• il y a 6 mois
- Grand témoin : Philippe Aghion, économiste et professeur au Collège de France

GRAND DÉBAT / École privée : l'État trop laxiste ?

« Le récap » par Valérie Brochard

Paul Vannier (LFI) et Christopher Weissberg (Renaissance) sont les co-auteurs d'une enquête sur le financement public de l'enseignement privé sous contrat. Ce rapport insiste notamment sur l'opacité concernant le montant exact de la dépense publique allouée tous les ans aux établissements privés sous contrat. Les corapporteurs pointent aussi du doigt la faiblesse du contrôle budgétaire de ces établissements qui pourraient statistiquement, d'après leurs calculs, être contrôlés seulement « une fois tous les 1 500 ans ». Ils formulent alors une cinquantaine de propositions afin de renouveler la relation contractuelle qui lie la quasi-totalité des établissements privés à l'Etat. Permettront-elles de lutter contre un déséquilibre croissant entre école publique et privée, et d'introduire de la mixité sociale dans le privé ?

Invités :
- Christopher Weissberg, député Renaissance des Français établis hors de France
- Paul Vannier, député LFI du Val-d'Oise
- Yann Diraison, adjoint au secrétaire général de l'enseignement catholique
- Carole Zerbib, proviseure du lycée Vauquelin à Paris, membre du SNPDEN-UNSA

GRAND ENTRETIEN / Philippe Aghion : l'intelligence artificielle, un accélérateur de croissance ?

Depuis sa présentation en juin 2018, ChatGPT est devenu un outil numérique majeur. Ouvert à l'utilisation publique depuis novembre 2022, le « Generative Pre-trained Transformer » a rendu l'intelligence artificielle plus accessible et a (ré)ouvert le débat sur son développement. Face à ces avances technologiques importantes, le gouvernement d'Elisabeth Borne avait mis en place une « Commission de l'intelligence artificielle » en septembre 2023. Sous la présidence des professeurs Philippe Aghion et Anne Bouverot, le groupe d'experts a publié, le 13 mars 2024, son rapport stipulant 25 recommandations concrètes afin que la France soit un acteur de cette « révolution technologique incontournable ». Le rapport appelle entre autres à un investissement conséquent dans le secteur, à la création d'une instance de gouvernance mondiale de l'IA ou encore à la sensibilisation et à la formation des citoyens sur ce sujet...

- Grand témoin : Philippe Aghion, économiste et professeur au Collège de France

LES AFFRANCHIS :
- Vincent Hugeux, enseignant à Sciences Po et ancien grand reporter
- Delphine Sabattier, journaliste à « B Smart »
- « Bourbon express » : Stéphanie Dépierre, journaliste LCP

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00 [Musique]
00:06 Bonsoir et bienvenue, très heureuse de vous retrouver dans "Ça vous regarde".
00:10 Ce soir, "Faire de la France" un champion mondial de l'intelligence artificielle avec vous, Philippe Aguillon. Bonsoir.
00:16 Bonsoir.
00:17 Merci d'être notre grand témoin, économiste, professeur au Collège de France.
00:20 Vous venez de publier un rapport très important sur l'IA avec la mathématicienne Anne Bouvreau.
00:26 6 mois de travail, 135 pages, 25 recommandations et une conviction fondamentale, investir dans l'IA, c'est investir dans la croissance de demain.
00:36 Vous nous direz donc pourquoi on a des raisons d'être optimiste pour notre économie à rebours des diabolisations de l'intelligence artificielle.
00:44 Notre grand débat ce soir, faut-il encadrer plus strictement les aides publiques à l'enseignement privé ?
00:51 Un rapport parlementaire pointe l'opacité du financement de l'école privée sous contrat. Dans le sillage de l'affaire Amélie Houdé à Casterat,
00:58 deux députés exigent davantage de contrôles et des sanctions en cas de manquement. Ils sont sur notre plateau ce soir.
01:05 Alors de quoi réveiller ou pas la guerre scolaire ? Nous en débattons dans un instant avec mes invités.
01:10 Enfin, nos affranchis ce soir, l'international Vincent Hugeot, l'œil sur le numérique Delphine Sabatier et puis Bourbon Express, l'histoire du jour à l'Assemblée de Stéphanie Despierre.
01:19 Voilà pour le sommaire. On y va Philippe Aguillon ?
01:22 On y va.
01:23 Ça vous regarde, générique.
01:24 Un système opaque et hors de contrôle, c'est ce que pointe donc ce rapport parlementaire sur l'enseignement privé.
01:42 Chaque année, l'État verse entre 10 et 12 milliards d'euros aux établissements privés sous contrat.
01:48 Mais le montant exact, figurez-vous, des crédits d'État alloués aux privés reste incertain.
01:54 Et c'est une partie du problème. Alors faut-il plus de transparence ? Faut-il même conditionner les aides publiques aux privés ?
02:01 Les deux députés auteurs de ce rapport sont avec nous ce soir. Bonsoir Christopher Weisberg.
02:06 Merci d'être avec nous, député Renaissance des Français établi aux Etats-Unis,
02:10 co-auteur de ce rapport d'information sur le financement public de l'enseignement privé sous contrat.
02:15 Avec vous, Paul Vanier. Bonsoir.
02:17 Bonsoir.
02:18 Bienvenue, député La France Insoumise du Val-d'Oise.
02:21 Vous partagez le même diagnostic sur la faiblesse des contrôles de l'État, mais vous avez des réserves sur les solutions.
02:27 On y reviendra. Bonsoir, Yann Virezon.
02:30 Bonsoir.
02:31 Ravi de vous accueillir sur ce plateau. Vous êtes adjoint au secrétaire général de l'enseignement catholique.
02:35 Les établissements privés sous contrat sont très majoritairement, à 96%, catholiques dans notre pays.
02:41 Enfin, bonsoir, Carole Zerbib.
02:43 Bonsoir.
02:44 Vous êtes proviseure adjointe du lycée public Vauclin à Paris,
02:47 membre du syndicat des directeurs d'établissements.
02:50 Philippe Aghion, n'hésitez pas à intervenir, si vous le souhaitez.
02:52 Vous enseignez au Royaume-Uni, vous avez enseigné aux Etats-Unis.
02:55 Peut-être qu'il y a quelques exemples à prendre chez nos voisins outre-Atlantique.
03:00 On va commencer par planter le décor.
03:02 Deux millions d'élèves en France sont scolarisés dans le privé.
03:05 Que prévoit ce contrat ? Qui les lie à l'État ?
03:08 C'est dans le récap de Valérie Brochard. Tout de suite.
03:10 (Générique)
03:18 Alors, de quoi parle-t-on, ma chère Valérie ?
03:21 Bonsoir, déjà.
03:22 Quand on parle de l'école privée.
03:24 Eh bien, ça existe depuis la loi Debré, votée en 1951-1959.
03:28 Des établissements privés touchent des financements de l'État
03:32 dans le cadre de leur association avec le service public de l'éducation.
03:36 Sont alors créées les fameuses écoles privées sous contrat.
03:39 Aujourd'hui, ça donne deux millions d'élèves,
03:43 c'est-à-dire 17 % des enfants scolarisés dans 7 500 établissements
03:48 à 96 % catholiques.
03:50 Ces chiffres sont relativement stables depuis des années.
03:53 Pourquoi s'y intéresser depuis quelques mois ?
03:55 Eh bien, parce que tout est parti de là.
03:57 Vincent qui a commencé, comme sa maman, à l'école publique,
04:01 à l'école littrée.
04:03 Et puis, la frustration de ses parents, mon mari et moi,
04:08 qui avons vu des paquets d'heures
04:10 qui n'étaient pas sérieusement remplacées.
04:13 Et à un moment, on en a eu marre.
04:15 Comme des centaines de milliers de familles
04:17 qui, à un moment, ont fait un choix
04:19 d'aller chercher une solution différente.
04:21 Voilà que la ministre de l'Éducation nationale de l'époque
04:25 avoue publiquement scolariser ses enfants dans une école privée.
04:28 Non seulement l'histoire prouvera plus tard
04:30 qu'il n'y avait pas vraiment de problème d'absentéisme
04:32 dans l'école publique littrée,
04:33 mais le choix de la ministre s'est donc porté
04:35 sur l'établissement Stanislas,
04:37 dans un rapport d'inspection
04:39 publié par nos confrères de Mediapart.
04:41 On apprend que l'établissement privé, sous contrat,
04:43 ne respecte pas la loi,
04:45 en obligeant tous ses élèves à suivre
04:47 des cours de catéchisme une heure par semaine.
04:49 Mais figurez-vous que dans le contrat
04:51 qui lie l'Etat avec les établissements privés,
04:54 ils n'ont pas le droit d'imposer des cours religieux.
04:57 Ils doivent rester facultatifs.
04:59 L'Etat finance donc sans regard
05:01 une école qui ne respecte pas la loi polémique.
05:03 Le recteur de l'Académie de Paris démissionne,
05:05 mais l'opacité demeure.
05:07 Les écoles privées, sous contrat,
05:09 seraient financées à hauteur de 10 milliards d'euros
05:12 distribués par l'Etat et les collectivités territoriales.
05:15 Enfin, c'est peut-être 11, peut-être même 12 milliards.
05:18 En réalité, on ne connaît pas ce chiffre,
05:20 impossible de l'obtenir, et c'est là tout le problème.
05:22 Dans le rapport remis aujourd'hui même par vos invités,
05:25 malgré leurs 43 auditions,
05:27 malgré les 150 personnes rencontrées,
05:29 on ne sait toujours pas précisément
05:31 comment, par quels mécanismes sont financées
05:33 les écoles privées.
05:35 Personne ne le sait, ni l'Etat,
05:37 ni l'Education nationale, ni même la Cour des comptes
05:39 qui relève, elle aussi, ce manque de transparence.
05:42 Mais les élus relèvent aussi une dégradation
05:45 de la mixité sociale dans les établissements sous contrat.
05:48 Phénomène observé par Julien Grenet,
05:50 économiste spécialisé dans l'éducation écoutée.
05:53 Le privé, depuis une quinzaine d'années,
05:56 voit sa composition sociale
05:58 devenir de plus en plus favorisée.
06:00 La part des élèves issus de catégories sociales
06:04 dites très favorisées,
06:06 elle a considérablement augmenté.
06:09 Elle est passée de 30% au début des années 2000
06:12 à aujourd'hui 41%.
06:14 Quand dans le même temps,
06:16 la part des élèves dites défavorisés,
06:18 c'est-à-dire des enfants d'ouvriers
06:20 ou de personnes sans activité professionnelle,
06:22 elle est passée de 24% à 16%.
06:24 Donc, l'école privée, le fossé social
06:27 entre l'école publique et l'école privée augmente.
06:31 Alors, nos deux élus, nos deux rapporteurs ici présents,
06:35 proposent chacun leur façon de remettre de la mixité
06:38 dans les établissements et privés.
06:40 Et pour ce faire, ils souhaitent tous les deux utiliser l'IPS,
06:42 l'indice de positionnement social.
06:45 Christopher Weisberg veut qu'il soit pris en compte
06:48 dans la sélection des enfants pour équilibrer les classes.
