• il y a 3 mois
Charlotte Casiraghi, née le 3 août 1986 à Monaco, est une personnalité importante de la famille princière monégasque. Elle est la fille de la princesse Caroline de Monaco et de Stefano Casiraghi, un homme d'affaires italien décédé tragiquement en 1990. Éducation et carrière :

Elle a obtenu son baccalauréat avec mention très bien en 2004

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En 2007, elle a décroché une licence de philosophie à l'université Paris-Sorbonne
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Elle a travaillé dans le monde de l'édition, notamment chez Robert Laffont et au journal britannique The Independent
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En 2009, elle a cofondé la revue "Ever Manifesto" axée sur la mode écologique
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Depuis 2015, elle est impliquée dans les Rencontres philosophiques de Monaco

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Activités officielles :

Marraine des forces de sécurité monégasques depuis 1997

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Participe au Bal de la rose depuis 2006
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Présidente honoraire du Jumping International de Monte-Carlo depuis 2010
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Anime les "Rendez-vous littéraires de la rue Cambon" lancés par Chanel depuis 2021

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Vie personnelle :

Elle a deux frères, Andrea et Pierre Casiraghi, et une demi-sœur, Alexandra de Hanovre

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Elle a eu une relation avec l'humoriste Gad Elmaleh de 2011 à 2015, avec qui elle a eu un fils, Raphaël, né en 2013
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Depuis 2017, elle partage sa vie avec Dimitri Rassam

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Charlotte Casiraghi est également connue pour ses activités dans le monde de la mode et de l'équitation. Elle a été l'égérie de marques prestigieuses comme Gucci (pour sa ligne équestre) et Chanel.
Transcription
00:00Ceux qui font Monaco sont au micro. Je suis Geneviève Berti et bienvenue dans le podcast de Monaco Info.
00:13Notre invitée est une femme plurielle, à la fois femme de lettres, icône de mode, figure emblématique du sport équestre, mais aussi maman tout simplement.
00:21Ses origines, son esprit et son élégance en font une femme très médiatisée malgré sa nature discrète.
00:28Bonjour Charlotte Casiari.
00:29Bonjour.
00:30Est-ce que ça vous convient quand je dis que vous êtes d'une nature discrète ?
00:36Oui, je pense qu'en tout cas j'ai toujours cherché à préserver mon espace intime et à faire attention à ne pas trop révéler non plus.
00:53Pas tout donner quoi.
00:55Oui.
00:56Vous êtes à Monaco en ce moment parce que c'est bientôt la semaine philo.
01:02Quand on se lance dans une entreprise ou dans une initiative comme ça, mettre la philo à la portée de tous, ça demande un investissement public.
01:12En tout cas, il faut l'incarner, il faut exister sur le devant de la scène pour ça.
01:18Oui, c'est vrai que je garde toujours cette idée en tête que quand on a des privilèges, on a aussi des devoirs.
01:25Pour moi, ça a toujours été très important de pouvoir encourager et porter quelque chose qui peut être utile à tous et de m'y engager.
01:39Si ça implique de pouvoir m'appuyer sur la chance que je peux avoir de pouvoir être entendue dans l'espace public, de pouvoir prendre la parole,
01:49je le fais volontiers quand c'est pour quelque chose qui permet d'apporter un bienfait ou quelque chose qui permet de faire avancer la réflexion et qui est d'utilité publique.
02:06En me disant ça, je pense que vous imaginez, ça ouvre des portes. Est-ce que vous pensez que la philosophie aurait eu des portes ouvertes sans vous sur cette initiative-là ?
02:20À Monaco ? Ça, je ne peux pas savoir, mais c'est vrai que ce n'est pas évident au départ d'associer Monaco à la philosophie,
02:31même s'il y a énormément d'éléments qui font de Monaco une terre de culture et d'accueil,
02:42et où il y a une véritable histoire d'un vrai engagement de la part de Monaco pour soutenir la culture.
02:50Donc en ce sens, ce n'est pas complètement inattendu, mais c'est vrai que créer cet espace à Monaco pour la philosophie avec cette ampleur-là,
03:04ça a demandé au départ beaucoup de passion et d'énergie pour convaincre que ça pouvait prendre à Monaco et qu'on pouvait créer cet espace.
03:15Et il nous a fallu un peu de temps, oui.
03:18D'ailleurs, ça prend quand vous dites « il a fallu du temps ». En tout cas, ça prend. Il y a une chose qui est frappante,
03:24c'est les matins, les matinées que vous organisez, puisque la semaine philo, c'est un ensemble d'événements,
03:30dont des matinées philo en direct et en public sur la place du marché.
