Le président chinois Xi Jinping est attendu en France pour une visite d'Etat du 6 au 7 mai. La guerre en Ukraine devrait occuper une partie des discussions avec Emmanuel Macron. Le décryptage de notre journaliste Claude Leblanc.
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00:00 La France est un pays important pour la Chine.
00:03 La visite de Xi Jinping s'inscrit dans le cadre du 60e anniversaire
00:11 de l'établissement des relations diplomatiques entre la France et la Chine,
00:15 qui ont eu lieu en 1964 à l'initiative du général de Gaulle.
00:22 Et donc, il fallait pour cette occasion montrer que les relations
00:26 entre les deux pays sont bonnes.
00:28 D'autre part, on est dans un agenda politique assez compliqué dans le monde.
00:32 Et donc, il est très important pour les Chinois comme pour la France
00:36 de montrer que ces deux pays, qui se considèrent comme des puissances
00:40 influentes dans le monde, montrent au reste du monde,
00:43 en quelque sorte, qu'il y a sinon une entente,
00:46 en tout cas une volonté d'exister sur la scène internationale.
00:49 Et donc, le voyage de Xi Jinping s'inscrit dans cette démarche-là.
00:53 Et puis, le troisième point, c'est que l'an passé,
00:55 Emmanuel Macron a effectué une visite d'État en Chine.
00:59 Et il est en général assez normal que dans l'année qui suit,
01:03 le président chinois se rende en France dans le cadre du visite officielle.
01:07 Et puis surtout, c'est la première visite de Xi Jinping en France depuis 2019.
01:12 En général, jusqu'à présent, il y avait des visites assez régulières
01:15 tous les deux ans à peu près d'un président français en Chine
01:18 ou d'un président chinois en France.
01:21 La crise du Covid a évidemment réduit beaucoup cette activité.
01:25 Et d'une certaine manière, avec la visite de Macron l'an passé à Pékin
01:28 et la visite de cette année de Xi Jinping en France,
01:31 c'est une remise en marche un petit peu d'un rythme diplomatique normal.
01:35 Historiquement, il faut rappeler que la reconnaissance de la Chine populaire
01:43 par la France en 1964 n'était pas quelque chose d'absolument acquis.
01:47 À l'époque, il y avait peu de pays qui étaient prêts à le faire.
01:50 La France était une puissance nucléaire,
01:51 qui a été une puissance qui se voulait indépendante de toute grande puissance,
01:56 à l'époque les États-Unis et l'Union soviétique.
01:58 À l'époque, la Chine n'avait pas de bonne relation
02:01 ni avec les États-Unis ni avec l'Union soviétique.
02:04 Et donc la France était apparue à ce moment-là comme un pays important
02:07 avec une certaine puissance qui venait en quelque sorte,
02:11 sinon au secours, en tout cas en soutien de la Chine,
02:14 en considérant que la Chine était un pays avec qui il fallait discuter.
02:17 Et donc pour les Chinois, qui sont très friands d'histoire
02:21 et qui estiment qu'il faut toujours se rappeler du passé,
02:24 l'entretien de cette relation bilatérale est très importante.
02:27 Les Occidentaux, de façon générale,
02:33 voudraient que la Chine cesse de soutenir la Russie,
02:36 en tout cas d'un point de vue économique, etc.
02:38 Mais c'est quelque chose qui n'arrivera pas
02:40 parce que la Chine n'a aucun intérêt à le faire.
02:43 On voit bien qu'aujourd'hui, la Chine se sent encerclée.
02:46 D'un côté, il y a l'Inde,
02:48 qui est le bastion sur lequel les Occidentaux s'appuient aujourd'hui
02:51 comme grande puissance en Asie
02:52 pour être un mur devant les ambitions chinoises.
02:56 Et puis les Américains construisent petit à petit,
02:58 depuis quelques années,
03:00 un réseau ou un renforcement de leurs alliances avec le Japon.
03:04 On a vu récemment le sommet trilatéral
03:06 entre Japon, Philippines et États-Unis à Grand-David.
03:09 Il y a l'hocus entre la Grande-Bretagne, l'Australie et les États-Unis.
03:13 Et donc les Chinois voient que les Occidentaux,
03:16 donc les Américains en premier lieu,
03:17 tentent effectivement de les contenir un peu partout des bords.
03:21 Et évidemment, si les Chinois devaient abandonner la Russie,
03:24 ils seraient aussi encerclés par un ennemi en quelque sorte.
03:27 Et puis par ailleurs,
03:28 je ne pense pas qu'ils soutiennent absolument la Russie
03:30 dans l'attaque et l'invasion du territoire ukrainien.
03:33 Les Chinois peuvent en revanche être des acteurs,
03:37 on va dire actifs, dans une solution pacifique.
03:40 Donc il faudra bien un moment
03:41 que les gens arrivent à discuter autour d'une table.
03:44 Il y a une initiative qui a été lancée d'ailleurs par l'Ukraine en janvier,
03:48 qui est une conférence de la paix qui doit se tenir en Suisse.
03:51 Initialement, Zelensky disait "oui, on va discuter de la paix,
03:54 mais sans les Russes".
03:55 Les Chinois disent "on ne peut pas aujourd'hui discuter de la paix
03:59 si les Russes ne sont pas là".
04:00 Donc le travail que font les Chinois aujourd'hui au niveau diplomatique,
04:04 c'est d'arriver à monter avec les Suisses d'ailleurs,
04:08 parce qu'ils sont sur la même longueur d'onde,
04:09 d'essayer de monter cette conférence de la paix
04:12 dans un sens beaucoup plus constructif
04:15 que de vouloir absolument arriver à la défaite absolue de la Russie
04:19 ou la victoire absolue de l'Ukraine,
04:21 qui semble aujourd'hui en tout cas inatteignable par l'un ou par l'autre.
04:24 Mais il est peu probable d'une part que Xi Jinping
04:28 renonce d'un seul coup à soutenir la Russie,
04:31 et en revanche peut-être que Xi Jinping peut amener aussi la France
04:35 à essayer de privilégier aussi la discussion,
04:38 y compris avec la Russie,
04:39 autour d'une table dans un territoire neutre qui serait la Suisse.
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