Dans ce nouveau numéro de ZED, Valérie Brochard et les équipes de LCP ont posé leurs caméras dans une classe de 3ème du collège Jean-Jacques Rousseau, au Pré-Saint-Gervais .
Après le visionnage du documentaire : « 20 ans, le plus bel âge », les élèves ont échangé avec la réalisatrice Charlotte Lavocat et le pédopsychiatre Patrick Landman. Comment vivent-ils cette période post-covid ? Se reconnaissent-ils dans ces portraits d'adolescents soumis au stress, et à la détresse ?
Alors que la santé mentale est décrétée grande cause nationale 2025... voici un partage de réflexions et d'expériences ; parce qu'il n'y a pas d'âge pour questionner le monde et ses images.
Après le visionnage du documentaire : « 20 ans, le plus bel âge », les élèves ont échangé avec la réalisatrice Charlotte Lavocat et le pédopsychiatre Patrick Landman. Comment vivent-ils cette période post-covid ? Se reconnaissent-ils dans ces portraits d'adolescents soumis au stress, et à la détresse ?
Alors que la santé mentale est décrétée grande cause nationale 2025... voici un partage de réflexions et d'expériences ; parce qu'il n'y a pas d'âge pour questionner le monde et ses images.
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00:00:23Bienvenue dans Z, la zone d'éducation documentaire.
00:00:27Pour vous donner la parole et vous aider à décortiquer le travail journalistique,
00:00:30LCP apporte ses films et pose ses caméras dans un établissement scolaire.
00:00:34Mais on est où là ?
00:00:35Au Collège Jean-Jacques Rousseau.
00:00:36Au Pré-Saint-Germain.
00:00:37Et vous avez regardé quel documentaire ?
00:00:3820 ans, le plus bel âge.
00:00:40Alors vous savez quoi, on va laisser les téléspectateurs le regarder eux aussi
00:00:42et on se retrouve tous ensemble avec nos invités dans votre CDI.
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00:01:15Accès au marché du travail.
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00:01:19La santé mentale est notre prochaine pandémie.
00:01:21Refuser d'accepter cela affectera le futur de notre union.
00:01:25Nous devons détruire le modèle actuel où nous stigmatisons la santé mentale
00:01:29et pourtant mourons la perte de vie à cause de cela.
00:01:32Nous devons faire cela pour nos jeunes.
00:01:34Nous devons faire cela pour notre union européenne.
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00:01:41Mon sœur, c'est Nathalie, je t'écoute.
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00:01:46Mon sœur, c'est Nathalie, je t'écoute.
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00:02:13Messieurs, est-ce qu'il y a quelque chose dont tu aimerais me parler ?
00:02:21Mais sache que je suis vraiment là pour t'écouter, qu'importe le sujet.
00:02:26Donc si tu souhaites m'en parler, tu peux y aller.
00:02:29Sinon, c'est comme tu le sens.
00:02:34On a un service composé d'étudiants et d'essais d'étudiants.
00:02:37Du coup, on n'est pas professionnels.
00:02:39Mais on a été formé à l'écoute active pour vous écouter.
00:02:46D'accord.
00:02:48Pourquoi est-ce que tu ne voudrais pas leur parler de tes problèmes à tes copines ?
00:02:56Qu'est-ce qui te donne envie de pleurer ?
00:03:00Nightline, c'est une association étudiante
00:03:03qui a pour mission d'améliorer la santé mentale des jeunes, en particulier des étudiants.
00:03:07Et on le fait en s'appuyant sur un outil qui est l'aide par les pères.
00:03:11Nous, ce qu'on fait en pratique, c'est qu'on informe, on déstigmatise,
00:03:14on soutient, on oriente.
00:03:16Et on le fait avec tout un éventail de dispositifs.
00:03:19Donc il y a la ligne d'écoute nocturne, mais on fait aussi des formations auprès des étudiants dans les facs.
00:03:23On mène des actions de terrain, on mène des campagnes sur les réseaux sociaux.
00:03:26Et puis on mène aussi des actions de plaidoyer.
00:03:30OK, ça marche.
00:03:37À toi aussi.
00:03:38Merci d'avoir appelé.
00:03:40En tout cas, sache que tu peux nous rappeler lorsque tu en ressens le besoin.
00:03:43On est ouverts tous les soirs, de 21h à 2h30.
00:03:48Passez une bonne soirée. Au revoir.
00:03:56Ça va ?
00:03:57Ouais.
00:03:59Ouais.
00:04:00Je pense qu'il y a un vrai besoin de mettre plus de moyens.
00:04:02Ça veut dire plus de psychologues dans les services de santé étudiants.
00:04:05Aujourd'hui, il y a un psychologue pour 15 000 étudiants.
00:04:07Donc c'est 10 fois moins que la recommandation internationale.
00:04:09Donc il s'agit de mettre aussi des moyens ici.
00:04:11Et c'est aussi ça qu'il y a derrière Nightline et le projet de la ligne d'écoute.
00:04:15De pouvoir offrir un service qui est disponible pour tout le monde,
00:04:18pour tous les étudiants, tous les soirs.
00:04:20Et donc idéalement, si on veut pouvoir améliorer la santé mentale des étudiants,
00:04:23il faudrait aussi pouvoir avoir une Nightline dans chacun des établissements d'enseignement supérieur.
00:04:36C'est le travail sans relâche.
00:04:38Le travail quotidien, les trajets, la précarité étudiante.
00:04:49C'est des insomnies.
00:04:50Donc forcément, quand on va en cours, c'est qu'on est épuisé.
00:04:53Et c'est être stressé.
00:04:56Mais vraiment, l'idée de tout, c'est qu'on ne peut plus rien faire
00:05:00sans trembler comme pas possible.
00:05:03Dès la première année, dès le premier cours, les profs nous disent
00:05:06« Vous avez choisi un cursus très difficile, il va falloir s'accrocher.
00:05:10Votre voisin de table ne sera pas là dans un an. »
00:05:16Des burn-out et des dépressions suite à, par exemple, trop de travail
00:05:20ou énormément de pression et d'élitisme de la part du système de la fac, des profs.
00:05:27Je commence à détester de plus en plus ce que je fais.
00:05:30Parce que je vois que ce domaine me plaît, mais il consomme trop de temps.
00:05:33J'ai arrêté le sport, j'ai arrêté de voir des gens.
00:05:36Je me concentre vraiment sur mes études parce que ça prend vraiment beaucoup de temps.
00:05:41Les études, c'est toute ma vie.
00:05:43C'est toute ma vie, je le dis, parce que j'ai des parents qui ont investi dans mes études.
00:05:48Je suis l'aînée et j'ai trois sœurs derrière qui me voient comme un exemple en fin de camp.
00:05:54Donc je me dis que je n'ai pas le droit à l'échec.
00:05:5875% des pathologies psychiatriques se déclarent entre 15 et 25 ans.
00:06:04Donc cet âge étudiant est un âge qui peut être particulièrement impacté
00:06:10par des troubles psychologiques, voire des maladies psychiatriques émergentes sur cette tranche d'âge.
00:06:16Par exemple, la schizophrénie, le trouble bipolaire,
00:06:21ce sont des pathologies qui généralement émergent à cet âge-là.
00:06:24Donc il y a déjà une vulnérabilité un peu caractéristique de l'âge.
00:06:28Donc la question de l'âge dans les troubles de santé mentale, elle est fondamentale,
00:06:32en ce sens qu'on doit s'intéresser très tôt à ces problématiques
00:06:37pour la prévention, pour l'éventuelle détection et pour les éventuelles prises en charge,
00:06:43afin d'éviter les problèmes de santé mentale.
00:06:46Jusqu'à l'âge de 25 ans, et parfois un peu au-delà,
00:06:50le cerveau continue à maturer, de différentes manières,
00:06:54mais il continue à maturer, il continue à se transformer.
00:06:57Et comme il se transforme, il est particulièrement sensible à l'évolution.
00:07:02Donc il est capable de se transformer, de se développer,
00:07:05de se développer, de se développer, de se développer,
00:07:08et de se développer, de se développer, de se développer,
00:07:12et comme il se transforme, il est particulièrement sensible aux influences de l'environnement.
00:07:17Et cette plasticité, elle se fait pour le meilleur et pour le pire.
00:07:25Ma santé mentale en tant qu'étudiante, c'est la pression, le stress, l'angoisse de ne pas réussir
00:07:31et de ne pas arriver au but qu'on s'est fixé.
00:07:37Ça a été en deuxième année que ça a commencé à être la douche froide,
00:07:40c'est-à-dire qu'il y a des profs qui ont vraiment commencé à nous mettre la pression très très fort.
00:07:49Je suis épuisé par toutes ces années d'études,
00:07:52épuisé du manque de considération qu'on peut recevoir parfois de certains professeurs,
00:07:57et c'est extrêmement difficile à vivre.
00:08:00En ce qui me concerne, le problème c'est que même si souvent je fais de mon mieux et je réussis mes études,
00:08:05j'ai beaucoup de mal à faire évacuer la pression après les examens.
00:08:08Après les examens, il y a toujours un moment où je suis malade pendant une semaine.
00:08:11Quand ça ne va pas, je ne peux même pas sortir pendant plusieurs jours,
00:08:15on ne peut plus rien faire, c'est anxiogène.
00:08:19J'en pouvais juste plus de tout, j'avais un ras-le-bol de tout, de tout le monde, de la vie,
00:08:23jusqu'à un point où malheureusement, j'ai fait cette tentative de suicide l'année dernière.
00:08:31La caractéristique des étudiants par rapport aux autres non-étudiants,
00:08:36c'est le cumul des facteurs de stress qui arrivent sur ce temps des études.
00:08:40Et ces facteurs de stress, on les connaît.
00:08:43Ce sont les facteurs académiques, et notamment la sélectivité,
00:08:46ce sont les facteurs culturels, notamment pour les étudiants sujettis à la mobilité,
00:08:52que ce soit cette mobilité nationale ou internationale,
00:08:55ce sont les facteurs économiques, la fameuse précarité étudiante,
00:08:59et enfin le moral des étudiants va être impacté par l'effondrement,
00:09:04on l'a vu pendant le Covid, de telle ou telle filière industrielle.
00:09:13La détresse psychologique qui n'est pas une maladie,
00:09:16la détresse est un ensemble, un syndrome, un ensemble de signaux,
00:09:19peut se traduire sur différents axes de la vie du sujet,
00:09:24évidemment dans la sphère affective et émotionnelle, avec des idées tristes,
00:09:29avec une morosité, une irritabilité, mais aussi dans la sphère somatique, physique,
00:09:36avec des troubles du sommeil, une fatigue intense, une difficulté à travailler,
00:09:42dans la sphère cognitive, et c'est là où ça va impacter le plus l'étudiant,
00:09:46avec une baisse de la concentration, de la mémorisation,
00:09:50et évidemment la motivation qui est le nerf de la guerre,
00:09:54c'est le nerf de l'étudiant, la motivation, la projection dans l'avenir,
00:09:59et par définition, la dépression, c'est une absence d'anticipation,
00:10:04une projection négative dans l'avenir,
00:10:06donc vous voyez, ça va venir directement impacter la vie étudiante.
00:10:16Ce qui est plus fréquent, beaucoup plus fréquent chez les étudiants,
00:10:19ce sont des troubles comme les troubles de l'humeur, de la dépression notamment,
00:10:25les troubles anxieux, qu'on peut retrouver assez fréquemment également chez les étudiants,
00:10:29les troubles des conduites alimentaires par exemple, qui peuvent aussi émerger à cet âge-là,
00:10:33et puis un trouble dont on parle assez peu, mais qui peut concerner pas mal d'étudiants,
00:10:38surtout à l'heure où on parle beaucoup des violences sexistes et sexuelles,
00:10:43c'est le trouble de stress post-traumatique.
00:10:50Et qu'est-ce que ton infancère, de ce qu'elle t'a dit ?
00:10:57D'accord, et pourquoi t'étais pas rassurée ?
00:11:02Et avec tes parents, ça se passait comment ?
00:11:08Et tu penses qu'ils auraient réagi comment si tu avais décidé de leur en parler ?
00:11:14Et ces interdits dont tu me parlais, c'était... Ils venaient de qui ?
00:11:24En tout cas, n'hésite pas à nous rappeler, on est ouvert de 21h à 2h30 tous les soirs.
00:11:30Je te souhaite une bonne soirée.
00:11:34Au revoir.
00:11:45Mais du coup, vu que je suis partie un moment, ça a duré combien de temps, ton appel ?
00:11:51Ça a duré 45 minutes.
00:11:53L'idée générale de l'appel, c'était de s'apporter sur le thème de l'image corporelle
00:12:00et de santé sexuelle, globalement.
00:12:03C'était un peu compliqué parce qu'il parlait toujours de la même chose,
00:12:10il parlait toujours de la même chose,
00:12:14et même quand j'essayais de rebondir sur le moindre petit élément de son passé,
00:12:21de ses parents, il revenait toujours à la même chose.
00:12:25En fait, j'avais rien pour me raccrocher à ce qu'il disait.
00:12:31Il me parlait d'interdits dans son enfance, qui avaient des répercussions à l'heure actuelle,
00:12:37mais c'est tout, il n'avait pas plus de choses que ça.
