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00:00Pas très discuté avec nous, 04, 76, 46, 45.
00:0345, est-ce que vous êtes déjà prêt à participer aux élections législatives ?
00:06Vous avez envie, enthousiaste ou déjà usé à l'idée de vous dire que vous allez devoir re-voter ?
00:10Venez nous en parler, quelles sont les dispositions que vous avez prises par rapport à ces élections ?
00:14Élections dont on discute avec notre invité ce matin, Laurent Gagnon.
00:16Voilà, avec Erwann Lequeur, politologue, sociologue, enseignant-chercheur à Sciences Po Grenoble.
00:21Bonjour.
00:22Bonjour.
00:23Sciences Po et à l'ICMI, également l'Institut de la Communication et des Médias.
00:26Avec vous, on va essayer de voir dans quel paysage, finalement, politique se dessine cette nouvelle législative.
00:32La gauche, Erwann Lequeur, estimait hier, d'un premier jet comme ça, qu'Emmanuel Macron ouvrait un boulevard au Rassemblement National.
00:39Est-ce qu'une victoire du RN aux législatives est aujourd'hui plus possible qu'il y a 2 ou 7 ans ?
00:45On a souvent parlé d'une sorte de plafond de verre, d'une limite.
00:48Est-ce qu'aujourd'hui, c'est clairement quelque chose de possible ?
00:52Oui, tout à fait. C'est devenu possible et c'est en effet assez inédit.
00:56On connaît le mode de scrutin à la française, ce mode de scrutin des législatives qui a deux tours, uninominal,
01:03qui faisait traditionnellement que les petites listes ou les parties concurrentielles, moins fortes que les autres,
01:11le Front National, les écologistes, ce n'est pas un scrutin comme les européennes, ce n'est pas un scrutin à la proportionnelle,
01:18mais un scrutin majoritaire à deux tours.
01:21Et ça empêchait normalement les parties, les mouvements, je dirais, qui apparaissaient sur la scène nationale,
01:30d'accéder au pouvoir seuls. C'était ça la grande théorie, c'était celle de la digue.
01:36Les législatives, ça empêchait que, par exemple, le Front National, devenu Rassemblement National, arrive au pouvoir.
01:42Et cette digue est-elle cédée aujourd'hui ou elle a été transformée aussi par une dose de proportionnelle ?
01:47Les gens qui habitent au bord de la mer le savent, quand on a une digue très haute, c'est très intéressant en tout un temps,
01:52mais si jamais la mer passe au-dessus de la digue, elle repart plus difficilement. C'est ça le problème des digues.
01:58Et donc là, c'est un peu ce qui se passe, c'est qu'à un moment donné, quand le Rassemblement National de Marine Le Pen arrive à 20,
02:0525% traditionnellement aux européennes depuis maintenant 10 ans, il y a un moment où la digue, non pas éclate,
02:12est dépassée par le flux, par la vague, et l'eau ne repart pas. Et c'est ce qui s'est passé à ces européennes.
02:18On est à plus de 30% pour la liste de Jordan Bardella, et donc l'eau ne repart pas.
02:23Et c'est ça qui fait peur à beaucoup de gens dans le champ politique, c'est que cette fois, les européennes sont comme un flux,
02:30une vague, pas seulement en France, mais principalement en France, pour ce parti, cette extrême droite française,
02:38et que l'eau ne repart pas et que faire des législatives juste après, c'est un mouvement dans lequel il y a une très forte prééminence
02:49de ce parti, de ses candidats, par rapport, par exemple, au macronisme qui est, on l'a vu en Isère, on l'a vu en France, qui est en chute libre.
02:59Alors, en même temps, le scrutin législatif reste un scrutin bien différent tout de même du scrutin européen,
03:04il y a notamment une prime à la figure connue au sortant du député qu'on voit le dimanche peut-être aux fêtes de village,
03:11il y a quand même une petite différence.
03:13Oui, c'était vrai, ça l'est resté très longtemps, ça l'est de moins en moins, c'est-à-dire que les députés sont de moins en moins connus,
03:19le macronisme a aussi amené des nouveaux venus en politique, des gens qui n'étaient pas des gens très connus dans l'endroit où ils sont,
03:28mais qui avaient été élus sur la figure d'Emmanuel Macron, justement, et en 2017, et même encore en 2022.
