Ça vous regarde - Quel arsenal pour lutter contre les ingérences étrangères ?

  • il y a 6 mois
Grand témoin : Charles Sapin, journaliste politique au « Point » et auteur de « Les moissons de la colère » (éditions du Cerf)

GRAND DÉBAT / Quel arsenal pour lutter contre les ingérences étrangères ?

« Le récap » par Valérie Brochard

La France est régulièrement victime de cyberattaques et de campagnes de désinformation provenant de la Russie, comme en témoigne l'infiltration récente dans la base de données de « France Travail ». Face à ces ingérences étrangères, une proposition de loi, portée par le député Renaissance Sacha Houlié, a été adoptée à l'Assemblée nationale, le mercredi 27 mars 2024. Celle-ci vise, entre autres, l'instauration « d'un dispositif législatif rendant obligatoire l'enregistrement des acteurs influant sur la vie publique française » ou encore un recours plus facile des services de renseignement « à la technique de renseignement dite de l'algorithme ». Les débats dans l'hémicycle ont été d'une haute intensité, notamment en ce qui concerne la proximité du Rassemblement national avec le régime du Kremlin, dénoncée particulièrement par le groupe Renaissance. Comment la France peut-elle se prémunir efficacement contre les tentatives de déstabilisation opérées par la Russie et la Chine ?

Invités :
- Sacha Houlié, député Renaissance de la Vienne,
- Jean-Philippe Tanguy, député RN de la Somme,
- Franck DeCloquement, expert en intelligence stratégique.

GRAND ENTRETIEN / Charles Sapin : la tentation populiste en Europe, jusqu'où ?

Marine Le Pen en France, Giorgia Meloni en Italie, Geert Wilders aux Pays-Bas... Dans « Les moissons de la colère », le journaliste politique Charles Sapin dresse un tableau de ces forces nationalistes qui prospèrent aujourd'hui partout en Europe. Il insiste sur leurs divisions au niveau européen, où elles sont représentées par deux groupes distincts : nationaux-populistes d'un côté, nationaux-conservateurs de l'autre. À moins de trois mois des élections européennes où elles pourraient connaître une progression record, ces deux extrême-droites sont-elles vraiment irréconciliables ?

Grand témoin : Charles Sapin, journaliste politique au « Point » et auteur de « Les moissons de la colère » (éditions du Cerf)

LES AFFRANCHIS

- Isabelle Lasserre, correspondante diplomatique au « Figaro »,
- Laure Daussy, journaliste à « Charlie Hebdo »,
- « Bourbon express » : Marco Paumier, journaliste LCP.

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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News
Transcript
00:00 [Musique]
00:05 Bonsoir et bienvenue, très heureuse de vous retrouver dans "Ça vous regarde" ce soir, plongée dans l'Europe nationaliste.
00:13 Avec vous Charles Sapin, bonsoir.
00:15 Bonsoir.
00:16 Et merci d'être notre grand témoin, vous êtes journaliste politique au point et vous venez de publier "Les moissons de la colère" aux éditions du CERF.
00:23 C'est une plongée passionnante au sein des différentes mouvances populistes, aux portes du pouvoir ou au pouvoir, au sein de l'Union Européenne, Suède, Finlande, Italie, Pays-Bas.
00:33 Quels sont les ressorts de leurs succès électoraux, ce qui les rapproche, ce qui les sépare.
00:37 C'est un livre qui tombe évidemment à pic à trois mois du scrutin européen, on va en parler longuement.
00:42 Dans la deuxième partie, notre grand débat ce soir, quelles armes pour lutter contre les ingérences étrangères.
00:49 Depuis plusieurs mois, notre pays est harcelé par les cyberattaques de la Russie, désinformation, piratage informatique, déstabilisation, une guerre hybride à laquelle se sont attaqués les députés.
01:01 Une proposition doit visant à les prévenir, ces ingérences étrangères a été adoptée.
01:06 En fin de journée, nous en débattons dans un instant avec mes invités.
01:10 Enfin, nos affranchis ce soir, l'international Isabelle Lasserre, la société L'Ordossi et Bourbon Express bien sûr, Marco Pogné.
01:18 Voilà pour le menu, on y va Charles Tapin ? On y va.
01:21 Ça vous regarde, j'ai d'accord.
01:22 La menace est là, bien réelle et elle s'est même largement intensifiée à l'approche du scrutin européen.
01:39 Alors a-t-on fait preuve de naïveté ou même de déni face aux entreprises de déstabilisation dont la France est l'objet ?
01:46 Ingérence étrangère, c'est de ça dont il s'agit, mais de quoi parle-t-on précisément ?
01:51 Qui sont nos ennemis ? Que veulent-ils ? Et comment nous prémunir sans sortir de l'état de droit ?
01:57 Bonsoir Sacha Houllier.
01:58 Bonsoir.
01:59 Merci beaucoup d'être avec nous, vous êtes député Renaissance de la Vienne, vous présidez la commission des lois à l'Assemblée.
02:03 Vous êtes l'ancien président de la délégation parlementaire au renseignement qui a largement, on y reviendra, inspiré cette proposition de loi dont vous êtes l'auteur visant à prévenir les ingérences étrangères en France et qui a donc été adoptée tout à l'heure dans l'hémicycle.
02:19 Bonsoir Jean-Philippe Tanguy.
02:21 Ravi de vous accueillir, vous êtes député Rassemblement national de la Somme.
02:24 Vous avez voté pour ce texte, mais avec des réserves, on va en parler.
02:28 Enfin, bonsoir Franck de Cloquement. Bienvenue, vous êtes expert en intelligence stratégique et vous enseignez à l'IHEDN, l'Institut des hautes études sur la défense nationale.
02:38 Charles Sapin, n'hésitez pas à intervenir parce que c'est vrai que la Russie ne fait pas mystère de vouloir soutenir par tous les moyens les partis antisystèmes de l'ensemble de la planète, si j'ose dire.
02:49 Donc voilà, n'hésitez pas parce que votre livre permet de faire des passerelles avec notre débat.
02:55 Alors de quelle menace parle-t-on précisément et que prévoit le projet de loi ?
02:59 C'est dans le récap pour démarrer le débat avec Valérie Brochard.
03:02 Bonsoir ma chère Valérie.
03:13 Bonsoir Myriam.
03:14 Alors, ingérence et ingérence étrangère. Ingérence russe, c'est ce qu'il faut comprendre ?
03:19 Alors, peut-être, peut-être, en tout cas, je vais vous montrer déjà ces premières captures d'écran, vous allez tout comprendre.
03:25 Regardez bien, voici le logo du Parisien, la même typographie et ce titre "Exode massif, les Ukrainiens tentent d'échapper à une mort imminente".
03:34 Sauf que le Parisien n'a jamais diffusé cet article.
03:38 Regardez encore un deuxième exemple, "Joe Biden est un terroriste", des nouvelles preuves.
03:44 Alors cette fois, on a barré le titre qui est totalement faux.
03:47 Et regardez bien, tout là-haut, en haut, à gauche, ce n'est pas l'adresse du site internet du Parisien.
03:52 C'est un site pirate qui diffuse de fausses informations pro-russes.
03:57 Le problème, c'est que ces faux articles, ils ont été multidiffusés sur les réseaux sociaux,
04:01 même par des personnalités politiques qui, de bonne foi, ont voulu partager ces informations sans voir la supercherie.
04:08 Et des sites pirates comme ceux-là, il en existe une cinquantaine qui copient nos médias traditionnels,
04:13 comme le Parisien, 20 minutes ou encore Le Monde.
04:16 Fausses informations, espionnage industriel et politique, mais aussi blocage de sites gouvernementaux.
04:21 Rappelez-vous, en mars, des ministères ont été attaqués et des services comme France Travail ont été totalement bloqués.
04:28 Des agressions numériques dénoncées par le président de la République dans sa dernière interview télévisée.
04:33 Vous nous attaquez, vous manipulez nos données, j'en ai été victime dans ma première campagne.
04:38 On a déjà, dans plusieurs de nos hôpitaux, subi des jours et des jours de dysfonctionnement à cause de cette agressivité russe.
04:44 Vous savez, c'est intéressant parce que le débat public est imprégné par les fausses informations russes.
04:50 Alors, pour contrer ces nouvelles formes d'intrusion, les députés ont voté cet après-midi, il y a quelques heures,
04:56 à 171 voix pour une proposition de loi visant à lutter contre les ingérences étrangères que le rapporteur du texte, ici présent, a défini comme ceci.
05:05 Nous savons que ces ingérences étrangères sont une stratégie de conquête des puissances autoritaires qui choisissent délibérément de s'en prendre aux démocraties libérales.
05:15 Alors, dans ce texte, on trouve en effet des propositions issues du dernier rapport de la délégation parlementaire aux renseignements.
05:22 Il prévoit donc d'étendre la procédure de gel d'avoir aux ressortissants étrangers accusés d'ingérence en France.
05:28 Il prévoit aussi de créer un registre des représentants d'intérêts agissant pour le compte d'un mandant étranger.
05:35 On parle ici des lobbyistes, des communicants, des collecteurs de fonds rémunérés par un Etat étranger.
05:40 Bon, jusqu'ici, tout le monde est d'accord, tout le monde trouve que c'est super.
05:43 Mais le texte propose aussi d'expérimenter pendant quatre ans l'extension du périmètre des algorithmes de la loi renseignement
05:50 pour identifier justement des agents étrangers.
05:53 Alors l'idée, ce serait d'utiliser ces méga boîtes noires qui enregistrent nos appels téléphoniques
05:58 et dans le détail qui appelle qui, quel jour, depuis quelle antenne relaie.
06:03 Et puis ces boîtes noires, elles permettent aussi de géolocaliser des moyens de paiement
06:07 ou capter les échanges de messagerie électronique.
06:09 Et là, ça va beaucoup trop loin pour la France insoumise.
06:12 Mais au final, c'est un texte scélérat parce que sous couvert de lutte contre les ingérences étrangères,
06:18 ils visent à aggraver la surveillance généralisée et la destruction méthodique des libertés publiques et individuelles.
06:25 Et donc la France insoumise a voté contre.
06:28 Et de l'autre côté de l'hémicycle, on a pu entendre aussi le Rassemblement national critiquer cette fois ce texte
06:34 parce qu'il n'irait pas assez loin.
06:36 Vous ne proposez rien évidemment et pour cause contre la corruption, rien contre les conflits d'intérêts.
06:41 Vous avez censuré nos amendements pour un péché par exemple.
