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"Quelle histoire ! Enquête sur la toile - La 'naine' de la cour d'Espagne" est un épisode d'une série documentaire diffusée sur ARTE qui se concentre sur l'analyse d'un personnage spécifique du célèbre tableau "Les Ménines" de Diego Velázquez. Voici les principaux points à retenir :

Le tableau "Les Ménines" a été peint par Diego Velázquez en 1656 et est conservé au Musée du Prado à Madrid

.
L'épisode se concentre sur la "naine" représentée dans le tableau, qui est en réalité Mari Bárbola, une femme atteinte de nanisme achondroplasique
.
Mari Bárbola était une "femme de plaisir" (hombre de placer) à la cour espagnole, faisant partie d'un groupe de personnes de petite taille et de bouffons qui divertissaient la famille royale
.
La présence de nains et de bouffons était courante dans les cours européennes de l'époque, en particulier à la cour des Habsbourg d'Espagne aux XVIe et XVIIe siècles
.
Velázquez a peint plusieurs portraits individuels de bouffons et de nains de la cour, dont Mari Bárbola et Nicolasito Pertusato, qui apparaissent tous deux dans "Les Ménines"
.
Le documentaire explore probablement le rôle et le statut de ces personnes à la cour espagnole, ainsi que la façon dont Velázquez les a représentées dans son art.
L'épisode fait partie d'une série plus large qui examine en détail différents aspects et personnages de tableaux célèbres, offrant ainsi une perspective historique et artistique approfondie

.

