Hubert Védrine : "il y a toujours eu plus ou moins un désordre mondial"
Hubert Védrine, ancien conseiller de François Mitterrand et ancien ministre des Affaires étrangères, est notre invité dans ce nouvel épisode de The Global Conversation.
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00:00Les conflits dans le monde se multiplient, les démocraties sont de plus en plus en crise.
00:05Est-ce que le monde est devenu ingouvernable ?
00:08On a posé cette question à Hubert Védrine, ancien conseiller du président français François Mitterrand
00:15et ancien ministre des Affaires étrangères.
00:18Tout de suite sur Global Conversation.
00:24Hubert Védrine, bienvenue sur Euronews.
00:26Cet été 2024, la question de la gouvernabilité se pose à tous les niveaux, national, international,
00:33union européenne ainsi que global.
00:36Est-ce qu'on est en train d'assister à la fin d'un ordre politique et d'un ordre économique mondial ?
00:42Globalement, il n'y a jamais eu d'ordre mondial en réalité.
00:46En fait, il y a toujours eu plus ou moins un désordre mondial.
00:49Mais il y a quelques moments où il y avait des puissances qui avaient réussi à dominer le système.
00:55Après la Deuxième Guerre mondiale, ce sont les Américains qui ont organisé la suite.
00:59D'ailleurs très bien.
01:01C'est un des rares moments où une puissance dominante arrive à mélanger les intérêts nationaux
01:06qui sont le cas de toutes les puissances, et puis une sorte de vision un peu plus générale.
01:11Après il y a eu la Guerre froide, qui était assez stable d'ailleurs, et on comprenait.
01:15Il y avait l'Est, l'Ouest et le Sud, le fameux tiers-monde.
01:19Et après, quand l'Union soviétique a disparu, il y a eu un élan d'enthousiasme, de triomphalisme en Occident.
01:28Avec une forme un peu nationaliste aux Etats-Unis, on a gagné, on est les maîtres.
01:33Là on revient en géopolitique classique.
01:35La force des Etats-Unis, la force de la Chine, que devient la Russie, etc.
01:39Donc je ne dirais pas que tous les régimes sont en crise, c'est différent.
01:43S'il y a des problèmes en Chine ou en Russie, c'est différent.
01:46En revanche, toutes les démocraties sont en crise à mon avis.
01:48Elles sont menacées.
01:50Justement, il y a un problème de gouvernabilité.
01:53Mais pas spécialement en Europe, c'est les démocraties.
01:56Regardez les Etats-Unis, ils sont dans une situation effrayante.
01:59C'est comme deux pays qui s'affrontent.
02:01Donc il y a une crise dans la démocratie, et l'idée de démocratie représentative.
02:06Il y a l'idée qu'on élit des gens, président, député, etc.
02:11On les laisse travailler et on juge le bilan.
02:14On les reprend ou pas, ça c'est mort.
02:16Il y a aussi une menace, un risque, celui d'une fracture définitive
02:20entre l'Europe et les Etats-Unis en termes d'intérêts.
02:23L'Europe et les Etats-Unis, à mon avis, évolueront un jour différemment du siècle passé.
02:30Parce qu'en fait, qu'est-ce qui a réunifié de force les Etats-Unis et l'Europe ?
02:35C'est la première guerre mondiale.
02:37Après c'est Hitler, après c'est Staline, maintenant c'est Poutine.
02:42Mais dans la longue durée, c'est des mondes différents.
02:45Dans son testament, le président George Washington, le premier,
02:49il a dit ne vous mêlez jamais des conflits entre les Européens.
02:53Mais les Etats-Unis n'ont jamais été isolationnistes globalement.
02:56Ils n'ont jamais été pour contrôler l'environnement, le Mexique, le Cuba, ni les Philippines.
03:03Mais par rapport à l'Europe, il y a un cas particulier, en effet,
03:06où ils ont été obligés de se réinvestir beaucoup plus que ce qu'ils avaient prévu.
03:10Et on le voit encore maintenant.
03:12Puisqu'il n'y a pas que les Trumpistes qui disent qu'il y en a marre de payer pour les Européens
03:17et qui ne font pas assez.
03:18Même les démocrates le disent un peu.
03:20Et même c'est un démocrate, Barack Obama, qui a lancé le mouvement du pivot vers l'Asie.
