Antibiotiques, paracétamol, corticoïdes, traitements du cancer, antidiabétiques... à l'approche de l'hiver, on s'inquiète de ne pas pouvoir se procurer ces médicaments en pharmacie. Mais en réalité c'est toute l'année que plusieurs molécules manquent...
Pour y faire face, il y a quatre ans, en pleine pandémie de Covid-19, Emmanuel Macron avait affiché son objectif de relocaliser la production pharmaceutique sur le territoire.
Pourquoi ces pénuries durent-elles ? Comment s'expliquent-elles ? Et comment y remédier ? Combien de médicaments sont-ils fabriqués en France ? L'affaire Doliprane doit-elle nous inquiéter ?
Élizabeth Martichoux et ses invités débattent de ces questions :
- Bruno BONNEMAIN, président honoraire de l'Académie nationale de pharmacie
- Nathalie COUTINET, économiste à l'université Sorbonne Paris Nord et chercheuse au Centre d'économie de l'université de Paris-Nord (CEPN), membre du collectif des économistes atterrés et eco-auteure de "Economie du médicament "(La Découverte) ,
- Sonia DE LA PROVÔTÉ, sénatrice centriste du Calvados et présidente de la commission d'enquête du Sénat sur les pénuries de médicaments,
- Catherine SIMONIN, présidente chargée des politiques de santé de la Ligue contre le cancer.
La santé figure au premier rang des préoccupations des Français et au coeur de tous les grands débats politiques et sociétaux.
L'organisation des soins, le service public hospitalier, mais aussi le mal de dos, les allergies, la bioéthique ou encore la nutrition... Sur LCP-Assemblée nationale, Elizabeth Martichoux explore chaque mois un thème de santé publique.
Entre reportages, interviews de professionnels de santé, de personnalités politiques mais aussi de patients, ce rendez-vous aborde tous les maux d'une problématique de santé, ses enjeux, les avancées et les nouveaux défis pour mieux vivre demain !
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Pour y faire face, il y a quatre ans, en pleine pandémie de Covid-19, Emmanuel Macron avait affiché son objectif de relocaliser la production pharmaceutique sur le territoire.
Pourquoi ces pénuries durent-elles ? Comment s'expliquent-elles ? Et comment y remédier ? Combien de médicaments sont-ils fabriqués en France ? L'affaire Doliprane doit-elle nous inquiéter ?
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- Bruno BONNEMAIN, président honoraire de l'Académie nationale de pharmacie
- Nathalie COUTINET, économiste à l'université Sorbonne Paris Nord et chercheuse au Centre d'économie de l'université de Paris-Nord (CEPN), membre du collectif des économistes atterrés et eco-auteure de "Economie du médicament "(La Découverte) ,
- Sonia DE LA PROVÔTÉ, sénatrice centriste du Calvados et présidente de la commission d'enquête du Sénat sur les pénuries de médicaments,
- Catherine SIMONIN, présidente chargée des politiques de santé de la Ligue contre le cancer.
La santé figure au premier rang des préoccupations des Français et au coeur de tous les grands débats politiques et sociétaux.
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NewsTranscription
00:00Générique
00:02...
00:26Bonjour à tous.
00:27Recherche, médicaments, désespérément.
00:30Amoxycilline, paracétamol, corticoïdes à l'approche de l'hiver,
00:33on s'inquiète de ne pas pouvoir s'en procurer
00:36dans nos pharmacies.
00:37En réalité, c'est toute l'année que plusieurs molécules manquent.
00:41La situation ne s'améliore pas
00:44depuis l'épidémie du Covid-19.
00:46Au contraire, vous verrez, les chiffres sont tout à fait éloquents
00:50et sans doute inquiétants.
00:51Justement, pourquoi ces pénuries durent-elles ?
00:54Comment les expliquer ?
00:56Comment y remédier ?
00:58Est-ce que ça doit nous inquiéter, l'affaire du Doliprane, par exemple ?
01:03Est-ce que c'est un symptôme ou est-ce que ça n'a rien à voir ?
01:06Toutes ces questions, on va les poser avec nos invités
01:08dans ce numéro spécial d'État de santé.
01:10Soyez les bienvenus.
01:12Soyez aussi la bienvenue, Sonia Delaprovoté.
01:15Merci d'être avec nous sur ce plateau.
01:17Vous êtes sénatrice unioncentriste du Calvados.
01:20Vous avez présidé la commission d'enquête du Sénat
01:24sur la pénurie de médicaments.
01:25Rapport rendu en juillet 2023,
01:27les préconisations ont-elles été suivies ?
01:29Lesquelles étaient-elles, d'ailleurs ?
01:31Vous nous le direz tout à l'heure.
01:33M. Bonnemain, bonjour.
01:35Président honoraire de l'Académie nationale de pharmacie.
01:38Vous avez été auparavant pharmacien dans l'industrie.
01:42On en parlait juste avant de débuter cette émission.
01:44Il y a beaucoup de pharmaciens dans l'industrie
01:46qui se préoccupent, qui rappellent à l'industrie,
01:48on l'espère en tout cas, qu'au cœur des préoccupations,
01:51il doit y avoir le patient.
01:53Vous nous direz.
01:54Est-ce qu'on a des idées simples sur ce sujet complexe ?
01:56C'est le point de vue de l'industriel que vous porterez.
01:59Bonjour, madame Coutinet. Merci d'être avec nous.
02:02Vous êtes professeure d'économie à l'université Sorbonne-Paris-Nord.
02:06Vous êtes membre du collectif des économistes atterrés,
02:09dont je rappelle qu'il propose une alternative
02:13au tenant du néolibéralisme.
02:15Vous connaissez bien la question.
02:16Vous avez été coauteur aux éditions de La Découverte en 2018
02:21d'un ouvrage, L'économie du médicament.
02:24Enfin, madame Simonin Catherine,
02:26ancienne vice-présidente de la Ligue contre le cancer,
02:29porte-parole aujourd'hui de France Assoce Santé.
02:32Vous suivez de très près ces pénuries de médicaments.
02:35J'ai envie de vous demander, madame Simonin,
02:38est-ce qu'il est fréquent
02:40que des malades du cancer soient privés de médicaments ?
02:44Ce qui paraît inouï quand on y pense.
02:47Alors, ça arrive, on a des études déjà.
02:49La Ligue nationale contre le cancer a fait une étude en 2023
02:53où on peut voir que les patients qui sont soignés à l'hôpital
02:56ont beaucoup moins d'informations que ceux qui vont en officine.
03:00Par exemple, France Assoce Santé, il y a 44 % de personnes
03:03qui ont été confrontées, l'année dernière, à une pénurie.
03:082 % à l'hôpital.
03:09Et ce chiffre ne bouge pas depuis trois ans.
03:11Est-ce que ça a des conséquences graves ?
03:15Bien sûr.
03:16Alors, il y a des retards de traitement,
03:19il y a aussi des substitutions qui ne sont pas neutres
03:21parce que ce n'est pas le médicament qui est indiqué pour le patient.
03:25Et quand on switch,
03:27c'est-à-dire on a vraiment des médicaments de seconde zone,
03:30donc pour le patient, il y a un impact,
03:32et surtout si la maladie est grave.
03:34Et après, nous avons des informations sur les pénuries
03:38que sur les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur,
03:40mais pas tous les autres.
03:42Donc c'est beaucoup plus ample
03:43que ce que l'on a objectivé jusqu'à aujourd'hui.
03:46On va voir les chiffres,
03:48parce que je le disais, ils sont tout à fait éloquents
03:50sur la durée et la persistance de ces manques de médicaments.
03:56Mais juste un mot, ces pénuries-là,
03:58pour des pathologies aussi graves que le cancer,
04:01c'est nouveau ?
04:03Dans le fond, il y a toujours eu ce risque.
04:05Non, il y a une amplification.
04:07Les études sont récurrentes.
04:09Depuis 2019, la Ligue avait objectivé
04:11qu'un certain nombre d'oncologues étaient confrontés à des pénuries.
04:14Là, aujourd'hui, il y en a 74 %.
04:16Et les pharmacies...
04:1774 % de quoi ?
04:19D'oncologues qui ont été confrontés à un problème de pénurie.
04:23Mais par contre, l'information n'est pas transférée
04:25vers le patient.
04:27C'est ça aussi.
04:28Alors évidemment, c'est très grave
04:30et ça nous perturbe énormément,
04:33les malades encore plus,
04:35de savoir que des personnes atteintes du cancer
04:38peuvent être confrontées, en plus de leur maladie,
04:40à ces questions-là.
04:41Mais cela dit, tous un jour,
04:43les chiffres.
04:44L'ANSM a reçu près de 5 000 signalements
04:47de rupture hérisse, de rupture de stock, en 2023.
04:50C'est une augmentation substantielle.
04:54En 2023, donc, ces signalements ont augmenté de 30 %.
05:00Nathalie Coutinet, la situation est pire.
05:02Oui, alors moi, j'ai calculé qu'entre 2013 et 2023,
05:05donc 10 ans, c'est 1 000 % d'augmentation de pénurie.
05:08En France ?
05:10Est-ce que tous les pays européens...
05:12C'est un phénomène...
