Tout au long de la journée, Europe 1 rend hommage à François Hardy, décédée ce mardi 11 juin à l'âge de 80 ans. Thomas Isle et l'équipe de Culture médias participent à cet hommage en retraçant la carrière de cette grande artiste.
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00:00Mais d'abord, c'est avec une grande émotion que l'on a appris la disparition de la chanteuse François Zardy à l'âge de 80 ans
00:07et Europe 1 lui rend hommage toute la journée, Julien.
00:10On va y partir quand même, comment te dira Dieu ?
00:12Ses chansons de François Zardy sur le départ prennent un autre relief.
00:15Ce matin, c'est son fils Thomas qui était d'ailleurs ici hier matin dans Culture Média
00:19qu'il a annoncé en soirée sur ses réseaux sociaux.
00:22« Maman est partie », a-t-il écrit.
00:23François Zardy luttait contre un cancer depuis 2004.
00:26Il y a six mois, lors de l'une de ses dernières interviews, elle avait confié à Paris Match
00:30qu'elle voulait partir bientôt et de façon rapide, sans de trop grosses épreuves.
00:34L'artiste était d'ailleurs déclarée favorable à l'euthanasie.
00:36« C'est inhumain de laisser quelqu'un d'incurable avoir des souffrances insupportables
00:40jusqu'à ce que mort s'en suive », disait-elle.
00:42Bon, les réactions sont nombreuses.
00:43Ce matin, vous avez entendu dans le flash d'Émilie Dez la réaction politique pour le critique musical.
00:47Philippe Manoeuvre, la pop est morte.
00:49« Au revoir ma grande », a sobrement écrit le photographe Jean-Marie Perrier
00:52qui fut son petit ami.
00:53François Zardy est sans doute l'une des artistes que Jean-Marie Perrier a le plus souvent photographiées.
00:57Et on gardera en mémoire ses nombreux tubes et ses débuts fulgurants.
01:01C'était en 1962 et pourtant ça ne paraissait pas gagné à l'époque.
01:05Oui, les Français ont découvert François Zardy le 6 février 1962.
01:08Précisément, c'est ce jour-là qu'elle fait sa première apparition télé
01:11dans le petit conservatoire de la chanson de Mireille.
01:13C'était en quelque sorte la Star Academy de l'époque.
01:16François Zardy avait alors 18 ans écouté.
01:18« Vous êtes triste dans la vie ? »
01:20« Non, ça dépend. »
01:21« Ça dépend, mais dans la chanson, là, c'est bien. »
01:23« Oui, je préfère les chansons tristes. »
01:25« Tristes ? Bon, on verra. Tournez-vous, il y a quelque chose qui m'intrigue. »
01:29« Tiens, c'est curieux. Vous avez mis votre chandail à l'envers exprès ? »
01:34« Oui, c'est parce que le pleuver est trop grand. »
01:37« Mais c'est une idée de mode, ça. C'est joli. C'est joli, on l'apprend. »
01:40« Oui, bien. »
01:41« Vous ne croyez pas ? Merci, mademoiselle. »
01:42Incroyable archive, toute timide avec son chandail à l'envers.
01:45Françoise Hardy s'est mise à chanter « Une fille comme toi », c'est son tout premier titre.
01:49« Un soir que je m'ennuyais de trop penser à toi. »
01:58Alors, pourquoi ça ne paraissait pas gagner, Thomas ?
02:00Parce qu'on est en pleine mode du yéyé et du twist,
02:02et le style de Françoise Hardy, délicat, mélancolique, discret, est totalement à contre-courant.
02:07D'autant que c'est elle qui écrit et compose.
02:08Ça, c'est un fait extrêmement rare à l'époque.
02:10Elle sort son premier disque dans le courant de l'année 62,
02:13dans la foulée de ce premier passage télé.
02:16Les producteurs n'y croient pas.
02:17En pleine vague, yéyé et twist, ça ne marchera jamais auprès des jeunes, disent-ils.
02:20Ils ne croient surtout pas à la dernière piste du disque,
02:22« Tous les garçons et les filles de mon âge. »
02:23Non, c'est trop triste.
