• il y a 7 mois
Créé il y a vingt ans, Coco.gg est une nouvelle fois au cœur de l’actualité suite au guet-apens meurtrier de Philippe organisé par des mineurs via ce site de rencontre. Que sait-on sur ce tchat en ligne trop facilement accessible ?

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Transcription
00:00 [Générique]
00:05 On en parle avec Maître Mathias Darmon, vous êtes avocat de l'association Innocence en danger
00:09 qui fait partie de ces associations qui réclament la fermeture de ce chat en ligne.
00:13 David Dunal, journaliste à BFMTV, est avec nous.
00:15 David a testé Coco, a passé une soirée sur Coco,
00:20 et vous allez nous raconter ce que vous y avez trouvé.
00:22 On en parle aussi aujourd'hui à Anne-Sophie Varmon, vous êtes à Valenciennes,
00:25 parce qu'il y a un procès justement qui s'ouvre aujourd'hui à Valenciennes,
00:28 le procès de 11 hommes âgés de 25 à 60 ans,
00:31 qui sont soupçonnés d'avoir eu des relations sexuelles avec une adolescente de moins de 15 ans,
00:36 qui était sur ce chat de Coco.
00:38 Racontez-nous, Anne-Sophie Varmon, d'abord, les faits pour lesquels ils sont jugés,
00:41 et ce qui relie tous ces hommes au profil finalement très différent.
00:46 Oui, tout à fait, cette affaire a été révélée en avril de l'année dernière.
00:53 À ce moment-là, une jeune fille fait une fugue, ses parents signalent sa fugue,
00:57 et cette jeune fille, elle est retrouvée par les gendarmes dans un entrepôt.
01:01 Elle est en fait en lien avec un homme d'un certain âge,
01:04 et cet homme dit qu'il a rencontré cette jeune fille sur un site, le fameux site Coco.
01:09 Et au moment de l'analyse du téléphone de cette jeune fille,
01:13 les gendarmes vont se rendre compte qu'elle n'est pas en lien seulement avec cet homme,
01:17 mais avec beaucoup d'autres, plus d'une dizaine d'hommes,
01:21 et que, vous l'avez dit, ces hommes n'ont aucun lien entre eux,
01:24 même si ce n'est cette jeune fille qu'ils ont pour la plupart rencontrée sur ce site Coco.
01:29 Et ils sont poursuivis aujourd'hui parce qu'ils ont eu des échanges de photos pédopornographiques,
01:34 puisque la jeune fille, vous l'avez dit, est mineure,
01:37 et aussi, ils ont eu des relations sexuelles avec elle, parfois tarifées, parfois non tarifées.
01:42 David, il y a quoi de particulier à ce site ?
01:45 Parce que c'est vrai que tous, on l'a plus ou moins découvert.
01:48 Coco, voilà.
01:49 Alors ce site, c'est un chat en ligne avec des messages privés qui sont échangés,
01:53 sans historique.
01:54 Il y a aussi des salons de discussion qui sont ouverts au public ou privés.
01:58 Ce site, il revendique être le premier chat français.
02:01 Il y a très peu, voire pas du tout de modération sur le site.
02:05 C'est un déversoir de saloperies, en fait.
02:07 Oui, nous, on a créé le compte d'une jeune femme de 18 ans.
02:10 On dit très rapidement dans les messages qu'on est mineure.
02:13 Ça arrête très vite des personnes, mais pas toutes, parce qu'on a des propositions.
02:18 On le voit sur les messages, on a des propositions sexuelles tarifées ou pas.
02:23 On a des demandes de photos, de vidéos.
02:26 Alors que vous avez clairement dit que vous étiez mineure.
02:28 On l'a clairement dit et on le voit sur les messages.
02:30 Ça n'arrête pas du tout les personnes.
02:31 On a pu discuter avec un homme de 50 ans qui est professeur dans une université dans les Alpes-Maritimes,
02:36 qui nous demande si on est coquine.
02:37 On discute avec un agent des routes de 26 ans, un ouvrier dans le bâtiment de 36 ans.
02:41 Voilà, que des personnes qui ont continué la discussion alors qu'elles savaient qu'on était mineure
02:45 et qui posent des questions sur le même thème, le sexe.
02:48 Et qui vous font parvenir des contenus explicites.
02:51 On a reçu avec Mathieu Lepeigné qui m'accompagnait des messages, des photos, des vidéos,
02:57 des propositions aussi de visio pour voir ces hommes se masturber en direct.
