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n 2019, Morocco celebrated 20 years of King Muhammad VI's reign. He's managed to impose his own style through gradual reforms. But the country is also deeply divided and unequal. Though the King wishes to reform, he must face opposing forces of tradition and common law. The challenges are numerous and the threats are significant. He must constantly walk a political tightrope to keep revolution at bay.

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Personnes
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00:00:00En 2019, le Maroc commémore les 20 ans de reine du roi Mohamed VI, deux décennies au
00:00:14cours desquelles il a affirmé sa personnalité.
00:00:16Héritier de deux souverains emblématiques, Mohamed V et Hassan II, le jeune roi a su
00:00:22imprimer son propre style en réformant progressivement son pays, peuplé de 36 millions d'habitants.
00:00:27« Le Maroc n'est pas encore une démocratie véritable, le Maroc est dans la voie de la
00:00:36démocratie.
00:00:37Qui gouverne ? Evidemment que le roi y gouverne, c'est pas le roi d'espace, c'est pas
00:00:42le roi de la Grande-Bretagne.
00:00:43Le roi oriente les grandes décisions du pays, une décision royale c'est une feuille
00:00:51de route.
00:00:52» Mohamed VI est à la tête d'un pays dans lequel les inégalités sociales et identitaires
00:00:59sont fortes.
00:01:00Si le monarque manifeste une volonté de réformer, il doit néanmoins composer avec des forces
00:01:06contradictoires issues de la tradition et du droit coutumier.
00:01:09Ses défis sont nombreux, et les risques non négligeables.
00:01:13« Le métier de roi au Maroc c'est un équilibriste toute la journée.
00:01:16Le risque c'est la révolution tout simplement, c'est le renversement de la monarchie, c'est
00:01:21la perte du trône.
00:01:22Parce que lui il joue sa tête, il ne joue pas à une élection.
00:01:25»
00:01:26Mohamed VI est le 23ème souverain de la dynastie alaouite, installé au Maroc depuis le 17ème
00:01:52siècle.
00:01:53Dès son intronisation, il affiche un style résolument moderne.
00:01:56Si sa personnalité est modérée, il ne faut pas oublier qu'il a été formé pour régner
00:02:02dès son plus jeune âge.
00:02:03S'inscrivant dans la tradition familiale, Mohamed VI est scolarisé au collège royal,
00:02:09au sein même du palais.
00:02:10Il est accompagné par cinq fils de notables, mais aussi de sept garçons méritants, issus
00:02:16de familles modestes et choisis à la fin de l'école primaire parmi les meilleurs élèves
00:02:20de chaque région du pays.
00:02:22« Assis Benyassi, Boulanger Benyassi, Fabien Benyassi, Docteur Benyassi, Sidi Mouhamed, Hassan.
00:02:37Roi.
00:02:38»
00:02:39Hassan II voulait ce qu'il appelait une formation à l'aspartiate, c'est-à-dire
00:02:46la rigueur, la discipline, etc.
00:02:49Donc on était dans un cadre un peu pratiquement, j'allais presque dire jésuite.
00:02:55On rêvait à six heures du matin, on priait, on commençait à apprendre le Coran.
00:03:01On levait des couleurs, c'était fondamental chaque matin, avant de rentrer à la classe.
00:03:11C'est une expérience unique, incontestablement, elle est unique par la mesure où on côtoie
00:03:24celui qui aura la charge.
00:03:26« Âgé de 13 ans, il sait se mêler aux garçons de son âge pour des jeux qui le font côtoyer
00:03:33des fils de familles modestes, mais il peut aussi être aux côtés de son père à l'occasion
00:03:37de cérémonies officielles au cours desquelles le peuple marocain apprend à connaître son
00:03:42futur souverain.
00:03:43»
00:03:44« Majesté, est-ce que vous êtes un père sévère pour vos enfants ? Il le faut bien
00:03:49parce que très peu de personnes le sont pour eux et j'estime que la sévérité du père
00:03:52remplace toutes les autres.
00:03:53J'ai été élevé comme ça et je compte les élever comme j'ai été élevé moi-même.
00:04:00»
00:04:01Je dirais que Hassan II, il était sévère dans l'éducation, dans une conception patriarcale
00:04:07et il se définissait comme étant autoritaire.
00:04:11Profondément timide, souvent caché derrière la stature imposante d'Hassan II, le futur
00:04:19roi Mohammed VI est un héritier peu connu du peuple marocain.
00:04:23Un fils qui, sans bruit, apprend sagement les codes de la gouvernance royale.
00:04:29« Je pense que Mohammed VI était un mystère pour beaucoup de personnes et il était dans
00:04:38l'ombre de son père.
00:04:39Un élément aussi qui est très très important chez le Marocain, c'est la légitimité de
00:04:42la monarchie.
00:04:43La monarchie marocaine, elle est légitime, elle est populaire.
00:04:46On peut contester certaines décisions politiques ou économiques, mais la monarchie demeure
00:04:52la pièce maîtresse de la vie politique marocaine.
00:04:55La monarchie, c'est la continuité.
00:05:00Il y a Mohammed V, Hassan II, Mohammed VI et ça se continue.
00:05:07Et la monarchie halawite est une dynastie qui a duré le plus, parce qu'elle a su travailler
00:05:13avec le peuple, mettre le peuple en avant, qu'ils se font aimer.
00:05:17C'est une question presque de fierté nationale, c'est un patrimoine et si on fait un référendum
00:05:26aujourd'hui, il aura 100%, 99,9%.
00:05:29Si le peuple remet en cause régulièrement certaines décisions, il n'attaque jamais
00:05:35l'institution monarchique en elle-même.
00:05:36A la mort du roi Hassan II, le 23 juillet 1999, l'émotion de la population en est
00:05:44une preuve, et ce malgré l'autoritarisme du monarque.
00:05:56Ça a commencé par, à la radio et à la télévision, il y avait des versets de courant.
00:06:03C'était un moment où les gens ne savaient plus quoi penser.
00:06:06Parce que Hassan II est mortel, je me souviens très très bien, l'animateur vedette de
00:06:11la chaîne nationale marocaine, qui pleurait à chaudes larmes la disparition du roi.
00:06:17Ces funérailles sont l'occasion de grandes manifestations de ferveur populaire et de
00:06:27soutien à la monarchie.
00:06:28On s'en souvient tous, en tout cas ma génération et la génération de nos aînés, parce que
00:06:39nous sommes nés avec le roi Hassan II, nous avons grandi avec le roi Hassan II, qui était
00:06:44un roi avec une très forte personnalité, un roi qui a traversé une période très
00:06:49difficile et très importante dans le développement de ce pays, donc vraiment un roi qui a beaucoup
00:06:54marqué.
00:06:55On voyait des grandes de ce monde, par exemple, le prison américain, Clinton à l'époque,
00:07:04on voyait Jacques Chirac, on voyait des présidents du monde entier, des rois qui sont là, qui
00:07:09sont alignés derrière le cercueil de Hassan II.
00:07:13Il y avait une sorte de fierté pendant ce moment-là, c'est-à-dire que les gens, ils
00:07:17vous disent, voilà, ça devait être un grand roi.
00:07:25Son décès était un moment très redouté parce qu'on se demandait vers quoi on allait
00:07:31aller pour les décennies à venir.
00:07:32Mais on savait en même temps que nous avions un prince héritier qui était profondément
00:07:38moderne, profondément humain, profondément ouvert, et qui était vraiment habité par
00:07:43une envie de faire évoluer la vie du peuple marocain.
00:07:55L'intronisation du roi Mohamed VI est célébrée le 30 juillet 1999.
00:08:00Le fait qu'on a fait une transition rapide, une cérémonie d'allégeance qui était assez
00:08:08rapide quand même, ça a permis de rassurer les Marocains, ça a permis aussi de rassurer
00:08:11les acteurs politiques, économiques.
