L’ex-productrice de cinéma française Albina du Boisrouvray a publié une séquence sur TikTok, vue presque un million de fois, au cours de laquelle elle est victime de sexisme sur un plateau de télévision dans les années 1970.
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00:00Voilà ce que j'ai dû subir dans les années 70 en étant une femme productrice de cinéma.
00:05Habituellement les producteurs de cinéma sont des gens, d'abord sont des hommes,
00:08sont des gens en gros, un peu lourds.
00:10Et vous êtes jeune et vous auriez pu être une actrice et si on vous voyait sur la croisette,
00:14on s'étonnerait que vous soyez productrice, oui.
00:18Albina Dubois-Rouvray n'a plus trop envie d'amener danser.
00:21On pensait que de toute façon on va être roulés.
00:23C'est dommage qu'il soit mort, parce que sinon je l'aurais foutu au voquet,
00:25j'aurais échappé, on dirait encore ce que tu disais.
00:28Sur TikTok, Albina Dubois-Rouvray, productrice de cinéma dans les années 70 et 80,
00:32a posté cette vieille séquence sexiste à la télévision.
00:35Et cela a beaucoup, beaucoup fait réagir.
00:39C'est pour ça que j'ai posté ça, parce que ça m'a scotché,
00:42ça m'a laissé complètement ébahie en me disant, c'est pas vrai, c'est comme ça que c'était.
00:47Parce que vous emmenez danser, c'est quoi ?
00:49C'est que vous emmenez danser et après vous emmenez baiser.
00:51Donc chaque fois qu'on finit d'être des objets, des objets sexuels,
00:55c'était soit belle et tais-toi, reste dans ton coin.
00:57Ça, c'était au Festival de Cannes,
00:59c'était l'année où j'ai présenté, belle, le film d'André Delvaux.
01:03Donc c'était un plateau de télévision.
01:05Comment pouvait-on réagir à l'époque ?
01:06Je veux dire, on se faisait écraser complètement,
01:09on se faisait dépouiller de ses compétences professionnelles,
01:12mais on était constamment, constamment qu'on fasse d'attitudes comme ça.
01:16C'était l'ambiance normale, j'allais dire.
01:18Alors, ou on se laissait faire, ou on disait rien, on était dans son coin ou on se battait.
01:22J'en me suis beaucoup battue.
01:23Dans votre carrière, vous êtes scénariste.
01:25Est-ce que vous avez envie de travailler avec Mme de Bois-Rouvray ?
01:29Pas tellement, non.
01:31Pourquoi ?
01:32Eh bien parce que, d'abord, comme vous dites, elle ne fume pas le cigare.
01:36On est habitué à travailler avec un certain nombre de gens,
01:38on sait quels arguments les touchent,
01:41comment tricher, comment leur mentir, comment leur raconter un scénario.
01:44Pourquoi vous avez dit, je vais la poster sur mon TikTok ?
01:46Parce que je pensais que c'était intéressant,
01:49que les jeunes femmes voient à quoi nous étions confrontées,
01:52ce que nous avons subi.
01:54Et que même si aujourd'hui, il y a toujours un chemin à faire,
01:58il y a toujours un machisme, un sexisme,
02:00peut-être même plus insidieux, puisqu'ils n'osent pas se montrer,
02:04et qui est plus difficile à combattre souvent,
02:06mais que le chemin a quand même été grandement ouvert,
02:10et que nous, c'était vraiment atroce.
02:13Jamais aujourd'hui, à la télévision française,
02:15les mecs se permettraient de vous interroger et de répondre de cette façon.
02:20Jamais !
02:21Heureusement, vous voyez, ça c'est un grand peu de gagné.
02:23Il y a Laurence, elle, qui dit,
02:26« Indélicat, irrespectueux, inélégant, stupide et misogyne au possible. »
02:30Je suis tout à fait d'accord avec Laurence.
02:32« L'icorne noire, elle parle comme si elle n'était pas là. »
02:37C'est exactement ça.
02:38Vous, vous n'avez même pas le droit à la parole.
02:40On ne vous demande pas de répondre, quoi que ce soit.
02:42C'était moi qui avais produit le film, qui était là en compétition,
02:46et que c'était moi qui le présentait.
02:48Et on n'a jamais parlé même du film.
02:50Est-ce vraiment une productrice ou c'est une femme de paille ?
02:55L'un n'exclut pas l'autre.
02:57J'ai l'impression qu'elle se sert un peu de son charme dans les affaires.
03:02Autant je ne peux pas répliquer sur un placoteau de télévision,
03:06autant dans la vie, j'ai été odieuse.
03:09J'ai dit des choses atroces à des vieux producteurs
03:12qui essayaient de me nier, qui essayaient de m'écraser,
03:14que je ne regrette pas.
03:17Mais il fallait qu'ils me respectent.
03:19Je me suis mise à fumer du cigare quand je suis devenue productrice de cinéma.
03:22Parce que c'était tellement amusant de faire ça en provocation aux producteurs mecs.
03:27C'était leur domaine réservé.
03:28Eh bien oui, moi je vous emmerde, je me fume quand même.
03:32Parce que même les compliments,
03:34même ce qui se voulait bienveillant de reconnaissance,
03:37étaient ambigus au possible.
03:38Une aventureuse un jour me dit,
03:40toi finalement tu es un vrai petit mec.
03:42Alors, j'étais d'abord extrêmement flattée, contente
03:46d'être adoubée par ce grand acteur.
03:48Après, j'étais furieuse.
03:49J'ai trouvé ça totalement injurieux.
03:51Parce qu'il me reconnaissait et il m'intégrait
03:55dans la catégorie des gens qu'il voulait réussir dans le cinéma.
04:00Parce que j'étais comme un mec pour lui,
04:02mais pas en tant que femme.
04:04C'est en ça que je crois que c'est intéressant
04:06de voir ces choses-là d'il y a quoi, 50 ans.
04:09C'est qu'on a quand même fait beaucoup de chemin.
04:12Et on continuera.
04:13Ce n'est qu'un début, continuons le combat.
04:16Le visuel, c'est sorti.