.
00:48:51 Parce qu'elle a juste mis le mot sur deux, trois
00:48:53 choses, on a
00:48:55 chialé et on est reparti, et vraiment,
00:48:57 c'était puissant, quoi. Et personnellement,
00:48:59 j'avais jamais consulté de professionnel,
00:49:01 j'étais assez choqué par
00:49:03 les déclics qu'elle nous a mis dans la tête,
00:49:05 alors qu'il n'y avait pas de problème majeur.
00:49:07 Si c'était nous, l'attente qu'on avait en tant que parents,
00:49:09 ou la pression qu'on se mettait,
00:49:11 parce qu'on veut être parfait en ce moment,
00:49:13 et on est vraiment dans là-dedans, elle nous a aidés
00:49:15 en deux séances. C'était un magicien,
00:49:17 une magicienne, quoi.
00:49:19 - Tu vois, toi tu dis que tu n'as pas de...
00:49:21 Tu n'apprends pas à l'école, à être parent ?
00:49:23 Nous, oui. On a fait des études, justement,
00:49:25 pour ça. Donc, en fait, les outils,
00:49:27 les clés, les évaluations, oui, c'est ça.
00:49:29 Nous, on a fait cette école-là. Je ne dirais pas vous vendre
00:49:31 un crédit immobilier,
00:49:33 parce que ça, je ne pourrais pas vous aider.
00:49:35 Mais c'est vrai que, ne pas hésiter
00:49:37 à consulter, parce qu'en plus,
00:49:39 on voit fleurir sur les réseaux
00:49:41 de partout, les coachs en développement personnel.
00:49:43 Je peux vous dire que la paternité,
00:49:45 la parentalité, c'est un bel exercice
00:49:47 de développement personnel,
00:49:49 du coup, qui coûte peut-être un peu moins cher qu'un coach,
00:49:51 des fois, mais qui va vraiment vous élever.
00:49:53 En fait, moi, j'en parle dans mon livre,
00:49:55 de ce désir.
00:49:57 En tant que jeune professionnel, je me disais,
00:49:59 "Mais attends, mais personne n'aurait demandé pourquoi ils voulaient un enfant?"
00:50:01 Parce que, au final, est-ce qu'ils ont questionné
00:50:03 ce désir? Il y a tellement, en fait,
00:50:05 de désirs d'enfants qui arrivent
00:50:07 pour combler
00:50:09 des choses, pression culturelle,
00:50:11 pour réparer des choses.
00:50:13 Moi, je l'ai vu, j'ai travaillé dans la protection d'enfants,
00:50:15 où, en fait, ils veulent juste un enfant
00:50:17 pour être aimé, comme on ne les a jamais aimés.
00:50:19 Et je me suis dit, mais ce n'est pas
00:50:21 que les gamines de 15 ans qui doivent savoir ça.
00:50:23 C'est tous les parents qui doivent savoir que le désir
00:50:25 va déjà teinter, finalement,
00:50:27 votre relation avec votre enfant.
00:50:29 Et c'est hyper important, déjà, de questionner ce désir-là
00:50:31 et de se dire, "Ok, je saisis cette occasion
00:50:33 avec mon partenaire
00:50:35 de mettre carte sur table et de dire,
00:50:37 "Ok, toi, comment ton enfance,
00:50:39 elle était? Parce que, comme tu disais
00:50:41 tout à l'heure, les défis éducatifs..."
00:50:43 Et souvent, on va dire,
00:50:45 moi, on est un couple multiculturel,
00:50:47 donc souvent, on nous met dans notre cours
00:50:49 le côté, "Mais comment vous gérez?"
00:50:51 Mais en fait, couple multiculturel ou pas,
00:50:53 en fait, on est deux personnes...
00:50:55 Que tu viennes du même pays, pas du même pays,
00:50:57 on gère les mêmes problèmes, guys.
00:50:59 On gère les mêmes problèmes, on a tous les mêmes problèmes,
00:51:01 on a tous des représentations différentes.
00:51:03 Ce n'est pas un lien qu'avec les couples
00:51:05 multiculturels, non, ou qui viennent de pays
00:51:07 différents. Deux personnes françaises
00:51:09 peuvent vivre les mêmes défis qu'on vit
00:51:11 parce qu'on a une éducation qui est différente.
00:51:13 Donc c'est pour ça que je dis que ça ne concerne pas
00:51:15 que certaines personnes. Ça concerne vraiment
00:51:17 tout le monde.
00:51:19 La lumière, en fait, c'est ça.
00:51:21 On en parlait aussi, puisqu'on avait préparé
00:51:23 l'entrevue, mais
00:51:25 la fin n'est pas quelque chose non plus de mauvais.