06:51 Paul Vannier préfère, lui, un mécanisme de malus
06:53 pour tout simplement baisser les dotations de l'État,
06:55 si jamais l'équilibre au regard de cet IPS n'est pas respecté.
06:59 La France Insoumise a déjà annoncé sa volonté
07:01 de déposer une proposition de loi pour concrétiser ces propositions.
07:05 Du côté de la majorité, on semble un petit peu moins pressé.
07:08 Et puis, silence radio du gouvernement.
07:10 Mais je suis sûre, Myriam, que vous obtiendrez plus de réponses sur ce point.
07:13 - J'espère bien, merci. Merci beaucoup, Valérie Brochard.
07:16 L'État doit être en capacité d'évaluer l'argent public
07:19 qu'il met dans le privé, et pourtant, il n'y arrive pas.
07:22 C'est quand même incroyable, non, Christopher Weisberg ?
07:24 Comment vous expliquez cette opacité-là ?
07:26 Comment on peut se dire...
07:28 C'est quoi ? C'est les traces qu'a laissées la guerre scolaire ?
07:31 Il y a 40 ans, en 1984, les pouvoirs publics sont tétanisés ?
07:35 - Alors, Paul Vannier et moi, on partage un rapport,
07:38 un certain nombre de propositions, mais aussi une même date de naissance.
07:41 On est nés en 1985. - Juste après la guerre scolaire.
07:44 - Un an après cette fameuse guerre scolaire,
07:46 lancée à l'époque où on voulait un système uni.
07:49 Et évidemment, elle a laissé énormément de traces.
07:51 Et ce qu'on dit, c'est que pendant 38 ans,
07:54 on a un peu évité le sujet.
07:57 Je tiens quand même à dire qu'on a éditionné, d'ailleurs,
08:00 des ministres de gauche, et que le premier qui a essayé
08:04 de relancer ce débat de façon constructive,
08:07 c'est un ministre de l'Éducation qui appartenait à cette majorité...
08:10 - Pape Diagne ? - Qui s'appelle Pape Diagne.
08:12 - On y reviendra. - Qui a travaillé là-dessus
08:14 et qui a fait évoluer les choses et qui a permis qu'on en arrive
08:17 aussi là où on en est aujourd'hui.
08:19 Je trouve que votre constat, au fond, il est lié, évidemment,
08:22 à ce souvenir, à ce fantasme d'une guerre scolaire
08:25 qui serait réactivée, mais les choses ont beaucoup changé
08:28 depuis un an et demi ou deux ans, et notre rapport s'inscrit là-dedans.
08:31 Et évidemment, un des objectifs principaux de ce rapport,
08:35 ce n'est pas de réanimer cette guerre scolaire.
08:38 Loin de là, absolument pas. - Voilà.
08:40 - C'est au contraire de faire progresser le système.
08:42 - C'est intéressant, parce que vous n'êtes pas,
08:44 on l'a bien compris, de bord politique similaire.
08:47 Vraiment, loin de là, un soumis macroniste.
08:50 Mais tous les deux, vous ne voulez pas remettre en cause
08:52 la loi Debré, Paul Vanier. C'est bien ça ?
08:54 C'est-à-dire que vous considérez que c'est l'Etat
08:56 qui doit financer pour partie le public sous contrat,
08:59 c'est-à-dire en contrepartie de quoi, d'ailleurs ?
09:02 C'est quoi ce contrat qui lie l'Etat au public privé ?
09:04 - J'apprête d'abord à ce que la loi Debré soit respectée.
09:07 Et quand elle ne l'est pas, à ce que des conséquences
09:09 en soient tirées. Vous avez évoqué le cas du collège Stanislas.
09:13 Je veux y revenir, parce que la loi Debré ne prévoit
09:15 que trois obligations. - Lesquelles ?
09:17 - La liberté de conscience des élèves doit être garantie,
09:19 les programmes doivent être dispensés
09:21 comme dans le mentionnement public, et l'accès doit être
09:24 garanti de façon égale, c'est-à-dire qu'on ne peut pas
09:26 discriminer les élèves. Pourtant, le collège Stanislas,
09:28 et ce n'est pas moi, député insoumis, qui le dit,
09:30 c'est l'Inspection générale de l'Education nationale.
09:32 Ne respectez pas la liberté de conscience des élèves.
09:34 Pratiquez jusqu'en 2023 un fichage confessionnel,
09:36 et donc potentiellement ouvrant la voie
09:38 à un traitement discriminatoire.
09:40 Et une partie des programmes, ceux de SVT,
09:42 ceux relatifs à la contraception,
09:44 n'étaient manifestement pas enseignés.
09:46 Or, dans cet établissement qui littéralement piétine
09:48 la loi Debré, le financement public perdure.
09:51 Chaque année, cet établissement reçoit des millions
09:53 et des millions d'euros d'argent public,
09:55 et personne, aucune autorité, ni le préfet,
09:57 ni le conseil régional... - Donc, clairement, vous,
09:59 vous êtes pour retirer le financement public ?
10:00 - Non, je suis pour, dans ce type de circonstances,
10:02 casser le contrat, tirer un certain nombre
10:04 de conséquences de l'observation du fait
10:06 que le contrat n'est pas respecté.
10:08 Mais le contrat, moi, je suis, en vérité, pour le consolider.
10:10 Je suis non seulement pour veiller à son respect,
10:12 mais pour ajouter des conditions au contrat.
10:16 Puisqu'il y a un financement public considérable.
10:18 Plus de 75 % du budget de ces établissements
10:21 vient de fonds publics.
10:22 - Je veux bien comprendre ça, parce que c'est important.
10:24 75 %, l'Etat, les collectivités, c'est ça ?
10:26 - C'est ça, ce sont des fonds qui viennent
10:28 de ces deux provenances.
10:29 - Et le reste, c'est les parents qui payent...
10:31 - C'est les parents, essentiellement.
10:32 Mais ce sont très majoritairement des fonds publics.
10:34 Eh bien, il doit y avoir des contreparties
10:36 à la hauteur de l'importance de ces financements.
10:38 Et je vais vous dire une chose.
10:40 Ailleurs dans les pays de l'OCDE,
10:42 quand la contribution publique est très importante,
10:44 par exemple en Belgique,
10:45 les contreparties sont beaucoup plus fortes.
10:47 En Belgique, les établissements privés sous contrat,
10:49 si on peut utiliser cette expression,
10:51 ils sont, par exemple, sectorisés.
10:53 Ils obéissent à la carte scolaire.
10:55 Ce qui n'est pas du tout le cas en France.
10:57 Ce qui permet à ces établissements privés
10:59 de choisir leurs élèves, de trier les élèves à l'entrée.
11:01 Donc, moi, je suis pour de l'égalité du contrôle,
11:03 de la transparence, de l'égalité de traitement.
11:05 Un principe républicain.
11:06 - Et vous voulez rajouter au contrat
11:08 un principe de mixité ?
11:09 - Là, pour le coup, on partage.
11:11 - Vous êtes d'accord.
11:12 Alors, monsieur Diraison,
11:14 j'imagine que vous trouvez que c'est un rapport légèrement à charge.
11:17 Mais vous allez nous dire déjà sur l'absence de contrôle.
11:19 Parce que c'est frappant.
11:21 Est-ce que sur la question du contrôle,
11:23 vous êtes arrivé à une sorte de calcul un peu ubuesque
11:26 qui dit qu'en gros, un établissement privé
11:28 a une chance d'être contrôlé tous les 1500 ans.
11:30 Est-ce que déjà, sur la faiblesse de ces contrôles,
11:33 de l'Etat, c'est de l'argent, c'est votre argent,
11:35 c'est le mien, c'est celui des contribuables,
11:37 vous avez filmé qu'il y a un vrai sujet ?
11:39 - Alors, c'est pas un rapport légèrement à charge.
11:41 C'est un rapport à charge,
11:43 dont 75 % avaient été écrits par monsieur Vannier
11:45 avant qu'il commence sa mission.
11:47 On n'est donc pas surpris par ce qu'il y a dans ce rapport.
11:49 - Sur les contrôles, pour lancer ce débat.
11:51 - Sur les contrôles, je vous réponds.
11:53 Ce qui est écrit dans ce rapport
11:55 ne concerne pas l'enseignement privé.
11:57 Il concerne l'Etat.
11:59 C'est pas nous qui sommes responsables
12:01 des contrôles qui ne sont pas faits.
12:03 Nous ne nous opposons pas aux contrôles.
12:05 Au contraire, nous les réclamons.
12:07 Donc, c'est pas vers nous qu'il faut se retourner
12:09 pour dire que nous cachons quelque chose
12:11 ou que nous avons envie de cette opacité.
12:13 - Donc, si les contrôles venaient à être renforcés,
12:15 vous dites "très bien".
12:17 - Moi, je n'ai aucun souci avec les contrôles.
12:19 Je voudrais quand même signaler que si les contrôles,
12:21 si une partie des contrôles,
12:23 ceux qui doivent être faits par les directions
12:25 départementales des finances publiques,
12:27 ne sont pas faits, il y a quand même
12:29 un certain nombre d'autres contrôles
12:31 qui sont faits régulièrement,
12:33 totalement occultés par le rapport.
12:35 Je pense notamment aux contrôles
12:37 qui sont faits par les élus des collectivités territoriales
12:39 qui sont invités
12:41 aux organes délibérants
12:43 de nos associations de gestion
12:45 qui arrêtent les comptes.
12:47 Un premier contrôle parfaitement possible.
12:49 Et là, c'est pareil.
12:51 Si les collectivités territoriales ne l'exercent pas,
12:53 ce n'est pas vers nous qu'il faut se retourner,
12:55 mais vers elles.
12:57 Et puis, je parle aussi de la très grande majorité
12:59 de nos grands établissements
13:01 qui sont tous l'objet d'une certification
13:03 de leur compte par des commissaires aux comptes.
13:05 - Très bien, mais vous avez vu
13:07 le rapport de la Cour des comptes ?
13:09 Le rapport de la Cour des comptes ne dit pas exactement ça.
13:11 - Si jamais, effectivement,
13:13 les commissaires aux comptes,
13:15 l'Etat et les collectivités territoriales,
13:17 tout ce monde-là ne fait pas son boulot,
13:19 je n'y suis pour rien.
13:21 - La faute à l'Etat. Je vous redonne la parole,
13:23 mais les députés doivent répondre.
13:25 Christophe Weisberg. Après tout, c'est vrai.
13:27 C'est l'Etat qui a l'obligation
13:29 de contrôler où il est, l'Etat.
13:31 - Moi, je parle de responsabilisation.
13:33 Je ne suis pas là pour stigmatiser qui que ce soit.
13:35 D'ailleurs, vous dites que mon collègue a écrit à 75 %,
13:37 vous pourriez admettre qu'il y a au moins 50 %
13:39 qui émanent de mon écriture.
13:41 - C'est la moindre des choses.
13:43 - C'est la moindre des choses.
13:45 Et qui, au fond, je dirais,
13:47 essaient, au contraire, je crois, de vous protéger.