03:36Alors ça, moi j'avoue, quand vous m'en avez parlé la première fois, j'ai dit « est-ce que ça va marcher ? ».
03:43Et en fait, on est… ce n'est pas que j'étais sceptique, mais je me suis dit « c'est une idée courageuse ».
03:49Et là, vraiment, on a l'impression que les matinées philo, ça devient un rendez-vous.
03:54Oui, en fait, ce qui m'a surprise et ce que j'ai trouvé vraiment très fort dans ces moments-là,
04:02c'est à quel point la parole philosophique, la discussion philosophique crée un espace un peu plus apaisé
04:10et permet peut-être d'ouvrir des échanges sur des sujets tabous,
04:16des sujets normalement qui ne sont pas simples à aborder sur la place publique.
04:22Et que même quand on a eu des personnes qui n'étaient pas forcément d'accord,
04:28il y a une manière de se confronter qui reste fraternelle, qui reste respectueuse
04:35et qui rassure quelque part qu'on peut vraiment pousser la réflexion, le débat, sans que ça dégénère.
04:42Et du coup, je pense que ça a aussi incité les gens à écouter, à participer.
04:47Et en fait, peut-être que des personnes aussi se sont rendues compte que ça parlait de sujets très concrets et très quotidiens
04:55et que tout le monde finalement avait quelque chose à dire.
05:00De partager son expérience du problème, c'est important.
05:04C'est-à-dire que les philosophes peuvent éclairer par la réflexion,
05:09mais il nous faut l'expérience concrète aussi des problèmes.
05:15Et donc, c'est pour ça que les remarques, les interpellations,
05:21les participations de personnes qui sont tout simplement là sont très importantes.
05:30Est-ce que vous avez la sensation qu'avec cet exercice, j'appelle ça un exercice,
05:35en tout cas avec ce dispositif, les gens se rendent compte un peu de ce que vous venez de décrire ?
05:43C'est-à-dire que finalement, la philosophie, on la vit aussi.
05:46Avant de l'évoquer, avant de poser les questions, est-ce qu'ils se rendent compte que ce sont des sujets
05:53qui ont un espace de conversation pour eux de tous les jours ?
05:57Oui, alors en fait souvent, le mot philosophie fait un peu peur,
06:01ou en tout cas on s'imagine que c'est une sorte de cathédrale conceptuelle très abstraite
06:07et qu'il faut des années d'études pour pouvoir se dire capable de rentrer dans un problème philosophique.
06:17Mais bien sûr qu'il y a une grande exigence dans la réflexion philosophique,
06:22qu'il y a plusieurs niveaux de complexité, qu'il faut aussi l'étudier, il faut l'approfondir,
06:28il faut connaître les textes, ça c'est très important, mais elle est tout de suite accessible.
06:34C'est-à-dire qu'en fait ce qui constitue le point de départ du questionnement,
06:41c'est l'étonnement, c'est le doute, c'est le sentiment d'être perdu, d'être désorienté.
06:49En fait on se dit que quelque chose ne va pas de soi,
06:53et c'est à partir de là qu'on rentre en questionnement philosophique.
06:58Après il faut pouvoir progresser, et pour ça il faut un peu de méthode, il faut aussi...
07:03Il faut de l'accompagnement quand même.
07:05Voilà, mais c'est pour ça qu'en fait on peut avoir des intuitions philosophiques,
07:11on peut commencer à raisonner, mais il faut qu'elles soient transmises,
07:17c'est-à-dire que c'est vraiment une discipline où on a besoin d'une transmission,
07:23d'un professeur ou de quelqu'un qui justement vous guide dans la progression, la réflexion,
07:31et c'est pour ça qu'on a créé les rencontres philosophiques, parce qu'il faut une rencontre.
07:36Vous dites d'ailleurs que la philosophie c'est une des rencontres les plus importantes de votre vie.
07:41Elle est arrivée par quelqu'un ?
07:44Oui, alors ça rejoint deux choses, parce qu'à la fois j'ai eu un grand professeur en terminale, Robert Magiore,
07:55qui est avec vous dans les rencontres philo.
07:59Ça a été une rencontre assez déterminante, mais je dirais que je l'avais quand même un peu rencontrée avant.
08:06Je pense que j'avais un désir de philosophie assez fort, je me questionnais énormément,
08:13et c'est les textes littéraires qui m'ont amenée vers ça, et la rencontre avec certains auteurs.