03:34Donc ça, ça a un petit peu évolué.
03:35Puis la deuxième chose, c'est que, vous l'aurez noté, le premier parti de France, c'est celui des abstentionnistes,
03:40et la question qui se pose, c'est qui s'abstient et qui va voter ?
03:44Et on le voit, depuis des années, ceux qui s'abstiennent, c'est ceux qui, traditionnellement, en effet, favorisent le pouvoir,
03:50favorisent les gens qui sont élus, alors pas aux municipales, mais aux législatives, aux européennes cette fois,
03:56et ceux qui vont voter, c'est ceux qui sont en colère, qui veulent changer, turbuler le système,
04:01et on le voit avec le vote pour le Rassemblement National, notamment.
04:04– On va continuer de parler de ça avec vous, mais on va prendre, à un point de le cœur, une auditrice.
04:09– Tout à fait, Roselyne nous appelle.
04:11Bonjour, Roselyne.
04:13– Oui, bonjour.
04:14– Roselyne, vous voulez revenir sur aussi la situation actuelle,
04:17alors on va discuter aussi de ces élections législatives,
04:19mais voilà, vous aviez un peu envie de parler de ce pourquoi on en est là, selon vous.
04:24– Voilà, je pense que pourquoi on en est là,
04:26bon, moi je pense pas que ce soit une histoire de race,
04:29parce que bon, en France, on peut être noir, marron, blanc, c'est pas la question,
04:33il y a des Africains qui sont très très bien, des gens très bien de partout, très sages, c'est pas ça.
04:38Moi je pense qu'il y a une situation générale, une insécurité, une violence, une criminalité exponentielle.
04:46– Donc pourquoi le Rassemblement National est aussi haut dans les sondages, c'est ça que vous voulez dire ?
04:49– L'État ne fait rien, le régalien est nul, excusez-moi, on relâche des vrais dangers publics,
04:54et moi je pense que c'est surtout ça.
04:56Après bon, il y a aussi le pouvoir d'achat, la santé, tout s'effondre,
05:00la santé, les hôpitaux, les gens n'en peuvent plus quoi,
05:03et je pense qu'il faut se poser la question.
05:05Les artistes qui s'insurgent, ils ont des gardes du corps, ils sont pleins de thunes,
05:09je pense qu'ils veulent bien être payés.
05:11– Excusez-moi, Roselyne, mais est-ce que vous trouvez que la santé, Roselyne,
05:17est si effondrée que ça ?
05:19– Le Rennes est bien, je pense qu'il faut se poser la question.
05:22Il y a des gens qui sont en bas de l'échelle, qui souffrent de…
05:26– Ce ras-le-bol qui serait à l'origine.
05:28Roselyne, je voulais vous poser une question.
05:31– … de l'insécurité, oui, ça tire dans la kalachnikov dans les quartiers.
05:36– Alors Roselyne, si vous ne nous écoutez pas, ça va être un peu compliqué.
05:39Roselyne, je voulais vous poser une question,
05:41pourquoi vous estimez que la santé est si effondrée que ça ?
05:44Par exemple, en France, on reste quand même dans un pays
05:46où on a des médecins, des hôpitaux.
05:48– Oui, mais il faut voir comment on est soigné.
05:50Pendant que M. Macron dépense des milliards d'euros
05:53à recevoir Pierre-Paul Jacques, à faire tous ces falbalas,
05:56alors que les hôpitaux manquent de moyens, et ce n'est pas depuis le Covid.
06:00Il y a l'enseignement, il y a tout.
06:03On est obligé de racler pour avoir des écoles, des classes en plus.
06:08Il y a beaucoup de choses qui ne vont pas.
06:10– On a entendu justement votre ras-le-bol, Roselyne, et votre point de vue.
06:14Merci beaucoup de nous avoir appelés.
06:16Juste, rapidement, sur Facebook, Soazik Pelé, il y a d'autres...
06:19Alors, on a posé la question de, est-ce que vous allez voter ?
06:22– Oui, voilà. Est-ce que vous allez vous organiser ?
06:24Parce que là, ça arrive très vite,
06:26et puis ça arrive surtout au début des grandes vacances.