13:49 Parce que des affaires comme Stanislas
13:51 sont des affaires qui ont
13:53 un impact très négatif
13:55 dans l'opinion publique
13:57 et dans la réputation du réseau.
13:59 Et vous nous l'avez dit en audition,
14:01 parce qu'on a eu des auditions passionnantes avec vous,
14:03 vous avez admis qu'il y avait un certain nombre
14:05 de dysfonctionnements.
14:07 C'est d'ailleurs ces points-là que j'ai précisés dans le rapport.
14:09 Et peut-être qu'il y a
14:11 une nuance dans l'écriture.
14:13 - Vous avez oublié les collectivités locales.
14:15 - Mais j'en parle énormément.
14:17 Les collectivités territoriales, dans mon approche,
14:19 peut-être un peu plus que Paul Vannier,
14:21 elles doivent être au cœur, elles doivent être recentrées
14:23 parce qu'elles ont une responsabilité
14:25 très importante au titre de leurs dépenses.
14:27 Il y a la loi Fallou, par exemple,
14:29 qui vous octroie des financements publics d'infrastructures.
14:31 C'est très important
14:33 que ces collectivités puissent s'engager
14:35 avec un cahier des charges
14:37 et avec un contrat.
14:39 - Après tout, M. Diraison dit très bien.
14:41 Pour l'instant, tout le monde est d'accord.
14:43 - Carole Zerbib,
14:45 j'imagine qu'il est plutôt bienvenu, ce rapport,
14:47 pour l'approviseur et pas l'approviseur adjoint,
14:49 je me corrige, pardonnez-moi, que vous êtes.
14:51 Mais j'aimerais quand même votre regard.
14:53 Vous la voyez, vous, la ruer vers le privé
14:55 à la sortie de l'école primaire,
14:57 face à l'absentéisme,
14:59 ou plutôt au non-remplacement des profs absents,
15:01 parce qu'il existe ce phénomène,
15:03 il faut s'interroger dessus.
15:05 Vous l'observez, notamment à l'entrée des collèges ?
15:07 - Oui, bien sûr.
15:09 - Comment vous l'expliquez ?
15:11 - La concurrence du privé est rude,
15:13 ce qui n'est pas admissible dans le fait
15:15 que l'Etat ne soit pas clair
15:17 dans ce qu'il allie au privé,
15:19 parce que ça pourrait être anecdotique
15:21 que le public se portait bien.
15:23 C'est-à-dire qu'on nous demande,
15:25 et c'est ça, la concurrence du privé pour le public,
15:27 c'est qu'on nous demande toujours de faire mieux
15:29 avec moins ou la même chose.
15:31 Donc c'est compliqué pour nous de rivaliser,
15:35 parce que le public a quand même
15:37 un financement à la fois de l'Etat,
15:39 des familles, des entreprises aussi,
15:41 et qui est donc bien plus important...
15:43 - Le privé ?
15:45 - Oui, le privé, pardon.
15:47 Le privé, je rêve, en fait.
15:49 Et qui est bien plus important
15:51 que ce que le public perçoit.
15:53 - Donc il faut exiger davantage du privé ?
15:55 Ou pourquoi pas même faire des bases communicants ?
15:59 Parce que c'est vrai que 10 à 12 milliards,
16:01 même plus, c'est beaucoup
16:03 à un moment où on cherche de l'argent.
16:05 - Le minimum, ce serait quand même
16:07 qu'on sache exactement combien le privé perçoit.
16:09 Et que si le privé ne respecte pas
16:11 les valeurs de la République,
16:13 puisqu'à partir du moment où on a
16:15 un financement public,
16:17 eh bien on doit respecter les valeurs de la République,
16:19 et bien qu'il y ait des pénalités,
16:21 pourquoi pas des pénalités financières.
16:23 - Alors on vient sur les sanctions,
16:25 sur ce système de malus
16:27 que vous proposez, Paul Vannier,
16:29 que vous ne souhaitez pas, Christophe Herbert-Haisberg,
16:31 mais d'abord, qu'en pensent les enseignants ?
16:33 Ils défilaient aujourd'hui contre la réforme
16:35 sur les groupes de niveau poussés par Gabriel Attal.
16:37 On leur a soumis l'essentiel
16:39 de vos propositions, messieurs.
16:41 Reportage Maïté Frémont.
16:43 - Preuve cet après-midi,
16:45 l'exigence est la même que la vôtre,
16:47 messieurs les parlementaires.
16:49 En finir avec cette opacité,
16:51 et connaître le montant exact des fonds
16:53 publics alloués chaque année
16:55 par l'État aux 7500 écoles privées.
16:57 Magali enseigne
16:59 les lettres classiques dans un lycée de Paris.
17:01 - D'une part, si on donne
17:03 de l'argent public quelque part, il faut que ça soit
17:05 contrôlé. D'autre part, il faudrait que ça soit transparent,
17:07 parce que ça fait quand même partie du budget,
17:09 donc si on pouvait connaître les dotations, par exemple,
17:11 des collèges de notre secteur, ça serait très intéressant
17:13 pour nous. - L'autre sentiment
17:15 partagé ici par les profs du public,
17:17 l'injustice avec ce déséquilibre
17:19 entre public et privé.
17:21 - Ils ont des souris dans les lycées
17:23 en 93, il pleut
17:25 par le plafond. Moi, j'hallucine.
17:27 C'est privatiser
17:29 les profits, socialiser les pertes.
17:31 - Nicolas est prof de maths dans le 93
17:33 depuis deux ans. Il dénonce
17:35 une sélection arbitraire des élèves
17:37 qui sont choisis par les établissements
17:39 privés, selon leur propre critère.
17:41 - On voit bien que prendre de l'argent
17:43 public pour le mettre dans le privé, c'est pas possible.
17:45 Eux, ils peuvent trier leurs élèves à l'entrée.
17:47 Moi, si vous avez
17:49 une tête qui leur revient pas, ils vous prennent même pas.
17:51 Nous, on prend tout le monde.
17:53 - Mickaël est lui prof de maths à Argenteuil.
17:55 Il dénonce le manque de mixité
17:57 sociale au sein du privé.
17:59 - Ça veut dire qu'on donne de l'argent pour
18:01 les classes
18:03 de la bourgeoisie, entre autres.
18:05 Nous, ça fait plus que nous choquer,
18:07 ça nous scandalise. Il faut que
18:09 l'enseignant privé soit payé
18:11 sur fonds privés. - Dans votre rapport,
18:13 vous souhaitez légiférer pour davantage
18:15 de modulation des financements publics,
18:17 en fonction du critère
18:19 de mixité.
18:21 Yann dit raison. Qu'est-ce que vous répondez
18:23 à ces enseignants qui légitimement
18:25 le disent ? Nous, on trime
18:27 et les établissements privés,
18:29 avec de l'argent public, bénéficient de conditions
18:31 bien plus
18:33 acceptables.
18:35 - Je vais d'abord prendre un exemple
18:37 de la France. On a signalé que,
18:39 dans le 93, en Seine-Saint-Denis,
18:41 nous représentons 10 % de la
18:43 scolarisation totale du département.
18:45 Et nous imputer à nous
18:47 le mauvais fonctionnement
18:49 éventuel, si j'entends ce qui est dit,
18:51 des établissements publics est un peu fort de café.
18:53 - Sur la mixité sociale,
18:55 que répondez-vous ? - Sur la mixité sociale,
18:57 ce que nous répondons, nous y avons déjà répondu.
18:59 C'est le protocole que nous avons signé avec le ministre,
19:01 Papel Daï, il y a un an, absolument,
19:03 dans lequel nous nous sommes engagés
19:05 de manière volontaire,
19:07 et que nous commençons
19:09 à appliquer depuis qu'il a été signé.
19:11 - Qui dit quoi, concrètement ?
19:13 - Qui dit, par exemple, que nous nous sommes engagés
19:15 à doubler le taux de boursier,
19:17 à moduler la contribution des familles
19:19 en fonction des revenus,
19:21 à afficher publiquement
19:23 une base de données
19:25 qui permettra de rendre public
19:27 nos tarifs de contribution, les forfaits,
19:29 les subventions des collectivités territoriales...
19:31 - J'ai regardé la Cour des comptes sur les boursiers,
19:33 et j'ai remarqué que si vous doublez,
19:35 vous êtes à 12 % dans le privé,
19:37 vous n'arrivez pas au taux du public,
19:39 qui est à 29 %. - Oui, absolument.
19:41 - Alors, il y a quand même un sujet, là.
19:43 - Non, il n'y a pas de sujet.
19:45 Il y a un sujet de la capacité
19:47 dans notre pays
19:49 à ce que toutes les familles puissent avoir
19:51 la liberté de choix. Ce n'est pas le cas
19:53 aujourd'hui en raison des problèmes de revenus
19:55 et du coût de l'école privée,
19:57 qui est imposé aux parents.
19:59 C'est une des raisons pour lesquelles nous avons
20:01 besoin de faire des investissements.
20:03 - Qu'est-ce que vous répondez, Paul Vannier ?
20:05 - Je dis qu'il y a une ségrégation
20:07 socio-scolaire dans notre pays,
20:09 qu'elle atteint des niveaux records,
20:11 qu'elle est généralisée, qu'elle s'aggrave,
20:13 et que les établissements privés,
20:15 plutôt pour être précis, le financement public
20:17 des établissements privés sous contrat,
20:19 y contribue très largement.
20:21 Et de ce point de vue-là, nous sommes, je crois,
20:23 à la croisée des chemins. Nous pourrions voir
20:25 s'installer peut-être définitivement
20:27 un système à deux vitesses, et je pense
20:29 qu'il faut... - Vous dites qu'il faut pénaliser
20:31 10 000 euros pour chaque élève qui serait sorti.
20:33 - C'est un autre dispositif,
20:35 je peux y revenir. - C'est quoi ?
20:37 - Je pense qu'il faut passer à la loi.
20:39 Les incitations, le protocole Mixité,
20:41 tout ça ne marche pas, tout ça ne fonctionne pas.
20:43 Voire même, le protocole Mixité, il introduit...
20:45 - Il vient d'être mis en oeuvre.
20:47 - Ça fait déjà un certain temps.
20:49 Il introduit un principe qui me paraît être une dérive.
20:51 Il conditionne l'atteinte d'objectifs de Mixité
20:53 à des contributions publiques plus importantes.
20:55 Par exemple, le protocole Mixité,
20:57 c'est l'AMF qui nous a dit ça, ce sont les maires de France.
20:59 Il contribue à augmenter les contentieux
21:01 entre certains établissements et les mairies,
21:03 parce que les établissements disent "Nous, on est prêts à faire
21:05 de la Mixité, mais il faut que vous nous donniez davantage de moyens."
21:07 Là, c'est vraiment une dérive. Si les fonds publics
21:09 permettent d'assurer la Mixité dans les établissements privés,
21:11 il y a quelque chose qui ne va pas. Donc moi, je pense qu'il faut
21:13 un cadre clair pour tout le monde, le même.
21:15 Quand il y a une contribution à la ségrégation,
21:17 il y a des moyens qui sont diminués.
21:19 Je ne dis pas de les retirer, je dis de les diminuer...
21:21 -Vous calculez ça avec l'indice des parents, c'est ça ?