00:08:13Même pour les Marocains, il ne fallait pas qu'il y ait un moment de doute et un moment
00:08:18de questionnement sur où est-ce que nous allons, où est-ce que la société marocaine,
00:08:22le pays, où est-ce qu'il va, etc.
00:08:27Mohamed VI arrive sur le trône, son casier judiciaire en tant que roi était vierge.
00:08:31Il n'avait emprisonné personne, il n'avait torturé personne, il n'avait pris de position
00:08:37sur aucun dossier chaud.
00:08:39Il incarnait pour un peuple marocain attaché à une institution monarchique qui reste le
00:08:45garant de la stabilité du pays.
00:08:47Le besoin d'espérer s'est manifesté d'une façon énorme et il s'est traduit par une
00:08:53popularité absolument phénoménale du nouveau roi.
00:08:57Toute sa vie est vouée pour aider les autres.
00:08:59On l'appelait le roi des pauvres d'ailleurs.
00:09:01Cette image populaire du roi des pauvres, cette image qui est extrêmement proche du
00:09:11peuple, on voyait un roi se balader dans les rues, saluer les citoyens, se prendre en photo
00:09:17avec eux.
00:09:18Donc il y avait une certaine modernité justement dans cette image du roi et je pense qu'il
00:09:23correspondait à une nature profonde du personnage.
00:09:26Mohamed VI n'est pas à l'aise et il a préféré remplacer l'aisance oratoire par la présence
00:09:40sur le terrain, l'interaction avec la population.
00:09:43Et ça c'est ce qu'on voyait au début du règne, c'est-à-dire un roi qui n'hésitait
00:09:48absolument pas à aller à la rencontre des gens et à envoyer des messages très très
00:09:55forts uniquement par ce qu'il fait et non pas par ce qu'il dit.
00:09:58C'était une réconciliation avec le pays, avec tout le Maroc.
00:10:08Pas seulement le Maroc d'en haut, mais le Maroc d'en bas, de très très bas quoi.
00:10:13Et on voyait une certaine sincérité qui se dégageait de sa personne.
00:10:17Donc ça ne peut susciter que de l'espoir.
00:10:21Tout ça peut paraître anodin, anecdotique, on n'est pas dans la grande politique, on
00:10:25n'est pas dans des grandes orientations, mais en même temps ça te crée un style,
00:10:29ça te crée une manière de gouverner, une manière d'incarner la monarchie, une monarchie
00:10:36qui colle avec son temps.
00:10:37Même dans sa vie privée, le roi surprend.
00:10:44Pour la première fois dans l'histoire du Maroc, un monarque présente son épouse à
00:10:49ses sujets.
00:10:50Une révolution dans les mœurs du Serail.
00:10:54Son mariage avec une jeune ingénieure en informatique, issue de la classe moyenne,
00:10:59est un signe de changement qui s'adresse particulièrement aux Marocaines, dans un
00:11:03pays musulman où le statut de la femme est un débat politique majeur.
00:11:07La société civile réformatrice, et notamment les féministes, comptent sur la jeunesse
00:11:15et la modernité de ce nouveau monarque pour faire évoluer les questions sociétales.
00:11:37Nous avons eu, en tant que femmes marocaines, le sentiment qu'il y a eu une accélération
00:11:43de notre histoire de citoyenne parce que, rapidement, on a été témoins de vraies
00:11:49volontés politiques de la part de Sa Majesté pour promouvoir les femmes.
00:11:55Arabes, des dizaines de milliers de femmes et d'hommes occupés de pavés au nom de
00:12:00la modernité.
00:12:01Selon les manifestants, la femme marocaine ne doit plus être une mineure soumise à
00:12:05l'autorité des hommes.
00:12:06Les progressistes veulent plus que des mots.
00:12:10Une véritable révolution juridique et sociale consacrant l'égalité homme-femme, et donc
00:12:16faire changer le code de la famille.
00:12:17Pour faire entendre leur voix, ils organisent en 2000 une manifestation à Rabat, la capitale
00:12:24du pays.
00:12:25Le code de la famille était un code très discriminatoire.
00:12:31La femme était considérée comme une mineure à vie, elle devait obéissance à son mari
00:12:37moyenne en subsistance, on mariait des mineurs, il y avait la répudiation, donc un homme
00:12:46pouvait répudier sa femme à n'importe quel moment, n'importe quand.
00:12:50Je voulais, entre l'indépendance du Maroc et le moment où il y a ce débat, il y a
00:12:55si vous voulez, un, une chute incroyable de la fécondité des femmes marocaines, il y
00:13:02a une démocratisation de l'enseignement avec une entrée des femmes marocaines dans
00:13:06la vie active, le travail, et donc deviennent des individus à part entière, qui veulent
00:13:13maîtriser leur vie.
00:13:14On a vu dans la rue des hommes et des femmes, des personnes âgées et des jeunes, pour
00:13:25moi c'était un message extrêmement important parce que jusqu'alors on avait considéré
00:13:30que c'était une préoccupation de sénacles féminins ou de féministes branchées sur
00:13:37la place occidentale, c'était une question démocratique, c'est une question de droit
00:13:43humain et pour moi ça a été une rupture.
00:13:46C'était euphorique d'arriver au milieu de toutes ces personnes qui scandaient des
00:13:53slogans pour la protection, la promotion des droits des femmes, pour la lutte contre
00:14:00les discriminations, c'était extraordinaire.
00:14:03Ces comtés sont les conservateurs qui organisent le même jour une contre-manifestation à
00:14:10Casablanca, capitale économique du pays.
00:14:13La grande majorité des participants sont les sympathisants islamistes.
00:14:18200.000 personnes, 500.000 selon les organisateurs, ont défilé dans les rues de Casablanca.
00:14:23Une véritable démonstration de force, une façon aussi de se compter.
00:14:27Thème unitaire, la révision du statut de la femme dans la société.
00:14:30Un projet inacceptable pour les partis et les associations islamistes.
00:14:40Ce qui était le plus important lors de la marche de Casablanca, c'était de faire
00:14:46son organisation.
00:14:50Les hommes étaient d'un côté et les femmes de l'autre.
00:14:55Les revendications étaient claires, non à la modification du code de la famille, non
00:15:02aux expériences occidentales et à leurs applications dans la société marocaine.
00:15:11Dès lors, le monarque est confronté à un dilemme.
00:15:14Car s'il est progressiste sur les questions sociétales, la société, elle, est encore
00:15:19très conservatrice.
00:15:24Commandeur des croyants, il garantit la liberté et la pratique de toutes les religions.
00:15:29Mais sa qualité de descendant du prophète le place dans une situation très complexe.
00:15:35Il y avait un désir sincère de modernité.
00:15:40Mais il était aussi clair qu'il a une fonction, qui est celle de commandeur des croyants,
00:15:47c'est-à-dire qu'il est aussi un chef religieux et un chef spirituel.
00:15:52La légitimité du pouvoir au Maroc, c'est quelque chose qu'il n'a pas.
00:16:00La légitimité du pouvoir au Maroc est une légitimité religieuse.
00:16:06C'est en raison de sa qualité de descendant du prophète que le roi détient le pouvoir
00:16:15et qu'il ne peut pas venir juste éduquer des règles selon ses préférences personnelles
00:16:21ou selon son humeur.
00:16:24Si le roi se démarque par un style nouveau, résolument ancré dans le progrès,
00:16:29il doit toutefois composer avec une population marocaine
00:16:32très attachée à la continuité de la monarchie.
00:16:37C'est ainsi que dès les premières années du règne de Mohamed VI,
00:16:40le peuple se sent rassuré par la naissance du prince héritier, Moulay el-Assad.