05:13Qui touche tous les pays,
05:14pas forcément sur les mêmes molécules,
05:16mais par exemple, si on se souvient
05:18de la pénurie d'amoxycyline hiver dernier,
05:20elle a été annoncée d'abord aux Etats-Unis.
05:22C'est les Etats-Unis qui ont tiré le signal d'alarme
05:25sur cette pénurie, c'était donc une pénurie mondiale.
05:28Oui, bien sûr, le phénomène s'aggrave
05:30et c'est vraiment une croissance exponentielle
05:32à laquelle on assiste,
05:33et c'est là où le phénomène, qui était déjà dangereux,
05:37devient un vrai sujet de santé publique.
05:39Et dans une économie mondialisée,
05:41évidemment, tout le monde est touché un jour
05:43par une baisse de production.
05:45Dans un pays, on va y venir,
05:46mais est-ce qu'on sait la proportion,
05:48ce qu'on connaît, la proportion de médicaments
05:50autorisés en France,
05:52qui sont ou ont été en rupture ?
05:5450, 40 % des médicaments autorisés en France
05:57qui ont été signalés ?
05:58Alors, signalés, ça peut être un mois,
06:00ça peut être davantage, madame Delaprovoté.
06:04C'est pas forcément durable.
06:05Il y a un moment où la chaîne...
06:06Le médicament n'est plus livré et ça revient vite.
06:09C'est pas forcément durable,
06:11mais tout l'enjeu, c'est, dans les moments
06:13où il y a une surconsommation, comme la période hivernale,
06:16de certains médicaments, c'est de l'anticiper
06:18pour que non seulement ça ne soit pas durable,
06:21mais qu'en plus, on ait des systèmes palliatifs
06:23pour compenser la crise et la surconsommation
06:25au moment où elle va avoir lieu.
06:27Ca, ça s'anticipe,
06:28parce que l'hiver, il y a toujours pas les mêmes maladies.
06:31Et donc, c'est la question des stocks.
06:33C'est la question des stocks
06:35et c'est la question de relancer une fabrication publique
06:39ou d'initiatives publiques,
06:40relancer la cinquantaine de pharmaciens en France
06:43qui est capable de reconditionner du clamoxyne,
06:46parce qu'on sait que les formes pédiatriques,
06:48par exemple, sont compliquées à obtenir.
06:51Tout ça, ça s'anticipe.
06:52Et évidemment, si on ne s'y prend pas en avance,
06:55quand on arrive au premier jour de l'épidémie,
06:58c'est la catastrophe,
06:59parce qu'un jour après, on n'a plus les médicaments nécessaires.
07:02Et ça devient un casse-tête.
07:04On va aller dans une pharmacie,
07:05parce que c'est, évidemment, chez les pharmacies
07:09qu'on peut constater tout un chacun le manque de médicaments.
07:13Marianne Cazot a rencontré une pharmacienne de la région parisienne
07:16qui est confrontée à cette question de la pénurie.
07:19Reportage.
07:25Là, j'ai le générique de l'Augmentin,
07:28qui manque depuis des mois, des années, des semaines.
07:33Et que j'arrive à avoir de temps en temps.
07:36Vous voyez, là, j'ai une boîte de 16 comprimés,
07:39une boîte de... Voilà.
07:40Deux boîtes de 16 comprimés,
07:42c'est tout ce que j'ai pour l'instant pour les patients,
07:44sachant que c'est un antibiotique beaucoup prescrit, notamment l'hiver.
07:48La situation actuelle, c'est un vrai casse-tête.
07:51On se retrouve face à face avec le patient,
07:53avec parfois pas de solution à lui proposer.
07:55Aujourd'hui, peut-être une ordonnance sur trois
07:58où on va être en difficulté parce qu'on n'a pas le produit.
08:01Il y a des ruptures, notamment sur le téralène.
08:03C'était les gouttes pour les yeux.
08:05En distaminique, en sirop, il y en a nulle part.
08:08Il n'y a rien de plus frustrant que d'arriver au comptoir
08:11et de dire qu'on ne peut pas honorer toute l'ordonnance
08:13alors qu'on sait pertinemment que le patient en a besoin.
08:16Donc, il y a un côté frustrant,
08:18l'impression de ne pas avoir fait le travail correctement,
08:21même si on sait bien que ce n'est pas de notre faite.
08:24Malheureusement, on s'est un peu tous habitués,
08:27que ce soit les patients, les prescripteurs ou nous-mêmes.
08:30Ça fait maintenant deux ans que ça dure.
08:32Donc, on devient tous un peu fatalistes et on bidouille.
08:36D'habitude, vous avez le générique, la gabapentine,
08:38mais il est manquant.
08:40Donc, je vous mets l'original.
08:42D'accord ? C'est la gabapentine.
08:44C'est celui pour vos douleurs... Voilà.
08:46Pégasi, pralluante, répévax.
08:48On a essayé d'évaluer le temps passé,
08:50à trouver des solutions pour les patients.
08:53En gros, on passe à peu près 12 heures par semaine.
08:55Tension, tension, rupture.
08:58C'est déjà s'assurer auprès de nos grossistes
09:00si le médicament est en rupture de stock
09:03ou s'il y a eu des retours chez eux.
09:05Parfois, on doit commander au laboratoire
09:07plutôt que de passer chez le grossiste.
09:09C'est une étape supplémentaire.
09:11Ensuite, on va voir avec nos confrères aux alentours
09:13pour savoir s'il leur reste des produits en stock.
09:16Quand on a épuisé toutes ces ressources-là,
09:18on va appeler le médecin pour savoir si il peut changer sa prescription.
09:22Quand, au bout du compte, on n'y arrive pas,
09:24c'est vrai qu'il y a un côté un petit peu fatigant, usant.
09:28Bip, bip, bip.
09:30Je vous appelle pour un renseignement
09:32concernant une disponibilité du Terralen.
09:35...
09:39Ils ne font pas de dépannage. Il y a trop de demandes.
09:42Il y aura des livraisons d'ici une dizaine de jours.
09:45Quelques boîtes éparpillées par la qui vont...
09:48Voilà.
09:49Il faut qu'on les surveille.
09:51Il y a beaucoup d'incompréhension.
09:53On ne comprend pas qu'aujourd'hui, en 2024, en France,
09:55on manque encore de médicaments.
09:57C'est pas acceptable, très sincèrement.
09:59Pourquoi ça dure, en fait ?
10:01Pourquoi ça dure dans le temps ? C'est ça, la vraie question.
10:04On peut comprendre que ponctuellement,
10:06parce qu'il y a un problème sur la chaîne de production,
10:09sur le conditionnement,
10:10n'importe quelle raison que ponctuellement,
10:12certains médicaments manquent,
10:14mais là, on en est à plus de deux ans.
10:16On a du mal à comprendre pourquoi on en est encore là,
10:19aujourd'hui, en 2024.
10:21...
10:25Pourquoi on en est encore là, en 2024 ?
10:27Dix-sept pharmaciennes l'ont répétée plusieurs fois,
10:30elle ne comprend pas elle-même. Sonia l'a provoqué.
10:33Pourquoi ?
10:34Il n'y a pas de réponse simple.
10:35Depuis la question de la chimie, la fabrication des principes actifs,
10:39qui s'est délocalisée depuis de nombreuses années
10:42et sur laquelle on n'a plus la maîtrise en France et en Europe,
10:45jusqu'au conditionnement qui s'est fait ailleurs,
10:48pour les génériques, notamment,
10:49qui sont les principaux médicaments les moins chers
10:52qui sont consommés sur le marché,
10:54mais aussi dans d'autres pays que la France,
10:56jusqu'à la distribution dans les pharmacies
10:59et la gestion des stocks,
11:00à chaque étape, il y a eu une défaillance,
11:02on a laissé faire, on n'a pas regardé les conséquences,
11:05et quand on ne fabrique plus de principes actifs
11:08dans un pays ou quand on surconsomme
11:10au plan international et qu'on ne fabrique plus en France,
11:13on n'a pas de stock en France
11:15pour pouvoir répondre à la demande sanitaire du pays, par exemple.
11:18Est-ce que vous avez, dans votre rapport, ce chiffre,
11:22un médicament sur cinq est fabriqué en France ?
11:25Ça veut dire qu'il y en a quatre sur cinq qui ne le sont pas.
11:29Ça veut dire que c'est en Inde, en Chine, etc.,
11:31que les médicaments et les principes actifs, en particulier,
11:35sont fabriqués et on doit les importer.
11:37Est-ce qu'il faudrait fabriquer tous les médicaments en France ?
11:41Est-ce que c'est ça, le problème ?
11:43Tous les médicaments, non.
11:44Evidemment, c'est pas possible.
11:46Par contre, on a...
11:48Les autorités ont une liste de médicaments essentiels,
11:50les médicaments d'un thérapeutique majeur,
11:53qu'il faut peut-être nettoyer parce qu'elle est très grosse.
11:56Il faut sans doute la rétrécir.
11:57Ce sont des médicaments indispensables
12:00pour traiter un certain nombre de pathologies.
12:02Ces médicaments-là doivent être produits en Europe
12:05pour s'assurer...
12:06En tout cas, les principes actifs, pour s'assurer de leur...
12:09Mais...
