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00:00:00Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouveau numéro de Postpop. Alors plusieurs longues années après les faits, les plaintes de comédiennes françaises
00:00:08contre leurs réalisateurs pour viol ou agression sexuelle se sont multipliées ces derniers mois. Alors du côté des plaignantes, Judith Godrech, Adèle Haenel,
00:00:17Isil Glebesko, entre autres, du côté des réalisateurs mis en cause, des auteurs médiatiquement prestigieux comme Benoît Jacot ou Jacques Doyon.
00:00:28Alors à la lumière de ces plaintes, comment regarder aujourd'hui les films qu'ils ont tournés ensemble ? Comment ces films légitiment-ils les situations d'emprise
00:00:38dénoncées entre des hommes prestigieux et de très jeunes femmes ou même de très jeunes filles ? Et quelles sont les mécaniques qui ont rendu possible de telles situations ?
00:00:47Nous avons avec nous aujourd'hui deux postpoppeurs, enfin un postpoppeur et une postpoppeuse. Postpoppeur Raphie Joumy, comme d'habitude, et postpoppeuse Geneviève Cellier,
00:00:57co-fondatrice, animatrice du site Le Genre et l'écran et récemment autrice d'un livre qui s'appelle Le culte de l'auteur, les dérives du cinéma français.
00:01:07On le voit là dans les écrans. Édité aux éditions La Découverte et... – Non, non, La Fabrique. – La Fabrique. La Fabrique est dans laquelle tu abordes un certain nombre des situations
00:01:20qu'on va détailler dans cette émission. Alors, plaintes, je le disais, de comédiennes contre leurs réalisateurs. Dans le cadre de ces plaintes ressurgissent les récits,
00:01:34ou surgissent les récits de tournages que font ces comédiennes, souvent de longues années après. Elles racontent comment ça s'était passé, des choses qui n'étaient pas jusqu'alors
00:01:44dans le domaine public. Et effectivement, il semble que les circonstances des tournages peuvent expliquer ensuite énormément de choses. Alors, on va parler de plusieurs films.
00:01:55On va commencer par un film de Jacques Doyant, qui s'appelle La fille de 15 ans. – La fille de 15 ans, qui date de 1989, dans lequel on a la jeune Judith Gobrech,
00:02:06qui a l'âge en titre, et qui suit donc l'histoire de Juliette, donc une jeune fille de 15 ans qui a une petite histoire avec un adolescent de son âge, qui décide de l'imposer
00:02:21à son père pendant les vacances, puisque son père cherche à se rapprocher de son fils, et donc accepte qu'il vienne passer son été avec sa petite amie.
00:02:33Et bien sûr, le père va avoir un penchant pour la jeune fille en question. Donc tout le film suit ensuite les déboires de cet homme possédé par le désir de cette jeune fille
00:02:49qui joue habilement avec ses sentiments, etc. – Alors, ce qu'il faut dire, c'est qu'à l'époque, Jacques Doyant et Judith Gobrech, ça commence bien, sont déjà ensemble, ont déjà une relation ?
00:03:04– Non, pas du tout. – Ah, ils n'ont pas une relation ensemble. – Non, il est avec Jeanne Berkine à l'époque. – Ah oui, voilà. Alors, il est avec Jeanne Berkine à l'époque.
00:03:13Donc, elle a 15 ans. Et ce qui va se passer, c'est qu'alors qu'au début... – Il en a 45. – Il en a 45. Alors qu'au début, il n'était pas prévu qu'il joue dans le film, Jacques Doyant.
00:03:25Au début du tournage, il va évincer le comédien qui était censé jouer le rôle du père dans le film. Et ce qu'a raconté récemment Judith Gobrech, c'est qu'il a rajouté au script initial
00:03:39une scène de sexe entre lui-même et Gobrech qui n'était pas prévue dans le script. Alors cette scène, on va en voir quelques images, là, pendant qu'on est en train de parler.
00:03:53Et donc, ça se passe dans cette villa des vacances. Les deux, Doyant et Gobrech, se tournent autour depuis le début du séjour. Et à un moment, effectivement, Doyant va sauter sur Gobrech.
00:04:14Alors, on ne va pas forcément montrer toute la scène dans sa longueur, mais ce que Gobrech a raconté ensuite, c'est que... Alors, je ne sais pas si elle dit vrai ou si elle exagère un peu, mais elle dit que la scène a été rejouée 45 fois.
00:04:29Doyant l'a fait revoir 45 fois. – Voilà. Et donc, elle dit, j'enlève mon pull, je suis torse nu, il me pelote, me roule des pelles. Elle précise par ailleurs que Jane Birkin,
00:04:41la compagne de Jacques Doyant à l'époque, était présente sur le tournage de cette scène. Une situation extrêmement douloureuse pour elle, dit Judith Godrech.
00:04:50Et en effet, le générique de fin comporte un carton avec le précieux secours de Jane Birkin où la gougiaterie le dispute au cynisme.
