• il y a 2 mois
Marie-José Allemand, députée Socialiste des Hautes-Alpes

Elle ne pourra plus faire les transhumances ou aider aux agnelages... Après avoir élevé des brebis dans les Hautes-Alpes pendant plus de 30 ans, Marie-José Allemand a été élue députée socialiste aux dernières législatives. Une élection qui consacre son engagement au PS de longue date.

Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !

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Transcription
00:00Elle ne pourra plus faire les transhumances
00:02ou aider aux agneulages.
00:03Mon invité a élevé des brebis dans les Hautes-Alpes
00:06pendant plus de 30 ans, tout en ayant un pied en politique.
00:09Elle siège au sein du groupe socialiste à l'Assemblée.
00:12Musique intrigante
00:14...
00:26Bonjour, Marie-Josée Allemand.
00:28Vous faites partie des nouveaux visages
00:30de cette Assemblée qui a été élue en 2024,
00:33mais ça fait longtemps que vous êtes engagé sur le terrain
00:36pour le PS dans les Hautes-Alpes.
00:38Pour commencer, je vous propose de regarder la réaction
00:40de quelqu'un qui vous connaît bien, juste après votre élection.
00:44Il y a eu beaucoup, beaucoup de défaites.
00:46C'est dur.
00:47Mais ça change.
00:49Je sais qu'elle s'occupera des choses.
00:52Elle est du terrain.
00:54Et elle est travailleuse.
00:59Je suis heureux, je suis ému.
01:00Vous êtes fier d'elle ?
01:02Oui, très fier.
01:03Cet homme, c'est votre mari.
01:05On le voit, il est ému, très ému.
01:07Ca donne presque l'impression
01:09que votre engagement politique personnel,
01:11c'est l'engagement de toute votre famille.
01:14C'est vraiment l'engagement de toute la famille,
01:16parce que, j'ai commencé, les enfants n'étaient pas nés,
01:20et c'est tout au long de notre vie
01:22qu'ils ont participé, finalement, à cet engagement de terrain.
01:26C'est vraiment de l'engagement de terrain.
01:29Le moi ne m'intéresse pas.
01:31C'est pour les autres, pour notre quartier,
01:34pour notre ville.
01:35Maintenant, on est là.
01:37C'est vrai que c'est...
01:38Il évoque les défaites.
01:40Vous en avez connu beaucoup.
01:41Beaucoup.
01:42Oui, oui, beaucoup de défaites,
01:44parce que, quand on s'engage...
01:47Si on gagne, c'est bien,
01:49mais moi, j'estime que c'est des défaites
01:51qu'on se relève et qu'on peut apporter encore plus
01:54pour essayer de faire encore mieux.
01:56On se remet en question,
01:58c'est parce qu'on n'a pas été peut-être bons,
02:00peut-être pas expliqué les choses comme on devait les expliquer,
02:04et, du coup, on remet l'ouvrage sur le métier.
02:07Ca permet aussi d'avancer pour soi-même.
02:11Alors, votre mari, on l'a vu, ému.
02:14Est-ce qu'il était pas un peu inquiet,
02:16aussi, après votre élection ?
02:18Parce qu'ensemble, vous élevez des brebis depuis longtemps.
02:22J'imagine que ce mandat de député,
02:24c'est venu tout perturber.
02:26C'est venu tout perturber, mais c'est tellement...
02:30C'est pas grave, en fait.
02:32C'est pas grave, parce que, pour lui,
02:34c'est aussi la reconnaissance de tout cet engagement.
02:38On travaille autrement, on fait plus,
02:42mais quand on est sur place, on fait beaucoup plus.
02:46Mais, de notre côté, c'est pas grave, en fait.
02:49Comment ça se passe, depuis ?
02:51Vous avez dû vous réorganiser ?
02:54On peut rester éleveuse de brebis en étant députée ?
02:57Bien sûr, bien sûr.
02:58Vous voyez, aujourd'hui, ils sont sur l'alpage,
03:01ils sont allés chercher les bêtes.