12:11Pour vous, c'est quoi le problème, justement,
12:14pour répondre à cette pharmacienne et à nous ?
12:17Pourquoi ça dure ?
12:18Il y a un problème d'offres et un problème de demandes.
12:21Le problème de demandes, c'est qu'au niveau mondial,
12:23plus de demandes pour ces médicaments peu chères,
12:26et c'est plutôt une bonne nouvelle,
12:28plus de pays ont accès aux médicaments.
12:30Je pense à la Chine, beaucoup de pays d'Asie,
12:33mais aussi des pays d'Amérique latine.
12:35La demande mondiale augmente.
12:36C'est le côté demandes.
12:38Parallèlement, du côté de l'offre,
12:40les industriels ont modifié l'organisation
12:43de leur production,
12:44c'est-à-dire que, de plus en plus,
12:46on fait produire, externaliser à l'étranger
12:48pour augmenter leur profit.
12:50On a... Quand vous dites qu'il y a un médicament sur cinq,
12:53vous avez raison, qui est produit en France,
12:55il y a 20 % des principes actifs,
12:57donc la substance qui soigne,
12:59qui est produite en Europe,
13:01et 80 % en Asie.
13:03Il y a dix ans, c'était l'inverse,
13:04et il y avait beaucoup moins de pénuries.
13:07On a laissé partir toutes ces fabrications.
13:09Alors, les laboratoires pharmaceutiques
13:12ont fait un choix pour augmenter leur profit,
13:15de délocaliser, comme n'importe quelle entreprise,
13:18et on fait produire.
13:19Il y a un autre phénomène qui est lié à l'offre...
13:22Les industriels ont traité le principe actif,
13:25ce qui nous soigne,
13:26exactement comme ils ont traité le textile.
13:29Il y a une main-d'oeuvre moins chère,
13:31donc on externalise, on délocalise.
13:33Il y a aussi une autre raison,
13:35c'est l'aspect environnemental.
13:37Dans les pays asiatiques,
13:38il y avait beaucoup moins de contraintes
13:40sur le plan de l'environnement,
13:42par exemple pour la production des antibiotiques.
13:45Vous dites qu'il y a un problème de normes ?
13:47Oui, on a des exigences réglementaires
13:49au niveau de l'environnement,
13:51beaucoup plus strictes qu'en Inde ou en Chine.
13:54C'est incroyable.
13:55C'est quoi une norme environnementale
13:57pour le médicament ?
13:58C'est tout ce qui concerne la pollution
14:01de l'environnement au niveau des usines.
14:03Les pharmacies...
14:04Les industriels, ça leur coûte plus cher
14:07de fabriquer ici à cause des normes ?
14:09Bien sûr.
14:10Vous élevez contre les normes ?
14:12Pas du tout.
14:13Je voudrais être sûre.
14:14Il y a beaucoup d'industriels
14:16qui s'élèvent contre les normes.
14:18Quand on relocalise en Europe,
14:19il faut changer les procédés de fabrication.
14:22Ca a un coût important.
14:23Oui, mais c'est plus protecteur
14:25pour l'environnement.
14:26Il y a aussi la protection sociale des salariés
14:29qui sont moins exposés.
14:30Dès qu'on fait de l'industrie chimique en France,
14:33on est classé Cveso seuil haut.
14:35C'est le plus haut de la protection
14:37et donc c'est les plus grandes contraintes réglementaires.
14:40Mais derrière, ça signifie aussi
14:42que comme ça coûte plus cher,
14:44mais c'est plus respectueux de l'environnement,
14:46on doit, au niveau européen,
14:48mettre en place des protections
14:50ou en tout cas mettre des contraintes
14:52sur la façon dont c'est fabriqué à l'extérieur.
14:54Si ça n'obéit pas, on doit privilégier
14:56ce qui est fabriqué dans nos pays
14:58sous ces normes-là qui sont plus respectueuses
15:01et qui garantissent un certain nombre de protections,
15:04notamment sanitaires.
15:05Ca, c'est intéressant.
15:06On est déjà un peu sur les solutions
15:08pour essayer de garantir la santé publique.
15:12La dimension satinitaire, très vite.
15:14Juste une dernière cause,
15:15parce qu'on était sur les causes.
15:17Je vous donne juste la parole après.
15:19Pour certaines molécules,
15:20il y a un ou deux producteurs au monde
15:24qui produisent une molécule.
15:25Et à ce moment-là, s'il y a un problème...
15:27Madame Simona ?
15:29Il y a un problème de sécurité,
15:30parce qu'en Inde ou en Chine, il y a moins de contrôles.
15:33C'est la FDA aux Etats-Unis qui va contrôler.
15:36Et là, on arrête la production
15:37et on arrête aussi le départ des lots.
15:41Et les lots qui sont contaminés.
15:42Donc il y a un problème de sécurité pour les patients.
15:45D'où l'intérêt d'avoir des usines à proximité
15:48pour pouvoir les contrôler.
15:49Mais c'est pas le seul problème.
15:51Je pense que dans toute la chaîne,
15:53on l'a vu avec la guerre en Ukraine,
15:55et notamment le flaconnage
15:56et les dispositifs nécessaires à la production
15:59de toute la chaîne du médicament,
16:01ça manquait.
16:02Vous voulez dire, le flaconnage, c'est l'enrobage.
16:05On a le principe actif d'un côté,
16:07et puis après, il y a tout ce qui fait
16:09que le médicament est vendable.
16:11Et là, si on a un seul intrant,
16:14un seul producteur pour un intrant dans la chaîne de production,
16:17s'il n'est plus en capacité de fournir ce dispositif
16:21qui rentre dans cette composition,
16:23il y a un arrêt et une pénurie derrière.
16:26Donc là, il y a quand même un souci,
16:29parce que, par exemple, il y a la qualité et la sécurité
16:32qui doivent être objectivées sur toute la chaîne,
16:35et les plans de prévention des pénuries européens.
16:38On y reviendra, sur la dimension européenne.
16:40Il y a peut-être des leviers intéressants.
16:42Je voudrais qu'on reste sur une des causes, le prix.
16:45Il faut qu'on parle du prix, c'est important.
16:47Le prix du médicament, il est très contrôlé en France.
16:50Regardez cette infographie qui nous détaille
16:54la décomposition du prix en France.
17:01En France, les médicaments sont divisés en deux catégories.
17:04Ceux qui sont remboursés et ceux qui ne le sont pas.
17:07Seuls les médicaments remboursés ont un prix régulé.
17:10Ils représentent plus de 94 % du chiffre d'affaires
17:14réalisé par les industries pharmaceutiques sur le territoire.
17:18La France est donc un marché attractif pour les laboratoires,
17:21avec ses 68 millions d'habitants et un système de santé solidaire.
17:28Le prix des médicaments remboursés se décompose ainsi.
17:3163 % pour les industriels,
17:3316 % pour les distributeurs et 21 % qui retournent à l'État.
17:38Les industriels communiquent peu sur les marges qu'ils réalisent,
17:41mais elles peuvent grimper très haut.
17:44Voici le résultat d'une enquête de l'ONG suisse Public Eye
17:48sur le rêve limite à un anticancéreux innovant.
17:510,1 % du prix de vente pour la production,
17:554 % pour la recherche et le développement,
17:596 % pour la distribution
18:01et plus de 89 % de marge pour le laboratoire.
18:06Du côté des génériques, en revanche, la rentabilité est toute autre.
18:10Elle aurait même été négative en 2023,
18:13moins 1,5 % selon les professionnels du secteur.
18:17Or, les médicaments génériques représentent
18:19la majorité des ruptures et tensions d'approvisionnement.
18:23Jugés peu rentables, certains industriels s'en désintéressent.
18:30Bruno Bonnemas, c'est un problème, la question du prix ?
18:33Oui, je pense que c'est un vrai problème
18:36pour ces produits génériques anciens,
18:38parce qu'on arrive à des marges tellement faibles
18:41qu'effectivement, les industriels ne s'y intéressent plus.
18:44On l'a vu récemment...
18:45Donc, ils ne les fabriquent plus.
18:47Ou ils le transfèrent à d'autres,
18:50à des gens qui sont...
18:51Par exemple, des Indiens,
18:53il y a eu un certain nombre de ventes vers des sociétés indiennes.
18:57Donc, je pense que c'est un vrai problème
18:59qui n'est pas simple à résoudre,
19:01mais c'est un vrai problème économique.
19:03D'ailleurs, il faut se rendre compte
19:05que quand on a un produit générique, un produit ancien,
19:08on continue à dépenser beaucoup chaque année
19:11pour le maintenir sur le marché.
19:12Qui ont ?
19:13Les industriels.
19:15Pour prendre simplement un exemple,
19:17on a mis en place, en Europe,
19:19un système qu'on appelle la sérialisation.
19:21C'est-à-dire qu'on va repérer, pour chaque boîte,
19:23l'origine du produit.
19:25Donc, ça, c'est très bien.
19:27C'est pour éviter les falsifications.
19:29Mais ça a coûté des millions aux industriels,
19:31y compris pour les produits anciens.
19:33Ce que vous nous dites, c'est que la méthode de fixation des prix,
19:37en France, génère des pénuries
19:40parce que les industriels ne s'y retrouvent pas.
