• il y a 6 mois
Transcription
00:00Paul Bernardin, c'est un personnage librement adapté de Xavier Dupont de Ligonnès, que
00:09j'interprète dans le film de Jean-Christophe Meurice, Les Pistolets en Plastique.
00:12Paul Bernardin, c'est un homme qui paraît extrêmement lumineux, jovial, sympathique,
00:19gentil, et qui en fait est le monstre absolu.
00:22J'ai joué justement l'inverse de ce qu'il est, pas de ce qu'il est, mais de ce qu'il
00:52est.
00:53C'est-à-dire que Jean-Christophe Meurice voulait un acteur qui soit solaire, positif,
01:00sympa, etc., dans le film, donc c'est ça que j'ai joué.
01:04On a beau se dire que c'est Dupont de Ligonnès, il est sympa, puis à un moment donné, quand
01:07il y a la scène de tuerie de sa femme et de ses enfants, là on se dit « oui, en fait
01:13». Et il a raison de le mettre, ça a été reproché, mais moi je trouve qu'il a raison,
01:17parce qu'il ne faut quand même pas que ça devienne quelqu'un de trop sympathique,
01:19parce qu'il faut quand même rallumer le flash « attention, monstre, attention, ce
01:28type est recherché, est-ce qu'il est encore vivant ? J'espère, j'espère qu'il sera
01:32condamné et qu'on arrivera à le retrouver, parce que c'est quelqu'un qui a tué quatre
01:38personnes.
01:39C'est lui qui a tué toute sa famille.
01:44Des fois, quand ils s'y mettent à trois, les deux gosses, ma femme, je te jure, je
01:49fais un bloc, tac, je les mets dans un sac, comme les chatons, je les noie.
01:52Les gens adorent ça, c'est ce qui marche le plus, c'est ce qui marche le plus, les
01:59gens ont une passion pour le mal.
02:01Aucune déchirure, une épision.
02:06Oui, mais stop, vous n'allez pas me parler de votre chat, tu sais ?
02:14Vous voulez prendre quelque chose ? Pourquoi pas ?
02:16J'y vais.
02:17Michel Serrault, mon maître, bravo, bonne pioche.
02:21J'adore Michel Serrault, Michel Serrault, c'est un acteur hors pair qui disait que
02:30pour lui, un acteur, c'est quelqu'un qui peut tout jouer et je suis tout à fait d'accord
02:33avec lui.
02:34Un acteur qui ne se cantonne ou qui ne sait pas jouer certains rôles, ce n'est pas un
02:38acteur.
02:39Un acteur, c'est un artiste, mais c'est aussi un artisan.
02:42C'est comme quelqu'un qui ferait des bons chocolats.
02:44Il y a des choses qu'il sait mieux faire que d'autres, comme tous les artisans, mais
02:49il doit aussi, pour se remettre en question et se remettre en route, s'intéresser à
02:54des choses où on ne l'attend pas.
02:57À chaque fois qu'on m'a proposé des rôles où je me suis dit « wow, est-ce que je vais
03:00accepter ça ? » parce que je ne sais pas si je vais savoir le jouer, ça m'a reboosté
03:03aussi quelque part.
03:04C'est bien de faire des rôles qui ne sont pas des rôles proches de soi.
03:07C'est à quel nom ?
03:09C'est pour Nicolas.
03:10Bonjour Mme Chirac, je tenais à vous féliciter pour ce portrait poignant d'une femme qui
03:19a souffert tout en faisant face avec dignité.
03:22Merci Mme Chirac.
03:33Regardez-moi ce tartuffe.
03:38Le trac, c'est horrible ! J'ai le trac tout le temps, je suis un trackeur, je croque la
03:47vie et en même temps, j'ai une peur panique de cette vie en question.
03:52Avant de monter en scène, c'est horrible, c'est des bouffées de chaleur, je me dis
03:58que je ne vais pas pouvoir y aller.
03:59Une fois que j'y suis, je suis content, mais c'est l'avant et je ne peux pas décrire
04:06cette sensation tellement elle est pénible.
04:09Et en même temps, quand on n'a pas le trac, il ne se passe pas grand-chose non plus.
04:14Le trac donne une vivacité, quelque chose qui est unique.
04:18C'était Sarah Bernard qui était avec une élève, qui lui dit « Vous savez Mme Bernard,
04:22moi je n'ai jamais le trac ». Elle lui a dit « Ne vous inquiétez pas mon petit,
04:24ça viendra avec le talent ». Il faut du trac, je crois, c'est des métiers sur l'humain
04:30et c'est des métiers où on doit être tout le temps en train de se dire « Je sais que
04:33ce n'est pas important, mais c'est primordial ».
05:04Place au jeu, place à nos gladiateurs de la scène, il n'en restera qu'un, et si c'était…
05:11Comment faire rire en étant très sérieux ? Le rire ne se produit que quand c'est sérieux.
05:17Le rire, ça a à voir avec la mort, je crois.
05:21Ça paraît dingue, mais c'est ça, c'est pour ça que c'est drôle.
05:27Bergson dit, un grand philosophe dit « Le rire, c'est de la mécanique plaquée sur
05:32du vivant.
05:33Si vous avez la mécanique et que vous n'avez pas le vivant, ce n'est pas drôle.