00:05:00– Alors, qu'est-ce qu'on peut retenir de... Qu'est-ce qui est significatif finalement dans ce récit postérieur de Judith Godrech ? Qu'est-ce que tu retiens ?
00:05:10– Oui, alors, la question n'est pas... Enfin, oui, bien sûr, c'est important qu'elle raconte les dessous de l'affaire, mais ce que ça confirme,
00:05:21c'est qu'en l'occurrence, l'histoire que raconte le film est une dénégation et une inversion de la réalité du tournage, c'est-à-dire l'emprise d'un homme de 45 ans,
00:05:34auréolé du statut d'auteur, sur une gamine de 15 ans.
00:05:39– Pourquoi c'est l'inverse ?
00:05:41– Parce que dans le film, c'est Judith Godrech, c'est, comment elle s'appelle ?
00:05:48– Juliette.
00:05:48– Juliette, qui a constamment l'initiative de séduction. Et donc, beaucoup de ces films fonctionnent comme ça,
00:05:58c'est-à-dire qu'ils inversent le schéma qui est celui de la réalité sociale, évidemment, pour se donner le bureau.
00:06:13C'est-à-dire que ce sont des hommes qui sont littéralement agressés sexuellement par des...
00:06:19– Commentés par le désir féminin.
00:06:22– Qui sont surtout sous l'emprise d'une adolescente sexuellement très active.
00:06:29– Mais ça veut dire que ces réalisateurs considèrent que se montrer eux-mêmes sous l'emprise d'une adolescente,
00:06:35c'est se donner le beau rôle, en fait, dans leur esprit.
00:06:38– Oui, parce que la caractéristique du protagoniste du cinéma d'auteur depuis la nouvelle vague,
00:06:46c'est la fragilité, la vulnérabilité, les tourments, etc.
00:06:51C'est-à-dire une sorte, là aussi, d'inversion de la situation réelle de ces réalisateurs
00:06:58qui ont pris le pouvoir et qui ont, y compris, écarté la génération précédente.
00:07:02– Ça se passe à toutes les générations.
00:07:05– Oui, oui, mais simplement qu'eux font des films, ça depuis Godard, Truffaut, Romère, etc.
00:07:12font des films dans lesquels leurs alters égaux sont des hommes fragiles.
00:07:18Et, en quelque sorte, oui, ça les protège, puisque ça masque le pouvoir,
00:07:25la capacité de domination qu'ils ont, en réalité, sur le tournage.
00:07:29– Le personnage que Doyon interprète dans le film est souvent vu en train de lire,
00:07:34assis dans son coin, les yeux plutôt vers le bas, très sensible.
00:07:39– C'est un intellectuel tourmenté.
00:07:41– Voilà, ça c'est insensible et insensible et intourmenté.
00:07:43Il n'est là, au départ, que pour son fils.
00:07:45Enfin, il est quand même en train de lui voler sa petite amie.
00:07:49– Oui, il y a quand même une grande hypocrisie dans ce film,
00:07:53c'est-à-dire que, dès le prologue à Paris,
00:07:55on voit très bien que le pauvre Melville Poupeau ne jouera que les utilités.
00:08:00– Il joue le fils.
00:08:01– Oui, ne jouera que les utilités, ne fera que de la figuration.
00:08:04La seule intrigue qui intéresse le réalisateur, c'est les rapports de séduction,
00:08:11donc inversés entre…
00:08:13– Mais tu l'as présenté comme une espèce de schéma général des films de la Nouvelle Vague.
00:08:18Tu vas jusque-là, il y a une espèce de…
00:08:20Cette envie de se poser en type fragile, qui boutine dans son coin, comme dit Rafiki,
00:08:27on peut le généraliser.
00:08:28– Oui, c'est-à-dire, dans l'ouvrage que j'ai écrit sur la Nouvelle Vague,
00:08:32je montre que la nouveauté de la Nouvelle Vague,
00:08:36effectivement du point de vue du schéma narratif,
00:08:39c'est la façon dont les protagonistes masculins qui sont des altérégaux des réalisateurs,
00:08:47par leur statut, leur lien, sont des héritiers du héros romantique.
00:08:53C'est-à-dire, ils se caractérisent par la vulnérabilité, le tourment,
00:08:59à la fois leur désir d'exprimer leur subjectivité
00:09:09et le risque qu'ils ont de tomber dans…
00:09:18de perdre leur autonomie à cause de l'amour d'une femme.
00:09:22– Non mais c'est intéressant que tu prononces le nom de romantique,
00:09:25parce que dans le tout début de la scène dont on vient de voir un extrait,
00:09:28effectivement, alors Doyon est assis par terre en tailleur
00:09:35avec ses cheveux longs, effectivement…
00:09:37– Oui, oui, c'est…
00:09:38– Il repousse violemment, il baisse les yeux,
00:09:41et c'est elle qui va se déshabiller pour initier l'acte sexuel.
00:09:45– Oui, voilà, et c'est sûr qu'il soigne son allure de beau ténébreux, c'est évident.