08:21Je parle souvent de Baudelaire, qui a été très important,
08:26et j'avais l'impression qu'il me parlait, qu'il y avait une vraie rencontre,
08:30parce qu'on peut aussi dans les livres faire des vraies rencontres.
08:36On a vraiment l'impression que l'auteur ou le philosophe vous parle.
08:43En tout cas partage quelque chose, partage quelque chose avec vous.
08:47C'est ça, mais quand j'ai une rencontre, c'est quelque chose qui vient toucher la sensibilité,
08:52et c'est quand je dis que le philosophe vous parle, bien sûr qu'il ne me parle pas,
08:59mais c'est une manière d'être habité par une voix qui vous accompagne,
09:07où la solitude tout à coup devient plus supportable, parce qu'elle est peuplée.
09:15Oui, vous parlez de solitude, et en vous écoutant sur le questionnement,
09:20je me disais, c'est vrai, quand on grandit,
09:24alors après à l'âge adulte on le vit peut-être différemment,
09:26mais quand on grandit et on passe ces périodes qu'on sait un peu délicates,
09:30on a toujours des moments où on se sent extrêmement seul,
09:34et où on se pose des questions, et c'est vrai qu'on a du mal à trouver des interlocuteurs pour ça.
09:40Mais il y a une différence entre le philosophe et le psychologue quand même,
09:44le psychiatre on n'est pas dans la même...
09:48Oui, mais après, c'est absolument pas le même type d'échange ou de rencontre.
09:56Mais moi vraiment, il y a des textes littéraires et des textes philosophiques
10:01qui ont été vraiment comme des pharmacodes,
10:04vraiment comme des textes qui m'ont tellement bouleversée,
10:09qui m'ont donné le sentiment d'être entendue, d'être comprise,
10:15où je me sentais plus seule dans ce questionnement,
10:18et qui m'ont donné des ressources.
10:20Alors je ne dis pas que ça ne remplace absolument pas,
10:23ce n'est pas une forme de thérapie du tout,
10:26mais je pense que la culture répare,
10:31et en l'occurrence moi je suis très sensible aux textes,
10:35ça a été pour moi une forme de réparation face à des doutes qui étaient très importants,
10:43et en fait tout à coup de trouver un espace où ces doutes pouvaient exister,
10:48pouvaient...
10:50Un espace de conversation en fait.
10:52Oui, parce que je pense qu'on rentre en conversation avec les livres,
10:55avec ceux qui les écrivent, même s'ils sont morts,
10:58enfin moi quand j'ai découvert ça,
11:00je me dis ce poète qui existait il y a deux siècles,
11:04il me parle là maintenant.
11:06Oui, c'est ça.
11:08Et c'est quelque chose qui est assez...
11:10ça semble assez banal, mais c'est très puissant en fait,
11:12cette idée que ça traverse le temps,
11:17et ça quand on en fait l'expérience.
11:20Et puis aussi de se dire qu'il y a plusieurs siècles,
11:25on traversait aussi les mêmes questionnements.
11:28La nature humaine est perpétuelle.
11:30Et du coup ça nous sort un petit peu de l'hyper-focalisation sur soi,
11:34sur son psychisme, sur ses propres mécanismes,
11:39et on se rend compte qu'il y a aussi des angoisses existentielles
11:44qui sont liées à la condition humaine tout simplement,
11:47et ça remet en perspective parfois nos souffrances.
11:51C'est vrai, ça permet aussi de prendre un peu de recul,
11:53mais en même temps vous dites, je suis très sensible au texte,
11:57est-ce que c'est ça qui vous donne l'envie de faire cagne-hypocagne ?
12:02Est-ce que vous vous dites, je veux vivre avec ça ?
12:05Oui, je pense que je voulais m'orienter vers des études littéraires,
12:10et c'est vrai que cagne-hypocagne, c'est une excellente formation.
12:15C'est très exigeant.
12:18C'est très dur, et ça a été deux années très difficiles,
12:23parce que c'est une pression assez importante,
12:28c'est une charge de travail qui est très lourde.
12:30J'imaginais plutôt la charge de travail,
12:32je me disais, pour acquérir tout ça, il faut…
12:35Il y a beaucoup de pression aussi,
12:37parce qu'on a très peu de temps pour soi,
12:39on est quand même pris beaucoup dans l'étude,
12:43et c'est vrai que ça n'a pas été facile.
