Alice Coffin est une journaliste et femme politique française, devenue un symbole national du militantisme féministe et LGBT. Depuis 2020, Alice Coffin est élue au Conseil de Paris.
Jeune, elle découvre le féminisme par les actions et la lutte du MLF.
Pour elle, le féminisme est LA Révolution. La militante la définit, par ailleurs, comme « une guerre qu'on n'arrive pas à nommer ». Alice Coffin défend un féminisme intersectionnel. Selon elle, pour lutter contre le patriarcat, il faut inverser les rapports de force. La « ruse du patriarcat » est d'avoir fait croire aux femmes « qu'elles ont à y gagner » dans ce système et y maintenir une certaine domination.
Également engagée au niveau européen, elle prône une coopération au-delà des frontières pour faire avancer la cause. Elle participe alors à la campagne féministe européenne pour l'IVG, qui s'engage pour l'accès et le droit à l'avortement en Europe notamment en Pologne.
Bien qu'elle souligne une accentuation du mouvement et d'une prise de conscience des inégalités envers les femmes, elle déplore un manque de femmes politiques purement féministes. Ce problème serait intimement lié aux lieux de pouvoir. Par la même occasion, Alice Coffin encourage les hommes à ne pas seulement parler mais aussi agir en faveur du féminisme.
Omniprésent dans l'actualité, le mouvement féminisme a une histoire riche et plurielle. Comment définir la complexité de ce mouvement, la diversité des messages et luttes ? Dans une nouvelle collection d'entretiens Laure Adler donne la parole à celles qui haussent la voix pour le droit des femmes.
A travers leur parcours, leurs écrits, leurs oeuvres ces personnalités engagées nous partagent leur vision du féminisme. Ovidie, écrivaine et réalisatrice, dénonce l'influence des médias et de la culture populaire dans notre perception du genre et du sexe. Michelle Perrot, historienne, nous offre un éclairage sur les racines et l'évolution du féminisme à travers les âges, nous permettant ainsi de comprendre les enjeux contemporains. Mona Chollet, écrivaine, partage ses réflexions sur les défis actuels du féminisme, elle interroge les normes sociales et les mécanismes de pouvoir en place et enfin Alice Coffin, femme politique, journaliste et militante LGBT explique comment les idéaux féministes devraient se traduire en actions concrètes dans la société.
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#LCP #assembleenationale #Politique
Jeune, elle découvre le féminisme par les actions et la lutte du MLF.
Pour elle, le féminisme est LA Révolution. La militante la définit, par ailleurs, comme « une guerre qu'on n'arrive pas à nommer ». Alice Coffin défend un féminisme intersectionnel. Selon elle, pour lutter contre le patriarcat, il faut inverser les rapports de force. La « ruse du patriarcat » est d'avoir fait croire aux femmes « qu'elles ont à y gagner » dans ce système et y maintenir une certaine domination.
Également engagée au niveau européen, elle prône une coopération au-delà des frontières pour faire avancer la cause. Elle participe alors à la campagne féministe européenne pour l'IVG, qui s'engage pour l'accès et le droit à l'avortement en Europe notamment en Pologne.
Bien qu'elle souligne une accentuation du mouvement et d'une prise de conscience des inégalités envers les femmes, elle déplore un manque de femmes politiques purement féministes. Ce problème serait intimement lié aux lieux de pouvoir. Par la même occasion, Alice Coffin encourage les hommes à ne pas seulement parler mais aussi agir en faveur du féminisme.
Omniprésent dans l'actualité, le mouvement féminisme a une histoire riche et plurielle. Comment définir la complexité de ce mouvement, la diversité des messages et luttes ? Dans une nouvelle collection d'entretiens Laure Adler donne la parole à celles qui haussent la voix pour le droit des femmes.
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NewsTranscription
00:00Générique
00:16Merci Alice Covain d'avoir accepté notre invitation
00:19de participer à cette série sur le féminisme.
00:22Je vais commencer par le fait que vous êtes une fille,
00:25vous êtes née du côté des filles.
00:27Vous étiez contente d'être une fille
00:29quand vous étiez petite ?
00:31Je pense que je ne l'ai pas compris tout de suite.
00:35Comment ça ?
00:36J'étais une fille, ça peut paraître étrange.
00:38Je ne pense pas que ça se positionnait ainsi.
00:41C'est-à-dire, la notion d'être une fille,
00:44je l'ai eue vraiment, vraiment tard.
00:47Parce que j'ai grandi dans une famille
00:50où on dit trois filles, trois garçons.
00:52Moi, j'étais l'aînée.
00:54Et en gros, on ne m'a jamais demandé
00:57ou inculqué de faire quelque chose différemment
01:00parce que j'étais une fille, différemment de mon frère,
01:03qui avait à peine deux ans de moins que moi.
01:05Pendant un très long moment,
01:07j'ai mis du temps à comprendre que ça ne se posait pas.
01:10La question du genre ne se posait pas,
01:12ce qui est un luxe inouï, quand on est enfant,
01:15de grandir sans être soumise directement à la question du genre.
01:19Et c'est arrivé plus tard.
01:21Le problème, c'est que la question du genre
01:23est arrivée de manière très négative.
01:26Parce que ça ne se soulignait pas quand j'étais enfant,
01:29aussi parce qu'il n'y avait pas non plus d'insistance valorisante,
01:34mais tant mieux, sur le fait que j'étais une fille.
