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Rencontre à Juvignac avec le plasticien et critique d'art franco-vénézuélien Luis Pannier
Il dévoile ses oeuvres dans de nombreux salons, biennales et expositions, notamment au Museum of Latin American Art Long Beach CA (MOLAA) et dans les musées d'art contemporain du Venezuela et de la Caraïbe.
Le projet "Détournements" qu'il présente à l'Hôtel de Ville et à la Médiathèque de Juvignac, se caractérise par un dialogue (hommage ou/et parodie) entre œuvres et styles capables d’actualiser nos réalités socioculturelles et politiques.
De même, l'exposition présente une série d'oeuvres en 3D d'artistes membres de l'Association Artel, dont Luis Pannier est le président.
Parmi les artistes invités figurent : Nicolle Garraux, Nina Blondet, Marie Pendeliau, Emery Baï, Christine Albinet, Seb.M, Hamida Baal, Klod, Colette Courtay, Sabine Christin, Jean Joël Léger, Antoinette Danescu et Sylviane Compan.
Au total, quatorze artistes qui auront plaisir à échanger sur une pratique "qui se rit des autorités sclérosées pour que chacun puisse retrouver autorité sur lui-même" selon l'excellente formule de Christophe Génin, dans son article sur "Le détournement : de l'accidentel au principal".
Transcription
00:00 Nous sommes à Juvignac à l'hôtel de ville avec Louis Spagné. Bonjour Louis.
00:07 Alors vous organisez une expo collective qui s'appelle "Détournement" qui va durer un bon
00:13 mois. Alors qu'est ce que vous détournez du coup ? On détourne des auteurs, enfin des artistes
00:19 anciens comme des artistes modernes. On réfléchit un peu sur les idéologies imagées, c'est à dire
00:30 ce qu'il y a sous les images. Donc moi je tiens absolument à que ça soit fait non pas mécanique
00:38 mais à la main. C'est le plaisir également de pouvoir peindre, de pouvoir établir un dialogue
00:47 avec des artistes de toutes les époques. Et bon j'y accompagne avec effectivement un élément
00:55 littéraire si on veut qui articule, qui donne la relation aux références, c'est à dire pour
01:04 qu'un spectateur puisse situer l'oeuvre. Et puis à partir de ça je développe par exemple
01:11 l'engagement ou non engagement d'un matisse par rapport à Van Veldt à l'abstraction comme
01:17 "manas". C'est un terme un tillet créole qui veut dire "je suis fatigué". Je suis fatigué aussi
01:23 bien du non engagement comme d'une peinture, d'une abstraction qui se perpétue depuis plus de 150
01:31 ans. Mais quand on lit mes textes en fait on voit bien que je ne suis pas non plus dans une espèce
01:36 de militance etc contre ceci. Il y a des choses au niveau de mon discours où je dirais
01:41 effectivement qu'il y a des choses que je déplore. Mais je les déplore pareil comme Yves Michaud
01:48 là quand il écrit son bouquin sur l'art c'est vraiment bien la fin du fait justement des formes
01:55 immersives etc. L'esthétisation outrance qui fait que bon maintenant il y a peu de substances.
02:02 -Vous exploitez combien d'oeuvres du coup ?