06:29On a plutôt des auditeurs qui vont se mobiliser,
06:31qui vont aller voter.
06:33Primordial pour Sylvie, par exemple.
06:35Indispensable aussi pour Corinne.
06:37Et puis, des auditeurs qui s'organisent,
06:39qui vont faire procuration, comme James,
06:41qui sait déjà qu'il sera en vacances,
06:43mais qui va faire procuration pour voter pour ses législatives.
06:46– Et revenir tout à fait vers Erwin Lequeur, sociologue, politologue.
06:51On a entendu Roselyne à l'instant.
06:54Si j'ose dire, tout est là, presque.
06:56Dans l'explication des votes et de la progression du RN,
06:59tout est dans les propos de Roselyne qu'on vient d'entendre.
07:02– Oui, tout à fait.
07:03C'était à la fois émouvant,
07:05parce qu'en effet, il y a un sentiment de perte,
07:07un sentiment de déclassement social,
07:10qui est un des moteurs principaux de ce vote.
07:13Il ne faut pas penser, en effet, comme le dit Roselyne,
07:15seulement à une question de racisme en tant que tel.
07:18Le RN n'est plus forcément seulement un parti
07:21qui pointe les immigrés, les étrangers, ou même l'islam.
07:25Depuis Marine Le Pen, l'islam est devenu le principal véhicule.
07:29Mais il y a aussi tout un tas d'autres sujets
07:31sur lesquels le RN devient ce qu'on appelle
07:34un parti qui attrape tout et qui est capable
07:36non plus de faire voter pour lui certaines catégories,
07:39comme dans les années 80, plutôt les gens très à droite,
07:42plutôt les gens très populaires dans les années 90,
07:44qu'on a appelés les minimistes,
07:46ou même ces dernières années,
07:48plutôt quelques jeunes un peu perdus.
07:50Non, non, c'est vraiment devenu un parti
07:52pour lequel les femmes, les jeunes, les homosexuels,
07:55tout un tas de catégories qui vont trouver
07:57dans le RN des réponses adaptées,
08:00simples sans doute, mais adaptées.
08:03C'est le parti qui récupère, RN,
08:05c'est le parti qui récupère aujourd'hui
08:07la colère populaire finalement,
08:09ce qui à 50 ans était au Parti communiste finalement.
08:12Oui, d'une certaine façon bien sûr,
08:14et d'ailleurs Marine Le Pen reprend des éléments de langage
08:17qui étaient ceux du Parti communiste des années 60,
08:20notamment sur la question de pourquoi est-ce qu'on a fait
08:22venir des immigrés pour les payer moins,
08:24pour abaisser le niveau des salaires.
08:26C'était le Parti communiste qui disait cela.
08:28Puisque les colères uniquement,
08:30même si les colères sont un élément central
08:32dans la politique désormais,
08:34et pas seulement dans la vraie vie,
08:35mais aussi sur les internets,
08:37sur les réseaux sociaux,
08:38et on l'a vu avec Jordan Bardella,
08:40ce nouveau chaos de la pensée,
08:42cette espèce de crise du sens
08:44va nourrir un ressentiment,
08:46un ressentiment à l'égard des puissants,
08:48à l'égard, et Emmanuel Macron en ce sens-là,
08:51incarne parfaitement pour beaucoup de gens
08:54cette espèce de grande bourgeoisie
08:56qui ne connaît pas le peuple,
08:58qui ne fait pas attention,
09:00et on l'a entendu avec Roselyne,
09:01moi je l'entends dans les groupes qualitatifs
09:03que l'on fait, dans les sondages également,
09:05dans les profils,
09:06il y a de plus en plus, notamment de jeunes,
09:08qui considèrent qu'ils ont été socialisés
09:11à la politique avec Le Pen et Bardella,
09:13c'est ceux-là qu'ils connaissent,
09:15qu'ils voient à la télévision,
09:16c'est aussi un nouveau phénomène.
09:17Les jeunes, le Rassemblement national
09:19et l'extrême droite très fort aussi
09:21sur les réseaux sociaux,
09:22qui s'est emparé dès le début d'ailleurs
09:23de ces réseaux sociaux,
09:24donc qui a très vite compris comment ça marchait.