01:37Mon père ne me traitait pas de sa petite princesse
01:40ou des choses comme ça,
01:41ou d'insistance sur le fait de même qu'il ne disait pas à mes frères
01:45qu'ils étaient super forts, parce qu'ils étaient des garçons.
01:48Ni dans la dévalorisation, ni dans l'injonction à faire quelque chose
01:51parce qu'on était une fille ou un garçon.
01:53Après, à l'école ou dans un regard plus extérieur de la société.
01:57Et les questions du genre, elles se sont, pour moi, d'être une fille.
02:00Ça s'est manifesté très tôt par le fait que je n'étais pas une fille complète.
02:04Ou que je ne performais pas bien,
02:07je n'accomplissais pas bien ce qu'on pouvait attendre d'une fille.
02:13Et ça s'est vraiment manifesté comme ça,
02:15c'est-à-dire de ne pas marcher suffisamment droite
02:20et élégamment,
02:23de ne pas porter des robes, tout ça.
02:26Ça veut dire que la définition d'avoir conscience d'être une petite fille,
02:30c'est plutôt d'avoir conscience, apparemment, de ne pas correspondre à ça.
02:34Ce qui était très étrange,
02:35parce que je n'avais pas l'impression que j'étais ça.
02:37Tout à coup, on me rappelait un devoir d'être quelque chose
02:40que je n'avais même pas l'intention et l'idée d'être.
02:43Donc, ça s'est passé comme ça, la découverte.
02:45Et après, je pense que ça s'est passé plus tard,
02:48parce que, après, ça a été bien plus tard.
02:50Moi, j'ai été super contente d'être une fille,
02:51mais beaucoup plus tard.
02:52À quel âge ?
02:53Bon, maintenant.
02:55Comme une révélation.
02:57Non, mais plus tard, mais vraiment avec le fait d'être lesbienne.
02:59Je pense vraiment avec le fait d'être lesbienne,
03:00ça a été un bonheur, parce que qui dit...
03:03En tout cas, pour moi,
03:08femme, cisgenre, etc.,
03:11ça passait, justement, le lesbianisme
03:13est quelque chose qui me permettait
03:15d'être valorisée, aussi, dans ce que j'étais.
03:18C'est-à-dire que ce type-là de féminité,
03:22c'est-à-dire de manière d'être...
03:25D'agir, le fait d'être un être humain,
03:29dans le monde, etc., comme je voulais,
03:32c'était tout à fait valorisé chez les lesbiennes,
03:34et ça l'est beaucoup moins...
03:37Pas chez tous, mais ça l'est beaucoup moins, quand même,
03:39chez les hommes.
03:40Et ce mot de féminisme,
03:42vous l'avez entendu quand pour la première fois ?
03:44Est-ce que votre mère était féministe
03:46et vous a éduquée selon des concepts féministes ?
03:49Mes deux parents, je dirais.
03:51Mon père comme ma mère avaient des...
03:54Une attitude, je pense, par rapport à la société,
03:57qui était particulièrement féministe,
04:00pas revendiquée, mais qui était...
04:02Je sais pas comment dire, c'était aussi...
04:04Et ça revient à ce que c'est que le combat politique féministe,
04:07qui était quelque chose de très humain,
04:10très...
04:12considéré, chaque être humain,
04:15pour ce qu'il était, essayer de faire en sorte
04:18que cet être humain s'épanouisse, quel que soit leurs enfants,
04:21en particulier, je pense,
04:22mais les amis de leurs enfants aussi, et les autres aussi.
04:26Donc, de manière générale, ça, ça donne,
04:28quand on est dans une attitude comme ça,
04:29automatiquement, ça mène au féminisme.
04:31Parce qu'être comme ça, dans cette société,
04:33ça veut dire être féministe, parce que le gros problème,
04:36si on prend l'inverse du sexisme,
04:38évidemment, ça se manifeste comme une dévalorisation,
04:41comme des violences envers les femmes,
04:43tout simplement comme un non-respect des êtres humains,
04:47quels qu'ils et elles soient.
04:48C'est faire une différence entre les êtres humains.
04:50À partir du moment où vous êtes des parents,
04:52des gens qui ne font pas de différence,
04:54qui traitent un être humain comme ils le sont,
04:57de fait, il se trouve que dans cette société,
04:59ça vous place du côté des féministes.
05:01Parce qu'encore, moi, j'ai grandi,
05:03je suis née dans les années 80,
05:06et encore là, évidemment, c'était encore...
05:09Toujours, de toute façon, il y avait des énormes différences.
05:11Donc le simple fait de faire ça, ça vous met du côté du féminisme.
05:13Après, c'était pas un féministe complètement...
05:16Il y avait du bouquin féministe dans leur bibliothèque et tout,
05:18mais plus tard, plutôt, ma mère a été militante féministe
05:22dans des groupes et tout ça,
05:24mais c'est une éducation générale, je pense, de mes deux parents.
05:27Vous êtes née féministe ou vous êtes devenue féministe ?
05:31Ou les deux en même temps ?
05:33Vous avez toujours été féministe ?
05:35Moi, j'ai pas eu le...
05:36Ça se mélange vraiment à...
05:40d'où ça venait, mon énergie vitale ou la façon d'être.