19:42Tout à fait.
19:43Je pense qu'il faut qu'on revoie...
19:45Qu'est-ce qu'il faudrait faire ?
19:47L'idée, c'est aussi que les prix soient pas trop élevés
19:50pour que la Sécurité sociale puisse soutenir la demande de soins.
19:54C'est ça, l'enjeu. C'est pas simple.
19:56Non, c'est pas simple.
19:57Si vous vendez, je sais pas, les fers algans beaucoup plus chers,
20:01ça va être un problème pour les Français.
20:03C'est pour ça que le Premier ministre, l'année dernière,
20:06a décidé de faire un groupe de travail sur ce sujet des prix.
20:09C'est pas un sujet simple.
20:11Mais il faut le prendre à bras-le-corps
20:13pour voir comment gérer cette situation.
20:15Madame Delaprovoté.
20:16Oui.
20:17Ce qu'il faut voir, c'est que les négociations
20:20avec les industriels se font sur une enveloppe
20:24au sein du CEPS, le comité spécial
20:27qui détermine le prix du médicament.
20:30Et dans cette enveloppe,
20:32qui est l'enveloppe médicaments
20:36du projet de loi de finances de la Sécurité sociale,
20:38qu'on vote tous les ans, il y a les médicaments innovants
20:41et les médicaments matures, les anciens médicaments,
20:44qui sont, pour le coup, indispensables.
20:46On peut dire qu'ils sont dégénériques.
20:49On peut pas dire qu'ils sont dégénériques ou pas.
20:51Tous ces médicaments innovants, c'est dans la même enveloppe.
20:55Or, on a une explosion du prix du coût des médicaments innovants.
20:59C'est jusqu'à 1,9 million d'euros
21:01pour un médicament, pour une pathologie très rare,
21:04pour un traitement, pour une personne, sur un an.
21:06Donc, on voit bien qu'à un moment,
21:08cette enveloppe qui y est contenue n'arrive pas
21:11à compenser le remboursement
21:13et l'accès aux médicaments très chers et innovants,
21:16mais qui, pour le coup, doivent faire preuve de leur efficacité
21:20et à rembourser également ces médicaments matures,
21:23qui sont très consommés, il y a un vrai effet volume,
21:26mais ils sont absolument essentiels.
21:28Et la nouveauté dans les médicaments matures,
21:31je me permets de le dire,
21:33c'est qu'il y a maintenant, désormais,
21:35effectivement, des anticancéreux.
21:36Donc, on est en train de toucher à une vraie problématique
21:40parce que, là, pour le coup,
21:41tous les domaines médicaux sont concernés,
21:44des antiépileptiques,
21:46des traitements à visée cardiologique.
21:48Et donc, on voit bien qu'autant le paracétamol,
21:51on arrive à regarder ça un peu, voilà,
21:53mais maintenant, c'est des médicaments
21:56qui sont vitaux, vitaux, essentiels pour les patients,
21:59et là, pour le coup, on est face à une vraie crise sanitaire
22:02et à une vraie défaillance de santé publique.
22:05Pardon, mais comment on fait ?
22:06Comment on fait ? Parce que si je vous écoute,
22:09c'est la rançon du progrès technologique.
22:11Exactement.
22:13La recherche est performante, elle coûte très cher,
22:16il y a des investissements extrêmement coûteux,
22:18et donc, il y a des médicaments très innovants,
22:21donc des produits de pointe,
22:23qui coûtent très cher et qui sont remboursés,
22:26qui sont pris en charge par l'hôpital, donc par nous.
22:29Et à côté de ça...
22:30Je voudrais faire une correction à ce qui a été dit.
22:33Il y a eu un deal, dans les années 2010,
22:36entre les industriels et les autorités.
22:39L'idée, c'était de dire, pour encourager l'innovation,
22:42on va avoir des prix des médicaments innovants
22:44et, en contrepartie, on va baisser les prix des médicaments génériques
22:48dans tous les pays, pas spécifiquement la France,
22:51qui vont à leur prix baisser.
22:52Donc, vous acceptez de vendre pas cher
22:54les médicaments du tout venant tomber dans le domaine public...
22:58Mais vous en êtes très cher.
22:59Donc, qu'est-ce qu'ont fait les industriels ?
23:02Ils ont dit OK, et petit à petit, ils se sont désintéressés.
23:05C'est-à-dire que c'est pas rentable de produire des génériques,
23:09c'est que c'est pas suffisamment rentable
23:11pour des entreprises financiarisées.
23:13Vous êtes d'accord avec ça ?
23:14C'est un problème de dividendes ?
23:16Vous êtes d'accord avec ça ?
23:18La branche de Novartis, Sandos, la branche générique,
23:21faisait 20 % du chiffre d'affaires de Novartis.
23:24Donc, il y a bien une rentabilité à produire du générique.
23:27Vous diriez de la même façon,
23:28les industriels, ce sont des voraces
23:31qui se font de l'argent sur le dos des patients ?
23:34Je pense qu'il y a un certain nombre de produits
23:37qui ne sont plus rentables du tout.
23:39Pour prendre l'exemple de Servier et de sa branche générique,
23:4230 % de leurs produits n'étaient pas rentables du tout.
23:45Il n'y avait pas de marge.
23:46Donc, c'est pas possible.
23:48Donc, on ne peut pas demander à une entreprise
23:50de ne pas gagner d'argent sur les produits qu'elle fabrique.
23:53C'est un équilibre global économique d'une entreprise.
23:56Il y a quand même un bilan global à regarder à la fin de l'année.
24:01On voit bien que ce qu'on gagne sur des médicaments innovants,
24:05on peut considérer qu'une partie est à perte,
24:08entre guillemets, sur des médicaments matures.
24:10Le médicament, ce n'est pas un bien de consommation ordinaire.
24:13Il y a des politiques de santé publique.
24:16Quand on fabrique du médicament, on ne fabrique pas des brosses à cheveux.
24:19Sans critiquer les brosses à cheveux.
24:22Madame Simone ?
24:23Le problème, c'est que quand on a une société
24:25qui ne fait que des génériques,
24:27de toute façon, il y a un problème de valeur.
24:30C'est un problème de stratégie industrielle.
24:32S'il ne fait que du générique et ne gagne pas d'argent,
24:35elle va fermer les portes.
24:37Mais si elle gagne beaucoup d'argent avec des médicaments innovants,
24:41la contrepartie, ça peut être peut-être
24:43de ne pas gagner trop d'argent.
24:45Madame Sivana ?
24:46C'est lié aux stratégies des industriels
24:49qui vont aller plus vers des anticancéreux innovants
24:52qui ne concernent que très peu de personnes.
24:54Avec les carticelles, par exemple, ou de la thérapie génique,
24:57c'est pas 1,9 million d'euros.
25:00Dans l'hémophilie, c'est 4 millions de dollars aujourd'hui.
25:03Donc, on dépasse tout l'entendement.
25:05Ca ne correspond absolument pas
25:07ni à la recherche et développement derrière.
25:10Ca a été fait plutôt par des start-up
25:12ou même de la recherche fondamentale
25:14qui est payée par de l'argent public,
25:16que ce soit aux Etats-Unis ou en France.
25:19Et ensuite, tous les pays sont...
25:21Il y a 36 pays qui ont des pharmaciens hospitaliers
25:25et qui ont une association
25:27et qui publient un bilan chaque année.
25:29Dans 36 pays, 95 % des pharmaciens sont confrontés à des pénuries.
25:34Donc, ce n'est pas un problème français.
25:36Il faut trouver des solutions.
25:38Je voudrais qu'on aille sur ce terrain.
25:40C'est ce qui nous intéresse.
25:42Vous aviez proposé, dans votre rapport,
25:44une réforme de la fixation du prix ou pas ?
25:47Oui, on avait proposé le fait de tenir compte
25:49des conditions de fabrication du médicament,
25:52c'est-à-dire favoriser ce qui était fabriqué.
25:54C'est toute la chaîne du médicament.
25:56Un cinquième fabriqué en France, c'est pas vrai.
25:59C'est ou les principes actifs pour certains,
26:02pour certains, c'est pas vrai.
26:03La réalité, c'est que toute la chaîne concernant le médicament
26:07doit être réinternalisée, en France ou en Europe.
26:09Il y a un vrai sujet de souveraineté.
26:12On doit en tenir compte dans le prix.
26:14Évidemment que faire un hôpital,
26:16quand il fait un appel d'offre,
26:17l'hôpital, il va au moins dix ans.
26:20Il choisit le médicament qui est proposé
26:22par le laboratoire qui propose le prix le plus bas.
26:25L'équilibre économique hospitalier fait que ça met en difficulté.
26:29On doit pouvoir encourager l'hôpital
26:32pour privilégier aussi le choix des médicaments
26:35qui sont fabriqués en France ou en Europe
26:37ou en tout cas qui ont une estampille de garantie
26:40de fournir le produit.
26:41Est-ce que vous avez été entendus ?
26:43Ça commence à bouger.
26:45Oui, il y a un travail qui est fait.
26:47Il y a eu un article du projet de loi de finances
26:50à Sécurité sociale, il y a deux ans,
26:52qui demandait au fameux comité de fixation du prix du médicament
26:56de tenir compte de ça
26:57pour fixer le prix du médicament mature,
27:00de ces médicaments anciens, mais indispensables.