12:45Moi, j'ai un petit peu souffert pendant ces années de la charge de travail,
12:51et puis surtout, j'étais très perfectionniste,
12:54donc j'ai trouvé ça difficile.
12:57Mais c'est vrai que…
13:00En fait, en France, souvent, dans le parcours universitaire,
13:03on doit assez rapidement, tout de suite choisir une matière
13:07dans laquelle on se spécialise.
13:09Vous parlez en France, et vous parlez…
13:12En cagne-hypocagne, forcément, c'est de la culture francophone.
13:15Oui.
13:16Est-ce que vous parlez anglais ?
13:18Oui.
13:19Parce que moi, j'ai lu que vous aviez fait un stage à Londres,
13:25notamment un stage que vous aviez travaillé avec Dieudepenet à Londres.
13:28Oui.
13:29Est-ce que vous avez…
13:32On dit toujours qu'on n'est pas la même personne dans chaque langue qu'on parle.
13:36Est-ce que vous avez senti ça en étant…
13:38Oui.
13:39Oui, bien sûr.
13:40Le rapport à la langue, c'est très différent,
13:44que ce soit votre langue maternelle ou paternelle,
13:48ou une autre langue.
13:49On ne l'habite pas de la même façon,
13:51on n'a pas le même rapport.
13:54Oui, donc c'est vrai que ça…
13:56Oui, j'avais besoin aussi de faire cette expérience-là en anglais,
14:01où j'avais peut-être moins de facilité,
14:04même si j'étais parfaitement bilingue.
14:06Oui.
14:07Vous lisez en anglais ?
14:09Oui, oui, oui.
14:10Mais j'avais besoin de faire une expérience aussi dans le monde du travail,
14:15au sens où, quand on se lance dans des études littéraires,
14:19c'est vrai qu'on se destine souvent à l'enseignement ou à…
14:23Voilà, quelque chose de plus solide.
14:25Au journalisme aussi.
14:26Oui.
14:27Une certaine forme de journalisme, en tout cas.
14:29Oui, bien sûr.
14:30Mais c'est vrai que j'avais envie d'une expérience dans le journalisme et dans l'édition,
14:38puisque c'est deux domaines où on met en valeur la culture, le texte.
14:47C'est une partie importante du processus aussi.
14:51C'est vrai qu'on y réfléchit très peu,
14:53mais le travail d'édition en journalistique,
14:56l'édition, ce qu'on appelle l'édition,
14:58refaire les textes, les formater comme il faut,
15:02dire ce qu'il faut dans le peu de mots qu'on a ou dans l'espace qu'on a,
15:05c'est un vrai travail, alors je ne dirais pas littéraire,
15:08mais c'est un vrai travail d'écriture quand même.
15:10Oui, puis aussi j'avais un peu une fascination pour…
15:14Enfin, pas fascination, mais je trouvais que travailler dans un quotidien,
15:19dans un journal, c'est quelque chose qui est assez…
15:23C'est unique.
15:24Oui, et j'avais envie de faire cette expérience.
15:27Pour le coup, je vous rejoins tout de suite pour travailler dans un quotidien.
15:31Les plus gros quotidiens aujourd'hui sont encore à Londres.
15:35Oui.
15:36C'est-à-dire que ces grosses machines de presse écrite qui fonctionnent vraiment,
15:40ils dépassent les 80 pages en parution.
15:42Enfin, c'est quand même incroyable.
15:45Je me disais d'ailleurs qu'on avait pensé que la lecture,
15:52puisqu'avec l'arrivée du jeu digital, on s'est dit les livres, ça va disparaître,
15:55les journaux, ça va disparaître.
15:56En fait, pas du tout.
15:57Oui.
15:58Ils restent là.
15:59Oui, ah oui.
16:00Ils sont toujours là.
16:01Est-ce que vous, vous avez aussi cette…
16:03Moi, je sais que je ne peux pas…
16:04Enfin, lire sur une tablette, pour moi, ce n'est pas la même chose.
16:09Lire mon journal, ça va.
16:11Ou lire le journal, ça va.
16:13Mais lire un auteur sur une tablette, pour moi, c'est compliqué.
16:16J'ai encore besoin de toucher.
16:18Vous avez ça ou pas ?
16:19Oui, moi, je suis très, très, très attachée à l'objet physique au livre.
16:23Parce que quand on lit un livre, on y laisse des traces sur les pages.
16:32Moi, j'écris.
16:34Oui, ça garde la trace aussi de l'expérience de lecture.