06:43 Que votre ami Nicolas Sarkozy, qui reçoit de l'argent du Qatar et de la Russie, soit mis devant ses responsabilités
06:49 comme vos amis Jean-Pierre Afarin, Bountane ou tant d'autres macronistes corrompus, défroqués ou militants.
06:54 Et pourtant, le Rassemblement national a voté pour.
06:57 Même s'il lui semble trop faible, l'extrême droite grossit volontairement le trait
07:01 parce qu'elle sait que cette proposition de loi ravive les accusations de la rapporteure de la commission d'enquête sur les ingérences étrangères.
07:07 Constance Legrip pointait à l'époque la relation privilégiée entre le Rassemblement national et le Kremlin.
07:13 Aujourd'hui donc, le texte est adopté par l'Assemblée nationale.
07:16 Il va maintenant se diriger en procédure accélérée pour une seule lecture au Sénat qui aura lieu en mai.
07:21 Merci beaucoup Valérie Brochard, c'était très clair.
07:23 Alors je vais commencer avec le rapporteur que vous êtes, Sacha Oulier.
07:26 C'est vrai que c'est un texte qui s'attaque aux renseignements.
07:29 S'il y a bien un domaine réservé au pouvoir exécutif, précaré, c'est bien celui-là.
07:34 Comment vous avez travaillé ? Est-ce que vous avez travaillé main dans la main avec le ministère de la Défense,
07:39 le ministère de l'Intérieur ou c'est une proposition parlementaire 100% ?
07:43 Je pense que c'est trop grave pour laisser tous ces sujets au seul exécutif
07:47 et que vous avez bien vu l'actualité et le fait que toutes ces menaces, toutes ces ingérences,
07:52 elles sont le quotidien des Français parce qu'il y a des cyberattaques,
07:55 parce qu'il y a de la désinformation, parce qu'il y a la manipulation de l'information
07:58 qui au final a des conséquences assez directes sur la démocratie et sur la façon dont les citoyens se forgent une opinion.
08:03 Et donc le rapport de la délégation parlementaire aux renseignements, ça a été la première base.
08:08 Il y a un an, durant lequel on auditionne tout le monde, les services,
08:11 via un instance qui s'appelle la délégation parlementaire aux renseignements,
08:15 quatre députés, quatre sénateurs, huit parlementaires,
08:18 qui ont disposé d'une masse d'informations colossales pour dire qu'est-ce que l'on peut faire.
08:22 Tout classifié, hein, secret défense, plutôt que la plupart.
08:24 Tout classifié. Alors le rapport est public sur Internet,
08:27 mais toute une partie des informations ne sont pas publiées, d'où la classification que vous dites.
08:31 Et à partir de là, c'est le premier exemple d'une proposition de loi sur le renseignement,
08:36 c'est-à-dire d'une initiative du Parlement sur le domaine de renseignement.
08:40 Oui, c'est la première fois que le Parlement se saisit de lui-même.
08:41 Je pense que c'est une forme de maturité du Parlement,
08:43 et je pense que c'est aussi une forme de prise en compte de ce que connaissent aujourd'hui les Français.
08:49 Alors on vous entendait définir les ingérences, mais il y a le texte,
08:52 parce qu'il faut bien mettre une définition dans un texte de loi qui s'y attaque.
08:55 Intervention délibérée, personne physique ou morale, donc entreprise ou personne physique,
09:00 agissant pour le compte d'une puissance étrangère.
09:02 Non, ou sous la direction.
09:04 Ou sous la direction. Expliquez-nous.
09:06 Intérêts fondamentaux de l'État mis en cause ? Système d'information ?
09:10 En fait, vous avez plusieurs définitions.
09:12 Un, vous avez le lien avec une personne morale étrangère, qui est la puissance étrangère.
09:17 Deux, vous avez les modes d'action qui sont définis.
09:19 Est-ce que vous levez des fonds ? Est-ce que vous avez une action d'influence sur la décision publique ?
09:23 Est-ce que vous cherchez à approcher, en tout cas avoir une action, y compris dans le débat public,
09:27 et non pas seulement sur la décision, ce qui distingue du lobbying.
09:30 Et puis enfin, avec toute une série de critères qui doivent être cumulatifs
09:34 pour déclencher la décision et qui expliquent comment vont s'appliquer les dispositions.
09:38 Il y a trois degrés dans la proposition.
09:40 Un, un débat au Parlement parce que, par le Parlement, il vaut mieux informer les Français sur quelles sont les menaces.
09:45 Deux, la restriction des influences.
09:47 L'influence, ce n'est pas l'ingérence. L'influence, c'est légal.
09:50 On peut agir pour le compte d'un État étranger légalement.
09:52 Par contre, il faut que ce soit dit, connu.
09:54 Si ce n'est pas dit et si ce n'est pas connu, dans ces cas-là, des sanctions pénales peuvent s'appliquer.
09:58 C'est le fameux répertoire dont parlait Valérie Brochard.
10:00 Donc ces sanctions pénales peuvent aller jusqu'à l'expulsion en peine complémentaire des personnes étrangères
10:04 qui agiraient pour le compte d'un État étranger en France.
10:06 Et enfin, le cœur de la proposition, là sur les ingérences, le gel des avoirs ou l'application d'un algorithme.
10:12 Alors on va et vient, parce que ça, ça pose des questions.
10:15 Jean-Philippe Tanguy, proposition de loi qui intervient évidemment dans un contexte particulier.
10:18 On est en pleine campagne européenne et le camp macroniste, il attaque dur.
10:22 Il suffit d'écouter chaque meeting de la tête de liste ou de Gabriel Attal, proximité avec la Russie de Poutine.
10:28 Et malgré ça, vous votez pour.
10:30 C'est absolument pas surprenant.
10:32 Vous votez pour. Pourquoi ?
10:34 Tout simplement parce que Marine Le Pen a toujours dit qu'on était contre la politique du pire.
10:38 Donc cette loi nous semble insuffisante.
10:40 Je dirais pourquoi, mais elle va dans le bon sens.
10:42 Qu'il y ait un registre pour s'inscrire comme les lobbyistes, ça ne mange pas de pain.
10:46 Pourquoi pas les personnes les plus correctes, celles qui ne veulent pas atteindre les fondamentaux de nos sociétés,
10:52 sans doute respecteront cette loi.
10:54 Et tant mieux qu'on étende l'algorithme pour identifier les menaces, tant mieux également.
10:58 On n'a rien à cacher.
10:59 Donc contrairement à la France insoumise qui visiblement redoute cette extension,
11:02 nous, au contraire, plus la clarté est établie, plus on pourra se défendre des infamies qui sont proférées contre nous.
11:08 C'est vrai que j'ai repensé à un épisode de la campagne de 2017.
11:12 Pas celle-là, mais en 2017, peut-être qu'on n'était pas encore suffisamment armés face aux fake news, à la désinformation.
11:19 Il y avait eu une fausse rumeur sur le compte soi-disant offshore, vous vous souvenez, c'était au Bahamas.
11:26 Et pendant la campagne présidentielle, alors que c'était un fake news relayé par les pro-russes,
11:33 Marine Le Pen s'en était emparée.
11:35 C'était une erreur ? C'est quoi ? C'est une prise au piège ?
11:38 - Elle n'est pas emparée, il y avait une mention, disons, d'une phrase.
11:40 - Je pose la question parce que c'est vrai qu'on est dans le sujet.
11:42 - On a auditionné les autorités à l'époque, avec Consens le Grip, en charge de la vigilance, de la protection de notre démocratie.
11:49 Suite à cette affaire, il y a une instance qui a été créée, une organisation plutôt, qui s'appelle Viginum,
11:54 qui a surveillé l'élection de 2022, que ce soit pour 2017 ou 2022.
11:58 Et c'est tant mieux d'ailleurs. Moi, je ne comprends pas qu'on ne s'en félicite pas.
12:01 Il a été établi que les fausses informations qui, effectivement, existent,
12:04 de la part d'un certain nombre de puissances étrangères, et en particulier de la Russie,
12:07 pour ce qui est des élections, n'ont pas d'effet en France.
12:09 Elles n'ont pas d'effet, le Conseil Constitutionnel a indiqué qu'il n'avait pas eu d'effet sur l'élection.
12:13 - Là, vous parlez du Macron-Lix. - Mais pas des raisons simples.
12:15 - Le 2017, les fuites de la boîte mail de campagne.
12:18 - Ça n'avait pas eu d'effet, tant mieux pour des raisons simples.
12:20 Je vais vous donner la seconde raison. - Je vous écoute.
12:22 - Nous sommes une démocratie solide. Vous avez des organes de presse, en France, qui font leur travail.
12:26 C'est pas le cas aux Etats-Unis, où vous avez des médias très importants,
12:29 qui ont une influence très importante, qui racontent n'importe quoi,
12:32 qui relaient des fake news, la campagne sur la nationalité d'Obama,
12:36 les fraudes aux dernières élections, c'est à la télé, à des heures de grande écoute.
12:42 En France, ça n'existe pas. Vous avez les journalistes qui font leur travail,
12:45 on a des groupes de presse qui sont indépendants, on a un service public.
12:48 - Donc vous n'êtes pas inquiet sur les scrutins qui viennent ?
12:51 Parce qu'on est dans l'année de tous les dangers, il y a deux scrutins majeurs,
12:54 l'Europe, en juin, et les Etats-Unis, en novembre.
12:56 - Il faut toujours être inquiet, il faut toujours être vigilant.
12:58 Mais entre la vigilance et la paranoïa, il y a le bon déroulement de notre démocratie.
13:03 Les Français sont intelligents, ils sont éduqués.
13:06 Quand ils voient ce que vous avez présenté avec une photo absurde,
13:08 une espèce de loup qui hurle sur le drapeau américain,
13:10 toute personne qui a reçu éducation à la française...
13:13 - Vous croyez qu'on est suffisamment armés pour faire le tri ?
13:17 - Les démocraties fonctionnent, parce que vous avez des organisations démocratiques
13:23 qui fonctionnent, et que vous avez un peuple qui permet à ces organisations de fonctionner.
13:27 Ça fonctionne ensemble, et on devrait s'en féliciter.
13:30 Il y a des graves problèmes d'ingérence, cyberattaques de la Russie, cyber-ensonnage,
13:34 des attaques contre nos hôpitaux, contre un certain nombre d'institutions,
13:37 contre notre recherche, contre nos intérêts économiques.
13:40 Et ça, là, il y a beaucoup de choses à faire.
13:42 Le gouvernement est dans le bon sens.
13:43 Moi, je ne suis pas pour la pédiatrie, et ils ont mis un peu de temps à réagir.
13:46 Mais il se passe des choses, des moyens sont mis.
13:48 Mais pourquoi vouloir faire croire aux Français que les élections sont menacées
13:51 alors que ça se passe bien dans notre pays, et tant mieux ?
