Le 24 juin 2022, coup de tonnerre aux États-Unis. La Cour Suprême, la plus haute instance judiciaire du pays, supprime le droit fédéral à l'IVG, l'interruption volontaire de grossesse. Deux ans plus tard, ce sujet est toujours d'actualité et fait même partie des principaux thèmes de campagne de Donald Trump et de Kamala Harris. Mais bien d'autres débats de société agitent la campagne présidentielle américaine.
Pour en discuter, Jean-Pierre Gratien reçoit en plateau la politiste Elisa Chelle, l'enseignant-chercheur Lauric Henneton, et le journaliste franco-américain Gérald Olivier.
LCP fait la part belle à l'écriture documentaire en prime time. Ce rendez-vous offre une approche différenciée des réalités politiques, économiques, sociales ou mondiales....autant de thématiques qui invitent à prolonger le documentaire à l'occasion d'un débat animé par Jean-Pierre Gratien, en présence de parlementaires, acteurs de notre société et experts.
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#LCP #documentaire #debat
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NewsTranscription
00:00:00Générique
00:00:02...
00:00:16Bienvenue à tous.
00:00:17Le 24 juin 2022, coup de tonnerre aux Etats-Unis.
00:00:21La Cour suprême, la plus haute instance judiciaire du pays,
00:00:24supprime le droit fédéral à l'IVG,
00:00:27l'interruption volontaire de grossesse.
00:00:29Voilà ce que va nous rappeler le documentaire qui suit,
00:00:32Amérique, la nouvelle bataille de l'avortement,
00:00:35réalisée sur place, deux ans plus tard,
00:00:37dans plusieurs Etats américains, par Cyril Denvers.
00:00:40Je vous laisse le découvrir et je vous retrouverai juste après,
00:00:44sur ce plateau, en compagnie de la politiste Elisa Schell,
00:00:47de l'historien Laurie Kenton et du journaliste Gérald Olivier.
00:00:51Avec eux, nous nous interrogerons sur les débats de société
00:00:55qui agitent aujourd'hui la campagne présidentielle américaine.
00:00:59Bonne nuit.
00:01:02Musique pesante
00:01:05...
00:01:13-"J'appelle Amanda Zurowski à la barre.
00:01:16Veuillez lever la main droite,
00:01:19jurer de témoigner devant cette cour,
00:01:21de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
00:01:25Je le jure. Veuillez vous asseoir."
00:01:27...
00:01:30J'étais enceinte de 17 semaines et 6 jours.
00:01:34J'entamais mon deuxième trimestre de grossesse.
00:01:37J'ai ressenti du liquide couler le long de ma cuisse.
00:01:43Je sais maintenant qu'il s'agissait de mon liquide amniotique.
00:01:47La première chose que j'ai demandé, c'est que pouvons-nous faire ?
00:01:52Elle m'a répondu que, malheureusement,
00:01:54la fausse couche était inévitable.
00:01:57J'ai demandé s'il n'y avait pas quelque chose à faire
00:02:00et le médecin m'a répondu qu'en raison des lois en vigueur au Texas,
00:02:04il ne pouvait pas intervenir parce que le coeur du bébé battait encore
00:02:08et que provoquer l'accouchement aurait été considéré
00:02:12comme un avortement illégal.
00:02:14Il ne pouvait rien faire.
00:02:20Alors, plusieurs fois,
00:02:24j'ai dû faire des échographies pour voir si son coeur battait toujours.
00:02:29Je voulais l'entendre et ne pas l'entendre en même temps.
00:02:37Amanda Zurowski a dû assister à l'agonie de son futur enfant,
00:02:43Inutero.
00:02:46Sa grossesse n'était plus viable à 4 mois,
00:02:49mais elle n'a pas eu le droit à un avortement.
00:02:53La loi au Texas lui a interdit de toucher à son fœtus
00:02:57tant qu'il était encore vivant.
00:03:05L'affaire mobilise les médias.
00:03:07Trois autres femmes ont connu les mêmes préjudices
00:03:10avec des complications médicales qui, pour certaines,
00:03:14ont failli leur être fatales.
00:03:16Ensemble, elles attaquent le Texas en justice
00:03:19pour obliger leur État à suspendre sa loi anti-avortement.
00:03:25L'État sudiste sacralise la vie du fœtus,
00:03:28presque en toutes circonstances.
00:03:30Il est le berceau de l'Amérique dite pro-vie,
00:03:33ultra-religieuse et radicale,
00:03:35au pouvoir, au plus haut sommet de l'État,
00:03:38à la Cour suprême.
00:03:42Le 24 juin 2022,
00:03:44ces neuf juges ont bafoué la liberté des femmes.
00:03:48Ils ont supprimé le droit à l'avortement
00:03:50garanti depuis 50 ans dans tout le pays.
00:03:55Aucune institution politique aux États-Unis
00:03:58ne peut s'opposer à leur décision.
00:04:18...
00:04:44Les femmes n'ont pas l'intention de vaciller.
00:04:4962 % des Américains soutiennent toujours l'IVG.
00:04:54Du simple bénévole au soignant,
00:04:56ils sont des millions à préserver ce droit fondamental
00:04:59pour leurs concitoyennes.
00:05:02Leur visage incarne un sursaut,
00:05:05un rempart face aux idéologies radicales.
00:05:18...
00:05:42Ce qu'ils veulent vraiment,
00:05:44c'est le contrôle de la famille,
00:05:46le contrôle des femmes.
00:05:48Ils veulent que les femmes reviennent à la maison,
00:05:51qu'elles reviennent à quelque chose qui ressemble à l'an 50.
00:05:54...
00:05:58L'attitude des chrétiens blancs nationalistes
00:06:01n'a aucune limite.
00:06:03On doit imaginer un monde où on ne s'arrête à rien
00:06:06pour empêcher les femmes d'obtenir l'avortement.
00:06:08...
00:06:29A l'origine, c'est grâce à la bataille judiciaire
00:06:33d'une jeune Texane de 22 ans
00:06:35que les Américains ont pu connaître la liberté de l'avortement.
00:06:38En 1969,
00:06:41Norma McCorvey souhaite interrompre sa troisième grossesse.
00:06:45Mais la loi de son Etat lui interdit.
00:06:48Sous le nom d'emprunt de Jen Rowe,
00:06:51elle se porte en justice contre le Texas
00:06:54et son avocat, Henry Wade.
00:06:56La cour suprême lui donne raison.
00:07:00L'arrêt Rowe contre Wade fait jurisprudence.
00:07:04Il légalise en 1973
00:07:07l'IVG dans tout le pays, jusqu'à 22 semaines.
00:07:10...
00:07:1650 ans plus tard,
00:07:18la révocation du droit national à l'avortement
00:07:21sonne comme une revanche au Texas.
00:08:04...
00:08:09Dans cette partie de l'Amérique puritaine,
00:08:12la légalisation de l'IVG acquise en 1973
00:08:15n'a jamais été acceptée.
00:08:17...
00:08:26Ce soir, on fête ici sa disparition.
00:08:30Les 1 200 convives sont des militants pro-vie,
00:08:33à leurs yeux, la vie est intouchable dès la conception,
00:08:37car elle est une création de Dieu.
00:08:40Ils vivent dans le dogme religieux,
00:08:42soutiennent la décision de la cour suprême
00:08:45et la Texas Alliance for Life,
00:08:47l'une des plus importantes organisations pro-vie
00:08:50du sud des Etats-Unis.
00:08:57Joe Pojman, qui se fait appeler Dr. Pojman,
00:09:01est un ancien ingénieur de la NASA.
00:09:03Il est aujourd'hui un lobbyiste anti-avortement, très actif.
00:09:09Il a facilité la création de la loi dite de la protection humaine,
00:09:13qui interdit depuis août 2022 l'IVG au Texas dès la conception,
00:09:18même en cas de viol, même en cas d'inceste.
00:09:33...
00:10:00Les premiers chiffres montrent
00:10:02qu'il y a eu une forte augmentation des naissances au Texas.
00:10:05Au Texas, de très nombreuses femmes accouchent plutôt que d'avorter.
00:10:09Je m'en réjouis.
00:10:11Ces enfants deviendront de grands citoyens.
00:10:14Ils seront nos médecins, nos avocats, nos plombiers,
00:10:17nos comptables, nos travailleurs de tout type,
00:10:21nos femmes au foyer.
00:10:22Je me réjouis de voir ces bébés naître
00:10:25et devenir de grands citoyens de notre Etat et de notre nation.
00:10:31Notre objectif est de construire au Texas une société
00:10:34où personne ne se sentira obligé de recourir à l'avortement,
00:10:38parce qu'il n'y a pas d'issue.
00:10:42Nous voulons construire une culture de la vie.
00:10:45C'est une expression que beaucoup d'entre nous,
00:10:48aux Etats-Unis et probablement dans le monde entier,
00:10:51empruntons au pape Jean-Paul II,
00:10:55qui a écrit un document très influent sur la culture de la vie.
00:11:00Applaudissements
00:11:06Il est terrible que la société attende des femmes
00:11:08qu'elles prennent soin d'elles-mêmes,
00:11:11qu'elles gèrent une grossesse non désirée
00:11:13en prenant la vie de leur propre enfant.
00:11:17Et je tiens à rappeler à tout le monde
00:11:19que nous savons maintenant que ce corps dans le ventre de la femme
00:11:23ne lui appartient pas.
00:11:25Il s'agit d'un organisme distinct.
00:11:28L'enfant à naître est un être distinct de la mère
00:11:31et nous ne pourrons jamais défendre une société
00:11:34qui accepte au nom de l'autonomie de la femme
00:11:37de supprimer la vie d'un enfant.
00:11:44C'est pas comme ça que ça marche.
00:11:49Il s'agit du droit des femmes.
00:11:52Elles ont le droit de décider de leur destin et d'accéder aux soins.
00:11:56Il n'y a personne d'autre de décider pour elles.
00:12:01Jordis donne tout son temps
00:12:03pour défendre la liberté de choix de l'avortement.
00:12:06Elle est, selon l'expression américaine, une pro-choix.
00:12:15Jordis habite l'un des 20 États américains
00:12:18qui a choisi de préserver l'accès à l'avortement.
00:12:22Dans son arbitrage du 24 juin 2022,
00:12:25la Cour suprême a supprimé le droit fédéral à l'IVG,
00:12:28mais elle a laissé le choix à chaque État
00:12:31de décider de sa législation.
00:12:34Le pays est comme coupé en deux.
00:12:3815 États l'ont totalement banni.
00:12:41Six l'ont fortement restreint.
00:12:45Un séisme pour une Américaine sur trois,
00:12:48soit près de 25 millions de femmes
00:12:50qui n'ont d'autre solution que de voyager
00:12:52pour atteindre les rives de l'Amérique libérale
00:12:55et trouver dans l'urgence une aide médicale.
00:13:22...
00:13:38Au sud de l'Illinois, dans la petite ville de Carbondale,
00:13:41la clinique Alamo offre un premier refuge
00:13:44aux naufragés de l'avortement.
00:13:46...
00:13:52Oh !
00:13:56Ces gens viennent du Kentucky.
00:13:59Ils sont probablement à trois ou quatre heures
00:14:04de là où nous sommes.
00:14:13Sur le parking, Jordi se charge de l'accueil, bénévolement.
00:14:18Elle porte le gilet de l'accompagnatrice
00:14:20que l'on retrouve devant toutes les cliniques abortives
00:14:23pour offrir un premier réconfort à l'arrivée des patientes.
00:14:28À 69 ans, Jordi s'est à l'expérience de la vie.
00:14:31Elle est mère de deux filles.