21:23 -Non, l'IPS, l'indice de positionnement social,
21:25 qui est fourni par l'Éducation nationale,
21:27 qui est extrêmement clair.
21:29 C'est un outil robuste qui n'est contesté par personne
21:31 et qui permettrait de faire évoluer le système
21:33 rapidement et efficacement.
21:35 -Sur ce point-là, vous êtes d'accord avec Paul Vannier ?
21:37 -Non, mais on a des variantes.
21:39 Déjà, premièrement, par rapport à un de vos reportages
21:41 que vous avez fait, des enseignants.
21:43 Il n'est pas vrai que les établissements privés
21:45 croulent sous l'or.
21:47 En fait, la réalité, c'est que ce qu'on a observé
21:49 souvent, c'est que les infrastructures
21:51 de ces établissements, elles sont,
21:53 à part les cas qu'on peut mentionner,
21:55 les très grands établissements prestigieux
21:57 à Marseille ou à Paris,
21:59 mais globalement, souvent, elles ont des infrastructures
22:01 qui sont moins bonnes que le public.
22:03 Donc, je ne crois pas qu'on puisse dénoncer
22:05 comme ça le fait, comme le dit ce professeur,
22:07 qu'on finance la précarité des autres,
22:09 on sociabilise les pertes.
22:11 C'est littéralement pas le cas.
22:13 Il y a, je crois, au contraire,
22:15 un besoin d'aller...
22:17 Et que ce système, il se renforce mutuellement.
22:19 Et que les politiques publiques,
22:21 quand on fait une délégation de services publics,
22:23 et c'est le cas de l'école privée,
22:25 ça ne veut pas dire qu'on abandonne la politique.
22:27 -Sur les objectifs de mixité, il faut revoir la loi.
22:29 Ce serait changer le contrat,
22:31 si je comprends bien. Vous êtes d'accord avec ça ?
22:33 Il faut davantage de mixité
22:35 contre la ségrégation produite
22:37 par le système du privé, c'est ce que dit Paul Vannier.
22:39 Ca veut dire qu'il faut donner des objectifs
22:41 à atteindre le pourcentage.
22:43 -C'est un point qu'on n'entend jamais.
22:45 Aujourd'hui, depuis deux ans,
22:47 ça a été lancé par Papendia et ça a été poursuivi,
22:49 il y a 30 % des ressources des enseignants
22:51 qui sont dans les contrats
22:53 qui sont sur un indice d'IPS faible.
22:55 C'est déjà le cas.
22:57 -Vous dites oui, mais pas la contrainte de la loi.
22:59 On fait confiance aux établissements.
23:01 -Ce n'est pas forcément par la loi,
23:03 mais ça peut être par des règlements
23:05 et par des actes administratifs.
23:07 -Carole Zerbier.
23:09 -La mixité, il est fondamental
23:11 que le privé soit soumis aux mêmes règles
23:13 que les établissements publics.
23:15 Monsieur, vous disiez
23:17 que vous alliez prendre davantage d'élèves boursiers,
23:21 mais il s'agirait de ne pas prendre
23:23 les meilleurs élèves boursiers,
23:25 mais tous les élèves boursiers,
23:27 quel que soit leur niveau scolaire.
23:29 Souvent, il nous arrive dans les établissements publics
23:31 des élèves qui ont été rejetés du système privé
23:35 parce qu'ils n'avaient pas de...
23:37 -Parfois, même en cours d'année, ça peut se produire.
23:39 -Souvent en fin d'année.
23:41 -On leur explique qu'ils ne peuvent pas passer
23:43 dans la classe supérieure,
23:45 ou alors on leur recommande fortement
23:47 de quitter l'établissement.
23:49 Ils arrivent dans les établissements publics.
23:51 Vous ne gardez que les meilleurs élèves,
23:53 vous n'avez que les meilleurs élèves,
23:55 et d'où cette concurrence.
23:57 C'est sûr que ce serait facile aussi
23:59 d'avoir que les meilleurs élèves.
24:01 -A partir du lycée, dans les grandes métropoles,
24:03 il faut aussi la même chose.
24:05 C'est sur dossier, maintenant.
24:07 La carte scolaire, c'est fini.
24:09 -Il y a l'IPS à Paris.
24:11 -Il y a aussi des concurrences entre lycées publics.
24:13 -Maintenant, c'est terminé.
24:15 -C'est terminé ?
24:17 -Oui, à l'heure qu'on a tenu depuis deux ans.
24:19 -Qu'est-ce que vous répondez
24:21 sur le rejet des mauvais,
24:23 pour le dire simplement ?
24:25 -Pour les élèves boursiers,
24:27 j'y suis favorable, à condition,
24:29 comme le disait le député Vagnier,
24:31 que le système soit identique pour tous.
24:33 Aujourd'hui, dans un grand nombre de collectivités,
24:35 un élève boursier qui déjeune
24:37 à la cantine, quand il est scolarisé
24:39 dans l'école publique, paye son repas à un euro,
24:41 quand il vient chez nous, il le paye six.
24:43 -Donc, il y a des avantages financiers.
24:45 -C'est la première raison
24:47 pour laquelle les familles
24:49 de ces élèves ne viennent même pas
24:51 frapper à notre porte. Nous n'avons,
24:53 hélas, même pas à les rejeter,
24:55 elles ne viennent pas chez nous,
24:57 parce qu'elles savent qu'elles ne peuvent pas payer chez nous.
24:59 -Vous voyez aussi un phénomène,
25:01 parce qu'on voit quand même qu'il y a une demande
25:03 du privé de plus en plus importante,
25:05 et ce n'est pas seulement des familles les plus aisées,
25:07 même si statistiquement, les chiffres sont là,
25:09 mais il y a aussi des familles
25:11 plus modestes, classe moyenne,
25:13 ça, vous le voyez, inférieures, qui font
25:15 des arbitrages financiers pour placer leurs enfants dans le privé,
25:17 ça existe ? -Il y a un signe de ça,
25:19 c'est que, hélas, depuis deux ans,
25:21 l'IPS moyen des établissements
25:23 catholiques en France
25:25 monte, parce que nous perdons
25:27 les familles les moins favorisées,
25:29 financièrement parlant,
25:31 notamment pouvoir d'achat et crise énergétique
25:33 l'année dernière, on le mesure, hélas.
25:35 -Hélas. Et sur le malus,
25:37 parce que c'est ce que, peut-être, vous pouvez réexpliquer,
25:39 puis vous répondez après, ce que vous voulez faire
25:41 justement pour ces élèves
25:43 qui n'auraient pas le niveau requis pour passer
25:45 souvent au lycée ou dans la classe supérieure ?
25:47 -Moi, je pense aussi
25:49 aux élèves, à leur famille,
25:51 aux élèves scolarisés dans les établissements privés sous contrat,
25:53 et moi, je ne veux pas être comme vous, monsieur,
25:55 dans la caricature, je veux être précis, ils sont divers,
25:57 ces établissements privés, ils ne fonctionnent pas tous
25:59 sur un modèle élitiste, mais certains pratiquent
26:01 un élitisme qui consiste, pour afficher
26:03 des taux de réussite au baccalauréat ou au brevet,
26:05 par exemple, à se débarrasser des élèves en difficulté.
26:07 C'est habillé par des procédures disciplinaires,
26:09 mais c'est à ça que cela revient. Et là, moi, je propose
26:11 de frapper financièrement
26:13 les établissements qui procèdent ainsi par une pénalité
26:15 de 10 000 euros par élève qui serait évincée.
26:17 Et pourquoi cette pénalité ?
26:19 Parce que ces fonds publics qu'on consacre à ces établissements,
26:21 ils contribuent, au fond, à l'effort
26:23 éducatif de la nation. Et bien, l'effort éducatif,
26:25 c'est de prendre en charge tous les élèves, quelles que soient leurs difficultés.
26:27 Et il n'y a aucune raison que les établissements privés
26:29 se débarrassent de la difficulté pédagogique,
26:31 de la difficulté éducative,
26:33 en refourgant, si je peux me permettre l'expression,
26:35 les élèves qui ont des difficultés
26:37 à l'école publique, et qu'en plus,
26:39 ils soient financés. Et monsieur,
26:41 vous disiez, je suis d'accord avec vous,
26:43 tout ne vous revient pas. Le contrôle, c'est l'État.
26:45 La mesure, c'est l'État, c'est les pouvoirs publics.
26:47 Mais là, par contre, c'est la responsabilité
26:49 des établissements qui se rattachent à votre réseau.
26:51 Il y a d'autres réseaux dans l'enseignement privé,
26:53 ils ne sont pas tous rattachés à l'enseignement catholique.
26:55 Mais j'aimerais vous entendre
26:57 sur ce type de pratiques, parce qu'elles sont mesurées
26:59 objectivement par la DEP, par le ministère.
27:01 - Alors on va lui laisser répondre.
27:03 - Qu'est-ce que vous pensez de ce type d'éviction ?
27:05 Est-ce que vous niez le fait qu'elles soient pratiquées ?
27:07 - Je vais répondre. J'ai déjà répondu, d'ailleurs,
27:09 dans les auditions dans lesquelles vous m'avez reçu.
27:11 - Mais nos téléspectateurs n'avaient pas la chance de vous entendre.
27:13 Alors répétez-vous, s'il vous plaît, monsieur.
27:15 - Je vais répondre. Et hélas, monsieur Vénier,
27:17 je vais vous dire que c'est vous qui faites de la caricature.
27:19 Nous avons déjà répondu à cela, que nous considérions
27:21 que ces pratiques n'étaient pas des bonnes pratiques.
27:23 Mais vous utilisez 2, 3, 10, peut-être 20, si vous voulez,
27:27 établissements qui les pratiquent pour jeter l'opprobre...
27:29 - Lesquels ?
27:31 - Pour jeter l'opprobre sur 7 500 établissements en France,
27:35 sans aucune nuance, sans aucune distinction.
27:37 - Moi, je ne les connais pas. Est-ce que vous les connaissez,
27:39 monsieur, ces établissements qui pratiquent ce type ?
27:41 - Non, je ne vous donnerai pas la liste, monsieur Vénier.
27:43 - Philippe Aguillon, c'est intéressant de vous entendre.
27:45 À ce stade, je ne vous donnerai pas la liste.
27:47 - Non, je ne vais pas rentrer dans le débat.
27:49 - Qu'est-ce que vous inspire ce débat ?
27:51 - Je pense qu'on a un grand problème, et mon collègue Jaravelle en a parlé,
27:55 on a une ressource extraordinaire pour la prospérité de ce pays,
27:59 c'est l'intelligence humaine.
28:02 Et on a beaucoup de ce qu'on appelle des "Einsteins" perdus.
28:05 Il y a beaucoup d'enfants très talentueux
28:07 qui viennent de familles très défavorisées,
28:09 et le tout, c'est que le système dans son ensemble
28:11 leur permette d'accéder aux savoirs et aux aspirations
28:15 qui vont leur permettre de devenir des innovateurs,
28:17 des gens qui vont créer du savoir.
28:19 - Et vous trouvez que par rapport au pays que vous connaissez...