00:16:47Un monarque qui a la perspective de léguer le trône à son fils
00:16:51et même à ses arrière-petits-enfants ne réfléchit pas du tout de la même façon.
00:16:55Il a le temps devant lui et l'essentiel pour lui est la stabilité de l'institution qu'il incarne.
00:17:01Qu'est-ce qui est le plus important pour la monarchie marocaine ?
00:17:04Bien sûr, c'est d'abord sa continuité, sa durée, son leadership.
00:17:11Une monarchie surtout qui a la capacité de s'adapter au contexte et à l'imprévu.
00:17:17C'est ça.
00:17:22Le Maroc est une monarchie et le roi en est le chef politique suprême.
00:17:26Il dispose donc de larges pouvoirs, mais doit aussi composer avec un parlement élu.
00:17:34En septembre 2002 ont lieu les premières élections législatives
00:17:37depuis l'accession au trône de Mohamed VI.
00:17:41Elles portent au pouvoir des forces qui émergent depuis quelques années.
00:17:51Depuis la fin des années 90, on assiste en effet au Maroc et dans la région
00:17:56à une montée de l'islam politique.
00:17:59Dans le royaume shérifien, le parti islamiste de la justice et du développement,
00:18:04sous la carte de la religion, se présente comme une véritable alternative aux problèmes sociaux
00:18:09et ses régents chantent de l'approbité.
00:18:13Grâce à ses promesses, il fait une véritable percée lors de ses élections
00:18:17et se classe au troisième rang des partis politiques marocains.
00:18:22Les classes populaires cherchaient ceux qui allaient défendre le côté religieux,
00:18:27c'est-à-dire le référentiel islamique,
00:18:30et qui défendraient aussi leurs intérêts et leurs conditions de vie.
00:18:34Elles cherchaient des gens honnêtes.
00:18:44Mais cette ascension du parti de la justice et du développement
00:18:47n'empêche pas la monarchie d'être frappée par l'intégrisme religieux.
00:18:51Le 16 mai 2003, un groupe de kamikazes sème la terreur à Casablanca.
00:18:56Les cinq explosions se sont produites de façon simultanée dans Casablanca
00:19:00vers 22 heures hors locale.
00:19:02Voici ce qu'il reste de la réception de l'hôtel Safir, en plein centre de la ville.
00:19:10C'était un choc par l'ampleur des dégâts.
00:19:13Une quarantaine de morts, des attentats dans cinq endroits différents.
00:19:17Treize kamikazes, c'est pour la première fois au Maroc.
00:19:20On pensait que ça arrivait que chez les autres.
00:19:22C'était à l'époque qu'on parlait de la spécificité marocaine,
00:19:26une sorte d'exception marocaine sur ces questions de la religion,
00:19:29qu'on est dans un islam modéré, tolérant, etc.
00:19:33Et finalement, on a découvert que c'était des jeunes Marocains.
00:19:36C'était des laissés-pour-compte.
00:19:38Ils ont été endoctrinés.
00:19:40En fin de compte, le terrorisme, c'est la combinaison de plusieurs facteurs.
00:19:43L'élément social et économique n'est qu'un élément.
00:19:47Bien sûr, il y a le discours, l'élément, etc., et le contexte.
00:19:50Mais ils ont été travaillés par un discours.
00:19:53Et finalement, le discours peut tuer, peut mener à la mort.
00:19:57L'une des raisons principales pour laquelle le Maroc est un pays
00:20:00qui est un pays qui est un pays qui est un pays qui est un pays qui est un pays
00:20:04L'une des raisons principales pour laquelle le Maroc est devenu une cible,
00:20:07c'est l'engagement du pays aux côtés de l'Occident
00:20:10dans la lutte contre le terrorisme.
00:20:13Depuis les attentats du 11 septembre 2001,
00:20:16Mohamed Hiss a une ambition,
00:20:18faire de son pays le rempart contre l'islamisme radical au Maghreb.
00:20:23Dans son dernier message audio,
00:20:25Oussama Ben Laden, menaçant les intérêts américains et occidentaux dans le monde arabe,
00:20:29qualifiait le Maroc de pays apostas,
00:20:31autrement dit de pays non islamiques,
00:20:33parce que jugé trop tolérant.
00:20:39Depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis,
00:20:42le royaume du Maroc a adhéré inconditionnellement à la coopération internationale.
00:20:52Le Maroc coordonne et fournit à ses alliés,
00:20:55comme les Etats-Unis,
00:20:57les pays européens,
00:20:59les pays arabes
00:21:01et les pays africains,
00:21:03toutes les informations et les données
00:21:05qui permettent de combattre le terrorisme.
00:21:12Le roi réagit avec fermeté
00:21:14dans un discours adressé à la nation
00:21:16et se montre implacable envers cette idéologie destructrice
00:21:20qui menace sa population et son pays.
00:21:32Après les attentats de 2003,
00:21:34il y a eu un discours royal assez violent
00:21:36dans lequel il a annoncé la fin de la récréation,
00:21:39entre guillemets,
00:21:41le retour de l'État,
00:21:43si vous voulez.
00:21:45Et ce discours a été suivi
00:21:47par une série d'arrestations
00:21:49qui n'ont jamais été vécues auparavant.
00:21:52La récréation,
00:21:54c'est le retour de l'État,
00:21:56c'est le retour de l'État,
00:21:58ça n'a jamais été vécu auparavant.
00:22:02En ce qui concerne les arrestations
00:22:04après les attentats sanglants de Casablanca,
00:22:07tout a été fait dans un cadre légal.
00:22:09Ces personnes étaient impliquées
00:22:11et faisaient bien partie de cellules terroristes
00:22:13que nous avons démantelées.
00:22:17Selon les chiffres qui avaient circulé à l'époque,
00:22:19mais rien d'officiel,
00:22:21c'était entre 3 000 et 10 000 personnes arrêtées.
00:22:28Beaucoup n'avaient rien fait,
00:22:30n'avaient aucun lien avec ces attentats.
00:22:32Donc il n'y avait pas simplement un objectif
00:22:34d'affaiblir l'islamisme,
00:22:36il y avait aussi un autre objectif politique,
00:22:38c'est-à-dire rétablir l'autorité de l'État.
00:22:43Le roi se retrouve alors en position de force
00:22:46pour faire passer des lois qui lui tiennent d'accord.
00:22:49Il choisit en premier lieu
00:22:51de réformer le code de la famille.
00:22:54Mais malgré cette situation favorable,
00:22:56sa volonté se heurte à des forces multiséculaires.
00:23:00Les conservateurs, au sein de la société marocaine,
00:23:02étaient hostiles à tout changement
00:23:04qui va toucher la Moudawana,
00:23:06c'est-à-dire le code,
00:23:08la loi qui régit le mariage, la succession,
00:23:10le divorce, etc.,
00:23:12tout ce qui est statut personnel.
00:23:15Parce que vous avez beau être le descendant
00:23:17d'une dynastie vieille de plusieurs siècles,
00:23:20et vous avez beau être le commandeur des croyants,
00:23:22il n'est pas facile
00:23:24de toucher
00:23:26à tout ce qui se rapproche de la religion,
00:23:28et pour une raison qui est quand même simple.
00:23:30La difficulté de l'islam, c'est que
00:23:32le miracle produit par le prophète
00:23:34est un livre.
00:23:36Et le livre du Coran
00:23:38est écrit, et on ne touche pas
00:23:40à ce qui est écrit.
00:23:42Et donc, tout roi qu'il était,
00:23:44il était quand même prisonnier
00:23:46de la position
00:23:48d'une majorité du peuple marocain.
00:23:52Donc, il fallait attendre
00:23:54une opportunité politique,
00:23:56il fallait attendre une fenêtre de tir.