00:51:27 Ce n'est pas parce que ça n'a...
00:51:29 Le fait d'admettre un enfant et d'avoir
00:51:31 un enfant dans sa vie et d'aboutir
00:51:33 à une séparation, admettons, ce n'est pas non plus
00:51:35 quelque chose de mauvais, en fait. On est deux
00:51:37 êtres humains, on est dans une relation, puis
00:51:39 peut-être que ça a été synonyme,
00:51:41 l'arrivée de cet enfant, de voir qu'on est dans la fin de quelque
00:51:43 chose et qu'on évolue d'une manière
00:51:45 différente et qu'on ne peut plus être couple
00:51:47 et rester parent aussi, en fait. C'est un truc
00:51:49 que je pense que c'est la prochaine prise
00:51:51 de parole qu'il faut faire dans les réseaux.
00:51:53 C'est banaliser un peu et normaliser
00:51:55 les séparations.
00:51:57 Les divorces, les séparations, ce n'est pas un échec.
00:51:59 C'est juste une relation qui évolue.
00:52:01 On a des chemins qui sont différents,
00:52:03 puis on va peut-être dans deux chemins différents,
00:52:05 mais on reste des parents, en fait.
00:52:07 On voit que cette maternité ou cette parentalité
00:52:09 nous a bouleversés au point qu'on a
00:52:11 remanié l'identité.
00:52:13 Puis ce n'est plus cette identité
00:52:15 qu'on aimait chez l'autre. C'est OK, en fait.
00:52:17 Ça, c'est un truc pareil
00:52:19 que j'ai aussi découvert, où
00:52:21 les séparations sont
00:52:23 banalisées, en fait.
00:52:25 Il y a même les formulaires à l'école qui disent
00:52:27 "formulaire papa,
00:52:29 formulaire maman".
00:52:31 C'est normal, en fait. Ce n'est pas un échec.
00:52:33 C'est ça. - Et on peut être un couple
00:52:35 parental sans être un couple conjugal.
00:52:37 Et on peut se faire accompagner pour rester
00:52:41 un chouette couple parental.
00:52:43 Ça, c'est important aussi.
00:52:45 - Très bien. Je vous remercie
00:52:47 tous les trois. C'était passionnant de vous écouter.
00:52:49 Bravo à vous.
00:52:51 [Applaudissements]
00:52:53 On va passer
00:52:55 au moment d'échange
00:52:57 s'il y a des questions dans la salle.
00:52:59 - Moi, je voulais vous demander, quand bien même
00:53:01 que ça va bien,
00:53:03 plus ou moins, etc., et qu'on veut consulter,
00:53:05 on est un peu perdus. C'est-à-dire qu'aujourd'hui,
00:53:07 sur plein de sujets, il y a
00:53:09 trop de choix. Tu le choix.
00:53:11 On ne sait presque pas vers qui se retourner.
00:53:13 Est-ce que vous, vous êtes allé voir
00:53:15 un pédopsychiatre, puisque à la base,
00:53:17 c'était pour votre puce.
00:53:19 Mais il y a les thérapeutes
00:53:21 en thérapie de couple. On saurait
00:53:23 quand ça va plus ou moins bien,
00:53:25 mais que du coup, vous nous mettez un peu le pied.
00:53:27 On se dit, pourquoi pas.
00:53:29 Vers qui se retourner, par exemple ?
00:53:33 - Alors, moi,
00:53:35 je recommande plutôt de se tourner
00:53:37 vers quelqu'un formé en périnatalité,
00:53:39 c'est-à-dire quelqu'un qui est formé
00:53:41 quand même à ses enjeux.
00:53:43 Et ça, sur Doctolib,
00:53:45 sur... Alors déjà, des professionnels
00:53:47 qui sont formés, donc
00:53:49 psychologues, psychothérapeutes qui ont des titres.
00:53:51 La plupart ont quand même des sites
00:53:53 internet, donc vous allez voir leur formation
00:53:55 sur leur site internet.
00:53:57 Je trouve que, voilà, la question
00:53:59 de la formation des professionnels est quand même
00:54:01 importante. Après,
00:54:03 un thérapeute de couple,
00:54:05 si la porte d'entrée, c'est le couple.
00:54:07 Si la question, c'est le couple.
00:54:09 Sinon, voilà, un thérapeute
00:54:11 spécialisé en périnatalité, il y en a
00:54:13 de plus en plus et puis il y en a de plus en plus qui le
00:54:15 mettent vraiment comme
00:54:17 spécificité.
00:54:19 - Ça peut être aussi ton
00:54:23 infirmière de PMI. Je parle de la PMI parce qu'il y a
00:54:25 beaucoup de...
