• l’année dernière
Christophe Naegelen, député LIOT des Vosges.

Avant 2017, ce patron d'un magasin familial de meubles dans les Vosges s'était distingué par un titre de champion régional de boxe française. Et puis, du jour au lendemain, sans aucune expérience politique, il s'est présenté aux législatives. Christophe Naegelen co-préside aujourd'hui le groupe LIOT à l'Assemblée.


Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00 -Mon invité a longtemps été à la tête
00:02 d'un magasin familial de meubles dans les Vosges
00:04 et du jour au lendemain, sans aucune expérience politique,
00:08 il est devenu député.
00:09 Il est aujourd'hui coprésident du groupe Liott à l'Assemblée.
00:13 Musique de tension
00:15 ...
00:27 -Bonjour, Christophe Négelen.
00:29 On ne peut pas dire que vous ayez baigné
00:31 dans la politique pendant votre enfance,
00:33 mais vous avez été très précoce.
00:35 J'ai découvert qu'à 9 ans, vous avez prononcé
00:38 votre premier discours politique, dans votre commune d'origine,
00:42 et c'était déjà un discours de député.
00:44 -Oui, tout à fait.
00:45 Coco Spiller, Christian Spiller, dit Coco,
00:48 qui, à l'époque, était député,
00:50 qui gérait le magasin que je gère actuellement
00:53 et qui, oui, me faisait tous les 15 août,
00:55 tous les 15 août, lors de la montée des Charbonniers,
00:59 lire son discours devant toutes les personnes.
01:02 -C'était la grande fête locale.
01:04 Pourquoi vous avez choisi, vous, âgé de 9 ans, 10 ans ?
01:07 -Oui, je suis de 83, donc...
01:09 Tout simplement parce que...
01:12 Je veux dire, c'était...
01:13 J'étais un enfant d'un des vendeurs du magasin,
01:16 parce qu'il y a des relations privilégiées
01:19 avec Marguerite et Coco Spiller,
01:21 que je considère comme sa femme,
01:23 comme la famille, en fait.
01:25 -Est-ce qu'il a senti en vous des prédispositions
01:28 ou... -Non, je pense qu'il était
01:30 beaucoup trop tôt. C'était quelqu'un
01:32 qui était extrêmement chaleureux, extrêmement ouvert,
01:36 qui avait envie aussi de mettre en avant les autres.
01:39 Je pense que c'est pour ça qu'il trouvait plus intéressant
01:42 que ce soit un enfant qui le fasse.
01:44 -L'histoire de ce discours n'est pas anecdotique.
01:47 Christian Spiller était surnommé Coco,
01:49 c'était le député à l'époque, assez iconoclaste,
01:52 avec un style bien à lui, une façon de faire de la politique.
01:56 Vous le considérez pas forcément comme votre mentor en politique,
01:59 et en même temps, vous avez repris plusieurs des principes
02:02 qui ont guidé son action.
02:04 Quand j'évoque sa façon de faire de la politique,
02:07 c'est aussi ce côté indépendant à tout prix des partis,
02:10 priorité au territoire. -C'est deux choses.
02:12 C'est l'indépendance des partis, c'est, comme vous l'avez dit,
02:16 d'abord le lieu où on habite, notre territoire,
02:19 un député de terrain, et en fait, on est tous les deux commerçants.
02:22 Le point commun entre le commerce et la politique,
02:26 c'est qu'il faut aimer les gens pour faire du commerce,
02:28 pour faire de la politique, il faut aimer les gens.
02:31 Coco aimait profondément les personnes qui l'entouraient,
02:35 aimait profondément les habitants de la circonscription,
02:38 et je suis complètement pareil.
02:40 -Vous êtes en politique à présent,
02:42 parce qu'ils sont étonnants, je l'ai évoqué,
02:44 mais à 9 ans, on a vu que vous vous sembliez
02:47 presque prédestiné à devenir député,
02:49 et puis après, il n'y a plus aucun engagement politique
02:52 avant 2017, et là, du jour au lendemain,
02:55 vous avez pris la initiative sans être dans aucun parti.
02:58 Qu'est-ce qui vous a pris ? Comment ça s'est fait ?
03:01 -J'ai toujours été intéressé par la chose publique,
03:04 c'est le premier point, et je suis fondamentalement amoureux
03:07 de mon territoire, j'y ai né, j'y ai grandi,
03:10 j'y ai fait mes études.