00:23:58Et cette fenêtre de tir
00:24:00a été les conséquences et les effets
00:24:02des attentats de Casablanca.
00:24:04Ces attentats ont pour effet
00:24:06d'affaiblir
00:24:08le parti islamiste,
00:24:10le parti de la justice et du développement,
00:24:12le PGD. Pourquoi a-t-il été affaibli ?
00:24:14Parce qu'il a été accusé d'avoir préparé
00:24:16le lit idéologique du terrorisme, du fanatisme, etc.
00:24:18Donc le PGD a fait profil bas
00:24:20pendant cette période.
00:24:22Et c'est cette période-là qui a permis
00:24:24d'ouvrir une brèche
00:24:26pour pouvoir mener cette réforme.
00:24:30L'audience est solennelle
00:24:32et le discours spectaculaire.
00:24:34C'était hier soir devant le Parlement marocain.
00:24:36Le roi Mohamed VI
00:24:38pose une question
00:24:40à ses députés.
00:24:50C'est ce qu'on a fait.
00:24:52C'est ce qu'on a fait.
00:24:56Ça reprenait en grande partie
00:24:58nos revendications
00:25:00et nos propositions.
00:25:02C'est une vague d'espoir extraordinaire
00:25:04qui faisait que
00:25:06dans la réforme,
00:25:08on plaçait l'âge du mariage à 18 ans,
00:25:10le divorce devenait judiciaire.
00:25:12Moi, j'ai pleuré.
00:25:14J'ai même envie de pleurer
00:25:16maintenant quand je vous le dis.
00:25:18C'est comme dans un rêve.
00:25:20On n'y croit pas.
00:25:22On se dit que ce n'est pas possible.
00:25:24C'est arrivé enfin.
00:25:28En février 2004,
00:25:30la loi sur la réforme de la famille
00:25:32est votée au Parlement.
00:25:34Un moment historique pour les Marocaines.
00:25:38Jusqu'alors, la femme était considérée
00:25:40comme une subalterne de l'homme
00:25:42au niveau du foyer.
00:25:44Cela est très important
00:25:46parce que le foyer, la sphère familiale,
00:25:48est où il y a le plus grand nombre
00:25:50d'inégalités.
00:25:52Le fait que ce texte considère
00:25:54que la femme est
00:25:56le co-responsable du foyer,
00:25:58ouvre la porte
00:26:00à beaucoup d'acquis.
00:26:02On n'arrêtait pas de nous dire
00:26:04que ça ne changera jamais,
00:26:06que le code de la famille, c'est sacré,
00:26:08que c'est basé sur la religion
00:26:10et qu'il n'y aura pas ces changements.
00:26:12Nous les avons eus, ces changements.
00:26:16C'est l'institution qui nous protège.
00:26:18Les femmes au Maroc considèrent
00:26:20que leur roi est leur allié
00:26:22pour la conquête de leur droit.
00:26:36Ce qui restera également
00:26:38une des grandes avancées du règne
00:26:40de Mohamed VI,
00:26:42c'est l'instance appelée
00:26:44l'Invasion, créée en 2004,
00:26:46et destinée à panser les plaies
00:26:48du régime répressif de son père.
00:26:52C'était une façon extrêmement
00:26:54intelligente, sage,
00:26:56de toucher un tabou.
00:26:58C'est que mon père,
00:27:00en tant que roi,
00:27:02a fait arrêter,
00:27:04a fait torturer et a emprisonné
00:27:06des dizaines,
00:27:08des centaines,
00:27:10des milliers d'opposants.
00:27:12Et moi, en tant que son fils,
00:27:14j'ai besoin
00:27:16de
00:27:18réconcilier le Maroc
00:27:20avec ce passé qui doit arrêter
00:27:22d'être tabou.
00:27:24Il faut crever l'abcès.
00:27:28Au début des années 1970,
00:27:30en réponse à deux tentatives de coups
00:27:32d'État militaire, lors desquelles
00:27:34Hassan II a failli perdre la vie,
00:27:36le Maroc plonge dans ce que l'on appelle
00:27:38les années de plomb.
00:27:40La répression d'une violence sans précédent
00:27:42s'abat sur les opposants politiques
00:27:44et les activistes démocrates.
00:27:48On parle des années de plomb,
00:27:50on parle des années noires.
00:27:52On était au summum
00:27:54de la répression
00:27:56systématique.
00:27:58Hassan II ne faisait pas
00:28:00la dentelle à ce moment-là.
00:28:04J'ai été retenu
00:28:06dans ce qu'on appelle les centres de disparition.
00:28:08Vous n'êtes pas dans une prison officielle.
00:28:10Vous êtes dans une prison,
00:28:12dans un lieu. Personne ne sait
00:28:14que vous êtes dans ce lieu.
00:28:16Vous n'avez ni contact familial,
00:28:18ni contact avec des avocats,
00:28:20ni charge retenue
00:28:22contre vous, ni procès,
00:28:24ni absolument
00:28:26rien.
00:28:28Et là, quand on était pris
00:28:30en train d'essayer de communiquer
00:28:32entre nous, on payait le prix cher.
00:28:34C'était de la torture
00:28:36énorme.
00:28:38Mais enlever comme ça des gens, en dehors de la loi,
00:28:40les amener dans un centre
00:28:42comme ces centres de disparus,
00:28:44et puis les torturer,
00:28:46c'est quelque chose
00:28:48d'absolument...
00:28:50Et je pense que ça a pesé dans ma vie.
00:28:54Pour les victimes d'Hassan II,
00:28:56cette instance équité et réconciliation
00:28:58est non seulement le symbole
00:29:00d'une reconnaissance de leur statut,
00:29:02mais aussi la possibilité
00:29:04d'obtenir une indemnisation,
00:29:06de libérer la parole, et surtout
00:29:08de raconter au peuple marocain
00:29:10les souffrances passées pour ne jamais oublier.
00:29:34C'est un moment essentiel,
00:29:36c'est-à-dire que toute une nation
00:29:38se met à l'écoute des victimes
00:29:40pour partager nos douleurs,
00:29:42et aussi c'est un moment
00:29:44d'éducation extraordinaire.
00:29:46Et c'est ça aussi ce qu'on a réussi.
00:29:50C'est inimaginable,
00:29:52un roi qui arrive au pouvoir
00:29:54et qui répare
00:29:56les erreurs de son père,
00:29:58qui fait, corrige les choses
00:30:00et qui veut que ce peuple
00:30:02aille de l'avant.
00:30:08Un pays ne peut se moderniser
00:30:10sans une presse capable d'analyser
00:30:12ses forces et ses failles
00:30:14et d'évaluer l'action politique.
00:30:16Parmi les choses qui ont marqué
00:30:18le début de Rennes, c'est l'apparition
00:30:20de ce qu'on appelait la presse indépendante,
00:30:22c'est-à-dire indépendante par rapport au pouvoir,
00:30:24par rapport à l'État.
00:30:26C'est aussi une presse
00:30:28assez audacieuse
00:30:30sur les questions de société.
00:30:32La défense des libertés individuelles,
00:30:34la défense par exemple des minorités,
00:30:36que ce soit des minorités sexuelles,
00:30:38la défense des droits de la femme, etc.
00:30:40Donc c'était des tabous qui ont été cassés
00:30:42par cette presse-là.
00:30:44Je pense que ces premières années
00:30:46étaient, pouvaient,
00:30:48pouvaient raisonnablement
00:30:50annoncer
00:30:52une évolution,
00:30:54une certaine libéralisation du régime,
00:30:56une évolution positive,
00:30:58des progrès sur le terrain
00:31:00de la construction de l'État de droit.
00:31:02J'étais responsable
00:31:04de la rubrique politique, et donc on commençait
00:31:06à parler de cette confusion
00:31:08entre l'argent et le pouvoir,
00:31:10les affaires,
00:31:12l'intérêt que le roi
00:31:14porte pour les affaires,
00:31:16la finance, etc.
