Marilou Duponchel est journaliste et critique aux Inrockuptibles.
Retrouvez tous les entretiens de 8h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-du-week-end
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00:00 - Monsieur Cinéma sur Inter, Laurent Delmas, Marie-Louis Duponchel, vous êtes critique cinéma aux Inrocks,
00:05 membre du comité de sélection de la semaine de la critique avec en couverture des Inrocks cette semaine,
00:12 Léa Sédoux et Louis Garrel qui sont à l'affiche du dernier film de Quentin Dupieux, "Deuxième Acte".
00:17 Vous êtes dans le studio de Radio France à Cannes, beaucoup de questions à vous poser
00:21 et les auditeurs aussi peuvent vous interpeller au 01 45 24 7000 ou sur l'application Radio France.
00:29 Même question à tous les deux pour commencer, Marie-Louis Duponchel et Laurent Delmas,
00:34 qu'est-ce que vous avez retenu depuis le début du festival ? Une image, un temps fort, un film ?
00:39 Commençons avec vous Marie-Lou.
00:41 - Alors je dirais que pour moi l'image la plus forte de ce festival et qui je pense sera la plus forte,
00:47 c'est vraiment la montée des marges de l'équipe du film de Judith Gaudrech qui présentait il y a deux jours,
00:54 il me semble, son court métrage, moi aussi, en ouverture d'un certain regard.
01:00 C'est une montée des marges particulière avec un symbole très fort qui était que
01:06 chaque membre de l'équipe avait sa main comme ça, posée devant sa bouche en signe de...
01:11 pour raconter la manière dont la parole des victimes de violences sexuelles, d'agressions sexuelles,
01:17 ne sont pas entendues et je trouvais que c'était une image très très forte.
01:23 - Laurent, vous, c'est une nouveauté cinématographique ?
01:26 - Ah oui, vous le savez déjà, c'est un certain Albert Diodonné qui nous vient de 1927,
01:30 c'est un fantôme, c'est le fantôme du film... - 1927 !
01:33 - Eh oui, de Napoléon, vu par Abel Gance, c'est une pépite, une merveille, on en a vu trois heures,
01:39 on verra les sept heures et demie au total en début juillet à la scène musicale notamment à Paris
01:45 avec les orchestres et la maîtrise et le chœur de Radio France.
01:49 Non, c'est sidérant de modernité, d'inventivité, il y a trois images de temps en temps,
01:54 il y a du bleu saturé, du rouge saturé, du noir et blanc, et puis cet acteur Albert Diodonné
01:59 que le rôle a rendu quasiment fou parce qu'il s'est cru Napoléon jusqu'à la fin de sa vie.
02:04 - Alors, on a beaucoup parlé, la presse a beaucoup parlé du retour du cinéma américain à Cannes
02:10 avec, on l'a entendu, Francis Ford Coppola qui est en lice pour une troisième Palme d'Or,
02:15 avec les Palmes d'Honneur de Meryl Streep, et de George Lucas avec le western de Kevin Costner.
02:23 Alors peut-être, Marie-Lou Duponchel, avec cette présence américaine, en tout cas symbolique et forte,
02:30 quelle chance pour des français, par exemple, face à Coppola,
02:34 quelle chance pour ce premier film Diamant Brut qui a été projeté hier ?
02:38 - Alors c'est difficile de comparer mais je pense que...
02:41 - Ils sont dans la même catégorie ?
02:42 - Oui, oui, oui, oui.
02:44 - Est-ce qu'ils ne sont pas écrasés en fait par ces figures tutélaires du cinéma américain ?
02:48 - Je ne sais pas, moi j'espère que les choses peuvent quand même cohabiter.
02:52 Je trouve ça plutôt réjouissant d'ailleurs quand on voit un cinéaste comme Coppola
02:56 dans une compétition avec une jeune cinéaste qui vient montrer son premier long métrage.
03:02 Je trouve ça plutôt enrichissant.
03:04 Par rapport à la présence du cinéma américain, c'est vrai que c'est une belle année.
03:08 Il y a aussi un jeune cinéaste américain du côté de la quinzaine des cinéastes
03:13 qui s'appelle Tyler Taormina, qui avait fait un très beau premier film il y a quelques années.
03:19 Donc c'est vrai qu'il y a des choses réjouissantes.
03:21 Après, je pense que le cinéma français cette année est aussi très présent et très réjouissant.
03:28 Moi c'est vrai que je fais partie du comité de sélection des films de la semaine de la Critique
03:33 et on a vu énormément de premiers et de deuxièmes longs métrages français très beaux.
03:41 - Donc beaucoup de découvertes.
03:42 - Exactement. J'ai l'impression que c'est vraiment un peu le motif de cette année.
03:47 C'est vraiment cette idée de découverte.
03:50 Puisqu'on voit, la semaine de la Critique, c'est vrai que c'est la sélection qui est là
03:54 pour révéler et mettre en avant des premières oeuvres.
03:57 Mais on voit que dans d'autres catégories, il y a aussi énormément de premiers et de deuxièmes longs métrages.
04:03 Et le cinéma français, à mon avis, a beaucoup de choses à proposer cette année.
04:08 Que ce soit les fantômes de Jonathan Miller, les reines du drame d'Alexis Langlois aussi.
04:12 On a hâte que les gens découvrent le film samedi.
04:15 - Le film de Jacques Audiard.
04:17 - Le film de Jacques Audiard.
04:18 - Le film de Jacques Audiard qui est toujours très attendu.
04:20 - En noir et blanc.