28:21 - Voilà, et je pense que le pays dans son ensemble,
28:23 il aura quand même un contrat, un débat national,
28:25 comment le système dans son ensemble peut résoudre,
28:27 peut faire qu'on réduise le nombre de ces "Einsteins" perdus.
28:29 Et c'est vrai que ce qu'il faut, c'est pousser des enfants.
28:31 Moi, je vais beaucoup dans des lycées de zone défavorisée,
28:33 des lycées publics surtout,
28:35 avec le Collège de France, le campus de l'innovation pour les lycées,
28:38 et il y a des intelligences, c'est des gamins formidables,
28:41 et moi, quand je vois des enfants comme ça, je veux les pousser.
28:44 Et je crois que tous, on doit avoir,
28:46 et surtout les catholiques, je pense quand même que...
28:48 Voilà, ça doit être dans vos valeurs quand même.
28:50 - Oui, je pense que tout le monde va se retrouver sur cet objectif.
28:52 - Il y a quand même l'idée de dire "je vois un gamin, il est bon,
28:54 peut-être qu'on ne peut pas payer pour lui,
28:56 mais il est tellement bien, je vais le pousser,
28:58 je vais lui donner les possibilités".
29:00 Et vraiment, parce que c'est notre grande ressource,
29:02 c'est ces intelligences, et on perd beaucoup là-dessus.
29:04 - Alors, est-ce qu'on peut tous se retrouver,
29:06 mais avec une volonté politique derrière ?
29:08 Christophe Herweilsberg, pour terminer, quand on regarde,
29:10 c'est intéressant, on est en train de célébrer Pompidou,
29:12 les 50 ans de sa mort, c'est le seul président
29:14 qui n'a fait que sa scolarité dans le public, tout du long,
29:18 pour terminer la normale sup.
29:20 Tous les autres, et ça dit quelque chose aussi,
29:22 sont passés par le privé.
29:24 Est-ce que cette prise de conscience-là,
29:26 elle existe au plus haut niveau de l'Etat ?
29:28 - Moi, je pense, encore une fois, je vous l'ai dit,
29:30 ce mouvement-là, il a été enclenché il y a deux ans.
29:34 Et quoi qu'on dise, il avait été mis sous le tapis
29:36 pendant les 38 dernières années.
29:38 Et par ailleurs, vraiment, si on regarde ce rapport,
29:40 on se rend compte qu'il y a énormément de propositions
29:42 qui vont dans le sens de la responsabilité de chaque acteur,
29:44 et je sais que vous êtes attaché aussi à ça,
29:46 donc je pense que c'est le moment de s'y mettre, collectivement.
29:50 - Eh bien, écoutez, c'est intéressant,
29:52 parce que là, on a toutes les sensibilités,
29:54 tout le monde est là, sans guerre scolaire ravivée.
29:56 - Voilà, il faut accepter le débat, c'est très important,
29:58 et il faut sortir de l'oberta.
30:00 Donc, il faut regarder en face les choses,
30:02 il faut les prendre avec mesure, et puis chacun,
30:04 c'est le débat démocratique, fait ses propositions,
30:06 il faut pas les mêmer, mais l'important, c'est le débat,
30:08 et moi, je souhaite que notre Assemblée puisse se saisir,
30:10 que la société, à travers ses représentants, puisse se saisir.
30:12 - On va suivre ça de près, le débat va se poursuivre,
30:14 et vous reviendrez si vous le souhaitez, merci.
30:16 On s'arrête là, merci d'être venus sur LCP.
30:19 Vous restez avec moi, Philippe Aguillon.
30:21 Dans une dizaine de minutes, les partis pris de nos affranchis.
30:23 Ce soir, Vincent Huges revient sur la claque électorale
30:26 obligée à Recep Tayyip Erdogan, au municipal en Turquie.
30:30 Des robots recruteurs dans les entreprises,
30:32 on verra ça avec Delphine Sabatier,
30:34 dans son œil sur le numérique,
30:36 et puis au menu de Bourbon Express, ce soir, Stéphanie Despierre ?
30:38 - La future réforme de l'assurance chômage
30:40 qui sème la zizanie au groupe Renaissance et dans le camp présidentiel.
30:43 - Ah, quel programme !
30:45 A tout à l'heure, les amis, mais d'abord,
30:47 on va se pencher sur votre rapport sur l'IA,
30:49 Philippe Aguillon, avec la présidente de l'école normale supérieure,
30:53 Anne Bouvreau, et un collège d'experts extrêmement impressionnant,
30:57 on y reviendra.
30:58 Vous avez travaillé pendant six mois,
31:00 à la demande de l'exécutif,
31:02 pour la révolution technologique fondamentale,
31:04 et vous avez rencontré tous les acteurs.
31:06 Vous en tirez une conclusion,
31:08 si elle est puissamment accompagnée,
31:10 l'IA sera pour la France une opportunité.
31:13 Comment, pourquoi ?
31:14 Interview juste après l'invitation de Marco Pomny.
31:17 Regardez.
31:18 - Si on vous invite, Philippe Aguillon,
31:20 c'est parce que dans la course à l'IA,
31:23 vous tirez la sonnette d'alarme.
31:26 La France est en retard, mais rien n'est perdu.
31:29 C'est la conclusion de votre comité que vous avez présidé,
31:32 avec Anne Bouvreau, présidente du conseil d'administration de l'ENS.
31:36 Six mois de travail, 600 auditions,
31:39 et un rapport de 130 pages, remis à Emmanuel Macron.
31:42 - C'est une révolution qui nous affecte.
31:44 C'est le texte, c'est l'image,
31:46 c'est des choses qui nous touchent de très près.
31:48 C'est une incroyable accélération.
31:50 - Philippe Aguillon, vous êtes une tête bien faite.
31:52 Économiste social-libéral, professeur au Collège de France,
31:56 on retiendra vos travaux sur la théorie de la croissance,
31:59 sur l'économie de l'innovation,
32:01 ouvrage remarqué, le pouvoir de la destruction créatrice.
32:05 - La destruction créatrice, c'est-à-dire les innovations
32:08 qui remplacent les anciennes activités,
32:10 eh bien, ça nous donne la clé de beaucoup de choses.
32:12 - Autrement dit, l'innovation engendre destruction
32:15 et création d'emplois, à l'image de l'intelligence artificielle.
32:19 Régulièrement diabolisée, l'IA, selon vous,
32:22 représenterait un puissant vecteur de croissance,
32:25 plus 400 milliards d'euros d'ici 2030,
32:28 puissant moteur d'emploi aussi.
32:30 - Et on montre que les entreprises qui adoptent l'IA
32:33 créent des emplois par rapport aux entreprises similaires
32:36 qui ne l'adoptent pas.
32:37 - Pourtant, 300 millions d'emplois
32:39 pourraient disparaître en Europe et aux Etats-Unis
32:42 à cause des IAs génératives.
32:44 Et les inquiétudes sociales sont déjà là,
32:46 comme pour les scénaristes d'Hollywood en grève l'année dernière,
32:49 la peur d'être remplacées bientôt par Chajipiti.
32:53 Alors vous faites des propositions.
32:55 Vous demandez au gouvernement de sortir le chéquier.
32:58 25 milliards d'euros d'investissement sur 5 ans
33:01 pour faire de la France un leader de l'IA
33:03 derrière les Etats-Unis et la Chine.
33:06 Ce soir, Philippe Aguion, nous avons une question pour vous.
33:09 A quoi peut-on comparer la révolution
33:11 de l'intelligence artificielle dans l'histoire ?
33:14 - Réponse ?
33:16 - On la compare évidemment aux grandes révolutions
33:19 qui ont précédé, la machine à vapeur, l'électricité
33:22 et la révolution des technologies de l'information.
33:25 C'était trois grandes révolutions.
33:27 A chaque fois, il y a eu la crainte
33:29 que ça créait du chômage de masse.
33:31 En fait, ça a généré de l'emploi et de la croissance.
33:34 - On va y venir dans le détail.
33:36 D'abord, comment avez-vous travaillé ?
33:38 J'ai été frappée de voir des noms aussi prestigieux
33:41 que Yann Lequin, le chercheur français
33:43 que tout le monde nous envit, qui est à Meta,
33:46 ou le jeune Arthur Mensch, la pépite française de l'IA,
33:49 avec Mistral, l'IA générative.
33:51 Est-ce que ça change la réflexion de l'économiste que vous êtes
33:54 que de travailler avec ces gens-là ?
33:56 - Absolument. Au début, je vais avouer
33:58 que je connaissais rien à l'IA.
34:00 Je savais à peine utiliser mon téléphone portable.
34:03 - On part de loin. - Je viens de très loin.
34:06 J'étais paniqué au départ.
34:07 Je n'arriverais jamais à coprésider
34:09 une commission sur l'intelligence artificielle.
34:11 J'ai appris énormément, évidemment,
34:13 en échangeant avec, en lisant,
34:15 beaucoup de travaux
34:17 et en interagissant avec ce groupe formidable.
34:20 On s'est réunis 25 fois, disons, en plénière hebdomadaire.
34:24 Il y avait évidemment des auditions.
34:26 - Vous avez même mis en place une plateforme interactive.
34:29 Le grand public se focalise toujours sur l'IA générative,
34:32 ChatGPT, qui produit des textes et des images,
34:35 mais vous, vous dites que c'est une avancée de plus,
34:38 l'IA générative, dans un mouvement de fonds
34:40 qui a commencé il y a des dizaines d'années.
34:42 - Absolument, avec le machine learning.
34:44 Là, ça a été une accélération.
34:46 C'est vrai qu'on dit, par exemple,
34:49 Netflix a fallu deux ans et demi
34:51 pour atteindre un million de souscripteurs,
34:53 ChatGPT, cinq jours.
34:55 C'est une extraordinaire accélération,
34:57 l'IA générative, évidemment,
34:59 et elle permet de créer du texte,
35:01 de créer de l'image,
35:03 mais c'est une accélération...
35:05 - D'un mouvement plus ancien. - Absolument.
35:07 - On rentre dans le détail.
35:09 Il y a quand même un vent d'optimisme
35:11 qui traverse votre rapport.
35:13 La France, champion de l'IA, pour vous,
35:15 c'est pas trop tard, réellement.
35:17 Vous avez les moyens de cette ambition-là ?
35:19 - Absolument, parce que nous disposons d'atouts.
35:21 On a d'excellents mathématiciens,
35:23 ingénieurs,
35:25 donc on a vraiment des données.
35:27 Vous savez, pour faire de l'IA,
35:29 il faut de la donnée,
35:31 et c'est en procédant de la donnée
35:33 qu'on produit de l'IA.
35:35 - La question de l'open source est fondamentale.
35:37 - Notamment, on a des très bonnes données de santé.
35:39 On est l'un des pays qui a
35:41 les meilleures données de santé.
35:43 Donc on a vraiment de quoi faire
35:45 avec de très bons atouts
35:47 pour vraiment être des acteurs
35:49 qui comptons mondialement.
35:51 - Parce que je te dis,
35:53 les géants de l'IA générative
35:55 que sont Jadipiti et ses concurrents,
35:57 ce sont les Américains.
35:59 Alors on a Mistral, mais est-ce qu'il faut avoir
36:01 un palier technologique
36:03 comme cette intelligence générative
36:05 pour compter, ou pas forcément ?
