La Boite à Médailles avec Rémy Boullé

  • la semaine dernière
La Boite à Médailles avec Rémy Boullé, médaillé de bronze en canoë.

Category

🥇
Sports
Transcript
00:00Salut tout le monde, la boîte à médailles avec Rémi Boulay, médaillé de bronze sur
00:09200 mètres en para canoë catégorie KL1, il est avec nous.
00:12Ça va Rémi ?
00:13Ça va très bien et vous ?
00:14Ça va super, je suis très content de t'accueillir sur le plateau avec de nouveau, comme à Tokyo,
00:18une médaille de bronze pour toi.
00:19Je sais que tu visais en tant que grand compétiteur une plus belle médaille.
00:23Est-ce qu'il y a un petit goût d'amertume encore ? Ou tu arrives déjà à la digérer
00:27?
00:28Il y a forcément un petit goût d'amertume parce que je sais que l'argent est défaisable.
00:31En série, je mets 0,7 secondes au Brésilien.
00:35Après, il a eu la chance d'avoir le bon tirage, c'est-à-dire qu'il est tombé seul et moi
00:39j'ai, en série, je me suis retrouvé avec le numéro un mondial, le Hongrois, et comme
00:44il n'y a que le premier de la série qui va en finale directe, il a eu une course en
00:47moins par rapport à moi, donc forcément, faire enchaîner deux courses de 200 mètres
00:50en une heure, au niveau international, on ne le fait pas, il n'y a qu'au jeu que ça
00:53se passe comme ça.
00:54Donc ça a été dur et quand je sais que je perds à 0,5 dixième, je me dis, si je
00:59n'avais pas eu cette course en plus, je pense que j'aurais pu aller chercher l'argent.
01:02On peut quand même préciser, donc tu termines, comme tu l'as dit, derrière le Hongrois
01:05Peter Kiss et le Brésilien Luis Carlos Cardozo.
01:08Tu l'as dit, tu as déjà réussi, même après, alors que la course était ce matin,
01:12à déjà cibler les points qui t'avaient manqué, tu es assez lucide quand même, tout
01:15de suite tu arrives…
01:16Bien sûr, alors je fais un mauvais départ, le Brésilien, comme à Tokyo, il met une petite
01:21pointe, il met 30-40 centimètres, je les reviens bien.
01:24Je remonte, au 100 mètres, on est au mano-mano et puis après, moi, j'explose à 170 mètres
01:30et à 170 mètres, au 30 dernier mètre, c'est là où il va créer l'écart et il va créer
01:35ses 0,5 de différence.
01:37Maintenant, je sais que je l'ai déjà battu à Duisbourg en Allemagne où j'ai fait vice-champion
01:41du monde, ça fait déjà à trois reprises que je fais des meilleurs chrono que lui au
01:44niveau des séries.
01:45Donc maintenant, il va falloir encore travailler le mental pour que maintenant, quand on arrive
01:49en finale, on doit aller développer plus.
01:53Et maintenant, j'aurai ma revanche à Los Angeles, ça c'est une certitude.
01:56Mais justement, décris-moi un peu plus en détail ce qui se passe sur une finale paralympique,
02:00sur la ligne de départ, est-ce que tu penses à des choses en particulier, tu te parles
02:04à toi-même ?
02:05Bien sûr, je me parle à moi-même, alors j'ai un petit truc ciné, on va dire, dans
02:12Fast & Furious.
02:13Il y a un moment donné, dans Fast & Furious, tu sais quand il fait les 400 mètres, les
02:16départs arrêtés à 400 mètres avec Vin Diesel, Paul Walker, il dit « je vais gagner, je
02:21vais gagner, je vais gagner ».
02:22Et je me dis un peu la même chose, je rentre dans le sabot et je me dis « je vais gagner,
02:26je vais gagner, je vais gagner ».
02:27Et après, je pense surtout à ce que je dois mettre en place pour aller gagner, pour aller
02:31chercher la performance.
02:32Après, on est chez soi, j'étais à la maison, il y avait l'Italien, champion du
02:37monde en titre, champion d'Europe en titre, qui est revenu de blessure depuis un an.
02:41Donc il ne fallait vraiment pas se louper, lui sinon il allait tout de suite rentrer
02:45dans le creux de souris pour aller chercher la médaille.
02:47Et puis il y avait l'Iranien, l'Iranien qui était dans la catégorie au-dessus, qui
02:50était KL2, et cette année il est descendu en KL1.
02:52Donc il y avait vraiment deux adversaires conséquents, plus l'autre Hongrois, Subak,
02:56qui avait déjà été médaillé paralympique à Rio.
02:58Donc il ne fallait vraiment pas se louper, je n'avais pas le droit à l'erreur pour
03:02aller au moins chercher la médaille.
03:04– Cette médaille, elle est belle, elle te permet quand même certains privilèges,
03:07tu me le disais en off, notamment passer l'après-midi avec le président de la République, Emmanuel Macron.
03:12– Oui, oui, le président Emmanuel Macron, moi, c'est une personne que j'affectionne
03:16beaucoup.
03:18On est devenus amis, vraiment, et il m'a beaucoup aidé.
03:21Il m'a beaucoup aidé dans ma reconstruction, il est beaucoup présent avec les blessés militaires.
03:26Il fait beaucoup pour les blessés militaires.
03:28Il devait venir à ma finale, me voir, mais vous savez, avec le remaniement,
03:33il a un gouvernement à constituer avec le Premier ministre,
03:36il y a un petit peu de changement depuis deux jours.