00:09:52– Alors, deuxième scène dont le making-of, si j'ose dire,
00:09:56a ressurgi ces derniers mois à l'occasion de la prise de parole de ces comédiennes,
00:10:01une scène du film Sade.
00:10:03Raphique, est-ce que tu peux d'abord nous présenter le film ?
00:10:07– Oui, alors Sade, donc c'est un film de Benoît Jacot qui est sorti en 2000
00:10:13et qui se passe sous les régions…
00:10:16– Je te coupe une seconde, Benoît Jacot qui, auparavant,
00:10:20avait été le petit ami aussi de…
00:10:22– De Julie Codrèche, tout à fait.
00:10:24– Je n'aime pas beaucoup cette expression.
00:10:26– Tu dirais quoi ?
00:10:28– Avait une relation, comment on dit ?
00:10:30– Avait eu sous son emprise la jeune Julie Codrèche
00:10:35qu'il a rencontrée, elle avait 14 ans,
00:10:37et dont il a exploité, y compris les revenus,
00:10:41jusqu'à la jeter pour la remplacer par une plus jeune.
00:10:44– D'accord, j'ai fait une présentation plus brève.
00:10:46– Oui, mais un peu trop neutre.
00:10:48– Ah ben voilà, alors, Raphique ?
00:10:50– Donc, le film se passe en 1794 sous le régime de la terreur
00:10:54et donc met en scène le marquis de Sade
00:10:56qui est dans une sorte de résidence surveillée
00:10:59où on enferme toute l'ancienne noblesse,
00:11:02donc, en quelque sorte, en prison.
00:11:05Et là, il va, tout d'un coup, on va dire,
00:11:08recréer son petit monde, son petit cirque
00:11:11en manipulant les gens autour de lui,
00:11:13dont un jardinier et une jeune fille de très bonne famille
00:11:17sur laquelle il a flashé dès son arrivée,
00:11:20qui est interprétée par la très jeune Isilde Lebesco.
00:11:24– Elle a quel âge à l'époque ?
00:11:26– Non, elle a 16 ans.
00:11:28– Elle a 16 ans à l'époque.
00:11:30– Alors, il faut dire quand même
00:11:32que ce qu'on retrouve assez fréquemment dans les films,
00:11:37en particulier les films à costume de ces réalisateurs,
00:11:42c'est qu'ils se valorisent en racontant des histoires
00:11:50autour de personnages prestigieux.
00:11:52Sade, en France, depuis l'après-guerre,
00:11:56c'est un personnage extrêmement prestigieux
00:11:59et, effectivement, il va ensuite faire un film sur Casanova,
00:12:05enfin, bon, pendant que Doilon, lui, va faire un film sur Rodin.
00:12:09Et chaque fois, ils font en sorte que le spectateur comprenne
00:12:12que c'est leur alter ego.
00:12:15– D'accord.
00:12:16– Ces grands hommes sont leurs alter ego.
00:12:17– Autre constante.
00:12:18– Autrement dit, ils sont, eux aussi, des grands hommes.
00:12:21– Autre constante.
00:12:22Et alors, il y a une scène, à la fin du film,
00:12:26dans laquelle Don Sade, qui est incarné par Daniel Auteuil,
00:12:31va faire en sorte de faire défleurer et violer Isilde Lebesco
00:12:35par ce jardinier.
00:12:38On va en voir un petit extrait pendant qu'on parle.
00:12:41– Ah, on montre carrément dans les images.
00:12:42– Non, pendant que nous parlons, voilà.
00:12:45– Oui, et…
00:12:46– En fait, il va la livrer au jardinier.
00:12:50D'une certaine manière, il a ce plan presque depuis le début.
00:12:54Il s'assurait, avant que le jardinier ne la pénètre,
00:12:58de lui-même vérifier sa virginité, voilà, en introduisant ses doigts.
00:13:04Et la scène est doublement ou triplement choquante
00:13:10du fait qu'elle est assez frontale, on va dire.
00:13:13On voit très clairement le sexe de l'actrice.
00:13:16Après, je pense que le plan…
00:13:18– Non, ce n'est pas le sexe de l'actrice.
00:13:19– Non, non, si, si, on voit le sexe de l'actrice quand elle est allongée.
00:13:25Et ensuite, effectivement, on a un insert dont on peut…
00:13:29– Non, parce que le sexe, au sens littéral, c'est-à-dire le vagin,
00:13:34c'est un insert fait avec une actrice porno
00:13:38où on voit Sade mettre les mains dans son vagin.
00:13:40– Mais cela dit, on ne va pas montrer l'image ici,
00:13:43mais on est bien d'accord qu'on la voit nue, face caméra, voilà.
00:13:46– Jambe écartée.
00:13:47– Jambe écartée, touchée.
00:13:49Et d'ailleurs, c'est toute la question,
00:13:51puisque ce qu'Isilde Lebesco a raconté récemment,
00:13:54c'est qu'elle ne souhaitait pas tourner cette scène.