00:14:32Elle a connu elle-même des IVG à deux reprises.
00:14:37Salut, les gars !
00:14:39Bienvenue dans l'Illinois, à la clinique Alamo.
00:14:42Je suis votre vieille, vieille escorte.
00:14:45D'accord ?
00:14:46Je suis juste là pour vous aimer et vous soutenir.
00:14:50Monsieur, si vous avez besoin d'aller aux toilettes,
00:14:53vous pouvez entrer et les utiliser.
00:14:55C'est bon ? Très bien. Allons-y.
00:15:02Tu vas bien ?
00:15:04Oui, madame, et vous ?
00:15:05Je vais bien.
00:15:07C'est un honneur pour moi d'être ici pour vous, les femmes.
00:15:11J'apprécie aussi.
00:15:12Merci beaucoup, ma chérie.
00:15:15Je m'inquiète pour vous toutes,
00:15:17bien plus que je ne peux vous le dire.
00:15:20Le truc qui fait sortir mon vieux corps plein d'arthrite du lit
00:15:23pour venir ici,
00:15:25c'est pour que ces femmes sachent qu'elles ne sont pas seules.
00:15:28Il y a d'autres femmes qui les soutiennent.
00:15:31Et...
00:15:33Pour juste avoir un mot gentil pour elles,
00:15:36c'est aussi simple que ça.
00:15:39Il s'agit d'amour
00:15:41et de montrer aux gens le respect qu'ils méritent
00:15:44simplement parce qu'ils sont des êtres humains.
00:15:47Oh !
00:15:49Je crois qu'on a besoin de moi.
00:15:51Bienvenue dans l'Illinois à l'amour.
00:15:55Tu vas bien, ma chérie ?
00:15:57Tu es en sécurité maintenant, d'accord ?
00:16:00C'est bon. Viens avec moi. Allons-y.
00:16:02J'ai peur.
00:16:03Pourquoi ?
00:16:04J'ai peur.
00:16:06Oh, ma chérie n'ait pas peur.
00:16:08De quoi as-tu peur ?
00:16:10De l'intervention, mais je n'ai plus le choix.
00:16:13C'est trop tard pour moi pour la pilule abortive.
00:16:15Tout ira bien.
00:16:17L'intervention en elle-même est sûre.
00:16:19Faut pas que tu t'inquiètes.
00:16:21C'est juste pas mal d'attente.
00:16:24Alors, respire profondément.
00:16:27Tu es en sécurité avec nous maintenant.
00:16:30D'accord ?
00:16:31Je suis juste là pour t'aimer et te soutenir
00:16:34et te faire savoir que tout va bien se passer.
00:16:38Ça va aller.
00:16:39D'accord ?
00:16:40D'accord.
00:16:41Viens, ma chérie.
00:16:42Je suis un peu nerveuse.
00:16:44Je sais bien et je le vois dans tes yeux.
00:16:55La clinique Alamo réalise des avortements médicamenteux
00:16:59et chirurgicaux.
00:17:00L'affluence est forte depuis la décision de la Cour suprême.
00:17:04En moyenne, elle reçoit 30 femmes par jour,
00:17:07originaires à 95 % de l'extérieur de l'Etat.
00:17:15Sa directrice, Andrea Galliegos,
00:17:17a grandi dans le milieu des soins obstétriques.
00:17:20Elle est fille de gynécologue.
00:17:22Dès l'abrogation fédérale de l'avortement,
00:17:25elle a dû abandonner les deux cliniques spécialisées dans l'IVG
00:17:28qu'elle possédait avec son père, au Texas et en Oklahoma.
00:17:33Allez-y, entrez.
00:17:35Je vous explique et après, je sors.
00:17:39Vous pouvez mettre vos affaires là-haut, sur l'étagère.
00:17:42Et déshabillez-vous à partir de la taille.
00:17:46Mais Andrea est une résistante.
00:17:50Elle est venue s'installer en famille dans les Linois,
00:17:53à l'automne 2022, pour voler au secours de ses concitoyennes,
00:17:57juste aux frontières de l'Amérique religieuse.
00:18:05Nous recevons des patients du Texas,
00:18:07de tous les Etats où l'avortement est interdit.
00:18:10Et pour beaucoup, notamment ceux qui viennent du Tennessee,
00:18:14du Kentucky et du Mississippi,
00:18:17nous sommes la clinique la plus proche.
00:18:22Tout va bien ?
00:18:25Vous n'aimez pas les aiguilles ?
00:18:27Je vais me débrouiller, ça va être rapide. D'accord ?
00:18:31Les patients arrivent ici épuisés,
00:18:33parce qu'ils ont voyagé pendant des heures.
00:18:35Leur voyage n'a pas commencé à 9h du matin,
00:18:38quand ils sont arrivés ici,
00:18:39mais quand ils sont partis de leur maison
00:18:41et qu'ils ont conduit 5h, 8h.
00:18:45Je viens de Memphis.
00:18:46À cause des récents changements législatifs,
00:18:49l'avortement est presque totalement illégal,
00:18:52surtout dans les Etats du Sud.
00:18:53Il m'a fallu 3 semaines pour arriver jusqu'ici,
00:18:56pour organiser le transport,
00:18:58mais aussi parce que j'ai des enfants qui vont à l'école.
00:19:02J'ai dû trouver le bon moment en fonction de leur emploi du temps.
00:19:06J'ai 5 enfants.
00:19:07Je viens de sortir d'une relation de 11 ans avec leur père,
00:19:11et j'essaie de me débrouiller toute seule.
00:19:13Et je sais que ce n'est pas le bon moment d'avoir un nouvel enfant.
00:19:20Je n'en ai pas parlé à ma famille ou à qui que ce soit d'autre.
00:19:23Même le père ne le sait pas.
00:19:28Je sais ce qui est le mieux pour moi.
00:19:31J'ai deux enfants.
00:19:33Mon plus jeune a 10 ans et je n'en veux pas d'autres.
00:19:37Mais qui sait ?
00:19:38Peut-être dans quelques années, je me sentirai plus solide que maintenant.
00:20:02Nous voyons des femmes venir se faire avorter pour différentes raisons.
00:20:06Ce n'est pas comme si elles se levaient le matin en disant
00:20:09qu'elles allaient juste se faire avorter.
00:20:12Ce n'est pas ce qui se passe ici.
00:20:13Contrairement à ce que certaines personnes pensent,
00:20:16ce n'est pas du tout ce qui se passe.
00:20:19Ce sont là des décisions angoissantes pour ces femmes.
00:20:22Très angoissantes.
00:20:25Je ne serais pas en paix avec moi-même
00:20:28si je ne venais pas dans cette clinique au moins 2 ou 3 fois par semaine
00:20:32pour dire aux femmes que c'est bon.
00:20:34Vous avez le droit de le faire.
00:20:36C'est OK.
00:20:38Vous décidez.
00:20:42Ne sois pas trop dure envers toi-même.
00:20:45Merci d'être là pour moi.
00:20:46Tu es la bienvenue, ma chérie.
00:20:48Que la paix soit avec toi sur le chemin du retour.
00:20:51Je suis là si tu en as besoin, ma chérie.
00:20:54Merci beaucoup.
00:20:56Tu es la bienvenue.
00:20:58Elle a décidé de ne pas avorter.
00:21:03Donc...
00:21:04C'est une décision vraiment difficile pour ce petit cookie.
00:21:08Elle est pleine d'incertitudes.
00:21:10Elle ne sait pas comment s'occuper de ce bébé.
00:21:13Vous savez ?
00:21:15Ce n'est pas mon rôle, ni le rôle de qui que ce soit,
00:21:18de dire à ces femmes ce qu'elles doivent faire de leur corps.
00:21:21Je ne suis pas là pour ça.
00:21:23Je ne suis pas là pour ça.
00:21:24Nous pouvons leur donner des informations
00:21:27pour les aider à prendre des décisions.
00:21:29Mais les cliniques ne disent pas aux femmes de se faire avorter.
00:21:33Ce n'est pas le rôle des cliniques.
00:21:36Si elles changent d'avis,
00:21:38on les aime, on les soutient de la même façon.
00:21:41Musique douce
00:21:44...
00:21:46...
00:21:48...
00:21:50...
00:21:53...
00:21:55L'éducation sexuelle et la contraception
00:21:58ne sont toujours pas enseignées dans la plupart des écoles des Etats-Unis.
00:22:04En conséquence, le taux de grossesse non désiré
00:22:07est l'un des plus importants de l'Occident.
00:22:10La moitié des femmes les plus impactées
00:22:13par l'interdiction de l'avortement
00:22:15sont issues des communautés afro-américaines
00:22:17et vivent sous le seuil de pauvreté.
00:22:21Leur précarité les prive d'une assurance médicale
00:22:24très coûteuse aux Etats-Unis.
00:22:26Une entrave supplémentaire à l'accès à l'IVG,
00:22:29dont le coût est d'environ 600 $ en moyenne,
00:22:31sans compter les frais de déplacement.
00:22:36Ici, je suis à environ 6 heures de chez moi.
00:22:39J'ai dû traverser deux Etats pour venir.
00:22:41J'ai dépensé environ 200 $ en logement
00:22:44parce que j'ai dû dormir à l'hôtel.
00:22:47Et puis, je devrais trouver un hôtel ce soir après l'intervention.
00:22:51Et puis, il y a la nourriture.
00:22:53Et en plus de cela, j'ai dû prendre un congé sans solde,
00:22:56ce qui est un manque à gagner pour moi.
00:22:58Donc, je dirais... Oh, oui.
00:23:00J'ai dû dépenser à peu près 1 000 $.
00:23:04Nous ne voulons pas que l'argent empêche qui que ce soit
00:23:07de venir à nous.
00:23:09C'est pourquoi nous avons noué de nombreux partenariats
00:23:12avec des organismes d'aide financière
00:23:14afin de les aider à payer toutes ces charges.
00:23:17Si une femme n'a pas suffisamment d'argent,
00:23:19on peut proposer la prise en charge totale
00:23:22de la procédure médicale, ou seulement une partie.
00:23:25Il y a toujours une solution de financement possible
00:23:28pour aider à couvrir non seulement le coût de l'intervention,
00:23:32mais aussi le coût du voyage.
00:23:35Après l'échographie d'aujourd'hui,
00:23:37on va vérifier où en est la fécondation
00:23:40et vérifier à combien de semaines vous êtes.
00:23:42Une fois qu'on aura fait ça, on vous donnera la première pilule.
00:23:46Je m'inquiète toujours pour les patients
00:23:49qui ne peuvent pas venir jusqu'à nous.
00:23:51Qu'arrive-t-il à ces femmes ?
00:23:53Que leur arrive-t-il physiquement, psychologiquement,
00:23:57émotionnellement, socialement ou économiquement
00:24:01lorsqu'elles sont forcées de rester enceintes ?
00:24:08Vous allez prendre cette pilule maintenant
00:24:10et vous revenez à 12h20.
00:24:13...
00:24:21Ca a été difficile de prendre la décision d'avorter
00:24:24parce que j'ai grandi dans la culture pro-vie avant tout.
00:24:30Au début, j'étais contre l'avortement.
00:24:33J'ai grandi dans la religion.
00:24:35Je n'étais pas au courant de ce qui se passait dans le monde réel,
00:24:39de ce que cela voulait dire.
00:24:41Maintenant, je le sais en tant qu'adulte.
00:24:45Je pense que l'avortement doit être libre d'accès.
00:24:48Les gens sont prisonniers de la religion.
00:24:52J'ai l'impression qu'une grande partie de cette loi
00:24:55est déterminée par le dogme religieux.