36:07 - Non, parce qu'on peut avoir...
36:09 L'IA, c'est toute une chaîne.
36:11 Il y a les puissances de calcul.
36:13 Il faut qu'on ait la puissance de calcul
36:15 nous-mêmes, mais il y a des applications
36:17 de l'IA. Dans toute une série
36:19 d'applications, là, on peut vraiment...
36:21 On peut vraiment, déjà, dès maintenant,
36:23 jouer un rôle important.
36:25 - La crainte, c'est toujours la même
36:27 à chaque révolution technologique,
36:29 c'est la casse sociale. On l'a vu
36:31 avec l'affaire Onclusive,
36:33 tous ces salariés qui faisaient du traitement
36:35 de revues de presse,
36:37 qui regardaient la veille des médias,
36:39 ces métiers, ils ont disparu.
36:41 Avec l'IA remplacé par des robots.
36:43 Et vous, vous nous dites "non, non,
36:45 il n'y aura pas un chômage de masse
36:47 à l'horizon". La question, c'est plus
36:49 la transformation de certains métiers
36:51 que leur disparition. - Voilà. Un métier,
36:53 c'est un ensemble de tâches.
36:55 Donc l'IA va remplacer certaines tâches.
36:57 Mais, alors, évidemment, il y a des métiers,
36:59 la plupart des métiers, ça va
37:01 automatiser des tâches, souvent rébarbatives,
37:03 et ça va laisser davantage de temps
37:05 pour la créativité.
37:07 Mais il y a certains emplois
37:09 dans lesquels pratiquement toutes les tâches
37:11 vont être remplacées. Ça fait très dur
37:13 d'être doubleur de film.
37:15 Il y a des séries de métiers
37:17 qui vont devoir être en tout cas
37:19 repensés fondamentalement avec l'IA.
37:21 Donc, globalement,
37:23 notre étude montre que les entreprises...
37:25 - Comment vous êtes parvenue à cette étude-là ?
37:27 Parce qu'elle est d'ampleur pour dire
37:29 que les entreprises qui adoptent l'IA
37:31 créent davantage que les entreprises qui ne l'adoptent pas.
37:33 - Voilà. Elle crée davantage.
37:35 On compare des entreprises qui adoptent l'IA
37:37 et qui sont similaires en tous points,
37:39 en toutes caractéristiques, mais qui n'ont pas adopté l'IA.
37:41 On voit que celles qui ont adopté l'IA,
37:43 en tout cas sur une période de 3-4 ans,
37:45 c'est les données dont on dispose,
37:47 sont nette créatrice d'emplois.
37:49 Globalement, ça ne veut pas dire
37:51 uniformément sur tous les emplois.
37:53 Il y a certains emplois, plus des emplois
37:55 plus administratifs en bas,
37:57 qui sont eux davantage remis en cause.
37:59 Mais globalement, c'est net créateur d'emplois.
38:01 - C'est la fameuse destruction créatrice des subventions.
38:03 - La raison, c'est que ces entreprises
38:05 deviennent plus productives.
38:07 Et comme elles sont plus productives,
38:09 elles deviennent plus compétitives.
38:11 Et donc, il y a un marché plus grand pour leurs produits.
38:13 Et donc, elles embauchent davantage.
38:15 - L'IA le détruit.
38:17 - Cet effet de productivité l'emporte globalement.
38:19 Mais quand même, néanmoins,
38:21 il y a des emplois qui doivent être repensés.
38:23 Et donc là, il faut qu'il y ait
38:25 un système d'éducation, de formation,
38:27 une organisation du marché du travail
38:29 qui permette aux individus de rebondir,
38:31 de repenser leur métier, de rebondir sur autre chose.
38:33 - Vous allez nous dire d'ailleurs
38:35 ce que vous proposez dans tous les domaines,
38:37 aussi bien de l'investissement public massif
38:39 que de la formation à tous les échelons de la vie,
38:41 d'une certaine manière.
38:43 C'est vrai qu'on dit souvent
38:45 les grandes révolutions industrielles,
38:47 les grandes révolutions technologiques,
38:49 elles viennent fragiliser les travailleurs peu qualifiés.
38:51 Est-ce que c'est le cas avec l'IA ?
38:53 Est-ce que là, on n'est pas dans quelque chose
38:55 d'un peu différent, où c'est le travail plus qualifié
38:57 qui est menacé ?
38:59 - Absolument, ça touche également des franges plus qualifiées.
39:01 - Le chercheur que vous êtes, par exemple,
39:03 qui travaille avec du texte, ou la journaliste que je suis.
39:05 - Absolument, mais des jeunes avocats,
39:07 quand vous commencez comme avocat, au début,
39:09 on vous fait faire des tâches un peu plus...
39:11 Mais vous démarrez comme ça, quand vous êtes stagiaire
39:13 dans un cabinet d'avocats,
39:15 et ça, c'est des tâches que souvent l'IA va être capable de faire.
39:17 Donc comment va se passer la carrière d'un avocat
39:19 quand vous introduisez l'IA ?
39:21 Donc c'est une vraie question.
39:23 - On va regarder. Vous avez, au fond,
39:25 créé une forme de camembert
39:27 en répartition par pourcentage
39:29 les investissements publics qu'il faut faire.
39:31 On va les voir s'afficher.
39:33 J'aimerais que vous nous commentiez les choses.
39:35 45 % de ces 27 milliards sur 5 ans
39:37 que vous préconisez...
39:39 Alors, on va venir aux économies après,
39:41 qu'on cherche, hein, parce que 27 milliards,
39:43 on se dit "ouh là là, c'est pas le moment".
39:45 Mais déjà, sur la répartition,
39:47 l'argent public doit aller massivement
39:49 dans les technologies, dans l'innovation,
39:51 dans les entreprises, c'est ça ?
39:53 - Absolument, c'est-à-dire,
39:55 c'est à la fois permettre de...
39:57 Donc, à des entreprises d'IA
39:59 de se développer,
40:01 et puis c'est, en même temps,
40:03 de diffuser l'IA dans l'ensemble du tissu économique.
40:05 C'est ça que je cherche à faire.
40:07 C'est pour ça qu'on a 5 fois 5 milliards,
40:09 et évidemment, le privé
40:11 doit mettre un coup.
40:13 Donc, il y a, évidemment, l'investissement,
40:15 il nous faut la puissance de calcul,
40:17 parce que là, pour le moment, on repose trop
40:19 sur la puissance de calcul américaine,
40:21 ce qui n'est pas bon, même pour l'environnement.
40:23 C'est important d'avoir localement
40:25 les données. - Voilà. Et il faut un meilleur
40:27 accès aux données. Alors, sur l'accès aux données,
40:29 on pense, par exemple, que les chercheurs
40:31 dans le domaine de la santé,
40:33 ils doivent à chaque fois demander des autorisations préalables
40:35 de la CNIL. Eh bien,
40:37 nous, nous sommes d'abord pour que la CNIL
40:39 ait des missions étendues, donc on est pour renforcer
40:41 la CNIL, la Commission nationale
40:43 des formations et libertés, et pour
40:45 qu'elle ait une mission d'innovation, en plus de toutes
40:47 les missions qui lui sont déjà imparties,
40:49 et que, par ailleurs, quand un chercheur
40:51 veut utiliser des données de santé
40:53 pour sa recherche, il puisse le faire
40:55 sans autre autorisation. - Il puisse susciter l'exception d'IA, c'est ça que vous avez...
40:57 - Qu'il n'y ait pas besoin d'autorisation préalable.
40:59 - La fameuse exception d'IA qui est dans le rapport.
41:01 - Alors, l'exception d'IA, c'est ça et autre chose.
41:03 C'est également le fait que les chercheurs
41:05 en IA, parce que beaucoup de chercheurs vont dans le privé,
41:07 parce que c'est plus attrayant,
41:09 eh bien de dire, voilà, il faut une carrière,
41:11 donc l'accès aux données, accès à la puissance
41:13 de calcul, des bons salaires,
41:15 voilà, qu'il y ait... Alors, ça ne veut pas dire
41:17 que c'est à prendre sur le reste des chercheurs,
41:19 c'est peut-être pilote, je dirais peut-être pilote
41:21 plutôt qu'exception, que les chercheurs
41:23 en IA, dans le public, puissent avoir une carrière.
41:25 - Et les incitations.
41:27 - Et donc c'est à la fois les données, la puissance de calcul,
41:29 les conditions de travail et le salaire,
41:31 évidemment. - Il va falloir que tous nos services
41:33 publics s'y mettent également ? 35%
41:35 d'investissement au service du citoyen ?
41:37 - Absolument, il faut réformer l'État, vous savez
41:39 qu'on parle beaucoup de réforme de l'État,
41:41 eh bien, voilà, il faut introduire l'IA.
41:43 Voilà, comment on peut faire que Pôle emploi
41:45 fonctionne mieux, comment on peut faire en sorte
41:47 qu'il y ait moins le millefeuille administratif,
41:49 comment on le réforme, on pense que l'IA
41:51 peut permettre le suivi des chômeurs,
41:53 voilà, comment on peut se concentrer
41:55 sur les cas difficiles et traiter
41:57 facilement les cas faciles, on pense que l'IA
41:59 dans tous ces domaines-là peut
42:01 permettre, peut vraiment améliorer
42:03 le fonctionnement de l'État. - Et vous dites quoi alors
42:05 à Bruno Le Maire, qu'il vous dit "c'est pas le moment, regardez,
42:07 nos finances publiques sont dans le rouge, vous réclamez
42:09 25 milliards d'euros sur 5 ans,
42:11 on cherche déjà 20 milliards pour l'année prochaine".
42:13 - Oui, mais alors je réponds à Bruno Le Maire que, en fait,
42:15 il ne faut pas mettre toutes les dépenses sur le même plan,
42:17 il y a les dépenses de fonctionnement, on a fait la réforme des retraites
42:19 l'an dernier, il y a certainement une réforme
42:21 de l'État, il y a certainement, les collectivités
42:23 territoriales ont créé 50 000 emplois
42:25 de fonctionnaires, peut-être que ce n'était pas indispensable
42:27 qu'elles créent 50 000 emplois, il y a certainement
42:29 des économies qu'on peut faire, il y a des duplications,
42:31 il y a ce qu'on appelle le fameux millefeuille
42:33 territorial, on ne s'est jamais délégué
42:35 à des échelons inférieurs et on garde
42:37 toujours les compétences en haut, donc je pense
42:39 qu'il y a vraiment, on peut faire
42:41 des économies sur les dépenses de fonctionnement...
42:43 - Il y a un point qui l'en coûte sur l'IA pour la croissance de demain, c'est ça ?
42:45 - Voilà, mais pourquoi ? Parce que
42:47 il faut investir dans la croissance
42:49 et l'IA est un outil pour ça
42:51 parce que l'IA, c'est minimum
42:53 1% de croissance pendant 10 ans,
42:55 donc il y a vraiment un retour sur investissement,
42:57 donc il ne faut pas sacrifier l'IA dans les économies
42:59 qu'on veut faire, parce que l'IA va augmenter
43:01 notre croissance et notre capacité
43:03 à rembourser notre dette à long terme.
