Deux éducateurs de l'US Colomiers ont vu leurs voitures incendiées devant leurs domiciles. Des violences intolérables pour les dirigeants du club amateur qui ont décidé de suspendre tous les déplacements et les matchs jusqu'au 11 novembre, en signe de protestation contre cette montée des incivilités. Phénomène qu'a également remarqué par Gérard Bellehigue, président de l'Association des Éducateurs de Football.
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00:00On avait envie d'aller plus loin. Bonjour Gérard Berluig, vous êtes le président du Cosmo Taverniste, un club du Val-d'Oise, et vous êtes par ailleurs le président de l'association des éducateurs de foot.
00:08Ça arrive souvent, les parents qui pètent les plombs ?
00:11Ça n'arrive pas souvent, mais ça arrive quelquefois. Depuis, on voit ce phénomène monter depuis à peu près 5-6 ans. En tout cas, moi, je le constate depuis 5-6 ans.
00:21En fait, le football reflète ce qu'est la société aujourd'hui, c'est-à-dire que de plus en plus de violences, par une minorité, ce n'est pas la société dans sa généralité qui est violente,
00:33mais il y a des comportements violents, des incivilités qui sont de plus en plus nombreuses.
00:39Est-ce que vous avez déjà été confronté dans votre club des parents, pas forcément qui agressent physiquement des éducateurs, mais même verbalement ?
00:46Non. Alors oui, il y a des parents qui peuvent avoir des comportements d'incivilité.
00:52Dernièrement, par exemple, j'ai eu un parent qui est rentré sur le terrain parce que son fils s'était accroché à l'adversaire, et donc il vient et il a tiré l'oreille de l'adversaire.
01:02Donc il n'a pas rentré sur un terrain.
01:05Ou il vient en soutien à son fils.
01:07Il vient en soutien à son fils alors qu'on ne sait pas qui a commencé. Vous savez, chez les enfants, ça peut être l'un ou l'autre. Nous, on n'a pas l'habitude.
01:15Et puis c'est le rôle de l'éducateur de le faire à ce moment-là, de les séparer.
01:17C'est le rôle de l'éducateur, effectivement, de rentrer sur le terrain et de séparer les enfants, de punir.
01:22Souvent, c'est en les sortant du terrain pendant quelques minutes, le temps qu'ils se calment, et puis ensuite ils rentrent un peu plus tard.
01:28Ceux qui suivent l'actu du foot de Gérard Béloïc savent que ça s'appelle le projet Mbappé.
01:32C'est un truc qui est d'ailleurs très péjoratif.
01:34C'est cette tendance des parents à vouloir faire de leur fils un champion parce que ça ramène beaucoup d'argent.
01:40Il y a vraiment eu un point de bascule.
01:43Quand vous dites 5-6 ans, ça correspond un peu quand même à ça.
01:45Chez certains parents, oui.
01:47Chez certains parents, l'enfant est un investissement.
01:49Et ils le disent. Ils n'ont pas peur de le dire.
01:51J'investis dans mon enfant.
01:53C'est-à-dire que je vais lui donner les moyens de réussir.
01:55Je vais l'inscrire dans un club.
01:57Je vais l'inscrire à côté sur des cours particuliers.
02:01Ils appellent des coachings. Ils ont des coachs qui leur font des cours particuliers, souvent individuellement.
02:05Alors que le football est un sport collectif.
02:07Et Mbappé, ce qu'on appelle le projet Mbappé,
02:13c'est aussi l'accompagnement des parents.
02:15Mais l'accompagnement des parents, Mbappé, il était plutôt dans le suivi de l'enfant et non pas pour le conduire.
02:21C'est l'enfant qui s'est construit lui-même.
02:23Le jeune qui est maintenant un adulte.
02:25Il s'est construit par ses qualités propres.
02:27Qui sont des qualités bien sûr techniques, physiques.
02:29Mais qui sont aussi des qualités mentales.
02:31Les qualités mentales, il n'a pas volé à ses parents.
02:33Ses parents ne lui ont pas donné.
02:35Il les avait naturellement.
02:37C'est ce qu'appelle Arsene Wenger.
02:39La notion de capacité à endurer mentalement.
02:45C'est-à-dire de proproduire l'effort plusieurs fois.
02:47De soutenir l'échec.
02:49L'échec qui peut être lié à la concurrence.
02:51Qui peut être lié à des blessures.
02:53C'est une forme d'échec.
02:55Tout cela contribue à ce que l'enfant doit se construire lui-même.
03:01Qu'est-ce que vous faites contre ces parents qui s'investissent un peu trop dans l'éducation sportive de leur enfant ?
03:09Est-ce que vous les réunissez en début de saison ?
03:11Est-ce que vous avez mis des affiches ?
03:13Nous ce qu'on fait d'abord c'est réunion de début de saison.
03:17Malheureusement tous les parents ne viennent pas.
03:19On va dire qu'il y a de l'ordre de 40% des parents qui viennent.
03:21Pour expliquer comment on fonctionne.
03:23Est-ce qu'on a le temps de leur enfant ?
03:27Est-ce qu'on va permettre à leur enfant ?
03:29Le football comme tous les sports collectifs.
03:31C'est de voir comment je vais m'intégrer dans la société plus tard.
03:35Je vais m'intégrer socialement dans la société.
03:37J'ai un plaisir, je pratique un plaisir qui est le sport que je recherche.
03:41En l'occurrence le football.
03:43Mais derrière c'est surtout comment je vais me comporter dans la vie sociale.
03:45Un peu comme l'école.
03:47Sinon que l'école est subie par l'enfant.
03:49Alors que le football quand il y va en principe c'est un plaisir.
03:51C'est une volonté de sa part d'y aller.
03:53On peut casser les enfants en investissant comme ça ?
03:55Complètement.
03:57J'ai plusieurs exemples de parents qui ont mis des pressions énormes sur les enfants.
04:01Et l'enfant arrivé à 14-15 ans il arrête le football.
04:05C'est souvent les papas.
04:07Malheureusement les enfants ne supportent plus d'avoir un père qui les critique du matin au soir.
04:13Parce que c'est pendant le match, après le match.
04:17Mais c'est surtout pendant les repas.
04:19C'est la vie familiale.
04:21Il y a une pression telle que l'enfant à un moment donné il craque.
04:23Aujourd'hui l'enfant qui réussit c'est plus l'enfant qui est soutenu, aidé.
04:25Que l'enfant qui est pressurisé.
04:27Merci beaucoup Gérard Bailly pour ton témoignage ce matin sur BFM TV.