00:24:58Et je ne pense pas qu'elle devrait l'être du tout.
00:25:02Vous aimez vos familles,
00:25:05vous aimez vos voisins,
00:25:07vous aimez notre nation
00:25:09et vous aimez chaque enfant,
00:25:11né et non né,
00:25:12parce que vous croyez que chaque vie est sacrée,
00:25:16que chaque enfant est un cadeau précieux de Dieu.
00:25:20Donald Trump est sans nul doute
00:25:23le grand artisan de la disparition du droit à l'IVG
00:25:26dans la moitié de l'Amérique.
00:25:28Le milliardaire new-yorkais, cet improvisé militant pro-vie,
00:25:31a des fins purement électoralistes.
00:25:34Mariana avait 17 ans quand elle a découvert qu'elle était prête.
00:25:38Mariana a choisi bravement la vie
00:25:40et a bientôt donné naissance à son fils.
00:25:43Il a su séduire l'électorat religieux du pays,
00:25:46qui représente un quart des suffrages.
00:25:52Comme ses prédécesseurs républicains,
00:25:54il a épousé la doctrine ultraconservatrice,
00:25:57appelée la majorité morale.
00:25:59...
00:26:02Je vais exécuter avec fierté...
00:26:04...l'Office du président des Etats-Unis...
00:26:07...l'Office du président des Etats-Unis...
00:26:11...et, à la meilleure de mes capacités...
00:26:13Poussé par les lobbies extrémistes qui l'ont porté au pouvoir,
00:26:16Donald Trump commence son travail de sape.
00:26:19Il donne à la Cour suprême, la plus haute institution du pays,
00:26:23chargée de trancher les grands débats de société,
00:26:26sa nouvelle couleur conservatrice.
00:26:29En avril 2017, il nomme Nell Gorsuch,
00:26:33un juge opposé au remboursement de la contraception
00:26:36par les mutuelles d'entreprises.
00:26:39En juillet 2018, Donald Trump désigne Brett Kavanaugh,
00:26:43un adversaire du mariage homosexuel.
00:26:47Puis, en 2020, Donald Trump n'attend pas le résultat
00:26:50des présidentielles comme c'est l'usage
00:26:53pour nommer un nouveau juge,
00:26:54conforme à la couleur politique du scrutin.
00:27:02Battu par Joe Biden, il a réussi à placer Amy Connett Barrett,
00:27:0645 jours avant la fin de son mandat.
00:27:10Une mère de sept enfants,
00:27:12proche d'un mouvement religieux radical.
00:27:14La haute magistrate est une pro-vie convaincue.
00:27:18Elle est contre le mariage gay, contre la contraception.
00:27:24La majorité de la Cour suprême a basculé.
00:27:27Désormais, six de ses neuf membres
00:27:30sont des fondamentalistes anti-avortement,
00:27:33nommés à vie,
00:27:34leur décision, en force de loi.
00:27:46Presque aussitôt, la Cour suprême de Donald Trump
00:27:50montre son nouveau visage.
00:27:52Elle ne s'oppose pas au Texas à une loi anti-avortement,
00:27:55huit mois avant que ne soit révoqué le droit à l'IVG
00:27:59sur tout le territoire.
00:28:00Dès septembre 2021,
00:28:03la loi anti-avortement, SB8, entre en vigueur.
00:28:13Deux ans plus tard, six Texans se révoltent.
00:28:16Aucune d'entre elles n'a eu le droit à une IVG.
00:28:21Alors que leur grossesse était condamnée
00:28:24et qu'elle était devenue un danger pour certaines d'entre elles.
00:28:28Devant les médias du pays,
00:28:30elles poursuivent le Texas en justice
00:28:32pour faire tomber la loi anti-avortement, SB8.
00:28:35Pendant deux jours,
00:28:37trois plaignantes sont entendues par un tribunal civil.
00:29:32...
00:29:41Samantha s'écroule,
00:29:43hantée par le souvenir d'avoir vu mourir son bébé dans ses bras.
00:29:47Le diagnostic était pourtant sans appel.
00:29:51A cinq mois de grossesse,
00:29:53la malformation crânienne de son fœtus
00:29:55ne lui laissait aucune chance de survie.
00:30:03Mais l'interdiction de l'IVG au Texas
00:30:06a laissé Samantha dans le dénuement.
00:30:08Ni elle, ni son compagnon
00:30:11n'avaient l'argent pour voyager dans un Etat libéral.
00:30:14Samantha a été forcée de donner naissance à une petite fille...
00:30:20qui n'a survécu que quatre heures.
00:30:23...
00:30:34Elisabeth Weller fait aussi partie des six plaignantes,
00:30:38victimes de la loi anti-avortement SB8.
00:30:43A 18 semaines de grossesse,
00:30:45Elisabeth a subitement perdu son liquide amniotique,
00:30:49puis elle a frôlé la septicémie,
00:30:51chez elle, seule, avec son mari.
00:30:56Je suis donc allée aux urgences.
00:30:58Un médecin est arrivé et m'a dit...
00:31:01OK, vous avez perdu les os,
00:31:03mais le col de l'utérus est encore fermé.
00:31:06Tout ce que nous pouvons faire maintenant,
00:31:09c'est espérer et prier pour que les choses s'améliorent.
00:31:13Je lui ai dit... Vous savez, je suis pas croyante,
00:31:16mais je suppose que je dois prier maintenant, n'est-ce pas ?
00:31:20Et pendant ce temps, mon médecin se met à pleurer.
00:31:24Elle me regarde et me dit...
00:31:26Je suis désolée, je ne peux pas vous toucher,
00:31:29je ne peux rien faire.
00:31:35Elle me dit que l'administration ne la croyait pas,
00:31:40quand elle leur expliquait que j'étais malade,
00:31:43parce que lors de mon admission, j'avais opté pour les antibiotiques
00:31:47afin d'éviter toute infection future.
00:31:50Alors elle m'a dit que la seule façon pour moi d'obtenir de l'aide,
00:31:54c'était de revenir suffisamment malade.
00:31:57Par exemple, quand je ferais une septicémie.
00:32:15Je suis passée d'un lit d'hôpital à mon propre lit,
00:32:18dans mon propre environnement,
00:32:21mais j'ai du mal à réaliser que mon bébé bouge,
00:32:24qu'il est toujours vivant, mais qu'il est en train de mourir.
00:32:28Je n'arrive pas à croire ce que je suis en train de vivre.
00:32:32Comment suis-je arrivée là ?
00:32:34Et l'une des consignes que nous avions
00:32:38était de vérifier ma fièvre toutes les deux heures,
00:32:42parce que si elle atteignait les 40 degrés,
00:32:44c'est qu'il fallait aller à l'hôpital.
00:32:47Une autre consigne était d'attendre que mes pertes deviennent jaunes.
00:32:50Il n'y avait rien de pire pour moi, en tant que mari,
00:32:54que d'espérer que ma femme tombe malade.
00:32:58Car si elle tombait malade,
00:33:00cela voulait dire que nous pouvions aller à l'hôpital pour la faire soigner.
00:33:04Chaque fois que nous prenions sa température et qu'elle était normale,
00:33:08d'une certaine façon, c'était une mauvaise nouvelle.
00:33:12Et c'est arrivé.
00:33:14Des pertes jaunes.
00:33:16J'ai regardé.
00:33:19J'ai senti et j'ai presque vomi.
00:33:21Et je lui ai dit...
00:33:23James, c'est en train d'arriver.
00:33:26Nous nous sommes serrées dans les bras en se disant merci.
00:33:29Merci.
00:33:32Et c'est un moment d'exaltation, de célébration.
00:33:37Et pourtant, c'est le plus horrible moment de notre vie.
00:33:42Parce que nous sommes enfin heureux de pouvoir sortir de cette épreuve.
00:33:52Elisabeth a pu finalement avorter.
00:33:55Mais une fois seulement,
00:33:56que son foetus ne donnait plus signe de vie.
00:33:59Pour le moment, elle se refuse un tout nouveau projet d'enfantement.
00:34:04Elle ne se sent pas en sécurité,
00:34:06chez elle, au Texas.
00:34:12En théorie, elle aurait dû bénéficier de l'exception
00:34:15prévue par la loi anti-avortement SB8,
00:34:18qui autorise l'IVG uniquement dans le cas
00:34:21où la grossesse devient un danger pour la santé de la mère.
00:34:24Une notion médicale vague, trop imprécise pour les gynécologues,
00:34:29effrayée par la criminalisation de leurs pratiques.
00:34:33Comme tous ses collègues au Texas,
00:34:36le docteur Karsan travaille sous la menace de mourir
00:34:39de sanctions en cas d'avortement illégal.
00:34:44Les sanctions sont tellement lourdes.
00:34:4699 ans de prison,
00:34:49la perte du droit d'exercer la médecine
00:34:52et une amende de 100 000 dollars.
00:34:56Ils essayent d'intimider le corps médical
00:34:59avec la sévérité des sanctions, vous savez.
00:35:02En les incitant à se taire,
00:35:04ils font des choses incroyables.
00:35:07En les incitant à se taire et à ne plus agir.
00:35:13Damella est une professionnelle de la santé reproductive.
00:35:17Elle est membre du collège américain des gynécologues
00:35:20et dirige son propre cabinet privé
00:35:22au sein de l'hôpital de la femme à Houston.
00:35:26Elle fait partie des deux seuls médecins à se faire entrendre au Texas,
00:35:30à se joindre à la plainte des victimes de la loi SB8.
00:35:37Voici.
00:35:42Est-ce que la prenance est dangereuse ?
00:35:47En Texas, oui.
00:35:49Notre taux de mort est abysmal.
00:35:54C'est l'un des pires au pays.
00:35:56Et les États-Unis sont les pires dans le monde.
00:35:59Et j'ai peur que ça devienne pire.
00:36:04Après la loi SB8,
00:36:06avez-vous offert des abortions pour les conditions médicales
00:36:10listées dans l'exhibit 1 ?
00:36:12Je n'ai pas.
00:36:14Ça a amplifié
00:36:18la peur et la reluctance
00:36:20d'offrir à un patient une abortion,
00:36:23même si je pensais
00:36:25qu'il pourrait passer les exceptions dans la loi.
00:36:29En SB8, avez-vous peur des lois civiles ?
00:36:32Oui.
00:36:40Mais c'est difficile.
00:36:44Je veux dire de demander aux médecins de prendre des risques énormes
00:36:47pour sauver leur patiente,
00:36:49pour défendre leur sécurité.
00:36:53Je pense que c'est injuste. Je pense que nous devrions être soutenus.
00:37:02...
00:37:20J'ai rencontré quelques personnes qui étaient sur le point de mourir.
00:37:23Je suis donc sûre qu'il existe des cas dont nous n'avons pas entendu parler.
00:37:27Je vois les admissions aux urgences,
00:37:29et certaines femmes n'en sortent pas.
00:37:31Il y a des décès.
00:37:32Ce n'est qu'une question de temps pour qu'ils soient révélés.
00:37:35Vous savez, quand on est mort, on se fait moins entendre.
00:37:39...
00:37:5815 jours plus tard,
00:38:00le tribunal civil d'Austin accède à la demande des plaignantes.
00:38:04Il suspend la loi anti-avortement, SB8.
00:38:09En attendant que soit clarifiée l'exception médicale
00:38:12qui permettrait aux médecins de pratiquer une IVG
00:38:15en toute sérénité.
00:38:18Mais le procureur de l'Etat a fait appel,
00:38:21conforté par un mémoire déposé par les lobbies ProVit
00:38:24de Joe Pochman et de la Texas Alliance for Life.
00:38:29La décision finale de la cour est reportée à l'été 2024.