03:25Le pivote.
03:26En disant que l'Europe c'est très bien, mais c'est secondaire.
03:29Mais ça peut quand même obliger les Européens à réagir plus qu'avant.
03:34Donc on a une présidence républicaine, comme tout le monde semblerait penser, avec Trump.
03:39Ou les démocrates.
03:41On n'aura pas un grand changement de politique.
03:44Alors il y a un changement gigantesque de style, de comportement.
03:48Le narrative.
03:49Le narrative.
03:50Mais c'est aussi une question de décence politique, etc.
03:53Mais sur le fond, je pense qu'il y a une évolution historique
03:56qui a lieu, même dans les deux hypothèses, par rapport à l'Ukraine.
04:00Même si c'est encore les démocrates.
04:02Ils ne vont pas faire re-voter un deuxième plan à 61 milliards.
04:06Donc d'une façon ou d'une autre, la question ukrainienne va être modifiée.
04:10La Russie demeure un dilemme pour les Européens et pour les Américains.
04:16Il y a des pays européens qui sont sur la confrontation dure en disant
04:21non, ça c'est une menace existentielle, il faut supprimer, éliminer cette menace.
04:26Alors que pour des autres, oui, c'est un risque, mais gérable.
04:30Et des autres aussi, ils parlent d'engagement de la Russie.
04:34Moi je suis de l'avis, pour être franc avec vous, des vieux réalistes américains,
04:39Kissinger, Brzezinski, pour une fois d'accord d'ailleurs,
04:43qui pensaient qu'on a complètement raté la décennie 90.
04:46Donc je pense vraiment, moi aussi, que dans cette période,
04:50Yeltsin, Poutine 1 et 2, Medvedev,
04:53il aurait fallu faire ce que Kissinger proposait,
04:56c'est-à-dire un grand accord de sécurité, y compris avec la Russie.
05:00Et Brzezinski lui-même, polonais, donc avec Carter,
05:04mais une influence énorme après aussi,
05:07disait, il faut couper l'Ukraine de la Russie,
05:10donc réinventer l'Ukraine, la couper de la Russie,
05:13comme ça la Russie ne sera plus un empire,
05:16mais il ne faut pas la mettre dans le temps.
05:18Il faut faire un statut de neutralité, genre Autriche,
05:21de l'époque de la guerre froide.
05:23Ce n'est pas du tout ce qui a été fait,
05:25mais pas du tout par duplicité stratégique.
05:28J'emploie les termes, à propos des Etats-Unis,
05:30de désinvolture olympienne.
05:33On a gagné, nos valeurs vont s'imposer partout,
05:36à coups de sermons, de sanctions, de bombardements, tout ça.
05:38On a gagné. Le réalisme n'a pas échoué.
05:41La réelle politique n'a pas échoué, n'a pas été essayée.
05:44Donc c'est une sorte d'irréelle politique confuse qui a dominé.
05:48Et là, je suis tout à fait de l'avis de Biden,
05:51pas de tous les Européens, Biden,
05:54depuis le début, il faut empêcher Poutine de gagner en Ukraine,
05:58absolument, mais on ne va pas se laisser entraîner
06:01dans l'engrenage de la guerre à la Russie.
06:03Et là, il y a clivage, parce qu'il y a une partie des Européens
06:06qui n'osent pas le dire comme ça,
06:08mais ils pensent qu'il faudrait abattre le régime russe, en fait.
06:11Il faut revenir à la Moscou, oui, pour certains.
06:14Oui, c'est ça. Valézy, c'est ça, par exemple.
06:17Parce que la Russie est aussi un empire colonial.
06:20Ben oui, quand même, c'est bon.
06:22Mais là, il y a une ligne américaine,
06:24et même à l'époque où on croyait, on espérait
06:26que les Ukrainiens allaient gagner,
06:28le chef d'état-major des armées américaines
06:31indiquait clairement qu'il ne soutiendrait pas
06:33l'attaque sur la Crimée, par exemple.
06:35Bon, on n'en est pas là, c'est l'inverse.
06:37C'est l'inverse, il y a une menace sur l'Ukraine.
06:40Et là, je suis complètement d'accord,
06:42il faut empêcher Poutine de gagner.
06:44Vous avez dit que, pour Biden,
06:47disons l'école Biden,
06:49la Russie ne doit pas gagner.