00:31:18C'était quelque chose de complètement inédit
00:31:20pour les Marocains.
00:31:22Des articles, des enquêtes sur le roi,
00:31:24sur la famille du roi,
00:31:26sur la fortune du roi.
00:31:30Le premier dossier très sensible
00:31:32que le journal a abordé,
00:31:34c'était
00:31:36la hallowisation de l'économie marocaine.
00:31:38C'est-à-dire, non seulement
00:31:40les entreprises du roi,
00:31:42mais le fait que la fortune royale
00:31:44était très liée
00:31:46à l'économie
00:31:48marocaine.
00:31:50C'était explicitement
00:31:52faire un lien direct entre
00:31:54le politique, c'est-à-dire la famille,
00:31:56la dynastie, et l'argent.
00:32:00Le roi et l'argent,
00:32:02l'institution monarchique et l'argent,
00:32:04la famille royale et l'argent.
00:32:06Au fil des ans, la fortune du roi
00:32:08s'étale dans les journaux économiques américains.
00:32:12En 2008, le magazine Forbes
00:32:14l'estime à 2,5 milliards de dollars.
00:32:18Une fortune multipliée par cinq
00:32:20en l'espace de dix ans,
00:32:22elle fait le tour du monde.
00:32:26On voyait très bien
00:32:28les connexions entre
00:32:30l'enrichissement royal
00:32:32et le fait que ceux qui gèrent
00:32:34la fortune royale sont en même temps
00:32:36ceux qui gèrent
00:32:38les établissements publics, financiers,
00:32:40économiques, administratifs du Maroc.
00:32:42Et que, donc,
00:32:44les banques du roi
00:32:46prospéraient au détriment des banques publiques.
00:32:48Que
00:32:50La fortune du roi était présente là où il y avait des avantages publics, des subventions publiques.
00:32:58Non seulement le pouvoir s'enrichit, mais aussi en enrichissant une clientèle politique,
00:33:05il se constitue une base qui devient un soutien du pouvoir politique,
00:33:14et qui donc renforce le pouvoir politique.
00:33:16La logique c'est celle-là, elle est autant politique qu'économique.
00:33:24Dans la rue, à l'instar des pays voisins, le peuple se soulève contre l'accaparement des richesses par une minorité.
00:33:31Le printemps arabe qui a réveillé le monde en décembre 2010 n'épargne pas le Maroc.
00:33:37En février 2011, aux quatre coins du pays, la jeunesse arpente les rues,
00:33:42scandant sa colère contre la corruption qui gangrène le royaume.
00:33:47Évidemment, le printemps arabe a pris tout le monde de cours. Personne n'avait prévu ça.
00:33:53Le fait que ces régimes, surtout du Maghreb, allaient tomber comme des châteaux de cartes, c'était inimaginable.
00:34:03Les spécialistes du monde arabe évoquent une probable onde de choc.
00:34:06Après la Tunisie et l'Egypte, d'autres pays pourraient être touchés.
00:34:10Le dénominateur commun, une jeunesse avide de liberté face à un régime imposé, quelquefois depuis plus de 30 ans.
00:34:17C'est la première fois dans l'histoire du Maroc, où les Marocains, des milliers de Marocains,
00:34:21pas seulement à Kazaéraba, mais dans plusieurs villes, Marrakech, Tangier, etc.,
00:34:25ne sont pas sortis pour réclamer des augmentations de salaires, ou bien des revendications matérielles, ou bien du pain.
00:34:31Non, ils sont sortis pour revendiquer des droits et des libertés. C'est la première fois.
00:34:41Évidemment, c'était un coup de tonnerre.
00:34:43La population, qu'est-ce qu'elle revendiquait ? Elle revendiquait tout simplement démocratie,
00:34:47démocratie, la fin de la corruption, la fin, la fin des conflits d'intérêts, des conflits d'intérêts,
00:34:53le mélange entre la politique et les affaires.
00:34:56La grande corruption qui nous a toujours fait mal jusqu'à présent, c'est la corruption dans le monde politique,
00:35:02la corruption dans les marchés publics.
00:35:05Le coût de la corruption en Maroc, c'est presque le coût de ce que va nécessiter chaque année
00:35:13l'accès des Marocains à la couverture sociale généralisée.
00:35:16Donc, c'est dire à quel point c'est un fléau.
00:35:19Cette corruption endémique représenterait, selon le FMI et Transparency International,
00:35:24principale organisation de lutte contre la corruption, à minima, 2,5 milliards de dollars par an.
00:35:30La demande n'était pas l'abolition de la monarchie, elle était de mettre un terme à ces pouvoirs absolutistes.
00:35:38L'absolutisme, c'est un terme politique qui signifie la concentration du pouvoir,
00:35:44de plusieurs pouvoirs, entre les mains d'une seule personne. C'est ça, c'est le pouvoir absolu.
00:35:49L'objectif n'était pas de s'attaquer au roi.
00:35:53Il y avait des revendications contre des conseillers de sa majesté,
00:36:01contre des membres du gouvernement, contre des hommes d'affaires connus, célèbres,
00:36:07contre certaines personnes qui s'étaient enrichies.
00:36:09C'est ces personnes-là qui s'étaient accaparées de ressources naturelles,
00:36:13qui avaient une position dominante dans une industrie ou une autre, etc., grâce à l'entre-gens.
00:36:19Donc si vous voulez, la population rejetait ce genre de pratiques.
00:36:24Ce qui est simple.
00:36:30Lorsqu'on voyait les effigies avec une pieuvre au centre et l'ensemble des conseillers du roi
00:36:36et des généraux sécuritaires et de certains de ses copains très grands bourgeois autour,
00:36:43on savait ce que ça voulait dire.
00:36:46L'accaparement de l'autorité et de la fortune,
00:36:50le mariage incestueux entre le pouvoir et la richesse.
00:36:54Il est temps d'arrêter, il est temps de devenir un pays normal, de devenir un peuple normal.
00:37:04À mon avis, si vous êtes dirigeant de quelque pays que ce soit,
00:37:08vous avez des gens qui sont dans la rue,
00:37:11plutôt qu'ils rentrent chez eux, le mieux sera.
00:37:13Donc vous avez un impératif temps qui est évident.
00:37:17Un roi joue sa tête. C'est juste sa tête.
00:37:19On a eu des rois qui étaient dégommés, tout simplement.
00:37:22Dans l'histoire du pays, comme dans l'histoire d'autres monarchies,
00:37:25un roi ne joue pas un petit jeu d'élection.
00:37:30Au palais, Mohamed VI sait qu'il doit canaliser la colère de son peuple
00:37:34et prend la parole le 9 mars 2011 dans un discours adressé à la nation.
00:37:39Le pouvoir est plutôt lucide et intelligent.
00:37:42Le roi prend acte de l'ampleur de la contestation,
00:37:46de l'ampleur des problèmes étatiques,
00:37:49de la colère des autres monarquies,
00:37:52de la colère des autres politiques,
00:37:55de la colère des autres politiques,
00:37:58de la colère des autres politiques,
00:38:01de la colère des autres politiques,
00:38:04de l'ampleur de la contestation, de l'ampleur des problèmes, etc.
00:38:09Il promet un changement de la Constitution.
00:38:12Cette concentration extrême des pouvoirs entre les mains de la monarchie
00:38:17faisait partie des griefs de la jeunesse du 20 février
00:38:22qui réclamaient une véritable séparation des pouvoirs.
00:38:26Donc tout ça est promis par le roi
00:38:30dans le cadre d'un discours qui était historique.