00:54:27 de la protection maternelle infondée,
00:54:29 des centres aussi publics.
00:54:31 Normalement, ça c'est normalement,
00:54:33 on est formé, en fait, pour dépister
00:54:35 les difficultés de couple.
00:54:37 C'est-à-dire que si, pareil, la porte d'entrée,
00:54:39 moi c'est souvent le sommeil,
00:54:41 des bébés, l'allaitement, on est
00:54:43 formé, en fait, normalement pour aller plus loin.
00:54:45 C'est-à-dire que moi, ça m'arrive très régulièrement d'aller
00:54:47 plus loin que le sommeil parce que souvent
00:54:49 c'est la pointe de l'iceberg.
00:54:51 Donc, en fait, ne pas hésiter à nommer n'importe quel problème
00:54:53 et de balayer
00:54:55 tout ce qui se passe dans ta vie
00:54:57 de maman. Et normalement,
00:54:59 un professionnel diplômé est censé
00:55:01 avoir des grilles d'évaluation
00:55:03 qui... une formation qui fait que
00:55:05 "Ah, elle m'a dit ça, ça, ça, bon, peut-être que je peux
00:55:07 mettre le doigt là-dessus." Et eux peuvent vous diriger
00:55:09 vers des professionnels du coup de couple.
00:55:11 À la PMI, généralement, les sages-femmes
00:55:13 elles ont toutes, dans leur
00:55:15 ressource, dans leur bagage,
00:55:17 des adresses. Elles travaillent pas seules,
00:55:19 elles travaillent en réseau. Il y a les réseaux
00:55:21 de santé périnatales aussi qui ont des
00:55:23 listes de psychologues formés qui adhèrent
00:55:25 aux réseaux de santé périnatales.
00:55:27 Il y en a en Ile-de-France,
00:55:29 mais il y en a partout en France.
00:55:31 Donc, généralement, les professionnels,
00:55:33 même à la maternité, ils ont des adresses.
00:55:35 Ils peuvent vous orienter.
00:55:37 - Je veux juste préciser,
00:55:39 après, il y a aussi le feeling qui rentre en compte,
00:55:41 évidemment, à diplôme équivalent et à profil
00:55:43 équivalent.
00:55:45 Il y en a avec qui ça passe, il y en a avec qui ça passe pas.
00:55:47 Et il ne faut pas hésiter aussi à changer.
00:55:49 On est passé par là et
00:55:51 il y en a une avec qui ça passait pas du tout,
00:55:53 il ne faut pas forcer, il faut juste passer à autre chose
00:55:55 et puis ça s'est très bien passé par la suite.
00:55:57 - Oui, il faut toujours que ça reste
00:55:59 confortable pour soi. Si on n'est pas bien
00:56:01 assis ou si on n'aime pas la couleur du papier peint
00:56:03 du cabinet, on s'en va.
00:56:05 - D'autres questions ?
00:56:09 - Bonjour, je suis, moi, dans un travail
00:56:17 personnel depuis beaucoup, beaucoup
00:56:19 d'années, je dirais presque 15 ans, parce que
00:56:21 j'ai une enfance qui a été très, très, très compliquée.
00:56:23 J'ai vécu dépression avant.
00:56:25 Aujourd'hui, mon bébé a un an.
00:56:27 Dépression post-partum sévère.
00:56:29 Je suis suivie dans
00:56:31 un centre depuis six mois,
00:56:33 centre lobbyer à Bourg-la-Reine
00:56:35 qui est magique.
00:56:37 Je suis suivie, moi,
00:56:39 je suis suivie avec mon bébé.
00:56:41 Mon mari vient de temps en temps.
00:56:43 Comment convaincre l'autre que lui aussi,
00:56:45 il a son histoire, lui aussi, il a ses casseroles
00:56:47 et que lui, il doit faire un travail seul, pas juste
00:56:49 venir avec moi, une fois
00:56:51 par trois mois ?
00:56:53 Juste comment je le convainc ? - Alors ça, c'est souvent une question
00:56:55 parce que la majorité du temps, ce sont les femmes
00:56:57 qui franchissent la porte de mon cabinet.
00:56:59 Moi, je leur dis,
00:57:03 votre travail, c'est de le faire venir au moins une fois.
00:57:05 Après, mon travail à moi, ça sera
00:57:07 si il y a besoin de le faire revenir.
00:57:09 Mais
00:57:11 à un moment donné aussi, de dire
00:57:13 à l'autre, j'ai besoin que tu viennes pour moi.