03:11 Je suis parti pendant quelques années,
03:13 je travaillais à l'international,
03:15 j'y suis revenu pour reprendre le magasin familial,
03:18 tel que vous le disiez, j'avais envie de m'investir,
03:21 mais avec ces deux jambes, qui sont celles du député,
03:25 local et national.
03:26 Je voulais pas me concentrer uniquement au niveau local,
03:29 pas uniquement au niveau national, mais vraiment faire les deux,
03:33 avoir une influence sur ma circonscription,
03:35 comment je peux aider au mieux mon territoire et ses habitants,
03:39 et comment je peux me positionner sur des problématiques nationales.
03:43 -Votre première tentative a été la bonne,
03:45 ça s'est joué sur quoi, votre victoire ?
03:48 Comment vous l'expliquez ? -Je pense l'approche terrain.
03:51 Le fait de parler, encore une fois, avec le coeur,
03:55 d'exprimer pourquoi je voulais y aller.
03:58 Après, même sans être élu,
04:00 j'étais très présent sur la circonscription,
04:03 de par mon métier, de par mon engagement associatif.
04:06 Donc, voilà, je pense que c'est aussi
04:09 ce qui a convaincu les habitants de mon territoire.
04:13 -Vous êtes engagé pour pouvoir changer la vie des gens
04:16 de votre territoire.
04:17 Il y a un combat que vous menez depuis votre élection
04:20 pour sauver l'hôpital de Remirmont.
04:22 On va revoir cela en image dans l'hémicycle.
04:25 -C'est sur l'hôpital public de Remirmont
04:28 que je vais axer ma question.
04:30 -Monsieur le ministre de la Santé,
04:33 notre système est en crise,
04:35 et notamment dans les territoires ruraux.
04:38 L'hôpital de Remirmont en est le parfait exemple.
04:41 On constate un manque de médecins,
04:43 de personnels soignants dans nos hôpitaux.
04:46 C'est un constat dans les Vosges
04:48 comme c'est un constat dans tout notre pays.
04:50 -Ce sont quelques-unes des questions que vous avez posées
04:53 sur cette problématique au coeur de votre circonscription,
04:57 sauver cet hôpital.
04:58 Vous êtes à l'origine d'une commission d'enquête
05:01 sur les difficultés d'accès aux soins dans les hôpitaux.
05:04 Ca illustre votre façon de faire de la politique,
05:07 la priorité donnée aux territoires,
05:09 mais est-ce que vous avez du pouvoir sur des sujets comme cela ?
05:13 Est-ce que vous avez une influence politique ?
05:16 -Ce pouvoir-là, on doit se le donner.
05:18 Le député n'a eu qu'une voix consultative
05:20 au Conseil de surveillance de l'hôpital.
05:23 Il n'a, de fait, pas de lien de subordination
05:26 avec les directeurs ou autres,
05:28 mais quand on se donne les moyens,
05:30 en interpellant régulièrement le gouvernement,
05:33 en allant régulièrement à la rencontre de la R.S.,
05:36 des praticiens... -Agence régionale de santé.
05:38 -En s'octroyant ou en se construisant
05:41 une expertise sur le sujet, on devient incontournable
05:44 et de ce fait-là, on est capable d'avoir une influence.
05:47 -Le fait de présider un groupe politique à l'Assemblée,
05:50 ça donne plus de poids, ça ouvre plus de portes ?
05:53 -C'est évident, surtout dans une majorité relative
05:56 telle qu'on l'a aujourd'hui, qui fait que, régulièrement,
06:00 on est à Matignon, donc c'est l'occasion aussi
06:02 de glisser aux différents Premiers ministres.
06:05 On a pu avoir le cas et les problématiques
06:07 qui se passent dans nos territoires respectifs,
06:10 et pour moi, celui des Vosges.
06:12 -On va évoquer ce rôle de coprésident de groupe
06:15 que vous partagez avec Bertrand Pancher.
06:17 C'est le groupe Liott, pour Liberté indépendant
06:20 Outre-mer et territoire.
06:21 On y trouve des députés de centre-droit,
06:24 d'anciens socialistes dissidents de la NUP,
06:26 on y trouve aussi quatre élus corse,
06:28 un indépendantiste breton, plusieurs députés ultramarins.
06:31 C'est un groupe assez hétéroclite.
06:34 François Bayrou avait une phrase au sujet des centristes.