27:02Ça n'avait pas été fait au début,
27:04et là, les choses commencent à être mises en place.
27:07J'aurais aussi qu'on aborde la question des stocks.
27:10Il y a des amendes qui ont été infligées
27:12à 11 laboratoires pharmaceutiques
27:14à hauteur de 8 millions d'euros au total
27:16pour des stocks insuffisants.
27:19C'est un début ?
27:20Alors oui, c'est un début,
27:21mais là, dans le PLFSS 2025,
27:23il y a un article qui veut renforcer ces sanctions.
27:27Il y a eu une loi qui a été votée à l'Assemblée nationale,
27:31et derrière, il va y avoir un renforcement des sanctions,
27:34s'il n'y a pas trop d'amendements,
27:36mais nous, nous y sommes favorables,
27:38parce qu'en tant que citoyens, on nous demande
27:41d'observer la loi, et il y a des amendes
27:43si on ne l'observe pas.
27:44Les annonciels, c'est la même chose.
27:47Cette question, agir sur les stocks, c'est intéressant.
27:50Oui, mais disons qu'on va pas...
27:51On est dans la maladie, on va dire que la pénurie,
27:54c'est la maladie.
27:55On ne cause pas les causes de la maladie.
27:58On ne voit pas la racine du mal.
27:59C'est palliatif, si vous voulez,
28:02mais il faut s'attaquer...
28:03C'est de la prévention.
28:05C'est le seul...
28:06Mais il faut s'attaquer à la racine du problème.
28:09Et cette racine du problème,
28:10comme ça a été dit dans l'excellent rapport du Sénat,
28:14je tiens à le préciser,
28:15il y a toute une question d'un enjeu de relocalisation.
28:18Alors on va y venir.
28:20On y vient doucement, mais sûrement.
28:22Le problème, c'est que les entreprises pharmaceutiques
28:25sont dans une situation particulière,
28:27car elles ont un marché solvabilisé par l'Etat.
28:30Tout ce qu'elles vont vendre, elles sont assurées que ça va être vendu.
28:34Il ne faut pas faire pleurer sur les entreprises pharmaceutiques.
28:37C'était la réponse à monsieur, tout à l'heure.
28:40Je voudrais qu'on vous emmène dans un laboratoire pharmaceutique,
28:43parce que c'est intéressant de savoir que ça existe.
28:46En l'occurrence, il s'appelle Freepharm.
28:48C'est une plateforme de fabrication hospitalo-universitaire.
28:52L'Agence nationale du médicament s'est coordonnée
28:54avec des pharmacies d'hôpital
28:56pour qu'elles produisent des médicaments
28:58en rupture d'approvisionnement.
29:00Il y a des solutions locales qui sont mises en place.
29:02C'est le cas, notamment, aux Hospices civils de Lyon.
29:06Reportage, Marianne Cazot.
29:13Je suis praticien hospitalier, pharmacien,
29:15à l'hôpital Édouard Riau, à la pharmacie,
29:18dans laquelle est implantée
29:19la plateforme hospitalo-universitaire Freepharm.
29:25Freepharm a une certaine expertise
29:27sur la production de médicaments stériles et non stériles,
29:30avec une production qui est d'environ 100 000 unités d'os par an.
29:35C'est un médicament que le Sanofi ne fabrique plus.
29:40Du coup, nous, nous avons repris la production.
29:45De l'expérience que nous avons retirée de la pandémie,
29:49c'est qu'il fallait anticiper un certain nombre de pénuries,
29:52et c'est ce à quoi nous sommes engagés dans une collaboration
29:55avec, notamment, l'Agence nationale de sécurité de médicaments.
30:00Donc là, c'est notre matière première en quarantaine.
30:03À chaque réception de matière première,
30:04on est obligé de faire des contrôles
30:07pour être sûrs qu'il s'agisse bien du produit concerné.
30:10On raconte cinq arrêts de commercialisation en France
30:13depuis le début d'année.
30:14Ensuite, il y a les tensions d'approvisionnement,
30:16c'est-à-dire une centaine au cours de cette année.
30:19Et ensuite, il y a des ruptures de stock.
30:21Il n'est pas envisageable de répondre à toutes les pénuries.
30:25Ce n'est pas possible, nous n'en avons pas la capacité.
30:27En revanche, il est possible,
30:29sur une liste limitée de médicaments
30:32et dans un temps bien circonscrit,
30:34d'apporter une réponse à ces pénuries.
30:37C'est ça.
30:47Nous nous sommes sollicités pour évaluer la faisabilité
30:51pour reproduire un médicament,
30:53soit à l'identique,
30:54soit adapté à des besoins spécifiques pour des patients.
30:59C'est une enzyme de dégradation du glucose
31:01pour des enfants qui ne produisent pas cette enzyme, justement,
31:06qui ne peuvent pas être traités par d'autres médicaments.
31:09Nous sommes les seuls à produire, en France, en Europe et dans le monde,
31:12un médicament qui permet de lutter contre un parasite intestinal
31:17dont l'issue est fatale,
31:18souvent chez les patients immunodéprimés.
31:21En l'absence de ce traitement,
31:23il n'y a pas d'autre solution pour le patient.
31:25Il y a eu un arrêt de commercialisation sur ce médicament
31:28et nous avons pu faire l'acquisition de la matière première.
31:31Il restait un stock en Europe,
31:33à la suite de quoi nous avons pu reproduire ce médicament
31:36et ensuite le proposer à la communauté médicale.
31:39Quand on a produit le premier lot de ce médicament,
31:42c'est à la fois une fierté,
31:44mais aussi, on se dit qu'on a fait son travail.
31:52Bon, alors ça, c'est quand même assez formidable.
31:54On est tenté de dire, dans l'urgence,
31:57on arrive donc à pallier une pénurie, M. Bonnemain.
32:01Oui, je pense que c'est une solution, évidemment,
32:04qui n'est pas satisfaisante pour le long terme,
32:06mais à court terme, ça peut rendre service.
32:08C'est ce qui s'est passé pour la doxycyline
32:10au niveau des pharmacies d'officine.
32:12Donc ça peut être actionné localement.
32:17Est-ce qu'il faudrait la provoquer que ça soit partout, en fait ?
32:20Eh bien, en fait, si on fait bien les choses,
32:23en France, on a les capacités dans les hôpitaux
32:26avec les pharmacies internes des hôpitaux.
32:28Au niveau de l'AGEPS, la structure qui dépend de l'AP-HP,
32:31de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris,
32:34qui peut fabriquer et conditionner.
32:36Au niveau de la pharmacie des armées,
32:39et puis ce réseau de pharmaciens dans les territoires
32:41qui peut conditionner aussi dans les pharmacies.
32:44On peut répondre à l'urgence,
32:45mais on peut pas produire toute l'année dans ces conditions-là.
32:49D'abord, c'est plus cher, la production,
32:52et puis les contraintes ne sont pas exactement celles
32:55qu'on impose à l'industrie, qui produit dans de telles quantités
32:58qu'il y a un cadre législatif et réglementaire
33:00qui est très contraint, notamment au suivi sanitaire.
33:04Pour dire les choses, on l'a pas encore dit,
33:06c'est plus cher de procéder de cette façon-là
33:08que d'acheter des médicaments à des gros labos.
33:12Bien sûr.
33:13C'est bien dans l'urgence, pour des raisons de santé publique.
33:16Ca fait partie des solutions qu'on a proposées.
33:18Quand on a eu besoin des cures rares,
33:20parce qu'il y avait beaucoup de personnes en réanimation,
33:23et qu'à un moment, c'est trouvé en pénurie,
33:25c'est Lyon qui a retrouvé la recette, la monographie,
33:28et qui a refabriqué en urgence
33:30et qui a permis de proposer aux services d'anesthésie
33:35dans les hôpitaux ce produit qui manquait sur le marché.
33:38Donc c'est une solution d'urgence.
33:40Palliative, d'urgence.
33:41Mais vous ne dites pas que c'est la solution.
33:43On va parler de l'éléphant dans la pièce,
33:47comme on dit maintenant.
33:48C'est quand même Doliprane.
33:49Pour nous arriver au sujet de la relocalisation.
33:52Est-ce que la solution, c'est la relocalisation ?
33:55Je parle de Doliprane parce que Sanofi,
33:58qui avait décidé et s'est acté maintenant de vendre
34:01sa filiale qui produit, entre autres, le Doliprane,
34:05a un fonds américain.
34:07Ca a été confirmé.
34:09Le gouvernement a dit qu'il avait reçu
34:11les garanties nécessaires, on va le voir,
34:13communiquées des ministères de l'Economie et des Finances,
34:16les garanties nécessaires pour l'emploi,
34:20et avec aussi un engagement via l'entrée dans le capital
34:24par BPI, la Banque publique d'investissement,
34:29qui prend 1 à 2 % du capital de cette entreprise
34:33pour contrôler,
34:36pour avoir... Ouh, je vois la mou, de Sophie, de madame Coutinet.
34:39Pour contrôler, pour garder, évidemment,
34:42une marge d'action sur la stratégie de Sanofi
34:47sur le Doliprane.
