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00:00 On passe maintenant à notre dernier rendez-vous de ce Paris Direct.
00:03 C'est derrière l'image.
00:04 Rendez-vous pour prendre le temps de décrypter l'info à partir de photos qui font sens.
00:08 Et on va prendre un peu de hauteur aujourd'hui.
00:10 Cette nuit, depuis Cap Canaveral, aux alentours de 4h34 précise hors française,
00:15 décollera la capsule de Boeing Starliner direction la Station Spatiale Internationale
00:20 avec à son bord deux astronautes expérimentés.
00:22 On en parle avec vous Sylvain Rousseau.
00:25 Bonjour Sylvain.
00:26 Vous avez choisi, c'est la tradition, une photo pour illustrer le propos,
00:31 la photo de ce fameux vaisseau Starliner sur son pas de tir.
00:35 Oui, effectivement, c'est un peu la photo qu'on n'attendait plus.
00:38 La capsule Starliner de Boeing, on la voit ici juste derrière moi,
00:42 elle est sur son pas de tir, prête à décoller avec un équipage à son bord.
00:45 Enfin, il faut savoir que ce vol était prévu pour 2020.
00:48 C'est donc quatre ans de retard pour Starliner et pour Boeing.
00:52 Quatre ans pendant lesquels Starliner, comme Boeing d'ailleurs, a accumulé les déboires.
00:58 Pour vous présenter un petit peu l'engin, on est sur un vaisseau qui fait une dizaine de tonnes,
01:03 4,5 mètres de diamètre, un volume de plus de 12 mètres cubes.
01:06 Elle peut emporter 7 astronautes à son bord, plus de 160 kg de frais.
01:10 Elle est à peine plus grande que sa concurrente, la capsule Crew Dragon de SpaceX.
01:15 Et donc là, ça y est, on y est, vous le disiez.
01:17 4h34 du matin chez nous, 22h34 de l'autre côté de l'Atlantique en Floride.
01:22 Et donc à bord pour cette première mission habitée de Starliner,
01:25 deux astronautes, Barry Wilmore et Sunita Williams.
01:28 Voilà, et alors, qui sont les deux astronautes qui vont participer à cette mission,
01:33 finalement assez exceptionnelle, mais aussi avec un peu plus d'incertitude que d'habitude,
01:36 puisqu'il s'agit d'inaugurer un vaisseau cette fois-ci.
01:39 Eh oui, ce n'est pas tous les jours qu'on a l'occasion de faire un premier vol.
01:42 Il y a une femme, Sunita Williams, qui est une légende parmi les astronautes.
01:47 Elle a 58 ans, deux séjours dans l'ISS, le premier en 2007, puis un deuxième en 2012.
01:52 Elle passe plus de 320 jours en orbite.
01:54 Elle bat à son époque, en tout cas, tous les records pour une femme dans l'espace.
01:57 Plus longtemps en orbite, plus longue sortie extravéhiculaire,
02:01 nombre de sorties extravéhiculaires, tous ces records ont été battus depuis.
02:04 Mais à l'époque, ils sont à peu près tous à elle.
02:07 Elle a même été pendant un an chef adjointe des astronautes de la NASA.
02:10 Avec elle, Barry Wilmore, 61 ans, ancien pilote de la navette spatiale,
02:14 lui aussi résident de la station spatiale entre 2014 et 2015.
02:17 C'est lui qui commandera cette mission.
02:19 Mais ce n'est pas grâce à leurs états de service, pourtant irréprochables,
02:22 mais c'est grâce à leur carrière militaire qu'ils sont à bord de ce premier vol.
02:25 On les a vus sur les images arrivées en avion.
02:27 Ils ont tous les deux été pilotes d'essai pour l'armée américaine avant de devenir astronautes.
02:31 Et donc, quand vous êtes astronaute et pilote d'essai,
02:33 vous avez le profil parfait pour tester, justement, pour essayer un nouvel engin.
02:38 Mais vous allez voir que malgré les incertitudes, évidemment,
02:41 inhérentes à un bisoutage, on peut dire,
02:44 il n'y a aucune inquiétude pour ces deux astronautes, on l'a dit, très expérimentés,
02:48 58 ans, 61 ans.
02:50 Je vous propose de les écouter à leur arrivée à Cap Canaveral.
02:53 Ce vaisseau spatial est génial, n'est-ce pas ?