00:38:34Les grossesses de ces femmes
00:38:36se sont déroulées dans des conditions difficiles.
00:38:39Elles étaient sur le point de perdre leur bébé,
00:38:42mais elles ont failli perdre la vie aussi
00:38:45parce qu'elles ont été mal soignées par leurs gynécologues.
00:38:49J'ai été très attentif,
00:38:52et cela me brise le coeur
00:38:54d'avoir découvert ce qu'elles ont enduré.
00:38:57Mais cela m'a fait aussi comprendre
00:39:00que notre loi est vraiment bien conçue,
00:39:03avec beaucoup de soins et d'attention.
00:39:06Bien sûr, cette loi doit être efficace et dissuasive,
00:39:09et l'objectif est d'empêcher les avortements.
00:39:12Alors comment faire face aux problèmes des femmes
00:39:16qui vont se faire avorter hors de l'Etat ?
00:39:19Il y en a probablement environ 4000 qui ont quitté l'Etat
00:39:22pour se rendre dans des Etats voisins.
00:39:24Nous ne savons pas exactement où,
00:39:26mais quel désespoir peut pousser ces femmes à l'avortement ?
00:39:29...
00:40:00...
00:40:24...
00:40:27Aux portes du Texas et de l'Oklahoma, le Colorado est un autre état refuge pour les femmes privées de droit à l'avortement chez elles.
00:40:36L'IVG y est restée possible à tous les stades de la grossesse.
00:40:42Galvanisés par la composition de la Cour suprême, les pro-vie du Colorado sont à l'attaque, comme ils le sont sur toutes les terres de l'Amérique libérale.
00:40:57La conscience révèle que vous êtes bon, et Jésus-Christ révèle que vous êtes l'amour.
00:41:04J'espère que le nom de Jésus sera élevé à travers ma parole, et j'espère que vous utiliserez ce documentaire pour accomplir votre volonté.
00:41:14Kevin affirme avoir eu une révélation divine dans les montagnes du Colorado.
00:41:27Une rédemption pour cet ancien accro à la méthamphétamine qui s'est trouvé un nouveau chemin.
00:41:33Il fait du prosélytisme pour dissuader ses concitoyennes d'interrompre leur grossesse.
00:41:40Kevin fait partie d'un groupe de pro-vie qui fait le siège du planning familial de la ville de Fort Collins.
00:41:56Bonjour.
00:41:59Comment ça va ?
00:42:00Oui, ça va.
00:42:10Les militants anti-avortement se sont regroupés au sein d'un collectif baptisé 40 jours de prière.
00:42:17En symbole des 40 jours de sermons continus, professés deux fois par an au pied des murs du centre de soins.
00:42:39Bonjour, j'ai un cadeau pour vous. On est là pour vous aider.
00:42:52En pratique, Kevin et ses camarades tentent d'intercepter les femmes dès leur arrivée au planning familial.
00:42:59Sans jamais franchir cette ligne jaune.
00:43:02Le Colorado a promulgué une loi qui empêche les militants pro-vie d'approcher les centres d'avortement à moins de 200 mètres.
00:43:10Bonjour, comment allez-vous ? J'ai un cadeau pour vous.
00:43:13Merci.
00:43:14Et il y en a un de plus. Vous venez pour un test de grossesse ?
00:43:16Non, pour ma contraception.
00:43:18Ah, pour la contraception. Permettez-moi de vous donner autre chose.
00:43:21C'est vraiment très sain. Comment élever des enfants, la contraception naturelle et ça.
00:43:27Il y a beaucoup de choses mauvaises. Et ceci.
00:43:33La plupart des contraceptifs sont cancérigènes. Ils peuvent provoquer un avortement précoce.
00:43:39Si vous avez des questions, dans ce petit paquet rose là, il y a mon numéro de téléphone.
00:43:43Je serais heureux de vous donner plus d'informations. OK ? Merci.
00:43:47Au revoir.
00:43:48Dieu vous bénisse.
00:43:49Elle était toute mignonne.
00:43:54Une personne sur cinq s'arrête et prend une rose.
00:43:57Nous avons eu beaucoup plus de bébés sauvés depuis que nous avons commencé à donner des roses.
00:44:01Parce que c'est un signe de bonne volonté. Beaucoup de filles ne peuvent pas résister à une rose.
00:44:05On a même mis de l'eau bénite dans les petits flacons.
00:44:09On a mis un modèle de fœtus et une fiche qui expliquent le développement du bébé, de la conception jusqu'à la fin.
00:44:15Il y a un tract évangélique là-dedans.
00:44:19Il y a mon propre témoignage et mon histoire personnelle.
00:44:49Des ultrasondes, des tests pré-enfermés, du soutien confidentiel.
00:44:55Et vous vous éloignez de ce lieu sombre et mauvais.
00:44:59Vous ne regardez jamais en revue. Vous n'avez jamais de regrets.
00:45:03En fait, vous célébrez ce jour pour le reste de votre vie.
00:45:07Chaque fois qu'elle met ses petits bras autour de votre nez et vous appuie, vous êtes fatigué et elle vous dit « je t'aime ».
00:45:13Vous célébrez le jour où vous avez quitté Planned Parenthood.
00:45:18La propagande pro-vie est bien rôdée pour culpabiliser les femmes.
00:45:23Et elle ne s'arrête pas là.
00:45:25Kevin fait aussi la promotion de témoignages de femmes sur un site internet baptisé « Conçus dans le viol ».
00:45:34À l'âge de 12 ans, je marchais dans la rue et j'étais droguée.
00:45:38J'ai été brutalement violée par deux hommes.
00:45:41On m'a emmenée à l'hôpital et le médecin m'a dit que j'étais enceinte.
00:45:45Et j'ai demandé au médecin si j'avortais, est-ce que j'oublierais le viol ?
00:45:50Est-ce que j'oublierais toute la douleur et la souffrance ?
00:45:53Et il m'a dit non.
00:45:55Je me suis alors demandé pourquoi je devais tuer mon bébé ?
00:45:58Pourquoi devrais-je condamner mon bébé à la peine de mort ?
00:46:01À l'âge de 17 ans, après avoir vécu une situation d'abus sexuel dans ma famille,
00:46:07j'ai enfanté à la suite d'un viol incestueux.
00:46:10J'ai été élevée dans l'église, j'ai vécu un retour à la foi,
00:46:14et j'ai compris qu'il s'agissait d'une vie.
00:46:17Et j'ai compris à 17 ans que je ne pouvais pas prendre la vie de cet enfant.
00:46:21Ce n'est pas la faute de l'enfant. Ce n'était pas ma faute.
00:46:24Et je ne voulais pas tuer mon bébé.
00:46:27J'ai donc choisi de garder mon bébé.
00:46:30Il a maintenant 3 ans.
00:46:32Pour être tout à fait honnête, il y a des jours où je ne me souviens plus.
00:46:37Pour être tout à fait honnête, il y a des jours où je ne me souviens même pas
00:46:41de la façon dont il a été conçu.
00:46:43C'est de la propagande vicieuse.
00:46:45Les femmes qui ont été violées ou qui ont subi un abus sexuel,
00:46:48elles sont terrifiées à l'idée d'être enceintes.
00:46:51C'est un poison qui est en elles. C'est un parasite.
00:46:55Elles veulent mettre fin à leur grossesse.
00:46:57Et quand elles le font, elles sont soulagées et heureuses.
00:47:01Pour eux, la vie de la femme ne vaut rien.
00:47:03Elle ne vaut rien.
00:47:05Elle n'est qu'une couveuse pour faire d'autres bébés.
00:47:08C'est donc du bétail.
00:47:10On élève des femmes comme on élève des vaches selon leur philosophie, d'accord ?
00:47:14Les vaches sont là pour faire plus de vaches.
00:47:16Donc il y a plus de vaches.
00:47:18Pour les femmes, c'est pareil.
00:47:21Mais alors, oubliez la liberté des femmes.
00:47:34Mon Dieu !
00:47:40C'est du fanatisme religieux.
00:47:42Le mouvement anti-avortement aux États-Unis est dominé par les catholiques et les nationalistes,
00:47:46les suprématistes blancs, les chrétiens évangéliques.
00:47:51C'est un mouvement fasciste.
00:47:53Il n'existe pas de débat sur l'avortement avec eux.
00:47:56C'est une guerre civile.
00:47:58Et leur camp utilise des balles et des bombes.
00:48:02Et font des menaces de mort.
00:48:11À une heure de route dans la ville de Boulder,
00:48:14le docteur Hearn fait son métier de gynécologue,
00:48:17barricadé dans sa clinique.
00:48:23Il est une des cibles privilégiées des pro-vie.
00:48:25L'un des derniers médecins américains à pratiquer des avortements jusqu'au terme de la grossesse
00:48:31pour des anomalies fétales incurables.
00:48:36Toujours en activité à 88 ans,
00:48:39Warren Hearn est plus que jamais mobilisé depuis la décision de la Cour suprême.
00:48:44Il est une figure médicale et politique de la lutte pour la liberté des femmes aux États-Unis.
00:48:53Un médecin pro-avortement qui a dû affronter à plusieurs reprises le fanatisme religieux.
00:49:02En 1988, 5 coups de feu ont été tirés sur la façade de mon bureau.
00:49:08Une rafale.
00:49:09Un membre de mon personnel a échappé de peu à la mort.
00:49:12Ils essayaient de me tuer.
00:49:14C'est un terrible signe d'hostilité.
00:49:17Après j'ai installé des fenêtres par balles.
00:49:19Puis j'ai tenu une conférence de presse et j'ai proposé une récompense de 5000 dollars
00:49:24pour toute information conduisant à l'arrestation et à la condamnation du tireur.
00:49:31Le docteur Hearn travaille derrière des vitres blindées et des sas de sécurité.
00:49:37Il nous a interdit de filmer son personnel pour ne pas risquer de le mettre en danger.
00:49:46En 1988, des fanatiques d'un mouvement appelé Operation Rescue bloquent l'accès à la clinique du docteur Hearn.
00:49:56Ils sont dirigés par un ancien vendeur de voitures qui prône le harcèlement de toute personne liée à l'avortement.
00:50:15Randall Terry, le dirigeant de Operation Rescue, était devant ma clinique avec ses partisans
00:50:22et ils ont prié pour mon exécution.
00:50:26Et j'étais sûr que j'allais être assassiné.
00:50:28Alors j'ai commencé à dormir avec un fusil près de mon lit.
00:50:47Quand je gare ma voiture, je me gare à un endroit spécial dont l'aménagement m'a coûté beaucoup d'argent.
00:50:53Quand je sors de ma voiture, je peux aller directement au bureau au lieu de traverser le parking à pied.
00:50:59Parce que dans ce parking, je suis une cible idéale pour un sniper.
00:51:03Et moi, je fais tout ce que je peux pour ne pas être exposé au tir.
00:51:07Lorsque je gare ma voiture, je prépare toujours mes clés pour ne pas avoir à les chercher.
00:51:12Quand je suis chez moi le soir, je ferme les stores.
00:51:15Nous ne pouvons pas laisser les stores ouverts la nuit parce que les fanatiques anti-avortement tirent sur les médecins par la fenêtre.
00:51:24Un tel évangéliste et fanatique religieux a déclaré.
00:51:27Nous ne pouvons pas autoriser l'avortement, sinon il n'y aura pas assez de personnes pour faire la guerre et payer les impôts.
00:51:33C'est à cela que les femmes servent.
00:51:36C'est la vision républicaine.
00:51:38C'est la politique des républicains.
00:51:43Et avec leur Cour suprême radicale,
00:51:46ensemble, ils veulent nous donner une théocratie chrétienne fasciste.