05:43C'est-à-dire qu'au départ, le fait même que, je sais pas,
05:46j'aimais bien jouer au foot, j'aimais bien courir,
05:48j'aimais bien pouvoir être libre,
05:51et c'était quelque chose que j'ai perçu,
05:54pas tout de suite, encore une fois, mais après, comme...
05:56Ouais, mais c'est compliqué, avec le fait que tu sois une fille,
05:59c'est compliqué, c'est pas tout à fait logique.
06:01Ah ouais, t'es sûre que tu veux faire ça ?
06:03Et ça, ça vous rend féministe,
06:04parce que ça vous fait prendre conscience
06:05qu'il y a une inégalité, que c'est pas juste,
06:07et pourquoi, tout d'un coup, moi, on me demande,
06:09tout d'un coup, on fait une différence entre mon frère et moi à l'école,
06:11pourquoi est-ce que lui, il se retrouve,
06:13alors que chez nous, dans l'appart,
06:16on peut autant casser des carreaux en jouant au foot dans le couloir,
06:19mais tout d'un coup, à l'école, c'est lui qui va pouvoir jouer
06:22dans le plus grand espace de la cour au foot,
06:24et moi, c'est plus compliqué
06:25parce qu'il n'y a pas de filles, en fait, qui jouent au foot.
06:26Donc, c'est tout d'un coup, un surgissement, en fait,
06:29d'une différence qui est faite dans la société
06:33et qui renvoie à ça.
06:34Et après, le mot même,
06:36non, mais moi, je l'ai découvert vraiment beaucoup
06:38par l'apprentissage du militantisme du MLF,
06:42et de Simone de Beauvoir, du MLF,
06:44mais vraiment du MLF dans l'activisme.
06:46C'est-à-dire que ce qui m'a plu,
06:48j'ai découvert avant ce qu'elle faisait...
06:53J'allais dire ce que vous faisiez aussi, d'ailleurs, avant la théorie.
06:57Et c'est ça qui m'a plu, c'est vraiment les actions,
07:00et qui me faisaient... Moi, quand j'ai découvert ça,
07:01ça me faisait tellement rire d'abord,
07:03et ça me rendait tellement joyeuse,
07:05et moi, je me suis vraiment dit,
07:06mais je veux cette vie-là, moi, je veux être ça.
07:09C'est-à-dire que le féminisme, il venait pas d'une colère, en fait,
07:11il venait d'un appel à la joie, de dire,
07:13mais moi, je veux tellement que ma vie, ça soit ça.
07:15Ça a l'air génial, elles ont l'air de trop rigoler,
07:17elles ont l'air de... Et en plus, elles font des choses importantes.
07:19Et ça aide, je pense, après,
07:20dans tous les combats féministes à mener,
07:23d'y venir, pas...
07:24La colère, évidemment, elle est là,
07:26enfin, je veux dire, mais la colère,
07:27c'est quand on regarde le monde, la colère,
07:28c'est pas juste le féministe, mais c'est...
07:31Mais d'avoir un appel, de dire,
07:32oh, il y a cette vie qui est possible,
07:34et ça a l'air tellement chouette,
07:35et vraiment, moi, je voulais faire ça dans la vie.
07:37Ça, c'est très important à souligner chez vous, Alice,
07:40et le côté joie qu'on souligne guère,
07:44c'est qu'être féministe, faire des actions militantes,
07:48se retrouver, c'est la sororité,
07:52c'est la solidarité, ce sont les actions communes,
07:55mais c'est la joie, l'affirmation de la joie de la vie.
07:59Parce que, en gros, c'est quoi ?
08:01Une action militante,
08:02quand on est avec un groupe de copines,
08:04qu'on prépare quelque chose.
08:05On va affronter, en général, quand on choisit une cible,
08:09disons, des afrobonhommes,
08:11et des gens qui exercent le pouvoir
08:13de manière particulièrement pénible,
08:16qui font régner, en gros, leur oppression sur un lieu donné,
08:20que ce soit dans le militantisme féministe, antiraciste,
08:22c'est vraiment ça, au départ, on s'affronte à une structure.
08:24Comment on fait ?
08:25La structure, c'est le patriarcat.
08:26Voilà, et là, c'est le patriarcat.
08:28On est moins fort, on est moins machin.
08:30Et si on les prend, je pense, vraiment,
08:32le moyen, et que ça a toujours été ça dans l'activisme,
08:34c'est aussi de passer par les fourrir, par l'ironie,
08:38et par rigoler de la situation,
08:40parce que tout ça, le patriarcat,
08:42repose sur quelque chose d'extrêmement artificiel.
08:44Parce qu'on décrète qu'un homme, c'est un homme parce que c'est un homme,
08:48et qu'il a ces droits-là, différents de toi,
08:51et il a cette position-là dans la société,
08:53que toi, femme, tu n'as pas, de manière assez artificielle.
08:57Et en fait, je pense que le rire et le fait d'aller démonter,
09:00de leur tendre un miroir,
09:01de regarder un peu comment ils exercent ce pouvoir-là,
09:03et vraiment de le déminer, de le délégitimer,
09:07c'est une première étape très importante,
09:09et qui passe par...
09:11On ne vous prend pas au sérieux, en fait,
09:12alors qu'ils font tout, en fait, pour nous faire croire.
