• il y a 6 mois

Chaque jour, découvrez la pépite du jour dans la France Bouge avec Elisabeth Assayag.
Retrouvez "La pépite" sur : http://www.europe1.fr/emissions/la-france-bouge-academie

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00:00 Europe 1, la France bouge, la pépite.
00:04 Alors avant de parler du MUMO, Ingrid Brochard, on va parler de vous,
00:07 parce que vous êtes une entrepreneur hors normes.
00:09 Vous avez monté plein de boîtes.
00:11 Longue histoire autour de l'entreprenariat, un parcours complètement atypique.
00:15 D'abord vous avez grandi en Guadeloupe, bac à 16 ans en candidate libre,
00:19 et puis vous partez aux Etats-Unis.
00:21 Dès l'âge de 19 ans, vous montez votre première entreprise dans les cosmétiques.
00:26 Oui, alors en fait c'est vrai que j'ai un côté entrepreneur.
00:30 Monter ma boîte à 19 ans, j'avais fait un stage en Asie, à Hong Kong, pour le Body Shop.
00:36 Et donc pour payer mon appartement, je cumulais un autre stage,
00:40 parce que l'e-prix c'était hors de prix, dans une société de trading française.
00:45 Et en fait en fin de stage, ils n'avaient pas d'argent pour me payer,
00:48 mais heureusement, ils m'avaient acheté un billet d'avion pour aller à Taïwan,
00:52 au salon du cosmétique, parce que j'étais passionnée de cosmétique.
00:55 Et en fait, je suis rentrée sans vêtements, et dans mes valises,
00:59 avec plein de maquillage, plein de rouge à lèvres, plein de produits.
01:02 Et suite à ça, j'ai monté ma société, j'achetais des cosmétiques en Asie,
01:07 que je revendais à la grande distribution.
01:09 En France ?
01:10 En France.
01:11 Alors j'ai commencé avec les magasins Tati, ensuite Leclerc, Carrefour, Cotinant.
01:16 Donc une société que j'ai vendue ensuite à Markwins.
01:21 Que vous avez gardée quand même pendant une quinzaine d'années.
01:23 Oui, j'ai développé pendant 15 ans.
01:25 En fait, au début, j'étais fière, je voyais les filles se maquiller dans le métro,
01:29 avec mes produits, je les voyais dans les magazines.
01:33 Et très vite, au bout de 7 ans, il m'a fallu 7 ans pour un peu prendre conscience
01:38 des conditions de fabrication.
01:40 Et cette année-là, chaque année je négociais les prix auprès des fournisseurs,
01:44 cette année-là je négocie et je dis "voilà, l'argent, je ne le veux pas pour moi,
01:49 mais s'il vous plaît, améliorez les conditions de vie de vos salariés".
01:52 Et là, mon fournisseur m'a regardé, a rigolé, son rire me résonne encore dans la tête,
01:58 et il m'a dit "it's time for you to stop business".
02:01 Et en fait, il avait raison, parce qu'à mon petit niveau, je ne pouvais pas arrêter.
02:05 - Vous ne pouvez pas changer le monde. - Ce fournisseur made in China.
02:09 - C'était trop. - Voilà.
02:10 - Mais vous avez eu cette prise de conscience. - Complètement.
02:12 Vous poursuivez, Ingrid Brochard, l'aventure entrepreneuriale
02:15 en montant un magazine d'art contemporain.
02:18 Comment vous avez passé des cosmétiques à l'art ?
02:21 Vous avez une passion pour l'art à l'origine ?
02:23 - Alors, pas du tout. En fait, moi je viens d'une famille où on nous a plutôt poussé
02:28 dans les études, le sport, les voyages. J'ai eu une enfance très heureuse,
02:32 mais c'est vrai que le pan culturel ne faisait pas partie du quotidien.
02:36 On n'allait ni au théâtre, ni à l'opéra, ni dans les musées.
02:42 Et en fait, j'ai découvert le monde du sensible, ce monde, en habitant à Paris,
02:50 donc quand j'ai monté ma société de cosmétiques.
02:54 Et quand j'ai vendu, j'ai pris trois mois, je suis partie en Antarctique.
02:59 Et là, je me suis dit, bon, maintenant, qu'est-ce que je fais ?
03:02 Et en fait, j'ai eu envie de faire un projet pour la société.
03:05 - Il faut y penser, je pars en Antarctique, vous auriez pu aller à Bordeaux.
03:08 - Oui, je sais, mais bon, quand on... En fait, j'avais beaucoup voyagé,
03:12 j'ai fait des stages à Hong Kong, très jeune, à 17 ans, j'ai monté ma société.
03:18 Donc voilà, j'avais envie d'un voyage un peu unique,
03:21 et c'était la bonne destination, parce que c'est vraiment un...