02:05 -Alors là il y en a une vingtaine. Tout ce qui est bidimensionnel c'est moi. Donc j'ai avec des
02:13 artistes qui détournent des objets un peu à la manière aussi surréaliste. Donc ils font des
02:20 choses et qui les présentent. -Alors je vous propose vous allez nous commenter quelques-unes
02:25 de vos peintures. Regardez ensemble l'une de vos oeuvres ce sont des chefs indiens je crois mais
02:30 qui ont quand même une drôle de tronche. Alors expliquez nous pourquoi ils font la tronche et
02:33 qu'est ce que vous avez voulu montrer ? -Oui alors on voit bien la petite étiquette qui met
02:40 référent Carré-Lapel. Carré-Lapel fait partie du groupe Cobra. D'accord ? Ce sont des artistes
02:46 d'après-guerre et ce sont voilà il y a une volonté de la part que ça soit Carré-Lapel comme
02:55 Diorne, comme Corneille, comme enfin c'est tout un groupe enfin ceux qui connaissent le mot de
03:09 Cobra, ça veut comment ils sont c'était entre Bruxelles, Amsterdam et Paris. Le point c'est
03:16 qu'en fait là je réfléchis sur le rupture, ce qui est ça impliqué comme à l'époque par rapport
03:25 justement à quelque chose, une posture radicale donc de rompre avec toute forme je veux dire
03:32 d'héritage d'une esthétique interdisquement. Moi j'aime pas les étiquettes mais ce qui sont
03:39 considérées comme ce qu'il fallait dépasser sur quoi il fallait pas retourner donc moi je
03:47 questionne tout simplement ça parce que Carré-Lapel fait un peu comme la voilà il exalte tout ce qui
03:53 est barbare à tout ce qui est brut puisqu'ils sont très liés aussi à l'art brut et moi j'ai
03:58 trouvé tout simplement dans le texte je l'explique que c'est aussi les termes d'Adolf Hitler nous
04:03 sommes des barbares nous venons finir avec cette civilisation absolument décadente chose qu'on
04:11 entend en permanence je veux dire. - Alors c'est pour ça que vous faites un parallèle entre les
04:14 génocides des indiens et les génocides des juifs non ? Il y a quelque chose, comment on lit le
04:20 symbole du patagrame du coup dans votre haut tableau ? - Alors là effectivement il y a quelque
04:25 chose moi on me rappelle que c'est une étoile qu'on peut trouver sur le drapeau algérien donc
04:30 il peut y avoir effectivement une petite sur un képi donc il peut y avoir peut-être une allusion
04:35 à quelque chose qui est toute la déviléité coloniale et le passé colonial mais ces drapeaux
04:42 là enfin peut-être qu'ils se présentent ici, ils rappellent également les Etats-Unis et ainsi de
04:47 suite donc bon moi je laisse assez ouvert j'aime pas voilà quelque chose qui est une orientation
04:55 sinon ça serait pas polysémique et ce qui m'intéresse dans une oeuvre c'est effectivement
04:59 qu'elle puisse être également interprétée par le spectateur avec quelques éléments de référence
05:07 et puis après il brûle sur sa propre histoire. - Nous sommes devant un collage qui s'appelle
05:12 la débutante alors qui est cette mystérieuse femme dont on voit que la poitrine ? - Oui en fait
05:18 ça c'est un modèle donc mais c'est un triptyque et ce qui est important dans ce triptyque c'est
05:24 que cette débutante est une petite aquarelle d'un artiste du XVIIIe siècle anglais suisse
05:32 Johann Heinrich Fussler qui a dépeint une scène de proxénète c'est à dire c'est une maison-clos,
05:45 c'est la débutante et comment dire une prostituée patiente qui attend le client. Donc pourquoi ?
05:57 Parce que tout simplement je m'inspire de la France de Baudelaire, les conditions marchandes
06:02 de l'art ne sont pas très éloignées de la prostitution. Baudelaire il dit voilà les
06:08 artistes et les prostituées ont en commun qu'ils vendent ce qui sont les plus précieux. Donc à
06:16 savoir effectivement leur âme et donc le début d'une carrière artistique peut effectivement
06:22 amener à des compromis extrêmement douteux. Un lien avec une marchandise, avec le côté commercial,
06:32 par exemple on a un des artistes qui fait le plus parler de lui c'est Jeff Koons mais vraiment
06:39 enfin les dérives de Jeff Koons sur le plan du marché donne et des vues et la fin et voilà
06:46 avec Cho Chobin, bref je passe tous les détails mais c'est pas forcément voilà pour des jeunes