02:57 Je pense que si j'étais une jeune astronaute et que j'envisageais d'aller sur la Lune,
03:00 je lèverais la main et dirais que je veux piloter le Starliner.
03:04 Est-ce que nous nous attendons à ce que tout se passe parfaitement ?
03:06 C'est le premier vol humain sur ce vaisseau.
03:08 Je suis sûr que nous allons découvrir des choses.
03:10 C'est pour cela qu'on fait ça.
03:12 On laissez courage les astronautes, ils font bonne figure,
03:14 mais on sait quand même, pour ceux qui ont eu la chance de s'être rendus là-bas
03:18 et on fait partie de ces chanceux, qu'il y a beaucoup de stress
03:20 qui accompagne une séquence comme celle-ci.
03:22 Il y a toujours un peu de stress quand c'est un premier vol.
03:25 On se rappelle du premier équipage qui avait essayé la Crew Dragon de SpaceX en 2020
03:29 ou encore du premier équipage qui avait essayé la navette spatiale.
03:32 C'est quelque chose d'assez rare, d'être le premier équipage à tester,
03:36 entre la navette spatiale et Crew Dragon,
03:38 il n'y avait pas eu d'inauguration de vaisseau américain.
03:42 Parlons peut-être un peu de cette capsule spatiale.
03:45 À quoi va-t-elle servir précisément ?
03:47 Sa vocation première, c'est de desservir la Station Spatiale Internationale.
03:50 Ça va être même l'objet de cette première mission.
03:52 C'est en tout cas ce qu'en attend la NASA.
03:54 Pour l'instant, l'agence américaine n'a pas d'autres missions à lui confier.
03:57 Est-ce que Boeing va suivre les traces de SpaceX
03:59 et s'orienter également vers le tourisme spatial ?
04:01 Pour l'instant, ce n'est absolument pas à l'ordre du jour.
04:04 Il faut d'abord, pour Boeing, ne pas griller les étapes,
04:07 s'assurer que tout marche, que Starliner est sûre et fiable,
04:11 qu'elle peut transporter des êtres humains vers la Station Spatiale en toute sécurité.
04:15 Mais le problème, c'est qu'avec quatre ans de retard sur SpaceX,
04:18 Boeing a un petit peu raté le coche,
04:20 puisque la Station Spatiale ne devrait pas s'étendre,
04:22 en tout cas sa vie ne devrait pas s'étendre au-delà de 2030.
04:25 Ensuite, on imagine qu'il y aura plusieurs petites stations privées.
04:29 Est-ce que Boeing va avoir le temps de prouver sa fiabilité ?
04:32 C'est justement toute la question.
04:34 C'est de là que va dépendre la rentabilité de cette capsule.
04:36 Alors, la fiabilité et Boeing, vous avez dit deux mots
04:38 qui ne vont pas forcément ensemble en ce moment.
04:40 Il s'agit en tout cas, ça c'est une certitude, d'une mission capitale pour Boeing,
04:44 car en plus du retard de quatre ans dans son programme spatial,
04:47 l'avion nord-américain fait face à plus de six années de catastrophes en tout genre.
04:51 Un succès de Starliner serait donc une vraie bouffée d'oxygène pour le groupe.
04:55 Retour sur les déboires de Boeing, tout de suite avec Noemi Roche.
04:59 C'était le 17 avril.
05:04 Quatre actuels et anciens employés de Boeing témoignent devant une commission d'enquête au Sénat.
05:09 Objectif, dénoncer de graves problèmes de fabrication des avions de la compagnie américaine.
05:15 Depuis 2013, le programme 787 a connu de graves problèmes
05:21 en ne fermant pas correctement des milliers d'espaces
05:23 dans l'assemblage des quelques fentes des principales articulations.
05:26 En fait, Boeing a produit des avions défectueux.
05:29 Un témoignage qui intervient après une série d'incidents spectaculaires
05:34 impliquant des avions Boeing ces derniers mois.
05:37 En janvier notamment, une porte de ce Boeing 737 Max de la compagnie Alaska Airlines
05:43 s'était détachée en plein vol à 5000 mètres d'altitude.
05:47 Bilan, quatre blessés et une énorme frayeur pour les 177 passagers.
05:53 Les enquêtes ouvertes après cet incident ont montré de graves lacunes
05:57 dans les dispositifs de Boeing en matière de sécurité.
06:00 Des défaillances dans la chaîne de fabrication et d'assemblage de l'avionneur
06:03 ont aussi été pointées par l'Agence américaine de l'aviation civile.