00:12:41Il y avait aussi beaucoup de silence,
00:12:43et j'avais l'impression qu'il était plus gêné par les silences que moi.
00:12:51Le concept des Nightlines est né dans les années 70, à Essex, dans le sud de la Grande-Bretagne.
00:12:56Depuis, ça a s'émet un peu partout en Europe et dans le monde.
00:12:59On peut retrouver des Nightlines au Royaume-Uni, en Irlande, en Allemagne, en Autriche, en Suisse et en France.
00:13:06Et nous, on est aussi en lien avec des étudiants belges motivés pour pouvoir monter une première Nightline en Belgique.
00:13:12Le problème de la santé mentale des étudiants, il n'est pas que franco-français.
00:13:16Dans les pays où il y a des études comparables,
00:13:18le constat qu'on fait, c'est celui d'avoir vu doubler le nombre d'étudiants
00:13:22qui présentent des symptômes dépressifs entre avant et après le Covid.
00:13:26Donc ce qu'on peut dire, c'est que le constat qu'on fait en France, on le retrouve un peu partout en Europe.
00:13:36Je suis étudiant en droit, j'ai 24 ans et j'habite à Brenne-le-Comte.
00:13:42Ma santé mentale, à moi, ce n'est clairement pas l'idéal.
00:13:45Je me rends compte en bachelier, après la première année,
00:13:48et je n'avais jamais dû travailler en secondaire,
00:13:50donc forcément, j'arrivais à l'UNIF tout content, je testais mes méthodes habituelles.
00:13:55Et là, boum, la première claque tombe. Je ne passe pas la première.
00:14:02Franchement, ça a commencé avec le sommeil.
00:14:05Le peu d'heures que je dormais, ce n'était pas suffisant.
00:14:07Mon corps ne voulait plus se lever.
00:14:09Il voyait mon bureau, mon lit, mon lit, mon bureau,
00:14:11donc il n'y avait plus que ça en tête, il fallait travailler constamment.
00:14:14Mon corps n'arrivait plus à faire des simples choses,
00:14:16même allumer mon PC, parfois ça devenait une épreuve incommensurable.
00:14:21Mon corps m'a lâché. À part dormir, je n'ai rien su faire.
00:14:31Je commence à détester de plus en plus ce que je fais.
00:14:33Je n'ai plus le temps de rien faire, je n'ai vraiment plus de vie sociale à un moment donné.
00:14:36Je n'en pouvais juste plus de tout, j'avais un ras-le-bol de tout,
00:14:39de tout le monde, de la vie, jusqu'à un point où malheureusement,
00:14:42j'ai fait cette tentative de suicide l'année dernière.
00:14:49On ne nous prépare jamais à la réalité.
00:14:51On voit en fait, en tout cas en droit c'est comme ça,
00:14:53on voit le succès de l'avocat à côté.
00:14:56Et en fait, le succès de l'avocat, c'est un parcours du combattant
00:14:59parce qu'on pousse les gens en se disant que c'est censé ouvrir plein de portes.
00:15:02Et là, je vois toutes les portes se refermer petit à petit.
00:15:04Et puis, ce qui m'angoisse aussi, c'est le fait que le monde ne va pas.
00:15:11Le suicide, c'est un problème majeur de santé publique
00:15:14pour lequel il est possible d'agir,
00:15:17c'est-à-dire qu'on peut éviter le suicide.
00:15:19Le suicide, c'est 9000 morts chaque année.
00:15:25On peut penser au 31-14, bien sûr,
00:15:28le numéro national de prévention du suicide.
00:15:30Il peut y avoir des dispositifs comme les sentinelles,
00:15:34c'est-à-dire des personnes, des étudiants, des pères aidants
00:15:37qui sont vraiment repérés comme ressources dans leur milieu
00:15:40pour aller discerner les crises suicidaires.
00:15:43Il y a des dispositifs pour accompagner les personnes
00:15:46qui ont fait une tentative de suicide, en particulier les jeunes.
00:15:49Ce qu'il faut rappeler, c'est que la prévention du suicide,
00:15:51c'est la responsabilité de chacun.
00:15:53Le professionnel, le bénévole, le citoyen,
00:15:58le politique, le décideur, on a tous notre rôle à jouer.
00:16:20C'était un tchat suicide immédiat.
00:16:24Sauf que quand j'ai proposé d'appeler les secours,
00:16:27la personne n'a pas voulu.
00:16:29Et après, elle répondait très peu.
00:16:32Ensuite, je l'ai redirigée à sa demande,
00:16:36vers l'annuaire qu'on a sous un étudiant.
00:16:41Mais après, pareil, elle répondait très peu.
00:16:46Ensuite, elle m'a un petit peu parlé des raisons
00:16:49qui la poussaient à vouloir mourir.
00:16:52Et après, elle n'a plus répondu.
00:16:55Tu te sens comment par rapport au fait
00:16:57qu'elle ait plus ou moins arrêté de te répondre ?
00:17:01Ça m'a pas mal inquiétée pendant le tchat.
00:17:07Parce que forcément, mon esprit me disait
00:17:10qu'est-ce qui se passe ?
00:17:12Est-ce que ça y est, elle ne va plus répondre ?
00:17:19Ça peut arriver que les personnes nous parlent de suicide.
00:17:22Et dans ce cas-là, ça va attirer notre attention.
00:17:25Et on va proposer par exemple d'appeler les secours.
00:17:28Quand on appelle les secours,
00:17:30on est obligé de briser l'anonymat.
00:17:32Mais on va prévenir la plante
00:17:34qu'il va y avoir une rupture d'anonymat.
00:17:37Parce que si on n'a pas les informations nécessaires,
00:17:40les secours ne peuvent pas intervenir.
00:17:43C'est le seul cas où il y a sortie d'anonymat.
00:17:53Le suicide de Fanny
00:18:07Je suis ici depuis presque une semaine.
00:18:16La première chose que je fais,
00:18:18c'est d'aller au poste des infirmiers
00:18:20pour prendre mon traitement du jour.
00:18:22Et très souvent, c'est mon premier contact social que j'ai.
00:18:42La clinique Fondra est un hôpital psychiatrique
00:18:45à Hucle, dans le sud de Bruxelles.
00:18:48L'unité 1 dans laquelle je travaille
00:18:50est dédiée aux jeunes adultes entre 18 et 30 ans.
00:18:54Il y a plusieurs types de pathologies
00:18:56qu'on peut rencontrer ici.
00:18:58Les premières décompensations psychiatriques
00:19:01peuvent être des bouffées délirantes,
00:19:03des tableaux dépressifs,
00:19:05des crises suicidaires,
00:19:07des addictions importantes
00:19:09qui les mettent souvent en retrait de la société,
00:19:13en repli chez eux.
00:19:15Et puis, tout ce qui est crise existentielle,
00:19:17crise de sens, crise familiale aussi,
00:19:19qui fait qu'à un moment,
00:19:21ces jeunes qui n'ont pas de logement
00:19:23trouvent ici un « asile »,
00:19:27même si le mot est un peu galvaudé,
00:19:29mais un asile où ils peuvent se poser,
00:19:31se reposer en tout cas,
00:19:33dans un endroit un peu neutre
00:19:35pour repenser un peu leurs projets de vie.
00:19:46Je fais des études de droit en bachelier
00:19:48et je vais être diplômé alors en 2024.
00:19:54Je pense que mes études ont eu un impact
00:19:56sur ma santé mentale, absolument.
00:19:58Moi, personnellement, j'ai tout remis en question.
00:20:01Même mes études, je les ai remises en question
00:20:03en me disant « en fait, je ne sais même pas
00:20:05pourquoi je fais ces études, à force de rester seul,
00:20:07on commence à se faire des idées,
00:20:09on commence à se dire qu'on ne va pas
00:20:11forcément savoir réussir ces études aussi.
00:20:13Il y a vraiment eu plein de questionnements
00:20:15et à un moment donné, je voyais juste que
00:20:17seulement avoir une psychologue
00:20:19et avoir des séances, des consultations,
00:20:21prendre une pilule chaque matin,
00:20:23n'était juste pas suffisant en fait.
00:20:25Je voyais vraiment que j'avais besoin
00:20:27d'être dans une institution
00:20:29pour retrouver une hygiène de vie,
00:20:31qu'on me mette vraiment une structure,
00:20:33une routine
00:20:35et qu'on se focalise vraiment là-dessus,
00:20:37que ce soit un peu une poursuite
00:20:39de la vie,
00:20:41parce que c'est comme ça que je le vis tout simplement,
00:20:43que j'ai l'impression que ma vie est en pause
00:20:45et qu'à ce moment-là, on est juste
00:20:47en hôpital,
00:20:49hospitalisé et on pense seulement
00:20:51à comment je me sens aujourd'hui
00:20:53et je voyais vraiment
00:20:55que c'était nécessaire parce que
00:20:57si je ne rentrais pas en fait,
00:20:59j'allais vraiment faire quelque chose
00:21:01de beaucoup plus grave.
00:21:03Je ne sais pas si je me sens
00:21:05forcément mieux,
00:21:07je dirais que je me sens
00:21:09plus en paix.
00:21:11Ce que j'espère,
00:21:13c'est
00:21:15d'avoir pris le temps
00:21:17justement
00:21:19d'aller creuser en moi,
00:21:21d'aller voir en fait
00:21:23d'où viennent tous ces traumatismes.
00:21:25J'essaie de faire un équilibre
00:21:27entre les deux, entre ma santé et mes études
00:21:29et du coup, je pense que c'est vraiment
00:21:31mon premier objectif,
00:21:33de pouvoir franchir ce cap-là.
00:21:35Je pense que
00:21:37en sortant d'ici, je ne vais pas être
00:21:39100% guéri
00:21:41ou à 100% de nouveau
00:21:43en forme ou quoi que ce soit.
00:21:45Mais je pense que du moins,
00:21:47il y aurait quand même quelques petits trucs
00:21:49que j'aurais réglés,
00:21:51des choses qui seraient plus claires pour moi.
00:22:00Je m'appelle Margot, j'ai 26 ans
00:22:02et j'ai fait une licence
00:22:04de japonais.
00:22:08J'ai passé plusieurs mois au Japon
00:22:10et en fait, ça a été un déclencheur pour moi
00:22:12justement pour commencer une fac de japonais
00:22:14et reprendre les études après ça.
00:22:16Et du coup,
00:22:18je suis rentrée la première année,
00:22:20j'étais absolument passionnée par
00:22:22tout ce que j'apprenais,
00:22:24je travaillais avec plaisir, je restais jusqu'à 21h
00:22:26à la bibliothèque le soir
00:22:28et je sortais avec un grand sourire.
00:22:30Et ça a été en deuxième année
00:22:32que ça a commencé à être la douche froide.
00:22:35Il y a des profs
00:22:37qui ont vraiment commencé
00:22:39à nous mettre la pression
00:22:41très très fort.
00:22:43Il y a eu ce côté extrêmement compétitif
00:22:45qui a été mis en place
00:22:47et il y a des gens
00:22:49qui ne supportent pas ça du tout.
00:22:51J'ai vraiment,
00:22:53littéralement fait une dépression et un burn-out
00:22:55parce que j'arrivais vraiment plus à suivre.
00:22:57J'avais plus de vie
00:22:59et je vivais mal d'avoir plus de vie,
00:23:01ce qui n'était pas le cas en première année.
00:23:03Je suis allée en parler
00:23:05à un de mes profs référents
00:23:07que j'appréciais beaucoup à ce moment-là.
00:23:09Je lui ai dit que ça n'allait pas
00:23:11et il m'a répondu
00:23:13assez sereinement
00:23:15« Dans tous les cas,
00:23:17en L2 où il y a 15% des étudiants
00:23:19en japonais qui sont en dépression,
00:23:21on le sait. »
00:23:25Tous les ans, il y a plusieurs suicides.
00:23:27Il ne s'en vante pas
00:23:29mais on le sait quand même.
00:23:31Je me dis que je suis fière
00:23:33d'avoir réussi
00:23:35à passer au-dessus de tout ça
00:23:37parce que tout le monde n'a pas cette chance.
00:23:53Bonsoir, ici Nightline, je t'écoute.
00:23:55Ok.
00:23:57Et c'est quoi exactement ton problème de santé ?
00:24:01D'accord.
00:24:07Ouais.
00:24:13Ouais, je comprends.
00:24:15C'est le simple fait de sortir
00:24:17qui te met KO ou c'est
00:24:19ce que ça engendre,
00:24:21c'est-à-dire les déplacements et tout ça ?
00:24:23Hum-hum.
00:24:27Comment tu te sens ?
00:24:29Ça va, ça va.
00:24:31Vraiment, il y avait un rapport très bienveillant
00:24:33donc bien.
00:24:35C'était quelqu'un d'assez touchant,
00:24:37de très gentil.