00:38:34Il a tenu des promesses très importantes, révolutionnaires,
00:38:38c'est-à-dire qu'il a présenté les bases de manière explicite
00:38:42que la monarchie marocaine est une monarchie sociale,
00:38:45parlementaire, démocratique, etc.
00:38:48Un roi qui règne mais ne gouverne pas,
00:38:51un gouvernement responsable, il a dit,
00:38:54qui rend compte de son action.
00:38:57Le pouvoir dit, je vous ai compris,
00:39:00je vais faire les réformes fondamentales, nécessaires.
00:39:08Cinq mois après les manifestations populaires,
00:39:11le roi met au vote la nouvelle Constitution marocaine,
00:39:14soutenue par un appui massif de la population.
00:39:17Cette Constitution résolument plus moderniste que la précédente
00:39:21ouvre un spectre plus large sur les questions sociétales et politiques.
00:39:27La Constitution, dès son préambule,
00:39:30s'ouvre sur l'égalité hommes-femmes dans tous les droits,
00:39:33sur la lutte contre les discriminations,
00:39:36toutes sortes de discriminations sur la race, la religion, le sexe aussi.
00:39:44Il y a la monarchie, mais il y a la souveraineté populaire.
00:39:47Le roi nomme, comme chef de gouvernement,
00:39:50un leader ou un membre du parti politique qui arrive en tête.
00:39:53Ça pose le principe de façon irrévocable
00:39:56que le roi est contraint par le vote.
00:40:05Depuis plus de 30 ans, à l'image de ses voisins,
00:40:08le Maroc voit monter l'islam politique au cœur de la société.
00:40:12Une idéologie représentée dans le royaume
00:40:15par le parti de la justice et du développement, le PJD,
00:40:18qui s'engage en force fin novembre 2011
00:40:21lors des premières élections législatives
00:40:23organisées après l'adoption de la nouvelle Constitution.
00:40:28Ce n'est absolument pas une surprise
00:40:30que le courant de l'islam politique gagne les élections.
00:40:34Il y a un autre scénario qui a été fait dans d'autres pays.
00:40:37En Tunisie, avec Ben Ali, en Algérie avec les généraux,
00:40:40en Égypte, on a refusé la victoire de l'islam politique.
00:40:44Ça a donné des guerres civiles et des violations graves des droits de l'homme.
00:40:48Dans ce pays, on a nommé un chef du gouvernement.
00:40:52Qu'on soit content ou pas content, ce n'est pas nous.
00:40:55Mais fondamentalement, c'était le respect du choix démocratique du Maroc.
00:40:59Et donc, le PJD, il incarnait quelque chose de nouveau pour beaucoup de gens.
00:41:04Il y avait tout d'abord ce sentiment et cette présomption de probité qui existait,
00:41:09qui entourait le parti islamiste,
00:41:12de dire « ces gens-là, on ne les a jamais essayés,
00:41:15probablement ils ne sont pas corrompus,
00:41:17on a dit aux citoyens, votre vote est un acte de confiance,
00:41:23nous ferons de notre mieux pour réaliser vos ambitions
00:41:27au niveau de l'emploi, de la lutte contre la pauvreté
00:41:31et avec une répartition équitable des richesses.
00:41:35Nous voulons l'instauration de la démocratie,
00:41:38la liberté et la dignité,
00:41:41combattre le despotisme et la corruption.
00:41:46Un des slogans du PJD, c'était « la réforme dans le cadre de la stabilité ».
00:41:52C'était clair dès le début.
00:41:54On voulait des réformes, mais aussi que la monarchie perdure.
00:42:02Ils ont suscité énormément d'espoir, surtout parmi les jeunes.
00:42:07Il ne faut pas oublier que ceux qui ont voté pour les islamistes,
00:42:12ce ne sont pas des profils avec Turbon et Djellaba,
00:42:16non, des cadres laïcs, des ingénieurs, des hommes d'affaires.
00:42:22En finalement réussissant à attirer à eux
00:42:26beaucoup de personnes qui avaient absolument besoin
00:42:30de croire au changement, dont moi, qui ai voté pour eux,
00:42:34alors que je suis situé plus à gauche dans mes convictions politiques.
00:42:39À ce moment-là, il y avait un vrai besoin de croire en la possibilité d'un changement.
00:42:44N'importe quoi, sauf le passé.
00:42:55Loin des discours du PJD,
00:42:57le roi poursuit les grands chantiers destinés à rénover l'infrastructure marocaine
00:43:01qu'il a initiée dès le début de son règne.
00:43:04Le GEMED, le plus grand port d'Afrique, les autoroutes, les aéroports,
00:43:09ou encore la politique d'essor des énergies renouvelables uniques dans le monde arabe.
00:43:18Dans ces 20 dernières années, les avancées sont nombreuses.
00:43:22L'électrification rurale, l'accès à l'eau potable,
00:43:26tout ça, c'est des choses indubitables.
00:43:32Depuis l'accession au trône de Mohamed VI,
00:43:35priorité a été donnée au développement des nouvelles technologies de la communication
00:43:39sur tout le territoire.
00:43:42Le pays est également devenu une destination courue
00:43:45qui accueille chaque année près de 10 millions de touristes.
00:43:51Sur ces 20 dernières années, le Maroc a énormément investi dans les infrastructures.
00:43:55En 2006, on avait à peu plus de 600 kilomètres d'autoroutes.
00:43:59Aujourd'hui, nous avons plus de 1800 kilomètres d'autoroutes.
00:44:02Nous avons construit le TGV.
00:44:05On avait 5 ou 6 ports, on en a 40.
00:44:08Des aéroports.
00:44:10Évidemment qu'a priori, qui ne serait pas content,
00:44:14qui ne se féliciterait d'être dans un pays où aujourd'hui,
00:44:18un touriste qui atterrit au Maroc dans un aéroport flambant neuf,
00:44:22des bâtiments magnifiques, qui prend l'autoroute,
00:44:26qui va aller dans des centres-villes qui sont très bien entretenus,
00:44:30des grandes avenues, des corniches magnifiques.
00:44:33Ça, c'est la devanture. C'est la vitrine.
00:44:37Maintenant, les infrastructures, c'est bien,
00:44:41mais quand on regarde l'impact de l'investissement en infrastructures
00:44:45sur la croissance du PIB, comparé à d'autres pays,
00:44:49cet impact-là est faible.
00:44:51On ne génère pas assez de croissance par de l'investissement en infrastructures.
00:44:55Et donc, il faut maintenant investir dans l'humain.
00:44:59Il faut investir dans l'éducation. Il faut investir dans l'innovation.
00:45:03Il faut investir dans la culture.
00:45:08Honnêtement, est-ce qu'on peut se permettre de donner la priorité
00:45:12au TGV ou à l'autoroute ou à la station balnéaire de luxe
00:45:17et laisser la population, notamment la population en milieu rural,
00:45:21croquer encore des moyens de satisfaire ses besoins les plus élémentaires ?
00:45:25Il est là, le problème. C'est d'abord un problème de pertinence des choix.
00:45:31À trop vouloir mettre en exact ses réussites économiques,
00:45:34Mohamed VI en aurait-il oublié le peuple ?
00:45:37Dans la société, la jeunesse crie son ras-le-bol du chômage
00:45:40qui touche 30 % des 15-24 ans et de la précarisation qui l'étouffe.
00:45:52Le message que les supporteurs ont essayé d'envoyer
00:45:56est un message extrêmement puissant.
00:45:59À nous tous, plusieurs dizaines de milliers dans un stade,
00:46:03nous ne sommes pas emprisonnables tous. C'est impossible.
00:46:07Nous formons un bloc.
00:46:09Il y a une prise de conscience que,
00:46:12si on ne fait rien, on n'est pas en prison.
00:46:17Nous formons un bloc.
00:46:19Il y a une prise de conscience que l'unité protège.