34:48Est-ce que vous êtes rassurés les uns et les autres,
34:51déjà, dans cette affaire ?
34:53Madame Simona.
34:54Alors, d'abord, la relocalisation,
34:57c'est une solution
35:00pour à peu près une cinquantaine de spécialités,
35:03au niveau européen,
35:04mais c'est surtout la diversification
35:07des approvisionnements.
35:08S'il y a un seul producteur, et on a eu le cas
35:10pour un antiépileptique, pour Pédiatric,
35:13qui est fabriqué en Italie et qui a été en rupture
35:17parce qu'il y avait un problème sur la chaîne de production,
35:19donc c'est effectivement, par les plans de gestion des pénuries,
35:23mais en faire des plans de prévention des pénuries,
35:25et d'essayer d'objectiver sur les chaînes
35:28les zones de fragilité
35:30qui risquent de faire en sorte que la chaîne s'arrête.
35:33Et ensuite, l'argent public.
35:35Quand on relocalise, il y a de l'argent public investi.
35:39Et là, nous nous demandons, en tant qu'association de patients,
35:42que des contrats soient passés avec ces industriels
35:46pour que ce soit pérenne
35:47et qu'à la fin des subventions,
35:49tout le monde ne parte pas à l'étranger
35:52aux meilleurs offrandes.
35:54Mais vous n'avez pas répondu à ma question
35:57sur la délocalisation,
35:59mais le risque de délocalisation de l'IPRAN,
36:03qui semble être jugulé par l'accord qui a été trouvé.
36:05Est-ce que vous êtes rassurée ?
36:07Je ne suis pas rassurée, honnêtement.
36:09Pourquoi ?
36:10Parce que je ne sais pas s'il y a, avec 1 %,
36:13le blocage possible, premièrement.
36:15Et deuxièmement, moi, ce qui, vraiment, nous inquiète,
36:20c'est ces arrêts de commercialisation.
36:22Mais là, le de l'IPRAN, ce n'est pas exactement le cas.
36:25Mme Koutinet, sur le de l'IPRAN...
36:27Disons que non.
36:28Ce n'est pas parce que BPI France va avoir même 2 %
36:31que ça va infléchir la stratégie d'Orpela ou de...
36:36Orpela, c'est la filiale.
36:37C'est que, si j'ai bien compris,
36:40BPI France et Sanofi garderaient à peu près 50 %,
36:43et le fonds d'investissement aurait 51.
36:46Donc, effectivement, c'est-à-dire que BPI, alliée à Sanofi,
36:49pourrait infléchir la stratégie qui sera mise en place
36:53par le nouvel acteur, qui est un fonds d'investissement.
36:55Après, il faut voir que les actionnaires principaux de Sanofi,
37:00ce sont des fonds d'investissement qui vendent à un fonds d'investissement
37:03un morceau de l'entreprise.
37:05Non, ce n'est pas rassurant.
37:06Après, dans le portefeuille de la société qui est vendue,
37:10il n'y a pas beaucoup de médicaments qui sont très importants.
37:12Mais le Doliprane, c'est très symbolique, le Doliprane.
37:18Tout le monde a une petite boîte jaune dans sa pharmacie.
37:22C'est vrai que, politiquement, c'était important.
37:25C'est aussi un échec de la politique de M. Macron,
37:27qui a donné de l'argent public
37:29pour faire relocaliser le principe actif du paracétamol à C15,
37:33qui devait approvisionner Sanofi.
37:36Si C15 n'approvisionne plus...
37:37Vous nous perdez, on ne sait pas ce que c'est que C15,
37:40mais ce qu'on sait, c'est qu'il y a une grande usine...
37:43qui va ouvrir l'an prochain et qui va fabriquer le paracétamol.
37:48Et qui a été subventionnée par de l'argent public.
37:50C'est une conquête, on peut s'en satisfaire.
37:53On va avoir du paracétamol en France.
37:55Sauf qu'il a approvisionné Sanofi, la filiale de Sanofi.
37:58C'est la première usine de paracétamol.
38:01Sur le site de Longue-Côte-Paul à Toulouse,
38:033 400 tonnes de paracétamol seront commercialisées l'an prochain.
38:07Donc là, on assiste bien à une relocalisation.
38:10Et puis dans l'accord tripartite qu'il y a entre l'Etat,
38:13le fonds d'investissement et Sanofi,
38:16parce que c'est quand même ça, la présence de BPI,
38:19c'est important au sein du Conseil d'administration,
38:21mais c'est l'accord tripartite et il y a un engagement
38:24de se fournir auprès de C15 en principe actif
38:30pour la fabrication du paracétamol.
38:32Il y a sous contrainte, quand même, une sanction financière,
38:35parce que je veux dire, c'est quand même nouveau, tout ça.
38:37On a laissé faire, quand même,
38:38parce que maintenant, on peut râler que c'est pas parfait.
38:41N'empêche que, pour le coup,
38:44et moi, je me fais le défenseur de personnes dans cette affaire,
38:47mais c'est une première, c'est-à-dire qu'il se passe
38:49un phénomène qui n'est pas neutre pour la société publique.
38:51La première, c'est quoi ? C'est la relocalisation ?
38:54C'est d'abord, un, le principe de relocalisation,
38:56mais surtout, là, cette contractualisation
38:59et le fait que l'Etat prend à bras-le-corps le sujet,
39:02parce que jusqu'à présent, ces phénomènes-là ont eu lieu
39:05avec les autres grands laboratoires pharmaceutiques
39:08et personne n'en a parlé, et puis, on pleure sur les pénuries.
39:11Vous voulez dire, maintenant...
39:12Au moins, il y a une réaction à ce moment-là.
39:15Est-ce qu'elle est efficace ? Est-ce qu'elle sera efficace ?
39:17Je ne dis pas dans le mar de café, mais dans la contractualisation.
39:19C'est déjà mieux que...
39:21Il y a quand même le fait de se fournir en principe actif
39:23auprès de l'usine française.
39:25Il y a un engagement sous pénalité,
39:27si ce n'est pas respecté d'investissement
39:29dans les industries françaises de fabrication,
39:31de maintien de l'emploi.
39:33Enfin, voilà, il y a un certain nombre d'engagements
39:35qui sont co-signés par les trois contractants.
39:38Derrière, évidemment, il va falloir faire le gendarme,
39:41et notamment celui qui va être présent
39:43au sein du conseil d'administration,
39:45qui a représenté l'Etat, en quelque sorte.
39:48Il faudra qu'il ait une feuille de route,
39:49qu'il ne soit pas que financière,
39:51que la vision d'un banquier et la vision d'un industriel,
39:54mais la vision de quelqu'un qui défend une politique sanitaire.
39:56Alors, ça n'était pas mieux avant, sur tous les plans,
39:59mais c'est vrai que jusqu'en 2008,
40:00nous étions le premier producteur de médicaments,
40:03je pars sous votre contrôle, en Europe.
40:05Nous sommes descendus à la sixième place.
40:07On va quand même regarder des relocalisations.
40:10Il y en a un.
40:12Petit flashback, par exemple, en 2020,
40:14à la sortie du Covid.
40:16On va dans une usine des Bouches-du-Rhône,
40:18où la production de principes actifs a été relocalisée.
40:21Regardez ce reportage,
40:23qui nous dit que produire en France, c'est possible.
40:25Il est signé Alexia Leperon et Sébastien Avila.
40:33Il y a quelques années,
40:35cette machine qui produit des principes actifs pharmaceutiques
40:38était en fin de vie.
40:41Elle a été restaurée et reprend du service
40:43pour répondre à la demande.
40:45Le responsable du développement du groupe qui a racheté cette usine
40:48vient découvrir les nouveaux équipements.
40:50Je vais vous présenter la nouvelle installation,
40:52la nouvelle ligne de bromation.
40:53Ici, on a tout un système de refroidissement des échangeurs.
40:57D'accord, donc ça nous permet d'alléger
41:00la précédente ligne de bromation, c'est ça ?
41:01Tout à fait, on va pouvoir tenir deux produits en même temps
41:05sur des bromations.
41:06Cette machine permet la synthèse du bromure de pinavérium,
41:10un principe actif utilisé pour traiter certains troubles digestifs
41:14et qui avait presque disparu des productions françaises.
41:17C'est une molécule fabriquée historiquement ici
41:19depuis fort longtemps,
41:20mais dont le niveau de production commençait à baisser
41:23année après année avec les délocalisations importantes,
41:25notamment en Inde.
41:26Et en l'espace de 7 ans,
41:28on a été capable de multiplier par 10
41:29la quantité de cet actif fabriqué ici.
41:32Si M2i a réinvesti,
41:35c'est en fait pour relancer une histoire industrielle
41:38vieille de plus d'un siècle.
41:40En plein bassin Camarguet,
41:42cette usine de la fin du 19e siècle
41:44fabriquait de la soude pour le savon de Marseille.
41:47Et à partir des années 80,
41:48des principes actifs pharmaceutiques.
41:52Pourtant, l'aventure a bien failli s'achever
41:54il y a une dizaine d'années,
41:55lorsque le groupe Solvay choisit d'abandonner la production
41:58de moins en moins rentable.