00:24:39L'appel n'a pas duré très longtemps,
00:24:41il a duré une trentaine de minutes
00:24:43parce qu'en fait, elle avait juste besoin d'exprimer,
00:24:45enfin juste de parler un petit peu de sa situation
00:24:47mais à la fin, elle me l'a dit que c'était assez
00:24:49cathartique de
00:24:51pouvoir juste sortir
00:24:53les informations de sa tête,
00:24:55juste de les transmettre et de pouvoir passer
00:24:57à autre chose
00:24:59parce qu'elle souffre d'une maladie
00:25:01qui lui pourrit la vie
00:25:03et du coup,
00:25:05elle se retrouve très seule,
00:25:07elle avait vraiment besoin d'en parler.
00:25:13Le mal-être étudiant est très ancien.
00:25:15Les différentes enquêtes épidémiologiques
00:25:17menées par les mutuelles étudiantes
00:25:19puis ultérieurement
00:25:21par l'Observatoire de la vie étudiante
00:25:23ont montré déjà avant le Covid
00:25:2520% de détresse psychologique
00:25:27puis 25%
00:25:29de détresse psychologique
00:25:31du fait des cumuls
00:25:33de facteurs de stress.
00:25:35Tous ces facteurs-là contribuent à la détresse universitaire
00:25:37qui n'a pas été prise en compte
00:25:39précisément par les pouvoirs publics
00:25:41depuis le rapport
00:25:43Vauquiez qui date de 2006.
00:25:45Finalement, rien n'a été vraiment
00:25:47mis en œuvre de manière importante
00:25:49pour la santé étudiante.
00:25:51Il a fallu attendre notre gouvernement actuel
00:25:53et le séisme du Covid
00:25:55pour que des moyens substantiels
00:25:57soient délivrés
00:25:59au regard d'une souffrance
00:26:01qui est montée jusqu'à
00:26:0343% de détresse psychologique
00:26:05en juin 2021,
00:26:07septembre 2021 encore,
00:26:09donc largement au sortir du Covid.
00:26:17La crise du Covid,
00:26:19on sait, a été particulièrement
00:26:21vulnérabilisante
00:26:23au plan de la santé mentale
00:26:25pour la population générale,
00:26:27pour les jeunes en particulier.
00:26:29Elle a fait un peu
00:26:31un effet loupe.
00:26:37Il y a véritablement
00:26:39un avant et un après
00:26:41mars 2020.
00:26:43La crise du Covid
00:26:45dans la mesure où
00:26:47les étudiants en particulier,
00:26:49les jeunes en général,
00:26:51ont été très sévèrement
00:26:53impactés par
00:26:55la crise du Covid.
00:26:57La privation de socialité
00:26:59chez les jeunes,
00:27:01donc chez les étudiants,
00:27:03c'est quelque chose de cataclysmique.
00:27:05C'est un moment où on construit
00:27:07sa vie relationnelle,
00:27:09où on en a vraiment besoin,
00:27:11où on a généralement beaucoup de relations,
00:27:13beaucoup de sorties,
00:27:15où on va beaucoup dans des lieux présentiels
00:27:17pour avoir des cours, des formations.
00:27:19Avoir supprimé tout ça,
00:27:21ça a eu un impact
00:27:23absolument énorme.
00:27:31Comme tout étudiant,
00:27:33je pense que mes études
00:27:35ont beaucoup d'influence sur ma santé mentale.
00:27:37Il y a beaucoup de stress qui est là,
00:27:39il y a beaucoup de doutes,
00:27:41il y a beaucoup aussi de doutes,
00:27:43non seulement pour les études actuelles,
00:27:45mais pour ce qu'elles me permettront de faire plus tard.
00:27:49Pendant la période de Covid,
00:27:51ce qui a été le plus dur pour moi,
00:27:53je pense que ça a été vraiment l'isolation.
00:27:55C'était vraiment le moment
00:27:57où on est seul avec soi-même.
00:27:59Donc mon premier confinement,
00:28:01je l'ai vécu,
00:28:03je l'ai vécu essentiellement dans ma chambre.
00:28:07Pendant cette période,
00:28:09je suis sorti,
00:28:11j'ai acheté beaucoup de Legos,
00:28:13je montais des Legos dans ma chambre,
00:28:15mais je ne suis pas sorti du tout à l'extérieur.
00:28:17Pas du tout, du tout, du tout.
00:28:19J'ai vraiment ressenti une grande solitude.
00:28:21Cet isolement, oui,
00:28:23a pesé sur ma santé mentale
00:28:25parce que ne sortant plus
00:28:27et prenant un peu moins soin de moi,
00:28:29j'avais les moments de doute,
00:28:31de se voir dans le miroir.
00:28:33Quand on n'est pas bien,
00:28:35on se voit encore plus laid,
00:28:37donc oui, cela a énormément joué
00:28:39sur la santé mentale de rester enfermé,
00:28:41de ne presque parler à personne
00:28:43parce que même si j'avais
00:28:45quelques amis à qui je pouvais envoyer des messages,
00:28:47ne sortant pas,
00:28:49je n'avais pas grand-chose à dire
00:28:51et on fait vite le tour
00:28:53d'une journée enfermée chez soi.
00:28:59En été 2021,
00:29:01suite au deuxième confinement,
00:29:03j'avais une amie,
00:29:05qui, elle,
00:29:07a vécu la crise de Covid
00:29:09encore beaucoup plus fort
00:29:11que n'importe qui, je pense,
00:29:13dans mon entourage
00:29:15et qui a préféré faire une bêtise
00:29:17et quitter ce monde.
00:29:19C'est une jolie façon de le dire,
00:29:21mais
00:29:23elle avait beaucoup de doute en elle.
00:29:25C'était une période qui était très difficile.
00:29:27C'est une période où elle s'est sentie très seule
00:29:29où je pense que
00:29:31aucun message virtuel n'aurait suffi
00:29:33à l'aider. Je pense qu'elle avait vraiment besoin
00:29:35que la vie soit comme elle l'était
00:29:37avant, de pouvoir sortir,
00:29:39de pouvoir changer ses idées.
00:29:41Mais elle est restée enfermée chez elle,
00:29:43ce qui lui a fait broyer encore plus du noir.
00:29:45C'est cette période-là qui l'a enfoncée, je pense.
00:29:49Les étudiants
00:29:51dont la socialité a été complètement
00:29:53supprimée, de même que la possibilité
00:29:55de se projeter dans leurs études,
00:29:57ont véritablement vécu ça
00:29:59comme un traumatisme.
00:30:01Un traumatisme, c'est-à-dire
00:30:03quelque chose qui effracte le psychisme
00:30:05et qui est susceptible d'attenter
00:30:07à la vie.
00:30:09En tout cas, tellement gravement
00:30:11à la qualité de la vie que ça devient
00:30:13difficile de se projeter dans une vie future.
00:30:15Et donc les étudiants, les jeunes,
00:30:17ont davantage
00:30:19que d'autres catégories de la population
00:30:21ces états de stress post-traumatique.
00:30:23C'est une chose qui est inédite
00:30:25dans l'histoire de l'humanité, l'état de stress post-traumatique.
00:30:27C'est quelque chose qui survient
00:30:29quand on risque de mourir soi-même,
00:30:31quand on voit quelqu'un mourir,
00:30:33quand on est pris dans un attentat.
00:30:35Là, on a des gens,
00:30:37toute une population,
00:30:39qui s'est retrouvée dans cet état traumatisé
00:30:41en raison
00:30:43des confinements qu'ils ont subis.
00:30:45Et on le sait parce qu'ils le disent.
00:30:47C'est-à-dire, quand on leur demande
00:30:49« Qu'est-ce qui,
00:30:51dans ce qui s'est passé dans cette crise, a été le plus traumatogène
00:30:53pour vous ? »
00:30:55Il y a la peur de mourir, il y a la peur que mes proches meurent
00:30:57et il y a le risque d'un prochain confinement.
00:31:05Je m'appelle Amina,
00:31:07j'ai 24 ans, je suis étudiante
00:31:09en sciences politiques cette année
00:31:11et je suis à l'université de Versailles, 50 ans.
00:31:15Ma santé mentale,
00:31:17en tant qu'étudiante, c'est la pression,
00:31:19le stress, l'angoisse
00:31:21de ne pas réussir et de ne pas
00:31:23arriver au but
00:31:25quand on s'est fixé.
00:31:27Il y a eu beaucoup de stress, beaucoup de pression
00:31:29les premières années,
00:31:31la seconde, il y a eu le Covid
00:31:33et là, c'était vraiment très compliqué
00:31:35de suivre
00:31:37parce que, du coup, on est isolé,
00:31:39on est seul, on n'est plus
00:31:41dans l'élément qu'on est en train de construire.
00:31:43Il y a eu le premier confinement, parce qu'on était
00:31:45terrorisés par le Covid
00:31:47et qu'on se rendait compte
00:31:49de ce qui se passait autour de nous et que le Covid,
00:31:51c'était grave et qu'il fallait s'isoler.
00:31:53Mais très rapidement, on était
00:31:55surchargés par beaucoup de travail
00:31:57à la maison, donc les profs
00:31:59nous mettaient la pression.
00:32:01En étant à la maison, je pense qu'ils
00:32:03pensaient qu'on ne faisait rien alors
00:32:05qu'en réalité, on avait une double charge de travail
00:32:07et donc ça, c'était très compliqué sur
00:32:09ma santé mentale, oui.
00:32:11J'ai eu un début du ulcère
00:32:13à l'estomac, j'ai passé
00:32:15parfois des semaines sans vouloir me
00:32:17lever, sans vouloir faire
00:32:19quoi que ce soit et avoir aussi
00:32:21la pression qu'il faut que je me lève et que je travaille
00:32:23pour réussir et on se dit aussi qu'on n'a
00:32:25pas besoin d'aide, que
00:32:27la seule solution, ce serait de réussir
00:32:29pour aller mieux et
00:32:31on met de côté tout ce qui nous arrive
00:32:33en ce moment même.
00:32:37Ils ont été beaucoup stigmatisés.
00:32:39Ils ont été désignés comme
00:32:41un des éléments
00:32:43majeurs de la circulation virale
00:32:45donc du coup, ça a eu un effet terrible
00:32:47sur leur santé mentale qui s'est
00:32:49très rapidement vue dans les données.
00:32:51On a vu exploser
00:32:53les troubles anxieux, les troubles dépressifs,
00:32:55les troubles du sommeil.
00:32:57Donc tous les gens, tous les jeunes, tous les étudiants
00:32:59qui se sont retrouvés
00:33:01avec des troubles mentaux de ce type
00:33:03en raison de cette période
00:33:05risquent
00:33:07d'en subir les conséquences pendant
00:33:09très longtemps, du simple
00:33:11point de vue de la santé mentale.
00:33:13Par ailleurs, pour beaucoup, leur cursus
00:33:15de formation a été très gravement
00:33:17altéré et ça, ça a eu un
00:33:19impact sur toute leur vie. Ça veut dire qu'en fait,
00:33:21on a engendré des conséquences pour
00:33:23plusieurs décennies. Donc on ne peut pas du tout considérer
00:33:25que le problème est terminé
00:33:27même malheureusement, on pourrait avoir
00:33:29tendance à considérer qu'il commence.
00:33:37Il y a forcément des appels qui restent
00:33:39à des degrés différents
00:33:41et nous
00:33:43à Nightline, on a des moyens aussi
00:33:45différents de pouvoir les extérioriser.
00:33:47Le premier niveau,
00:33:49c'est ces débriefings
00:33:51qu'on fait à chaud, tout de suite
00:33:53après avoir raccroché,
00:33:55ou dans les quelques minutes qui suivent
00:33:57et qu'on partage avec les autres bénévoles
00:33:59qui sont en permanence avec nous.
00:34:01Ça, c'est un peu le premier degré
00:34:03d'extériorisation.
00:34:05Ensuite, on a ce qu'on appelle les réunions
00:34:07de partage. C'est des réunions
00:34:09qui ont lieu une fois par mois
00:34:11et qui rassemblent
00:34:13entre 5 et 10 bénévoles
00:34:15et qui sont encadrées par une psychologue.
00:34:17Pendant ces
00:34:19réunions de partage,
00:34:21l'objectif, c'est justement
00:34:23de reparler de ces appels qui restent avec nous
00:34:25parce que les thématiques
00:34:27sont lourdes et qu'elles nous ont marquées,
00:34:29parce qu'on s'est sentis
00:34:31particulièrement en difficulté pendant l'appel
00:34:33pour X ou Y raisons.
00:34:35Ces réunions sont obligatoires
00:34:37pour tous les bénévoles qui prennent des appels
00:34:39et elles sont mensuelles.
00:34:41On n'a pas le droit de prendre
00:34:43d'appel pendant un mois si on n'a pas fait
00:34:45sa réunion le mois précédent.
00:34:49En parler à la famille et aux amis,
00:34:51c'est justement pas possible
00:34:53dans le cadre de Nightline parce que le rôle de bénévole
00:34:55est anonyme.
00:34:57Cet anonymat, il est au premier plan
00:34:59pour les appelants.
00:35:01Eux ne doivent pas dévoiler
00:35:03d'informations sur eux, mais en fait,
00:35:05elle est valable aussi pour nous, nous les bénévoles.
00:35:07On ne doit pas révéler
00:35:09à nos entourages qu'on est bénévole à Nightline.
00:35:11C'est une partie
00:35:13de notre quotidien qui reste secrète
00:35:15pour un tas de raisons.