00:13:56– Voilà.
00:13:57– Alors, qui…
00:13:58– Alors, je vais lire quelques extraits de l'ouvrage « Dire vrai »
00:14:02qu'elle a publié cette année.
00:14:06« Peu à peu, une intimité et une confiance se sont installés.
00:14:09Il me disait qu'il m'aimait beaucoup.
00:14:10Il me mettait sur un piédestal,
00:14:12me donnant une importance que je n'avais jamais eue.
00:14:14Cette manière qu'il avait de faire comme s'il savait mieux que moi
00:14:17ce qui allait se passer entre nous, comme un chef d'orchestre,
00:14:19ce n'était pas convaincant.
00:14:20Pourtant, ça me donnait envie de le suivre.
00:14:22Pour autant, j'avais 16 ans et j'étais fermée à tout mode de séduction.
00:14:25Il était vieux, ça me dégoûtait
00:14:27et je savais qu'il avait été avec toutes ces jeunes actrices.
00:14:30Ma mère me l'avait dit, ça m'avait gênée qu'elle s'imagine,
00:14:33qu'elle m'imagine ses dents à ce vieux monsieur.
00:14:35C'était dégradant.
00:14:36Lui-même jouait avec cette légende.
00:14:38Il me racontait que Virginie Ledoyen venait passer ses nuits avec lui.
00:14:41Il cherchait à provoquer une réaction.
00:14:43Je ne me sentais pas concernée.
00:14:44Au contraire, je me sentais protégée.
00:14:46– Il y a tout son livre, Geneviève.
00:14:48– Non, non, j'en viens à la scène.
00:14:50– On va la prévenir à la scène.
00:14:51– Alors, nous allions bientôt tourner certaines scènes plus intimes.
00:14:57L'adolescente que j'interprétais était offerte à un jeune homme
00:15:00sous l'impulsion du Marquis de Sade.
00:15:01Benoît avait l'obsession qu'on me voit nue, allongée, face caméra.
00:15:06Je ne le voulais pas et je l'avais annoncé dès le départ.
00:15:09Il m'a juré qu'on tournerait en équipe réduite
00:15:11et qu'on ne verrait rien à la caméra.
00:15:13Je me sentais redevable.
00:15:15J'avais le sentiment que refuser serait une trahison,
00:15:17alors que lui me faisait confiance depuis le début.
00:15:19Je cédais.
00:15:21J'étais simplement là pour servir son film, après tout.
00:15:24Ma perception des limites se troublait.
00:15:26Je devenais son objet artistique, un prolongement de lui.
00:15:29Le week-end qui a précédé le tournage de cette scène,
00:15:31Benoît m'a donné sa carte bleue.
00:15:33Il a précisé que j'étais libre d'acheter ce que je voulais avec.
00:15:36Une carte bleue contre mon corps d'adolescente
00:15:38et surtout le dépassement de mes limites.
00:15:40J'étais sidérée par le cadeau.
00:15:42Le chantage ne m'apparaissait pas.
00:15:44– Alors, tu ne lis pas tout là, parce que…
00:15:46– Non, mais…
00:15:48– On ne va pas tout lire non plus.
00:15:50Mais le plus significatif,
00:15:54c'est qu'est-ce qu'elle va s'acheter avec cette carte bleue ?
00:15:56Elle va s'acheter des gâteaux et des bonbons ?
00:15:58– Pour ses frères et soeurs.
00:16:00– Pour toute sa fratrie.
00:16:02– Ça donne une idée, effectivement,
00:16:04de l'écart entre cet enfant et ce manipulateur pervers.
00:16:10– La suite de l'histoire,
00:16:12c'est qu'il a porté plainte.
00:16:14– En plus, il a porté plainte.
00:16:16– Il a porté plainte pour vol de sa carte bleue
00:16:18et elle a dû expliquer que…
00:16:20– Donc, l'ignominy n'a pas de limite.
00:16:22– Attends, l'ignominy n'a pas de limite.
00:16:24On va juste rappeler ici
00:16:26que des plaintes ont été déposées
00:16:28mais que les jugements n'ont pas été rendus
00:16:30et que les personnes dont on parle,
00:16:32que ce soit Jacques Doyon ou Benoît Jacot,
00:16:34sont présumées innocentes à l'instant où nous parlons.
00:16:36– Absolument.
00:16:38Alors, plus tard au montage de ça,
00:16:40il a ajouté des inserts dans la scène
00:16:42que nous avions tournée,
00:16:44des gros plans d'une vulve de femme
00:16:46et d'un pénis qui la pénètre.
00:16:48Ces images étaient tournées par des acteurs pornos.
00:16:50Jalil Lespère, qui avait joué avec moi,
00:16:52était offusqué.
00:16:54Il a refusé qu'on insère l'image d'un sexe
00:16:56qui n'était pas le sien.
00:16:58Benoît n'a donc pas pu utiliser
00:17:00qu'un gros plan des doigts pénétrant le sexe
00:17:02de mon personnage.