03:25 - Un voyage extraordinaire. - Un voyage extraordinaire.
03:27 Et là-bas, j'ai entendu le bruit du silence.
03:30 Donc voilà, et c'est un voyage aussi un peu... - Nicétique.
03:34 - Exactement, puisque sur place, je me suis dit, bon, maintenant, qu'est-ce que je fais ?
03:38 Et je me suis souvenu de mon enfance, quand j'étais petite, j'attendais le bibliobus.
03:43 On habitait dans des zones très rurales, et c'était vraiment une attente,
03:47 parce que c'était une ouverture sur le monde, tous ces livres.
03:50 Et je me suis dit, pourquoi pas faire la même chose, en fait, avec les œuvres d'art ?
03:54 - Le bibliobus, c'est quand vous n'avez pas de bibliothèque près de la maison,
03:57 il y a ce bus qui passe rempli de livres.
03:59 - Voilà, et donc je me suis dit, faisons la même chose avec les œuvres d'art.
04:03 Alors, au départ, comme j'avais eu ce magazine d'art contemporain,
04:06 et je produisais des émissions télé sur Direct 8,
04:09 j'avais rencontré énormément d'artistes, des grands artistes,
04:12 exposés dans les plus grands musées.
04:14 Je les ai appelés, je leur ai dit, voilà, j'ai ce projet.
04:17 Ils m'ont dit, c'est super, ils sont tous vraiment fédérés autour du MUMO,
04:22 et tout de suite, ils ont dit, on fera des œuvres pour le camion,
04:25 parce que justement, ça les intéressait d'aller vers des publics qui ne sont pas initiés,
04:30 de proposer leurs œuvres, pas forcément que dans les musées.
04:34 Il y a un artiste américain qui m'avait dit, moi, ma plus belle expérience dans ma vie,
04:40 ça a été de montrer mes œuvres sur un parking de supermarché.
04:43 - Voilà, l'art peut être partout.
04:47 Donc là, on est en 2011, c'est là où vous fondez le musée ?
04:50 - Oui. - C'est votre deuxième, troisième boîte ?
04:53 - Alors, c'est la troisième. - Vous avez fait un passage sur les locations de vêtements aussi.
04:58 - Alors, c'est après ça. Je suis retournée aussi sur les bancs de l'école,
05:03 j'ai fait un master à Sciences Po, Management des politiques publiques,
05:06 puisque j'avais commencé ma carrière très jeune.
05:10 Mais oui, donc là, je monte le MUMO, c'est en 2011, à Saint-Venant,
05:16 dans une école primaire, puisque c'est là où on nous apprend à lire, à écrire, à compter,
05:21 c'est tout aussi important de nous apprendre à rêver, imaginer.
05:24 Alors, je n'achète pas un camion, je contacte un architecte américain, Adam Kalkin,
05:29 qui va me créer cet espace d'exposition mobile.
05:33 Donc, avec un système hydraulique, c'est un camion, un container,
05:36 qui se déploie et se transforme en deux étages pour proposer une exposition d'art contemporain.
05:43 - Mobile. Et ça, c'est le MUMO ? - Et ça, c'est le MUMO.
05:46 - Alors, on va pitcher quand même. - On pitche le MUMO,
05:48 et après, on revient dans le détail sur ce qu'est ce MUMO aujourd'hui, en 2024.
05:53 Le MUMO, on vous écoute Ingrid ?
05:55 - Allez, c'est à vous.
05:57 - MUMO pour Musée Mobile, donc imaginez un camion qui se déploie dans les cours de récréation,
06:03 sur les parkings de supermarchés, les places d'églises,
06:08 pour se transformer en espace d'exposition,
06:12 donc 50 mètres carrés d'art contemporain et d'art moderne.
06:16 Donc, vous allez pouvoir découvrir des tableaux, des sculptures, des vidéos, des photos.
06:22 MUMO va à la rencontre des enfants, donc 50% des enfants n'avaient jamais été au musée.
06:28 On a construit un nouveau camion pour faire circuler les œuvres des fracs en région.
06:34 Donc, à chaque fois qu'on change de région, on change d'exposition.
06:37 Il y a trois ans, on a construit un nouveau camion pour faire circuler les œuvres du Centre Pompidou,
06:43 donc la collection du Centre Pompidou.
06:45 Il faut savoir que c'est une collection nationale,
06:48 et que seulement 70% des Français ne l'ont jamais vue.
06:55 On a construit aussi un camion pour la Tate en Angleterre,
06:59 donc c'est une idée aussi qui s'exporte.
07:01 Extraordinaire, il y a eu le Gong, nous ça nous fait tous rêver.
07:04 Autour de la table de la France Bouge, Caroline Darras, directrice des projets culturels à Chenonceau.
07:09 - Ah bah complètement ! - C'est génial !