13:54 - Là, vous ne serez pas d'accord sur la menace qui pèse sur les scrutins.
13:58 Je vous donne la parole dans un tout petit instant,
14:00 mais pour bien se figurer l'ampleur de la menace,
14:03 revue de détails en images avec Stéphanie Despierre.
14:06 Et on détaille tout ça ensemble juste après.
14:08 Quelques jours après l'attaque du 7 octobre en Israël,
14:15 apparaissent deux mystérieuses étoiles de David bleu,
14:18 taguées sur les murs de Paris.
14:20 L'enquête révèle que c'est en fait une opération commanditée en direct par le FSB,
14:25 les services de sécurité russe, pour attiser la haine anti-juive dans notre société.
14:30 Un mois auparavant, les réseaux sociaux comme les médias
14:34 s'emballent sur une invasion de punaises de lit avec des titres anxiogènes.
14:38 Là encore, la Russie saute sur l'occasion
14:41 et une multitude de comptes d'origine russe amplifient la psychose.
14:45 Les campagnes de désinformation pour manipuler l'opinion
14:48 sont la signature de l'ingérence russe en France.
14:51 Il y a aussi le piratage comme celui des sites et messageries
14:54 de l'équipe de campagne d'Emmanuel Macron pendant la présidentielle de 2017.
14:58 Ou encore les cyberattaques contre Ranson
15:01 comme celle de l'hôpital de Corbeil-Esson en 2022,
15:04 orchestré par des hackers russes.
15:06 La Russie, comme la Chine et la Turquie,
15:09 sont les trois puissances les plus agressives vis-à-vis de la France,
15:12 selon un rapport parlementaire.
15:14 Pékin vise des secteurs précis, la défense, l'industrie ou encore la recherche.
15:20 Selon nos services, la Chine tente d'infiltrer les universités françaises.
15:25 Et elle se concentre sur un espionnage plus classique
15:28 qui s'appuie sur l'importante diaspora chinoise en France.
15:31 Tout ressortissant chinois est un potentiel espion.
15:35 La Turquie, elle aussi, mise sur sa diaspora
15:38 et sur sa présence dans les institutions musulmanes de l'Hexagone.
15:42 Des tentatives d'antrisme politique aux législatives de 2022 en Alsace
15:46 ont même été détectées.
15:49 - Franck de Kloegman, vous connaissez bien l'intelligence économique,
15:53 l'intelligence stratégique, ça a toujours existé.
15:55 Mais avec les nouvelles technologies, est-ce qu'on est en mesure d'y faire face ?
15:59 Est-ce qu'on n'est pas face à une vague que les démocraties ne peuvent pas maîtriser ?
16:05 - Les technologies amènent une amplification,
16:07 si vous préférez, de choses qui datent depuis la nuit des temps.
16:10 Les problématiques d'ingérence, les problématiques de tromperie,
16:13 d'action sur les perceptions, c'est des choses connues depuis longtemps.
16:16 Mais effectivement, vous avez, grâce à ces nouveaux outils,
16:18 si vous préférez, la capacité d'augmenter encore le prisme,
16:21 l'action, le volume, la surface d'attaque,
16:23 grosso modo, sur ce que j'appellerais ces ingérences étrangères.
16:27 Alors, elles ne sont pas uniquement du haut russe au chinois, etc.
16:30 Là, il faut voir les choses à 380 degrés.
16:33 Dans cette affaire-là, on ne vise que des choses à 180 degrés,
16:37 essentiellement pour les adversaires que nous avons actuellement
16:39 et qui sont les plus agressifs,
16:41 parce que pour l'instant, les déstabilisations viennent d'eux,
16:43 par proxy, directement, de manière à ce que leurs actions secrètes
16:48 ne soient pas imputées ou définies comme venant d'eux.
16:51 - Pour se figurer des choses, car on parle beaucoup de la Russie,
16:54 parce qu'il faut bien reconnaître qu'on retrouve la Russie
16:56 derrière beaucoup de déstabilisations.
16:58 Quels sont les moyens que met Poutine là-dedans,
17:01 dans ces usines à trolls, dans ces hackers, dans ces médias ?
17:06 Quelle est la part de cette guerre hybride
17:10 dans les politiques publiques du Kremlin ?
17:13 - Ce sont des moyens conjoints, si vous préférez.
17:15 L'objectif, c'est de générer une forme de pression globale.
17:17 Donc, vous utilisez plusieurs vecteurs,
17:19 vous utilisez tout un système, toute une atmosphère,
17:21 pour ensuite tenter, bien évidemment,
17:24 de fracturer les démocraties d'en face,
17:26 de fracturer les partis politiques, de fracturer l'opinion publique,
17:29 d'essayer de couper les gens, d'une certaine manière, des décideurs,
17:33 en usant de fake news, évidemment,
17:36 en usant d'attaques, ad dominem,
17:38 ou en visant de fausses nouvelles.
17:40 Donc, c'est à produire des fausses nouvelles, si vous préférez,
17:42 à tromper par le biais de fausses nouvelles.
17:44 - Vous pensez qu'on est armé suffisamment ?
17:46 Est-ce que les Français ont pris conscience de ce qui se passait ?
17:49 Ou au contraire, ce genre de texte,
17:51 c'est aussi un moyen d'une prise de conscience collective ?
17:53 - Alors, il y a un sondage qui est sorti récemment,
17:55 pour expliquer est-ce que les gens étaient effectivement
17:57 très conscients de ces fake news ?
17:59 En fait, non.
18:01 On pense que oui, on pense qu'on les tousse,
18:03 vous savez, on les tousse, pas moi, évidemment.
18:05 En réalité, si, tout le monde est poreux à cette affaire.
18:08 Preuve édente, c'est que certains députés ont relié des choses à l'époque,
18:11 se sont laissés avoir, parce que parfois c'est très fin.
18:13 Des fois c'est très grossier, parfois c'est très fin.
18:15 - Exemple ?
18:16 - Grosso modo, vous avez des actions sur les perceptions
18:18 qui sont menées sur des décisions liées à des opérations en Ukraine,
18:24 ou des contre-attaques qui réussissent, qui ne réussissent pas, etc.
18:27 Bon, vous pouvez effectivement altérer cette compréhension,
18:30 par le fait de répliquer les médias un peu à l'identique
18:32 de ce que vous avez montré précédemment,
18:34 qui ressemblent, si vous préférez, au niveau de la mise en page,
18:36 qui sont grosso modo assez en lien sur le plan visuel,
18:40 et qui peuvent prêter à confusion.
18:42 Dès lors, dès que le sujet, finalement le contenu, est republié, partagé,
18:47 il se peut qu'effectivement des erreurs soient glissées à l'intérieur,
18:50 et particulièrement des erreurs d'interprétation.
18:52 L'objectif, c'est de faire passer la sémantique de l'agresseur,
18:54 en tout cas dans le cas présent, d'Aïrus et de leur proxy,
18:56 puisqu'il n'y a pas que l'Aïrus.
18:58 - Oui, donc on sent bien qu'il y a énormément de niveaux
19:01 pour essayer de convaincre par tous les moyens.
19:05 Alors, on y va sur les solutions.
19:07 Le répertoire, je crois que vous êtes tous d'accord,
19:09 l'influence, il faut...
19:11 Même les réunions politiques d'un think-tank étranger...
19:16 - Le répertoire, il faut le comprendre comme s'appliquant
19:18 à toutes les puissances étrangères, c'est-à-dire qu'y compris
19:20 dans le rapport de la Délégation parlementaire au renseignement,
19:22 on vise les trois puissances que vous avez décrites,
19:24 mais les alliés de la France ne sont pas nos amis,
19:27 on l'écrit comme tel, et donc des puissances étrangères
19:30 qui seraient les États-Unis, le Qatar, qui ont été cités
19:32 lors du débat, l'Arabie saoudite notamment,
19:34 toutes celles-ci qui concourent parfois avec la France
19:36 à des politiques publiques au sein d'organisations internationales,
19:39 sont concernées, si on a un think-tank qui est financé
19:41 par les États-Unis, sont concernées par le registre...
19:43 - Vous avez retiré les pays européens.
19:45 - On a retiré les pays européens, parce qu'on pense que,
19:47 d'abord, il y a des questions d'application du marché
19:49 via le traité de fonctionnement de l'Union européenne
19:51 qui aurait posé quelques soucis de compatibilité
19:54 aux droits européens, et ensuite, parce qu'on pense
19:56 qu'on a plus de proximité avec des pays de l'Union européenne
19:58 qui ne justifient pas cette surveillance.
20:00 En revanche, pour tous les autres pays
20:02 qui ne sont pas ceux de la zone de l'Union européenne,
20:04 ils sont concernés. A fortiori, les Britanniques le sont,
20:06 puisqu'ils ne sont plus dans la zone de l'Union européenne.
20:08 - Charles Sapin, vous vous êtes retrouvé
20:10 dans des grandes réunions où vous avez suivi
20:14 deux partis politiques à l'initiative des pro-Trump...
20:18 - Oui, tout à fait.
20:20 - ...qui, eux aussi, essayent d'influencer,
20:22 puisque là, il s'agit d'influence des élus de l'Europe entière.
20:26 - C'est ce que... Pour rebondir,
20:28 il peut y avoir une différence assez fine,
20:30 c'est ce que vous soulignez très bien,
20:32 entre l'influence et l'ingérence.
20:34 L'idée, si je comprends bien, de ce répertoire.
20:36 C'est vrai que lors de mes déplacements
20:38 au sein de l'Union européenne,
20:40 vous avez différents routs où les nationalistes européens
20:42 se retrouvent, et j'en ai un en tête
20:44 qui a eu lieu à Budapest au printemps dernier,
20:46 qui s'appelait le CIPAC.
20:48 C'est des conférences organisées par le Parti républicain
20:50 depuis les années 70 et qui s'exportent en Europe
20:53 depuis deux ans, organisées dans la capitale hongroise
20:57 au pays de Viktor Orbán.
20:59 Vous aviez tous les nationalistes européens.
21:01 C'était intéressant de voir que cet événement,
21:03 où nombre de responsables politiques
21:05 venaient participer, était financé, organisé
21:09 par des Américains qui mettaient en contact
21:12 ces forces nationalistes avec différents prestataires,
21:14 que ce soit sur une politique digitale,
21:17 notamment, qui fait de la communication numérique,
21:20 qui est de mettre en contact.
21:22 Et si vous voulez, c'est...