16:39Et puis moi, j'adore les couvertures de livres, vraiment.
16:43Vous les gardez ? Vous avez une bibliothèque quelque part ?
16:46Oui, j'ai beaucoup, beaucoup de livres dans ma bibliothèque, un peu partout.
16:49Mais j'adore la typographie, l'image, l'objet livre.
16:54La reliure, quoi.
16:55Oui, très importante.
16:56Même encore aujourd'hui, dans les parutions modernes,
17:01on reconnaît un Flammarion.
17:04Oui, mais même parfois, j'adore aller dans des brocantes
17:09ou des endroits où on trouve des vieilles éditions.
17:11Même si j'ai déjà le livre, je trouve que la couverture des années 60,
17:16ça a son charme et j'aime bien.
17:21Moi, j'ai du mal à me séparer des livres.
17:23Même quand je les ai lus, j'ai du mal à laisser partir.
17:27Ce sont mes amis, si je déménage, je les emmène avec moi.
17:31Tout le monde me dit, mais tu vas trier.
17:33Ah ben non, non, je ne peux pas les laisser partir.
17:35Et surtout, il y a une chose, je ne sais pas si ça vous arrive,
17:37moi, je passe devant ma bibliothèque et parfois, je vois un titre sur une tranche.
17:41Et ça me rappelle un moment.
17:43Et je me dis, à ce moment-là, je faisais ça ou j'étais à tel endroit.
17:47D'ailleurs, pour parler de littérature,
17:49vous avez lancé, avec un partenariat avec Chanel,
17:54un atelier qui s'appelle « Mode et littérature ».
17:57Oui, ça s'appelle les rendez-vous littéraires du Cambon.
18:01On organise une rencontre littéraire.
18:04Il y en a à peu près cinq par an.
18:06Et c'est toujours autour d'écrivaines,
18:10soit dans l'histoire de la littérature.
18:12C'est des femmes.
18:13Contemporaines, oui.
18:15Et où c'est souvent accompagné d'une lecture
18:19par une comédienne qui est souvent attachée à Chanel.
18:25Et vraiment, ça rentre tout à fait dans l'identité de Chanel aussi,
18:32parce que même si ça ne semble pas évident au premier abord comme ça,
18:36la littérature a joué un rôle important pour Gabrielle Chanel et Karl Lagerfeld,
18:42où c'était des immenses lecteurs passionnés de littérature, de poésie,
18:51qui ont inlassablement lu tous les jours.
18:56Et donc, c'était une manière aussi de…
18:59Ils ont lu, ils ont écrit,
19:01ils ont dit des choses qu'ils ont laissées derrière eux.
19:04Gabrielle Chanel, c'était une femme de citation,
19:07en tout cas, qui avait cette façon de définir son action
19:11ou en tout cas d'expliquer son positionnement avec des phrases
19:14qui sont restées assez célèbres.
19:16C'était le cas de Karl Lagerfeld aussi.
19:18Est-ce que vous diriez que ces rencontres,
19:22est-ce que vous diriez qu'elles sont un peu l'alliance de tous les univers
19:25qui sont votre appétence ?
19:28Parce que la mode est quand même aussi un univers dans lequel vous vous épanouissez.
19:33Oui, bien sûr. Après, je ne me considère pas comme une modeuse
19:37ou quelqu'un qui est obsédé par les codes de la mode.
19:41Après, c'est vrai que j'ai eu la chance de connaître des créateurs.
19:48J'ai la passion du détail, du vêtement.
19:52Vous êtes perfectionniste aussi dans le choix du vêtement.
19:55Oui, et c'est vrai que je trouve ça un plaisir immense de pouvoir se transformer.
20:01Et le vêtement permet ce jeu aussi de dévoilement.
20:07Ou pas d'ailleurs.
20:09Ou pas, et donc c'est vrai que c'est quelque chose qui fait partie de moi aussi.
20:15Après, pour moi, ça a surtout été le fait de me dire qu'aujourd'hui,
20:20la mode a un pouvoir de communication, de diffusion,
20:24qui est extrêmement important, d'impact.
20:28Et que c'était bien qu'elle puisse se mettre un petit peu au service de la littérature
20:36et de mettre en avant la création littéraire.
20:40Oui, bien sûr, ça ouvre des portes aussi.
20:44Des espaces de conversation avec des cibles,
20:46en tout cas des communautés qu'on ne touche peut-être pas forcément directement.
20:49Exactement, et puis surtout, après, il y a un point important
20:53qui est la question de l'émancipation féminine.