06:07 En mars, d'autres incidents se sont produits impliquant des Boeing 737,
06:12 mais aussi des 787-9 et des 777.
06:17 Résultat, trois des quatre modèles d'avions commerciaux de Boeing
06:21 sont désormais visés par une enquête du régulateur américain.
06:24 Une nouvelle série noire pour l'avionneur américain
06:27 plongé dans la tourmente depuis plusieurs années,
06:30 après le crash de deux 737 Max 8 en 2018 et en 2019
06:35 à cause de défauts de conception.
06:37 Ces catastrophes avaient fait 346 morts.
06:40 Clouer au sol ce modèle d'avion pendant 20 mois
06:43 et coûter des milliards de dollars à la compagnie.
06:46 Pour le résumer, il y a des déboires enregistrés ces derniers mois.
06:51 Il y en a un certain nombre.
06:52 Boeing joue gros.
06:53 Aujourd'hui, un échec serait catastrophique.
06:56 On parle d'un avionneur historique, plus que centenaire,
06:59 mais en pleine tempête.
07:00 On vient de le voir depuis quelques années.
07:02 Ce n'est pas tant un cas de succès que Boeing joue gros.
07:04 Evidemment, ça redorerait le blason de la marque, de la compagnie.
07:07 L'image se retrouverait un peu de prestige
07:09 et ça offrirait un peu de répit à Boeing.
07:12 Un échec serait une catastrophe absolue pour Boeing,
07:14 surtout si cet échec implique la perte des astronautes.
07:16 Ça serait vraiment la catastrophe absolue,
07:19 évidemment pour les astronautes,
07:21 mais également pour Boeing.
07:26 Imaginez tous ces déboires-là,
07:28 auxquels vous ajoutez une explosion en Mondio Vision.
07:31 Certains estiment que cela pourrait avoir des conséquences
07:33 irrévocables, voire définitives, pour la compagnie.
07:37 Ce qui rassure, c'est qu'on a pris le temps de développer cet engin.
07:40 Il y a eu un premier essai en 2019 où la capsule avait raté la station.
07:43 En 2021, on est prêt à partir dans la même situation
07:46 que maintenant.
07:47 La capsule avait été rappelée au hangar
07:48 et elle y était restée plusieurs mois à l'usine
07:50 parce qu'il avait fallu refabriquer des pièces.
07:52 Mais en 2022, le vol pour transporter du fret à bord de l'ISS
07:55 s'était très bien déroulé.
07:56 Boeing a vraiment pris le temps.
07:57 Et puis, on ne rigole pas avec la sécurité des astronautes à la NASA.
08:01 Je vous propose d'ailleurs tout de suite d'écouter l'administrateur,
08:04 Bill Nelson, l'administrateur de la NASA.
08:06 On écoute.
08:07 Ce vaisseau spatial est au point.
08:10 Il est prêt à être lancé.
08:12 Je peux vous dire que du point de vue de la NASA,
08:15 nous ne nous lançons pas tant que le vaisseau n'est pas prêt.
08:19 Voilà, donc ce qui est sûr, c'est que beaucoup de monde
08:22 aura les yeux rivés sur Cap Canaveral cette nuit.
08:24 Pas seulement le monde de l'espace, puisque c'est vraiment
08:27 l'une des entreprises les plus emblématiques de l'industrie américaine
08:30 qui se retrouve sur la sellette.
08:31 Y a-t-il encore un intérêt pour la NASA, Sylvain,
08:34 de commencer à travailler avec Boeing alors que SpaceX,
08:37 dont on parle beaucoup plus, est désormais omniprésent
08:39 dans l'accès à l'espace ?
08:40 Oui, forcément, on parle plus de SpaceX parce qu'ils sont arrivés
08:42 les premiers quand les deux entreprises ont été sélectionnées
08:45 pour assurer le transport d'astronautes vers la station spatiale.
08:48 Tout le monde pensait que Boeing arriverait largement avant SpaceX.
08:51 Et puis, finalement, c'est totalement l'inverse.
08:53 Mais oui, l'intérêt, il est multiple pour la NASA d'abord,
08:55 parce que l'objectif de l'agence a toujours été d'avoir
08:57 au moins deux compagnies capables de fournir la même mission,
09:00 ne serait-ce que pour des questions de sécurité.
09:02 Alors, pas forcément des questions de sécurité d'astronautes,
09:04 mais des questions de sécurité nationale.