03:03J'attends impatiemment de savoir combien il y en a,
03:06et ce soir, en arrivant,
03:08je manquerais pas d'aller faire un petit tour,
03:11voir qui est là, qui est pas là,
03:13et comment ça va se passer.
03:14Parce que, en fait, c'est génétique.
03:17C'est notre vie, nos bêtes, c'est notre vie,
03:20c'est nos bébés, aussi.
03:22Vous, députée, votre vie,
03:23elle se passe en partie à Paris, à l'Assemblée,
03:26beaucoup aussi sur le terrain, dans votre circonscription.
03:29Qu'est-ce qui vous reste comme temps ?
03:31Vous savez, le monde agricole a beaucoup de ressources,
03:34et c'est pas un problème, on en a l'habitude.
03:38Non, moi, c'est mon équilibre,
03:42et surtout, il faut le garder.
03:44Vous manquez vos brebis, à l'Assemblée, à Paris ?
03:47Vous savez, oui, elles nous manquent,
03:49mais de notre côté, elles sont en vacances dans les Alpages,
03:52donc on sait qu'elles vont revenir,
03:54on est très contents qu'elles reviennent.
03:56C'est le cycle annuel de notre travail,
04:00on sait qu'elles vont arriver.
04:02Oui, évidemment, ce sera pas la même chose,
04:05c'est la première fois cette année,
04:07qu'en 35 ans, je fais parler à Transhumance.
04:09Ça a été très dur,
04:11de voir partir les camions, partir les bêtes,
04:13et de se dire, j'y vais pas.
04:15Bien sûr, c'est toujours la grande question,
04:17est-ce qu'ils vont arriver sans moi ?
04:19Evidemment qu'ils y arrivent, ils n'ont pas besoin de moi.
04:23Vous dites que vous n'étiez pas destinée à être députée.
04:26Pourquoi ?
04:27Parce que c'était pas...
04:28Beaucoup de gens ont une ambition politique,
04:31moi, c'était pas mon ambition, c'était de faire avancer,
04:34et ça l'est toujours, d'ailleurs,
04:36de faire avancer les choses pour les gens.
04:39Le moi ne m'intéresse pas.
04:40Aujourd'hui, je suis...
04:42Est-ce que quelqu'un peut être destiné à...
04:44Il y a une certaine logique,
04:46c'est-à-dire que vous soyez députée,
04:48vous avez milité sur les terrains,
04:50vous êtes à la tête du PS dans le département des Hautes-Alpes
04:54depuis un certain temps.
04:55Après, c'est pas une fait en soi.
04:57Voilà, c'était pas...
04:58Que ce soit moi ou quelqu'un d'autre,
05:01pour moi, c'était pas l'objet.
05:02L'objet, c'était de gagner cette circonscription.
05:05Il se trouve que mes camarades, mes collègues des autres parties
05:09ont souhaité que ce soit moi qui porte cette candidature,
05:12donc je l'ai portée,
05:13et bon, très bien, dans tact,
05:15et j'en suis très fière.
05:16Je suis très, très fière d'être députée aujourd'hui
05:19et je ferai tout ce que je dois faire pour notre territoire
05:23et pour pas décevoir les Hauts-Alpins, surtout,
05:25et puis la famille.
05:27Si on remonte un peu dans le temps,
05:29vos premiers combats politiques,
05:31vous les avez menés en dehors de tous partis.
05:33Pourquoi ?
05:34Bah, parce que c'était...
05:37Mon combat, c'était d'empêcher que l'école de quartier ferme.
05:41Donc, pour nos enfants,
05:44et puis pour nos voisins.
05:46Donc, voilà, on n'est pas nécessairement...
05:48On n'a pas forcément la culture d'aller dans un parti politique.
05:52C'est bien lorsqu'on s'engage un peu plus,
05:54mais moi, je suis rentrée au Parti socialiste qu'en 2007,
05:58donc mon combat pour l'école, c'était 1991,
06:00donc il y a eu beaucoup de...
06:02Ca aide pas quand on prend sa carte dans un parti ?
06:05On a des soutiens, on a des appuis...
06:07Après, encore une fois, l'objet...
06:09Vous méfiez des partis ?
06:10Non, pas du tout. J'avais pas l'objectif d'être élue.