09:15Je pense vraiment, moi, que la société, elle est fondée sur un mythe,
09:18un leurre, une fable, qui est celle de la masculinité,
09:21qui traverse aussi bien les productions culturelles, les œuvres,
09:26de nous faire croire que c'est ça, une œuvre,
09:27ça doit correspondre à ces critères qui ont été,
09:30très souvent, faits par des hommes pour des hommes,
09:32qu'un homme politique, ça doit correspondre à des critères
09:34qui sont, encore une fois, des critères qui ont été forgés,
09:37vraiment créés de toutes pièces,
09:39et que quand on veut aller déminer,
09:41essayer de casser vraiment ce qui repose,
09:44ce qui s'est sédimenté pendant des siècles,
09:45donc c'est très dur d'aller casser cette image-là,
09:47que c'est ça, le sérieux, c'est ça, la vraie vie, c'est ça,
09:49ça passe par des actions militantes,
09:51effectivement, où c'est bien d'être en joie,
09:54et c'est bien d'être ensemble, en fait.
09:55Mais le féminisme est-il seulement l'action d'aller trouver des cibles,
10:01c'est le mot que vous venez d'employer, Alice,
10:04ou est-ce que c'est aussi tout un arsenal de conceptions,
10:08de pratiques à élargir pour que la société démocratique
10:13puisse continuer à exister dans un rapport d'égalité femmes-hommes ?
10:18Et c'est très important, ça.
10:20Alors, je pense que c'est les deux, évidemment.
10:23Il y a tout un pan, parce qu'encore une fois,
10:26le patriarcat repose aussi sur des soi-disant savoirs,
10:33règles, institutions,
10:35et il y a tout un travail théorique à mener,
10:37qui nourrit aussi, et tout un travail de modélisation aussi,
10:41de montrer aussi qu'on peut être une femme différemment,
10:43qu'on peut vivre différemment,
10:45mais je crois très fort qu'il y a aussi un rapport de force à engager.
10:48Et quand je dis des cibles ou des actions,
10:50oui, je pense que ça passe aussi par là.
10:52Je donne un exemple.
10:53Moi, chaque année, et j'espère qu'on va le faire, là, pour 2025,
10:58je râle un peu sur le fait que c'est génial,
11:01maintenant, on amène beaucoup de monde à la manif du 25 novembre,
11:04Journée mondiale contre les violences faites aux femmes.
11:06Super, on est plein.
11:08On fait des manifestations, et tant, moi, je pense que tant,
11:10on ne le fera pas en s'arrêtant à la fin de la manif,
11:13on choisit la cible, justement,
11:14le ministère, l'Élysée, Matignon, ce qu'on veut,
11:16et on reste là, on reste là,
11:18et on fait des picketings autour nos tours,
11:20on reste, on ne bouge pas,
11:21tant qu'on n'a pas obtenu des revendications qui sont super claires.
11:24En plus, ce n'est pas très compliqué,
11:25ce n'est pas ça qui mettra fin au patriarcat.
11:26Ce que demandent les associations féministes françaises chaque année,
11:30ce n'est pas compliqué à leur donner.
11:31Il y a un refus de leur donner, donc, quand quelque chose doit être obtenu,
11:33il faut faire un rapport de force,
11:35et ce rapport de force, il passe par choper l'attention des médias,
11:38rester, attirer, et si on arrive à mettre ce qu'on arrive à faire,
11:42grâce au remarquable travail des militantes féministes,
11:45maintenant plusieurs dizaines de milliers de personnes
11:46à chaque fois dans la rue, ce qui n'était pas le cas il y a dix ans,
11:48on n'était pas aussi nombreuses.
11:50On en fait quoi de cette force-là ?
11:51Il faut l'amener à quelque chose, il faut l'amener dans un rapport de force,
11:54sinon, ils continuaient à regarder à la télé,
11:56à dire qu'il y avait vraiment beaucoup de monde,
11:57ils sont très fâchés, les féministes, très bien.
12:00Mais ce qui m'intéresse, c'est comment, après,
12:01on fait réellement, on ne fait pas juste force de témoignage,
12:05on fait un changement...
12:08Mais comment l'exiger ?
12:09Franchement, c'est du rapport de force,
12:11c'est-à-dire pourquoi est-ce que ce qui est...
12:12Alors, c'est compliqué en ce moment, d'ailleurs,
12:14mais je veux dire, ça, il faut se nourrir de ce qui a été acquis
12:18dans l'élite sociale, dans l'élite des droits civiques,
12:21il y a tout un savoir-faire de l'activisme, du militantisme
12:24pour faire plier des structures étatiques, ce n'est pas nouveau,
12:27ça s'est passé pas seulement au XXIe, mais au XXe, au XIXe, au XVIIIe,
12:31je veux dire, la France a des exemples assez glorieux
12:34de révolution française et tout, ça s'organise, en fait,
12:37ce n'est pas la lutte, mais il faut du rapport de force.
12:40Et ce qui est compliqué, je pense, en ce moment, c'est qu'on est...
12:42Donc, c'est politique, être engagé féministe,
12:45c'est une action politique.
12:46Oui, mais le problème, c'est ce qui est très, très spécifique
12:49aux féministes, vraiment très, très spécifique dans la lutte,
12:50ce qui est très, très compliqué,
12:52c'est que dans les autres luttes, c'est assez clair
12:54qu'en gros, si vous vous battez pour les droits civiques
12:58et l'antiracisme, les gens, machin, on voit bien
13:01qui va faire une différence entre les gens qui oppriment les Noirs,
13:06si vous faites ouvrier patron, vous voyez bien.