06:51Mais qu'est-ce qui signifie, en termes concrets,
06:54sur les terrains, une sorte de 38e parallèle
06:58à l'européenne ?
07:00C'est-à-dire, on gèle le conflit
07:02là où les Russes sont arrivés.
07:04Moi, je m'attends à une sorte de gel.
07:06Je sais, c'est le fameux plan Trump,
07:08dont on connaît le début.
07:10Il dit à Zelensky, il faut arrêter.
07:13En disant, je vais m'entendre avec Trump,
07:15j'invite les Russes à des négociations,
07:17il a déjà compris.
07:19Et même si c'est les démocrates,
07:21ils ne vont pas promettre le soutien perpétuel.
07:23Donc, une sorte de gel.
07:25Après, je n'imagine pas
07:28des négociations, en tout cas, pas directes.
07:30L'Ukraine a trop souffert.
07:32C'est trop dégueulasse, la guerre russe en Ukraine.
07:35C'est monstrueux sur le plan humain,
07:37les cibles, etc., effrayants.
07:39Donc, ils ne peuvent pas négocier.
07:41Aucun président, même si ce n'est pas Zelensky,
07:43même si c'est un autre,
07:45ne peut pas négocier avec la Russie, en fait.
07:47Quelle formule ?
07:49Différents pays proposaient des plans,
07:51des plans de coexistence, de voisinage,
07:53de cesser le feu organisé, etc.
07:55Les Turcs, qui rappellent
07:57qu'ils avaient quand même permis
07:59des négociations la première année,
08:01rappelaient. Éventuellement, les Indiens,
08:03les Chinois, Lula,
08:05enfin, tout le monde.
08:07Mais pas les Européens qui sont dans un camp, maintenant.
08:09Que dans un camp.
08:11Je pense que les Européens, sans rien lâcher,
08:13continuant à aider l'Ukraine,
08:15devraient se positionner pour être capables
08:17de jouer un rôle dans la suite,
08:19par rapport à ça.
08:21Et donc, ça veut dire être capables d'accepter
08:23qu'à un moment donné,
08:25on reparle aux Russes.
08:27Mais les Russes veulent parler avec les Américains.
08:29Je sais bien.
08:31Et les Américains ne veulent pas parler avec les Russes.
08:33Peut-être Trump voudrait.
08:35Non, Trump, il a un plan.
08:37Il ne veut plus les cibles militaires.
08:39Mais après, tout le monde va lui dire,
08:41même aux Etats-Unis,
08:43il faut quand même empêcher Poutine de réattaquer.
08:45Même pour Trump,
08:47ça peut marcher. Parce que s'il réattaque,
08:49il ne peut plus impressionner les Chinois.
08:51Après.
08:53Donc, il peut y avoir un deuxième volet du plan Trump.
08:55Il commence à dire, d'ailleurs,
08:57il croit qu'il va gagner. On n'est pas sûr.
08:59Mais c'est une hypothèse sérieuse.
09:01Je règle la question
09:03entre mon élection et l'entrée à la Maison Blanche
09:05le 21 janvier.
09:07Donc, ça veut dire qu'il ne se croit
09:09qu'appelable d'une façon ou d'une autre
09:11d'obtenir des garanties russes,
09:13ce qui ne vaut rien, à mon avis,
09:15sauf s'il y a des menaces.
09:17Ce qu'on appelle garantie, il faut que ce soit des menaces
09:19dissuasives, en vrai.
09:21Est-ce que, justement,
09:23l'adhésion de l'Ukraine à l'Union Européenne
09:25pourrait être une solution
09:27acceptable pour tout le monde ?
09:29L'élargissement général.
09:31Un jour, il faudra s'arrêter quelque part.
09:33Donc, l'idée qu'on va s'élargir
09:35jusqu'à la Mongolie, c'est une plaisanterie, mais...
09:37Non, non, mais... Bon, on n'en est pas là.
09:39Ukraine, je peux comprendre
09:41qu'à un moment donné, pour des raisons
09:43de solidarité humaine, vu l'atrocité
09:45de ce que subissent les Ukrainiens,
09:47on fasse ce geste.
09:49C'est très compliqué, en réalité.
09:51Il ne remplisse pas les conditions.
09:53Donc, il faut qu'il y ait un calendrier
09:55quand même réaliste.