00:17:04Je ne voulais pas non plus,
00:17:06Benoît lui a organisé une projection spéciale
00:17:08aux Champs-Elysées et l'a aisément convaincue
00:17:10que la doublure protégeait mon image.
00:17:12– Avant le récit d'Isile Lebesclau,
00:17:14avant tous ces récits,
00:17:16par exemple, toi, Raphique,
00:17:18qui suis l'actualité du cinéma…
00:17:20– Pas du cinéma d'auteurs français,
00:17:22– Non, mais quand même,
00:17:24il arrive que ça te tombe sous les yeux.
00:17:26– Je voyais ces films arriver sur les écrans.
00:17:28Effectivement, dès La fille de 15 ans,
00:17:30je me souviens très bien,
00:17:32je n'avais pas vu le film en salle,
00:17:34mais l'affiche, la promesse,
00:17:36déjà, me choquait.
00:17:38Alors, sauf qu'à l'époque,
00:17:40le dire, c'était s'exposer
00:17:42comme un vieux réactionnaire…
00:17:44– Puritain.
00:17:46– Voilà, puritain.
00:17:48– Qu'est-ce qu'on voyait sur cette affiche ?
00:17:50– Rien d'autre que Judith Godrech
00:17:52et Melvin Poupeau sur le lit,
00:17:54mais on savait que l'histoire
00:17:56était celle d'une jeune fille
00:17:58qui allait tomber dans les bras
00:18:00d'un homme adulte.
00:18:02– D'un homme adulte.
00:18:04– Je me disais, bon, il y a quand même
00:18:06quelque chose d'assez complaisant là-dedans.
00:18:08– Vraiment, tu disais ça,
00:18:10tu étais gêné.
00:18:12– Oui, j'étais gêné.
00:18:14J'ai été gêné aussi, à l'époque,
00:18:16dans les années 90,
00:18:18puisqu'on parlait des îles de Besko,
00:18:20par rapport à sa famille,
00:18:22il y a un personnage de Mai Wen aussi
00:18:24qui est très intéressant,
00:18:26qui est devenu la mère d'un des enfants
00:18:28de Luc Besson alors qu'elle avait
00:18:30déduit qu'ils avaient été ensemble
00:18:32au moins un an avant,
00:18:34et moi je me disais,
00:18:36il y a des lois normalement
00:18:38qui régissent les rapports
00:18:40avec des mineurs de cet âge-là,
00:18:42pourquoi ces gens-là
00:18:44ne tombent pas en fait ?
00:18:46– Parce que les parents,
00:18:48je crois dans ces deux cas d'ailleurs,
00:18:50les parents avaient signé une…
00:18:52– Une décharge ?
00:18:54– Non, un papier disant que…
00:18:56pour émanciper leur fille.
00:18:58– D'émancipation d'accord.
00:19:00– Voilà, d'émancipation.
00:19:02Et c'est aussi le cas pour Judith Godrej.
00:19:04– Ça valait juridiquement ça ?
00:19:06Ça valait quelque chose juridiquement ?
00:19:08– Ah oui, ça.
00:19:10– Les parents ont le pouvoir
00:19:12de démanciper des enfants
00:19:14de moins de 15 ans.
00:19:16– Voilà, et à ce moment-là,
00:19:18ils n'en sont plus responsables
00:19:20et donc l'enfant est censé être
00:19:22responsable de lui-même,
00:19:24c'est-à-dire, en fait,
00:19:26livré pieds et poignets.
00:19:28Et ça s'explique…
00:19:30Enfin, le contexte de l'époque,
00:19:32c'est aussi non seulement
00:19:34que tous ses parents sont
00:19:36complètement tétanisés
00:19:38en admiration devant
00:19:40ces figures prestigieuses
00:19:42du cinéma d'auteur,
00:19:44mais qu'aussi on est à une époque
00:19:46où la permissivité,
00:19:48y compris la pédocriminalité,
00:19:50est en débat,
00:19:52mais est en débat
00:19:54d'une façon très problématique
00:19:56puisqu'on considère
00:19:58que les enfants ont droit
00:20:00comme tout le monde
00:20:02à une sexualité
00:20:04et qu'est-ce que c'est
00:20:06que tous ces gens
00:20:08qui les empêchent, etc.
00:20:10On est à cette époque-là.
00:20:12– Alors on dit enfants,
00:20:14mais 14-15 ans,
00:20:16on les appelle plutôt
00:20:18– Il y a la question du détournement mineur
00:20:20de l'emprise de l'adulte.
00:20:22– Ils sont surtout en dessous de 15 ans
00:20:24qui est l'âge de la majorité sexuelle,
00:20:26qui était le sauf cas, effectivement,
00:20:28d'émancipation de la part des parents.
00:20:30– Voilà, voilà.