13:09La grande ruse du patriarcat et du sexisme,
13:12c'est quand même d'avoir fait croire que vous allez y avoir et y gagner,
13:14que les femmes avaient tout aillé gagner à ça et que...
13:16Mais pas du tout, elles ont aussi leur place dans cette société
13:19qui est magnifique, qui est celle de déesses,
13:22et regardez la Vierge Marie, regardez ces mannequins,
13:24regardez ces sublimes actrices.
13:26Donc, il y a eu tout un travail, c'est pour ça que je dis
13:28que ça ne passe pas sans un travail culturel.
13:30Le patriarcat, il s'assoit aussi,
13:31ce n'est pas seulement des lois qui ont été mises en place,
13:34ce n'est pas seulement des pratiques discriminantes
13:36au sein des foyers, etc.
13:38C'est aussi tout un imaginaire,
13:40et le cinéma y a participé très largement, par exemple,
13:43pour faire penser aux femmes qu'elles avaient tout à gagner à cette situation.
13:46Donc, il y a une analyse de la lutte contre l'idéalisation du féminin
13:51à l'intérieur de notre société.
13:52De faire comprendre qu'on est dans un combat,
13:55et ça, c'est très compliqué.
13:56Moi, je trouve, quand j'ai publié mon livre,
13:59Le génie lesbien, c'était ça que je voulais essayer vraiment de dire,
14:01de dire, en fait, tant que...
14:03C'est fou, c'est une guerre qu'on n'arrive pas à nommer.
14:05C'est un combat qu'on n'a pas le droit de nommer.
14:07Je n'ai jamais vu ça, en fait.
14:08Il y a une oppression, il y a des morts tous les jours,
14:09il y a des femmes violées.
14:10On n'a pas le droit de dire, en fait, que c'est un combat et une guerre,
14:13parce qu'on vous dit, vous exagérez.
14:14Mais quand même, vous ne détestez pas les hommes.
14:15Mais à qui on demande ça, dans un combat ?
14:17À qui on demande de dire que ton ennemi,
14:19qui est en train de te tuer tous les jours,
14:21tu dois lui prodiguer des signes d'affection et lui dire,
14:24mais non, bien sûr, monsieur, moi, non, je ne le déteste pas.
14:26Mais tous les hommes participent-ils, selon vous, Alice, du patriarcat ?
14:31Tous les hommes sont-ils des oppresseurs ?
14:33Tous les hommes sont-ils des violeurs ?
14:35Alors, ça, c'est beaucoup un truc qu'on me reproche, en général,
14:37c'est de généraliser.
14:38Et moi, ça me fait réponse immédiate.
14:40Je ne sais pas, c'est presque insultant, quoi.
14:43Je ne suis pas...
14:45Non, je vous pose la question naïvement.
14:47Je résonne encore en temps...
14:50Et je pense que c'est important que...
14:51Moi, j'ai été très, en plus, privilégiée là-dessus.
14:54Parce que que ça soit...
14:55C'est marrant, les gens, ils s'en prennent, par exemple, toujours...
14:57Ils disent toujours, son père, il a dû...
14:59C'est le mec le plus gentil du monde, le plus soutenant, etc.
15:02Donc, non, bien sûr que ce n'est pas...
15:04Mais ce que je veux dire, c'est que quand on dit les hommes,
15:06ça ne veut pas dire chaque homme, justement.
15:08Ça veut dire qu'on est dans un système où, de généralité...
15:11Là, c'est important de le souligner.
15:12Oui, mais pourquoi on dit les hommes ?
15:14Là encore, moi, je renvoie à ceux qui ont fondé
15:16qu'est-ce qu'elle est la légitimité d'un savoir.
15:19Quand vous êtes historien, historienne, quand vous faites comme ça,
15:22vous dites, les Français, les Françaises, en 1780...
15:25Je ne sais pas, moi, souffrez de guisettes, j'en sais rien, voilà.
15:28Oui, c'est vrai.
15:29Et personne... Ça vient à l'esprit de personne de dire...
15:32Mais pas chaque Français, hein.
15:33Attention, le roi, lui, avait à manger.
15:35Bien sûr, mais on comprend que c'était une situation historique générale
15:38qu'on est en train de décrire un état de fait.
15:40Et c'est fou que sur le féminisme, ça, on n'a pas le droit.
15:42Alors que ça, c'est l'apanage du savoir.
15:43Ça veut dire avoir un savoir universitaire,
15:45être capable de poser une généralité
15:47que tout le monde, normalement, comprend très bien.
15:49Oui, ça ne veut pas dire chacun d'entre vous,
15:51quand on dit ça, quand on dit les Français ne sont plus machin,
15:54on comprend bien que c'est une analyse sociologique, historique,
15:57qu'on n'est pas en train de dire ça.
15:58Comme par hasard pour le féminisme, quand on dit les hommes,
16:00là, on ne comprend plus, on n'a pas le droit de les catégoriser.
16:02Alors que c'est de la sociologie, de l'histoire, du combat aussi,
16:07c'est vrai, mais c'est une catégorie, bien sûr que oui.
16:10Et c'est une catégorie, ce n'est pas moi qui l'ai inventée,
16:12ce ne sont pas les femmes qui l'ont inventée,
16:13c'est plutôt eux, les mecs qui ont inventé ça,
16:15de scinder le monde en deux parties différentes.