06:37 "Rassembler les centristes, c'est comme conduire
06:40 "une brouette remplie de grenouilles."
06:42 Est-ce que ça vaut aussi pour le groupe Liott ?
06:45 -C'est des groupes qui sont faits lire sur leur nom,
06:47 et non pas du fait d'une étiquette politique,
06:50 et qui se retrouvent parce qu'ils se rendent compte
06:53 qu'ils ont plus de choses en commun que de choses divergentes,
06:56 et notamment l'intérêt fondamental du pays.
06:59 Cinq députés socialistes, quatre autonomistes,
07:02 trois corses, un breton...
07:03 -Qu'est-ce qui fait la cohésion ?
07:05 -On échange beaucoup, on discute beaucoup,
07:08 et surtout, on est d'accord sur le fait qu'on peut être
07:11 sur certains points en désaccord.
07:13 C'est important. Dans beaucoup de groupes parlementaires,
07:16 c'est très vertical, tout le monde doit être d'accord,
07:19 voire être au garde-à-vous.
07:21 Chez nous, il y a une liberté de vote totale,
07:23 on discute, et à la fin, si on n'est pas d'accord,
07:26 la liberté de vote prime.
07:28 -Dans cette assemblée sans majorité absolue,
07:30 on dit souvent que votre groupe pourrait faire tomber
07:33 le gouvernement en rassemblant à la fois
07:36 les oppositions de droite et de gauche
07:38 sur une motion de censure.
07:39 On l'a vu avec la réforme des retraites,
07:42 on est tout près. Avec Bertrand Pancher,
07:44 vous pouvez appuyer sur ce bouton à n'importe quel moment.
07:47 C'est pas un peu comme la dissuasion nucléaire,
07:50 une arme qui n'est pas forcément destinée à être utilisée ?
07:53 -Déjà, il faut pas...
07:55 Si on l'utilise, il faut l'utiliser à bon escient.
07:58 Ca peut pas s'utiliser à n'importe quel moment,
08:00 et ça peut pas s'utiliser sur n'importe quel texte.
08:03 Donc, c'est ça, les éléments déclencheurs.
08:06 -Vous avez conscience de cette responsabilité particulière
08:10 qui peut vous incomber ?
08:11 -Bien sûr, et on en parle régulièrement.
08:14 Au sein de notre groupe, il y a des divisions sur ce sujet.
08:17 Il faudrait l'actionner plus souvent,
08:20 d'autres, moins souvent, mais au bon moment.
08:22 Donc, voilà, c'est aussi l'objet de nombreuses discussions.
08:27 -De nombreux débats entre vous.
08:29 Quand on tape votre nom sur Internet,
08:32 il y a le député Christophe Neyjelen,
08:34 et puis il y a un boxeur, et ce boxeur, c'est vous.
08:37 Boxe française, qu'est-ce qui vous a amené vers ce sport ?
08:40 Qu'est-ce que vous êtes allé chercher dans ce sport ?
08:43 -Beaucoup de choses.
08:44 Déjà jeune, j'étais assez bagarreur aussi,
08:48 et le fait de vouloir se canaliser,
08:51 de vouloir apprendre aussi,
08:53 ça a été extrêmement important pour moi,
08:56 et c'est un sport très formateur.
08:58 Quand on monte sur le ring pendant un combat,
09:00 pendant 8 minutes, donc 4 fois 2 minutes,
09:02 on sait qu'on va se prendre des coups...
09:05 -Parce que vous, c'est la boxe française
09:07 avec des vrais coups portés.
09:09 -Vous ne pouvez pas le toucher. -C'est du combat.
09:12 Comme disait à l'époque mon entraîneur,
09:14 le but, c'est d'envoyer le gars au frigo.
09:16 C'est des coups qui sont des coups portés.
09:19 Ca vous forge un caractère, clairement.
09:22 -Vous étiez jusqu'à quel niveau ?
09:24 -J'ai, en 2013 ou 2012, été champion du Grand Est,
09:28 mais Alsace-Lorraine, Bourgogne et Franche-Comté.
09:30 -Pas le très Grand Est. -Pas le très Grand Est.
09:33 -Beaucoup d'hommes et de femmes politiques
09:36 aiment se faire photographier en boxeur.
09:38 C'est une photo d'Emmanuel Macron qui a beaucoup fait réagir.
09:41 Avant lui, on avait vu Edouard Philippe,
09:44 mais aussi Valérie Pécresse, Olivier Véran.