09:57D'autre part, on ne peut pas laisser tomber
09:59les pays comme ceux des Balkans occidentaux
10:01qui sont dans la salle d'attente depuis des années.
10:03C'est ça, le problème.
10:05On sait très bien que c'est là
10:07où, officiellement, le problème
10:09le plus grand se pose quand on parle
10:11d'élargissement aux Balkans occidentaux,
10:13la reconnaissance du Kosovo.
10:15Vous étiez en poste
10:17en tant que ministre des Affaires étrangères.
10:19J'étais là comme groupe de contact
10:21qui a géré ça,
10:23y compris avec le ministre russe
10:25de l'époque, Igor Ivanov.
10:27Mais je vous signale que l'Espagne
10:29n'a pas reconnu le Kosovo.
10:31Il y a plusieurs pays d'Europe
10:33qui n'ont pas reconnu
10:35parce que c'est un précédent trop dangereux.
10:37Donc, je ne vois pas comment la machinerie
10:39européenne, qui est quand même
10:41psychorigide, sûre d'elle-même
10:43avec beaucoup d'arrogance,
10:45peut-être un peu moins maintenant,
10:47je ne comprends pas comment on en fait une condition.
10:49Parce que la construction d'une défense
10:51européenne,
10:53surtout d'un point de vue industriel,
10:55demeure quelque chose d'absolument
10:57irréel.
10:59De toute façon, c'est un peu du théâtre,
11:01parce que même avant
11:03Macron, qui lui est encore plus convaincu
11:05personnellement, les Français ont
11:07toujours suggéré une défense européenne.
11:09Les Européens n'en veulent pas.
11:11Ça passe
11:13notamment par les industries de défense
11:15en Europe. Mais les Américains,
11:17tout en prétendant
11:19que les Européens doivent dépenser plus,
11:21ils combattent les concurrents
11:23européens. Donc, ils veulent
11:25que les Européens dépensent plus pour acheter
11:27Américains. Il faudrait que les pays qui
11:29comptent en matière de défense,
11:31il y en a 6 ou 7,
11:33secrètement, je le dis publiquement, c'est bête,
11:35mais il faudrait que ce soit fait secrètement,
11:37réfléchissent entre eux
11:39à ce qu'on fait
11:41s'il y a vraiment Trump.
11:43Les États-Unis
11:45forcent pour
11:47ramener l'OTAN, étendre l'OTAN,
11:49les rayons d'action de l'OTAN
11:51à l'Asie pacifique,
11:53les pivots sur l'Asie.
11:55Les Européens ne sont pas tous convaincus
11:57de ça.
11:59Moi, j'ai un point de vue classique,
12:01français et classique.
12:03C'est le traité de l'Atlantique nord.
12:05Il y a toujours eu
12:07la tentation de ce qu'on appelle le hors jaune,
12:09l'étendre.
12:11Mais c'est pas nouveau. Je pense
12:13que c'est pas une bonne solution. C'est incontrôlable,
12:15hyper dangereux.
12:17On sait pas dans quoi ça nous étendrait.
12:19L'OTAN, la clé, c'est l'article 5, quand même.
12:21L'obligation de défendre les alliés.
12:23Donc je pense qu'il faut une alliance
12:25différente, une vraie alliance.
12:27Et dans certains cas, pour certaines
12:29opérations ponctuelles,
12:31il peut y avoir une collaboration ponctuelle,
12:33limitée, entre
12:35tel ou tel pays de l'OTAN en Europe
12:37et cette alliance asiatique,
12:39éventuellement, ou non, on peut dire non.
12:41Mais en tout cas, ça peut pas être la même alliance,
12:43à mon avis. D'ailleurs, c'était déjà abusif
12:45d'étendre
12:47la compétence théorie de l'OTAN
12:49à l'Afghanistan,
12:51qui en plus se termine sur un échec.
12:53Le Proche-Orient, par contre,
12:55il est,
12:57disons, un problème
12:59énorme pour
13:01la sécurité
13:03européenne.
13:05Il y a plusieurs scénarios,
13:07dont des scénarios épouvantables.
13:09Les Israéliens, nationalistes,
13:11extrémistes, quasiment fascistes,
13:13pas forcément Netanyahou, mais ses alliés,
13:15ils ont expulsé tous les Palestiniens.