09:06 Imaginez qu'il y a un problème sur SpaceX,
09:08 que la capsule soit clé au sol, les Américains ont besoin
09:10 d'avoir un deuxième vaisseau pour prendre le relais
09:12 et pour pouvoir desservir l'ISS en astronautes et en frette,
09:15 sans avoir à se tourner, comme ils l'ont fait pendant plusieurs années,
09:18 vers les Russes, compte tenu de la situation géopolitique actuelle.
09:21 On peut imaginer qu'ils n'ont pas très envie d'en arriver là.
09:23 Et puis, c'est aussi le principe du capitalisme.
09:25 Si vous instaurez de la concurrence, vous avez de bonnes chances
09:28 de faire baisser les coûts, de favoriser l'innovation.
09:31 Et puis, pour finir, ça peut aussi servir à la NASA
09:34 à calmer un petit peu l'expansion de SpaceX,
09:36 qui prend de plus en plus de place, peut-être même un peu trop,
09:39 parfois, dit-on du côté de la NASA.
09:41 Qui est présente sur la base de la NASA à Cap Canaveral.
09:43 Ils ont leur propre hangar.
09:45 Ils ont leur propre hangar, ils ont également leur propre pas de tir,
09:47 on l'a vu avec le Starship.
09:49 Mais c'est aussi l'occasion pour la NASA de rappeler que
09:52 si la NASA a besoin de SpaceX,
09:54 notamment avec le futur vaisseau Starship,
09:56 pour aller sur la Lune,
09:58 et bien SpaceX a aussi besoin de la NASA,
10:00 car la plupart des financements de SpaceX
10:02 viennent de l'agence américaine.
10:04 Alors comment la NASA, justement, parce qu'on parle de SpaceX,
10:06 en est arrivée à confier la vie de ses astronautes
10:09 à des entreprises privées comme SpaceX, depuis plusieurs années,
10:12 et maintenant à Boeing ?
10:14 Tout démarre en 2003, le 1er février, très exactement.
10:17 La navette Columbia explose lors de son retour sur Terre.
10:20 C'est le deuxième accident d'une navette.
10:23 Et puis un accident de navette, ça veut dire qu'on perd tous les astronautes à chaque fois.
10:26 Et cet engin, qui est pourtant aujourd'hui encore
10:29 probablement l'un des objets les plus perfectionnés jamais conçus par l'homme,
10:32 devient réellement trop dangereux, en plus d'être beaucoup trop cher.
10:36 Donc George Bush décide de la mettre à la retraite.
10:39 Et puis après son élection, quelques mois plus tard,
10:41 c'est Barack Obama qui prend la décision de faire appel au secteur privé.
10:44 Donc la NASA confie une enveloppe à différentes entreprises,
10:47 à Boeing et à SpaceX, qui sont les deux finalistes pour cet appel d'offres.
10:53 Et ensuite, c'est charge à eux de construire leur vaisseau.
10:56 L'objectif pour la NASA, c'est d'abord de limiter ses coûts,
10:58 d'encadrer les budgets, d'avoir une vision très claire de ce qu'ils vont dépenser,
11:01 puisque les surcoûts sont à la charge des compagnies.
11:04 C'est aussi une façon pour eux de favoriser l'innovation par la compétition,
11:08 comme on le disait précédemment.
11:10 Et puis, pour les Américains, il fallait obligatoirement en passer par là,
11:13 puisque SpaceX, et peut-être même Boeing, mais surtout SpaceX,
11:17 ont pu développer des vaisseaux beaucoup plus rapidement
11:19 que si la NASA avait dû le faire de son côté,
11:22 puisque avec la navette, tous les autres vaisseaux s'étaient arrêtés.
11:26 Et il faut savoir que pendant presque 10 ans,
11:28 les astronautes américains ne pouvaient aller sur la station spatiale
11:31 que grâce au Soyouz russe.
11:33 C'était donc aussi une question de souveraineté nationale
11:35 pour les Américains de reprendre le plus rapidement possible le contrôle de l'espace.
11:38 Merci beaucoup, Sylvain Rousseau, pour cette chronique.
11:42 Vous qui êtes notre spécialiste des questions spatiales,
11:44 peut-être vous nous redirez un mot demain à l'issue de ce tir, ce lancement.
11:48 On vous dira comment ça s'est passé.
11:50 On vous le dira en plein milieu de la nuit.
11:52 Pour nous, les Français, qu'on ne manquera pas de vous faire le point,
11:55 Demain matin.