21:24 D'ailleurs, je m'en souviens, il y avait des élus
21:26 du Rassemblement national qui tiquaient un petit peu,
21:28 parce qu'avant d'entrer dans ce rout,
21:30 il y avait un énorme drapeau de l'OTAN,
21:32 et il se trouve que le Rassemblement national
21:34 est assez fébrile sur l'OTAN, ce qui n'est pas
21:36 le cas de toutes les forces nationalistes en Europe.
21:38 Et c'est vrai qu'il peut y avoir une différence
21:40 très ténue, et c'est toute la difficulté
21:42 de ces textes, entre ingérance, influence.
21:44 - Jean-Philippe Tanguy, chacun a son agenda.
21:46 D'ailleurs, on voit bien que ce soit
21:48 Poutine ou que ce soit Trump, il y a une volonté
21:50 idéologique, mais avec des moyens derrière,
21:52 de créer des grandes alliances
21:54 au sein de l'Europe.
21:56 Vous vous dites, ça ne va pas assez loin,
21:58 ce texte, vous vouliez quoi ?
22:00 Un délit d'ingérence étrangère ? - Oui, on a proposé
22:02 de créer un délit d'ingérence étrangère, parce que
22:04 ce texte prévoit, en fait, si j'ai bien compris,
22:06 monsieur Houllier,
22:08 de coincer les ingérences pour ceux qui ne s'enregistreraient pas
22:10 sur le registre, et donc, pas négativement,
22:12 il serait...
22:14 Ça pouvrait être une ingérence, sauf que,
22:16 bon, le délit, ce serait de ne pas
22:18 aller sur le registre, il ne serait pas jugé
22:20 pour le méfait d'ingérence en lui-même.
22:22 Donc moi, je ne comprends pas, parce que vous l'avez défini
22:24 dans votre article 4, vous définissez d'ailleurs très bien,
22:26 j'ai repris la définition mot pour mot,
22:28 l'ingérence pour geler les avoirs, les actifs,
22:30 dans le code monétaire et financier.
22:32 Vous ne voulez pas créer un délit d'ingérence général
22:34 qui s'ajouterait au fait de ne pas
22:36 s'enregistrer sur le registre. - Donc vous n'êtes pas
22:38 sur le registre, donc vous n'obéissez pas à la loi.
22:40 - Voilà, mais ça ne suffit pas. - Offre, délit,
22:42 infraction, sanction. - Je sais pourquoi. Dans plusieurs auditions
22:44 qui ont été menées avec la commission d'enquête, aujourd'hui,
22:46 vous pouvez, il y a dans le code pénal
22:48 des dispositions pour intelligence avec l'ennemi,
22:50 pour espionnage, pour sabotage... - Ça ne suffit pas, d'ailleurs ?
22:52 - Non, qui ont été prévues pour des moments
22:54 de guerre et vraiment des actes extrêmement
22:56 hostiles, voire violents.
22:58 Et un certain nombre de personnalités nous ont dit
23:00 que l'autorité judiciaire ou les services
23:02 de police ne pouvaient pas, en fait, poursuivre
23:04 à certaines personnes parce que
23:06 le code pénal ne prévoyait pas
23:08 de définir cette zone grise entre l'influence
23:10 qui est légale, l'intelligence avec l'ennemi
23:12 qui est de la haute trahison, il y a une zone grise.
23:14 Et nous, on voulait prévoir un délit d'ingérence
23:16 pour sortir de cette zone grise. - Alors, réponse ?
23:18 - Je ne comprends pas pourquoi on n'a pas fait un délit d'ingérence
23:20 général pour tous les méfaits possibles et pas
23:22 seulement pour geler les avoirs. - Sacha Ouilly ?
23:24 - Parce qu'on a deux désaccords. Moi, ce que j'ai voulu faire, c'est une boîte à outils et pas un
23:26 enrichissement de nouvelles pages du code pénal
23:28 parce que j'estime, contrairement à ce que dit M. Tanguy,
23:30 que les infractions pénales existantes sont suffisantes.
23:32 C'est pour ça que les mesures qui concernent
23:34 l'ingérence, soit l'application de l'algorithme,
23:36 soit le gel des avoirs, ce sont des mesures de police
23:38 administrative, qui sont directement à la main
23:40 de l'administration pour avoir une action
23:42 immédiatement coercitive
23:44 à la main de l'administration et des services de renseignement
23:46 contre les ingérences. En revanche, sur le
23:48 registre, on parle de l'influence. On parle de personnes
23:50 qui pourraient avoir des actions qui sont tout à fait
23:52 légales, mais qui agissent pour le
23:54 compte d'une puissance étrangère. Donc, soit les Français doivent
23:56 le savoir, elle s'inscrit dans le registre,
23:58 soit le fait de ne pas le dire, là, pour le coup,
24:00 c'est constitutif d'une infraction
24:02 et on peut être dans l'influence... - Mais il faut être poursuivi.
24:04 C'est-à-dire qu'il faudrait quand même une action
24:06 à la faveur de laquelle la personne
24:08 serait mise en cause. C'est pas automatique.
24:10 - Un seul signalement au procureur, il suffit à déclencher
24:12 une enquête. Ce signalement pourrait d'ailleurs être fait par
24:14 l'HATVP qui a constaté des activités... - La Haute Autorité
24:16 pour la transparence de la vie publique.
24:18 - La Haute Autorité de transparence de la vie publique
24:20 pourrait très bien signaler la moindre action qu'elle estime devant relever
24:22 du répertoire et n'y figurant pas.
24:24 Et donc, on couvre la zone grise où on n'est pas dans l'ingérence.
24:26 On peut être dans le légal ou le paralégal.
24:28 Et là, on va essayer d'attraper toutes ces personnes-là
24:30 qui constitueraient un délit
24:32 par le seul fait de ne pas s'inscrire.
24:34 Et ce délit, là où c'est important,
24:36 c'est que la peine pénale que nous prévoyons pour ne pas
24:38 être inscrit au registre, elle prévoit non seulement
24:40 3 ans de prison,
24:42 45 000 euros d'amende, mais le déclenchement
24:44 d'un loi immigration si vous êtes une personne étrangère,
24:46 c'est-à-dire la mesure d'éloignement ou d'expulsion.
24:48 - Est-ce que ça va dissuader
24:50 les Etats, les puissances
24:52 qui veulent clairement déstabiliser
24:54 nos démocraties ?
24:56 - Si c'est une action rapide,
24:58 le temps que vous les retrouvez dans votre registre,
25:00 ils auront déjà commis leur méfait.
25:02 - Si c'est une action rapide d'ingérence,
25:04 alors les mesures de police administrative immédiate
25:06 y seront applicables, contrairement à une mesure pénale
25:08 qui, elle, et vous avez raison de le dire...
25:10 - On est à l'Assemblée, on sait bien qu'il y a beaucoup de lobbies.
25:12 Il y a beaucoup de groupes d'intérêt.
25:14 Quand il s'agit de puissances étrangères, est-ce qu'on peut être efficace ?
25:16 - Je suis tout à fait d'accord, parce que ce que vous avez fait,
25:18 c'est une reprise de la loi FARA américaine qui date de 1938.
25:20 Bon, la loi FARA, ça fait 80 ans qu'ils ont fait ça avant nous.
25:22 Et eux, si vous préférez, grâce à cette loi,
25:24 utilisent toutes les, comment dirais-je,
25:26 les centrales du renseignement
25:28 de contre-intelligence, de contre-ingérence,
25:30 de contre-espionnage, justement,
25:32 sur cette capacité à définir
25:34 qui est qui, qui fait quoi.
25:36 Et le problème, c'est que sur le territoire, on a des tas de gens
25:38 qui, effectivement, poussent des intérêts. Alors pas de lobbying uniquement,
25:40 mais des intérêts particuliers. L'objectif de l'influence
25:42 ou des ingérences, parce qu'effectivement,
25:44 la distinction est très faible,
25:46 c'est d'être sous la barrière radar
25:48 pour ne pas se faire repérer et d'influer,
25:50 donc de modifier. Donc se doter d'une législation
25:52 de type FARA me semble tout à fait intéressant.
25:54 Et effectivement,
25:56 et étant en capacité de lutter très concrètement
25:58 sur des actions qui sont faites.
26:00 Alors tout a 10 muts, parce qu'effectivement,
26:02 actuellement, c'est la Chine, la Russie et d'autres,
26:04 proxy, la Turquie et d'autres,
26:06 mais il n'y a pas que eux. Voilà. Et donc, vous expliquez
26:08 que ça ne se rapportait pas uniquement
26:10 qu'à ces ingérences-là.
26:12 Donc ça veut dire que ça ouvre d'autres possibilités,
26:14 je pense que ça satisfera beaucoup de gens.
26:16 - Et donc, vous avez aussi des politiques d'ingérences,
26:18 vous avez également, par exemple, la DRSD...
26:20 - Donc le filet s'élargit. - Bien sûr.
26:22 - Il fallait surveiller. C'est très clair.
26:24 - Sur nos affaires de BITD,
26:26 tous les ingérences... - Ouh là là là !
26:28 - La BITD, c'est tous les acteurs... - Des entreprises de la défense.
26:30 - Voilà, exactement. Vous avez les centrales
26:32 du renseignement, très peu connues, mais très actives,
26:34 par exemple la DRSD, la Direction du renseignement
26:36 et de la Sécurité de la défense,
26:38 qui utilisent en fait tous ces moyens-là
26:40 pour protéger nos forces, protéger les personnels
26:42 et tous les gens qui sont dans cet écosystème.
26:44 Donc, il faut faire pression dessus.
26:46 Il n'y a pas que les problématiques liées à ce que j'appellerais
26:48 les actions de nature internationale et sémantique.
26:50 On peut et on doit pouvoir agir là-dessus.
26:52 Donc, effectivement, des gens font pression
26:54 et parfois, on peut les définir grâce à ces modalités.
26:56 - Et puis, il y a la question, on y vient,
26:58 pour terminer ce débat,
27:00 de la surveillance algorithmique élargie
27:02 avec cette proposition.
27:04 Moi, j'étais étonnée. Le RN est très attaché
27:06 aux libertés publiques,
27:08 vous l'avez prouvé dans de nombreux débats ici à l'Assemblée.
27:10 Technologie qui va permettre de collecter
27:12 des données de connexion et pas seulement des contenus,
27:16 identifier un abonné à partir d'un numéro de téléphone,
27:18 géocaliser ses moyens de paiement,
27:20 géocaliser des communications
27:22 sur toutes les messageries électroniques.
27:24 Vous dites "il faut y aller", il faut le faire.
27:26 - Non, mais moi, on n'a pas de problème avec ça,
27:28 puisque moi, j'ai confiance dans les services de renseignement,
27:30 aux services d'une démocratie.