09:46 Comment vous expliquez ça ?
09:48 Qu'est-ce qui peut attirer les hommes et les femmes politiques
09:51 vers ce sport ? Est-ce que c'est l'image qu'ils peuvent donner d'eux
09:55 ou est-ce que c'est la boxe ?
09:57 -Là, je vois Olivier Véran avec des pattes d'ours,
10:00 Valérie Pécresse sur un sac, Emmanuel Macron sur un sac.
10:03 Un sac où des pattes d'ours, ça rend jamais les coups.
10:06 -C'est quoi, juste ? -Ce qu'a l'entraîneur, là.
10:10 -Ah oui, pour apportir des coups. -Exactement.
10:13 Et ça, ça rend pas les coups.
10:15 Donc, moi, je veux voir, comme certains collègues,
10:18 et je suis loin d'être le seul,
10:20 mais qui aillent vraiment sur le ring avec un adversaire.
10:24 C'est un sport où il y a énormément de respect,
10:27 de respect envers l'adversaire,
10:29 et c'est ce qui manque dans notre hémicycle.
10:31 -Il y a un enjeu d'image derrière ça ?
10:34 -Sans doute, parce que ça prouve une certaine mentalité,
10:37 mais en même temps, c'est physique.
10:39 -Et c'est populaire. -C'est un sport très populaire.
10:42 -Que ce soit en boxe ou en politique,
10:45 un trait de caractère ressort quand vos proches parlent de vous.
10:48 C'est un côté très compétiteur, parfois poussé à l'extrême.
10:51 Est-ce que c'est ça qui vous a permis de devenir
10:54 à la fois champion régional et président de groupe à l'Assemblée ?
10:58 -Oui, alors, c'est vrai que Pierre de Coubertin
11:00 disait l'essentiel de cette partie du JP.
11:03 -Oui. -Quitte à faire quelque chose,
11:05 je préfère aller au bout et être victorieux,
11:07 c'est une évidence.
11:09 Après, on peut être compétiteur sans être mauvais joueur.
11:12 -On va passer à notre quiz, à présent.
11:15 Je vais vous proposer des débuts de phrases
11:17 et vous allez devoir les compléter.
11:19 C'est bon pour vous ? -Très bien.
11:21 -La prochaine fois que Hugo Bernalicis
11:23 perturbe les travaux en commission...
11:25 -Je lui demande de manière très gentille de s'asseoir.
11:28 -Il ne prendra pas une bonne droite de votre part ?
11:31 -Non, parce que ça avait été assez tendu
11:34 quand il y avait eu un incident de séance
11:36 et vous étiez intervenu pour le calmer.
11:38 -A deux reprises. -Oui.
11:40 -La deuxième reprise, ça avait été un peu plus tendu
11:42 et une huissier est intervenue, mais après, c'était resté...
11:46 -Avec les députés corse de Lyott, il vaut mieux éviter...
11:49 -De parler politique ?
11:51 -C'est embêtant quand on est président de groupe.
11:53 -Non, avec les députés corse, on échange sur tous les sujets,
11:57 mais c'est vrai que la Corse,
11:59 c'est un sujet que je ne connais pas.
12:01 -Vous ne vous aventurez pas sur le sujet Corse ?
12:03 -Je préfère ne pas m'aventurer.
12:05 -Quand un démarcheur téléphonique m'appelle...
12:08 -Je lui dis "Est-ce que vous connaissez la loi Nejlen ?"
12:11 -Oui, mais ça veut dire peut-être que cette loi
12:13 que vous avez votée n'est pas si efficace que ça.
12:16 Elle est censée mettre fin aux démarchages abusifs ?
12:19 -C'est pas qu'elle n'est pas efficace.
12:21 C'est interdit de rouler avec plus de 0,5 g d'alcool.
12:24 Malheureusement, il y a des gens qui le font.
12:27 C'est interdit aux opérateurs et aux centrales d'appel
12:30 d'appeler et malheureusement, il y en a qui le font.
12:33 C'est pour ça qu'on doit donner plus de moyens à l'ADG et à l'ARCEP
12:37 de telle manière à plus contrôler,
12:39 à mettre des amendes telles que ça peut l'être
12:41 depuis quelques années,
12:43 pour qu'on ne soit plus embêtés par le démarchage téléphonique.
12:46 -Merci, Christophe Nejlen. -Merci à vous.
12:49 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
12:51 ...

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