00:46:40Ce type de contestation dans les stades
00:46:42est le reflet de l'absence de projection dans l'avenir.
00:46:45C'est très important.
00:46:47Cette absence de projection que je rencontre chez beaucoup de jeunes,
00:46:50ils me disent, mais on ne sait pas de quoi est fait notre avenir.
00:46:53Sinon, émigrer, sinon...
00:46:57Cette absence de la projection
00:47:02est un constat d'échec de toute une politique.
00:47:05Et ces jeunes-là, ils expriment ces disparités
00:47:08entre d'autres jeunes où tout est tracé dès la naissance.
00:47:12Le papa a tout préparé jusqu'à ce qu'il ait son travail, sa maison.
00:47:17Tout est tracé comme une autoroute.
00:47:19Il est absolument impossible
00:47:23de faire taire la colère populaire.
00:47:26Elle est comme l'eau.
00:47:28Vous l'enfermez d'un côté, elle s'enfuit d'un autre.
00:47:30Il n'est pas possible de fermer les stades,
00:47:33de couper tous les réseaux sociaux,
00:47:36d'emprisonner tous les manifestants.
00:47:38C'est impossible.
00:47:39La seule façon d'y mettre un terme,
00:47:42c'est de répondre aux aspirations de ceux qui expriment cette colère.
00:47:45Il n'y en a aucune autre.
00:47:49Et le PJD l'a bien compris.
00:47:51En surfant sur la vague du mécontentement général,
00:47:54il reste en effet le premier parti politique du Maroc
00:47:57à la faveur des élections du 7 octobre 2016.
00:48:01Pour la société civile réformatrice,
00:48:03cette deuxième victoire du parti islamiste
00:48:06est un coup d'arrêt à tout avancer sur les questions sociétales.
00:48:09Un coup dur pour la Constitution de 2011
00:48:12qui prenait une évolution moderne.
00:48:17Là, on tombe dans un gros paradoxe
00:48:19parce qu'on a une Constitution qui prône l'égalité,
00:48:23homme-femme,
00:48:24et pour la mettre en œuvre,
00:48:26on a un gouvernement conservateur.
00:48:29Il ne se passe rien,
00:48:30enfin, il se passe très peu.
00:48:32C'est toujours emprunt d'idéologies,
00:48:34ce qui fait qu'il y a beaucoup de retard
00:48:36donc l'élaboration des projets de loi,
00:48:38le vote des projets de loi, etc.
00:48:43Il y a eu des élections
00:48:44et le peuple a élu un parti conservateur
00:48:49qui n'est pas pour la liberté de conscience,
00:48:50qui n'est pas pour la liberté de culte,
00:48:52qui n'est pas pour l'égalité des femmes et des hommes,
00:48:54qui n'est pas pour la liberté de corps,
00:48:56qui n'est pas pour l'avortement.
00:49:01Mais comme souvent au royaume du Maroc,
00:49:03où l'absolutisme règne en maître,
00:49:05la vie n'est pas aussi simple
00:49:06que celle d'une démocratie parlementaire.
00:49:09Si la Constitution est incline
00:49:11à moderniser la loi de la cité,
00:49:13elle n'a jamais ôté le pouvoir absolu au monarque.
00:49:16La Constitution,
00:49:17elle ne vous dit pas
00:49:18qu'une fois que vous gagnez les élections,
00:49:19vous allez exercer le pouvoir.
00:49:21Non, le rôle du gouvernement au Maroc,
00:49:24ce n'est pas d'appliquer un programme,
00:49:26même s'ils le disent,
00:49:27même s'ils l'annoncent.
00:49:29Le rôle du gouvernement tel qu'il est fixé
00:49:32par la Constitution,
00:49:33c'est d'exécuter les décisions
00:49:35qui sont prises par le palais.
00:49:37La vraie séparation des pouvoirs
00:49:38n'a pas eu lieu dans la Constitution de 2011.
00:49:42Et revendication majeure,
00:49:43c'était effectivement d'évoluer
00:49:45vers une monarchie parlementaire,
00:49:47qui est le seul, je dirais,
00:49:49le seul moyen aujourd'hui
00:49:52que l'intelligence humaine a trouvé
00:49:54pour essayer de concilier apparemment
00:49:56des choses qui ne sont pas conciliables,
00:49:58c'est-à-dire entre la monarchie
00:50:00qui, par essence, n'est pas démocratique
00:50:05et la démocratie.
00:50:08Celui qui détermine la politique générale de l'État,
00:50:10c'est le roi, c'est le roi lui-même.
00:50:12Et donc le gouvernement
00:50:14exécute les décisions du roi.
00:50:17Disons-le clairement,
00:50:18de par les textes de la Constitution,
00:50:21le roi garde l'essentiel des pouvoirs.
00:50:24Je suis pour la monarchie parlementaire,
00:50:26mais on n'est pas encore là.
00:50:28Certains ministères sont des ministères de régalia,
00:50:32c'est le roi qui décide.
00:50:34Heureusement, je le dis en totalité,
00:50:37parce que dans certains partis,
00:50:38il n'y a pas les compétences requises.
00:50:40Quand on ne trouve pas dans le vivier politique
00:50:43les femmes et les hommes compétents
00:50:46pour gouverner,
00:50:49il faut bien que quelqu'un les mette là,
00:50:51le roi les met.
00:50:52Alors, c'est une entorse à la démocratie,
00:50:55incontestablement.
00:51:06Le Maroc, de par l'autocratie royale
00:51:08et le règne des privilèges,
00:51:10reste un pays fragile,
00:51:12où la moindre étincelle ravive les tensions sociales.
00:51:16En octobre 2016,
00:51:18un fait divers dramatique dans la ville d'Aloceima,
00:51:20dans la région du Rif,
00:51:22met le feu aux poudres.
00:51:24Ces images ont choqué le Maroc.
00:51:27On y voit Moussine Fikri, marchand de poissons,
00:51:30grimper dans une baine à ordures.
00:51:32Il s'oppose à la destruction par la police
00:51:35de sa cargaison d'espadons,
00:51:37une marchandise illégale.
00:51:39Il est happé par le mécanisme
00:51:42et meurt broyé sous les yeux des passants.
00:51:45La scène a été filmée par un téléphone portable
00:51:48et diffusée sur les réseaux sociaux.
00:51:50C'est le choc, c'est la consternation,
00:51:52c'est la révolte, c'est le mouvement de contestation
00:51:54qui est né tout de suite,
00:51:56et ça a évolué en ce qu'on appelle Irak.
00:51:58Irak, ça veut dire en arabe mouvement.
00:52:00Les attentes, les espérances, les déceptions,
00:52:03les colères, tout a surgit
00:52:05et s'est exprimé par ce mouvement.
00:52:10Les gens qui sont descendus, généralement,
00:52:12étaient des gens qui étaient des citoyens,
00:52:14anonymes, très simples,
00:52:16qui sont descendus dans les rues.
00:52:18Les revendications étaient de plus de travail
00:52:20dans la ville, par exemple de construire
00:52:22un hôpital public
00:52:24pour que les gens ne se déplacent pas
00:52:26quand ils sont malades vers d'autres villes
00:52:28de la région, par exemple
00:52:30une université dans la région.
00:52:36La réaction du pouvoir a été extrêmement négative.
00:52:40La répression, l'emprisonnement,
00:52:42aujourd'hui encore, des jeunes
00:52:45dont le seul crime est d'avoir demandé
00:52:47des droits élémentaires
00:52:49sont encore, aujourd'hui encore,
00:52:51à commencer évidemment par leurs leaders,
00:52:54sont emprisonnés.
00:52:58Ils ne baissent pas les bras.
00:53:00Pour la sixième nuit consécutive,
00:53:02ces manifestants sont descendus dans les rues d'Aloceima.