00:51:51C'est leur plan.
00:52:16Ils ont invoqué notre Créateur quatre fois.
00:52:21Parce qu'en Amérique, nous ne pourrions pas adorer le gouvernement, nous adorons Dieu.
00:52:26Dans Dieu, nous avons confiance.
00:52:28Et c'est pourquoi nous prouvons fièrement que nous sommes une nation sous Dieu.
00:52:42Dans les États libéraux du pays, du Colorado à l'Illinois,
00:52:45les pro-vie ne relâchent pas la pression.
00:52:48Ils ont le vent en poupe.
00:52:50Leur mentor, Donald Trump, est de retour.
00:52:53Il est bien placé dans les sondages pour la prochaine élection présidentielle.
00:52:59Une menace pour le droit à l'avortement, qui pourrait cette fois disparaître sur tout le territoire.
00:53:05Bonjour New, vous avez reçu ce prospectus à votre arrivée ?
00:53:08On peut se parler une seconde ?
00:53:10Nous avons plein d'aides gratuites à vous proposer.
00:53:16Face à l'Amérique de l'obscurantisme, l'Amérique de la liberté n'a pas l'intention d'abdiquer.
00:53:23Partout où elle se bat pour préserver la dignité de ses concitoyennes et les droits de la personne.
00:53:31Comme dans la ville de Carbondale, où est installée la clinique refuge d'Andrea Gallegos.
00:53:38Ce matin, elle reçoit la visite surprise de la maire, inquiète pour la sécurité de ses patientes.
00:53:46J'étais en train de participer à une réunion,
00:53:49quand quelqu'un m'a dit qu'il avait vu des personnes qui essayaient d'empêcher les patientes d'accéder à la clinique.
00:53:55J'ai décidé de venir voir moi-même ce qu'il se passait.
00:53:59Parce que ce n'est pas quelque chose que j'approuve, vraiment.
00:54:07Caroline Hervé est à l'origine d'une loi obligeant les manifestants à rester à bonne distance d'un centre de soins.
00:54:15Chrétienne et pratiquante, l'élue reste perplexe devant les arguments des pro-vie de sa ville.
00:54:25Ils m'ont dit qu'ils voulaient aider les personnes qui souhaitaient avorter.
00:54:30Ma réponse a été de leur demander « Quel type d'aide offrez-vous ? »
00:54:35Ils disent « Oh, nous aidons à payer ceci et cela. »
00:54:38« Allez-vous les aider pendant 18 ans jusqu'à ce que l'enfant devienne adulte ? »
00:54:42« Non, ils ne feront jamais ça. »
00:54:43Et puis ces manifestants sont rémunérés, en tout cas certains d'entre eux le sont.
00:54:47Je ne dis pas qu'ils ne croient pas à ce qu'ils font, qu'ils y croient probablement.
00:54:50Mais certains sont là parce qu'ils sont payés pour.
00:54:59Carbondale a toujours été une enclave libérale.
00:55:03Son université s'est fait connaître dans les années 70 pour ses positions anti-militaristes pendant la guerre du Vietnam.
00:55:13Une autre clinique abortive est venue s'y installer.
00:55:16Et un planning familial vient d'être inauguré.
00:55:21L'image d'une Amérique plurielle qui cultive la tolérance comme une vertu.
00:55:29Contre toutes les formes de fanatisme.
00:55:34Je suis chrétienne, je crois en Dieu.
00:55:38Mais je pense qu'il s'agit d'une décision personnelle.
00:55:41Tout comme il est personnel de dire qu'on est chrétien, qu'on croit en Dieu.
00:55:45Et si vous choisissez d'avorter ou d'avoir recours à d'autres formes de soins, cela vous regarde.
00:55:50C'est votre opinion personnelle.
00:55:52Et c'est entre vous et votre Dieu.
00:55:54Et personne d'autre n'a besoin d'être impliqué là-dedans.
00:56:11Nous, les femmes, sommes des créatures résilientes.
00:56:13Assez difficiles.
00:56:15Données l'opportunité de contrôler nos propres corps.
00:56:23Nous pouvons faire des choses incroyables.
00:56:27Vous êtes tous prêts pour ce déjeuner ?
00:56:33Je vous en prie.
00:56:34Vous êtes tous prêts pour ce déjeuner ?
00:57:04Au-delà, l'occasion pour nous de s'interroger, maintenant, sur ce plateau de débats doc,
00:57:08avec nos invités sur les débats de société qui agitent aujourd'hui la campagne présidentielle américaine.
00:57:14Elisa Schell est avec nous pour commencer.
00:57:16Bienvenue à vous.
00:57:17Vous êtes professeure de sciences politiques à l'université Paris-Nanterre, spécialiste des Etats-Unis
00:57:23et rédactrice en chef de la revue Politique américaine, dont on voit ici le dernier numéro avec ce titre.
00:57:30Une démocratie ébranlée.
00:57:32Également avec nous, Gérald Olivier.
00:57:34Bienvenue à vous, Gérald Olivier.
00:57:36Vous êtes journaliste indépendant franco-américain, passionné, bien entendu, par cette campagne présidentielle américaine 2024.
00:57:44Et puis, on va citer votre ouvrage.
00:57:46C'est le dernier.
00:57:47Il s'intitule Cover Up.
00:57:49Le clan Biden, l'Amérique et l'Etat profond.
00:57:52Il a été édité chez Confident.
00:57:54Il a été écrit, je crois, il y a maintenant un an.
00:57:58Il est paru en novembre 2023.
00:58:00Biden était bien évidemment, à l'époque, toujours en course pour cette présidentielle américaine 2024.
00:58:07Et puis, enfin, avec nous, Laurie Kenton.
00:58:09Bienvenue à vous, Laurie Kenton.
00:58:11Vous êtes historien, maître de conférences en études américaines à l'université de Versailles 51.
00:58:16Vous êtes un chroniqueur régulier du magazine Rolling Stone et auteur, entre autres, d'un atlas historique des Etats-Unis,
00:58:23publié aux éditions Autrement.
00:58:25Je vais commencer avec vous.
00:58:27L'avortement est la première préoccupation des Américaines de moins de 45 ans devant l'économie.
00:58:35Ce n'est pas moi qui l'affirme, c'est vous, dans un site de presse indépendant intitulé The Conversation.
00:58:41Autrement dit, l'avortement, ce thème, qu'on a vu bien entendu traité dans ce documentaire,
00:58:47et le vote des femmes vont être centrales dans cette campagne.
00:58:49C'est comme ça qu'ils vont comprendre les choses.
00:58:51Alors oui, l'avortement est un enjeu essentiel pour ces femmes en âge de procré,
00:58:56c'est ce qu'il faut comprendre par femme de moins de 45 ans,
00:58:59et cet enjeu a été mis en avant avec l'entrée en campagne de Kamala Harris.
00:59:05Avant, Joe Biden en parlait peu, il est resté longtemps très prudent,
00:59:10il l'a souvent relié à sa foi catholique,
00:59:13donc une dénomination religieuse qu'on sait aux Etats-Unis plutôt protectrice du droit à la vie,
00:59:20comme on dit là-bas.
00:59:22Donc cet enjeu était plutôt en arrière de la campagne,
00:59:26même si, évidemment, c'est un sujet politisé depuis les années 70,
00:59:30depuis la protection fédérale de l'avortement,
00:59:33que la Cour suprême a révoqué avec cette décision de 2022.
00:59:38Donc c'est Kamala Harris, une femme, qui a décidé d'en faire un enjeu dans cette campagne.
00:59:43Oui, tout à fait.
00:59:45Elle sait que c'est un argument fort, et aussi un argument face à Julie Vance,
00:59:51le colistier de Donald Trump, qui s'est prononcé contre l'avortement.
00:59:56C'est un pro-life, c'est l'appellation qu'on donne à son nom.
01:00:00Kamala Harris a vu, comme tout le monde, le résultat des élections de mi-mandat,
01:00:04parce que là, ce sont les premières élections présidentielles
01:00:07depuis la décision de la Cour suprême de 2022,
01:00:09mais avant ces présidentielles...
01:00:11Il y a deux ans ?
01:00:12Exactement, il y a eu des élections de mi-mandat.
01:00:14On vote tous les deux ans aux Etats-Unis.
01:00:16Pas pour les mêmes offices, mais on vote tous les deux ans.
01:00:18Et lors de ces élections, plusieurs Etats ont mis aux voix
01:00:22des mesures qui concernent l'avortement,
01:00:24et ce qu'on a constaté, c'est que même dans les Etats républicains,
01:00:28il y avait une volonté de ne pas implémenter trop de restrictions
01:00:32ou de garantir un droit minimal à l'avortement.
01:00:35Donc les femmes républicaines se prononcent
01:00:38pour une protection minimale de ce droit.
01:00:41A l'occasion de ces midterms, on peut dire que dans certains Etats,
01:00:44des femmes ont voté démocrate alors qu'elles votaient
01:00:48préalablement républicain ?
01:00:50Alors là, elles votaient pour des référendums locaux.
01:00:54Donc ce n'était pas tellement une question
01:00:56de voter démocrate ou républicain, mais de manifester une opinion
01:00:59quant à cette question de l'avortement.
01:01:01Et bien sûr, les grands partis en tirent des leçons
01:01:04quant à la stratégie adoptée.
01:01:06Donc Donald Trump a eu des positions très variables
01:01:10sur l'avortement.
01:01:12Il a été pro-choix dans sa vie.
01:01:15Et puis quand il s'est affilié au Parti républicain,
01:01:18il n'avait pas d'autre choix que de devenir pro-life.
01:01:21Donc il doit mettre en avant des positions
01:01:25qui satisfont un électorat conservateur.
01:01:28Et on l'a vu, dans le Texas,
01:01:30qui est un Etat très abordé dans le documentaire,
01:01:33la population est majoritairement conservatrice.
01:01:37C'est le troisième Etat le plus religieux des Etats-Unis.
01:01:40Donc cet électorat existe.
01:01:42Et c'est pour ça que les responsables républicains
01:01:45défendent aussi des positions
01:01:47qui correspondent aux préférences de leurs électeurs.
01:01:49Mais dans cette campagne, c'est un peu plus compliqué
01:01:52parce que certaines femmes ne sont pas sur cette ligne-là.
01:01:55Alors je vais faire juste un point
01:01:57concernant ce thème de l'avortement
01:01:59et cette décision de la Cour suprême.
01:02:01Aujourd'hui, sous votre contrôle,
01:02:0317 Etats interdisent strictement l'avortement,
01:02:065 l'interdisent passer un délai de 12 à 18 semaines,
01:02:0918 l'autorisent selon des conditions variables,
01:02:13et enfin, il est légal sans limitation
01:02:16dans 7 Etats américains aujourd'hui,
01:02:18plus Washington d'ici.
01:02:20On va voir un extrait du documentaire.
01:02:22C'est Donald Trump qui parle de ce sujet,
01:02:24qui parle de l'avortement et de l'IVG.
01:02:37Donald Trump est sans nul doute
01:02:39le grand artisan de la disparition du droit à l'IVG
01:02:42dans la moitié de l'Amérique.
01:02:44Le milliardaire new-yorkais,
01:02:46cet improvisé militant pro-vie
01:02:48a des fins purement électoralistes.
01:02:50Est-ce qu'elle pose problème,
01:02:52cette question de l'IVG
01:02:54dans la campagne de Donald Trump aujourd'hui
01:02:56face à Kamala Harris,
01:02:58qui a été élu présidente de l'Union Européenne,
01:03:00qui a été élu présidente de l'Union Européenne,
01:03:02qui a été élu présidente de l'Union Européenne,
01:03:04face à Kamala Harris,
01:03:06qui a décidé d'en faire un enjeu de campagne ?