00:20:32– Moi, ce qui me choquait,
00:20:34c'est que c'était vu et su
00:20:36et que ça n'apparaissait jamais
00:20:38comme une problématique dans les articles,
00:20:40dans les critiques,
00:20:42parce que je ne connaissais ce cinéma d'auteur
00:20:44globalement que par les critiques
00:20:46d'ailleurs dans ton livre, tu reprends
00:20:48les critiques de cette époque,
00:20:50dans un déluge de termes
00:20:52totalement vidés de leur sens
00:20:54par rapport aux intentions prêtées
00:20:56aux auteurs des films.
00:20:58Il y a une chose aussi,
00:21:00parce que cette problématique
00:21:02de l'emprise des réalisateurs
00:21:04sur les comédiennes,
00:21:06comme tu l'as dit,
00:21:08c'était déjà très présent
00:21:10dans la nouvelle vague française.
00:21:12Il y a une lettre célèbre
00:21:14d'un échange très violent
00:21:16entre Truffaut et Godard
00:21:18où Godard accuse Truffaut
00:21:20de malhonnêteté
00:21:22puisque dans son film La nuit américaine
00:21:24toute l'équipe du film
00:21:26couche ensemble sauf le réalisateur
00:21:28qui ne touche à personne
00:21:30et Godard trouve ça hypocrite
00:21:32et dans sa réponse Truffaut lui dit,
00:21:34enfin le reprend quoi,
00:21:36à la même époque, toi tu imitais Jeanne
00:21:38volontairement ou pour faire plaisir à Anna
00:21:40tu tentais un dérisoire chantage
00:21:42tu as fait tourner Catherine Ribéraud
00:21:44que je t'avais envoyé dans les carabiniers
00:21:46et puis tu t'es jeté sur elle
00:21:48comme Charleau sur sa secrétaire dans Le dictateur
00:21:50j'énumère tout cela pour te rappeler de ne rien oublier
00:21:52dans ton film de vérité sur le cinéma et le sexe
00:21:54au lieu de montrer le cul de
00:21:56on ne connait pas le nom
00:21:58et les jolies mains d'Anne Wiazemsky sur la vitre
00:22:00tu pourrais faire le contraire maintenant que tu sais que
00:22:02pas seulement les hommes mais les femmes aussi sont égales
00:22:04y compris les actrices, chaque plan d'elle dans Weekend
00:22:06était un clin d'œil aux copains
00:22:08cette pute veut tourner avec moi
00:22:10regardez bien comment je la traite
00:22:12il y a les putes et les filles politiques
00:22:14et là tu vois
00:22:16effectivement que
00:22:18il y a un jeu
00:22:20de pouvoir et de possession
00:22:22qui est...
00:22:24Toutes ces histoires sont au centre
00:22:26de ton livre et sont au centre de ta théorie
00:22:28sur le cinéma d'auteur français
00:22:30si tu veux tu expliques tout ça par le statut
00:22:32particulier, prestigieux
00:22:34intouchable, sacralisé
00:22:36de l'auteur
00:22:38de l'artiste en France
00:22:40de l'artiste en France
00:22:42alors moi j'ai juste une question
00:22:44est-ce que de tels rapports de pouvoir
00:22:46et les abus qu'ils entraînent seraient absolument
00:22:48inimaginables dans le cinéma
00:22:50qui n'est pas le cinéma
00:22:52d'auteur tel que le cinéma industriel
00:22:54alors éventuellement le cinéma hollywoodien
00:22:56ou le cinéma pas d'auteur français
00:22:58ou tout de même
00:23:00il y a aussi des rapports de domination et de pouvoir
00:23:02est-ce qu'il y a quelque chose de spécifique
00:23:04au cinéma d'auteur ?