27:32 - Donc, la raison d'Etat prime sur les libertés.
27:34 - C'est juste s'assurer qu'il n'y a pas de phénomène d'ingérence
27:36 et utiliser les outils qu'il faut.
27:38 Moi, je regrette, en revanche, parce qu'on a beaucoup parlé de ça,
27:40 qu'on ne parle pas du tout de phénomène de corruption.
27:42 Ce texte a fait l'impasse,
27:44 et c'est quand même ma principale hostilité,
27:46 ou mon regret, sur la corruption.
27:48 - Pardonnez-moi, M. Tanki, mais moi, je me souviens du débat.
27:50 En 2015, pendant la lutte antiterroriste,
27:52 après les attentats,
27:54 Marine Le Pen, elle était très vigilante
27:56 sur tout l'arsenal, sur les assignations à résidence,
27:58 sur les perquisitions.
28:00 Et aujourd'hui, vous nous dites "pas de problème".
28:02 Mais je m'étonne !
28:04 - Non, il y a un certain nombre d'institutions
28:06 qui permettent de vérifier, et ça a été fait pour le terrorisme,
28:08 et ça correspond à l'État de droit.
28:10 Mais par contre, il n'y a rien sur la corruption.
28:12 - Donnez-nous des exemples.
28:14 - M. Sarkozy, ancien président de la République,
28:16 fait des conférences rémunérées par le Qatar,
28:18 les puissances du Golfe, par des amis de M. Poutine en Russie.
28:20 M. Fillon a voulu prendre deux jetons de présence
28:24 pour des entreprises d'État directement liées à la Russie,
28:26 en tant qu'ancien Premier ministre.
28:28 Jean-Marie Le Guin, ancien ministre des Relations avec le Parlement
28:30 et au Conseil d'administration de Huawei.
28:32 Et aujourd'hui, suite à la commission d'enquête,
28:34 il y a deux procédures...
28:36 - Oui, il y a, en tout cas,
28:38 je considère que ce n'est pas normal
28:40 qu'un ancien président de la République
28:42 ait eu à connaître... - Mais c'est de la corruption,
28:44 parce que c'est des accusations fortes que vous portez.
28:46 - Oui, en tout cas, je dis qu'il y a une impasse sur le fait de corruption.
28:48 Je pense que les Français sont très choqués
28:50 que M. Sarkozy puisse être payé,
28:52 et ce n'est pas anecdotique,
28:54 ce n'est pas juste payer le déplacement et l'hôtel,
28:56 plusieurs dizaines de milliers d'euros
28:58 pour des prestations, comme d'autres le font,
29:00 M. Fillon, d'autres, et aucune personnalité
29:02 du rassemblement national vous l'aurait noté.
29:04 - Vous sous-entendez qu'il y a une forme d'échange derrière ?
29:06 - Je ne sous-entends rien, madame.
29:08 - C'est de l'influence pour le Qatar,
29:10 pour l'Arabie saoudite ?
29:12 - C'est-à-dire qu'en France, on autorise,
29:14 contrairement à ce que voulait le général de Gaulle,
29:16 c'est-à-dire que les anciens présidents soient tranquillement,
29:18 prennent une retraite tranquille au Conseil constitutionnel,
29:20 on autorise des gens qui ont eu les codes nucléaires
29:22 de faire la tournée des popotes, si je puis dire,
29:24 et des ménages, avec des dictatures.
29:26 Donc si tout le monde trouve ça normal,
29:28 et qu'on laisse ça en suspens, moi je ne trouve pas ça normal,
29:30 et qu'on laisse en plus des personnalités
29:32 comme Jean-Marie Le Guene, qui ont pu faire pendant des années,
29:34 donner en échange de votes,
29:36 ouvrir aussi un commissariat ici,
29:38 négocier le maintien d'une poste là,
29:40 et qu'après ils se retrouvent avec...
29:42 - Quelque chose vous dit que les intéressés vous répondront.
29:44 - Oui, oui, ils peuvent nous répondre,
29:46 - Sacha Houllier, non mais c'est intéressant,
29:48 - ... qui s'occupe de toute la téléphonie,
29:50 de tous les réseaux de fibres,
29:52 de tous les plans de fibres qui sont financés
29:54 par les collectivités territoriales, ça m'interroge.
29:56 - Sacha Houllier.
29:58 - Les personnes là qui à mon avis ont des comportements totalement amoraux,
30:00 ne sont pas dans l'illégalité,
30:02 en revanche elles relèveront du registre,
30:04 elles devront se déclarer, et si elles ne le font pas,
30:06 alors elles pourront être sanctionnées,
30:08 et là elles tomberont dans l'illégalité, premier aspect.
30:10 Deuxième aspect, sur les mesures de police administrative dont je parlais,
30:12 et celles de l'algorithme, qu'est-ce qu'on va faire ?
30:14 Est-ce que d'abord c'est une restriction des libertés ?
30:16 Oui. Est-ce qu'elle est justifiée ?
30:18 Oui, par un objectif d'intérêt général, la sécurité nationale.
30:20 Et est-ce qu'elle est nécessaire
30:22 et proportionnée ? Oui.
30:24 Parce qu'on va regarder dans le champ
30:26 les finalités du renseignement,
30:28 à quoi le renseignement peut avoir accès,
30:30 pourquoi le renseignement est-il fait.
30:32 - Donnez-nous des exemples concrets. Un espion chinois,
30:34 il fait quoi ?
30:36 Il prend des chambres d'hôtel ?
30:38 - On a restreint précisément le champ
30:40 de ce pourquoi c'est fait,
30:42 et ensuite, ce qu'on recherche,
30:44 ce que l'on fait déjà en antiterrorisme,
30:46 puisqu'on a des comportements qui sont très individuels,
30:48 puisqu'on n'a plus les menaces projetées qu'on avait avant,
30:50 comme ce qu'on a eu en Russie, mais des menaces qui sont individuelles,
30:52 ça marche moins en antiterrorisme.
30:54 Pourquoi ça marche en ingérence ?
30:56 Parce que vous avez un agent chinois qui arrive sur le territoire français,
30:58 qui réserve X chambres d'hôtel,
31:00 dans 10 hôtels différents,
31:02 qui réserve 15 trains différents et 20 avions différents
31:04 pour se diluer, pour s'évaporer.
31:06 Le seul fait qu'il ait ce comportement-là
31:08 et qu'il soit reproductible
31:10 pour tous les agents chinois qui vont venir sur le territoire français,
31:12 ou pour tous les chinois qui sont déjà présents sur le territoire français,
31:14 mais parce qu'ils sont activés par un service,
31:16 eh bien, vont avoir un comportement qui est identique.
31:18 On va développer un algorithme
31:20 sur les données de connexion qui va dire
31:22 que toutes ces personnes ont le même comportement
31:24 qui est suspect parce qu'ils réservent 15 choses
31:26 en même temps et qu'ils en ont eu les trois quarts
31:28 et qu'ils prennent un ou deux vols.
31:30 Eh bien, on recherche
31:32 à savoir qu'est-ce qu'ils font, où est-ce qu'ils vont,
31:34 pour le compte de qui ils agissent.
31:36 C'est le but de faire, on appelle ça un "hit"
31:38 dans les services d'enseignement.
31:40 Ça va apparaître et on va identifier la personne
31:42 qu'on n'avait pas vue de façon manuelle.
31:44 Là, on est au cœur des techniques modernes
31:46 de renseignement avec l'aval du législateur.
31:48 Qu'est-ce que vous en pensez ?
31:50 Est-ce que c'est efficace ? On entendait la France insoumise
31:52 dire dans le débat qu'on ne veut pas des robots.
31:54 C'est le renseignement territorial
31:56 à l'ancienne
31:58 qu'il faut valoriser.
32:00 - Il faut la connaissance des anciens,
32:02 si j'ose dire, et mixer ça
32:04 avec les nouvelles technologies
32:06 qui permettent de définir des patterns,
32:08 des profils comportementaux
32:10 en fonction de certaines objections
32:12 qu'on peut faire sur tel ou tel type de déplacement,
32:14 tel ou tel type de personnalité.
32:16 - Et ça, ça traque, entre guillemets,
32:18 les personnes qui essaient de brouiller les pistes
32:20 en réservant, puis en annulant
32:22 pour qu'elles soient intraçables ?
32:24 - Ça peut marcher. Les anglo-saxons le font.
32:26 C'est le principe de la Sécurité nationale,
32:28 qui est plus vaste que notre Défense nationale
32:30 et nos intérêts supérieurs à la nation.
32:32 C'est la Sécurité nationale, un continuum complet
32:34 sur lequel il s'offre cette possibilité
32:36 de mixer les outils. C'est ce que fait la NSA,
32:38 qui doit tout récupérer du spectre électromagnétique.
32:40 - Les services secrets américains.
32:42 - Il y a 17 centrales chez eux.
32:44 Il y en a pas 3 ou 4, il y en a 17.
32:46 - Ils ont une petite longueur d'avance.
32:48 - Ils sont très bons, parce qu'ils prennent
32:50 le spectre complet sur ces problématiques
32:52 d'ingérence, puis les problématiques économiques,
32:54 qui est un autre volet qu'il faudrait étudier un jour.
32:56 Mais, grosso modo, ces affaires-là
32:58 nous obligent à aller dans le sens des technologies
33:00 pour, bien évidemment, manager ça
33:02 de manière humaine aussi,
33:04 parce que vous avez des spécialistes
33:06 dans le domaine, contre ingérence,
33:08 contre espionnage, qui peuvent définir ces éléments-là.
33:10 Mais ce sont des outils supplémentaires
33:12 qui permettent d'être plus efficaces.
33:14 - Vous êtes pas convaincu par l'enraisonnement
33:16 sur la surveillance par algorithme ?
33:18 - C'est très bien. J'ai vu une phrase...
33:20 Vous avez quand même dit "tout bilational chinois"
33:22 par contre, je voulais quand même le dire,
33:24 vous avez laissé apparaître une phrase,
33:26 "tout bilational chinois peut être un agent".
33:28 Il faut faire attention à ce genre de choses.
33:30 On a plein de compatriotes français
33:32 qui sont d'origine chinoise,
33:34 qui sont parfaitement intégrés,
33:36 qui aiment leur pays, qui n'ont rien à voir
33:38 avec le régime de Pékin.
33:40 C'est pas parce qu'on a un ancien député
33:42 que tous nos compatriotes...
33:44 - C'est dit. D'ailleurs, je termine le débat
33:46 en expliquant que les diplomates ne font pas partie de ce texte.
33:48 - Ils sont très surveillés.
33:50 - Ils sont très surveillés. On va s'arrêter là.