16:18Si on veut être capable de l'analyser, de le comprendre
16:20et de lutter contre ça, il faut pouvoir nommer les choses.
16:24Et donc, dire les, c'est juste, c'est vraiment de la généralisation.
16:27Non, mais vous considérez les hommes comme des ennemis.
16:30Est-ce que vous avez l'impression que le combat, c'est une guerre
16:33ou c'est plutôt une série de revendications
16:36pour établir la réelle égalité femmes-hommes ?
16:39Non, moi, j'ai l'impression que eux,
16:40c'est pour ça que, franchement, c'est la question qui est renversée.
16:43En tout cas, je suis persuadée qu'ils nous considèrent
16:44comme des ennemis et des gens à battre.
16:46Il y en a certains d'entre eux, peut-être pas tous.
16:49Les autres, on ne les entend pas assez, c'est toujours pareil.
16:51C'est-à-dire que ce n'est pas possible, en fait,
16:53qu'on les entende si peu, que je ne comprends pas.
16:56En fait, moi...
16:57Ils commencent à parler.
16:59Les hommes qui supportent le fait qu'ils se disent féministes.
17:05Mais non, mais très, très peu.
17:07Trop peu ?
17:08Moi, très peu.
17:09Très peu, et c'est tant que...
17:11En fait, tant qu'il n'y aura pas un signe tangible.
17:12C'est-à-dire que moi, si je regarde le truc comme ça,
17:15je me dis, mais mon Dieu, depuis des siècles,
17:17on est en train d'opprimer, de se comporter
17:20vraiment comme d'horribles individus envers les femmes.
17:22Mais je quitte les places d'emblée.
17:25Filez les places, donnez le pouls.
17:26Si vraiment vous êtes convaincus que c'est n'importe quoi,
17:29laissez la place.
17:30Ne le dites pas seulement, mais agissez.
17:32Faites-le, faites la nuit des privilèges.
17:34C'était ça, la nuit des privilèges.
17:35Ils ont quitté les privilèges, ils ont...
17:37Donc, le féminisme est une forme de révolution pour vous ?
17:40Complètement, oui.
17:41Non, mais vraiment, c'est la révolution.
17:43C'est la révolution à accomplir.
17:45Et en fait, ce n'est pas seulement qu'il le...
17:47Enfin, c'est encore plus qu'une révolution.
17:49C'est parce que je pense vraiment que, malheureusement,
17:53le patriarcat, le fait de centrer sur la masculinité,
17:56il y a une révolution à faire pour les femmes,
17:58pour sortir de leur état d'oppression,
18:00mais aussi vraiment pour sauver l'humanité.
18:02Parce que la particularité, je crois, de la masculinité et du patriarcat,
18:06c'est que ça va de pair avec le développement...
18:10Je vais pas faire des grands mots, mais du capitalisme,
18:12de l'exploitation, pas seulement des femmes,
18:13mais de la nature, de la colonisation, de choses...
18:17C'est-à-dire que c'est vraiment quelque chose d'extrêmement toxique
18:20pour l'ensemble de l'humanité,
18:21et pas seulement dans un rapport homme-femme.
18:24Et on a fait une fausse route terrible, quoi,
18:27en prenant ce chemin de la masculinité.
18:28Mais c'est pour ça que vous êtes une apôtre
18:32du féminisme intersectionnel,
18:34et que vous pensez que la régénération du féminisme,
18:38aujourd'hui ça existe,
18:39mais peut-être ça existera encore plus dans le futur,
18:43ne peut que se féconder par les luttes, justement,
18:47de l'écologie, de l'environnement,
18:51qui a un avenir extrêmement fécond et divers
18:56dans les pistes de lutte du féminisme.
18:59Oui, et de l'antiracisme, beaucoup, mais pourquoi ?
19:01Parce qu'on est, en gros, dans un enjeu contemporain,
19:04et je dirais, dans les alliances, effectivement,
19:07mais aussi dans les alliances internationales,
19:09c'est-à-dire européennes.
19:10Moi, je travaille vraiment beaucoup en dehors du contexte français.
19:13Et pourquoi ? Parce que je pense que nos adversaires,
19:16on va dire, pour faire très court, l'extrême droite,
19:18ne se privent pas de ces alliances-là
19:20entre différents pays et font front,
19:23et ont des cibles, en fait, qui sont les mêmes.
19:25Je veux dire, les mécanismes d'oppression raciste,
19:29les mécanismes d'oppression sexiste sont différents,
19:33mais en réalité, ils ont quand même un certain nombre de cibles,
19:36et donc de fait, en fait, les alliances,
19:37elles se font sur le terrain, elles se font automatiquement,
19:41pour peu qu'on soit dans la rue et qu'on milite,
19:47c'est les mêmes personnes souvent qu'on retrouve.
19:48Alors, que peut-on faire sur le plan européen ?
19:50Parce que je sais que vous êtes très engagée
19:53et que vous avez déjà un socle de certitude
19:57et de possibilité de faire avancer la condition de la femme.
20:01Oui, alors déjà, il y a une grosse campagne qui est menée en ce moment,
20:05et vraiment, que tout le monde,
20:06toujours même à la télé, faire du militantisme.
20:08Allez signer sur mavoismonchoix.org.