07:11 - Vous connaissiez MUMO ? - Alors, je connaissais de nom,
07:14 et je ne connaissais pas, et je suis ravie de cette rencontre, voilà.
07:17 - Avec Ingrid Broschard. - Par ailleurs.
07:19 Et je comprends l'idée, parce que quand à Chenonceau,
07:22 on a fait ces expositions pendant 30 ans d'art contemporain,
07:25 en fait, ça remonte, c'était avant que tout le monde en fasse,
07:29 on était assez précurseurs, c'était la même idée,
07:31 c'était pour le prix d'un billet, on vous ouvre une galerie dans Chenonceau,
07:35 et tout le monde a le droit de voir les œuvres de Manolo Valdès,
07:38 d'Elanane, c'était la plus grande rétrospective des œuvres d'Elanane, etc.
07:43 Donc je comprends l'idée, je la trouve magnifique.
07:45 - Clara, vous connaissiez le MUMO ? - Moi je connaissais de nom aussi,
07:47 mais je trouve que c'est vraiment fantastique, même pour les enfants, c'est génial.
07:50 - Et vous Nathanaël Lugué ? - Je vais être honnête,
07:52 je ne connaissais pas, mais j'adhère complètement au projet, c'est vraiment génial.
07:55 - C'est extraordinaire. Donc vous le montez rapidement,
07:58 vous faites appel à cet artiste américain qui vous...
08:01 - Adam Kalkin, architecte.
08:03 - Adam Kalkin, architecte, qui vous conceptualise le projet, le camion,
08:08 et ensuite il se passe quoi ?
08:09 - Alors il se passe que les artistes créent des œuvres in situ,
08:13 donc à l'intérieur, des artistes comme James Turrell, Paul McCarty,
08:18 Daniel Buren, Pierre Huyghe,
08:21 vraiment des artistes exposés dans les plus grands musées.
08:24 Et ça y est, l'aventure commence à Saint-Venant,
08:28 ensuite on part en Afrique, en Côte d'Ivoire et au Cameroun.
08:32 - Mais comment vous partez ? Le camion sillonne ou vous le mettez dans un bateau ?
08:37 - Le camion sillonne les routes de France,
08:40 donc chaque jour il est dans une école différente ou dans une ville différente,
08:45 et ensuite quand il est parti de Marseille,
08:48 on a pris la route pour l'Afrique, donc en bateau,
08:51 et ensuite... alors là on a perdu notre mobilité,
08:54 parce que les écoles étaient immenses,
08:56 c'est des écoles de 3000 élèves,
08:59 donc on est restés dans la cour de l'école pendant deux mois,
09:02 c'était un peu inversé.
09:04 - C'était au cœur de l'école.
09:06 - Au cœur de l'école.
09:07 - Donc ça, ça se développe de plus en plus, c'est gratuit.
09:10 - C'est gratuit, mais alors comment vous faites pour en vivre une grille de brochards ?
09:15 J'imagine qu'il y a beaucoup de personnes, des mécènes, comment ça se passe ?
09:19 - Alors oui, c'est vraiment un projet pour moi à but non lucratif,
09:23 puisque quand on parle d'accessibilité,
09:26 la première barrière c'est le prix, l'éloignement,
09:30 et après il y a le côté aussi psychologique,
09:33 c'est pas forcément inné de pousser la porte d'un musée,
09:37 les gens ils se sentent pas forcément à l'aise,
09:39 donc en fait la gratuité est importante dans ce projet.
09:44 Alors d'un point de vue du modèle économique,
09:47 au début, moi je suis plutôt une femme d'action,
09:49 donc le projet il s'est lancé,
09:51 j'avais monté un fonds de dotation,
09:54 et donc je pouvais capter que des financements de mécénats d'entreprise ou de mécènes.
10:00 Et très vite en fait, comme on était dans les écoles,
10:02 on a été repéré par le ministère de l'éducation nationale,
10:05 de la culture, même les territoires voulaient nous aider.
10:08 - Mais quand vous y allez, vous demandez l'autorisation de l'éducation nationale,
10:11 on peut rien faire dans les écoles sans avoir le directeur ?
10:14 - Oui, complètement, en fait on a des agréments avec les conseillers pédagogiques,
10:17 donc eux ils étaient ravis parce que jusqu'à présent,
10:20 ils présentaient des œuvres d'art sur des polycopiés,
10:22 c'était une chance inouïe pour eux de créer cette rencontre des enfants avec les œuvres.
10:29 Donc très vite on a monté une association pour capter des subventions publiques,
10:35 donc là du ministère des DRAC, le ministère en région,
10:40 et des territoires, départements, communautés de communes, régions.
10:45 - Et ensuite vous avez levé des fonds, vous avez réuni des actionnaires,
10:51 comment ça fonctionne ?