00:35:17L'une d'entre elles, c'est de ne pas projeter
00:35:19d'identité sur ce bénévole
00:35:21qui peut nous répondre sur ce service
00:35:23d'écoute pour ne pas
00:35:25peut-être décourager certains de nos proches
00:35:27qui pourraient avoir envie d'appeler
00:35:29mais qui ne le font pas parce qu'ils
00:35:31auraient vent de notre engagement.
00:35:33Donc, pour ces raisons
00:35:35et pour encore plein d'autres,
00:35:37on ne peut pas partager justement
00:35:39ce qui se passe en permanence avec
00:35:41nos proches.
00:35:51C'est un micro-cause, mais si,
00:35:53c'est...
00:35:55Dans la vraie vie, ça ne peut pas se passer comme ça.
00:35:57En tout cas, pour moi, de mon côté,
00:35:59ça ne se passe pas comme ça. Ma journée,
00:36:01elle est faite, je fais les choses que j'ai à faire
00:36:03et je n'ai pas le temps de m'occuper de ma santé mentale.
00:36:05Parfois, on ne va pas forcément
00:36:07trouver la personne à qui parler
00:36:09ou sentir confiance.
00:36:11Moi, personnellement,
00:36:13j'ai vraiment beaucoup de mal à parler
00:36:15de moi, surtout quand ça ne va pas bien.
00:36:17C'est vraiment difficile de faire parvenir
00:36:19le message de « là, ça ne va pas, j'ai besoin d'aide ».
00:36:21C'est peut-être que la société
00:36:23a échoué à fournir suffisamment
00:36:25de ressources, comme vous le nommiez.
00:36:27S'il y avait justement plus de choses dans l'ambulatoire,
00:36:29ça permettrait de maintenir
00:36:31son rythme de vie, son emploi
00:36:33tout en ayant une place pour prendre soin de soi
00:36:35et que, finalement, ça ne soit pas de l'ordre du sacrifice
00:36:37de prendre soin de soi.
00:36:39C'est super dur de faire ça à l'extérieur.
00:36:41Moi, j'ai tenté.
00:36:43Ça fait trois ou quatre ans que je tente
00:36:45de faire ça qu'à l'extérieur
00:36:47et je n'y arrive pas.
00:36:49En tout cas, en psychiatrie,
00:36:51c'est bouché de chez bouché, complètement.
00:36:53Donc, il y a cette réalité-là aussi.
00:36:55Ce n'est pas que
00:36:57le bon vouloir de la personne.
00:36:59Déjà qu'on est fatigué, émotionnellement parlant
00:37:01et qu'on n'a pas spécialement envie de s'en sortir
00:37:03parce qu'on est dans une boucle.
00:37:05Mais en plus de ça, si tout est bouché
00:37:07de tous les côtés, ce n'est pas possible.
00:37:15C'est un sentiment très particulier.
00:37:17Ça fait vraiment très bizarre
00:37:19parce que je pense que ce n'est pas tous les jours
00:37:21qu'on va chez quelqu'un et qu'on dit
00:37:23« Ouais, moi, en fait,
00:37:25j'ai envie de mourir »
00:37:27ou « Je n'ai pas l'énergie pour aller faire mes courses,
00:37:29de me lever du lit, etc. »
00:37:31et que l'autre dit « Ouais, moi aussi, franchement. »
00:37:33Ce sont vraiment des sujets
00:37:35qui sont hyper, hyper,
00:37:37pas hyper, mais je dirais
00:37:39qu'on n'entend pas très souvent dans la vie de tous les jours.
00:37:41Et ici, en fait,
00:37:43on arrive vraiment à en parler entre patients
00:37:45et c'est complètement normal.
00:37:47Moi et ma génération,
00:37:49on se pose aussi énormément la question
00:37:51de « Qu'est-ce qui va être le futur ? »
00:37:53Du coup, on est pleinement dans nos études,
00:37:55on se dit avec le réchauffement climatique,
00:37:57on ne sait même pas comment le monde va être
00:37:59dans 30, 50 ans.
00:38:01Et ça crée vraiment
00:38:03une grosse, grosse anxiété.
00:38:05Ça crée vraiment une crise existentielle
00:38:07de se dire « Là, je suis en train
00:38:09de faire des études.
00:38:11Est-ce que ça vaut vraiment le coup ? »
00:38:13L'anxiété, elle est là.
00:38:19Quand on dit éco-anxiété, on a tout de suite tendance
00:38:21à considérer ça comme un trouble anxieux.
00:38:23Et ça risque d'avoir cette conséquence
00:38:25On va avoir tendance à considérer que si les jeunes sont éco-anxieux,
00:38:27c'est parce qu'ils ont des problématiques qui leur sont propres.
00:38:29Non.
00:38:31Les jeunes, et toute l'humanité,
00:38:33développent des émotions
00:38:35par rapport à ce risque
00:38:37qui sont légitimes,
00:38:39qui sont sains,
00:38:41et qui, lorsqu'ils ne deviennent pas
00:38:43inhibants parce qu'ils sont trop intenses,
00:38:45génèrent de l'action,
00:38:47de la colère, de la révolte.
00:38:49Du coup, ce n'est même plus de l'anxiété, c'est de la peur.
00:38:51Parce que l'anxiété, c'est quelque chose
00:38:53qui est là par rapport à un danger futur un peu incertain.
00:38:55Mais là, on est dans un danger concret
00:38:57qui est actuel.
00:38:59C'est de la peur.
00:39:01Quand on n'a pas peur face à un danger,
00:39:03ce n'est pas qu'on est courageux, c'est qu'on est inconscient.
00:39:11Je m'appelle Zinedine, j'ai 24 ans.
00:39:13Je fais actuellement un Master 2 de droit
00:39:15à l'Université Paris-Nanterre.
00:39:19On va dire que je vais très mal
00:39:21parce que je suis épuisé par
00:39:23toutes ces années d'études,
00:39:25et c'est extrêmement difficile à vivre.
00:39:27Tous les jours, je me rends à la fac
00:39:29la boule au ventre,
00:39:31je vais à mon alternance en cabinet d'avocat
00:39:33la boule au ventre.
00:39:37Les études, ça apporte personnellement,
00:39:39mais il y a quand même une forme de déception
00:39:41au bout du tunnel parce que
00:39:43il n'y a pas de transition.
00:39:45C'est-à-dire qu'on finit l'université,
00:39:47ensuite on est balancé dans le grand bain,
00:39:49on se rend compte que ce n'est pas vraiment
00:39:51ce qu'on nous a présenté au début.
00:39:53Et je pense personnellement que je ne suis pas fait
00:39:55pour le monde dans lequel
00:39:57on me balance
00:39:59aujourd'hui.
00:40:03Il y a un contexte qui est très particulier,
00:40:05il y a eu la crise Covid,
00:40:07il y a eu même le mouvement
00:40:09des gilets jaunes, on pourrait presque l'inclure,
00:40:11l'inflation, la guerre,
00:40:13toutes ces choses-là qui sont très difficiles à vivre.
00:40:15Je pense que de manière plus générale,
00:40:17ça pèse sur toute la société en réalité,
00:40:19mais les étudiants,
00:40:21ils ont une difficulté supplémentaire,
00:40:23c'est qu'eux, ils sont déjà,
00:40:25pour certains, dans une grande précarité,
00:40:27et ils doivent, en plus de cela,
00:40:29continuer à rester motivés pendant leurs études,
00:40:31et je pense que c'est ça aussi le plus difficile,
00:40:33rester motivés
00:40:35alors que l'avenir est
00:40:37totalement incertain en réalité.
00:40:39C'est plus dur de se projeter aujourd'hui,
00:40:41peut-être qu'il y a une dizaine d'années,
00:40:43parce que les problématiques sont beaucoup plus
00:40:45mises en avant, le réchauffement climatique
00:40:47c'est devenu un sujet de tous les jours,
00:40:49les problématiques économiques
00:40:51c'est devenu un sujet de tous les jours,
00:40:53le chômage, les violences sexistes
00:40:55et sexuelles, il y a
00:40:57un climat ambiant qui
00:40:59est probablement plus anxiogène
00:41:01aujourd'hui pour les jeunes,
00:41:03et qui est accentué par
00:41:05la pression des examens, l'isolement de la famille,
00:41:07faire des études, c'est bien,
00:41:09mais on va aussi avoir besoin d'aller plus loin
00:41:11dans comment est-ce qu'on se sent bien,
00:41:13beaucoup plus que gagner un gros salaire,
00:41:15ça va vraiment être comment est-ce que je me sens bien
00:41:17dans mes études pour aller bien dans ma vie professionnelle,
00:41:19et on s'est rendu compte que de plus en plus
00:41:21les étudiants et les étudiantes avaient envie
00:41:23d'avoir un bon cadre de vie
00:41:25avant d'avoir un cadre de vie luxueux.
00:41:27Les sociétés sont éminemment
00:41:29régulières, fiables,
00:41:31structurées, prévisibles pour leurs membres.
00:41:33Donc, bien évidemment, quand on s'engage
00:41:35par exemple dans des études,
00:41:37on s'attend à ce que le métier
00:41:39auquel on se forme existe encore dans 5 ans,
00:41:41dans 10 ans.
00:41:43Quand on projette une famille, on s'attend
00:41:45à ce qu'il y ait encore une planète dans 15 ans
00:41:47pour les enfants qu'on va faire. Et ce sont des régularités
00:41:49extrêmement puissantes, extrêmement structurantes,
00:41:51non seulement de la société,
00:41:53mais aussi des psychismes individuels,
00:41:55et tout ceci a été
00:41:57disloqué. Et donc,
00:41:59les jeunes sont pris dans ça aujourd'hui
00:42:01à une époque
00:42:03de leur vie où leur psychisme,
00:42:05leur fonctionnement relationnel
00:42:07et leur implication dans la société sont encore en construction.
00:42:09Donc, il y a cette dimension
00:42:11de ça va se construire sur quelque chose
00:42:13de pas stable et de pas prévisible.
00:42:15Et là, c'est la base
00:42:17des graves, graves, graves troubles mentaux.
00:42:25J'ai 21 ans
00:42:27et je suis actuellement en deuxième année
00:42:29de BUT carrière sociale,
00:42:31parcours animation sociale et socioculturelle
00:42:33à l'IUT de Tourcoing.
00:42:36Alors, la santé mentale,
00:42:38c'est compliqué
00:42:40selon les jours.
00:42:42Il y a déjà tout ce qui est vie quotidienne,
00:42:44donc c'est-à-dire quand on est étudiant
00:42:46et précaire, savoir
00:42:48comment se loger,
00:42:50payer le loyer, payer tout ce qu'il y a à côté,
00:42:52les frais quotidiens comme
00:42:54tout ce qui est transport,
00:42:56la nourriture, les courses, etc.
00:42:58Plus, après, quand on n'a pas de soutien
00:43:02de sa famille proche comme les parents,
00:43:04c'est vrai que c'est compliqué
00:43:06à gérer au quotidien.
00:43:10Avec mes parents, ce qui s'est passé,
00:43:12c'est que je suis LGBT
00:43:14et eux,
00:43:16ils ont
00:43:18pas bien pris
00:43:20la nouvelle.
00:43:22Et du coup, ça fait trois ans qu'à cause de ça
00:43:24que je ne les vois plus
00:43:26et que j'ai pas le droit de voir mon petit frère.
00:43:30J'avais aucun revenu
00:43:32et j'avais pas le droit à la bourse
00:43:34donc j'ai dû demander une pension alimentaire
00:43:36même si ça a été long.
00:43:38Parce que vivre
00:43:40quand on est étudiant,
00:43:42c'est vrai que c'est compliqué
00:43:44sans ressources financières.
00:43:46Et c'est vrai que quand
00:43:48on peut pas, en étant étudiant,
00:43:50être suivi par un psychologue parce que ça coûte cher
00:43:52et qu'on voit les délais
00:43:54pour
00:43:56les bureaux d'aide ou pour des fois
00:43:58les psychiatres qui peuvent être remboursés
00:44:00par la sécurité sociale,
00:44:02c'est compliqué.
00:44:04Des fois, on a tendance plus à
00:44:06ne pas être suivi
00:44:08et à laisser tomber parce que
00:44:10c'est épuisant
00:44:12en plus des études, de devoir chercher,
00:44:14de devoir s'investir encore
00:44:16sur un autre plan.
00:44:18C'est décourageant, c'est du bruit.
00:44:24En France, on a
00:44:26des vraies difficultés
00:44:28au cours de la santé mentale
00:44:30en ce sens que
00:44:32dans les centres
00:44:34médico-psychologiques, il y a des listes
00:44:36d'attentes qui sont importantes.
00:44:38Et par ailleurs, les services de santé
00:44:40universitaires ne sont pas assez
00:44:42pourvus, notamment en
00:44:44psychologues ou en professionnels
00:44:46de la psychiatrie.
00:44:48Les files d'attente aujourd'hui, pour les jeunes,
00:44:50que ce soit en ville,
00:44:52que ce soit à l'université,
00:44:54dans les services universitaires, que ce soit à l'école,
00:44:56les files d'attente pour accéder à des soins psychiques,
00:44:58elles sont lunaires.
00:45:00Lunaire, c'est 6 mois.