Cette analyse du personnage de Mari Bárbola dans "Les Ménines" permet de mieux comprendre les pratiques sociales de l'époque et la façon dont Velázquez a choisi de représenter tous les membres de la cour, y compris ceux qui étaient considérés comme marginaux ou différents.
Transcription
00:00Ce tableau monumental, intitulé Les Ménines, est conservé au Musée du Prado à Madrid.
00:11Peint en 1656 par Diego Velázquez, il illustre la famille royale espagnole.
00:18Parmi ces onze personnes représentées en taille réelle, l'artiste lui-même,
00:25le roi et la reine d'Espagne dans le reflet du miroir, des serviteurs du palais,
00:31et au centre, l'infante, âgée de cinq ans.
00:35Peint au même niveau qu'elle, qui est cet autre personnage, avec un visage d'adulte et une taille d'enfant ?
00:43Grâce à l'analyse de centaines d'archives sur Internet, nous avons retrouvé son identité
00:49et enquêté sur l'attrait de la royauté au XVIe et XVIIe siècles pour ce que l'on appelait les nains de cour.
01:06Sur le site du Prado, où le chef-d'œuvre est exposé, la notice indique qu'un historien de l'art, Antonio Palomino,
01:13est le premier à avoir identifié la plupart des personnages représentés.
01:20Dans son ouvrage, publié en 1724, soixante-dix ans après la réalisation du tableau,
01:27il révèle que derrière le chien couché se trouve Marie Barbola, une naine.
01:35Que fait Marie Barbola, cette femme atteinte de nainisme, dans l'entourage de la famille royale espagnole ?
01:43Dans le premier dictionnaire en langue espagnole, édité en 1611,
01:49la définition de nain indique qu'il s'agit d'un homme tout petit et ajoute
01:55« Le nain a beaucoup de monstruosité, parce que la nature a voulu en faire un jouet pour rire.
02:01Ses monstres sont heureux avec les princes, qui les éduquent par curiosité et pour se divertir. »
02:08Le physique des nains amuse donc les puissants, qui les considèrent comme des attractions.
02:17Cet usage remonte à l'Antiquité.
02:21Dans ce livre, écrit au premier siècle par Pline l'Ancien,
02:26nous découvrons qu'il distrait déjà la famille de l'empereur romain, Auguste.
02:32C'est au 16e et 17e siècle que l'engouement pour les personnes atteintes de nainisme
02:37est le plus fort dans les courroyales européennes.
02:42En ligne, nous retrouvons de nombreux portraits.
02:50Tous ces souverains posent la main sur la tête de leur serviteur,
02:54dont la petite taille fait ressortir leur grandeur et leur puissance.
02:59La présence de singes donne une connotation exotique à ces êtres miniatures.
03:08En Europe, à cette période, la famille royale espagnole de la dynastie des Habsbourg
03:13est celle dont l'attrait pour les personnes de petite taille est le plus visible.
03:18Comme ici, avec la fille du roi Philippe II, ou encore avec le roi Philippe IV.
03:25Sa famille est celle qui est représentée sur les ménines, où figure Marie Barbola.
03:33Dans les archives royales, le nom de Marie Barbola, surnommée aussi Maria Barbara,
03:39apparaît pour la première fois sur ce document en 1651, quand elle arrive à la cour d'Espagne.
03:46Nous y apprenons qu'elle devient la naine de la reine.
03:50Grâce à l'œuvre de Velasquez, nous savons qu'elle est aussi au service de sa fille, l'infante.
03:57Quelles sont ses conditions de vie à la cour ?
04:02Sur ses factures de tailleur de 1691, nous découvrons que huit robes lui sont destinées.
04:12Cette autre archive nous apprend qu'elle dispose même d'une servante.
04:21Marie Barbola jouit donc de certains privilèges.
04:25Un statut mis en valeur sur le tableau les ménines.
04:28Si Marie Barbola n'est pas peinte seule, elle figure au premier plan, au même niveau que l'infante.
04:35Aucun des traits irréguliers de son visage n'est accentué,
04:38et son regard franc semble indiquer une certaine assurance.
04:43Une représentation qui tranche avec cet autre tableau de Juan Bautista Martinez,
04:49où Marie Barbola est peinte cette fois à l'arrière-plan,
04:53avec un teint livide et une présence fantomatique.
04:59Cet artiste n'est pas le seul à cette époque à dévaloriser les nains de cour.
05:03En 1600, le caricaturiste français Jacques Callot réalise ses portraits.
05:09Où ils sont dessinés avec des ventres énormes, de petites jambes et des visages monstrueux.
05:17Le peintre de cour Diego Velasquez est le premier au XVIIe siècle
05:21à représenter dignement les personnes atteintes de nainisme avec cette série de portraits.
05:29Elles ne sont plus les faire-valoir de la royauté, mais le sujet principal.
05:33Leur taille est soulignée, mais pas moquée.
05:36Et l'artiste valorise même celles qui ont pu accéder à un poste plus prestigieux,
05:41comme ce secrétaire de la chambre du roi, représenté entouré de livres.
05:49Combien de personnes de petite taille vivent auprès des souverains d'Espagne à cette époque ?
05:54Dans cet ouvrage, écrit par un archiviste du palais royal espagnol,
05:59nous découvrons qu'entre 1563 et 1700,
06:03pas moins de 123 individus ont été choisis pour divertir la cour.
06:09Des bouffons, des noirs, des géants, et surtout, près de 70 naines et nains.
06:19En enquêtant sur leur vie à partir des archives royales,
06:22l'auteur est interpellé par la répétition de l'artiste.
06:25Cela amène à penser que cette ville fournissait des fous et des nains
06:28beaucoup plus que les autres villes d'Espagne.
06:31Et le fait est qu'il y avait là un célèbre asile.
06:36Ce premier hôpital général espagnol, créé à Saragosse et tenu par des religieux,
06:41est chargé d'accueillir, à partir du 15e siècle, tous les fous, sans distinction.
06:47Cette institution est la plus importante dans l'histoire de l'Espagne.
06:52Cette institution, peinte ici par Francisco de Goya,
06:57a manifestement servi de vivier à la cour pour se fournir en bouffons et en nains.
07:05Les personnes atteintes d'onanisme sont si convoitées
07:08que les puissants d'Europe n'hésitent pas à se les offrir entre eux.
07:13Sur ce tableau apparaît Geoffrey Hudson,
07:16qui est au service de la reine Henriette Marie d'Angleterre.
07:21Dans cet ouvrage, nous découvrons qu'il lui a été donné en cadeau
07:24par le duc et la duchesse de Buckingham, au cours d'un dîner.
07:31Le nain Hudson fut apporté sur la table, caché dans une tarte,
07:35dont il fut libéré par surprise devant eux.
07:39La reine fut amusée de ses manières vives, il passa à son service.
07:45Pour se divertir, d'autres souverains européens n'hésitent pas à aller encore plus loin.
07:52Le tsar Pierre le Grand, en Russie, organise une parodie de mariage
07:56avec des dizaines de nains pour amuser sa cour.
08:01Dans cet ouvrage, un envoyé danois qui a participé à l'événement raconte.
08:07Les nains étaient 62 en tout, tous vêtus de magnifiques vêtements,
08:11tous les convives s'asseyaient, le dos au mur et le visage tourné vers les nains,
08:16qui étaient assis au centre de la salle sur de petites tables.
08:20La plupart de ces nains, qui pouvaient à peine marcher, savaient encore moins danser.
08:24Pourtant, ils étaient obligés de danser,
08:27de sorte qu'ils tombaient souvent sans pouvoir se relever.
08:30Ils étaient ramassés seulement par d'autres nains.
08:33Il y avait un tel rire et un tel tumulte que cette scène n'est pas évidente.
08:37En Espagne, Marie Barbola reste, quant à elle, au service des souverains pendant 50 ans,
08:42avant d'être obligée de quitter la cour.
08:46Cette archive révèle qu'en 1700, elle est brutalement privée de tout ce dont elle jouissait,
08:51suite à son retour en Allemagne, d'où elle était venue.
08:57En 1700, le dernier roi de la branche de l'Empire,
09:01l'Empereur de l'Empire de l'Allemagne,
09:04En 1700, le dernier roi de la branche espagnole de la dynastie des Habsbourg décède.
09:12Il est remplacé par Philippe V, de la maison de Bourbon,
09:15qui met fin à la tradition des nains à la cour d'Espagne.
09:21Dans cet ouvrage, nous constatons en effet que plus aucune personne atteinte de nainisme
09:26n'est recrutée officiellement au palais royal espagnol à partir de cette date.
09:31Peu à peu, elles disparaissent des autres cours royales européennes.
09:39Mais la fascination qu'elles génèrent traverse le temps.
09:43Les cirques en font une de leurs attractions.
09:47Comme cette troupe de nains chanteurs, qui rencontre un franc succès dans les années 1900.
09:53Dans les pays anglo-saxons, à la fin du XXe siècle,
09:56se popularise le lancer de nains dans les bars et les discothèques.
10:01Une pratique qui s'exporte en Europe dans les années 90.
10:12En France, l'interdiction de ce divertissement sera validée par le Conseil d'Etat en 1995.
10:19Au motif qu'une telle attraction porte atteinte à la dignité de la personne humaine.
10:26Quant à Marie Barbola, à partir de son départ de la cour royale espagnole vers son pays d'origine, l'Allemagne,
10:33la fin de sa vie n'est plus documentée.
10:35Elle tombe dans l'oubli.
10:38Le tableau Les Ménines, de Diego Velázquez, a permis de l'immortaliser.
10:43Et de lui donner une place dans l'histoire.

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