43:05 - Alors vous dites aussi, et c'est ma dernière question, qu'il faut investir
43:07 massivement dans la filière européenne
43:09 de composantes semi-conducteurs pour
43:11 concurrencer le géant TSMC
43:13 taïwanais, ça c'est fondamental,
43:15 vous y croyez vraiment ?
43:17 On n'a pas encore, là de plus, une longueur de retard ?
43:19 - Je pense que non, parce que
43:21 l'IA, ça évolue très vite, et donc
43:23 on peut être les meilleurs
43:25 de la prochaine étape, je crois qu'il faut toujours
43:27 anticiper l'étape d'après, et on peut être
43:29 très fort dans l'étape d'après. - Et la régulation,
43:31 la gouvernance, est-ce que, là encore,
43:33 il en faut une, et à quel échelon ? Est-ce qu'on ne va pas se lier les mains
43:35 en régulant en Europe et en Chine,
43:37 là où les autres ne le font pas ?
43:39 - La régulation de l'interprétation, je crois, sur l'IA,
43:41 il existe, et nous,
43:43 il faut qu'on l'interprète d'une manière qui
43:45 - ne freine pas la recherche et l'innovation.
43:47 - Il faut protéger les personnes, évidemment,
43:49 mais en même temps, ne pas freiner la recherche,
43:51 parce que, par exemple, dans le domaine de la santé, il va y avoir des grandes
43:53 innovations, on va guérir des cancers,
43:55 on va faire plein de choses, l'IA va
43:57 aider énormément à faire ses progrès beaucoup plus
43:59 vite, et donc si on bloque l'accès
44:01 aux données, eh bien, on bloque l'innovation.
44:03 - Merci beaucoup, merci, Philippe Aghion.
44:05 Attention, le trop de régulation qui
44:07 freine la recherche, mais on a des atouts.
44:09 Je garderai cette conclusion. Merci, Philippe Aghion.
44:11 Je revois, évidemment, à votre
44:13 rapport qui est en ligne, tous les citoyens
44:15 peuvent s'en emparer
44:17 allègrement. Vous restez
44:19 avec moi, c'est l'heure des Affranchis, pour les
44:21 partis pris. On les accueille tout de suite.
44:23 (Générique)
44:32 - Et bonsoir, les Affranchis. - Bonsoir.
44:34 - Vincent Hugueux, pour l'International, qui va nous parler
44:36 de cette claque électorale en Turquie
44:38 pour Erdogan dans un instant, mais on va
44:40 commencer par poursuivre, en quelque sorte,
44:42 la discussion, Philippe Aghion, avec
44:44 vous, Delphine Sabatier de Mitbismarck.
44:46 Bonsoir à vous. Vous voulez nous
44:48 alerter sur la question
44:50 qui va se poser en matière
44:52 d'intelligence artificielle au
44:54 travail. - Oui, ça commence
44:56 dès le recrutement. Si vous cherchez
44:58 un emploi, il y a une
45:00 probabilité pour que votre premier contact
45:02 soit avec un chatbot, donc un logiciel qui est là
45:04 pour converser avec vous.
45:06 On se retrouve parfois à répondre
45:08 comme ça à des questions qui ont déjà été
45:10 préparées par des logiciels.
45:12 On est face, finalement, à des IA qui vont
45:14 classer ce qu'on dit,
45:16 filmer ce qu'on dit, tout enregistrer, plutôt que
45:18 face à un responsable des ressources
45:20 humaines, réellement humain.
45:22 Alors, il arrive même que ces intelligences
45:24 artificielles soient à l'origine de l'annonce,
45:26 pas seulement pour les rédiger, mais même
45:28 pour prédire quels sont les besoins
45:30 en termes de recrutement de l'entreprise.
45:32 Tout le monde n'adhère pas
45:34 encore à ce type de pratiques pour
45:36 les recrutements, parce que ça pose des questions
45:38 de biais sur les choix, et puis
45:40 ça pose des questions aussi, j'ai envie
45:42 de dire, d'égalité d'accès à l'emploi,
45:44 et puis d'humanité dans le
45:46 processus. - En matière de management, aussi,
45:48 il y a de l'algorithme dans l'air ?
45:50 - Alors, absolument. Il y a
45:52 aussi, une fois qu'on est intégré, quand on arrive
45:54 la première fois en entreprise, il y a maintenant
45:56 des packages d'onboarding
45:58 qui, en fait, vous confient
46:00 une sorte de premier collègue
46:02 qui va être là pour s'assurer que tout se passe
46:04 bien à l'arrivée de votre...
46:06 à l'arrivée à votre bureau,
46:08 et qui va alerter le RH
46:10 si besoin, sinon il n'aura pas le temps.
46:12 Ce management algorithmique,
46:14 c'est quand, carrément, on délègue des décisions
46:16 automatiques, finalement,
46:18 à des IA, à des logiciels.
46:20 Quand ils sont en pilotage automatique
46:22 comme ça, ça pose la question, quand même,
46:24 des critères qui leur permettent de prendre
46:26 ces décisions. Quand il s'agit d'un planning
46:28 horaire, par exemple, ça ne choque personne,
46:30 mais parfois, la machine s'emballe
46:32 parce que ces IA, finalement, elles évoluent en fonction
46:34 du temps, des critères, de ce qui
46:36 se passe dans l'entreprise, et
46:38 on arrive à des situations où, finalement,
46:40 les collaborateurs ne comprennent plus très bien
46:42 pourquoi telle ou telle décision
46:44 est prise. Ça peut couper un lien de
46:46 communication important dans
46:48 l'entreprise, et on peut arriver à des
46:50 situations un peu dans l'impasse.
46:52 Ce management algorithmique, juste pour qu'on ait
46:54 une idée de où ça se passe
46:56 principalement aujourd'hui, les chauffeurs,
46:58 les livreurs, pour les grandes
47:00 plateformes numériques, subissent
47:02 ce management algorithmique au quotidien.
47:04 Il est sombre, le tableau que vous nous écrivez.
47:06 C'est ça, l'avenir du travail ?
47:08 En tout cas, ce que
47:10 j'aimerais qu'on prenne,
47:12 et ce à quoi il faut absolument réfléchir,
47:14 c'est que s'il y a une urgence à maîtriser
47:16 ces outils d'intelligence artificielle,
47:18 s'il y a une urgence économique pour les entreprises
47:20 à les adopter,
47:22 il est aussi important de ne pas aller
47:24 trop vite, parce que là on est face à une technologie
47:26 avec un impact considérable.
47:28 Donc il faut se poser les bonnes questions,
47:30 et il faut considérer quels sont
47:32 les effets, y compris
47:34 non attendus d'ailleurs, de ces IA
47:36 pour ceux qui travaillent avec, mais aussi
47:38 tous ceux qui en dépendent.
47:40 Donc, comment on fait
47:42 pour anticiper
47:44 toutes ces transformations du travail ?
47:46 Parce qu'on est face à deux rythmes très différents.
47:48 Il y a la technologie qui a un rythme effréné
47:50 dans l'IA, toutes les semaines ça bouge.
47:52 Et puis ce temps du dialogue
47:54 social, humain, qui est beaucoup plus...
47:56 La concordance des temps.
47:58 Alors nous, on insiste beaucoup sur le fait que l'IA doit être
48:00 mise au service du dialogue social.
48:02 La France est d'ailleurs en retard par rapport
48:04 aux Allemands, en Scandinave, on est mauvais en dialogue
48:06 social, on ne sait pas faire.
48:08 Et on pense, souvent, les partenaires sociaux
48:10 ne sont peut-être pas informés comme ils le devraient
48:12 des problèmes techniques
48:14 ou de la stratégie de l'entreprise.
48:16 Et nous, on pense que l'IA
48:18 peut permettre aux partenaires sociaux
48:20 d'être beaucoup plus vite informés, mieux informés.
48:22 Et donc, peut être un outil
48:24 qui stimule le dialogue social.
48:26 - A condition qu'il ait le dernier mot.
48:28 C'est pas le robot qui remplace le syndicat.
48:30 - Absolument pas.
48:32 Et l'idée, c'est que l'IA doit pas remplacer,
48:34 l'IA doit être un outil qui s'occupe
48:36 des tâches rébarbatives et qui laisse
48:38 les gens être plus créatifs.
48:40 Mais qui aussi permet vraiment, souvent, les partenaires sociaux
48:42 dont, voilà, ils doivent
48:44 être mis au courant des sujets, ils doivent être capables
48:46 de co-gérer. Vous savez, en Allemagne,
48:48 il y a la co-gestion. Et bien moi, je pense
48:50 que l'IA peut aider à ce que
48:52 la France aussi aille vers la co-gestion.
48:54 - D'ailleurs, est-ce que les entreprises...
48:56 - Avec cette question du ralentissement de la technologie,
48:58 du coup, dans l'entreprise. - Oui, les entreprises
49:00 le font, c'est-à-dire qu'ils négocient
49:02 avec les partenaires sociaux avant de mettre le management
49:04 algorithmique ou pas ?
49:06 - Quand on est avec des grandes plateformes
49:08 américaines, non. Aujourd'hui,
49:10 en France, il y a quand même l'Anact,
49:12 l'agence nationale, qui travaille
49:14 sur ces sujets et qui expérimente des choses
49:16 en matière de dialogue social face aux technologies.
49:18 - Alors, on montre dans le rapport que l'IA...
49:20 Enfin, il y a eu des expériences qui ont fait très micro,
49:22 au niveau d'une entreprise,
49:24 a pu augmenter
49:26 la satisfaction des employés
49:28 et des clients.
49:30 Par exemple, des entreprises qui conseillent sur le software,
49:32 sur les logiciels.
49:34 Et l'IA permet d'accomplir
49:36 plus de tâches en un temps donné
49:38 et ça soulage les employés.
49:40 Et ça accroît la situation.
49:42 - Il faut prendre le bon chemin. Il y a le vertueux
49:44 et le vicieux.
49:46 - L'idée, c'est de qualifier ses employés.
49:48 Moi, je gère un centre de recherche,
49:50 je veux que les gens chez moi se qualifient
49:52 et rebondissent.
49:54 Et je crois que l'IA peut être un outil
49:56 dans cette direction.
49:58 - Vincent, on va enchaîner avec vous.
50:00 Une raclée. Vous nous parlez
50:02 d'une raclée infligée au président turc.
50:04 - Ah oui, pour une raclée, c'est une raclée.
50:06 La pire débâcle électoral
50:08 essuyée par l'AKP, le parti de la justice
50:10 et du développement du président Recep Tayyip Erdogan
50:12 depuis son accession aux manettes
50:14 en 2002. Voyons, entre la réélection
50:16 de son champion, voilà moins d'un an,
50:18 et le scrutin municipal de dimanche,
50:20 la formation islamo-conservatrice
50:22 a perdu plusieurs millions de suffrages.
50:24 Orateur Tony Truant, Erdogan
50:26 aura donc frôlé l'extinction de voix.