13:17Ils rendent la vie
13:19intenable en Cisjordanie.
13:21Donc, c'est vraiment des incendiaires
13:23en Cisjordanie.
13:25Ou alors, vous avez l'autre hypothèse atroce,
13:27un jour, les Israéliens prennent
13:29une vraie bombe sur la tête. Enfin, c'est des scénarios,
13:31c'est pas des solutions.
13:33La seule solution, c'est celle que
13:35Yitzhak Rabin a eu le courage d'assumer
13:37les deux États. Un État palestinien,
13:39Rabin,
13:41Shimon Peres, Olmert,
13:43Ehud Barak, et même Sharon
13:45à la fin.
13:47Avant que Netanyahou gagne, reprenne le pouvoir,
13:49notamment, disait Clinton,
13:51en raison de l'influence
13:53dans l'électorat des juifs russes,
13:55et disent avec moi,
13:57jamais d'État palestinien.
13:59Et l'horreur du 7 octobre,
14:01puis l'horreur de la guerre, donc c'est pas une question
14:03de sécurité. Sur quelle base un État palestinien ?
14:05Alors qu'à l'époque, il y avait
14:07quand même Arafat, l'OLP...
14:09Même l'équipe Biden, qui est d'ailleurs très très très bien
14:11là-dessus, le mieux possible,
14:13compte tenu de ce qu'est l'Amérique.
14:15Biden, Blinken, Sullivan.
14:17Ils disent qu'il faut un chemin vers l'État palestinien.
14:19Les pays arabes eux-mêmes
14:21avaient complètement abandonné.
14:23Je pars de l'hypothèse de la mise
14:25à l'écart de Netanyahou.
14:27Il faut un gouvernement israélien
14:29qui prend le risque.
14:31Du côté palestinien, il faut réinventer
14:33une autorité palestinienne nouvelle et crédible.
14:35Donc c'est la seule menace contre le Hamas.
14:37D'ailleurs, le Hamas fera tout
14:39pour l'empêcher.
14:41Parce que si on retrouve un autre premier ministre israélien,
14:43un autre leader palestinien,
14:45non Hamas,
14:47il faut les protéger.
14:49Et un seul État, par contre ?
14:51Je crois que ça ne tiendra pas.
14:53Avec un changement de nom, évidemment.
14:55Il faut commencer par séparer les deux peuples.
14:57Avant peut-être un jour
14:59de vivre plus ensemble, etc.
15:01Donc je n'y crois pas.
15:03Ça me parait encore plus compliqué que l'autre
15:05scénario qui est déjà
15:07assez compliqué.
15:09Il ne faut pas renoncer d'espérer ça.
15:11On termine avec un scénario
15:13un peu moins compliqué.
15:15On pense et on espère.
15:17La situation française,
15:19après les élections,
15:21pour la première fois, on voit
15:23des grandes difficultés à trouver une majorité.
15:25Et
15:27la solution d'une cohabitation
15:29aussi se pose.
15:31Mais avec quelle majorité ?
15:33Vous avez été ministre dans un gouvernement
15:35qui avait une cohabitation.
15:37Moi j'ai connu les trois cohabitations.
15:39Le président Macron,
15:41déjà, il n'avait pas la majorité.
15:43Vrai. Donc il avait un gouvernement
15:45qui naviguait
15:47selon les sujets.
15:49La situation est encore plus compliquée qu'avant.
15:51D'abord parce que personne n'avait anticipé
15:53sur la coalition électorale
15:55intitulée Front Populaire.
15:57Tout à fait étonnant d'ailleurs.
15:59Un cartel, oui.
16:01Ce qu'on appelait le cartel des gauches
16:03dans les années 1922-1923.
16:05Macron ne s'y attendait pas, mais personne ne s'y attendait
16:07parce qu'il y a une contradiction absolue sur le fond.
16:09Sur énormément de sujets.
16:11Il suffit de regarder le programme.
16:13On voit bien qu'il y a des contradictions
16:15personnelles,
16:17des ambitions contraires
16:19et des contradictions de programmes.
16:21Énormes.
16:23Alors, la question, qu'est-ce qui se passe dans l'année
16:25qui est devant nous, sauf si le Front Populaire
16:27réussit à imposer une candidature unique.
16:29Mais pour le moment, ils n'y arrivent pas.