00:45:02Dans certains endroits en France, très défavorisés,
00:45:04c'est 18 mois.
00:45:06Autant dire que ça n'a aucun sens.
00:45:08Quand on a un problème
00:45:10de santé mentale sérieux,
00:45:12même pas forcément sévère,
00:45:14mais déjà sérieux, c'est tout de suite maintenant.
00:45:26Ça va, patron ?
00:45:28Ça va, ça va.
00:45:30On dit quoi ?
00:45:32Rien.
00:45:34Rien ?
00:45:36OK.
00:45:38Allez.
00:45:40T'as pas encore rangé ?
00:45:42Et quoi ?
00:45:44T'as la flemme, c'est ça ?
00:45:46Non, je faisais une sieste.
00:45:48Allez, à tout à l'heure.
00:45:56Ça va ?
00:45:58Oui.
00:46:00Qu'est-ce qu'on a fait aujourd'hui ?
00:46:02Pas grand-chose.
00:46:04Comment ça, pas grand-chose ?
00:46:06T'as pas fait d'activité aujourd'hui ?
00:46:08T'as pas été en activité ?
00:46:10Fin de journée.
00:46:12Fin de journée ?
00:46:14Oui.
00:46:16Il est 16h ?
00:46:18Oui.
00:46:20Il est 16h ?
00:46:22Oui.
00:46:24Il est 16h ?
00:46:26Oui, mais je vais voir mon père d'abord.
00:46:28Ah, d'accord.
00:46:30Papa d'abord, et puis l'activité après.
00:46:32Oui.
00:46:36Ça va.
00:46:38Allez, à tout à l'heure.
00:46:54On va rentrer.
00:47:08Ça va, maman ?
00:47:24Donc, la mademoiselle, elle dort.
00:47:26Mais il faut quand même vérifier qu'elle respire.
00:47:54Je m'appelle Oumy, j'ai 25 ans,
00:47:56je suis sénégalaise.
00:47:58Je suis venue en France après mon bac en 2017.
00:48:00Je suis partie à Tours
00:48:02où j'ai fait des études de droit.
00:48:04Et là, je suis revenue sur Paris pour continuer mes études.
00:48:08Ma première année à Tours
00:48:10a été un peu éprouvante
00:48:12parce que je ne connaissais pas la ville.
00:48:14C'était la première fois que j'ai commencé à vivre seule,
00:48:16à aller faire mes courses toute seule,
00:48:18à payer mon loyer.
00:48:20Et entre l'université et ma vie sociale,
00:48:22j'étais très vite fatiguée.
00:48:24Et il a fallu que je me retrouve aux urgences,
00:48:26que le médecin me demande ce que je faisais dans la vie,
00:48:28que je lui dise que je suis étudiante en droit,
00:48:30que je lui dise clairement
00:48:32que je n'avais pas envie de me réveiller.
00:48:34Que là, je me rends compte
00:48:36de ce qui est en train de devenir ma vie.
00:48:40Je n'avais pas envie de me réveiller
00:48:42parce que c'était un peu compliqué
00:48:44entre la fac, entre ma vie sociale.
00:48:46J'avais l'impression d'être sur tous les fronts
00:48:48et que je n'avais pas de résultat.
00:48:50J'ai pris des médicaments et j'ai pris 20 kilos.
00:48:52Et ça ne m'a pas aidée.
00:48:54Ça ne m'a pas aidée
00:48:56parce que derrière,
00:48:58on perd confiance en soi.
00:49:00On se trouve plus belle.
00:49:02Mes habits ne m'allaient plus.
00:49:04Tout le monde me disait que j'ai pris du poids,
00:49:06comme si je ne me voyais pas devant la glace chaque matin.
00:49:10Si un Français doit être bien,
00:49:12l'étudiant étranger doit être excellent pour s'en sortir.
00:49:16Et on est constamment sous pression
00:49:18donc il va falloir allier.
00:49:20Il va falloir réussir ses études
00:49:22parce que si on ne réussit pas,
00:49:24la préfecture ne va pas renouveler son titre de séjour.
00:49:26Et derrière, il faut avoir une vie sociale.
00:49:28Il faut s'en sortir,
00:49:30il faut trouver un logement décent,
00:49:32il faut manger à sa faim.
00:49:34Il faut vivre tout simplement,
00:49:36comme j'ai l'habitude de dire.
00:49:38Alors que vivre a un coût en France.
00:49:40Vivre, ce n'est pas évident.
00:49:42Parce qu'il y a vivre et vivre.
00:49:44Il ne suffit pas de respirer pour dire qu'on vit.
00:49:46Quand on voit qu'on ne va pas bien,
00:49:48on n'est pas seul.
00:49:50Ça c'est un point important.
00:49:52On a certes dit qu'il y avait des difficultés,
00:49:54qu'il y avait des listes d'attentes
00:49:56et pour autant, on s'organise,
00:49:58les professionnels sont mobilisés
00:50:00et donc les étudiants ne sont pas seuls.
00:50:02Il y a énormément d'initiatives qui ont été mises en place
00:50:04en paire à paire,
00:50:06des étudiants et des étudiantes pour les étudiants et les étudiantes.
00:50:08Et c'est vers ça que nous,
00:50:10on pense qu'il faut aussi
00:50:12encourager ces initiatives-là,
00:50:14de se mobiliser, d'aller dans la bonne direction
00:50:16puisque l'État et l'université ne peuvent pas
00:50:18combler tous les manques.
00:50:20Ça coûte énormément d'argent, mais les étudiantes et les étudiants
00:50:22ont envie de se mobiliser,
00:50:24d'aider et de faire au mieux au quotidien
00:50:26et parfois nuit et jour
00:50:28pour certaines activités.
00:50:36Tu t'imaginais que ça se passerait comment ?
00:50:40C'est quelque chose qui te dérange ?
00:50:44Je t'en prie.
00:50:46N'hésite pas à rappeler si t'en as envie.
00:50:50Je t'en prie.
00:50:52Passe une bonne soirée.
00:50:54Merci. Au revoir.
00:51:02Tu veux débriefer du coup ?
00:51:04Yes.
00:51:06Du coup, ça a duré deux heures,
00:51:08donc le temps maximal.
00:51:10C'était...
00:51:12Il y a eu plein de thématiques
00:51:14qui ont été abordées.
00:51:16Il y a eu la dépression,
00:51:18les relations familiales
00:51:20suite à un coming-out
00:51:24et le regard des gens
00:51:26par rapport à la dépression
00:51:28dans la thématique.
00:51:30Et qu'en fait,
00:51:32la personne ne pouvait pas...
00:51:34Elle ne se sentait pas légitime
00:51:36de dire à ses proches
00:51:38qu'elle avait une dépression.
00:51:40J'ai appris qu'il y a des gens
00:51:42qui ne sont pas encore...
00:51:44Qui n'ont toujours pas conscience
00:51:46des enjeux de santé mentale
00:51:48et que oui, ça existait que de nous.
00:51:50C'est pas des fous.
00:51:52Ça m'a fait vachement de peine
00:51:54parce que c'était une personne
00:51:56qui avait une histoire assez lourde
00:51:58par la réaction de sa famille
00:52:00face à son coming-out.
00:52:02C'était pas...
00:52:04J'étais un peu triste pour cette personne.
00:52:06Mais à la fin,
00:52:08elle était très contente d'avoir pu parler.
00:52:10C'était chouette.
00:52:12Elle m'a dit qu'elle comptait
00:52:14recontacter Nightline
00:52:16parce que ça l'avait vraiment aidée.
00:52:18Donc ça fait plaisir.
00:52:20Parfois, on a l'impression
00:52:22que les jeunes ne veulent pas s'engager
00:52:24ou ne font rien pour la société.
00:52:26On entend beaucoup ce discours.
00:52:28Nous, on voit plutôt l'inverse.
00:52:30Une vraie volonté de prendre acte
00:52:32que tout ne va pas bien
00:52:34mais on n'a pas envie d'être
00:52:36plus loin chez les étudiants,
00:52:38de se dire qu'on est acteur et actrice.
00:52:40On se rend compte qu'il y a besoin d'agir
00:52:42et on agit.
00:52:44Les étudiants, de manière générale,
00:52:46même s'ils sont en difficulté pour eux-mêmes
00:52:48dans leur vie actuelle,
00:52:50ne sont pas dans une vision
00:52:52d'éclinisme et catastrophique du monde.
00:52:54Ce sont des jeunes qui restent
00:52:56très engagés dans un avenir
00:52:58sur lequel ils ont le sentiment
00:53:00d'avoir les moyens d'intervenir
00:53:02du fait de leur formation,
00:53:04du fait de leur vitalité.
00:53:06Et je pense que
00:53:08cette vision d'éclinisme
00:53:10est assez loin.
00:53:12C'est plus une vision de leurs parents
00:53:14ou de leurs grands-parents peut-être
00:53:16mais c'est assez loin de leur préoccupation du moment.
00:53:18Les jeunes sont vraiment dans une envie d'agir
00:53:20et ils agissent déjà.
00:53:22On n'a plus l'idée de
00:53:24on fera plus tard
00:53:26mais vraiment, on sait faire,
00:53:28on a fait des choses.
00:53:30Maintenant, il faut aussi nous laisser la place.
00:53:32D'avoir une place qui leur soit considérée
00:53:34et qu'on ne leur dise pas
00:53:36vous ferez plus tard
00:53:38mais ils peuvent faire maintenant
00:53:40et ils ont envie de faire maintenant.
00:53:54Et voilà, c'était 20 ans,
00:53:56le plus bel âge, un documentaire
00:53:58réalisé par Charlotte Lavoca.
00:54:00Et juste à vos côtés, nous avons invité
00:54:02le docteur Patrick Landman, bonjour.
00:54:04Vous êtes pédopsychiatre
00:54:06et si on vous a réunis
00:54:08aujourd'hui tous les deux dans la zone d'éducation
00:54:10documentaire, c'est pour répondre
00:54:12aux questions de la 3ème D du collège
00:54:14Jean-Jacques Rousseau du Pré-Saint-Gervais.
00:54:16Bonjour les élèves.
00:54:18Ce film, vous l'avez vu, vous l'avez analysé,
00:54:20vous l'avez décortiqué. Je sais que vous avez
00:54:22plein de questions à poser
00:54:24à nos invités. Mais juste avant,
00:54:26je voulais vous demander. Le Premier ministre
00:54:28a fait de la santé mentale
00:54:30la grande cause nationale
00:54:32de l'année 2025.
00:54:34C'est quoi la santé mentale ?
00:54:36Alix, dis-moi.
00:54:38C'est ce qu'on ressent
00:54:40dans nos têtes
00:54:42ou nos problèmes
00:54:44ou en général, des choses comme ça.
00:54:46Qu'est-ce que vous avez ressenti quand vous avez vu ce film ?
00:54:48Moi, j'ai été un peu
00:54:50choqué de voir que les étudiants en droit
00:54:52étaient aussi
00:54:54bouleversés et que c'était
00:54:56aussi dur d'être
00:54:58un étudiant et qu'ils n'avaient
00:55:00pas beaucoup d'aide
00:55:02et que vraiment,
00:55:04ils avaient du mal
00:55:06à continuer les études.
00:55:08Ça peut faire peur pour plus tard
00:55:10comme on peut
00:55:12croire qu'on va être comme eux.
00:55:14Est-ce que vous sauriez me dire ce que c'est que l'anxiété ?
00:55:16C'est quelque chose
00:55:18qu'on a peur que ça arrive.
00:55:20Par exemple, un exposé à l'oral en cours,
00:55:22on appréhende un petit peu.
00:55:24Ahmed, tu t'es déjà senti stressé,
00:55:26anxieux ?
00:55:28Oui, par rapport à des exposés
00:55:30pendant les contrôles.
00:55:32Parfois, je révise
00:55:34des heures, mais quand même, je stresse.
00:55:36Oui, c'est le principe.
00:55:38Plus on révise, plus on est stressé.
00:55:40Je vous propose qu'on passe à vos questions
00:55:42et on va commencer justement par toi, Ahmed.
00:55:44Comment vous avez eu l'idée de parler
00:55:46sur la santé mentale
00:55:48et est-ce qu'il y avait-il un lien avec
00:55:50votre vie ? Le sujet de la santé mentale,
00:55:52ça n'existait pas du tout.
00:55:54Quand j'étais au collège à votre place
00:55:56il y a quelques années, il y a très longtemps même,
00:55:58il y a plus de 20 ans,
00:56:00c'était pas du tout un sujet.
00:56:02La santé mentale, moi, j'en ai entendu parler,
00:56:04un peu comme vous, au moment du Covid.
00:56:06Et en repensant
00:56:08un petit peu à mes années collège,
00:56:10moi, oui, effectivement, c'est vrai qu'il y a des
00:56:12moments où je me sentais pas toujours très bien,
00:56:14où j'aurais aimé avoir une écoute,
00:56:16où j'aurais aimé qu'on soit un peu plus décomplexés
00:56:18par rapport à ce sujet, mais je me rappelle
00:56:20de camarades, de petits copains, de copines
00:56:22qui étaient un peu isolées
00:56:24et je pense qu'il y avait peut-être
00:56:26un accompagnement
00:56:28qui aurait été important
00:56:30et nécessaire à ce moment-là
00:56:32pour ces camarades.