06:53 débutants artistes ni un modèle. Pour moi donc je parle de ça et dans le petit texte que vous
07:02 allez vous pouvez lire il y a effectivement ce rapport Sergio, Sergio c'est moi, ce côté nombril
07:08 de beaucoup d'artistes donc ce côté narcissique absolument qui est pénible c'est pour ça qu'il
07:14 y a aussi un rapport sur la méchanceté des artistes. C'est très sympathique souvent sur
07:22 voilà leur vie, leur expérience ainsi de suite. Bon des fois elle est transcendante, des fois peu,
07:28 mais bon peu importe enfin voilà ça c'est un regard là dessus et comme toute forme de narcose
07:35 c'est à dire enfin une capacité de s'évader de la réalité ou de résister, effectivement j'ai
07:41 mis une bouteille de pubis. C'est à dire cette espèce de relation et ce qui est important en fait
07:49 pour être plus concis c'est que pour moi il n'y a ni style, ni période, ni art contemporain,
07:56 ni voilà c'est à dire que c'est la capacité à un moment donné de pouvoir prendre tout ce qui
08:01 se passe parce qu'on est nous aussi une somme d'expérience et de passé et de mémoire et voilà
08:08 je critique beaucoup ce qui est fuite en avant parce que ça rend tout obsolète la technologie,
08:13 l'avancement enfin voilà on devient laissé pour compte souvent et donc voilà c'est mon intention
08:25 ici à traiter ces questions là. On a une référence à l'univers du Dersaud avec Falbala qui fait un
08:32 bisou à une statue alors qu'est ce que Falbala à la statue de pierre qu'est ce que vous voulez
08:37 nous signifier ? C'est à dire c'est l'histoire un peu la belle au bois dormante c'est à dire que
08:44 c'est souvent un peu à l'arithmétique ici, c'est à dire on dort, on est une société qui s'endort,
08:52 on a par exemple une guerre pas très loin, on a laissé faire, c'est la belle au bois dormant,
09:01 je reprends aussi la "Tout est dans ma tête" ou "La belle au bois dormant" avec des histoires aussi
09:06 de migrants ainsi de suite donc dans Falbala c'est le même cadre de référence seulement que très
09:16 souvent ces lignes que je mets dans les idées fixes également, elles renvoient au cinétisme,
09:22 c'est à dire au cinétisme c'est une réalité d'un art purement optique qui anime bien sûr des
09:30 murs mais qui a créé un défaçage par rapport par exemple à des peuples comme en Amérique du sud
09:37 où il y a eu une rupture par rapport à des anciennes formes d'art ce qui fait qu'effectivement
09:43 le peuple ne s'est pas retrouvé dans ce type d'art mais en même temps il a couvert, c'est à dire
09:52 c'était des liens, c'est à dire quand on met un peu en avant un type d'art plutôt qu'un autre
09:57 donc on considère que c'est que les élites qui méritent de l'art et donc on coupe, on acculturise
10:07 je dirais, on remplace ce type de monde, je dis ici par exemple mon combat c'est un peu par rapport
10:12 à ces formes société de consommation, acculturation etc. Voilà alors donc c'est une expo qui est dans
10:19 un lieu populaire on est à la mairie de Juvignac et aussi à la médiathèque Théodore Meunot et
10:25 donc le public pourra voir cette exposition combien de temps à peu près ? Alors ici il y a
10:29 deux mois et à la médiathèque un mois. Voilà peut-être dire que vous avez créé une association
10:34 qui s'appelle Artel, peut-être dire un mot de cette association pour terminer ? Oui c'est une
10:38 association donc on devrait avoir un espace fixe, une plus grande visibilité à Montpellier même,
10:44 pas très loin de la gare, il y a une quarantaine d'artistes, il y a des espagnols, des allemands,
10:50 des latino-américains, donc on essaie d'être le plus actif possible. Il y a un site internet,
10:56 une page facebook ? On a une page facebook, un instagram également, il y a tout pour qu'on
11:03 puisse aller. Alors par contre c'est Artel, l'association Art Plastique. On invite nos
11:09 auditeurs à venir voir ces beaux détournements plasticiens de la réalité, à se questionner sur
11:14 qu'est ce que c'est que l'art contemporain. Merci monsieur Pannier. Merci.
11:17 Merci.
11:17 Merci.
11:18 Merci.
11:18 Merci.
11:19 Merci.
11:19 Merci.
11:20 Merci.
11:20 Merci à tous !
11:22 Merci à tous !