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Col roulé noir, veste noire, David Pelicot s'avance à la barre. Précis, clair, il expose, chronologiquement, son vécu, depuis "le tsunami" du 2 novembre 2020. "Notre famille a été anéantie." Ce soir-là, l'aîné de la fratrie, 50 ans, commercial, reçoit à son tour un coup de fil de sa mère. "J'imagine le pire, une maladie, un accident. Elle m'apprend l'horrible. Que l'homme dans ce box a livré ma mère à des inconnus. Le sol se dérobe sous mes pieds. Je lui demande de répéter ce qu'elle vient de me dire. Quand je raccroche, j'ai envie de vomir. Je pars dans les toilettes."

La fratrie - Caroline Darian, David et Florian Pelicot - rejoint Carpentras, puis Mazan, dès le lendemain. Au commissariat, tous trois découvrent l'ampleur des faits. Les photos, les vidéos. "J'essaie de me donner une contenance, mais suis décontenancé. On se demande si dans les photos, il n'y en a pas de nos enfants. On nous répond que pour l'instant, on n'a rien trouvé." S'ensuit le franchissement du seuil de cette maison, désormais "maison de l'horreur", où le couple Pelicot s'était établi en 2014. La fratrie y passait des vacances. S'y sont, aussi, noués la plupart des faits.
"Sur la droite, il y a le bureau de ce monsieur, sur lequel est encore installé son ordinateur. Nous décidons de tout faire disparaître, tout ce qui nous lie à cet homme. Aujourd'hui, nous n'avons plus aucune photo, aucun album. Nous avons fait disparaître ses vêtements, ses tableaux." Gisèle Pelicot et ses trois enfants passent une nuit sur place. "Nous imaginons le pire. Est-ce que des individus ne vont pas venir ? Chaque bruit nous paraît suspect."

De retour le lendemain en région parisienne, la victime est hébergée, tour à tour, chez chacun de ses enfants. "Nous arrivons sur le quai. J'ai une image très forte de maman. Il lui reste une valise et son chien. Sa vie se résume à ça. Chez nous, elle faisait des promenades très longues. Je lui ai demandé pourquoi. Elle m'a dit, "je parle à ce monsieur, je lui demande pourquoi il m'a fait ça, est-ce que je l'ai mérité". Elle criait, elle hurlait sa colère."

À l'évocation de son père, David Pelicot hausse le ton. Il relate son "deuil". "J'ai le sentiment, aujourd'hui, que toute mon enfance a disparu. Elle a été comme effacée." Il se tourne vers "l'homme dans le box" et évoque les photos de sa sœur, Caroline, découvertes sur l'ordinateur de Dominique Pelicot. Elles montrent cette dernière endormie, dans des sous-vêtements qui ne sont pas les siens (depuis le début du procès, et à nouveau ce lundi, Caroline Darian affirme sa conviction d'avoir été soumise chimiquement par son père, Ndlr).

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Transcription
00:00Quand on sait les atrocités et ce que ma mère a vécu,
00:02c'est évident ce qu'on ne peut pas pardonner.
00:05Vous savez, le 2 novembre 2020, j'ai perdu mon père.
00:09Le 2 septembre 2024, j'ai retrouvé un monstre.
00:30C'est un exercice effectivement difficile, mais on l'a passé avec mon frère, j'espère,
00:39avec le plus de précisions possibles dans nos récits respectifs.
00:42On a, comme on dit, repris notre place dans ce procès, puisqu'on était absents,
00:47vous l'avez constaté, pendant un certain temps.
00:49C'est important pour vous cette prise de parole sur ce fait, face à face ?
00:55Oui, parce que nous sommes toujours à la recherche de la vérité.
00:59Est-ce qu'à l'issue de ce procès, on ne l'aura probablement pas ?
01:03Mais oui, il est très important.
01:19Est-ce que vraiment il dira la vérité ou est-ce qu'il s'exprimera à ce sujet ?
01:24On verra, on attend.
01:25On a jusqu'au 20 décembre pour avoir une once d'humanité.
01:28S'il y en reste, c'est ce que j'ai déclaré à la barre, on attend.

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