33:52 On est tous surveillés. Vous restez avec moi, Charles Sapin.
33:54 Merci à vous. Dans une dizaine de minutes,
33:56 les partis pris de nos affranchis,
33:58 ce soir, Macron et le Brésil.
34:00 Isabelle Lasserre nous dira si Lula
34:02 peut devenir l'allié de l'Occident
34:04 avec sa belle chemise éclatante,
34:06 blanche, au coeur de cette présentation.
34:08 Et puis, à sa droite,
34:10 Laure Dossi va revenir sur la démission
34:12 du proviseur du lycée Ravel,
34:14 une capitulation française.
34:16 Et puis, quel est le menu, Marco Baumier,
34:18 de votre Bourbon Express, ce soir ?
34:20 - Ce soir, je vous parle d'une audition
34:22 qui a tourné au règlement de compte
34:24 entre Yann Barthez, présentateur vedette de Quotidien,
34:26 et le Rassemblement National.
34:28 - A tout à l'heure, les amis.
34:30 Mais d'abord, on va plonger dans votre livre,
34:32 "Les moissons de la colère", aux éditions du CERF,
34:34 plongée dans l'Europe nationaliste.
34:36 Vous êtes allé à la rencontre de ces partis
34:38 en Europe, sur le vieux continent.
34:40 Alors, il y a les nationaux conservateurs
34:42 et les nationaux populistes.
34:44 Vous allez nous dire en quoi c'est différent.
34:46 L'invitation de Marion Becker, d'abord.
34:48 Interview juste après.
34:50 ...
34:52 - Si on vous invite,
34:54 cher Le Sapin, c'est parce que vous prédisez
34:56 un raz-de-marée des nationalistes
34:58 lors des prochaines élections européennes,
35:00 en juin.
35:02 Ils pourraient gagner plus de 20 sièges
35:04 au Parlement européen.
35:06 ...
35:08 - Charles Sapin, vous avez sillonné l'Europe
35:10 pour comprendre les ressorts de ce vote massif.
35:12 Car vous êtes journaliste politique,
35:14 spécialiste des partis conservateurs
35:16 et nationalistes au Figaro,
35:18 puis au point où vous êtes désormais reporter.
35:20 Dans votre ouvrage,
35:22 "Les moissons de la colère,
35:24 plongée dans l'Europe nationaliste",
35:26 vous racontez comment l'émergence
35:28 de ces partis a bouleversé
35:30 en quelques années seulement le paysage politique.
35:32 Depuis l'arrivée de leur chef de file,
35:34 Viktor Orban, en Hongrie,
35:36 les forces nationalistes ont conquis
35:38 le pouvoir en Suède, en Finlande
35:40 et en Italie, avec Giorgia Melloni.
35:42 Son parti fratelli est passé
35:44 de 4 % en 2018
35:46 à 22 %
35:48 moins de 4 ans plus tard.
35:50 - Est-ce que l'Italie doit être,
35:52 selon les autres pays européens,
35:54 le seul port de débarquement
35:56 pour les migrants arrivants d'Afrique ?
35:58 - Au Pays-Bas,
36:00 ces guerres de l'Europe,
36:02 au début du mois, au Portugal,
36:04 le parti Chega fait une percée historique.
36:06 Partout, les populistes
36:08 gagnent du terrain.
36:10 16 de ces formations nationalistes européennes
36:12 sur 27 sont au pouvoir
36:14 dans des gouvernements,
36:16 au niveau national ou régional.
36:18 Il n'y en avait aucun en 2000.
36:20 Pourquoi une percée spectaculaire ?
36:22 C'est ce que vous analysez.
36:24 - Vous voyez un retour de la droite,
36:26 pourquoi ? Parce qu'il y a une crise du système.
36:28 - C'est un système qui est en train de se dérouler.
36:30 - Un retour de la droite, pourquoi ?
36:32 Parce qu'il y a une crise du centre.
36:34 Les droites traditionnelles ont le choix
36:36 entre continuer de s'allier avec le centre et la gauche,
36:38 et dans ce cas, perdre des électeurs,
36:40 et paver un boulevard pour les forces nationalistes,
36:42 soit faire un revirement d'alliances,
36:44 faire tomber les digues,
36:46 s'allier avec les forces nationalistes
36:48 pour gouverner avec elles.
36:50 - Au Parlement européen,
36:52 deux forces nationalistes dominent.
36:54 Les nationaux populistes du groupe
36:56 Identité et Démocratie
36:58 sont des nationaux conservateurs et réformistes européens.
37:00 Vous expliquez leur singularité,
37:02 leurs ambitions,
37:04 et surtout leur rivalité idéologique,
37:06 car ces deux forces
37:08 n'ont jamais réussi à s'allier.
37:10 Alors, on a une question pour vous,
37:12 Charles Sapin.
37:14 A quelques semaines du scrutin,
37:16 ces deux extrêmes-droites sont-elles vraiment
37:18 irréconciliables ?
37:20 - Réponse ?
37:24 - Réponse ? Oui.
37:26 En fait, dans cette grande famille nationaliste,
37:28 c'est vrai qu'il y a deux sous-familles.
37:30 La famille nationale populiste
37:32 qu'on connaît mieux en France,
37:34 puisque l'une des plus grandes leaders de cette famille,
37:36 c'est Marine Le Pen,
37:38 qui a pour spécificité,
37:40 d'avoir une promesse
37:42 d'émancipation par rapport à la droite et la gauche,
37:44 et d'avoir pour socle
37:46 idéologique de base, le peuple
37:48 contre les élites.
37:50 Les nationaux conservateurs,
37:52 qui sont l'autre famille,
37:54 c'est la tête de file et Giorgia Meloni,
37:56 depuis son élection à la tête de l'Italie.
37:58 C'est très différent, si vous voulez.
38:00 Elle n'a rien contre les élites.
38:02 Même une partie de sa formation politique
38:04 se revendique d'un certain élitisme.
38:06 Elle se revendique de droite.
38:08 Et si vous voulez,
38:10 c'est beaucoup de choses...
38:12 Il y a beaucoup de différences
38:14 entre ces deux familles,
38:16 notamment de stratégie.
38:18 - C'est intéressant. Justement,
38:20 sur la stratégie, je vais vous montrer
38:22 une photo de Giorgia Meloni
38:24 aux côtés d'Ursula von der Leyen.
38:26 C'était après son élection
38:28 à Lampedusa, en pleine crise migratoire.
38:30 Cette photo,
38:32 elle dit très clairement les divergences
38:34 entre ces deux familles politiques.
38:36 Meloni, elle est pro-OTAN,
38:38 elle est pro-Ukraine,
38:40 elle est à la faveur des circonstances pro-Europe.
38:42 Meloni, c'est du nationalisme
38:44 de sous-préfecture.
38:46 Et ça, c'est le bras droit
38:48 de Marine Le Pen, qui vous le dit
38:50 dans le livre.
38:52 Un féodé aux Etats-Unis, aux patronats, aux ONG,
38:54 elle est peut-être conservatrice, mais en quoi
38:56 est-elle nationaliste ?
38:58 - Tout à fait. - C'est très fort,
39:00 finalement, cette opposition. - C'est très fort.
39:02 Et ça vient en réponse d'une autre phrase
39:04 qu'a dit, dans l'intimité
39:06 de quelques élus italiens, il y avait un
39:08 eurodéputé français aussi. Plusieurs sources
39:10 m'ont rapporté cette phrase de Giorgia Meloni,
39:12 juste avant son élection à la tête de l'Italie,
39:14 qui parlait de Marine Le Pen, et qui disait
39:16 "Marine Le Pen, finalement,
39:18 c'est une démago, elle est
39:20 socialiste sur le plan économique
39:22 et elle est progressiste sur le plan sociétal".
39:24 - Elle est beaucoup trop de gauche, en fait,
39:26 pour Giorgia Meloni. - C'est pour dire,
39:28 dans cette opposition, tout est résumé, cette opposition
39:30 entre différentes nationalistes... - Ces deux-là
39:32 se détestent, en réalité.
39:34 - Se détester, le mot est peut-être
39:36 trop fort, je pense qu'il n'y a pas encore,
39:38 enfin, il n'y a pas de lien suffisamment
39:40 fort pour que ça aille au point de l'âne,
39:42 mais en tout cas, elles sont rivales, et politiquement,
39:44 un fossé immense les sépare.
39:46 Ce qui explique d'ailleurs pourquoi Giorgia Meloni
39:48 n'a pas appelé à voter pour Marine Le Pen
39:50 contre Emmanuel Macron au second tour
39:52 de 2022. - Alors justement, on va regarder
39:54 l'hémicycle actuel du Parlement
39:56 européen pour bien comprendre
39:58 à quoi on peut s'attendre, parce qu'on nous
40:00 dit que les populistes progressent partout,
40:02 encore faut-il qu'ils s'allivent, vous nous l'avez bien
40:04 expliqué. On va voir, dans cet hémicycle,
40:06 la majorité, elle est clairement
40:08 détenue par le Parti Populaire
40:10 Européen, 176 sièges,
40:12 et puis avec le SPD,
40:14 le SCD, pardon,
40:16 144, Renew au milieu.
40:18 On s'attend à ce que Renew diminue, que les
40:20 écologistes diminuent aussi, mais que ces deux
40:22 parties à droite, ID pour Identité
40:24 et Démocrate, Marine Le Pen, donc,
40:26 et ECR,
40:28 où il y a Giorgia Meloni,
40:30 plus, on va dire, pro-Europe,
40:32 pro-OTAN,
40:34 vraiment progressent ? - En fait,
40:36 selon les sondages, mais encore une fois,
40:38 c'est qu'une photographie à l'instant T, ça peut bouger
40:40 jusqu'à l'élection, mais si les
40:42 sondages disent vrai, ces deux groupes
40:44 qui sont les deux groupes nationalistes du Parlement Européen
40:46 seront les deux groupes qui gagneront
40:48 le plus en nombre de sièges, donc les
40:50 plus en dynamique. Est-ce que
40:52 ça va bousculer
40:54 les rapports de force du prochain Parlement
40:56 Européen ? - A priori, non.
40:58 Sauf s'ils s'allient,
41:00 c'est la fameuse union des droites avec le Parlement,
41:02 le PPE. - Quand bien même,
41:04 s'ils s'allieraient, ça ne suffirait
41:06 pas à avoir une majorité de
41:08 305 sièges. Il faudrait
41:10 qu'il y ait un groupe qui s'allie avec le principal
41:12 groupe au Parlement Européen qui est
41:14 le groupe PPE,
41:16 "IPP" en anglais, comme on le voit ici.