42:00Mais en 2013, M2i fait le pari
42:02de relancer la fabrication de ses principes actifs.
42:06Aujourd'hui, l'entreprise fabrique une dizaine de ces molécules.
42:09Une démarche qui ne s'est pas faite du jour au lendemain.
42:12Ça passe par plusieurs choses.
42:13La première, c'est beaucoup d'investissements.
42:141,5 million par an d'investissements dans les machines.
42:17Ensuite, c'est une augmentation des capacités,
42:19donc avec plus de personnel.
42:21Si ces investissements conséquents ont été rendus possibles,
42:23c'est parce que depuis quelques années,
42:25la demande en principes actifs made in Europe augmente.
42:29Pour comprendre pourquoi,
42:30il faut se rendre à l'extérieur de l'usine.
42:35Cette machine permet de filtrer les rejets gazeux
42:38propres à la fabrication des principes actifs.
42:41Là, c'est ce qu'on appelle les scrubbers.
42:43C'est les laveurs de gaz.
42:44Il y a un système qui piège les gaz,
42:46dans lequel le gaz est neutralisé.
42:49Car en Europe, la gestion des déchets polluants
42:51est régie par des normes très strictes.
42:54Nous, ici, à Saint-Lazaro, on est au milieu d'un parc naturel.
42:59Tous nos rejets sont régis par un arrêté préfectoral.
43:02Il y a également des contrôles inopinés ou planifiés.
43:05Donc oui, tout ça est très contrôlé par les autorités françaises.
43:09Des normes qui, dans les années 90-2000,
43:11étaient beaucoup moins strictes en Asie.
43:13C'était donc moins cher d'y produire ces principes actifs.
43:16Mais aujourd'hui, l'écart de coût se réduit.
43:19C'était peut-être économiquement un peu avantageux
43:22dans les années 90, au début des années 2000, de délocaliser.
43:25Aujourd'hui, les normes sont plus sévères là-bas.
43:27Le prix de la main-d'oeuvre est plus élevé.
43:29Ça a obligé les industriels chinois à rehausser leur niveau d'exigence
43:34et donc à augmenter leurs coûts pour répondre
43:36à des normes un peu plus sévères là-bas,
43:38qui ne sont peut-être pas loin d'être au niveau de celles qu'on a en Europe,
43:41mais qui sont quand même plus coûteuses
43:43et qui réduisent le gap de prix
43:46entre une production délocalisée et une production française.
43:50Mais alors, si ce n'est pas une question de différence de coût,
43:54que manque-t-il aux industriels pour rapatrier la production ?
43:58Des incitations financières, si l'on en croit le gouvernement.
44:01Il y a 120 millions d'euros spécifiquement dédiés
44:05à la relocalisation d'activités industrielles liées aux médicaments.
44:09Nous avons engagé des travaux avec Ségeyns, Upsa, Sanofi,
44:14avec comme objectif, d'ici trois ans,
44:17que la France soit en mesure de produire,
44:20de conditionner et de distribuer du paracétamol.
44:25Alors, ça a pris un peu plus de temps,
44:27monsieur le ministre Bruno Le Maire,
44:29qui était donc encore aux commandes à ce moment-là.
44:34Depuis le reportage,
44:35la production des principes actifs continue dans cette usine,
44:38qui a embauché une vingtaine de personnes.
44:40Le groupe a bénéficié d'ailleurs de l'aide du plan de France Relance
44:45en 2020 et 2021 pour investir dans la production.
44:48L'État n'est pas inerte, madame Coutinet.
44:50L'État agit sur le plan de France Relance
44:53et l'énergie, finance, encourage.
44:56L'État s'est réveillé, un peu tardivement,
44:58mais l'État s'est réveillé face à la post-Covid,
45:01mais la situation était déjà là avant le Covid.
45:04Par contre, il y a un problème quand même.
45:06C'est bien d'aider les industriels à revenir,
45:09mais quand ils sont partis,
45:10on n'a rien gagné à ce qu'ils partent.
45:13On n'a gagné que des pénuries.
45:14Mais les profits, eux, ils ont été gagnés par les entreprises.
45:18Donc, il y a quelque chose, c'est quand même les citoyens...
45:21On dit qu'on n'a rien gagné.
45:23Vous voulez dire qu'en termes, par exemple,
45:25de découvertes scientifiques,
45:27puisque c'est justifié comme ça par Sanofi,
45:30on a besoin de beaucoup d'argent pour la recherche,
45:33même si l'État contribue à 4,8 milliards chaque année
45:37pour aider les entreprises, mais ça coûte très cher.
45:39Donc, on se dit, ce qu'on perd d'un côté,
45:42on le gagne en efficacité des traitements
45:45pour des maladies mortelles, par exemple.
45:47Oui, mais ce n'est pas les mêmes médicaments.
45:49On parle du principe actif des médicaments génériques,
45:51des médicaments traditionnels.
45:53Ces médicaments-là, ce n'est pas le même problème
45:55que les médicaments innovants,
45:57parce que, comme ça a été dit à plusieurs reprises,
45:59ceux-là coûtent très cher.
46:01Donc, ces médicaments anciens, on voit qu'on peut les relocaliser,
46:04donc c'est bien, c'est une bonne nouvelle,
46:06qu'on peut les relocaliser et que c'est rentable.
46:09Après, ça dépend de ce qu'on exige comme niveau de rentabilité.
46:12Ce que je disais, c'est qu'il y a un problème.
46:15Si on regarde le développement du médicament,
46:17ces vieux médicaments ont eu des brevets.
46:19Ils ont coûté très cher à la Sécurité sociale, aux patients.
46:22Et puis, ils ont perdu leurs brevets.
46:24Ça a fait des économies pour tout le monde.
46:26Maintenant, il faut payer, l'État doit payer pour qu'ils reviennent.
46:29Il y a quelque chose de pas très normal.
46:31Néanmoins, c'est une bonne chose et il ne faut pas s'arrêter là,
46:35c'est évident.
46:36Vous êtes d'accord ?
46:37Oui, parce qu'on peut pleurer sur le lait renversé,
46:40même si c'est un peu malheureux de dire ça,
46:42mais de toute façon, il faut remonter la pente.
46:44Il y a deux sujets dans les pénuries.
46:46Il y a les sujets de la crise
46:48et c'est tout ce qu'on a évoqué sur les gestions de stock, etc.
46:51Les plans de gestion de pénuries par les laboratoires.
46:54Il faut qu'on ait le moyen de fabriquer en para-public ou en public
46:57s'il y a un besoin urgent qui se fait signer.
47:01Mais il y a tout le long terme et le moyen terme,
47:03et ça, c'est la réindustrialisation.
47:05Encore une fois, il faut tout traiter de la chimie
47:08jusqu'à la boîte qui arrive dans la pharmacie ou à l'hôpital.
47:12Et ça, c'est essentiel de traiter tous les sujets.
47:15Ça, ça se fait pas en deux ans, trois ans, quatre ans,
47:17cinq ans ou six ans.
47:18Et quand on voit l'ampleur des pénuries,
47:21on se dit qu'il y a beaucoup de questions de réindustrialisation
47:24et pas que au niveau du pays, mais au niveau européen,
47:27puisqu'on doit quand même raisonner au niveau européen.
47:30La consommation d'un pays à l'autre en Europe est à peu près la même,
47:33les indications thérapeutiques sont à peu près les mêmes,
47:36et donc les laboratoires, quand ils regardent,
47:38ils voient le marché européen.
47:40Donc on a urgence à faire les choses de toute façon ensemble.
47:44Moi, je voudrais souligner...
47:45Est-ce qu'il y a une stratégie européenne de relocalisation ?
47:49Il y a un Medical Business Act qui vient quand même de se monter.
47:54Il y a des échanges entre les pays européens.
47:56On voit bien qu'à l'Agence européenne du médicament,
47:59il y a une liste européenne de médicaments indispensables
48:02qui est en train de se monter.
48:03C'est un peu compliqué, d'un pays à l'autre,
48:06mais au moins, on aura des choses en commun.
48:08Je voulais juste insister sur quelque chose,
48:10c'est que les pénuries de maintenant,
48:12on doit en tirer l'enseignement,
48:14sur la nécessité de réindustrialiser la souveraineté,
48:19parce que les médicaments innovants de maintenant,
48:21pour certains, dans 15 ans, ce sera les médicaments matures.
48:25Donc on doit, au moins,
48:26pour ces médicaments innovants de maintenant,
48:28mettre en place la chaîne de fabrication industrielle,
48:31parce qu'on aura des pénuries sinon,
48:33et les mêmes problèmes de souveraineté dans 15 ans
48:36pour ces médicaments de première ou de seconde ligne
48:38pour la cancérologie.
48:39Je reviens sur la stratégie européenne.
48:42Au moment du Covid, il y a eu une mutualisation
48:44des partitions ensuite, par exemple, sur les masques,
48:47qui étaient opérées par l'Union européenne, par Bruxelles.
48:50Est-ce qu'il ne peut pas y avoir des mutualisations
48:53de production, de relocalisation,
48:55qui soient ensuite redispatchées sur l'ordre ?
48:57C'est absolument indispensable.
48:59Mais est-ce que c'est en cours ?