16:31Et si ce n'est pas le cas dans les deux cas,
16:33on passe après à des tentatives
16:35du gouvernement de coalition.
16:37Ce qui reste des macroniens, ensemble.
16:39Plus un peu de droite modérée.
16:41Pas le RN.
16:43Un peu de gauche.
16:45Et personne n'en sait rien.
16:47Mais dans tous les cas, c'est minoritaire.
16:49Est-ce qu'à votre avis, il faudra quand même
16:51à un moment donné, engager ou créer
16:53une détente institutionnelle,
16:55une forme de détente institutionnelle
16:57avec le RN ?
16:59À un moment donné.
17:01Et de toute façon, elle représente
17:03une partie considérable de l'électorat français.
17:05C'est sûr.
17:07Oui, je pense qu'on atteint les limites, quand même,
17:09de l'esprit démocratique,
17:11quand on prétend ostraciser
17:13dans les postes, etc., des gens qui représentent
17:15près de la moitié de l'électorat.
17:17Donc ça ne tient plus.
17:19D'ailleurs, si le barrage
17:21Front Républicain,
17:23coalition contre l'extrême droite
17:25et le moralisme,
17:27histoire du fascisme, etc.,
17:29c'est différent.
17:31C'est une paresse intellectuelle de comparer aux années 30.
17:33Je crois que c'est complètement, complètement différent.
17:35Mais si ça avait fonctionné,
17:37le RN serait à 15%.
17:39Il ne serait pas à 40%.
17:41Donc c'est vrai, la question est
17:43délicate.
17:45Ça peut...
17:47Les réponses peuvent choquer certaines personnes,
17:49mais à mon avis, soit les partis de gouvernement
17:51arrivent à répondre,
17:53ce qui n'est pas le cas depuis 30 ans,
17:55à la demande non pas fasciste,
17:57mais banale d'ordre.
17:59Ou alors, un jour ou l'autre, le RN
18:01gouvernera.
18:03À ce moment-là, on verra les limites.
18:05On verra qui se les banalisera.
18:07Ça deviendra
18:09un parti de gouvernement détesté,
18:11comme tous les autres.
18:13Exactement. Et à propos des extrêmes, pour conclure,
18:15il y a eu l'initiative
18:17de Viktor Orban, le Premier ministre
18:19hongrois, qui était très critiqué
18:21d'ouvrir un table des négociations
18:23avec les Russes, ainsi qu'avec les Chinois,
18:25et en plus avec Trump.
18:27Est-ce que vous pensez qu'une initiative comme ça
18:29pourrait être utile aussi ?
18:31Non, pas de façon isolée.
18:33Je ne crie pas au scandale.
18:35D'abord, plus personne ne se rappelait
18:37qu'il y avait des présidences tournantes.
18:39Donc, d'une certaine façon...
18:41Il a redonné visibilité
18:43à la présidence tournante.
18:45Après, il a un jeu particulier.
18:47Quand Poutine le reçoit,
18:49il sait très bien qu'Orban n'engage que lui.
18:51Peut-être un ou deux pays à côté,
18:53mais c'est tout par rapport à ça.
18:55Donc, je ne hurle pas contre Orban,
18:57même si ça met dans un état
18:59comateux tout le système
19:01Commission, PESC, etc.
19:03Et de toute façon,
19:05le cadre va changer à la fin de l'année.
19:07Parce que soit c'est Trump,
19:09ce qui est le plus probable aujourd'hui,
19:11soit c'est les démocrates,
19:13mais ils ne vont pas continuer sur la ligne d'avant.
19:15Donc, Orban pourra dire
19:17« J'ai préparé le terrain ».
19:19Mais ça ne veut rien dire. Il ne peut pas préparer le terrain
19:21La discussion qui intéresse les Russes,
19:23c'est la discussion américaine.
19:25Zelensky aura besoin
19:27de gens qui parlent aux Américains
19:29et aux Russes.
19:31Donc, c'est un scandale exagéré.
19:33C'est plutôt des luttes de territoire,
19:35mais ce n'est pas la solution non plus.
19:37Et moi, je ne vois pas
19:39les Européens,
19:41même dans le cadre de Trump,
19:43faire du Orban.
19:45Merci beaucoup.
19:48Merci pour vos invitations
19:50et vos questions.
19:52On a fait le double.
19:54Il faut garder le double.