20:10Et ça, c'est une campagne pour l'avortement au niveau européen
20:12et pour faire changer les institutions européennes
20:15et pour permettre, justement, en gros,
20:17que les Polonaises, par exemple,
20:20puissent venir dans n'importe quel autre pays européen
20:22avorter gratuitement et de manière sécuritaire,
20:25puisqu'elles en meurent à l'heure actuelle.
20:28Et ça, en fait, ce qui est assez intéressant,
20:30c'est que quand on voit, quand on fait toutes ces campagnes-là,
20:32c'est que ces alliances, quand vous luttez sur l'avortement,
20:36moi, ce qui m'intéresse en ce moment,
20:37comme ça a été le cas en Pologne,
20:38mais comme c'est le cas dans pas mal de pays d'Amérique du Sud,
20:40ça place le féminisme au cœur du logiciel politique.
20:42C'est-à-dire que le combat, il va commencer par des manifestations
20:45de femmes sur l'IVG, etc.
20:47Par exemple, en Pologne, ça a été le cas
20:48avant que le gouvernement soit renversé,
20:49le gouvernement autoritaire, par les élections.
20:52Et après, il y avait de plus en plus de gens aux manifestations, etc.,
20:56qui ne savaient même pas que ça avait commencé par un combat comme l'IVG,
20:59et qu'en fait, le combat féministe devenait un logiciel politique.
21:02On l'a vu dans des pays d'Amérique du Sud aussi.
21:04Et moi, c'est ça qui me manque en ce moment, notamment en France.
21:07C'est-à-dire que j'ai l'impression que le féminisme, c'est encore...
21:10Oui, bien sûr, il y a beaucoup plus de gens
21:11qui vont se dire féministes dans la sphère politique, etc.
21:13Il y a beaucoup plus d'associations qu'il y a 10 ans,
21:16où c'était quand même minoritaire.
21:19Ça reste... Ce n'est pas un logiciel programmatique.
21:21Et je le vois, parce que je travaille avec les partis politiques.
21:23Ils ne l'ont pas au cœur.
21:24Oui, alors il faut préciser, Alice,
21:26que vous êtes élue à la mairie de Paris.
21:28Comment vous comprenez cette surdité
21:31par rapport aux appareils politiques ?
21:33Absolument. Je la vis en tout cas tous les jours.
21:35Mais en tant qu'élue... Mais vraiment, parce qu'ils sont...
21:37Alors, un, parce qu'il y en a qui ne sont pas d'accord,
21:39c'est-à-dire qu'ils n'ont pas envie que ça devienne le cœur de résistance.
21:42Deux, et je parle vraiment aussi de gens de gauche,
21:44pour qui, pour moi, ça devrait être une évidence
21:46de comprendre maintenant des enjeux contemporains,
21:48que la gauche passe par le féminisme,
21:50absolument, mais pas juste, encore une fois,
21:52comme on a tout un chapitre.
21:53Alors, est-ce qu'ils sont trop vieux ?
21:55Est-ce qu'ils ne sont pas intéressés par les jeunes générations
21:59qui, elles, sont plutôt passionnées et engagées dans le féminisme ?
22:04Oui, mais parce que je pense que ça, c'est un leurre de pensée.
22:07On est en politique...
22:09Moi, je le vois en tant qu'élue.
22:10Il y en a très peu qui sont féministes.
22:12Il y en a très, très peu des élus féministes.
22:14Et quand vous l'êtes, en fait, ils viennent vous chercher,
22:16parce que vous êtes militante et tout ça.
22:17Et puis, une fois que vous êtes là,
22:19ils mettent très vite des limites à comment vous pouvez progresser.
22:22Vous pensez vraiment que le féminisme, aujourd'hui,
22:24est terriblement minoritaire ?
22:26Terriblement minoritaire. Et franchement, beaucoup plus massif...
22:28Et pourtant, on en parle beaucoup.
22:29Rien à voir avec il y a dix ans.
22:30Et pourtant, les forces des femmes et des féministes...
22:32Rien à voir avec il y a dix ans. Je vois, c'est factuel.
22:35C'est plus massif, on est d'accord.
22:37C'est plus devenu un mouvement de masse comme elle.
22:38Et puis, les jeunes filles, les jeunes femmes sont féministes.
22:41Rien à voir. C'est-à-dire, rien à voir avec moi,
22:42quand j'étais ado, je suis tout à fait d'accord.
22:43Et rien à voir avec...
22:44Et puis, il y a eu MeToo.
22:45Non, mais je suis entièrement d'accord avec tout ça, et vraiment.
22:47Et ça, c'est extrêmement important de le souligner.
22:49En revanche, je pense que, oui, là où ça se décide,
22:52dans les sphères de pouvoir, qu'elles soient politiques, financières,
22:57on est encore dans des parcours, mais extrêmement sexistes,
23:00extrêmement... Et dans la... J'allais dire, c'est juste...
23:03Ce qui est intéressant, d'ailleurs, avec MeToo,
23:04c'est que je pense qu'il y a des pratiques,
23:05où il y a des choses qui vont être...
23:07Ils vont faire un peu plus gaffe à ce qu'ils vont dire,
23:09si on a de la chance, ou des choses comme ça.
23:10Ils vont avoir un peu plus peur, ou des trucs comme ça.
23:12Enfin, dans la sphère politique qui est la vôtre, Alice,
23:15on peut voir qu'il y a un abaissement des femmes
23:18dans toutes les représentativités du politique.