01:03:08Je pense pas qu'elle pose un problème pour Donald Trump.
01:03:10D'ailleurs, je crois qu'il a mené une campagne
01:03:12où il a parfaitement géré la question.
01:03:14Par contre, c'est une question
01:03:16qui divise l'Amérique.
01:03:18Pas rien que les femmes.
01:03:20C'est un sujet... Il faut être deux pour faire un bébé.
01:03:22Pas rien que les femmes.
01:03:24C'est un sujet, par contre,
01:03:26qui mobilise plus les femmes,
01:03:28notamment les femmes en âge de procréer.
01:03:30C'est vrai que celles-ci ont été très mobilisées.
01:03:32En fait,
01:03:34la décision d'Obs,
01:03:36celle que vous citiez en tout début d'émission,
01:03:38c'est celle qui a tout bouleversé.
01:03:40Parce que,
01:03:42même si les Américains
01:03:44n'étaient pas tous d'accord
01:03:46avec la décision de 1973,
01:03:48la fameuse décision Roe v. Wade,
01:03:50qui avait légalisé
01:03:52au plan fédéral
01:03:54la pratique de l'avortement,
01:03:56et s'il y avait une grande mobilisation
01:03:58justement du côté des citoyens
01:04:00favorables à ce qu'ils appellent
01:04:02le droit à la vie,
01:04:04pour essayer d'invalider cette décision,
01:04:06on était parvenus, après 50 ans,
01:04:08à une certaine idée
01:04:10que ce ne serait plus possible.
01:04:12C'était rentrer dans les mœurs.
01:04:14Après la décision Roe v. Wade,
01:04:16il y a eu, en 92, presque 20 ans plus tard,
01:04:18une seconde décision de la Cour suprême,
01:04:20la décision qui s'appelait Casey,
01:04:22à l'époque, dont on avait pensé
01:04:24qu'elle pourrait invalider Roe v. Wade,
01:04:26et ça n'avait pas du tout été le cas.
01:04:28En fait, les juges de l'époque,
01:04:30qui étaient déjà, à majorité,
01:04:32des conservateurs, nommés, entre autres,
01:04:34par Ronald Reagan, qui venait d'être président,
01:04:36les juges avaient au contraire
01:04:38renforcé le droit à l'avortement
01:04:40et introduit simplement une notion de vaillabilité
01:04:42vis-à-vis du fœtus.
01:04:44On en était arrivés à cette notion que,
01:04:46même s'il y avait une lutte pour faire invalider
01:04:48Roe v. Wade,
01:04:50on n'y parviendrait pas.
01:04:52Avec Donald Trump, les Républicains
01:04:54et les conservateurs et la droite évangélique
01:04:56y sont parvenus.
01:04:58Et ça a été un choc, je dirais, à la fois pour eux
01:05:00et pour le reste de l'Amérique.
01:05:02Parce que ça a renvoyé la question
01:05:04aux 50 Etats.
01:05:06En fait, la Cour suprême, en 1973,
01:05:08avait pris une décision
01:05:10qui s'appliquait à l'ensemble de la population
01:05:12et des Etats américains,
01:05:14et une fois cette décision invalidée,
01:05:16chacun des 50 Etats
01:05:18pouvait avoir sa propre législation
01:05:20sur la question.
01:05:22C'est d'abord ce qui justifie la liste que vous nous donnez
01:05:24sur ceux où on peut encore le pratiquer
01:05:26et ceux où il est plus ou moins limité.
01:05:28Le Trump de 2016, le Trump de 2020
01:05:30ressemble-t-il au Trump de 2024
01:05:32sur cette question précisément
01:05:34et compte tenu de ce qui s'est passé depuis ?
01:05:36Il est beaucoup plus à l'aise aujourd'hui.
01:05:38Il est beaucoup plus à l'aise aujourd'hui
01:05:40parce qu'il n'est plus otage de cette partie
01:05:42du Parti républicain qui disait
01:05:44qu'il nous faut un candidat qui soit pro-life.
01:05:46Et lui, comme vous le soulignez, n'a pas toujours été
01:05:48favorable au droit à la vie.
01:05:50Il s'est longtemps dit pro-choix.
01:05:52En 1990, il s'est dit ouvertement pro-choix.
01:05:54Il s'est rallié à cette position.
01:05:56Mais la façon dont il gère la question,
01:05:58c'est qu'il a dit, jusqu'en 1973,
01:06:00donc de la naissance des Etats-Unis
01:06:02à 1973,
01:06:04la question de l'avortement
01:06:06a été gérée par les Etats.
01:06:08Elle a été prise en main par la Cour suprême
01:06:10qui a créé ce précédent juridique
01:06:12qui s'applique à l'ensemble du territoire fédéral.
01:06:14Je rends cette décision aux Etats
01:06:16et je suis très à l'aise avec cette décision-là.
01:06:18Laurie Quenton,
01:06:20on avait cru comprendre
01:06:22que les démocrates
01:06:24et sa leader actuelle,
01:06:26Kamala Harris, comptaient beaucoup sur ce thème
01:06:28pour glaner des voix,
01:06:30notamment du côté
01:06:32des femmes. Est-ce que c'est le cas ?
01:06:34Est-ce qu'elle a réellement fait campagne ?
01:06:36Est-ce qu'elle peut espérer, un temps soit peu,
01:06:38faire basculer un certain nombre d'Etats ?
01:06:40On pense notamment aux 7 Etats-clés,
01:06:42les fameux Swinstakes, les Etats pivots.
01:06:44C'est là que ça va se jouer.
01:06:46En sa faveur, grâce à ce thème.
01:06:48C'est ce qu'elle espère en partie,
01:06:50mais tout se jouera
01:06:52dans le niveau des priorités.
01:06:54Les femmes qui sont visées sont des femmes
01:06:56qui sont susceptibles de bouger encore.
01:06:58Il y a un certain nombre de femmes
01:07:00qui sont de toute façon acquises à Trump
01:07:02ou de toute façon acquises aux démocrates.
01:07:04Ce n'est pas sur elles qu'il va falloir faire campagne,
01:07:06c'est plutôt sur les femmes
01:07:08qui sont un peu entre deux.
01:07:10Généralement, c'est le public qu'on considère
01:07:12comme les femmes blanches des banlieues des grandes villes
01:07:14comme Atlanta, Phoenix
01:07:16et d'autres, les comtés autour de Philadelphie.
01:07:18C'est ça, le public.
01:07:20Des femmes plutôt diplômées.
01:07:22Il y a un certain nombre de priorités
01:07:24qui se percutent.
01:07:26Il y a les priorités économiques,
01:07:28parce qu'il faut remplir le frigo,
01:07:30la vie coûte plus cher,
01:07:32l'inflation commence à se tasser un petit peu,
01:07:34certes, mais les prix sont bien plus élevés
01:07:36qu'avant le Covid.
01:07:38Autrement dit, peut-être que les démocrates
01:07:40ont un peu déchanté sur cette question.
01:07:42Ils ne peuvent pas, de toute façon,
01:07:44considérer que tout va se jouer là.
01:07:46Une mère de famille, il y a la sécurité
01:07:48de ses enfants, il y a la question
01:07:50de l'avortement et du droit, éventuellement,
01:07:52de ses filles.
01:07:54Toutes ces choses-là entrent en ligne de compte.
01:07:56Qu'est-ce qui détermine mon choix
01:07:58pour une élection
01:08:00qui est plurielle ? On vote pour le président,
01:08:02mais on vote également pour le Congrès,
01:08:04pour le gouverneur, parfois.
01:08:06Il y a des référendums. On vote pour un tas
01:08:08de choses. On peut voter aussi
01:08:10de manière panachée. Ce que l'on a vu
01:08:12dans un certain nombre d'États, comme le Kansas,
01:08:14qui est indiscutablement conservateur,
01:08:16il y a eu un référendum et on a vu
01:08:18un certain nombre de républicaines voter
01:08:20pour garantir le droit
01:08:22à l'avortement. Ce n'est pas pour ça qu'elles vont
01:08:24voter démocrate. Après,
01:08:26s'ajoute à ça une question qui n'est
01:08:28pas liée à l'avortement, qui est de savoir
01:08:30si Trump est acceptable
01:08:32comme président pour des questions
01:08:34d'autoritarisme, ce genre de choses
01:08:36dont on parle pas mal sur cette fin de campagne.
01:08:38Et donc, là, la question n'est pas seulement...
01:08:40Mais ça rentre en ligne de compte.
01:08:42Avortement ou pas avortement, mais
01:08:44est-ce que je vois Trump comme président ?
01:08:46Tout ça entre dans un faisceau
01:08:48de critères
01:08:50qui vont déterminer l'élection.
01:08:52J'ai quand même lu quelque part qu'environ
01:08:54deux tiers des résidents des États pivots,
01:08:56des fameux swing states,
01:08:58soutiennent le droit à l'avortement aujourd'hui.
01:09:00Oui, c'est une
01:09:02position qu'on retrouve. Il y a un enjeu très fort.
01:09:04Oui, bien sûr, mais cette élection
01:09:06est serrée. On le sait, on voit que tous les sondages
01:09:08sont très serrés. Donc, chaque poche
01:09:10de voix compte.
01:09:12Et le positionnement de Donald Trump n'a pas été
01:09:14si facile, je pense,
01:09:16à trouver. Je nuancerais peut-être
01:09:18ce que vous avez évoqué, parce que
01:09:20il a dit plusieurs choses. Il a dit
01:09:22oui, je serais favorable, par exemple, à un délai de
01:09:2415 à 16 semaines pour avorter, ce qui est
01:09:26même supérieur à ce qu'on observe en France.
01:09:28Il a, par exemple, émis
01:09:30des réserves sur le délai
01:09:32de six semaines en Floride, donc un délai restrictif
01:09:34dans son état de résidence, la Floride,
01:09:36qui est sur le point d'être votée.
01:09:38Et il s'est pris, après,
01:09:40des salves
01:09:42de la part de ses franges
01:09:44les plus conservatrices à ses côtés.
01:09:46Et il a dû revenir
01:09:48sur des positions plus prudentes en disant
01:09:50qu'on allait laisser les Etats
01:09:52décider. Et puis, on a vu aussi
01:09:54que Melania Trump avait publié
01:09:56un livre, Melania,
01:09:58il y a quelques jours, semaines,
01:10:00et que, dans ce livre, elle se dit
01:10:02ouvertement pro-choix.
01:10:04Donc ça, c'est pas du tout l'effet du hasard,
01:10:06ce n'est pas du tout Melania Trump qui se dit
01:10:08tiens, je publierai bien un livre, ça a forcément
01:10:10une dimension politique très forte, et ça vient
01:10:12adoucir, peut-être,
01:10:14l'image d'un Donald Trump
01:10:16qui pourrait être trop
01:10:18du côté des restrictions,
01:10:20même s'il n'a jamais pris, il a dit
01:10:22je ne serais pas favorable à l'interdiction
01:10:24fédérale de l'avortement.
01:10:26Il y a tout de même eu ce choix du colissier.
01:10:28Il y a eu, effectivement, ce choix
01:10:30du colissier qui marque,
01:10:32effectivement, un positionnement
01:10:34de ce côté-là, c'est tout à fait juste.
01:10:36Et je voudrais juste ajouter que les Démocrates
01:10:38essayent de tirer profit
01:10:40de ces hésitations, puisque les Démocrates
01:10:42financent, dans les Etats-clés, des petits
01:10:44candidats qui visent à déstabiliser
01:10:46Trump explicitement sur
01:10:48cette question. Donc que font les Démocrates ?