20:56Gabrielle Chanel a quand même joué un rôle considérable
21:00dans l'émancipation des femmes par le vêtement.
21:03Et l'écriture est aussi un moyen.
21:06Et son style de vie.
21:07Elle a adopté un style de vie d'une femme libre.
21:10Mais elle, c'est vrai qu'en découvrant la littérature jeune,
21:15dans un grenier où elle lisait des feuilletons,
21:18en fait, elle s'est mise à rêver une autre vie.
21:21Et le pouvoir de la fiction, de l'imagination.
21:24Et dans un livre, c'est encore plus fort presque
21:27parce que le lecteur doit créer ses propres images,
21:31a une liberté dans l'imagination qu'on n'a pas forcément au cinéma,
21:35qu'on n'a pas forcément dans les arts plus visuels.
21:37Où là, il y a une part, un travail de l'imaginaire
21:41que la littérature encourage énormément
21:45et développe cette capacité à s'abstraire aussi de sa propre vie
21:50pour imaginer d'autres vies que la sienne.
21:54Et je pense que pour beaucoup de femmes
21:57qui n'avaient pas forcément accès à des possibilités d'émancipation,
22:03la littérature et les lectures qu'elles ont pu faire,
22:07on pense à l'impact que Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir, par exemple, a eu.
22:11Ou certains romans aussi.
22:15Je pense à George Sand.
22:17Enfin, voilà, ont permis d'insuffler des idées de liberté.
22:22Et donc, voilà l'idée que Chanel puisse peut-être être un vecteur de transmission
22:30peut-être dans d'autres cultures, d'autres pays,
22:33vu que c'est une marque qui est quand même présente dans le monde entier.
22:37Et avec quel positionnement d'ailleurs ?
22:40Et que tout le monde ne peut pas forcément s'acheter une veste Chanel
22:44mais peut accéder à un contenu qui est porté par Chanel.
22:48Je pense que cette élégance, ce style,
22:52il va avec une certaine idée de liberté
22:56et qu'on retrouve aussi dans les livres.
22:58Voilà, tout s'est emboîté parfaitement.
23:02Parce qu'on dit toujours que les bonnes idées,
23:04c'est celles qui arrivent à être rendues possibles spontanément.
23:10Et donc, on a parlé des rencontres philo.
23:12Elles ont été rendues possibles.
23:14Ce partenariat avec Chanel, il a été rendu possible.
23:17Il y a autre chose qui a été rendue possible,
23:19qui moi m'a beaucoup interpellée,
23:22c'est votre envie d'aller au contact des plus jeunes.
23:25C'est-à-dire que vous avez voulu aller porter la philosophie
23:29ou en tout cas éveiller le sens de la philosophie aux plus jeunes dans les écoles.
23:34Oui, parce que c'est un moment très propice de questionnement, d'ouverture.
23:38Il y a tout un tas de raisons.
23:40Je pense qu'aujourd'hui, c'est d'autant plus important
23:45de donner accès aux plus jeunes au questionnement philosophique.
23:50Ils sont beaucoup plus exposés à de l'information, à de la désinformation.
23:54Donc, il y a un besoin de pouvoir clarifier ses pensées,
24:00de pouvoir s'autonomiser aussi par la réflexion.
24:03Donc, ça, c'est quelque chose qui est peut-être plus important aujourd'hui.
24:08On le voit sur des grands sujets comme le harcèlement, le changement climatique,
24:12énormément de sujets qui touchent particulièrement les jeunes.
24:17Si on ne peut pas penser ces problèmes-là,
24:20si on ne peut pas essayer de débattre, de réfléchir,
24:23on ne va pas donner des idées toutes faites.
24:26C'est ça.
24:27C'est un peu le problème des réseaux sociaux,
24:29où c'est des vecteurs d'idées toutes faites,
24:32de militantisme, d'influence.
24:36D'ailleurs, on appelle ça des influenceurs.
24:39Il y a plein de termes différents et qu'en fait,
24:42il faut pouvoir être libre d'interpréter une situation,
24:46de pouvoir s'en dégager grâce à son esprit critique.
24:50Je pense qu'on peut, en tout cas, encourager ça
24:53en apportant un peu plus de philosophie à l'école.
24:56Mais après, c'est un engagement aussi, on va dire,
24:59à la fois sur le terrain de l'hôpital, de l'école.
25:02Là, vous terminez un cycle aussi.
25:04Oui, à l'hôpital.
25:05C'est vrai que la question du soin et de l'éducation,
25:08c'est des questions centrales aujourd'hui.