03:02 Mais Maître, des sites de tchat, il y en a plein.
03:05 Qu'est-ce qu'il a de particulier celui-là ?
03:08 La particularité de ce site, c'est qu'il n'y a effectivement aucune modération.
03:11 On rentre un pseudo, le pseudo qu'on souhaite, on rentre son sexe, son département,
03:18 et puis tout simplement son âge.
03:22 Sans aucune vérification ?
03:23 Sans aucune vérification, peu importe.
03:25 On peut très bien avoir 70 ans et écrire qu'on en a 18, 19.
03:28 Et à ce moment-là, on peut rentrer en contact avec n'importe quelle personne qui décide de nous contacter.
03:32 Votre association Innocence en danger demande l'interdiction de ce site depuis longtemps.
03:38 Ça fait combien de temps d'ailleurs ?
03:39 Le site existe depuis 2003, donc ça fait quand même très longtemps qu'il est là.
03:44 Et nous, depuis 2013, nous signalons ce site Internet aux autorités.
03:48 Et en 2016, nous avons lancé une pétition qui a recensé plus de 5000 signataires.
03:53 Et rien ne s'est passé depuis.
03:55 David, il faut nous expliquer, pour bien qu'on comprenne à quoi on a affaire,
03:59 le nom des salons.
04:00 Les salons, c'est-à-dire, grosso modo, on entre dans une forme de discussion, très explicite.
04:07 Et donc là, il y a un échange qui a lieu.
04:11 C'est ça. Maximum 70 utilisateurs simultanés par salon.
04:14 Donc c'est une salle de discussion virtuelle.
04:16 Il faut qu'on attende notre tour.
04:17 Il y a des gens qui payent.
04:18 Les intitulés.
04:19 Les intitulés, on a Exhibez vos femmes, lycéenne.
04:22 On a des catégories où il y a des photos qui s'échangent, des numéros de téléphone.
04:26 Dominique P, qui violait sa femme, la faisait violer à son insu.
04:29 Rencontrait des hommes, recrutait des hommes sur le site Coco, avec un salon qui était nommé à son insu.
04:35 Donc il y a des noms, plus de la moitié des salons finalement, qui tournent autour du sexe.
04:39 Et pourquoi vous ne parvenez pas à faire fermer ce site ?
04:42 Il n'y a aucun doute sur le fait que c'est le musée des horreurs.
04:46 C'est un site qui appartient depuis l'année dernière à une société bulgare.
04:50 Il est hébergé sur l'île anglo-normande de Guernesey.
04:54 Donc il y a évidemment des difficultés pour les autorités françaises de parvenir à la fermeture de ce site Internet.
05:00 Mais on considère qu'il y a des solutions, notamment en se tournant vers les fournisseurs d'accès.
05:05 On pourrait très bien leur demander d'empêcher l'accès à ce site Internet en France.
05:10 Mais est-ce que les usagers français pourraient être poursuivis pour avoir fréquenté ce site ?
05:16 Je dis bien fréquenté.
05:18 Pour la fréquentation, non, parce que c'est un espace d'expression.
05:21 Aujourd'hui, la liberté d'expression est consacrée en France largement.
05:24 Mais même quand il y a des propositions pédophiles de la part des utilisateurs ?
05:27 Si, à ce moment-là, oui. Le fait d'y entrer n'est pas pénalement répréhensible.
05:30 Mais le fait de proposer à des mineurs des relations tarifées, de leur envoyer des photos, comme vous l'avez évoqué,
05:36 c'est de la corruption de mineurs et c'est puni par la loi Stendhal.
05:39 Mais on imagine que la police est connectée à ce site avec des faux profils.
05:42 Il y a des brigades spécifiques qui créent effectivement des faux comptes, des faux profils de personnes mineures,
05:49 de jeunes filles mineures, et qui, à ce moment-là, arrivent à remonter vers les utilisateurs qui prennent la tâche avec les mineurs et les interpellent.
05:56 C'est quand même le paradoxe de cette histoire.
05:59 La police peut lutter contre les utilisateurs, mais pas contre ceux qui hébergent ce site.
06:04 Oui, il y a une impunité vis-à-vis de ce site-là.
06:07 On ne sait pas vraiment qui l'a fondé. Apparemment, ce serait quelqu'un qui habitait en France, dans le Var.