01:10:50Ils financent des petits candidats
01:10:52anti-avortement
01:10:54qui n'ont, bien sûr,
01:10:56aucune chance de l'emporter, c'est le système
01:10:58américain, mais qui peuvent, peut-être,
01:11:00enlever quelques milliers
01:11:02de voix au candidat Trump.
01:11:04Et n'oublions pas que les swing states
01:11:06se jouent vraiment à très, très peu de voix.
01:11:0810 000, 20 000, 30 000,
01:11:1050 000 voix. Donc chaque poche de voix
01:11:12est recherchée par les candidats
01:11:14sur le sujet de l'avortement, comme sur d'autres, d'ailleurs.
01:11:16Alors, autre sujet de campagne très fort,
01:11:18outre-Atlantique, c'est l'immigration.
01:11:20Là, on est sur un terrain où Donald
01:11:22Trump travaille beaucoup l'électorat.
01:11:24Vous êtes, d'ailleurs, par ailleurs
01:11:26très dur sur le bilan Biden
01:11:28en la matière. Vous dites que le bilan de l'administration
01:11:30Biden sur l'immigration est clandestine et désastreux.
01:11:32Biden a mis en place
01:11:34une politique d'ouverture des frontières
01:11:36en lien avec leur idéologie internationaliste
01:11:38post-nation d'extrême-gauche.
01:11:40Donald Trump compte
01:11:42beaucoup sur ce thème de l'immigration
01:11:44pour emporter cette élection ?
01:11:46Oui, et c'est un thème qui occupe considérablement la campagne.
01:11:48D'ailleurs, ce qu'on constate
01:11:50depuis l'été, même depuis
01:11:52que Kamala Harris est devenue la candidate,
01:11:54c'est vrai qu'elle a beaucoup poussé
01:11:56la question de l'avortement, parce qu'elle sait que ça met
01:11:58l'électorat républicain en difficulté
01:12:00et ça met Donald Trump en difficulté.
01:12:02Maintenant, quand on constate ce qui occupe
01:12:04l'actualité, ce qui fait la une des journaux,
01:12:06ce qui fait la une des journaux télévisés
01:12:08ou des quotidiens, c'est beaucoup plus l'immigration
01:12:10et c'est sur ce point aussi
01:12:12où Kamala est mise en difficulté.
01:12:14Qu'est-ce qui s'est passé ? En vérité, on s'en souvient,
01:12:16Trump avait voulu construire un mur.
01:12:18Il n'avait pas réussi à construire son mur.
01:12:20Il avait fait quelques centaines de milles de son mur,
01:12:22mais c'était très, très peu.
01:12:24Mais il avait une politique...
01:12:26On parle de la frontière étatnusienne avec le Mexique.
01:12:28Un fameux mur à la frontière sud des Etats-Unis,
01:12:30entre le Texas, l'Arizona,
01:12:32la Californie et le Mexique de l'autre côté.
01:12:34C'est une frontière qui fait 3000 km
01:12:36et sur laquelle il y a quelques
01:12:38centaines de kilomètres de mur qui sont déjà construits,
01:12:40dont certaines portions, d'ailleurs,
01:12:42ont été construites par d'autres présidents,
01:12:44dont le président Obama,
01:12:46et Donald Trump, en 2016, avait promis
01:12:48de terminer le mur. Il n'est jamais parvenu
01:12:50à le faire. Par contre, il avait mené
01:12:52une politique anti-migratoire,
01:12:54c'est-à-dire qu'il cherchait à décourager
01:12:56les candidats à l'immigration clandestine,
01:12:58notamment en obligeant
01:13:00les demandeurs d'asile à faire
01:13:02cette demande depuis un pays extérieur,
01:13:04comme le Mexique, et de rester
01:13:06dans ce pays extérieur jusqu'à ce que
01:13:08leur dossier ait été examiné
01:13:10et approuvé ou rejeté.
01:13:12Cette mesure fait partie des dizaines de mesures,
01:13:14et il y en a eu plusieurs dizaines,
01:13:16qui ont été révoquées
01:13:18au premier jour de la présidence de Joe Biden.
01:13:20Il a éliminé
01:13:22toutes ces mesures,
01:13:24ces obstacles à l'immigration clandestine,
01:13:26et on a vu immédiatement
01:13:28déferler un flot de clandestins
01:13:30dont on ne connaît pas,
01:13:32je dirais, le nombre exact,
01:13:34ni, et surtout,
01:13:36la nature exacte, c'est-à-dire qu'on a vu
01:13:38une hausse, je dirais,
01:13:40quand même majeure de la criminalité
01:13:42dans certains Etats frontaliers
01:13:44et même au-delà,
01:13:46que l'on lie, justement,
01:13:48à cette immigration clandestine.
01:13:50Cette question a été l'une des plus discutées
01:13:52de la campagne, et c'est l'un des points
01:13:54qui bénéficient à Donald Trump
01:13:56et sur lequel Kamala Harris
01:13:58est mise en difficulté, justement,
01:14:00à cause de ses positions.
01:14:02Des mots très durs vis-à-vis des immigrants
01:14:04clandestins, animaux,
01:14:06terroristes, criminels...
01:14:08Non, non, non.
01:14:10Ce sont des termes qu'on retrouve
01:14:12dans certaines interventions de Donald Trump.
01:14:14Il faut être honnête jusqu'au bout.
01:14:16Jusqu'aux haïtiens à Springfield
01:14:18qui mangeraient des chiens et des chats
01:14:20dans ce fameux débat.
01:14:22Il faut toujours remettre son contexte.
01:14:24Et Donald Trump, si vous prenez ses propos,
01:14:26il parle des criminels et des gangs
01:14:28au sein des clandestins,
01:14:30et il y en a de nombreux qui s'infiltrent,
01:14:32qui, eux, sont traités d'animaux.
01:14:34Mais il parle de ces gangsters-là,
01:14:36il parle pas de l'immigrant clandestin.
01:14:38L'immigration, vrai sujet d'inquiétude
01:14:40chez les Américains, et chez quels Américains ?
01:14:42Est-ce que là aussi, il y a une fracture
01:14:44de l'électorat dans l'Amérique
01:14:46aujourd'hui sur cette question précise de l'immigration ?
01:14:48Je crois que les Etats-Unis ont accueilli
01:14:503,2 millions d'étrangers
01:14:52l'année dernière sur leur sol.
01:14:54Oui, alors, c'est une question
01:14:56qui est ancienne. Le mur, il remonte
01:14:58à Bill Clinton, les années Clinton,
01:15:00où il y avait aussi un congrès républicain,
01:15:02donc il y a une vraie continuité
01:15:04de ce débat-là, et de cette...
01:15:06Cette réticence
01:15:08à l'immigration.
01:15:10C'est ce que Reagan
01:15:12naturalise,
01:15:16légalise à plusieurs millions
01:15:18d'immigrés clandestins
01:15:20dans les années 80. Il y a un changement
01:15:22de ton, et Reagan n'est pas exactement
01:15:24un gauchiste.
01:15:26Donc, il y a un changement de ton
01:15:28dans les années 90, et les choses
01:15:30s'amplifient après sous George W. Bush.
01:15:32Obama renvoie
01:15:34au Mexique
01:15:36beaucoup plus de gens que son
01:15:38prédécesseur Bush, donc
01:15:40les démocrates ne sont pas
01:15:42que des immigrationnistes.
01:15:44Biden l'a été ?
01:15:46Biden, c'est un peu compliqué,
01:15:48parce que
01:15:50la remise en cause
01:15:52des décrets
01:15:54de Trump, ça a été une mesure
01:15:56symbolique, et le problème, c'est que
01:15:58les nouveaux présidents sont toujours un petit peu
01:16:00prisonniers de leur prédécesseur,
01:16:02et que la première chose qu'ils font
01:16:04absolument tous, c'est que
01:16:06quand ils arrivent en poste,
01:16:08ils retoquent, en fait,
01:16:10les décrets présidentiels,
01:16:12qui n'ont pas force de loi, parce qu'ils ne sont pas passés
01:16:14par le Congrès, et que c'est facile, ça ne mange pas de pain,
01:16:16c'est symbolique, et donc, de ce point de vue-là,
01:16:18c'est ce qu'ils font absolument tous.
01:16:20Cela dit, Biden a gardé
01:16:22en place, beaucoup plus longtemps que son
01:16:24camp l'aurait espéré, un certain
01:16:26nombre de mesures migratoires
01:16:28sanitaires estampillées Covid, ce qu'on appelle
01:16:30le Title 42,
01:16:32qui empêchait un certain nombre
01:16:34de gens pour des raisons
01:16:36sanitaires, ça, il l'a gardé beaucoup plus longtemps que son
01:16:38aile gauche le souhaitait, donc
01:16:40c'est un petit peu mitigé.
01:16:42Il y a un autre angle d'attaque, pardon,
01:16:44je vous coupe, mais
01:16:46il ne faut pas oublier que
01:16:48Kamala Harris, en tant que vice-présidente,
01:16:50s'est vu octroyer ce dossier de l'immigration,
01:16:52et ça, c'est un angle d'attaque pour les
01:16:54Républicains, néanmoins. Absolument, parce que
01:16:56le problème du vice-président,
01:16:58c'est que la Constitution
01:17:00ne lui donne aucun véritable rôle, il est là
01:17:02pour attendre que le président meure,
01:17:04pour dire les choses un petit peu crûment.
01:17:06Donc on lui donne un certain nombre de dossiers qui sont
01:17:08généralement des dossiers dont le
01:17:10président ne veut pas.
01:17:12Elle n'en voulait pas non plus, paraît-il.
01:17:14Personne n'en veut vraiment, et généralement, tous les dossiers
01:17:16qui sont confiés au vice-président
01:17:18ne sont pas les dossiers les plus flatteurs,
01:17:20et c'est des dossiers souvent assez ingrats.
01:17:22Et elle n'a pas été très bonne
01:17:24là-dessus, il faut le dire.
01:17:26Mais, il faut aussi voir
01:17:28qu'il y a eu tout un travail
01:17:30de partisans pour créer une loi
01:17:32assez tard dans le mandat, c'est vrai.
01:17:34Les Républicains, notamment des
01:17:36Républicains assez durs sur la question et les Démocrates
01:17:38sont tombés d'accord pour,
01:17:40justement, accorder beaucoup plus de crédit
01:17:42financier pour régler la question,
01:17:44et Donald Trump a sifflé la fin de la récré
01:17:46et a dit qu'il n'y aura pas de loi,
01:17:48et les Républicains se sont mis au garde-à-vous,
01:17:50il n'y a pas eu de loi.
01:17:52Kamala Harris, face à Donald Trump, sur ce thème
01:17:54de l'immigration,
01:17:56est le bilan
01:17:58dont elle peut ou pas se faire
01:18:00prévaloir, justement, à sa qualité de vice-présidente
01:18:02sur ce sujet précis de l'immigration.
01:18:04Qu'est-ce qu'on peut en dire ?
01:18:06Il faut aussi s'interroger sur pourquoi
01:18:08les électeurs s'intéressent à cette question
01:18:10de l'immigration. C'est quelque chose
01:18:12qui poursuit le Parti démocrate
01:18:14comme les gauches, d'ailleurs,
01:18:16social-démocrates européennes.
01:18:18La question de l'immigration fait tomber
01:18:20la gauche aux Etats-Unis,
01:18:22en Europe, dans un certain
01:18:24nombre de pays. Et c'est lié
01:18:26aussi à un contexte économique
01:18:28où, dans les années 90, on avait
01:18:30une gauche beaucoup plus ouverte
01:18:32à la mondialisation. J'associe gauche
01:18:34et Parti démocrate, ce qui n'est pas totalement exact,
01:18:36mais par facilité de langage, j'associe les deux.