25:11Et où il y a aussi beaucoup de souffrances,
25:17beaucoup de difficultés.
25:19Et que c'était absolument très important
25:25d'intervenir dans ces espaces-là
25:29et de ne pas uniquement proposer des rencontres
25:33au théâtre.
25:35Il fallait aller sur le terrain.
25:36Il fallait aller sur le terrain.
25:37Vous parlez d'éducation.
25:38Est-ce que vous estimez que votre éducation,
25:41ou l'éducation que vous avez reçue,
25:43vous a donné cet esprit critique,
25:44ou vous a permis de l'avoir ?
25:46Vous avez été éduquée sur le principe de liberté ?
25:49Oui, je pense que j'ai eu beaucoup de chance
25:51d'avoir été éduquée dans cet esprit de liberté
25:56où j'ai été encouragée à réfléchir.
26:01À être vous-même.
26:02Oui, puis à avoir tout simplement accès aux livres,
26:05où c'était valorisé.
26:06Ça aussi.
26:07Donc ça, c'est une chance.
26:08D'autres n'ont pas eu cette chance.
26:10Mais après, je pense que ma grande chance,
26:12ça a été d'avoir été confrontée
26:15à des milieux sociaux différents
26:17en ayant été à l'école publique,
26:19en province, dans différents endroits,
26:23de m'être confrontée peut-être à certaines crises.
26:27Vous avez fait des endroits différents en plus,
26:28culturellement.
26:29Parce que quand on est à Saint-Rémy-de-Provence
26:31ou à Fontainebleau,
26:32ce n'est pas exactement le même univers.
26:34Oui, et c'est vrai que la mixité sociale,
26:38c'est très important.
26:40Voilà, ça m'a beaucoup appris.
26:43Et surtout, ça a ouvert mon regard sur le monde
26:51et sur le fait que je n'avais pas forcément envie
26:55d'être assignée à un territoire,
26:57même si j'aime infiniment mon pays
27:00et que je me sens très très très très très monégasque
27:02et indéfectiblement liée à l'histoire de Monaco.
27:08Mais je pense que c'est une chance aussi
27:12de pouvoir vivre le monde quand même.
27:17Oui, et puis aussi,
27:18et ça rejoint ce que je disais sur les livres,
27:22d'autres vies que la sienne.
27:24C'est-à-dire qu'il ne faut pas se raisonner
27:29en fonction de ses paradigmes sociaux,
27:32de ses privilèges.
27:34C'est s'ouvrir à la multiplicité
27:42et on ne peut pas s'enfermer dans certains déterminismes.
27:51Après, on tombe dans le préjugé,
27:54dans les idées reçues,
27:56dans quelque chose qui vous enferme
27:58sur ce que vous connaissez.
28:00C'était peut-être un peu ça aussi.
28:02Parce que quand on est, comme vous,
28:07dans une famille extrêmement médiatisée,
28:10qui a une image, qui a un nom, etc.,
28:13est-ce qu'on n'est pas aussi exposé à des préjugés
28:17de la part des gens qui nous regardent ?
28:18Oui, après, je pense qu'on est tous exposés à des préjugés.
28:22On est tous déterminés par sa famille.
28:24On est tous déterminés par ceux qui nous ont précédés,
28:27par des données biologiques.
28:30Il y a tellement de déterminisme qui pèse au départ.
28:35Et ça, je pense qu'on peut tous le vivre
28:40et se sentir enfermé dans une image.
28:44Mais peut-être ce qui est plus lourd
28:47et ce qui est peut-être moins agréable,
28:49c'est la médiatisation de la vie intime.
28:54L'exposition.
28:55C'est quelque chose que je trouve pas très justifiable
29:00parce que ça a des vrais impacts
29:03sur la vie personnelle des gens.
29:06Sans doute que ça satisfait de la curiosité,
29:10mais ça a des vrais impacts.
29:14Le fait de se sentir suivi, observé,
29:17ce qui regarde la vie privée de quelqu'un,
29:19ça regarde sa vie privée.
29:20Ça ne devrait pas être exposé.
29:27Et ça, je dois dire que c'est pas quelque chose de facile ou d'agréable.
29:31C'est pas la partie que vous préférez, disons ?
29:33Non.
29:34Et puis surtout, ça va à l'encontre
29:37de certaines libertés fondamentales
29:39où on a le droit d'avoir un espace privé.
29:42On a le droit de faire ses choix.