06:13 On ne connaît pas réellement sa profession, son âge. C'est difficile à cibler.
06:16 Et puis là, le fait que ça soit hébergé sur Guernosais, c'est compliqué pour les autoriser.
06:21 Mais est-ce qu'à votre connaissance, la brigade de la cybercriminalité s'intéresse vraiment en particulier à ce site ?
06:29 Ou est-ce qu'elle a tellement de travail que ça se noie dans les autres affaires, dans les autres dossiers à surveiller ?
06:34 Ce qui est une bonne chose déjà, c'est qu'il y ait une brigade spécifique qui soit créée.
06:38 Ce n'est pas le cas pour de nombreuses infractions en France.
06:41 Et il y a de plus en plus d'interpellations.
06:45 Nous, à l'association Innocence en danger, on reçoit de plus en plus de témoignages d'enfants, de jeunes filles.
06:50 On voit ça des enfants quand ils ont 12 ans.
06:52 Mais on imagine qu'ils sont dans un état…
06:54 Oui, mais en fait, le problème, c'est que vous l'avez évoqué aussi, très rapidement, on peut recevoir des photos, des vidéos.
06:59 Et d'un coup, il y a une photo de sexe qui apparaît pour des enfants qui ont 12-13 ans.
07:03 Donc ils sont particulièrement choqués et ils ne savent pas vraiment quoi faire.
07:06 Et donc c'est dans ces conditions-là qu'ils prennent la tâche avec l'association.
07:09 Et nous, on leur explique qu'il faut évidemment déposer plainte, en espérant qu'il y ait des poursuites judiciaires le plus rapidement possible.
07:13 Anne-Sophie, est-ce que la petite victime sera là aujourd'hui ?
07:16 Est-ce qu'elle sera sur les bancs des partis civils ? Ses parents ? Enfin, qui ?
07:20 Alors elle, elle ne sera pas là, tout simplement parce que son avocat nous expliquait qu'elle ne voulait pas être confrontée à ses hommes,
07:29 cette dizaine d'hommes avec qui elle a entretenu des relations.
07:31 Par contre, son papa sera là, sa maman ne sera pas là, mais son papa sera là,
07:35 parce que pour lui, c'est important d'être présent et de dire qu'il faut que ce site ferme.
07:41 Alors, vous l'avez dit, ce n'est pas le site qui est poursuivi aujourd'hui, ce sont ses hommes.
07:45 Mais il veut aussi alerter les autres parents de se méfier des sites sur lesquels vont leurs enfants.
07:50 Et le but pour lui, c'est que cela n'arrive plus.
07:53 Est-ce qu'il a des suspects ? Enfin, ceux qui sont jugés en l'occurrence, Anne-Sophie.
07:56 Je n'ai pas bien entendu votre question, excusez-moi.
08:01 Qu'est-ce qu'il risque ? Quelle est la peine encourue ?
08:03 Il risque entre 7 ans et 10 ans de prison, mais il faut dire qu'il y a quand même eu un premier jugement d'un homme en février.
08:11 Lui, il a écopé de 2 ans de prison et il a eu 18 mois avec sursis,
08:17 ce qui veut dire que cet homme n'ira pas en prison,
08:20 tout simplement parce qu'au bout d'un an ferme, vous pouvez faire aménager cette peine.
08:24 Merci beaucoup. Merci à tous les trois.
08:28 On imagine qu'on ne sort pas indemne après avoir réalisé ce reportage sur cette enquête sur ce site.
08:34 J'avais une question. On rentre vraiment facilement ?
08:37 C'est-à-dire qu'il n'y a pas un contrôle avec une pièce d'identité sur l'âge ?
08:40 Il n'y a aucun contrôle.
08:41 C'est peut-être ça aussi le levier. C'est comment des jeunes de 12-13 ans se retrouvent sur ce site.
08:45 Le levier, ce serait demander une vérification formelle à l'entrée du site.
08:50 Ça, ce n'est pas possible avec la loi PSUI.
08:52 Pas comme pour les sites pornographiques. On en parle beaucoup, mais ça n'existe pas.
08:55 Exactement. Vous voyez, il y a des réseaux sociaux autres, Facebook, WhatsApp, où c'est totalement contrôlé.
09:01 Et là, ici, c'est incontrôlé par les services publics.
09:05 Et c'est dramatique pour les enfants qui se connectent dessus.

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