04:21 - Et le film de Michel Hazanavicius d'après Jean-Claude Grimbert.
04:25 - C'est un film d'animation en compétition, ce qui est assez gonflé parce que très rare.
04:29 Et c'est un film magnifique, magnifique qui pourrait peut-être même créer la surprise.
04:35 Il est présenté le dernier jour du festival.
04:37 Ça a porté chance à une certaine Rosetta par exemple, cette place dans le festival.
04:42 - Et Laurent, il y a aussi la naissance de deux réalisatrices françaises que vous avez notées.
04:48 - Mais oui, effectivement.
04:49 - "Les Camements Bruts", on l'a déjà un petit peu évoqué sur le parcours d'une jeune ado du Sud
04:58 prise dans la tourmente de la télé-réalité pour aller vite.
05:02 Et puis une autre pépite, et c'est ça qui est formidable à Cannes.
05:06 Vous avez cette jeune femme du côté de Fréjus qui veut faire de la télé-réalité.
05:11 Et puis à côté, vous avez dans le Jura un jeune homme à peu près du même âge qui lui veut faire du comté.
05:17 Il veut faire du fromage pour s'en sortir.
05:19 C'est un film de Louis Courvoisier qui est étonnant, un premier film là aussi,
05:23 qui est tout à fait étonnant parce que ça pourrait paraître anecdotique, un peu facile, etc.
05:27 Or pas du tout.
05:28 Il y a une distribution qui n'est pas connue, qui n'est pas faite de grands acteurs,
05:33 mais qui est formidable, qui fonctionne très, très bien.
05:36 Et il y a un regard porté sur cet adolescent qui en veut à tout prix.
05:40 Vous sortez de là, vous savez fabriquer du comté.
05:42 C'est pas mal du comté artisanal.
05:44 - Oui, c'est utile.
05:45 - Oui, c'est très bien fait.
05:47 Et puis plus sérieusement, franchement, là aussi, c'est un beau premier geste de cinéma.
05:51 C'est ça Cannes aussi.
05:52 C'est d'accord évidemment Coppola et Coman et Paul Schrader et tous ces grands que nous aimons.
05:58 Mais c'est aussi le prix, le plaisir de la découverte des talents émergents, des grands de demain.
06:05 - Et venus de toute la planète.
06:07 - Marie-Lou Duponchel, au moment de la conférence de presse d'annonce du festival de Cannes,
06:15 le délégué général Thierry Frémault avait dit qu'il voulait parler de cinéma,
06:21 éviter une édition polémique.
06:22 Alors là, vous nous avez parlé du mouvement #MeToo, du court-métrage de Judith Godrech
06:26 et de la montée des marches particulièrement forte et symbolique.
06:29 Est-ce que malgré tout, vous diriez que pour l'instant, mission accomplie,
06:32 cette édition de Cannes n'est pas polémique et on parle encore de cinéma ?
06:36 - Oui, pas polémique.
06:39 Après, c'est aussi peut-être parfois le problème que ce soit pas polémique.
06:42 Je pense aussi à une autre image très forte de cette édition,
06:47 qui est la présence, encore une fois, cette année, du collectif "Sous les écrans, la dèche"
06:51 qui réunit beaucoup de gens qui travaillent dans les festivals et qui sont...
06:58 - "Sous les écrans, la dèche", oui, qui a une dimension sociale très importante.
07:02 - Voilà.
07:03 Donc, qui sont complètement investis dans le cinéma et qui pourtant ont des métiers très précaires.
07:11 Ils ont été accueillis et on leur a donné la parole à la semaine de la Critique, à la quinzaine, à la CIDE.
07:17 Ils ont tenté aussi de faire quelque chose lors de la cérémonie d'ouverture.
07:21 Je trouve ça aussi important que ces gens soient entendus
07:25 et que le réel puisse vraiment avoir une place importante dans le Festival de Cannes.
07:31 - Le Festival de Cannes, c'est le plus grand festival du monde, Laurent Delmas.
07:35 Est-ce que vous avez le sentiment qu'après des années d'inquiétude, des années d'incertitude,
07:40 des années post-Covid, le cinéma a enfin retrouvé sa vitalité ?
07:46 - Oui, juste un mot sur ce qu'on vient de dire.
07:48 Le réel revient aussi en force dans les films, c'est ce dont parlait Thierry Fremaux.
07:53 Parce qu'en deux jours, on a vu des choses sur la Corse et le nationalisme,
07:58 Paul Pott, le comté, je le disais, la guerre de sécession, les criminels de guerre en Syrie,
08:02 l'infanticide en Allemagne, la réalité virtuelle en France et le deuil en Islande.
08:06 Alors, ce n'est pas forcément un sujet polémique, mais en tous les cas, ce sont des sujets bien réels.
08:10 Et un bras-le-corps, que le cinéma mondial prend un bras-le-corps.
08:12 Oui, je crois qu'on est, comme vous le disiez très bien, en train de repartir dans les rails habituels,
08:19 traditionnels du festival, dans ses chaussures, dans ses souliers, très beaux et qui fonctionnent très bien,
08:25 après effectivement quelques années de problématiques dues notamment au Covid.
08:30 - En tout cas, merci infiniment à tous les deux d'avoir donné un aperçu de ce qui se joue au 77ème festival de Cannes.
08:37 - Et ça n'est que le début !
08:38 - On sait que c'est un exercice sportif.
08:42 Merci Laurent Delmas, on vous retrouve demain dans le 6/9 et puis on aura tout vu avec Christine Masson.
08:47 Et merci infiniment Marie-Lou Duponchel des AROK.