00:57:15 Déjà, c'est légitime, c'est
00:57:19 entendable. Après, il y a des
00:57:21 couples, on peut dire à l'autre, bah, t'as peut-être
00:57:23 des petites choses, des casseroles, toi aussi,
00:57:25 des choses à régler. Parfois, c'est pas possible de dire
00:57:27 ça, parce que c'est trop pataquant
00:57:29 pour l'autre et ça, ça me
00:57:31 semble aussi important de pouvoir
00:57:33 le respecter. Mais dans ce cas-là, passer par la porte,
00:57:35 pour moi, c'est important.
00:57:37 C'est important qu'on fasse cette démarche ensemble,
00:57:39 pour notre famille, pour notre enfant.
00:57:41 S'il y a des choses qui sont douloureuses, pour moi, on va
00:57:43 en parler ensemble.
00:57:45 C'est quand même rare que les conjoints,
00:57:47 quand leur femme, leur compagne
00:57:49 leur disent, bah, moi, j'en ai
00:57:51 besoin, ils viennent pas.
00:57:53 Parfois, ils viennent avec les pieds de plomb,
00:57:55 en tirant la gueule,
00:57:57 en disant rien, mais après, ça, c'est
00:57:59 le job du professionnel,
00:58:01 d'accueillir ça,
00:58:04 et puis de permettre
00:58:06 au père
00:58:09 de comprendre,
00:58:11 et de pouvoir voir ce qu'il va
00:58:13 pouvoir en tirer, et que ça peut lui aussi
00:58:15 lui apporter des choses. Et moi, c'est quand même
00:58:17 assez régulièrement qu'une fois
00:58:19 que le père est venu,
00:58:21 à un moment donné,
00:58:23 quand l'alliance est tissée, je lui dis,
00:58:25 peut-être un petit espace pour vous, quelques consultations,
00:58:27 et là, comme ils ont compris, comme ils ont
00:58:29 fait l'expérience d'être
00:58:31 accueillis, que ça se passe bien,
00:58:33 qu'ils ont compris à quoi ça servait,
00:58:35 ça les aide ensuite à faire cette démarche pour
00:58:37 eux-mêmes. Parce que oui,
00:58:39 de manière globale, en périnatalité ou pas,
00:58:41 les femmes consultent plus que les hommes,
00:58:43 c'est une réalité statistique.
00:58:45 Donc, voilà, il faut être un peu stratégique.
00:58:47 - Merci.
00:58:49 - Je vais en parler avec Maxi, du coup,
00:58:51 la semaine prochaine. - Mais tu peux aussi être son modèle.
00:58:53 Excuse-moi. Tu peux être son modèle,
00:58:55 tu peux parler des changements que ça a amené chez toi.
00:58:57 Et lui dire, regarde, moi,
00:58:59 depuis que je vais, je sais pas, ça fait
00:59:01 six mois, ben regarde, j'arrive à lâcher
00:59:03 prise là-dessus, j'arrive à faire ça.
00:59:05 T'sais, t'es comme un peu l'image de cette thérapie
00:59:07 en fait, et souvent, ça entraîne l'autre
00:59:09 en disant, ouais, c'est vrai, regarde, elle a changé
00:59:11 là-dessus, ça lui a fait du bien là-dessus,
00:59:13 elle voit telle chose différemment, puis
00:59:15 il sent, il le vit,
00:59:17 ses changements au quotidien, et lui dire
00:59:19 que, ok, ben t'as vu, ça, ça a changé, ben c'est
00:59:21 grâce à ma thérapie en fait. Donc, tu vois,
00:59:23 être le miroir en fait de tout
00:59:25 ça et un peu l'image.
00:59:27 - Et, alors moi, sans forcément
00:59:29 que ça soit une thérapie de couple, j'invite
00:59:31 beaucoup les conjoints dans les consultations
00:59:33 individuelles. Je pense qu'il y a
00:59:35 beaucoup de thérapeutes, et notamment de thérapeutes
00:59:37 formelles, assistémiques, qui travaillent comme ça.
00:59:39 Et c'est-à-dire que ça s'agit pas de dire
00:59:41 à son partenaire, moi je leur dis, mais on invite votre
00:59:43 partenaire dans votre séance à vous.
00:59:45 C'est pas une séance de couple.
00:59:47 Voilà, il vient vraiment pour vous.
00:59:49 Pour vous, vous aider à travailler et avancer.
00:59:51 Et après, parfois, ça, ça mène
00:59:53 sur d'autres choses. - D'accord.
00:59:55 Merci beaucoup.
00:59:57 - Une question ?
01:00:03 Deux ? Trois ?
01:00:05 Adjugé vendu.
01:00:07 Merci à vous. - Merci.
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