06:14C'était pas mon objectif.
06:15Mon objectif, c'était de faire avancer dans mon quartier
06:19pour le bien des autres, puis après,
06:21élargir un peu plus le spectre de l'avancée.
06:25Voilà.
06:26Mais c'était absolument pas pour avoir,
06:29entre guillemets, une carte d'élu.
06:31Vous étiez toujours sur des problématiques locales
06:34très concrètes. Vous avez évoqué la fermeture d'écoles,
06:37il y a eu aussi un enjeu autour d'une garderie.
06:40Une fois qu'on a sauvé l'école, il faut faire ce qu'il y a autour.
06:43Il y a la cantine, la garderie, la maternelle,
06:46l'agrandissement de l'école.
06:48Il y a quasiment 110 enfants dans cette école.
06:50C'était pas un vain combat.
06:52C'est ça qui vous anime en tant que femme politique,
06:55députée ? C'est les problématiques locales concrètes
06:58plus que les grands discours ?
06:59Exactement. Il faut pas séparer les deux
07:01parce qu'on a besoin aussi d'être entendues et reconnues.
07:05C'est par les grands discours qu'on fait avancer les choses.
07:08Mais d'abord et avant tout, moi, si je suis là,
07:10je suis là pour les Hautes-Alpes, pour que les Hautes-Alpes avancent,
07:14pour que mes concitoyens soient aussi fiers
07:17d'avoir une députée qui porte leurs problématiques à l'Assemblée.
07:20C'est vraiment ça, l'objectif.
07:22Vous battez pour les oublier des territoires ruraux ?
07:25C'est ça. Moi, je considère,
07:27et c'est exactement ce que font remonter
07:29mes concitoyens et les personnes qui habitent
07:32dans ma circonscription et dans le département,
07:35c'est qu'on a des départements qui sont loin,
07:38qui sont enclavés,
07:41et qu'on ne pense pas forcément.
07:43Aujourd'hui, si on regarde le département des Hautes-Alpes,
07:46on est trois parlementaires.
07:48Sur l'ensemble des parlementaires qui représentent la France,
07:52c'est tout petit, et il faut qu'on se fasse entendre
07:56parce que nos problématiques, elles sont importantes.
07:59C'est quel type d'enjeu ?
08:01Les déserts médicaux, par exemple, chez nous.
08:03Aujourd'hui, on n'est pas d'accord avec l'ARS qui dit
08:06que tout va bien chez nous.
08:08Tout à fait.
08:10Par exemple, on a une petite commune,
08:13j'ai découvert ça, la petite commune d'Orpières,
08:16un petit bus prend des rendez-vous à Aix-en-Provence
08:19ou à Marseille pour ses administrés,
08:22elle met tout le monde dans le bus le même jour
08:24et elle les mène se faire soigner à 150 km de là.
08:27C'est inadmissible qu'on ne puisse pas se faire soigner
08:30dans notre département.
08:31Pour être honnête, vous connaissez bien l'Assemblée
08:34parce qu'en plus d'élever des brebis,
08:36vous êtes collaboratrice parlementaire d'une députée,
08:39Karine Berger, députée socialiste.
08:42Pourquoi elle vous a choisie, vous,
08:44plutôt qu'un jeune diplômé de Sciences Po,
08:46parce que c'est en général le profil type
08:48des collaborateurs parlementaires ?
08:50C'est un peu ce que je vous disais, c'est le parcours.
08:53C'est le parcours et madame Berger m'a demandé
08:57d'être, justement, à ses côtés pour les territoires ruraux,
09:01pour m'occuper des communes de notre circonscription,
09:05pour m'occuper du monde agricole,
09:07parce qu'elle avait besoin de quelqu'un sur le terrain
09:10qui connaisse la problématique.
09:12Ca s'est toujours très bien passé.
09:14Vous faisiez le lien, en quelque sorte,
09:16entre tous les territoires ruraux de la circonscription et elle ?
09:20Exactement, exactement.
09:22C'est les tournées, c'est chez les élus,
09:25c'était vraiment la ruralité, c'était vraiment mon travail.