10:53 - Alors on n'est pas réellement dans une start-up,
10:55 c'est vrai que vous utilisez un langage "levé des fonds",
10:57 ça c'était plus dans mon aventure panoplie de location de vêtements de créateurs.
11:01 Non, alors là on touche des subventions publiques,
11:04 on va sensibiliser, on va déposer des dossiers auprès de fondations
11:09 qui distribuent de l'argent dans le secteur de la culture.
11:13 Mais aujourd'hui la fierté c'est qu'on est quand même financé
11:17 à plus de 60% de financement public.
11:21 Donc un projet qui était un peu fou, utopique,
11:24 est rentré dans les politiques publiques.
11:26 On le voit, même la ministre dernièrement a dit qu'elle voulait un ministère
11:31 qui soit le ministère au cœur de la culture pour les français
11:35 et elle veut une culture au pied des immeubles.
11:38 Le mumot est rempli.
11:40 - Vous remplissez complètement la mission.
11:42 Je tiens à préciser que le premier groupe qui vous a aidé c'est le groupe Bolloré.
11:45 - Exactement, c'est Vincent Bolloré,
11:47 puisqu'à l'époque je produisais des émissions pour Direct 8 sur l'art contemporain
11:52 et j'étais allée lui pitcher le projet
11:56 et tout de suite, c'est un homme qui est visionnaire,
11:59 il a tout de suite dit "Allez !"
12:01 - Il a vu dans le projet.
12:02 - Voilà, à une condition, c'est qu'il y ait d'autres mécènes.
12:05 Et ça aussi c'est très simple.
12:07 - Il y a eu la fondation Total, la fondation Peugeot-PSA qui vous ont aidé,
12:10 puis très vite vous avez reçu les subventions publiques.
12:14 Là en ce moment, ce mumot est en train de se diriger aussi vers le cinéma mobile.
12:19 On sort du musée, je crois que ce sera pour 2025 une Grimbrochard ?
12:23 - Oui, alors en fait j'ai rejoint la fondation Art Explora
12:27 et l'idée c'est de développer justement le musée mobile
12:31 et j'ai proposé en fait un contenu différent
12:34 parce que c'est vrai qu'aujourd'hui les jeunes regardent beaucoup les films sur leur portable,
12:39 sur les plateformes, ils regardent beaucoup de séries
12:42 et en fait le film de patrimoine, le film d'art et essai se perd
12:47 ou même les cinémas parfois proposent une programmation
12:51 qui ne parle pas forcément aux jeunes
12:53 et là je parle plutôt pour les jeunes dans les banlieues,
12:55 ils ne s'identifient pas forcément aux films
12:57 et d'ailleurs le Centre Pompidou a créé la Cinémathèque idéale des banlieues.
13:01 Donc voilà, l'idée c'est d'aller avec ce camion dans les campagnes,
13:05 dans les quartiers politiques de la ville
13:07 et de proposer donc une séance de cinéma,
13:09 mais pas que, puisque tout à l'heure vous parliez d'expérience,
13:13 ce sera suivi de débats, ça viendra aussi décentraliser un festival
13:17 donc on pourra proposer des rencontres avec des acteurs, des producteurs.
13:21 - À l'intérieur du camion ?
13:22 - Exactement.
13:23 - 180 places, une mini-salle de cinéma.
13:26 - Et puis je compte bien en tirer.
13:27 - Et vous êtes aussi en train de fomenter des trucs avec un musée parisien.
13:31 - Oui, alors je ne peux pas en parler puisque normalement l'ministre doit l'annoncer.
13:35 - Elle n'a rien dit encore.
13:37 - Elle n'a rien dit encore mais parce qu'elle n'a pas encore sorti son plan
13:39 sur le printemps de la ruralité.
13:42 Donc ce que je peux vous dire c'est qu'on a eu la chance d'en construire un
13:46 avec le Centre Pompidou, on va en construire un autre
13:48 avec une grande institution parisienne
13:50 et on est très fiers de ce partenariat.
13:53 - C'est pour quand ?
13:54 - C'est pour fin 2025.
13:57 - Allez, vous restez avec nos tours de la table de la France Bouche.
14:00 Tout ça c'est passionnant, ça s'appelle donc le MUMO, le musée mobile.
14:04 C'est passionnant Ingrid Brochard, on est toujours avec Caroline Darras,
14:07 la directrice des projets culturels du château de Chenonceau à suivre.
14:11 Oui, Artcraft avec vous Nathanaël Huguet,
14:14 on va rester dans cet univers des châteaux aussi, des événements
14:18 puisque vous à la base c'est une société d'événementiel
14:21 mais vous utilisez la vidéo pour rendre les projets architecturaux
14:26 encore plus beaux, encore plus fascinants pour le public.

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