00:23:06ce qui est spécifique à la France
00:23:08c'est la sacralisation
00:23:10de la figure de l'artiste
00:23:12c'est-à-dire que les rapports de domination
00:23:14on l'a bien vu avec l'affaire Winstein
00:23:16le droit de cuissage
00:23:18on va le dire
00:23:20existe évidemment à Hollywood
00:23:22depuis les débuts d'Hollywood
00:23:24c'est ce que j'ai envie de te demander, est-ce que c'est mieux
00:23:26quand c'est le producteur qui est tout puissant
00:23:28la différence
00:23:30c'est que
00:23:32dans l'affaire Winstein
00:23:34dans les pratiques hollywoodiennes
00:23:38on n'enrobe pas ça
00:23:40dans l'idée que
00:23:42ça lui permet d'exprimer
00:23:44sa créativité tellement merveilleuse
00:23:46c'est ça la différence
00:23:48on est dans des rapports capitalistes
00:23:50absolument épouvantables
00:23:52mais je dirais que
00:23:54la différence c'est qu'à Hollywood
00:23:56il y a des contre-pouvoirs
00:23:58il y a des syndicats
00:24:00y compris capables de faire des grèves
00:24:02mais il y a des contre-pouvoirs
00:24:04même si ces contre-pouvoirs
00:24:06pendant très longtemps
00:24:08n'ont pas été sensibilisés
00:24:10sur ces questions de violence sexiste et sexuelle
00:24:12ils existent
00:24:14tandis qu'en France
00:24:16à partir du moment en particulier
00:24:18à partir de la nouvelle vague
00:24:201959, la création du ministère de la culture
00:24:22l'avance sur recettes etc
00:24:24la sanctuarisation du cinéma d'auteur
00:24:26fait que
00:24:28dénoncer ces pratiques est impossible
00:24:30parce qu'on porte atteinte
00:24:32à la créativité de l'artiste
00:24:34il y a un autre aspect
00:24:36c'est moi qui ramène mon petit grain
00:24:38là-dedans
00:24:40c'est que la nouvelle vague originelle
00:24:42donc les Truffaut, Godard etc
00:24:44est arrivée avec une forte proposition
00:24:46cinématographique, cinégénique, esthétique
00:24:48un vrai travail
00:24:50sur la forme
00:24:52dont on pouvait
00:24:54aisément constater
00:24:56le talent
00:24:58on va dire
00:25:00affirmé en tant qu'artiste et auteur
00:25:02tout en ayant effectivement
00:25:04ces rapports très compliqués
00:25:06avec leurs actrices
00:25:08mais par la suite
00:25:10j'en viens à
00:25:12Doyon et Jacot
00:25:14que ce soit Sade
00:25:16ou la fille de 15 ans
00:25:18c'est le vide
00:25:20c'est l'indigence cinégénique totale
00:25:22on n'est plus que dans un rapport
00:25:24strictement littéraire
00:25:26au récit
00:25:28avec une caméra qui se contente d'être là
00:25:30et de poser son regard à droite et à gauche
00:25:32non mais vraiment
00:25:34c'est au moins les fondateurs
00:25:36avaient le talent
00:25:38la notion d'auteur telle qu'elle a été théorisée par la nouvelle vague
00:25:40elle ne disait pas qu'un auteur était auteur
00:25:42du simple fait de l'avoir dessiné
00:25:44mais que c'était par sa mise en scène
00:25:46qu'il se révélait en tant qu'auteur
00:25:48et au fil des décennies cette notion a disparu
00:25:50et n'est devenue auteur que celui
00:25:52qu'on décrétait comme tel
00:25:54il a grandi sur les plateaux
00:25:56en tant qu'assistant réalisateur
00:25:58de je ne sais plus si c'était
00:26:00Marguerite Jauras ou
00:26:02les derniers Marcel Carnet
00:26:04des choses comme ça
00:26:06il faisait vraiment partie de ce langage de cinéma français
00:26:08j'imagine
00:26:10qu'il a dû avoir des tas de soirées
00:26:12où il a déballé ses références littéraires
00:26:14ou que sais-je
00:26:16et donc dès le moment
00:26:18où il devient
00:26:20où il passe derrière la caméra
00:26:22de fait auteur
00:26:24sans avoir eu à prouver
00:26:26il est intronisé
00:26:28par un petit milieu
00:26:30qui est celui qui a accès
00:26:32à l'aventure recette
00:26:34qui est couvé
00:26:36par les revues cinéphiliques
00:26:38et l'aventure recette a vie
00:26:40parce que l'aventure recette au départ
00:26:42se donnait pour projet d'aider les jeunes réalisateurs en difficulté
00:26:44et on va se retrouver avec des gens
00:26:46pour qui c'est une rente
00:26:48l'autre différence Raphique
00:26:50c'est que entre
00:26:52la nouvelle vague du tournant des années 60
00:26:54et
00:26:56Jaco Doualon
00:26:58du tournant des années 90
00:27:00il y a eu la soi-disant révolution sexuelle
00:27:02c'est à dire
00:27:04un mouvement qui au départ
00:27:06est un mouvement d'émancipation
00:27:10de la part des femmes pour exiger
00:27:12qu'on prenne en compte
00:27:14leur capacité
00:27:16à désirer
00:27:18et qui a été complètement dévoyée
00:27:20par
00:27:22les rapports de force existants
00:27:24c'est à dire la domination masculine
00:27:26en une injonction faite aux femmes
00:27:28de se rendre disponible pour le désir des hommes
00:27:30et c'est ça qu'on voit dans ces films
00:27:32c'est ça qu'on voit dans ces pratiques
00:27:34et donc on passe
00:27:36je dirais d'un univers romantique
00:27:38où la passion
00:27:40s'exprime de manière
00:27:42à travers des affects
00:27:44mais pas avec des scènes de cul
00:27:46à un cinéma où
00:27:48de manière très très crue
00:27:50on va donc déshabiller
00:27:52des actrices de plus en plus jeunes
00:27:54en les renouvelant régulièrement
00:27:56bien entendu pour
00:27:58manifester son pouvoir
00:28:00– Alors je voudrais qu'on revienne aux films
00:28:02et à la construction des récits dans les films
00:28:04et notamment à la construction des personnages
00:28:06et des personnages de filles
00:28:08de jeunes filles pour revenir
00:28:10à la fille de 15 ans
00:28:12alors le personnage
00:28:14de Judith Goderich
00:28:16comment dire, alors tu disais tout à l'heure
00:28:18il a construit un personnage
00:28:20finalement d'une adolescente qui saute
00:28:22sur le quadragénaire
00:28:24alors c'est un tout petit peu plus compliqué que ça
00:28:26puisqu'on lui donne une certaine ambiguïté
00:28:28alors je voudrais qu'on voit comment
00:28:30doyons
00:28:32donne de l'ambiguïté
00:28:34à son personnage féminin qui
00:28:36d'un côté a l'air de
00:28:38se plaindre auprès de son petit ami
00:28:40des avances
00:28:42du père
00:28:44et d'un autre côté aguiche le père
00:28:46alors petit extrait
00:28:48Ils ne regardaient pas ?