50:28 Non content de garder dans son escarcelle
50:30 les mairies d'Ankara et d'Istanbul,
50:32 le parti républicain du peuple,
50:34 ou CHP, d'obédience sociale
50:36 démocrate et laïque, a triomphé
50:38 à Izmir, à Adana, à Antalya,
50:40 mais rafle aussi la métropole industrielle
50:42 de Bursa, classée parmi les fiefs
50:44 du sultan Erdogan. Mieux,
50:46 il taille des croupières à l'AKP jusqu'au fin fond
50:48 de provinces anatoliennes,
50:50 acquises jusqu'alors au pouvoir. Au bullying,
50:52 on appelle ça un strike. - Alors, quels sont
50:54 les facteurs d'un revers
50:56 de cette ampleur ? - On en retiendra trois.
50:58 D'abord, l'inflation, 67% sur un an,
51:00 tant elle ronge le pouvoir d'achat
51:02 des plus humbles, quitte à fissurer le socle
51:04 électoral de l'AKP. Ensuite,
51:06 l'irruption sur l'avancène du Yéniden-REFA,
51:08 un petit parti islamiste
51:10 qui tente à déborder la mouvance
51:12 erdoganiste sur sa droite,
51:14 ses cibles qu'il eut crues, la communauté
51:16 LGBT, les féministes, le taux d'intérêt
51:18 que les musulmans rigoristes assimilent
51:20 à l'usure proscrite par le Coran,
51:22 mais aussi et surtout le maintien
51:24 des échanges commerciaux entre la Turquie
51:26 et Israël, et ce, en dépit du carnage
51:28 punitif infligé aux frères palestiniens
51:30 dans la bande de Gaza. Troisième facteur,
51:32 l'aura du très charismatique maire
51:34 CHP d'Istanbul, Ekrem Imamoglu,
51:36 triomphalement réélu et propulsé
51:38 de fait dans le fauteuil de Challenger
51:40 numéro 1 à l'horizon
51:42 2028, la date de la prochaine
51:44 présidentielle. - C'est la fin de partie
51:46 pour Erdogan ? - Alors, n'anticipons pas,
51:48 il reste reis turc, 4 ans
51:50 de mandat et plus d'un tour dans sa
51:52 besace. Touché mais pas coulé.
51:54 Pourquoi pas ? Scénario improbable, il est vrai,
51:56 une révision de la Constitution, laquelle
51:58 lui interdit en l'Edat de briquer
52:00 un troisième quinquennat. Mais,
52:02 il y a un hic. Si elle détient
52:04 plus de la moitié des sièges du Parlement,
52:06 l'alliance scellée par l'AKP
52:08 et le MHP, un parti d'extrême droite,
52:10 n'atteint pas la majorité qualifiée
52:12 et requise pour bricoler une loi fondamentale
52:14 sur mesure. Erdogan, convenons-en,
52:16 a réagi avec un fair-play inattendu
52:18 aux cinglants revers et essuyés dans
52:20 les urnes. Tout porte à croire qu'il s'échinera désormais
52:22 à cultiver, sur un registre ultranationaliste,
52:24 sa stature de capitaine dans la tempête,
52:26 haro sur les terroristes kurdes
52:28 du PKK, gare au péril
52:30 qui guette une Turquie placée au coeur d'une région
52:32 incandescente et retour dans une arène
52:34 où, nostalgique du rayonnement de l'Empire
52:36 ottoman, le timonier moustachu
52:38 prête à en jouer les médiateurs de l'Ukraine
52:40 à Gaza. C'est à ce prix que
52:42 Teflon Taïp, ainsi surnommé pour son
52:44 aptitude à résister à toutes les avanies,
52:46 pourra conjurer le spectre d'un long
52:48 crépuscule politique, gérer le déclin,
52:50 perdre la main, sentir s'étioler
52:52 la toute-puissance passée pour
52:54 insultant cet insultant.
52:56 - Merci. Très bonne chute.
52:58 Ça reste une forme de démocratie, en tout cas.
53:00 C'est assez remarquable.
53:02 - Malgré les tentatives de baïonner la presse,
53:04 la justice, etc., il y a une
53:06 altérité. La preuve. - Merci
53:08 beaucoup, Vincent. On va garder un peu de temps
53:10 pour que vous puissiez réagir à Bourbon Express,
53:12 la petite comme la grande histoire du jour
53:14 à l'Assemblée. Tout de suite.
53:16 (Générique)
53:22 - Bonsoir Stéphanie Despierre.
53:24 - Bonsoir. - Vous nous parlez ce soir d'une
53:26 réforme qui passe mal, c'est ça, dans la majorité ?
53:28 - Oui, je vous raconte comment Gabriel Attal
53:30 essaye d'éteindre le feu qui couvre dans sa majorité
53:32 sur l'assurance-chômage.
53:34 Ce matin, il était à la réunion du groupe Renaissance.
53:36 En terrain très glissant,
53:38 la réforme de l'assurance-chômage
53:40 est plus sensible encore que le débat
53:42 sur les impôts, insistait un député
53:44 à la sortie de la réunion.
53:46 Interview, tribune dans la presse, depuis les annonces
53:48 de Gabriel Attal mercredi dernier,
53:50 des voix s'élèvent et non des moindres pour s'opposer
53:52 à toute nouvelle modification des règles.
53:54 Écoutez la présidente de l'Assemblée nationale.
53:56 - Nous avons déjà réduit
53:58 la durée d'indemnisation.
54:00 Il me semble qu'il n'est pas forcément
54:02 de bonne méthode de réformer aussi rapidement
54:04 à nouveau un point majeur
54:06 sans qu'on ait pu regarder
54:08 ni les effets
54:10 produits par la précédente réforme
54:12 ni qu'on ait pu l'évaluer.
54:14 - Il faut dire que la précédente réforme
54:16 date seulement de l'automne 2023.
54:18 L'aile gauche de Renaissance
54:20 est vendeboue.
54:22 Son chef de file, Sacha Thiel,
54:24 a expliqué ce week-end
54:26 qu'il ne faut pas faire de mesures
54:28 d'économie sur les chômeurs.
54:30 Ce n'est pas la bonne voie.
54:32 Et ce matin, plusieurs macronistes
54:34 de la première heure sont montés au créneau.
54:36 Marc Ferracci, Astrid Panossian-Bouvet,
54:38 Clément Born, l'ancien ministre.
54:40 L'ancienne Première ministre, Elisabeth Borne.
54:42 L'ancien ministre du Travail, Olivier Dussopt,
54:44 qui avait mené la précédente réforme,
54:46 n'était pas là.
54:48 Une absence qui en dit long selon un participant.
54:50 - Comment le Premier ministre,
54:52 a-t-il réagi lors de cette réunion de groupe
54:54 à huis clos ?
54:56 - La seule parole qui parle de cette réforme
54:58 comme d'une mesure d'économie,
55:00 c'est "toi, Sacha, ni moi,
55:02 ni les membres de mon gouvernement
55:04 n'ont utilisé ces mots".
55:06 Le Premier ministre jure donc que non,
55:08 ce n'est pas une question d'économie.
55:10 Le député Mathieu Lefebvre,
55:12 qui met en avant les 340 000 offres d'emploi
55:14 non pourvues, permet d'y voir un peu plus clair.
55:16 - Elle aura des conséquences budgétaires,
55:18 c'est indéniable, mais ce n'est pas son objectif.
55:20 On ne fait pas la guerre aux chômeurs,
55:22 on fait la guerre au chômage.
55:24 Si on a un taux d'emploi qui est plus important demain
55:26 qu'aujourd'hui, on aura plus de rentrées d'impôt sur le revenu,
55:28 plus de cotisations sociales et ce sera meilleur
55:30 pour nos finances publiques, mais ce n'est pas l'objectif premier.
55:32 - Alors si ce n'est pas pour combler les déficits,
55:34 à quoi ça sert ? Eh bien à envoyer un signal politique.
55:36 Le Premier ministre l'a dit clairement ce matin.
55:38 Il faut aussi écouter
55:40 une majorité silencieuse, ce sont ces Français
55:42 qui bossent et qui ont l'impression
55:44 que tous les efforts leur sont demandés.
55:46 Nous devons leur envoyer un message et valoriser le travail.
55:48 Et selon un participant,
55:50 Gabriel Attal a aussi laissé entendre que c'était l'Elysée
55:52 qui lui forçait un peu la main.
55:54 - Alors d'un mot, comment on accorde les violons en interne
55:56 dans cette majorité ?
55:58 - Alors ça ne va pas être simple, Gabriel Attal a écouté les députés.
56:00 Il fait attention de ne pas se laisser déborder par la fronde.
56:02 Certains députés seraient prêts à valider
56:04 une révision des conditions d'ouverture
56:06 des droits au chômage. Aujourd'hui, je vous rappelle
56:08 qu'il faut avoir travaillé six mois durant les deux dernières années.
56:10 Ça pourrait être un peu plus, sept, huit mois.
56:12 Et puis d'autres députés disent
56:14 "OK, donnant donnant, OK, on rabote un peu
56:16 l'assurance chômage, mais à condition que le gouvernement
56:18 accepte de taxer un peu plus
56:20 ceux qui se sont enrichis ces dernières années."
56:22 Ça tombe bien, le Premier ministre a lancé une réflexion,
56:24 une tasque forte sur la taxation des rentes.
56:26 - Un peu de justice sociale pour faire passer la pilule.
56:28 Utile, d'un mot,
56:30 utile ou injuste, cette nouvelle réforme du chômage ?
56:32 - Je pense,
56:34 à mon avis, inutile.
56:36 Parce que la réforme Born 23
56:38 est très bien. Je pense qu'elle a été
56:40 faite pour des raisons budgétaires.
56:42 Parce que les rentrées,
56:44 notamment de l'impôt sur les sociétés,
56:46 n'ont pas été ce qu'on espérait.
56:48 Or, la réforme Born,
56:50 elle est contracyclique, c'est-à-dire de dire
56:52 "je durcis en période d'expansion
56:54 et je ne suis plus laxiste en période de récession."
56:56 En durcissant maintenant,
56:58 en période de croissance très faible,
57:00 on tue la logique
57:02 contracyclique de la réforme Born,
57:04 qui me paraissait très bonne. Et puis enfin,
57:06 si c'est pour faire des économies, et c'est pour faire des économies,
57:08 quoi qu'en dise Gabriel Attal,
57:10 moi je le sais de mes échanges
57:12 avec Bercy et avec d'autres,
57:14 donc je peux garantir que c'est pour des économies.
57:16 Il y a d'autres sources,
57:18 les collectivités territoriales,
57:20 on peut peut-être, l'indexation des retraites,
57:22 peut-être à certains niveaux, peut-être repenser.
57:24 Et puis, il y a des niches,
57:26 par exemple, restaurant, niche hôtel,
57:28 il y a des niches fiscales.
57:30 - Il y a des alternatives. - En tout cas...
57:32 - C'est très clair. Merci pour cette franchise.
57:34 L'avertissement est très clair de la part d'un économiste,
57:36 professeur au Collège de France,
57:38 il y a la raison, allez hop !
57:40 - C'est un grand honneur, merci Les Affranchis,
57:42 merci Stéphanie, très belle soirée sur LCP,
57:44 à demain.
57:46 (Générique)
57:48 ---

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