02:24« Tous les garçons et les filles de mon âge. »
02:27Ça ne marchera jamais, ça.
02:28« Se promènent dans la rue de Paris. »
02:29« Bien vu. »
02:30C'est pourtant l'inverse qui va se produire à chacun de ces passages télé.
02:34Le standard explose, la chanson va s'écouler à 2 millions d'exemplaires
02:38et être diffusée toute la journée sur Europe,
02:41numéro 1, son ascension fulgurante à 18 ans étonne.
02:44Quand elle revient chanter chez Mireille en septembre 62,
02:46elle est cette fois presque plus connue que la patronne du Conservatoire.
02:50Thomas Dutrot qui nous racontait hier que sa maman n'aimait pas beaucoup cette chanson,
02:54en tout cas qu'elle en avait marre.
02:55Elle l'avait trop chantée, oui.
02:56Parce que c'est vrai que ça avait écrasé beaucoup de ses succès.
02:58Après, elle lui dévoilait même très peu et qu'ils écoutaient très peu à la maison
03:02ces chansons de ses débuts.
03:04Et puis justement, depuis ses débuts en 62,
03:07le lien entre François Zardy et Europe 1 aussi,
03:09cette maison est restée très fort pendant même 60 ans.
03:12Oui, jusqu'au bout.
03:13Elle a participé à de nombreuses émissions,
03:15dont ce jeu incroyable des années 60,
03:17le jeu des gages de Michel Kogony.
03:19En 1964, elle y participe.
03:21Les invités avaient le choix, vous connaissez ce jeu,
03:23action ou vérité, c'était la même chose.
03:25Soit vous répondez à une question indiscrète, soit vous avez un gage.
03:28Et en ce 29 janvier 64, François Zardy,
03:30qui vient tout juste depuis quelques jours d'avoir le permis de conduire
03:33et tester sur ses capacités au volant.
03:35La séquence est très drôle,
03:36elle éclaire une facette un petit peu moins connue de François Zardy
03:38qui avait un goût prononcé pour le farfelu et le fantasque.
03:41Nous sommes maintenant dans la rue François 1er.
03:43Je crois qu'il y a déjà du monde qui est venu voir un petit peu.
03:45Tout le monde a fait très vite.
03:46Je suis là, près d'une petite voiture.
03:48Voilà, François, on essaie la vitesse pour l'instant.
03:49Comment ça se passe ?
03:50C'est très très bizarre, j'ai jamais vu un levier de vitesse comme ça.
03:53Alors je ferme la porte hier et je te laisse toute seule dans ta voiture.
03:56Allez, c'est parti.
03:57Elle s'était pliée au jeu avec plaisir,
03:58elle avait fait le tour du pâté de maison,
04:00mais non sans difficulté.
04:01Alors d'ailleurs, un petit accident de voiture,
04:03sans gravité l'année suivante en 65,
04:05elle se rétablira vite
04:06puisque quelques jours plus tard,
04:07elle était de nouveau sur Europe 1.
04:08Nous sommes le 16 août 65
04:10et Pierre Bouteillier la questionne sur cette place à part
04:12qu'elle tient dans la chanson française.
04:14Il y a une certaine mélancolie,
04:15une certaine tristesse, on peut le dire.
04:17Pourquoi ?
04:18C'est que d'abord,
04:19les paroles mélancoliques sont toujours
04:22beaucoup plus proches de la réalité que le reste
04:26et qu'ensuite, elles s'accordent beaucoup mieux
04:28avec une jolie mélodie que des paroles gays.
04:32Les paroles gays, ça va avec une mélodie un peu rapide
04:35comme ce n'est pas du tout mon tempérament
04:37de chanter des choses rythmées.
04:39Alors voilà.
04:40L'interview de Françoise Hardy
04:41vraisemblablement faite dans un bistro
04:43près d'Europe 1 à l'époque.
04:45Cette mélancolie imprègne toute l'oeuvre
04:47de Françoise Hardy.
04:48Elle faisait partie de son style
04:49au même titre que cette silhouette longiligne
04:51qui lui faudra faire de nombreuses unes
04:52de magazines en France et à l'étranger.