00:56:34Et la santé mentale, il faut se dire surtout
00:56:36qu'on en a tous une.
00:56:38La santé mentale comme la santé physique,
00:56:40on a tous une santé mentale. Elle n'est pas forcément bonne
00:56:42tous les jours, mais en tout cas on en a tous une.
00:56:44Donc il faut s'en préoccuper.
00:56:46Tous ces personnages qu'on retrouve tout au long du documentaire,
00:56:48comment vous les avez rencontrés,
00:56:50comment vous les avez castés ?
00:56:52J'ai contacté plusieurs comptes Instagram notamment,
00:56:54puisqu'aujourd'hui il se passe beaucoup de choses
00:56:56sur les réseaux sociaux, je ne vous l'apprends pas.
00:56:58J'ai notamment contacté un compte Instagram
00:57:00qui parle de psychophobie,
00:57:02de santé mentale
00:57:04chez les jeunes.
00:57:06Et il y a cette jeune femme qui tient ce compte
00:57:08qui a accepté de passer un appel à témoins,
00:57:10j'ai eu pas mal de retours.
00:57:12Ils ont donc accepté, il et elle, assez facilement
00:57:14de se livrer.
00:57:16C'est très fort, tous ces témoignages.
00:57:18Ils sont face caméra, ils s'assoient devant
00:57:20Charlotte l'avocat et
00:57:22ils livrent leur expérience qui est difficile,
00:57:24vous l'avez compris.
00:57:26Il faut être sacrément
00:57:28courageux pour le faire.
00:57:30Et ça s'est fait assez naturellement.
00:57:32Ils ont traversé des épisodes difficiles,
00:57:34mais ils ont en tout cas assez bien pour pouvoir en parler.
00:57:36On a ensuite,
00:57:38quand ils ont accepté
00:57:40d'échanger par téléphone, on s'est parlé.
00:57:42Et moi je leur ai dit, effectivement c'est important
00:57:44pour moi qu'il y ait un témoignage face caméra
00:57:46et pas flouté.
00:57:48Ce qui aurait pu être un choix aussi, mais
00:57:50je pense que le fait de témoigner
00:57:52les yeux dans les yeux, c'est aussi très impactant.
00:57:54Et ça vous parle directement à vous.
00:57:56On continue avec Cyrine.
00:57:58J'ai une question pour Patrick Landman.
00:58:00Si les jeunes qui témoignent dans le film
00:58:02avaient raconté leurs problèmes plus tôt,
00:58:04en seraient-ils arrivés à ce stade ?
00:58:06Oui, c'est
00:58:08une question très importante que tu poses.
00:58:10C'est-à-dire à quel moment
00:58:12il faut consulter,
00:58:14à quel moment il faut dépister
00:58:16avant que la catastrophe n'arrive.
00:58:18Parfois, malheureusement, il y a des catastrophes.
00:58:20Plus tôt on a dépisté
00:58:22les choses, plus le pronostic,
00:58:24comme on dit en médecine, est favorable.
00:58:26Ça c'est sûr. Mais pas toujours.
00:58:28Pas toujours. Malheureusement,
00:58:30il y a des cas où, même dépistés tôt,
00:58:32les choses ne s'arrangent pas facilement.
00:58:34Mais globalement, il faut rester optimiste.
00:58:36Avec un dispositif,
00:58:38avec un réseau
00:58:40de soins, avec un dispositif
00:58:42solide, on arrive à tirer
00:58:44d'affaires énormément de gens.
00:58:46Moi, j'en ai l'expérience, ça fait 44 ans
00:58:48que j'exerce ce métier, donc j'ai vu
00:58:50les évolutions. Et je peux vous dire
00:58:52qu'il faut quand même rester optimiste.
00:58:54Et je suis très content que
00:58:56notre Premier ministre ait considéré que c'était
00:58:58une priorité, donc votre documentaire
00:59:00est particulièrement, tombe absolument
00:59:02à pic. Espérons que,
00:59:04comme on dit, ce ne soient pas
00:59:06des promesses en l'air et qu'il y ait
00:59:08pas simplement un effet d'annonce, mais qu'il y ait
00:59:10des choses qui suivent.
00:59:12On continue avec toi, Mohamed.
00:59:14J'ai une question pour Charlotte, l'avocat.
00:59:16Les étudiants qui écoutent sur la Nightline,
00:59:18pourquoi font-ils ça ? Et est-ce que cela peut avoir
00:59:20des répercussions sur eux ?
00:59:22Le fonctionnement de Nightline, c'est le soutien par
00:59:24pair. Donc,
00:59:26ce sont des étudiants qui vont aider
00:59:28leurs camarades parce qu'ils ont une expérience en commun,
00:59:30parce qu'ils vivent aussi la vie
00:59:32universitaire, avec tous ces enjeux de santé
00:59:34mentale, c'est des sujets qui les concernent directement.
00:59:36Et oui,
00:59:38bien sûr, ça peut avoir un impact sur eux, c'est pour ça qu'ils sont suivis,
00:59:40que les
00:59:42permanences aussi sont limitées,
00:59:44et qu'une fois par mois,
00:59:46ils ont des groupes de parole pour partager
00:59:48leur expérience, parce qu'au fil des soirées,
00:59:50effectivement, c'est pas anodin, ils reçoivent
00:59:52beaucoup de choses, beaucoup de témoignages très
00:59:54durs. Nous, on n'a pas entendu directement
00:59:56les témoignages parce qu'ils sont anonymes,
00:59:58mais on a assisté à des débriefs,
01:00:00donc on savait à peu près la teneur
01:00:02des sujets, et des sujets
01:00:04très graves, très éprouvants,
01:00:06et effectivement, tu rentres pas chez toi
01:00:08à 3h du matin d'une permanence comme ça,
01:00:10c'est pas comme si t'étais parti faire la fête
01:00:12avec des copains, ça a un impact sur leur propre
01:00:14santé mentale, et c'est important
01:00:16qu'ils soient dans de bonnes dispositions, qu'ils aient
01:00:18une bonne santé mentale, pour recevoir la
01:00:20parole des personnes qui
01:00:22ont besoin d'aide sur cette ligne.
01:00:24J'ai une question pour Patrick Landman.
01:00:26Pourquoi 75% des
01:00:28pathologies psychiatriques apparaissent-elles
01:00:30entre 15 et 25 ans ?
01:00:32Pour l'instant, il n'y a pas d'explication scientifique
01:00:34de cela. Il y a une explication,
01:00:36je dirais, il y a des hypothèses.
01:00:40C'est un âge où il y a
01:00:42des transformations importantes,
01:00:44biologiques,
01:00:46en particulier aussi du cerveau,
01:00:48avec une perte de la matière
01:00:50cérébrale,
01:00:52qui est tout à fait normale, physiologique,
01:00:54et c'est un âge
01:00:56où on découvre,
01:00:58je dirais, en général,
01:01:00les difficultés des relations
01:01:02entre les hommes et les femmes,
01:01:04entre les hommes et les hommes, entre les femmes et les femmes,
01:01:06tout ce qui concerne la sexualité
01:01:08non plus
01:01:10infantile, mais la sexualité
01:01:12adulte. C'est
01:01:14une période où
01:01:16on a un problème de séparation
01:01:18avec les parents, en général.
01:01:20C'est une période où
01:01:22on a aussi, je dirais,
01:01:24des choix professionnels
01:01:26à faire, des choix personnels
01:01:28et des choix professionnels. Donc il y a
01:01:30une sorte de condensation
01:01:32de cumul
01:01:34de facteurs de risque.
01:01:36Et du coup,
01:01:38il est évident qu'un certain nombre
01:01:40de personnes, pour des raisons
01:01:42d'ailleurs pour l'instant non expliquées
01:01:44complètement, peuvent être des raisons
01:01:46génétiques, une vulnérabilité
01:01:48familiale, pour des raisons
01:01:50sociales, avec des enfances
01:01:52traumatisantes ou des enfances très
01:01:54pénibles, ou tout simplement
01:01:56l'impossibilité de répondre
01:01:58aux exigences de la société,
01:02:00et des raisons psychologiques,
01:02:02des ruptures sentimentales,
01:02:04des ruptures d'amitié, tout ça
01:02:06fait que
01:02:08c'est une période de vulnérabilité particulière.
01:02:10Alors est-ce qu'on peut devenir
01:02:12dépressif à force d'écouter des gens dépressifs ?
01:02:14Oui.
01:02:16Oui, c'est un
01:02:18risque, c'est un métier qui est risqué.
01:02:20Il faut,
01:02:22je dirais, se former.
01:02:24Oui,
01:02:26c'est risqué.
01:02:28Mais c'est passionnant.
01:02:30C'est passionnant d'aider les gens.
01:02:32C'est passionnant de les écouter.
01:02:34Et depuis, je dirais,
01:02:36la nuit des temps, comme on dit,
01:02:38on sait que la parole
01:02:40peut soigner.
01:02:42Ça existe dans toutes les cultures,
01:02:44on sait que la parole peut soigner.
01:02:46Mais ce qui soigne aussi, c'est le lien.
01:02:48Et dans ce documentaire,
01:02:50on voit les gens qui sont
01:02:52sans lien,
01:02:54ou en tout cas avec des difficultés
01:02:56à établir des liens durables.
01:02:58Or, quand on établit
01:03:00un lien thérapeutique avec quelqu'un,
01:03:02on sait
01:03:04qu'on a des chances de le soigner.
01:03:06Et en particulier quand il est déprimé.
01:03:08Il y a évidemment d'autres méthodes,
01:03:10en particulier les médicaments,
01:03:12parce que la dépression, elle est parfois biologique,
01:03:14elle est parfois psychologique,
01:03:16elle est parfois, je dirais,
01:03:18sociale, mais
01:03:20elle est en général les trois à la fois.
01:03:22Et le lien, c'est très important.
01:03:24Et en plus, avoir soi-même
01:03:26en quelque sorte
01:03:28nettoyer ses propres
01:03:30difficultés le plus possible,
01:03:32de façon à ne pas projeter
01:03:34sur l'autre immédiatement ce que vous,
01:03:36vous pouvez ressentir, ou ce que vous avez
01:03:38ressenti. Et ça, c'est important.
01:03:40C'est-à-dire qu'il faut écouter les gens
01:03:42individuellement, singulièrement,
01:03:44sans immédiatement... On n'est pas comme
01:03:46en médecine où, je dirais, quelqu'un a
01:03:48un cancer du côlon, il faut
01:03:50tout de suite faire le diagnostic et faire ce qu'il faut.
01:03:52Là, il faut être
01:03:54à l'écoute de la singularité de chacun.
01:03:56Chacun a une histoire différente,
01:03:58même s'ils ont les mêmes
01:04:00symptômes en apparence, ils ont
01:04:02d'autres raisons, ils ont des raisons
01:04:04différentes d'avoir ces symptômes.
01:04:06Je ne sais pas si c'est clair.
01:04:08C'est super intéressant. C'est intéressant, non ?
01:04:10Ça vous parle ?
01:04:12On continue avec Nour.
01:04:14J'ai une question pour vous, Patrick Longman.
01:04:16Qu'est-ce qui fait la différence entre la dépression
01:04:18et la flemme ?
01:04:20La dépression, c'est considéré
01:04:22comme une pathologie.
01:04:24Mais dans la dépression,
01:04:26il y a une fatigue.
01:04:28Il y a une fatigue mentale
01:04:30et parfois une fatigue physique qui fait
01:04:32qu'on perd l'initiative,
01:04:34on perd l'envie, on perd le désir
01:04:36de faire un certain nombre de choses
01:04:38et du coup, ça peut être considéré
01:04:40comme quelqu'un qui a de la flemme,
01:04:42qui ne veut pas. En fait, ce n'est pas quelqu'un qui ne veut pas,
01:04:44c'est quelqu'un qui ne peut pas, en général.
01:04:46Il ne peut pas et ça ne sert à rien
01:04:48de le culpabiliser.
01:04:50Il faut effectivement soit lui donner des médicaments
01:04:52quand c'est vraiment très grave,
01:04:54ce que je fais, soit lui permettre
01:04:56de lui dire... Vous savez ce que je dis
01:04:58aux gens ? Je dis, écoutez,
01:05:00vous avez des problèmes,
01:05:02les médicaments, ça peut être une solution
01:05:04pour atténuer les problèmes.
01:05:06Mais derrière les problèmes, il y a des questions.
01:05:08Et ces questions personnelles
01:05:10que vous avez, ce ne sont pas les médicaments
01:05:12qui vont les résoudre, c'est vous.
01:05:14Et avec mon aide, en tant que professionnel.
01:05:16C'est-à-dire qu'il faut bien distinguer les choses.
01:05:18Alors quelqu'un qui a la flemme, en général,
01:05:20ils ne viennent pas me consulter, ils ont la flemme
01:05:22de venir.
01:05:24Est-ce que vous vous rappelez de Margot,
01:05:26l'étudiante en fac de japonais ?
01:05:28La première année, j'étais absolument passionnée
01:05:30par tout ce que j'apprenais.