49:00Il y a ERA, si je peux me permettre,
49:02il y a ERA qui existe, c'est le consortium
49:05qui, en cas de crise, est activé au niveau européen.
49:07Il y a le paquet pharmaceutique aussi,
49:09qui est en cours de discussion
49:11avec les plans de prévention des pénuries,
49:13et là, on est sur la gestion à posteriori.
49:15J'aimerais qu'il y ait plus de prévention.
49:17Comme l'a dit Mme Delaprovoté,
49:19ça s'anticipe, et ça s'anticipe aujourd'hui
49:22pour les médicaments en pénurie de demain.
49:24Aujourd'hui, il faut la souveraineté,
49:26la diversification des approvisionnements,
49:29des stocks...
49:30Comme ça a marché l'hiver dernier,
49:32on a déstocké les stocks,
49:33qui sont des stocks tournants,
49:35et qui ont été déstockés par la NSM,
49:37l'Agence nationale de sécurité.
49:39C'est quoi, ces stocks ?
49:40Les stocks de sécurité, obligatoires.
49:42C'est des stocks stratégiques ?
49:43Oui, c'est des stocks de sécurité.
49:45Normalement, c'est pour quelles raisons ?
49:47Alors, c'est réglementaire en France,
49:50depuis le décret de mars...
49:51C'est en cas de conflit ?
49:53Non, c'est pas en cas de conflit.
49:54Pour tous les MITM, ils sont...
49:56Parlez pas en sigle, parce que nous...
49:59Pour tous les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur,
50:02il faut une obligation de deux mois de stock
50:04à réaliser par les industriels.
50:06Nous demandons quatre mois,
50:07parce que c'est pas suffisant deux mois,
50:09parce qu'une pénurie en moyenne, c'est supérieur à deux mois.
50:13Et ces stocks ne sont évidemment pas pérennes,
50:16mais quand il y a une pénurie,
50:17le fait de déstocker, ça donne le temps
50:19d'importer des médicaments,
50:21ça donne le temps de chercher
50:23un médicament de substitution.
50:25Donc, déstocker.
50:26Et pour les patients, c'est quand même essentiel.
50:28Alors, autre levier, mais je voudrais qu'on s'y arrête,
50:31parce que c'est assez surprenant,
50:33moi, j'ai découvert ça en préparant cette émission.
50:35Huit médicaments, selon l'UFC, que choisir ?
50:39Huit médicaments sur dix
50:40présentent encore 90 % d'efficacité.
50:44C'est peut-être le 10 % qui pose des problèmes,
50:46mais 90 % d'efficacité,
50:48plusieurs années après la date de péremption.
50:52Quand on pense à toutes les boîtes de médicaments
50:55qu'on jette régulièrement,
50:57on se dit, mon Dieu, quel gâchis, M. Bonnemain.
50:59Est-ce qu'on peut pas faire autrement ?
51:01Il faut dire que la péremption, c'est quelque chose de compliqué,
51:05parce qu'il faut pas simplement regarder le principe actif,
51:08il faut regarder aussi les impuretés générées
51:10pendant la stabilité.
51:12Je dirais qu'il faut rester très prudent là-dessus.
51:16La deuxième chose, c'est que, effectivement,
51:18c'est ce qu'a fait l'AFDA depuis plusieurs années.
51:20L'AFDA, c'est l'agence américaine.
51:23Ils ont fait une liste des produits
51:25pour lesquels la péremption peut être prolongée en cas de rupture.
51:28Je trouve que c'est une très bonne idée.
51:30On pourrait faire la même chose en Europe et en France,
51:33ce serait également très bien.
51:34Mais ça demande un vrai travail
51:36entre les industriels et les autorités de santé
51:39pour ne pas faire n'importe quoi.
51:40C'est une piste intéressante, marginale.
51:43C'est intéressant, de toute façon.
51:45L'étude doit déjà être confirmée scientifiquement,
51:47pour essayer, avec l'Agence nationale du médicament,
51:51d'avoir vraiment la certitude de l'inocuité du produit
51:54que l'on va délivrer à un patient.
51:56Mme Koutinet.
51:57Oui, c'est toujours bien quand on peut avoir plus,
51:59quand il y a plus de stocks,
52:01quand il y a une disponibilité des produits qui s'accroît,
52:04qu'il y ait une solution durable à ce problème majeur.
52:07Mais quand on est économiste de la santé,
52:09quel gâchis monstrueux !
52:11Bien sûr, bien sûr, mais ça peut être très bien.
52:13Après, il y a aussi des questions de prescription,
52:16de conditionnement, des médicaments
52:18qui ne sont pas toujours conditionnés
52:20dans les mêmes dosages qu'ils sont prescrits.
52:23Si on vous prescrit, je sais pas, 10 pastilles
52:25et que la boîte en compte 14, voilà.
52:27Il y a des problèmes de conditionnement,
52:29il y a des tas d'éléments qui pourraient permettre d'améliorer.
52:33Il y a aussi, également, la pertinence des prescriptions,
52:36on n'en parle pas.
52:37Vous voulez ouvrir une autre page, pour les solutions.
52:40Oui, c'est-à-dire qu'il y a
52:43une surconsommation de médicaments en France,
52:45et donc, je pense que les médecins
52:47prescrivent trop de médicaments,
52:49il y a trop d'angines pour les antibiotiques
52:52et on va avoir de l'antibioresistance à venir.
52:54Donc, il faut être vraiment attaché à la prescription.
52:57Ça, ça peut être un levier... C'est pas marginal, non plus.
53:01C'est un levier important.
53:02Un levier important, la surprescription.
53:04Vous en avez parlé dans le rapport ?
53:06Si, on a évoqué ce sujet, parce que, normalement...
53:09La question des angines a été assez symbolique.
53:12En fait, il y a des tests de dépistage
53:14pour vérifier si l'angine est à streptococque ou pas,
53:18et auquel cas, si c'est du streptococque,
53:20il faut mettre un antibiotique précis à ce moment-là.
53:23Il y a des angines virales
53:25pour lesquelles l'antibiotérapie n'a aucune efficacité.
53:28Ceci dit, il faut quand même avoir les moyens...
53:31Les antibiotiques, c'est pas automatique,
53:33ça fait longtemps qu'on entend ça.
53:35Le test n'est pas forcément pris en charge,
53:37je me permets de le dire, simplement.
53:39Le test de dépistage.
53:41Donc, il faut quand même se donner les moyens aussi,
53:43si on veut faire de la prévention,
53:45de financer le test de dépistage.
53:47On prescrit moins d'antibiotiques,
53:49mais si on n'en prescrit pas assez,
53:51parce qu'on se fait disputer,
53:52après, c'est des conséquences sanitaires importantes,
53:55parce qu'il y a des effets secondaires
53:57à une angine non traitée.
53:59Les effets secondaires, à ma connaissance,
54:01sont pas mal développés dans les pays où on prescrit mieux,
54:04mais pas forcément...
54:05C'est passionnant, parce qu'il n'y a pas de réponse simple.
54:09C'est aussi compliqué que la médecine l'est.
54:11C'est extrêmement complexe.
54:13On se dit que s'il y a moins de prescriptions
54:15et si on jette moins vite ces médicaments,
54:17parce que la durée de préemption est allongée,
54:20bon, ça n'est pas du tout une réponse industrielle,
54:23parce que c'est principiel, c'est systémique.
54:25Il faudrait s'attaquer, comme vous disiez, à la racine du mal.
54:28Sur ce sujet, vous n'avez pas entendu ce dernier mot,
54:31vous, la dimension européenne de la solution,
54:34elle vous paraît importante ?
54:35Elle est indispensable.
54:37Elle est fondamentale.
54:38Elle est fondamentale.
54:40C'est au niveau européen
54:41que cette relocalisation doit avoir lieu.
54:44C'est ça qui a un sens économique et un sens industriel.
54:48Il y a eu une prise de conscience avec le Covid.
54:50Pour le moment, elle est timide.
54:52Depuis que...
54:53Quand même, les vaccins.
54:54Les vaccins Covid.
54:56Ils sont à la répartition.
54:57Pour le moment, l'Union européenne,
54:59dans les techs sur les pénuries, ne propose pas de relocalisation.
55:03Elle ne propose pas d'organiser la relocalisation.
55:05Elle propose d'acheter pour tout le monde.
55:08Rien n'empêche les Etats, et notamment les Etats producteurs,
55:11de travailler ensemble, sans passer par la Commission européenne.
55:15Il y a un progrès important avec ERA,
55:17c'est une structure qui a été créée pour la gestion de crise,
55:20et ils ont choisi 11 produits
55:22pour regarder toute la supply chain,
55:24toute la distribution et la production,
55:26pour voir où ça coinçait.
55:28On n'y est pas...
55:29...au niveau européen sur...
55:31On n'y est pas encore, mais on avance.
55:34C'est bien terminé sur une note un peu positive.
55:37Merci à vous d'avoir contribué à nous éclairer sur ce sujet.
55:40Il faut se garder des idées simples.
55:43Les solutions sont complexes.
55:46Merci infiniment à tous les quatre.
55:48Merci de nous avoir suivis
55:49dans ce numéro spécial d'État de santé.
55:51À très vite.