Benoît Morelière, délégué de l'Union syndicale des magistrats
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00:00A 8h moins le quart, l'actualité décryptée avec votre invité comme tous les jours dans le 6-9 France-Bleu-Bourgogne
00:05et le délégué régional de l'USM, l'union syndicale des magistrats, est avec nous jusqu'à 8h.
00:10Benoît Meurlière, on a beaucoup parlé de cette opération Placenet ces derniers mois,
00:14une opération de grande envergure menée partout en France contre le trafic de drogue,
00:17après ces fusillades à Dijon notamment, ça a marché, ça a fonctionné ou c'était,
00:22comme certains opposants l'ont précisé, un coup de com ?
00:26Alors, le principe d'une opération Placenet, c'est de mettre en place des effectifs conséquents de police,
00:32de gendarmerie, dans un endroit donné pour essayer de lutter contre ce qu'on appelle
00:39les incivilités au quotidien, mais aussi tout type d'infractions.
00:43Dans l'agglomération, force est de constater que les forces de police et de gendarmerie
00:48ont largement fait le travail, avaient en amont anticipé un certain nombre de choses,
00:52un certain nombre de cibles, et puis sont allés réaliser des interpellations, en ont fait un grand nombre,
00:58et puis ceci a conduit à des déferments, à des audiences, à des comparutions médiates,
01:02et puis aussi à d'autres types de réponses pénales, parce que la seule réponse pénale
01:06ce n'est pas forcément celle de l'audience. Donc oui, ça a marché, mais...
01:10Maintenant c'est terminé, une fois que c'est terminé, est-ce que les trafics ne se remettent pas naturellement en place ?
01:15C'est triste à dire, mais...
01:17Ça peut être une conséquence, c'est aussi la problématique de la lutte contre un certain
01:21spectre de criminalité. On ne fait pas de la lutte contre le trafic de stupéfiants,
01:25et en tout cas pas par rapport à celui qui est le revendeur, le dernier maillon de la chaîne,
01:31on fait aussi de la revente, mais on fait de la lutte contre ce type de criminalité
01:36uniquement quand on fait des enquêtes au long cours, avec des moyens qui sont des moyens adaptés d'enquête,
01:41des écoutes, des balisages, des géolocalisations, etc.
01:44Mais tout ceci prend du temps, et ce n'est pas tant de deux semaines de place nette qui sont suffisants.
01:50En tant que délégué régional de l'Union syndicale des magistrats, vous êtes magistrat morelière,
01:55comme vous entendez, la justice est trop laxiste, notamment avec les jeunes.
01:59Qu'est-ce que ça vous évoque ? Est-ce que c'est vrai, la justice est trop laxiste ?
02:03Alors, j'invite d'abord tous nos concitoyens à se rendre dans les tribunaux de France,
02:09quels qu'ils soient, où qu'ils se trouvent, puisque la justice est rendue au nom du peuple français,
02:16en partie d'ailleurs avec certains des citoyens, mais la justice est rendue au nom du peuple français,
02:20et le contrôle de la justice, entre guillemets, des décisions de justice qui sont rendues,
02:24peut se faire par l'accès au tribunal.
02:26Les salles d'audience, c'est public, c'est totalement public.
02:29Allez dans le tribunal de Dijon, de Châlons, de Mâcon, de Chaumont, où vous voulez,
02:35et que ce soit les audiences civiles, d'ailleurs, et les audiences pénales,
02:38sont d'un accès sans aucun problème, sous réserve, évidemment, de garder le calme quand on vient dans la salle d'audience.
02:45On est en pleine campagne des législatives, Benoît Morelière,
02:49les candidats ont évidemment tous des positions, des propositions,
02:53vous, vous êtes un syndicat apolitique, donc je ne vais pas vous demander votre avis sur ces politiques-là,
02:59mais certains candidats prennent le retour de peine planchée,
03:02c'est quelque chose qui a été déjà fait dans l'histoire de la Ve République,
03:06par Nicolas Sarkozy en 2007, Abrogé en 2014, plus en vigueur depuis ce moment-là.
03:11Est-ce que c'est souhaitable, les peines planchées, du point de vue de la magistrature ?
03:14C'est-à-dire qu'on ne peut pas mettre moins qu'une peine minimum, c'est ça ?
03:19Alors, c'est en lien avec le sujet précédent, parce que l'idée initiale, c'est-à-dire,
03:25il y a trop de petites peines, il faut augmenter le niveau moyen des peines prononcées.
03:31Alors, que le législateur et que certains candidats se rassurent, le laxisme de la justice n'existe pas.
03:37Entre 2015 et 2023, le niveau moyen des peines d'emprisonnement ferme n'a cessé d'augmenter,
03:44alors si ce n'est la particularité de l'année 2020 qui a connu quelques particuliers.
03:48Globalement, aujourd'hui, pour des faits strictement similaires,
03:51si vous comparaissiez en 2015, vous aviez une peine moyenne de 8 mois d'emprisonnement ferme,
03:57aujourd'hui, vous êtes à plus de 10 mois, pour les mêmes faits.
04:00Donc, la justice laxiste, c'est peut-être un slogan politique, mais ça n'existe pas,
04:04ça n'est pas une réalité chiffrée statistique du ministère de la Justice, c'est sûr.
04:08Quand on entend aussi certains candidats qui voudraient davantage de sévérité,
04:12avec plus de peines d'emprisonnement, est-ce que les prisons, aujourd'hui, ne sont pas déjà pleines ?
04:17Alors, c'est aussi la conséquence du traitement, parce que nos concitoyens qui,
04:21d'une manière ou d'une autre, ou pour une raison ou pour une autre, vont en détention,
04:25inévitablement, l'objectif, c'est quand même après la détention,
04:29parce que l'objectif de la détention, c'est aussi que les gens s'amendent,
04:32l'objectif après, c'est que les gens soient réinsérés.
04:34Donc, augmenter des places de prison, pourquoi pas ?
04:38Ça a toujours été un sujet, mais aujourd'hui, les prisons sont plus que pleines,
04:45on a des gens qui vivent à trois dans des conditions indignes, avec des matelas au sol, etc.,
04:51qui n'ont que trois ou quatre douches par semaine, ça aussi, il faut l'entendre.
04:55Alors, évidemment, ce n'est pas un hôtel, mais au-delà de cette difficulté,
04:58c'est surtout que l'objectif, ce n'est pas que la prison rende les gens
05:01plus délinquants que ce qu'ils sont avant d'y entrer.