01:18:38Le Parti démocrate
01:18:40avait plutôt une position
01:18:42favorable à la mondialisation
01:18:44qui a causé
01:18:46un certain nombre
01:18:48de pertes d'emploi dans
01:18:50les populations travaillant
01:18:52dans les secteurs industriels,
01:18:54notamment. Donc, il y a eu
01:18:56un ressentiment qui s'est créé
01:18:58dans ces électorats contre
01:19:00les immigrants qui venaient prendre
01:19:02leur travail ou, en tout cas,
01:19:04où leur emploi était délocalisé.
01:19:06Donc là, on a un électorat populaire plutôt blanc
01:19:08qui s'est plutôt rapproché
01:19:10de Donald Trump ?
01:19:12Pas que, parce qu'il n'y a pas de clivage strict.
01:19:14Les Blancs sont contre l'immigration
01:19:16et les minorités aiment les immigrants.
01:19:18Il y a aussi plusieurs générations
01:19:20d'immigrants. Si vous regardez, par exemple,
01:19:22les communautés latino,
01:19:24les immigrants illégaux sont vus
01:19:26d'un très mauvais oeil puisqu'on a affaire
01:19:28à des générations qui ont
01:19:30eu des difficultés pour
01:19:32se faire une situation aux Etats-Unis
01:19:34et ils voient d'un très mauvais oeil
01:19:36des immigrants qui se
01:19:38feraient régulariser très vite.
01:19:40Donc, il y a des tensions au sein des minorités
01:19:42et ça, c'est un point important
01:19:44de cette élection, c'est que les minorités sont
01:19:46de moins en moins acquises aux démocrates.
01:19:48Sur ce sujet, d'ailleurs, comme sur l'avortement,
01:19:50par exemple, dans le Texas, les minorités
01:19:52qui arrivent par l'immigration sont aussi
01:19:54des minorités conservatrices, religieuses
01:19:56et qui sont opposées à l'avortement majoritairement.
01:19:58Donc, il faut bien ici
01:20:00nuancer la situation
01:20:02du point de vue de l'électorat.
01:20:04Il s'agit de l'immigration clandestine,
01:20:06pas de toute l'immigration. C'est celle-là
01:20:08qui pose problème et c'est celle-là qui va menacer
01:20:10les minorités et les minorités
01:20:12raciales et autres aux Etats-Unis
01:20:14et souvent les personnes qui ont les emplois
01:20:16les moins qualifiés, parce que c'est cela
01:20:18que les migrants vont prendre.
01:20:20Donc, c'est là où il y a un conflit.
01:20:22On va aborder un autre sujet central,
01:20:24mais c'est un peu comme les campagnes français,
01:20:26c'est le pouvoir d'achat. Un des thèmes centrales
01:20:28aujourd'hui aux Etats-Unis, c'est l'économie
01:20:30et c'est, bien évidemment, le pouvoir d'achat.
01:20:32Et là, Donald Trump a le sentiment
01:20:34qu'il retrouve les bonnes
01:20:36vieilles recettes républicaines,
01:20:38c'est-à-dire la baisse des impôts
01:20:40et puis
01:20:42essayer, un temps soit peu,
01:20:44de réduire
01:20:46l'Etat fédéral.
01:20:48On est sur du classique
01:20:50concernant Donald Trump
01:20:52et les propositions de Donald Trump en manière
01:20:54de pouvoir d'achat aux Etats-Unis.
01:20:56On est sur du classique, sauf pour la question des tarifs douaniers,
01:20:58parce que ça, c'est pas quelque chose qui est très républicain.
01:21:00Par contre, vous avez raison de parler des impôts,
01:21:02parce que lorsqu'il a été élu président,
01:21:04il a mis en place ce qu'on appelait les Trump Tax Cuts,
01:21:06donc il a des réductions d'impôts,
01:21:08et leur date d'expiration, c'est le printemps prochain.
01:21:10Donc là, qui sera élu ?
01:21:12Si Kamala Harris est élue,
01:21:14c'est vraisemblable qu'elle ne prolongera pas
01:21:16ces coupes d'impôts.
01:21:18Donc on aura automatiquement une hausse des impôts aux Etats-Unis.
01:21:20Lui a déjà annoncé qu'il les prolongerait
01:21:22et donc qu'on resterait dans la situation actuelle.
01:21:24Mais c'est vrai que de tous les sujets
01:21:26de sociétés, de cultures et autres
01:21:28qui mobilisent autour de la campagne,
01:21:30c'est l'économie qui est toujours mise en tête
01:21:32et au sein de l'économie, c'est le problème
01:21:34de l'inflation.
01:21:36Il faut comprendre aux Etats-Unis que c'est pas seulement
01:21:38le prix du litre de lait
01:21:40ou du litre d'essence, même si ça compte,
01:21:42pour manger et pour se déplacer,
01:21:44tous les Américains, ou la plupart des Américains,
01:21:46veulent devenir propriétaires
01:21:48de leur logement.
01:21:50Et votre dépense principale de votre vie,
01:21:52c'est l'argent que vous allez mettre dans votre maison.
01:21:54Et les taux d'intérêt sont toujours variables.
01:21:56Et c'est sur 30 ans.
01:21:58Et quand l'inflation repart,
01:22:00les taux d'intérêt partent avec
01:22:02et là, vos mensualités, elles explosent.
01:22:04Et c'est ça qui a fait très, très mal aux Américains
01:22:06et ils le ressentent tous les mois.
01:22:08Et c'était pas ce qu'ils ressentaient
01:22:10sous Donald Trump, mais c'est qu'ils ont
01:22:12ressenti, quand l'inflation est repartie,
01:22:14c'était au début de l'année 2021,
01:22:16elle est un tout petit peu retombée depuis
01:22:18et les taux d'intérêt directeurs,
01:22:20comme on dit, se décidés par la Réserve fédérale,
01:22:22ont été un petit peu baissés,
01:22:24mais pas suffisamment pour que les Américains
01:22:26se sentent bien. Donc là, ils ont mal au portefeuille
01:22:28et ça, c'est évidemment un argument
01:22:30qui est défavorable à Kamala Harris, puisqu'après tout,
01:22:32elle est l'assortante et favorable à Trump,
01:22:34malgré tout.
01:22:36Le problème, c'est qu'ils sont fixés par la Fed
01:22:38qui est indépendante du pouvoir politique,
01:22:40donc quel que soit le président, de toute façon,
01:22:42même si Donald Trump avait été réélu,
01:22:44il aurait pu vitupérer autant qu'il voulait,
01:22:46il y a une situation économique et les taux
01:22:48d'intérêt auraient été les mêmes.
01:22:50Donc ça, en fait, c'est...
01:22:52On voit que c'est un vrai clivage, c'est-à-dire que Kamala Harris
01:22:54ne propose pas des baisses d'impôts
01:22:56dans les mêmes proportions que celles
01:22:58proposées par Donald Trump ?
01:23:00Pas dans les mêmes proportions, mais ce qu'elle propose,
01:23:02c'est qu'en dessous de, je crois, 400 000 dollars
01:23:04de revenus, ce qui est quand même une somme un peu rondelette,
01:23:06les impôts n'augmenteraient pas,
01:23:08donc ça ne concernerait qu'une frange
01:23:10assez élevée de l'échelle sociale,
01:23:12et donc le graal,
01:23:14en fait, c'est les classes moyennes,
01:23:16on ne sait jamais trop ce que c'est que les classes moyennes,
01:23:18tout le monde s'identifie, voudrait s'identifier aux classes moyennes,
01:23:20ne seraient pas touchées.
01:23:22Donc l'électeur lambda,
01:23:24en dessous de 400 000 dollars par an,
01:23:26ne serait pas touché par les hausses d'impôts
01:23:28quand il s'agira de confirmer ou pas
01:23:30les réductions d'impôts de Trump en 2025.
01:23:32Est-ce qu'elle ne peut pas tirer, d'une certaine manière,
01:23:34de ce qu'a été le bilan de Joe Biden
01:23:36sur, justement,
01:23:38l'économie, sachant que la période
01:23:40inflationniste à laquelle vous faites référence
01:23:42couvre vraiment ce mandat Biden ?
01:23:44C'est le problème
01:23:46d'être au mauvais endroit au mauvais moment.
01:23:48Biden s'est fait élire
01:23:50juste après le Covid, de la même manière
01:23:52qu'Obama s'est fait élire en 2008
01:23:54et il y avait une crise économique.
01:23:56Nicolas Sarkozy s'est fait élire en 2007,
01:23:58il y a eu une crise économique juste après.
01:24:00Quand on arrive au moment où il y a une crise économique,
01:24:02on est coincé...
01:24:04Pour moi, l'inflation ne vient pas de nulle part,
01:24:06c'est pas simplement la crise. Vous avez eu des décisions
01:24:08prises au début de l'administration Biden,
01:24:10notamment en matière d'énergie,
01:24:12qui ont fait monter immédiatement le prix du pétrole,
01:24:14et puis vous avez eu des dépenses
01:24:16qui étaient quand même considérables, liées à la pandémie,
01:24:18qui n'étaient pas forcément justifiées
01:24:20parce qu'on était en fin de pandémie,
01:24:22et qui ont créé un surcroît de liquidité
01:24:24qui a après produit une inflation.
01:24:26Donc elle ne vient pas de nulle part,
01:24:28et pour moi, elle est le résultat de la politique de Joe Biden
01:24:30et de son administration,
01:24:32et je pense que beaucoup d'Américains en ont conscience.
01:24:34Donc ils blâment Biden pour ça.
01:24:36Je laisse le mot de la fin. L'économie, le pouvoir d'achat...
01:24:38Oui, c'est un enjeu central.
01:24:40Pour les deux candidats, un enjeu central,
01:24:42c'est la poursuite de la renationalisation
01:24:44de l'économie
01:24:46ou des mesures de protectionnisme économique.
01:24:48D'ailleurs, ce qui a créé l'inflation,
01:24:50c'est cet argent de l'Inflation Reduction Act,
01:24:52qui n'en porte que le nom,
01:24:54et qui a injecté tellement d'argent
01:24:56dans le système économique américain,
01:24:58tellement d'investissements,
01:25:00que ça a créé une augmentation des prix.
01:25:02Donc dans les deux cas,
01:25:04on aura bien sûr des mesures protectionnistes
01:25:06qui se défient de la Chine,
01:25:08mais aussi de l'Europe,
01:25:10dans une certaine manière,
01:25:12et ça, c'est une continuité entre les démocrates et les républicains.
01:25:14Vraiment un grand merci à tous les trois
01:25:16d'avoir échangé ensemble
01:25:18après ce documentaire entièrement consacré
01:25:20à ce problème de l'avortement
01:25:22aujourd'hui aux Etats-Unis.
01:25:24Ça sera un des thèmes de campagne
01:25:26important dans la toute dernière
01:25:28droite de cette campagne présidentielle,
01:25:30mais il y aura aussi l'immigration
01:25:32et l'économie,
01:25:34notamment le pouvoir d'achat,
01:25:36comme thème majeur de cette campagne.
01:25:38Vos réactions, ça sera sur hashtag débadoc.
01:25:40Merci à Félicité Gavalda,
01:25:42Victoria Bellé, qui m'ont aidée à préparer cette émission.
01:25:44Moi, je vous retrouve pour un prochain débadoc,
01:25:46ça sera bien sûr avec son documentaire
01:25:48et son débat. A très bientôt.