05:36Si vous avez le vivant et que vous n'avez pas la mécanique, ce n'est pas drôle.
05:38Si vous êtes dans la rue avec une personne que vous aimez et qu'elle tombe sur une
05:42plaque de verglas, on rit et les gens autour rient.
05:45Si elle ne se relève pas, on pleure ». C'est ça, le rire.
05:49Pas drôle, le rire ? Si, heureusement.
05:53Philibert marquait de la durbelière, c'était le premier rôle au cinéma, un rôle important,
05:59avec Claude Berry, avec Guillaume Canet et Audrey Tautou, c'est un rôle que j'ai
06:07beaucoup aimé jouer.
06:08J'ai rencontré Claude Berry un soir tard chez lui, il m'a dit « C'est un personnage
06:13comique, mais il est bègue ». J'ai travaillé ça en me disant que être bègue, ce n'est
06:21pas drôle.
06:22Ça fait rire les autres, mais lui, ça ne le faisait pas rire, Philibert, d'être
06:26bègue.
06:27Il en souffre.
06:29C'est cette différence-là, c'est les gens différents qui m'intéressent.
06:33Quand quelqu'un est trop normé, normal, à jouer, ce n'est pas intéressant.
06:39Avec Philibert, il y avait plein de choses à jouer, père autoritaire, mère qui l'adore,
06:47aristocratie française, fin de race, bègue, cadeau.
06:58Un rêve ou un cauchemar récurrent ?
07:28Le rêve de l'acteur.
07:29Tous les acteurs racontent le même rêve.
07:31Je suis en costume de scène, je vais rentrer sur scène et je ne sais pas quel est le costume.
07:39Je me dis que c'est bizarre.
07:40Tout à coup, on me dit « Vas-y ». Je ne sais pas quelle est la pièce, je ne reconnais
07:45pas les acteurs qui jouent avec moi et je rentre dans un théâtre que je ne connais
07:50pas.
07:51C'est le cauchemar récurrent.
07:53La troupe.
07:54C'est très important, la troupe.
07:56Sans troupe, je ne serais pas resté à la comédie française.
07:59La troupe, je le dis sans flagornerie, c'est une deuxième famille.
08:03Quand on n'a pas une famille très soudée, on se retrouve très bien dans une troupe
08:09qui est un endroit où on a l'impression que rien ne peut nous arriver de mauvais.
08:14On est épaulé, on est sur scène.
08:17Si on a un problème, il y en a un autre qui dit le texte.
08:21C'est une hydre à 25, à 60 têtes.
08:27C'est réconfortant, c'est chaleureux.
08:30On s'engueule, on n'est pas d'accord et c'est tant mieux.
08:34On crève les abcès si ça ne va pas, mais on discute.
08:38Pourquoi tu fais ce rôle-là ?
08:40Par exemple, l'écrivain seul devant sa page blanche
08:44ou le peintre qui peint des heures chez lui.
08:48Ça, c'est un truc qui me paraît complètement dingue.
08:51Je ne sais pas comment ils font.
08:52Je suis béat d'admiration parce que Robinson n'existe pas.
08:56Il faut vendredi.
08:57Si je suis tout seul, je ne peux pas travailler.
08:59Il faut qu'il y ait quelqu'un, il faut que je discute,
09:01que je parle d'autre chose, que je me change les idées.
09:04Mais je ne peux pas travailler tout seul.
09:07Je tremble qu'il n'ait soupçonné quelque chose de mon argent.
09:10Ne serais-tu pas un homme à aller faire courir le bruit
09:13que j'ai chez moi de l'argent caché ?
09:15Vous avez de l'argent caché ?
09:16Non, concard ! Dis pas ça !
09:19Je demande si malicieusement
09:22tu n'irais pas faire courir le bruit que j'en ai.
09:24Que nous importe que vous en ayez ou que vous n'en ayez pas,
09:26si c'est pour nous la même chose.
09:27Tu fais le raisonneur ?
09:28Je te baillerai de ce raisonnement-ci par les oreilles.
09:30Sors d'ici encore une fois.
09:32Eh ben, je sors.
09:34Jouer les hommes de pouvoir.
09:37Alors, j'ai beaucoup joué les hommes de pouvoir
09:42les cinq dernières années, les quatre dernières années,
09:44depuis le Covid, bizarrement.
09:47C'est génial à jouer.
09:48Après, on reste un acteur, heureusement.
09:52Mais il y a cet exemple de Zelensky,
09:55qui était un acteur et qui est devenu président de l'Ukraine.
09:59Et Ronald Reagan, il y en avait plusieurs.
10:02D'ailleurs, quand on rencontre les gens de pouvoir,
10:04ils ont une fascination,
10:06que nous, on n'a pas forcément pour les gens de pouvoir,
10:08mais pour les gens de théâtre.
10:10Parce que ce côté, le mentir vrai, c'est important en politique.
10:15Il faut pouvoir asséner un mensonge en étant persuadé
10:19et en faisant croire aux autres que c'est la réalité.
10:22Et c'est faux.
10:23C'est pour ça qu'il est acteur aussi.
10:25On va à la fête et on va danser.
10:27Depuis qu'il a dégommé tout le monde, c'est plus tranquille.

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