00:53:04Ils disent protester contre la corruption,
00:53:06l'autoritarisme et le chômage
00:53:08et ils demandent notamment la libération
00:53:10d'une quarantaine de personnes
00:53:12dont Nasser Zefzafi, le leader du mouvement de protestation
00:53:14qui secoue la région du Rif dans le nord du Maroc
00:53:16depuis sept mois.
00:53:18Après la fin du processus répressif policier
00:53:20pour empêcher les manifestants de manifester,
00:53:22a commencé un processus judiciaire
00:53:25dont la sévérité était vraiment imprévisible.
00:53:28C'est inimaginable.
00:53:30Condamnés entre 15 ans et 20 ans de prison.
00:53:33Pourquoi ?
00:53:34Ils n'ont tué personne.
00:53:36Ils n'ont blessé personne.
00:53:38Beaucoup ont été agraciés par le roi,
00:53:40mais pas les leaders.
00:53:43Je ne suis pas d'accord avec ce qui se passe
00:53:45avec les prisonniers du Chirac.
00:53:47Malheureusement, je ne sais pas qui conseille le roi,
00:53:51qui prend des mesures antidémocratiques,
00:53:56des mesures, je dirais, répressives,
00:53:59des mesures injustes.
00:54:01Ça permettra aussi d'ouvrir une nouvelle page
00:54:04et de fermer cette page.
00:54:06Je pense qu'elle fait tant du mal
00:54:09aux Marocains, à l'image du Maroc.
00:54:12Le Maroc de Mohamed VI
00:54:14a fait des pas vers la démocratie
00:54:17impressionnant les dix premières années du règne du roi actuel.
00:54:21Depuis dix ans, au contraire,
00:54:24des fois, on fait marche arrière.
00:54:29C'est le cas pour la presse,
00:54:31dont la liberté de ton finit par déranger.
00:54:34Les journalistes se retrouvent dans le collimateur du palais.
00:54:37Les mesures de rétorsion laissent progressivement place
00:54:39à des arrestations, puis des condamnations.
00:54:42Il y a une difficulté des responsables
00:54:45à s'accoutumer à la liberté de la presse.
00:54:48C'est s'accoutumer à la critique,
00:54:51accepter la critique.
00:54:53Et c'est ça la démocratie, la démocratisation des sociétés.
00:54:56C'est accepter qu'il y ait des points de vue différents.
00:55:00On est encore dans des visions
00:55:03plus frisbées, si vous voulez.
00:55:06Il faut que le Maroc change
00:55:09au niveau des libertés publiques.
00:55:12Je le dis, je le demande avec beaucoup d'humilité,
00:55:15de respect, majesté.
00:55:17Libérez ces hommes.
00:55:21Tous ceux qui, à un moment ou un autre,
00:55:23peuvent exprimer une opinion,
00:55:26des positions qui ne plaisent pas,
00:55:28peuvent finalement se retrouver
00:55:30pris dans un engrenage judiciaire,
00:55:32et puis se retrouver en prison,
00:55:34puis se retrouver accusé des pires délits,
00:55:37de moeurs, de droits communs.
00:55:40On les accuse, par exemple,
00:55:42d'agressions sexuelles contre des femmes,
00:55:45ou bien de viols pour certains,
00:55:48de manière à ce qu'ils ne se présentent pas
00:55:51comme des victimes de leurs idées
00:55:54et de leurs opinions politiques.
00:55:57L'essentiel de l'objectif, c'est de terroriser
00:56:00les dizaines et centaines de milliers d'autres personnes
00:56:03qui pourraient prendre le ton critique face au régime.
00:56:07Et jusqu'à aujourd'hui,
00:56:09ils y sont assez largement parvenus.
00:56:11Je subis des pressions,
00:56:15des vexations, des menaces.
00:56:18Il y a eu des appels à des proches qui ont dit
00:56:20« Bon, maintenant qu'il habite à la campagne,
00:56:23un accident est vite survenu,
00:56:26une agression, une attaque. »
00:56:37En septembre 2021,
00:56:39le peuple, toujours étreint par les difficultés économiques,
00:56:42est à nouveau appelé aux urnes.
00:56:45A la stupéfaction générale,
00:56:47le PJD, première force politique du pays,
00:56:50est laminé.
00:56:52Un fiasco auquel personne ne s'attendait.
00:56:54En cinq ans, le parti islamiste est passé
00:56:57de 125 à 17 députés.
00:57:00Un parti qui construit toute sa stratégie électorale
00:57:04sur un slogan important, fort,
00:57:08très sensible,
00:57:10à savoir la lutte contre la corruption sous toutes ses formes,
00:57:13et que dix ans plus tard, en 2021,
00:57:17ils répètent la même chose.
00:57:19C'est-à-dire, nous allons lutter contre la corruption.
00:57:22Alors le Marocain n'a pas besoin d'être un politologue
00:57:26pour dire « Mais qu'est-ce que vous faisiez pendant dix ans ? »
00:57:31L'inaction du Parti de la Justice et du Développement,
00:57:34au pouvoir pendant deux mandats,
00:57:36ne suffit pas seul à expliquer la catastrophe électorale.
00:57:40En réalité, la débâcle des islamistes
00:57:43trouve également sa source dans une décision politique historique.
00:57:47Dix mois plus tôt, le 22 décembre 2020,
00:57:51devant les caméras du monde entier,
00:57:53le Maroc, sous l'égide des États-Unis,
00:57:56signe un accord de normalisation des relations entre Israël
00:57:59et le royaume halawite.
00:58:01Une véritable trahison pour les électeurs marocains
00:58:04qui avaient porté au pouvoir le parti islamiste.
00:58:11Le chef du gouvernement islamiste
00:58:13a signé un document consacrant la normalisation
00:58:18que ce parti avait combattu avec la plus extrême vigueur jusqu'ici.
00:58:23En disant, jusqu'à la dernière minute,
00:58:26que la normalisation avec Israël est une ligne rouge
00:58:29que nous ne franchirons jamais.
00:58:34Bien sûr, ça a porté un coup dur au PJD et à ses partisans.
00:58:42Parce que le PJD faisait de la lutte
00:58:44contre toute forme de normalisation un principe.
00:58:49Il y a même des gens qui considèrent
00:58:51que la défense de la Palestine est l'un des piliers de l'islam.
00:59:01Aux yeux de la majorité des Marocains,
00:59:03la crédibilité des islamistes était absolument ruinée.
00:59:07Incompétents, incapables de gérer leurs ministères,
00:59:11incapables de tenir leurs promesses,
00:59:13désespérément insolents,
00:59:15incapables de tenir leurs promesses,
00:59:17désespérément accrochés au pouvoir,
00:59:19ou plutôt aux miettes du pouvoir,
00:59:21au prix même de sacrifier la totalité de leurs convictions.
00:59:26Bref, pas crédibles, pathétiques.
00:59:34Un naufrage électoral qui fait l'affaire du RNI et du PAM.
00:59:38Deux partis arrivés en tête des élections,
00:59:40réputés pour être des proches du palais.
00:59:43Il y a une sorte d'euphorie qui veut que l'important,
00:59:48c'est qu'on a tourné la page du PJD
00:59:51et que le reste, on verra bien.
00:59:54Mais le défi, lui, n'a pas changé.
00:59:56La population marocaine continue de croire
00:59:59qu'une majorité est exclue du festin
01:00:02et continue à rejeter très violemment
01:00:06cette situation d'exclusion.
01:00:08Désormais, le roi face à lui une opposition quasi inexistante.
01:00:13En l'absence d'un contre-pouvoir fort,
01:00:15il a toutes les cartes en main
01:00:17pour faire avancer les réformes réclamées par son peuple.
01:00:20Mohamed VI saura-t-il être au rendez-vous avec l'histoire ?

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