23:21Mais c'est pour ça que, pour moi, c'est pas du tout...
23:22Et je le vois. Et en plus, quand on dit des femmes...
23:24Mais alors, si on va prendre des femmes féministes,
23:26je vous jure, moi, j'en vois si peu, quoi.
23:28Si peu ! C'est-à-dire qu'ils vraiment...
23:30Parmi les élus dont vous faites partie, il y en a combien ?
23:32Je sais pas, franchement... Il y a quasi personne.
23:35Non, mais c'est même pas une blague.
23:36C'est-à-dire, vraiment, il y a quasi personne.
23:37C'est très, très rare, des femmes vraiment féministes.
23:39Moi, je les compte vraiment sur les doigts d'une main,
23:41deux, peut-être, mais en France, c'est très rare.
23:43Les gens vraiment qui ont le savoir, la connaissance,
23:46qui ont été militantes féministes, qui le font de manière...
23:49Et on le voit. Pourquoi on le voit ?
23:50Parce que quand on a des événements qui surviennent,
23:53il y a des choses, c'est très facile à dire.
23:54En tant que féministe, c'est très automatique à dire.
23:56Même, ça aiderait la gauche d'avoir des pensées comme ça.
23:59Et elles les ont pas.
24:00Les gens n'ont pas, à gauche, ce logiciel-là
24:02parce qu'ils ne comprennent pas ça.
24:04Ils n'ont pas ça au cœur.
24:05C'est-à-dire, je pense vraiment...
24:05Parce que le pouvoir est, par essence, masculin.
24:09Le pouvoir est, par essence, masculin.
24:10Le pouvoir est... Oui.
24:11Enfin, il a été confisqué pendant des siècles et des siècles,
24:14en tout cas, par les hommes.
24:15Oui, et puis, alors, vraiment, le pouvoir de manière générale.
24:18Mais je pense que la politique, en particulier,
24:20est une sphère qu'on va retrouver dans d'autres choses.
24:22Il y avait des sociologues qui disaient, justement,
24:23le vestiaire et l'armée.
24:25Le sport et l'armée, des bastions quand même très masculins,
24:27de sociabilité aussi masculine.
24:29Mais la politique, elle a été conçue comme ça aussi.
24:31Elle a été très clairement conçue aussi
24:33comme des regroupements où on pouvait un peu rigoler,
24:36faire des conquêtes, franchement,
24:37ce qu'ils appellent des conquêtes féminines.
24:38Les roses du pouvoir.
24:39Mais c'était vu comme ça.
24:40Donc, c'est pensé comme ça, la politique.
24:42Donc, je ne dis pas que maintenant, on ne peut pas le faire différemment.
24:45Et je ne dis pas qu'il n'y avait pas aussi des gens qui avaient des idéaux.
24:48Et il y a des très belles figures, évidemment,
24:50qui ont fait des super trucs.
24:51Mais je veux dire, c'est quand même...
24:54On s'appuie...
24:55Moi, quand j'arrive dans une assemblée politique,
24:57c'est quand même ça, leur inconscient collectif et leur imaginaire.
25:00On est encore là-dedans.
25:02Et comme tout imaginaire,
25:03ce n'est pas juste les hommes, ça imprègne aussi les femmes.
25:05Et donc, les femmes politiques, elles sont très, très imprégnées aussi de ça.
25:08Mais tellement, tellement.
25:09Et moi, je ne peux pas...
25:10J'ai toujours beaucoup de mal à critiquer une femme publiquement, justement.
25:13Mais c'est très dur aussi,
25:15parce qu'elles sont elles-mêmes soumises
25:17aux contraintes, à des injonctions, à un jeu,
25:20et à la solidarité.
25:21Ce n'est pas toujours ça, quoi.
25:23Dernière question, Alice.
25:24L'avenir du féminisme, selon vous ?
25:27L'avenir du...
25:29Je crois beaucoup vraiment dans le militantisme lesbien.
25:33Donc, vraiment, c'est quelque chose, je pense que quand...
25:36Et quand je dis lesbienne, c'est-à-dire sur le lesbiennisme politique,
25:39ça ne veut pas dire un truc d'avec qui vous couchez,
25:41je me couche bien avec qui ils veulent.
25:43Mais ça veut dire vraiment sur...
25:47se détacher du regard des hommes, quoi.
25:48Plus être soumise à ça, plus se dire, et dans toutes les sphères,
25:52qu'elles soient culturelles, de la vie quotidienne,
25:54de la séduction, du truc de la validation,
25:57des trucs d'être approuvés.
25:59C'est une respiration à l'avenir du féminisme.
26:00Moi, je pense que c'est vraiment comme ça que ça passera.
26:02Et quand je dis, autant je peux insister sur des rapports de force
26:04et qu'eux, ils mènent un combat,
26:06moi, je ne suis pas dans un truc de prise d'armes ou un truc comme ça,
26:08mais je crois vraiment qu'on a des leviers fantastiques
26:11qui sont juste de, arrêtons de leur donner de l'oxygène
26:13avec nos regards, nos soupiraines amourées et tout ça.
26:16Si on leur enlève ça, ça va être comme un poisson sans bicyclette.
26:20Ils vont...
26:21Donc, je pense que ça passera par là.
26:23Merci beaucoup, Alice.