01:05:32Je travaillais avec plaisir,
01:05:34je restais jusqu'à 21h à la bibliothèque le soir
01:05:36et je sortais avec un grand sourire.
01:05:38Et ça a été en deuxième année
01:05:40que ça a commencé à être la douche froide.
01:05:44Il y a des profs
01:05:46qui ont vraiment commencé
01:05:48à nous mettre la pression
01:05:50très très fort.
01:05:52Il y a eu ce côté extrêmement compétitif
01:05:54qui a été mis en place.
01:05:56J'ai vraiment, littéralement,
01:05:58fait une dépression et un burn-out
01:06:00parce que je n'arrivais vraiment plus
01:06:02à suivre. J'avais plus de vie
01:06:04et je vivais mal d'avoir plus de vie,
01:06:06ce qui n'était pas le cas en première année.
01:06:08Que vous avez-vous déjà rencontré dans votre scolarité
01:06:10des profs qui vous mettaient la pression ?
01:06:12Moi, en CM2,
01:06:14notre prof, tout le temps,
01:06:16elle nous disait, si vous ne changez pas votre comportement
01:06:18au collège, vous allez avoir des difficultés.
01:06:20Les profs, ils sont
01:06:22horribles.
01:06:24Ils vont vous manger ?
01:06:26Non, ils vont vous mettre la pression, etc.
01:06:30Moi, au début,
01:06:34je ne faisais pas gaffe à ce qu'elle disait
01:06:36parce que cette prof,
01:06:38je ne l'appréciais pas vraiment.
01:06:40Et vers la fin de l'année,
01:06:42j'ai commencé à angoisser,
01:06:44à me dire, qu'est-ce qui va se passer
01:06:46au collège ? Qu'est-ce que ça va devenir ?
01:06:48Et donc,
01:06:50elle me mettait vraiment
01:06:52la pression. Du coup, pendant les vacances,
01:06:54je n'ai pas bien profité.
01:06:56Même si à la fin, mes parents
01:06:58et mes cousins et cousines m'ont dit
01:07:00ne t'inquiète pas, c'est très simple,
01:07:02il n'y a pas de problème.
01:07:04C'est vraiment ça qui m'avait mis la pression.
01:07:06Tu as ressenti ça ?
01:07:08Quand tu as vu le témoignage
01:07:10de Margot,
01:07:12ça t'a rappelé ?
01:07:14Oui.
01:07:16C'est très intéressant.
01:07:18Heureusement que tu étais bien entourée
01:07:20à ce moment-là pour passer un collège
01:07:22plutôt tranquille, c'est ça ?
01:07:24Tant mieux.
01:07:26Merci beaucoup, Nour, d'avoir partagé ça avec nous.
01:07:28Alors, on va continuer avec Fares.
01:07:30Qu'est-ce que c'est exactement que la dépression ?
01:07:34La dépression,
01:07:36c'est considéré comme
01:07:38un trouble mental.
01:07:40C'est-à-dire que
01:07:42on est triste,
01:07:46on est sans énergie,
01:07:48on a
01:07:52des idées noires,
01:07:54des idées sombres,
01:07:56on a un ralentissement moteur,
01:07:58on a
01:08:00je dirais
01:08:02un dégoût de la vie,
01:08:04on pleure,
01:08:06on est parfois très irritable,
01:08:08on ne supporte pas l'environnement
01:08:10dans lequel on vit,
01:08:12on a des relations qui se dégradent
01:08:14avec les proches,
01:08:16parfois ça va
01:08:18jusqu'à une baisse de l'estime de soi-même,
01:08:20on pense qu'on n'est pas digne,
01:08:22qu'on se culpabilise
01:08:24excessivement d'un certain nombre de choses,
01:08:26etc.
01:08:28C'est un travail relativement passager,
01:08:30parfois un peu plus long,
01:08:32des fois ça guérit spontanément,
01:08:34parce qu'il y a des bonnes nouvelles qui arrivent,
01:08:36parce qu'il y a des choses qui se changent dans la vie,
01:08:38mais en général, il vaut mieux l'avoir
01:08:40l'aide de quelqu'un.
01:08:42L'aide de quelqu'un qui
01:08:44est en mesure d'aider au diagnostic,
01:08:46de prendre en compte
01:08:48le risque qu'il y a
01:08:50et de faire ce qu'il faut.
01:08:52Je ne sais pas si
01:08:54vous avez déjà rencontré des gens endeuillés,
01:08:56c'est ça un dépressif.
01:08:58Lui, il n'est pas dépressif, il est endeuillé.
01:09:00Mais ça ressemble,
01:09:02ça ressemble terriblement.
01:09:04C'est quelqu'un qui
01:09:06pense à la mort, se culpabilise,
01:09:08je n'ai pas fait assez
01:09:10pour la personne qui est décédée, j'aurais dû faire ceci,
01:09:12il a des remords, il a des regrets,
01:09:14et puis il est face
01:09:16à l'absurdité. Vous avez
01:09:18quelqu'un qui est vivant, avec qui vous avez parlé
01:09:20parfois pendant des décennies, et d'un seul coup
01:09:22il n'est plus jamais là.
01:09:24Il y a des gens croyants, ça aide,
01:09:26des gens qui ne sont pas croyants, ça aide,
01:09:28il y a toutes sortes de gens, mais
01:09:30il y a le deuil. Et le deuil, ça peut
01:09:32vous faire comprendre ce qu'est un état dépressif.
01:09:34Même si ça n'est pas un état dépressif.
01:09:36Mais ça y ressemble.
01:09:38À quoi servent vraiment les médicaments prescrits
01:09:40aux personnes dépressives ? Et est-ce qu'il y a d'autres méthodes
01:09:42que les médicaments ?
01:09:44Les médicaments servent à apaiser.
01:09:46Ils servent à apaiser, ils agissent
01:09:48sur le cerveau, ils agissent
01:09:50très précisément sur
01:09:52certains médiateurs
01:09:54qui sont dans le
01:09:56cerveau, entre les neurones,
01:09:58et ils apaisent.
01:10:00Ils apaisent, c'est-à-dire que ça rend
01:10:02plus indifférent, plus indifférent
01:10:04aux sources
01:10:06de stress, aux sources
01:10:08de difficultés, et
01:10:10ça permet parfois, je dirais,
01:10:12de calmer le jeu. C'est-à-dire
01:10:14du coup, ça ne guérit pas.
01:10:16Mais c'est un, je dirais,
01:10:18ça aide
01:10:20à la trajectoire, prendre une bonne trajectoire,
01:10:22à condition que ce soit accompagné
01:10:24de thérapies, c'est-à-dire que
01:10:26soit des thérapies comportementales
01:10:28où on aide les gens à mieux réfléchir
01:10:30à leur,
01:10:32ce qu'on appelle leur cognition, c'est-à-dire leur pensée
01:10:34qu'on essaye de rectifier avec eux
01:10:36leur pensée négative, soit des
01:10:38thérapies comme Je fais moi, qui sont par la parole
01:10:40où on s'intéresse à leur histoire, etc.
01:10:42Mais ce sont des médicaments
01:10:44qui sont des médicaments qui apaisent.
01:10:46Mais ils ont des effets secondaires
01:10:48et surtout, ils peuvent être très addictogènes
01:10:50pour certains.
01:10:52Donc à prescrire, bien sûr, quand c'est
01:10:54nécessaire, mais pas quand ce n'est pas nécessaire.
01:10:56– Oui. – Ces médicaments-là,
01:10:58ça ne sert à rien de les prendre s'il n'y a pas de
01:11:00thérapie à côté ?
01:11:02– Moi, je pense. Je pense que
01:11:04certains, probablement, ne s'en sortent qu'avec des médicaments
01:11:06parce qu'ils n'ont pas envie d'étaler leur vie
01:11:08ou ils n'ont pas envie d'être, vous voyez,
01:11:10ils vont chez un généraliste qui leur prescrit
01:11:12puis ça leur suffit.
01:11:14Tant mieux. Moi, je suis médecin, je suis
01:11:16pragmatique. Si quelqu'un est guéri,
01:11:18même si ce n'est pas selon ma méthode,
01:11:20tant mieux. Je veux dire,
01:11:22je ne suis pas un militant
01:11:24d'une méthode, je ne suis pas dogmatique.
01:11:26Par contre, moi, je pense
01:11:28que, comme je disais, c'est la différence
01:11:30entre les problèmes et les questions.
01:11:32Je pense que quelqu'un qui a envie de se poser des questions
01:11:34sur ce qui lui est arrivé,
01:11:36la meilleure méthode, c'est qu'il puisse en parler
01:11:38à un professionnel. – Est-ce que le stress,
01:11:40il peut engendrer la dépression ?
01:11:42– Oui, il peut favoriser la dépression, bien sûr.
01:11:44C'est ce que vous disiez,
01:11:46c'est la question qui vous a été posée,
01:11:48est-ce que vous avez déjà eu la pression, etc.
01:11:50Donc, au con, est-ce que vous avez été
01:11:52stressé anormalement ?
01:11:54On a tous une certaine angoisse
01:11:56de performance, mais parfois,
01:11:58c'est au-delà de l'angoisse de performance,
01:12:00ça devient pathologique, c'est-à-dire
01:12:02on y pense sans arrêt, ça nous inhibe,
01:12:04ça nous rend vraiment
01:12:06malheureux, etc.
01:12:08Et le stress, c'est effectivement
01:12:10un facteur favorisant qui peut, à un moment donné,
01:12:12faire en sorte qu'on est déprimé,
01:12:14mais ce n'est pas la même chose.
01:12:16Le stress, en même temps, ça peut être
01:12:18positif, parce que
01:12:20quand on fait quelque chose,
01:12:22on a toujours un petit peu de stress,
01:12:24mais si on fait quelque chose de positif,
01:12:26c'est normal qu'on soit stressé,
01:12:28mais il ne faut pas l'arrêter pour autant.
01:12:30– J'avais une question pour Charlotte Lavoca,
01:12:32est-ce un hasard qu'il y ait autant
01:12:34d'étudiants en droit dépressif ?
01:12:36– C'est un peu un concours de circonstances,
01:12:38très honnêtement, j'ai rencontré
01:12:40un étudiant qui m'a
01:12:42partagé les contacts et les expériences
01:12:44de ses camarades, donc on s'est vite
01:12:46retrouvés dans ce petit huis clos
01:12:48des études de droit, où il y a en tout cas
01:12:50visiblement quand même un sujet,
01:12:52parce que c'est des études aussi qui sont très exigeantes,
01:12:54où on travaille beaucoup,
01:12:56c'est des études qui sont longues,
01:12:58où il y a en plus,
01:13:00ce que Zinedine justement
01:13:02dit dans le documentaire,
01:13:04c'est que souvent,
01:13:06il y a ce fantasme de la robe noire,
01:13:08c'est vrai que c'est des professions,
01:13:10des carrières qu'on embrase vraiment,
01:13:12parce que c'est très prestigieux,
01:13:14parce qu'on défend,
01:13:16parce qu'on a parfois des messages
01:13:18aussi à faire passer, donc c'est des carrières
01:13:20qui partent parfois
01:13:22de passion, comme l'enseignement
01:13:24aussi,
01:13:26et parfois on est déçu parce qu'effectivement
01:13:28c'est très exigeant, il y a un grand niveau,
01:13:30qu'il y a peu d'élus à la fin,
01:13:32qu'on travaille énormément,
01:13:34et donc il y a une pression au travail
01:13:36qui est énorme, et il y a aussi, je pense,
01:13:38une désillusion, qui fait qu'on a une
01:13:40grosse attente de ce que représente
01:13:42cette robe noire, et face
01:13:44à une réalité qui est plus précaire,
01:13:46qui n'est pas
01:13:48si jolie que ce qu'on pouvait
01:13:50voir à travers des séries par exemple,
01:13:52donc voilà, il y a
01:13:54le fantasme parfois qui est un petit peu
01:13:56déçu. Quand on ne peut
01:13:58pas, en étant étudiant, être suivi
01:14:00par un psychologue parce que ça coûte cher,
01:14:02et qu'on voit les délais
01:14:04pour les
01:14:06bureaux d'aide, ou pour des fois
01:14:08les psychiatres qui peuvent être remboursés
01:14:10par la sécurité sociale, c'est décourageant,
01:14:12c'est du bruit.
01:14:14En psychiatrie, c'est bouché
01:14:16de chez bouché, complètement.
01:14:18Donc il y a cette
01:14:20réalité-là aussi, c'est pas que le bon
01:14:22vouloir de la personne, déjà qu'on est
01:14:24fatigué émotionnellement parlant, et qu'on
01:14:26n'a pas spécialement envie de s'en sortir parce
01:14:28qu'on est dans une boucle, mais en plus de ça,
01:14:30si tout est bouché de tous les côtés,
01:14:32c'est pas possible.
01:14:34Comment cela se fait-il qu'il y ait un psy pour 15 000
01:14:36étudiants alors que légalement,
01:14:38ils devront en avoir 10 fois plus ?
01:14:40C'est un manquement aux obligations.
01:14:42C'est triste
01:14:44de voir qu'on n'a pas
01:14:46consacré suffisamment d'attention
01:14:48et suffisamment de crédit
01:14:50à la santé mentale
01:14:52des étudiants.