41:18 Le problème, c'est que le PPE, qui est en fait
41:20 le groupe de la droite traditionnelle, veut bien
41:22 travailler avec ECR, donc les nationaux
41:24 conservateurs type Georges Ameoni, mais surtout
41:26 pas avec le groupe Identité et Démocratie,
41:28 parce que ce sont des populistes et qu'il y a
41:30 toujours un cordon sanitaire. Donc, si vous voulez,
41:32 il y a une révolution auquel tout le monde s'attend, mais
41:34 qui n'arrivera pas. C'est un Parlement
41:36 Européen dominé par les nationalistes,
41:38 qui ne peut pas être un Parlement Européen
41:40 qui est un Parlement Européen,
41:42 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:44 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:46 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:48 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:50 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:52 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:54 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:56 qui n'est pas un Parlement Européen,
41:58 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:00 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:02 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:04 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:06 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:08 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:10 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:12 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:14 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:16 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:18 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:20 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:22 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:24 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:26 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:28 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:30 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:32 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:34 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:36 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:38 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:40 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:42 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:44 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:46 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:48 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:50 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:52 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:54 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:56 qui n'est pas un Parlement Européen,
42:58 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:00 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:02 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:04 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:06 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:08 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:10 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:12 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:14 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:16 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:18 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:20 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:22 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:24 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:26 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:28 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:30 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:32 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:34 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:36 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:38 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:40 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:42 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:44 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:46 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:48 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:50 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:52 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:54 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:56 qui n'est pas un Parlement Européen,
43:58 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:00 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:02 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:04 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:06 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:08 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:10 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:12 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:14 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:16 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:18 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:20 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:22 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:24 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:26 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:28 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:30 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:32 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:34 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:36 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:38 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:40 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:42 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:44 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:46 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:48 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:50 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:52 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:54 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:56 qui n'est pas un Parlement Européen,
44:58 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:00 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:02 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:04 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:06 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:08 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:10 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:12 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:14 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:16 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:18 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:20 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:22 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:24 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:26 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:28 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:30 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:32 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:34 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:36 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:38 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:40 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:42 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:44 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:46 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:48 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:50 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:52 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:54 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:56 qui n'est pas un Parlement Européen,
45:58 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:00 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:02 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:04 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:06 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:08 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:10 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:12 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:14 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:16 qui n'est pas un Parlement Européen,
46:18 comme vous le disiez au début de votre livre.
46:20 Est-ce que vous voyez dans la montée des populistes dans l'Europe
46:24 une forme de volonté d'un homme fort,
46:26 qui résoudrait tous les problèmes,
46:28 à commencer par l'immigration,
46:30 au risque de s'asseoir un peu sur l'Etat de droit,
46:34 ou pas du tout ?
46:36 Parce que Orban joue avec les limites de l'Etat de droit.
46:38 Est-ce que c'est une attente que vous avez perçue
46:40 dans votre retour d'Europe ?
46:42 - C'est vrai que la particularité de Victor Orban,
46:44 C'est que la particularité de Victor Orban,
46:46 entre un pragmatisme pour obtenir certains résultats
46:48 et un absolutisme idéologique,
46:50 et un absolutisme idéologique,
46:52 il reste souvent sur ce deuxième choix,
46:54 qui fait que d'ailleurs,
46:56 il y a eu des sanctions européennes très lourdes pour son pays,
46:58 jusqu'à l'équivalent de 20% du PIB en sanctions financières,
47:00 dans un contexte de forte inflation.
47:02 - Il est toujours élu dans un pays libre,
47:04 mais il est très pro-Poutine,
47:06 et on sent qu'il y a une forme de modèle.
47:08 et on sent qu'il y a une forme de modèle.
47:10 Est-ce que les Européens sont dans cette attente-là,
47:12 enfin ceux qui votent pour ces parties-là,
47:14 ou la question démocratique reste essentielle ?
47:16 ou la question démocratique reste essentielle ?
47:18 - La question démocratique reste essentielle.
47:20 L'important, c'est que la démocratie fonctionne.
47:22 Par exemple, en Pologne,
47:24 où il y a eu, pareil,
47:26 le pouvoir du PiS,
47:28 le pouvoir nationaliste, qui a franchi beaucoup de lignes rouges,
47:30 mais il y a une alternance qui est possible,
47:32 c'est-à-dire que par les élections,
47:34 vous pouvez avoir un remplacement du pouvoir.
47:36 - Vous montrez très bien d'ailleurs que...
47:38 - Les forces nationalistes qui ont le plus le vent en poupe,
47:40 aujourd'hui, c'est des forces type
47:42 "Fratelli d'Italia" et...
47:44 - "Giorgia Mellone". - Voilà, exactement.
47:46 Et qui a cette particularité, il y a cette expression
47:48 de Giovanni Orsina, qui est un politologue italien,
47:50 qui dit "c'est la romanisation des barbares".
47:52 C'est-à-dire ces forces nationalistes qui,
47:54 pour arriver au pouvoir, et une fois qu'ils y sont
47:56 face aux contraintes diplomatiques,
47:58 européennes, financières,
48:00 préfèrent abandonner les pans
48:02 les plus radicaux de leur programme pour justement
48:04 obtenir des résultats et être conduits dans les urnes.
48:06 - Merci beaucoup, merci Charles Chapin.
48:08 La suite, c'est dans "Les moissons de la colère",
48:10 plongée dans l'Europe nationaliste
48:12 aux éditions du CERF, où vous montrez
48:14 très bien que la stratégie de diabolisation
48:16 a fait complètement long feu.
48:18 Allez, on va ouvrir la page "Opinion"
48:20 de cette émission. Pour terminer,
48:22 voici les parties prises de nos affranchis.
48:24 (Générique)
48:26 ---
48:32 Isabelle Lasserre,
48:34 la correspondante diplomatique au Figaro
48:36 et l'orde aussi grand reporter
48:38 à Charlie Hebdo. Bonsoir à toutes les deux.
48:40 On va commencer avec vous, Isabelle.
48:42 Emmanuel Macron, après la Guyane,
48:44 vient d'arriver au Brésil.
48:46 Que vient-il chercher précisément
48:48 de Lula ? - Eh bien, il vient chercher
48:50 un partenariat stratégique avec ce
48:52 géant de 215 millions
48:54 d'habitants, reconsolider les liens
48:56 avec le Brésil, qui était devenu
48:58 extrêmement médiocre
49:00 avec le prédécesseur de Lula, Jair Bolsonaro.
49:02 Entre la France
49:04 et le Brésil, on en était quasiment
49:06 à un gel des relations politiques
49:08 en 2019, mais surtout,
49:10 Macron vient essayer de
49:12 renforcer les liens avec
49:14 le Sud global.
49:16 Il voudrait que le Brésil
49:18 pèse davantage de son
49:20 côté, parce que la guerre
49:22 en Ukraine a révélé
49:24 les changements du monde et la bascule
49:26 qui est en train de s'opérer avec l'émergence
49:28 de toutes ces nouvelles
49:30 puissances et la rétractation
49:32 de l'Occident en face. - Le Brésil ne soutient
49:34 pas clairement Kiev, il faut le dire.
49:36 Elles s'en sont où, les relations
49:38 avec Lula ? - Alors, justement,
49:40 elles sont bonnes sur tous les
49:42 grands sujets, les
49:44 enjeux globaux, comme la lutte contre la déforestation
49:46 ou la lutte contre le changement
49:48 climatique, mais justement,
49:50 effectivement, les divergences
49:52 sont encore très importantes sur les
49:54 grandes crises internationales et notamment l'Ukraine.
49:56 Emmanuel Macron essaie de rallier
49:58 Lula à son combat
50:00 pour soutenir l'Ukraine et
50:02 pour sortir la politique vis-à-vis de Vladimir
50:04 Poutine, mais
50:06 le Brésil, même sous
50:08 Lula, penche toujours du côté
50:10 de Moscou. Lula défend
50:12 une troisième voie, la voie des
50:14 non-alignés, et il se fait
50:16 le porte-parole de tous ceux qui ont un
50:18 ressentiment vis-à-vis de l'Occident.
50:20 Il voudrait même, Lula, que
50:22 l'Ukraine cède la Crimée. Il voudrait
50:24 aussi inviter Vladimir Poutine
50:26 au G20. Et alors, il y a une deuxième
50:28 divergence, c'est la divergence
50:30 sur la guerre menée
50:32 par Israël à Gaza, après
50:34 les attentats du 7 octobre.
50:36 Lula, récemment, a accusé
50:38 Israël de mener un génocide
50:40 à Gaza, et donc il a fait une comparaison
50:42 totalement
50:44 stupéfiante entre la
50:46 guerre israélienne et l'Holocauste.
50:48 Et enfin, ils ne sont pas d'accord aussi sur le
50:50 Mercosur, l'accord de libre-échange.
50:52 On sait bien pourquoi.
50:54 - Alors, le combat pour rallier ces pays
50:56 du Sud global,
50:58 il est gagné ou il est perdu d'avance ?
51:00 - Il était assez mal engagé
51:02 depuis le début de la guerre en Ukraine
51:04 en février 2022.
51:06 Et alors là,
51:08 il est carrément enrayé
51:10 parce que la guerre
51:12 entre les Israéliens et les
51:14 Palestiniens a nourri
51:16 le discours des pays
51:18 du Sud global, qui considèrent que l'Occident
51:20 mène une politique
51:22 de double standard. En gros,
51:24 vous attaquez Poutine en permanence,
51:26 vous ne dites rien sur les bombardements
51:28 israéliens à Gaza.
51:30 Or, sans le soutien du Sud
51:32 global, les sanctions contre la
51:34 Russie perdent en efficacité
51:36 et
51:38 l'élan impérialiste de
51:40 Vladimir Poutine est encouragé parce qu'il n'est pas tout seul.
51:42 - Voilà, ce n'est pas gagné.
51:44 C'est ce que je retiens. Merci, Isabelle Lasserre.
51:46 Alors, ce soir,
51:48 vous vouliez revenir sur ce qui s'est
51:50 passé hier. Le proviseur du lycée parisien
51:52 Maurice Ravel a démissionné.
51:54 Les menaces étaient trop fortes, très clairement.
51:56 Il avait été
51:58 menacé de mort et puis ça a continué.
52:00 Et je rappelle les faits, c'est qu'il
52:02 avait tout simplement dit à des
52:04 élèves qui voulaient entrer voiler dans son établissement
52:06 qu'ils devaient se dévoiler.
52:08 - Absolument.
52:10 Ce proviseur avait juste voulu
52:12 appliquer la loi de 2004
52:14 sur les signes religieux à l'école.
52:16 Et voilà qu'un mois après les faits, il annonce
52:18 qu'il quitte ses fonctions.