04:54Parce que le style de Françoise Hardy,
04:55c'était également cette frange,
04:57ces robes futuristes à lamelles
04:58dessinées par Paco Rabanne
04:59qui feront le tour du monde.
05:00C'est cette élégance française
05:01qui en faisait un idéal féminin
05:03pour Mick Jagger.
05:04Une figure de référence
05:05pour d'autres artistes majeurs
05:06comme Bob Dylan ou David Bowie.
05:08Il y aura aussi Gainsbourg
05:09qui traversera sa vie.
05:10Il lui écrit « Comment te dire adieu ? »
05:11Michel Berger qui lui compose
05:13« Messages personnels ».
05:14Mais l'homme de sa vie reste Jacques Dutronc
05:16avec qui elle vit une histoire d'amour
05:17parfois d'ailleurs source de désillusions.
05:19Ensemble, ils auront un fils, Thomas,
05:21qui était à ce micro hier matin
05:22dans Culture Média sur Europe 1.
05:24Nous lui avons partagé d'ailleurs
05:25cet archive du 18 juin 73.
05:27Nous sommes deux jours
05:28après la naissance de Thomas,
05:30après sa naissance,
05:31et François Zardy,
05:32depuis la maternité,
05:33avait accepté de répondre
05:34aux questions d'Europe 1.
05:35Un petit garçon.
05:37Un petit garçon, il s'appelle comment ?
05:38Thomas.
05:39Il a une petite particularité ?
05:41Euh non, non,
05:42à part qu'il a les yeux bridés.
05:44On dirait un petit chinois.
05:46Dans l'ensemble,
05:48on pense qu'il ressemble plus
05:49à son père qu'à moi.
05:51Les gens ont trouvé vite
05:52une ressemblance.
05:53Regarde, il a un grand nez alors.
05:55Alors vous êtes heureuse ?
05:57Ah oui, je suis très très très contente.
05:59Les enfants porteront le nom de Jacques
06:01et on s'en occupe tous les deux.
06:02Je ne connaissais pas ce document.
06:04Vous pourrez me le donner ?
06:05J'adore.
06:06Oh là là, c'est touchant.
06:08Mon Dieu, mon Dieu.
06:09On lui a fait parvenir
06:10évidemment cet archive à Thomas.
06:11Je voudrais vraiment remercier
06:12Thomas Dutronc d'être venu hier
06:14à ce micro parce que c'était difficile
06:16pour lui.
06:17Il savait que vraiment
06:18sa mère vivait ses dernières heures
06:20et il a eu le courage de venir là
06:21et qu'il puissait de chanter
06:22avec ses musiciens dans ce studio.
06:24Donc encore un grand merci à lui.
06:26Pour conclure Thomas,
06:27je vous propose d'écouter
06:28cet archive bouleversante
06:29qui date de 2015.
06:30Au micro d'Europe 1,
06:31Françoise Hardy avait alors évoqué
06:33la mort, la sienne.
06:34Elle nous avait confié
06:35qu'elle aurait peut-être préféré partir
06:36au début de son combat contre le cancer.
06:38Écoutez.
06:39Je n'aurais pas dû ressusciter
06:41comme j'ai ressuscité.
06:42Ça aurait été cohérent
06:44que je meure à ce moment-là
06:45d'une certaine manière
06:46puisque j'avais donné
06:47le meilleur de moi-même
06:49sur le plan professionnel.
06:51Et qu'en plus,
06:52j'avais failli mourir
06:53de la mort dont je rêvais,
06:54c'est-à-dire une mort dans l'inconscience.
06:56La mort, la vieillesse,
06:57la maladie,
06:58qu'est-ce qui vous effraie le plus ?
07:00C'est la souffrance.
07:02Qu'est-ce qui compte le plus
07:03pour vous aujourd'hui ?
07:04C'est mon fils.
07:05On revient à Thomas
07:06à qui on pense évidemment
07:07très fort ce matin.
07:08Merci beaucoup,
07:09Julien Pichenay,
07:10pour cet hommage.