01:14:54Aux Etats-Unis,
01:14:56dans les
01:14:58facultés, dans les campus,
01:15:00il y a beaucoup plus de disponibilité
01:15:04des endroits où les étudiants
01:15:06peuvent être accueillis.
01:15:08En France, pour l'instant,
01:15:10c'est désertique
01:15:12encore, mais l'expérience
01:15:14des nightlights, c'est très
01:15:16intéressant, mais ça ne suffit pas.
01:15:18Il faut aussi qu'il y ait des dispositifs
01:15:20pérennes et sur place.
01:15:22Qu'est-ce qu'il faut changer ?
01:15:24Il y a, je pense, un gros problème de disparité
01:15:26géographique déjà entre Paris, les régions,
01:15:28où il y a une grosse inégalité d'accès
01:15:30aux soins, notamment sur
01:15:32les soins
01:15:34psychiques, l'accès au CMP,
01:15:36centre médico-psychologique.
01:15:38C'est parfois
01:15:40absurde, parce qu'on envoie
01:15:42un jeune aller consulter,
01:15:44il a six mois de délai pour avoir
01:15:46un premier rendez-vous, donc on s'imagine ce qui peut se passer en six mois
01:15:48quand on est en grande détresse.
01:15:50Beaucoup de gens découragés
01:15:52de devoir être sur des
01:15:54listes d'attente pendant des mois, voire des
01:15:56années, viennent
01:15:58dans le privé.
01:16:00Ça fait qu'à un moment donné,
01:16:02moi, j'étais débordé complètement
01:16:04de gens qui venaient du fin fond de l'Île-de-France
01:16:06pour leur enfant, ou pour
01:16:08eux-mêmes, ou pour leur adolescent,
01:16:10parce qu'on leur avait donné comme réponse.
01:16:12L'offre de soins était
01:16:14tellement limitée,
01:16:16que les délais d'attente étaient
01:16:18tellement importants, et on sait très bien
01:16:20par exemple pour les enfants, il ne faut pas
01:16:22attendre. Il y a des fois où il faut aller vite.
01:16:24Il faut très vite prendre des dispositions
01:16:26pour les adolescents
01:16:28aussi, donc oui, il faut
01:16:30augmenter l'offre de soins, il faut la rationaliser
01:16:32peut-être, parce que le
01:16:34coût, c'est quand même un problème,
01:16:36mais je pense que
01:16:38on verra bien les mesures
01:16:40qui vont être prises,
01:16:42mais enfin, il y a un véritable
01:16:44chantier énorme.
01:16:46C'est une question pour Patrick Landman,
01:16:48à quoi sont dues les troubles alimentaires
01:16:50et pourquoi c'est les jeunes qui sont les plus
01:16:52touchés ? Alors, les troubles alimentaires,
01:16:54oui, généralement ça commence
01:16:56parfois dans l'enfance,
01:16:58en général dans l'adolescence,
01:17:00parce qu'il y a des transformations du corps
01:17:02importantes, en particulier
01:17:04la puberté est un facteur
01:17:06très important
01:17:08de déséquilibre potentiel,
01:17:10évidemment, et
01:17:12le poids,
01:17:14l'image du corps,
01:17:16l'image du corps
01:17:18se modifie très rapidement.
01:17:20Elle se modifie aussi à l'âge adulte,
01:17:22à une vitesse d'escargot
01:17:24par rapport à la période pubertaire.
01:17:26La période pubertaire est une période
01:17:28où le corps et l'image du corps
01:17:30se modifient énormément
01:17:32et provoquent parfois des
01:17:34troubles alimentaires, puisque
01:17:36c'est lié.
01:17:38J'ai une question pour
01:17:40Patrick Landman,
01:17:42pourquoi le taux de personnes dépressives
01:17:44a-t-il autant augmenté depuis le Covid ?
01:17:46Ça a augmenté
01:17:48pour des raisons qui sont liées
01:17:50au fait que le confinement
01:17:52a été un facteur extrêmement
01:17:54puissant
01:17:56de
01:17:58stress,
01:18:00de solitude,
01:18:02de rupture des liens,
01:18:04d'impossibilité
01:18:06d'avoir
01:18:08des relations sociales normales,
01:18:10ce qui fait que ça a favorisé
01:18:12chez certains un état de vie
01:18:14et chez d'autres un état dépressif.
01:18:16Cela a énormément joué sur la santé mentale
01:18:18de rester enfermé,
01:18:20de ne presque parler à personne,
01:18:22parce que même si j'avais
01:18:24quelques amis à qui je pouvais envoyer
01:18:26des messages,
01:18:28ne sortant pas, j'avais pas grand-chose à dire
01:18:30et on fait vite le tour d'une journée
01:18:32enfermée chez soi.
01:18:34Comment vous l'avez vécu ?
01:18:36Vous vous en rappelez de la période du Covid ?
01:18:38Tout le monde s'en rappelle ?
01:18:40Comment vous l'avez vécu ? Vous avez fait quoi ?
01:18:42C'était bien,
01:18:44on s'ennuyait beaucoup chez nous mais
01:18:46au moins il n'y avait pas d'école et on pouvait s'amuser.
01:18:48Toi tu l'as bien vécu ?
01:18:50D'un côté oui
01:18:52parce qu'on était à la maison
01:18:54on faisait ce qu'on voulait chez nous
01:18:56mais d'un autre côté
01:18:58ne pas sortir pendant des semaines
01:19:00c'est quand même pesant.
01:19:02Surtout qu'on pouvait sortir mais il y avait des limites
01:19:04et ce n'est pas comme une balade normale.
01:19:08Tu t'es sentie enfermée ?
01:19:10D'un côté c'était bien
01:19:14J'ai vu tout le monde réagir
01:19:16Oui Alex ?
01:19:18Le confinement
01:19:20je l'ai aussi bien vécu
01:19:22et je pense que c'est parce qu'à notre âge
01:19:24on n'avait pas forcément l'habitude
01:19:26de sortir tous les jours
01:19:28du coup on était un peu habitués
01:19:30et je pense que si
01:19:32à notre âge
01:19:34on aurait été
01:19:36à ce moment là
01:19:38c'est peut-être plus compliqué pour nous.
01:19:40C'était il y a 4 ans, c'est ça ?
01:19:42Du coup vous étiez en CM2 ?
01:19:44Vous étiez en CM1 ou CM2 ?
01:19:46Donc ce n'est pas tout à fait la même chose.
01:19:48Est-ce que
01:19:50vous avez des souvenirs de
01:19:52vos grands frères, grandes soeurs,
01:19:54grands cousins, parents ?
01:19:56On entendait souvent que
01:19:58le Covid ça pouvait être mortel
01:20:00pour certaines personnes
01:20:02du coup je m'inquiétais pour ma famille
01:20:04ou pour mes grands-parents
01:20:06et du coup
01:20:08c'était un peu un stress pour moi
01:20:10parce que je ne connaissais pas
01:20:12ce qui allait se passer après
01:20:14du coup l'avenir me faisait peur à ce moment là.
01:20:16Moi ce n'est pas forcément moi
01:20:18mais je connais quelqu'un de ma famille
01:20:20qui à ce moment là vivait avec sa mère
01:20:22qui était une personne âgée
01:20:24et du coup elle à un moment
01:20:26elle a eu le Covid et elle a eu peur
01:20:28de le transmettre à la personne âgée
01:20:30parce que quand la personne est âgée
01:20:32elle est plus fébrile
01:20:34et ça faisait des stress
01:20:36par rapport à sa mère, elle avait peur
01:20:38qu'elle le transmette.
01:20:40Est-ce que vous-même
01:20:42ou peut-être les gens autour de vous, vous les avez vus
01:20:44nettoyer plus les choses ?
01:20:46Oui je t'ai vu réagir Mohamed, dis-moi.
01:20:48Oui ma mère, en fait
01:20:50elle ne nous laissait pas sortir sans gants
01:20:52ni masque
01:20:54on devait doubler les gants, etc.
01:20:56Elle nous disait de ne pas appuyer
01:20:58sur le bouton d'ascenseur
01:21:00pour ne pas avoir de contact avec les hôpitaux.
01:21:02Moi j'avais une question
01:21:04pour Patrick Landman.
01:21:06Est-ce que vous pensez que notre génération ira mieux
01:21:08étant donné qu'on a vécu le confinement enfant ?
01:21:10Bah écoutez, oui
01:21:12je pense que vous êtes peut-être mieux armés
01:21:14maintenant, enfin en tout cas on va faire en sorte
01:21:16qu'une émission comme celle-là
01:21:18le documentaire
01:21:20va vous aider
01:21:22je pense, mais
01:21:24il faut déstigmatiser
01:21:26tout ce qui concerne
01:21:28la folie, la non santé mentale, etc.
01:21:30Il faut, je dirais
01:21:32pas hésiter à
01:21:34faire appel à des pères
01:21:36ou à des professionnels
01:21:38si vous le souhaitez, bien sûr.
01:21:40Et puis bon,
01:21:42moi je suis optimiste
01:21:44on a toujours l'impression qu'on est les derniers
01:21:46des hommes en fait.
01:21:48C'est pas parce qu'on a parlé des maladies
01:21:50qu'on a parlé des troubles
01:21:52qu'il faut s'angoisser
01:21:54il faut rester zen.
01:21:56Il faut dire
01:21:58vous avez toute la vie devant vous
01:22:00et c'est super.
01:22:02Léa, j'aurais une question pour vous
01:22:04Charlotte, l'avocat.
01:22:06Selon vous, comment peut-on encourager
01:22:08une culture de discussion
01:22:10ouverte sur la santé mentale
01:22:12dans les établissements
01:22:14de enseignement supérieur ?
01:22:16Effectivement, la santé mentale aujourd'hui c'est un sujet
01:22:18qui est beaucoup plus
01:22:20accessible, ouvert, populaire
01:22:22sur toutes les radios
01:22:24même, j'entendais sur Radio Nova
01:22:26sur des radios plutôt jeunes publics
01:22:28on en parle assez ouvertement, c'est des sujets
01:22:30qui sont repris par des jeunes influenceurs
01:22:32par, je pense à Simone Bait
01:22:34la grande championne
01:22:36de Gym.
01:22:38C'est une compétitrice
01:22:40c'est pas du tout quelqu'un
01:22:42qu'on peut penser faible et elle en a parlé
01:22:44donc déjà, avoir ces
01:22:46exemples-là, c'est super encourageant
01:22:48et dans les établissements
01:22:50peut-être prévoir des temps
01:22:52de parole, avoir un bureau
01:22:54un psy à disposition, c'est pas le cas
01:22:56dans tous les établissements supérieurs, il en faudrait
01:22:58plusieurs en fait
01:23:00des temps, peut-être des groupes de parole
01:23:02aussi, ça marche bien les groupes de parole
01:23:04Le dernier intervenant du documentaire
01:23:06il explique que grâce
01:23:08à ce climat
01:23:10anxiogène
01:23:12les jeunes réfléchissent mieux
01:23:14plus tôt à ce qu'ils veulent
01:23:16il dit
01:23:17faire des études c'est bien
01:23:19mais on va aussi avoir besoin d'aller plus loin dans
01:23:21comment est-ce qu'on se sent bien, où est-ce qu'on veut aller
01:23:23beaucoup plus que gagner un gros salaire
01:23:25ça va vraiment être comment est-ce que je me sens bien
01:23:27dans mes études pour aller bien dans ma vie professionnelle
01:23:29Qu'est-ce que ça évoque pour vous ça ?
01:23:31Vous êtes d'accord ou pas ?
01:23:33Je pense qu'il a raison, parce que vaut mieux faire
01:23:35quelque chose qu'on aime plutôt que quelque chose
01:23:37qui va nous faire gagner de l'argent
01:23:39parce que quand t'aimes pas forcément
01:23:41quelque chose, tu dis c'est pour de l'argent
01:23:43tu vas pas forcément avoir le courage de le faire
01:23:45réussir à le faire
01:23:47alors quand tu fais quelque chose qui te plaît
01:23:49au moins ça peut durer toute ta vie
01:23:51et tu vas te sentir plus à l'aise
01:23:53tu vas apprécier
01:23:55même quand tu vas aller au travail
01:23:57qu'on va être content
01:23:59du coup oui je suis plutôt d'accord
01:24:01Perso moi j'aimerais bien faire un métier
01:24:03que j'aime mais qui en même temps
01:24:05renforce comme ça
01:24:07C'est sûr, si on pouvait les deux ça serait toujours mieux
01:24:09Eh bien merci beaucoup
01:24:11merci à tous
01:24:13l'émission est déjà terminée, merci infiniment
01:24:15à nos deux invités
01:24:17merci évidemment à vous les élèves
01:24:19pour votre travail, pour vos réflexions
01:24:21pour vos questions si bien préparées par vos deux professeurs
01:24:23qui se trouvent juste à côté de vous
01:24:25on les salue, bravo, bravo à vous
01:24:27et puis nous on se retrouve très vite pour un prochain
01:24:29numéro de la zone d'éducation documentaire
01:24:31parce qu'il n'y a pas d'âge
01:24:33pour questionner le monde et ses images
01:24:35Allez salut les élèves !