52:20 Une décision qui est une déflagration dans la
52:22 communauté éducative. Alors,
52:24 dans une lettre qu'il adresse à ses collègues,
52:26 il évoque des raisons de sécurité
52:28 pour lui-même et pour
52:30 l'établissement, car ces menaces
52:32 mettent en danger ses collègues
52:34 et l'ensemble aussi des élèves.
52:36 Mais comme pour minimiser
52:38 cette décision, on note que le rectorat
52:40 de son côté a
52:42 évoqué des convenances personnelles
52:44 et un départ anticipé
52:46 à la retraite, une minimisation
52:48 comme à l'époque du pas de vague.
52:50 - Donc il n'a pas été protégé selon vous, ce proviseur ?
52:52 - Alors, on ne peut pas dire que rien n'ait été fait.
52:54 Plusieurs mesures ont été
52:56 prises pour le protéger. Il était placé
52:58 sous protection fonctionnelle.
53:00 L'établissement a été sécurisé.
53:02 Une enquête a été ouverte pour
53:04 cyberharcèlement. Un homme de 26 ans
53:06 d'ailleurs a été arrêté et doit être
53:08 jugé le 23 avril à Paris
53:10 pour menace de mort.
53:12 Mais cette démission montre un profond malaise
53:14 du corps enseignant, encore
53:16 meurtri évidemment, traumatisé
53:18 par les meurtres de Samuel Paty
53:20 et de Dominique Bernard. Et ce proviseur
53:22 n'est pas le seul à quitter ses fonctions.
53:24 D'après les derniers chiffres,
53:26 plus de 2800 professeurs ont
53:28 démissionné de l'Education nationale.
53:30 Ça, c'était en 2021-2022,
53:32 les derniers chiffres en date. Alors, c'est
53:34 multifactoriel, bien sûr, la difficulté croissante
53:36 du métier, le manque de reconnaissance
53:38 salariale et les menaces
53:40 et les agressions qui se multiplient.
53:42 Ces démissions, il faut préciser, c'est 0,3%
53:44 des enseignants en France,
53:46 mais c'est quand même 5 fois plus
53:48 qu'il y a 10 ans. - Et ces menaces de mort se multiplient
53:50 encore aujourd'hui ? - Coïncidence.
53:52 On vient d'apprendre ce soir, dans le Figaro,
53:54 l'existence d'une affaire très similaire
53:56 à celle du lycée Maurice Ravel.
53:58 C'est une chef d'établissement,
54:00 cette fois-ci, d'Ivry-sur-Seine, qui a été
54:02 menacée de mort pour avoir demandé
54:04 à une élève d'enlever son nabaya.
54:06 Alors, la chef d'établissement avait
54:08 multiplié les rendez-vous avec l'élève
54:10 pour lui demander de se conformer
54:12 au principe de laïcité. Et malgré
54:14 plusieurs médiations, l'élève a refusé.
54:16 Elle a été convoquée à un conseil
54:18 de discipline, puis exclue pour
54:20 atteinte à la laïcité.
54:22 Mais l'élève renvoyée a diffusé
54:24 une vidéo sur les réseaux sociaux. Elle a accusé
54:26 l'approviseur d'islamophobie.
54:28 Sa publication est devenue virale.
54:30 Ça a provoqué une vague
54:32 de haine. Ça, c'était en juin 2023.
54:34 C'était passé en dessous du radar
54:36 des médias. L'approviseur a même reçu
54:38 une menace de décapitation.
54:40 Et en novembre dernier, les enquêteurs
54:42 ont interpellé trois personnes,
54:44 dont la jeune fille exclue, et ces trois personnes
54:46 comparaîtront en mai prochain.
54:48 En tout cas, cette démission et ces
54:50 multiples menaces sont un échec collectif.
54:52 Et rappelle combien ce sont les enseignants
54:54 et plus encore les directeurs d'établissement
54:56 qui sont toujours en première ligne.
54:58 - Évidemment. J'ai envie de dire merci
55:00 beaucoup. Ça laisse sans voix
55:02 ces professeurs, ces proviseurs
55:04 menacés. Bravo le Figaro
55:06 d'avoir réussi à sortir
55:08 cette nouvelle affaire.
55:10 On va enchaîner.
55:12 Marco Poemier, les coulisses, la grande,
55:14 la petite histoire, à l'Assemblée, c'est dans Bourbon Express.
55:16 Tout de suite.
55:18 [Musique]
55:20 Et votre histoire du jour est un peu plus légère
55:26 que la chronique de l'or. De quoi nous parlez-vous
55:28 ce soir, Marco ? - Oui, Myriam. Nouvel épisode
55:30 ce soir dans la série "Commission d'enquête TNT"
55:32 après Pascal Praud,
55:34 après Cyril Hanouna. Place aujourd'hui
55:36 à l'audition de Yann Barthès,
55:38 présentateur vedette
55:40 de l'émission "Quotidien" sur TMC,
55:42 producteur de la société
55:44 Bandgoumi, aux côtés de Laurent Bon,
55:46 également auditionné ce matin, vous le voyez,
55:48 tout comme le numéro 2 de TF1.
55:50 Une audition qui a rapidement
55:52 tourné au règlement de compte avec
55:54 le Rassemblement National, à l'origine
55:56 de cette demande d'audition. Et dès le début,
55:58 on a vu un Yann Barthès très offensif.
56:00 Regardez. - Alors, j'ai juré
56:02 de dire la vérité, toute la vérité,
56:04 donc je ne vais pas vous dire que je suis ravi d'être là.
56:06 Mais c'est néanmoins une expérience.
56:08 Et c'était inédit d'être convoqué à deux reprises
56:10 notre co-gérante. Elodie Bernard
56:12 est déjà passée devant cette même commission
56:14 il y a quelques semaines. Et parmi les 5 députés RN
56:16 qui ont demandé à ce que nous repassions aujourd'hui,
56:18 car nous repassons, aucun n'était présent
56:20 lors de notre premier passage.
56:22 - Voilà, Yann Barthès qui fait
56:24 mine de s'interroger sur sa présence
56:26 ce matin. Pourtant, il le sait,
56:28 le parti de Marine Le Pen
56:30 accuse son émission de TMC
56:32 de ne pas respecter le pluralisme politique.
56:34 Pas d'extrême droite en plateau,
56:36 un boycott assumé.
56:38 - Les quotidiens
56:40 et les politiques, les rapports n'ont jamais
56:42 été simples, que ce soit avec le pouvoir
56:44 ou avec les oppositions.
56:46 Mais même si ces relations sont tendues,
56:48 la liberté d'informer est respectée par
56:50 tous, sauf
56:52 par le Rassemblement national
56:54 qui s'acharne, je suis désolé de le rappeler
56:56 ici, depuis des années à interdire
56:58 à nos journalistes l'accès
57:00 à leurs réunions publiques. Le RN boycott
57:02 discrédite et agresse
57:04 les équipes de quotidien depuis des années.
57:06 - Aucune plainte n'a été
57:08 déposée par les journalistes à rétorquer
57:10 Sébastien Chenu au Rassemblement
57:12 national, dans le viseur aussi
57:14 de Thomas Ménager, les
57:16 déclarations de Julien Belvert.
57:18 Vous le voyez, Thomas Ménager. Julien Belvert,
57:20 il est chroniqueur à quotidien, également auditionné
57:22 ce matin, épinglé par
57:24 le RN pour ses propos chez
57:26 Sud Radio en 2023, lorsqu'il déclarait
57:28 "On est une chaîne privée, on fait ce qu'on veut".
57:30 - Je tiens toutefois
57:32 à vous rappeler que ces fréquences
57:34 TNT, elles vous sont données par les Français,
57:36 elles appartiennent aux Français et qu'indirectement, vous excluez
57:38 13 millions de Français qui ont fait le choix
57:40 de voter Marine Le Pen à l'élection présidentielle.
57:42 - J'aurais peut-être dû dire "On fait ce qu'on
57:44 veut tant qu'on respecte les règles".
57:46 Et les règles, on le répète depuis le début de cette commission,
57:48 on les respecte à la lettre.
57:50 - Alors elles sont respectées ?
57:52 Ces fameuses règles ? - Oui, si on écoute
57:54 le numéro 2 de TF1,
57:56 Ara Apricrian, pour qui toutes
57:58 les sensibilités politiques s'expriment
58:00 dans "Quotidien", grâce au reportage et chronique
58:02 diffusée dans l'émission,
58:04 l'équité des temps de parole contrôlés
58:06 par l'ARCOM, le gendarme de l'audiovisuel, serait
58:08 donc parfaitement respectée et Yann Barthez
58:10 a un argument.
58:12 - "Quotidien", c'est zéro dérapage, zéro procédure
58:14 de sanction, zéro amende, zéro mise en demeure
58:16 de l'ARCOM, zéro mise en garde et aucune
58:18 procédure en diffamation.
58:20 - Voilà, sous-entendu Myriam, c'est pas le cas des
58:22 chaînes du groupe Canal+, notamment C8
58:24 avec "Touche pas à mon poste"
58:26 présentée par son ennemi juré, le fameux Cyril Hanouna.
58:28 Bref, comment profiter d'une audition
58:30 à l'Assemblée pour régler ses comptes ?
58:32 - Merci beaucoup Marco.
58:34 C'est de bonne guerre ce que fait le RN avec "Quotidien"
58:36 ou ça tourne aux politiques,
58:38 cette commission d'enquête ?
58:40 - Ça tourne totalement aux politiques, si vous voulez,
58:42 il y a...
58:44 On parlait tout à l'heure de la prégnance
58:46 nouvelle des sujets identitaires dans le débat public
58:48 et si vous voulez, il y a une forme de...
58:50 Oui, de clivage
58:52 jusque maintenant sur les chaînes de télévision.
58:54 - Polarisation. - Exactement, de polarisation
58:56 importante.
58:58 Bon, voilà.
59:00 - En tout cas, vous savez que vous pouvez suivre
59:02 cette commission d'enquête sur nos réseaux,
59:04 tout comme cette émission qui a maintenant son podcast
59:06 et une chaîne YouTube, n'hésitez pas,
59:08 lcp.fr.
59:10 Merci à vous. On s'arrête là.
59:12 Merci Les Affranchis, Marco Pommier, à très vite
59:14 et merci Charles Sapin d'être passé par
59:16 LCP, "Les moissons de la colère"
59:18 plongé dans l'Europe nationaliste
59:20 très utile avant d'aller voter.
59:22 Allez, soirée documentaire.
59:24 Jean-Pierre Gracien, tout de suite.
59:26 A demain.
59:28 ...
59:40 *Générique de fin*

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