09:29Vous arrivez d'aller à l'Assemblée ?
09:31Alors, j'ai... Depuis quelques temps,
09:33si j'étais venue deux fois de plus, ça n'aurait pas été du luxe,
09:37parce que ça m'aurait bien aidée,
09:39mais effectivement, je suis venue quelques fois,
09:42mais très peu, parce que c'était pas le lieu...
09:44C'était pas vraiment mon travail de venir ici,
09:47mais il fallait voir comment ça se passait
09:49et c'était aussi important de voir la transition jusqu'au bout.
09:53Cette expérience de collaboratrice parlementaire,
09:56ça vous a aidé à prendre vos marques en tant que députée ?
09:59Franchement, oui, oui, parce qu'on a besoin de...
10:02Alors, on est très bien accueillis à l'Assemblée,
10:04les collègues sont vraiment formidables,
10:08mais c'est vrai aussi que le fait d'avoir été collaboratrice
10:12m'a permis de bien avancer.
10:15Ça a mis un peu d'huile dans les rouages.
10:18On va passer à notre quiz, à présent, si vous le voulez bien.
10:21Je vous explique le principe, je vais commencer des phrases
10:24et vous allez devoir les compléter, les terminer.
10:27On y va. À ceux qui disent que j'ai mauvais caractère.
10:31Je dirais que j'ai du caractère.
10:33En général, quand on dit qu'elle a du caractère,
10:35c'est sous-entendu mauvais.
10:37Non, c'est pas mauvais parce que je suis quelqu'un
10:40qui ne lâche pas l'affaire.
10:41Quand je suis obstinée
10:43et quand je sais qu'il faut faire les choses,
10:48même si c'est pas forcément ce que j'en pense,
10:51je vais au bout.
10:52C'est un avantage en politique ?
10:54Je pense que c'est un avantage...
10:56Ça peut jouer des tours ?
10:57Tant pis.
10:58Il faut savoir assumer.
11:00Je pense qu'il faut savoir assumer.
11:02Être une femme en politique ?
11:03C'est, aujourd'hui, un peu plus facile
11:06que quand j'ai commencé.
11:09Mais c'est compliqué.
11:11Vous avez été confrontée à des problèmes liés à...
11:14Du sexisme, enfin, tout ce qu'on peut voir.
11:17On en a encore un peu.
11:19Nos départements font que...
11:23Voilà, le patriarcal est toujours...
11:26Assez présent.
11:27Et les hommes pensent aussi que les...
11:30Chut !
11:31Chez nous comme ailleurs,
11:33mais c'est vrai qu'on a quand même cette sensation,
11:36le fait qu'on doit toujours prouver plus qu'eux.
11:41Enfin, être députée ou maire de Gap ?
11:45Entre députée ou maire de Gap, je choisis.
11:47Députée, je resterai...
11:50Je garderai le mandat de députée.
11:52Je pense que la ville de Gap a besoin de jeunesse.
11:55Et je fais confiance aux personnes qui y travaillent actuellement.
11:59Est-ce que ça a été votre ambition, en 2020 ?
12:02Vous avez été tête de liste.
12:04J'ai été tête de liste, je dirais, un petit peu, par défaut,
12:09parce que la personne qui était candidate à ce moment-là
12:12nous a lâchées au milieu du gué.
12:14On a bien été obligés d'assumer,
12:16en tant que première fédérale du Parti socialiste.
12:18Vous étiez partie au combat.
12:20Ca m'est...
12:21La responsabilité m'en a comblée, on va dire ça comme ça.
12:25Aujourd'hui, je pense qu'il faut envoyer des jeunes,
12:29reprendre cette ville en main, on en a besoin.
12:32Votre avenir à vous est ici, à l'Assemblée.
12:34Exactement. Je garderai, même si je garde mon mandat
12:37de conseillère municipale d'opposition,
12:40aujourd'hui, je suis élue députée,
12:42j'assumerai le rôle qui m'incorbe.
12:44Merci, Marie-Josée Allemand, d'être venue dans La Politique et moi.
12:48SOUS-TITRAGE ST' 501
12:54Générique
12:57...

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