03:38Donc forcément, il avait des obligations ce matin.
03:41Et donc on s'est dit, moi, on avait un deal ensemble, et comme c'est quelqu'un qui
03:46tient quand même à chaque fois qu'on a fait des promesses, moi envers lui et lui envers moi,
03:50on se les était tenus.
03:51Et donc, on a pu se rencontrer, on a pu se voir tout à l'heure,
03:55on a passé deux heures ensemble tout à l'heure, c'était vraiment très agréable.
03:59Et humainement, c'est vraiment une personne exceptionnelle.
04:01Donc après, je ne parle pas du politique, machin, mais moi, je vous parle de la personne humaine.
04:06C'est vraiment quelqu'un de très, très, très humain, et donc c'était vraiment génial, oui.
04:09– Justement, on peut rappeler quand même un peu ton parcours de vie aussi, Rémi.
04:13Tu es un ancien commando de l'armée de l'air.
04:154 septembre 2014, tu es devenu paraplégique suite à un accident de parachutisme
04:19au cours d'un entraînement.
04:20Quasiment dix ans, jour pour jour après, tu es de nouveau médaillé paralympique.
04:25C'est finalement une très belle revanche sur la vie,
04:28et puis voilà, un sacré chemin parcouru, j'ai envie de dire.
04:31– Oui, c'est vrai.
04:32Alors, à Tokyo, j'ai couru le 3 septembre 2021.
04:38– Ah ouais, donc quasiment…
04:38– Donc c'était, normalement, s'il n'y avait pas eu de Covid,
04:40j'aurais dû courir le 4 septembre 2020, donc c'était vraiment le jour J.
04:45Alors après, ma date du 4 septembre 2014, elle a apporté chance, apparemment, aux cyclistes.
04:52Ils ont fait énormément de médailles ce 4 septembre.
04:54– 11 médailles.
04:54– 11 médailles ce 4 septembre, donc, ils ont mon pote Mathieu, etc.
04:58Donc ça, voilà, ça leur a apporté chance, mon malheur, entre guillemets.
05:01Mais non, ouais, c'est jour pour jour, là.
05:03Il y a trois jours, j'ai fêté mes dix ans de fauteuil roulant.
05:08Maintenant, je ne sais pas si c'est une revanche sur la vie,
05:10parce que moi, comme je dis toujours, ma vie d'avant, il faut être honnête,
05:13je préférais ma vie d'avant.
05:14Aujourd'hui, je savoure ma vie actuelle en fauteuil roulant, je suis devant vous,
05:18on me fait la médaille, etc.
05:19Mais il faut voir tout d'un côté, quand on est valide, quand on est sur ses jambes.
05:23Moi, je préférerais retourner dans l'ombre,
05:25refaire des missions en Afghanistan ou autre, c'était mon métier, ça m'incarnait.
05:29Maintenant, le fait était que je suis devenu paraplégique pour mon pays.
05:34Et puis maintenant, on doit avancer.
05:36Moi, je me dis toujours, il y a toujours pire dans la vie.
05:38Et vous savez, aujourd'hui, il y a des enfants qui naissent avec un handicap,
05:42il y a des gens qui ont un cancer.
05:44Donc je me dis, on doit avancer, et on n'a qu'une vie de toute façon.
05:47Toi, comme moi, on n'a qu'une vie.
05:49Tu vas mourir comme moi, je vais mourir pareil.
05:51Donc en fait, profitons de la vie, éclatons-nous.
05:53Et puis voilà, maintenant, c'est sûr que j'essaye d'insuffler
05:57et de me dire, le 4 septembre 2014, j'aurais dû mourir, j'ai survécu.
06:01Et aujourd'hui, je suis là devant vous avec une médaille paralympique, c'est cool.
06:04Et puis un dernier mot, profitons aussi des personnes qu'on aime, j'ai envie de dire.
06:07Je voudrais juste revenir avec toi là-dessus,
06:08parce qu'on sait que ta famille est extrêmement importante pour toi,
06:11notamment ta petite-fille Chloé, et puis ta femme.
06:13Je suppose que tu les as vues après cette médaille,
06:15tu as dû voir aussi la fierté dans leurs yeux.
06:17Est-ce que tu peux me décrire ce moment, Rémi ?
06:19Carrément, à la petite histoire,
06:23j'ai rencontré ma compagne à l'hôpital, à Percy.
06:28Et il y avait mon médecin qui est venu me voir, etc.
06:30Et oui, ma famille compte, elle est là devant ma fille qui est venue et qui était ultra fière.
06:34Je ne l'ai jamais vu comme ça, en fait.
06:35Je ne l'ai jamais vu comme ça, aussi fière.
06:37Donc moi, ça m'a touché énormément.
06:39C'est la première course de kayak qu'elle voit,
06:40parce qu'elle n'était jamais venue en compétition.
06:42Et donc forcément, ça m'a touché.
06:44Et puis là, de voir aussi mon père et ma mère.
06:47Moi, j'ai mon père qui est touché d'Alzheimer.
06:49Donc voir mon père qui a fait 800 kilomètres pour venir me voir.
06:53Voilà, c'est un syndrome de Benson qui est très avancé.
06:56Il n'a plus du tout aucune autonomie.
06:57Et donc forcément, ça m'a touché de pouvoir être là avec mon père.
07:01Évidemment, je sens l'émotion dans tes yeux, dans ta voix.
07:02Mais tu peux être fier de cette magnifique médaille de bronze.
07:05Merci beaucoup Rémi de passer sur ta patte.
07:06Merci à vous, merci de m'avoir reçu.
07:07Merci à toi.
07:08A bientôt.
07:09Et puis nous, on se donne rendez-vous très vite pour une prochaine boîte à médailles.
07:11Salut à toutes et à tous et à bientôt sur Sport en France.

Recommandée