09:26Je voulais revenir justement avec vous Erwann Lequeur
09:28sur les jeunes,
09:29ce qu'on entend dans les manifestations
09:30qui ont lieu dans les villes de France
09:32hier soir et depuis dimanche soir,
09:33c'est la jeunesse en mer de le Front National,
09:36le Rassemblement national désormais,
09:38un slogan qui est vieux et qui est repris comme ça,
09:40pas tant que ça.
09:42Non, c'était une chanson des années 80-90 en effet,
09:45qui avait fait florès à l'époque,
09:47qui était très connue dans la gauche de la gauche,
09:50et il était vrai à l'époque que les jeunes
09:52votaient très peu pour le Front National de l'époque,
09:54c'était plutôt des gens intermédiaires,
09:56autour de 50 ans,
09:57plutôt des gens sans diplôme,
09:58plutôt ce que je décrivais,
10:00c'était l'électorat populaire.
10:02Aujourd'hui c'est de moins en moins vrai,
10:03je le disais,
10:04les femmes, depuis l'arrivée de Marine Le Pen notamment,
10:06votent autant pour le Rassemblement national
10:08que les hommes, c'est inédit.
10:10Les jeunes également depuis quelques années
10:11votent de plus en plus,
10:12mais je précise,
10:13les jeunes qui vont voter,
10:15parce qu'énormément de jeunes ne votent pas,
10:17il y a un tiers des jeunes qui votent environ,
10:19ce qui est très très peu,
10:20encore une fois, à ces élections européennes,
10:22et dans ce tiers de jeunes,
10:24il y a plus d'un tiers qui votent pour Jordan Bardella,
10:26parce que, et vous l'avez noté,
10:28sur les réseaux sociaux, dans les télés,
10:30tout un tas d'endroits où eux s'informent,
10:34eh bien Jordan Bardella est en tête,
10:35est en pointe,
10:36Marine Le Pen est très présente,
10:38et il y a un nouveau paradigme,
10:42une nouvelle façon, je dirais,
10:43de s'informer, de comprendre le monde,
10:45à travers le prisme notamment du Rassemblement national,
10:47qui s'est normalisé,
10:48qui désormais devient un parti,
10:50non pas comme les autres, tout à fait,
10:52mais de plus en plus acceptable,
10:54et Marine Le Pen, de ce point de vue,
10:55a beaucoup joué, et Jordan Bardella aussi,
10:57le côté Jean Dridéa.
10:58La normalisation, tout à fait.
11:00Erwan Le Coeur, merci d'être venu ce matin
11:02nous éclairer sur la situation,
11:04cette espèce de photographie politique,
11:06française et sociologique,
11:07avant ce nouveau scrutin d'en trois semaines.
11:09Je vous souhaite une très bonne journée,
11:11merci également aux auditeurs
11:14qui nous ont appelés ou qui ont laissé
11:16une réflexion sur Facebook.
11:18On salue également
11:20tous ceux qui nous ont appelés sur Facebook,
11:22on l'a dit, beaucoup de procurations,
11:23et c'est comme ça que les questions se font.
11:26On a eu une question de Ginette qui nous dit
11:27comment on fait pour faire une procuration,
11:29site internet en l'occurrence ?
11:30Alors ça se passe soit auprès des tribunaux,
11:32le tribunal judiciaire,
11:33ce n'est pas l'endroit où on va forcément très souvent,
11:35mais auprès des gendarmeries
11:36ou des commissariats de police.
11:38Il faut savoir qu'il y a quand même
11:39des remplissages en ligne
11:40qui sont possibles avant de se rendre au bureau.
11:42Le site la-procuration.gouv.fr
11:44et ça a été extrêmement facilité
11:45depuis quelques années désormais la procuration.
11:48On aura l'occasion de vous en reparler
11:49dans les prochains jours en l'occurrence.
11:51Mais il ne faut pas tarder
11:52parce que les délais sont un petit peu longs.
11:55C'est dans pas très longtemps, on vous l'a dit.
11:57Continuez d'en discuter,
11:58de nous laisser vos témoignages sur la page Facebook,
11:59ce sera l'occasion d'en parler avec vous.