29:44Et que ça ne regarde pas les autres.
29:47C'est quelque chose qui ne se justifie pas.
29:50Oui, on peut comprendre que les gens sont curieux,
29:53mais c'est quelque chose que je trouve...
29:56Si je pouvais m'en passer...
29:59Est-ce que vous le sépareriez de l'image publique ?
30:02Là, on parle d'intrusion dans un espace privé
30:06ou en tout cas dans des choix privés,
30:08mais quand on devient une égérie comme vous l'avez été,
30:11alors Gucci d'abord, Chanel maintenant,
30:14on a quand même son visage, son apparence
30:17qui est exposée beaucoup.
30:20Est-ce que ça, c'est différent de ce que vous décrivez ?
30:23Oui, c'est très différent parce que...
30:27Voilà, c'est quelque chose tout comme...
30:33quand vous faites du cinéma...
30:37C'est le métier, ça ?
30:38Oui, où on peut être exposé physiquement,
30:44incarner quelque chose...
30:46Votre apparence, votre look...
30:48Mais ça, ce n'est pas du tout sur le même plan.
30:52Ça, c'est assumable.
30:54Ce n'est pas parce qu'on a une vie publique
30:56qu'on n'a pas le droit à une vie privée.
30:58Ça, c'est complètement...
31:01La question que je suis posée, c'est que
31:03le fait d'être en photo partout,
31:05ce n'est pas ça qui vous gêne le plus.
31:07Mais c'est la photo qui...
31:09En fait, il y a quelque chose de très différent.
31:12Vous vous êtes pris en photo à un événement officiel
31:15ou à quelque chose dans lequel vous vous engagez.
31:18Vous le savez, c'est comme ça.
31:19Ce n'est pas du tout la même chose
31:21que si vous êtes pris en photo pendant vos vacances
31:24ou à un moment qui est intime.
31:26Je vous retourne la question.
31:28Est-ce que vous aimeriez, quand vous êtes en vacances,
31:30vous dire que vous êtes susceptible d'être observé
31:33à tout moment par quelqu'un
31:35et que chaque truc que vous faites...
31:37La réponse est non, c'est sûr.
31:39Personne...
31:40D'ailleurs, quand on n'est pas sous cette exposition-là,
31:44on a du mal à s'imaginer pouvoir contrôler ça
31:48ou en tout cas le supporter en disant
31:50si je ne suis pas bien assise,
31:52si je me penche,
31:55si j'ai du chocolat...
31:57Ce n'est pas du tout la même chose que si...
32:00Oui, ce n'est pas pareil que si c'est...
32:02Ce n'est pas du tout la même chose.
32:04Vous disiez que vous vous sentiez très monégasque
32:06et que vous étiez très très attachée à Monaco.
32:09Est-ce que le fait de l'avoir quitté,
32:13puis revenu, puis quitté...
32:15Oui, mais on peut être extrêmement attaché,
32:17se sentir très libre aussi.
32:19C'est-à-dire que je me sens très attachée
32:21à plein de choses qui m'ont été transmises.
32:23Je m'engage pleinement dans les rencontres philosophiques
32:27pour apporter quelque chose à Monaco.
32:31Le nom, c'est les rencontres philo de Monaco.
32:34Mais après, je me sens très libre aussi
32:37de partir et de revenir et d'explorer autre chose.
32:40Enfin, je veux dire, ce n'est pas...
32:42C'est votre camp de base, ce n'est pas votre...
32:44Non, et puis le monde est vaste
32:46et j'ai besoin de...
32:48J'ai cette soif de liberté aussi
32:52et de ne pas être assignée à résidence, on va dire.
32:55Et alors, qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter maintenant ?
32:57Peut-être le plein succès des rencontres philo,
32:59mais qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter ?
33:01Si j'avais une baguette magique et que je vous disais
33:03« Charlotte, donnez-moi un souhait ».
33:05Oh là là, je ne sais pas, c'est trop difficile.
33:08J'ai mal à souhaiter quelque chose comme ça.
33:13Mais donc, s'il y a un souhait,
33:15c'est que la semaine de la philo se passe le mieux possible,
33:18que les gens là soient...
33:20Continuent d'aimer alors.
33:22Oui, et soient fidèles aux rencontres
33:24parce qu'on a tissé quand même des liens.
33:26On a un public qui nous suit
33:29et que ça, ça continue.
33:31Écoutez, ce sera le mot de la fin.
33:34Merci beaucoup en tout cas.
33:35Merci d'avoir été avec nous.

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