00:28:50Non mais ils te regardaient toi
00:28:56Pas d'une façon
00:28:58insistante mais ils te regardaient
00:29:02Ils ne me regardaient pas lourdement ?
00:29:04Non
00:29:06Furtivement ?
00:29:08Non c'était pas lourd et pas furtif
00:29:12Avec attention alors
00:29:16Donc ils me regardaient
00:29:22On peut le laisser avec ces regards
00:29:24on s'en fout
00:29:26On s'en fout pas c'est pas toi qui as regardé
00:29:30C'est dégueulasse de sentir un regard
00:29:32comme ça
00:29:34C'est dégueulasse de sentir un regard
00:29:36immonde sur soi
00:29:38ça rend tout dégueulasse
00:29:40y compris toi et moi si tu fais rien
00:29:46J'aime pas les peaux cuites
00:29:48je préfère les peaux transparentes
00:29:50Le bronzage ça va avec les mèches blondes
00:29:52ça me fait penser aux amis de ma mère
00:29:56Malheureusement je bronze très vite
00:29:58mais heureusement je débronze très vite aussi
00:30:04Ce qui est intéressant dans la construction de ce personnage
00:30:06c'est qu'elle est duplice
00:30:08elle se plaint auprès de son petit ami
00:30:10de la lourdeur du regard du père
00:30:12et en même temps on voit bien qu'elle va
00:30:14aguicher le père
00:30:16Là dans le dernier extrait
00:30:18qu'on a pas en entier
00:30:20c'est le seul moment du film
00:30:22où il y a un semblant de mise ancienne
00:30:24même si il y a assez caractéristique
00:30:26c'est qu'il y a un moment
00:30:28où il y a l'impression
00:30:30qu'il n'y a rien
00:30:32un semblant de mise ancienne
00:30:34la caméra fait un panneau
00:30:36c'est à dire qu'elle est du côté du père
00:30:38avec ce regard
00:30:40de jeune fille troublée
00:30:42et ensuite elle se tourne vers le jeune homme
00:30:44elle redevient l'adolescente
00:30:46très à l'aise
00:30:48et elle revient vers le père
00:30:50et donc il y a un panneau comme un jeu de ping-pong
00:30:52entre les deux
00:30:54assez caricatural
00:30:56Mais c'est une manière
00:30:58de charger encore plus
00:31:00d'alourdir la charge
00:31:02de la responsabilité
00:31:04sur la gamine
00:31:06Bien entendu tous ces dialogues
00:31:08sont écrits par Doyon
00:31:10C'est l'auteur
00:31:12Oui mais alors justement
00:31:14là je dirais que
00:31:16le côté pervers de la chose
00:31:18c'est que lui
00:31:20par exemple dans cette scène
00:31:22lui est silencieux
00:31:24et elle se répand
00:31:26en pensée plus ou moins profonde
00:31:28qui bien entendu
00:31:30sont
00:31:32les résultats
00:31:34des cogitations de Doyon
00:31:36Donc il y a
00:31:38une sorte de mise en scène
00:31:40qui là encore
00:31:42est une sorte d'inversion de la réalité
00:31:44puisque
00:31:46Doyon fait dire
00:31:48alors y compris à Melville Poupeau
00:31:50qui dans la scène
00:31:52précédente
00:31:54lui dit ben oui il avait un regard
00:31:56attentif, il te regardait
00:31:58donc pas négatif
00:32:00positif
00:32:02donc il délègue au fils
00:32:04la défense du père
00:32:06et puis après le père peut être silencieux
00:32:08et ce regard
00:32:10ce regard
00:32:12profond
00:32:14Ce qui est intéressant c'est que avant d'avoir le récit
00:32:16de Gilles Gaudrech, le seul récit
00:32:18de tournage qu'on avait c'était celui de Doyon
00:32:20et celui de Doyon confiait
00:32:22aux critiques qui lui demandaient comment il
00:32:24tournait son film
00:32:26et un certain nombre de ses réalisateurs
00:32:28alors je ne sais plus si c'est Doyon dans ce film précis
00:32:30disaient ben on tournait au jour le jour
00:32:32c'est à dire qu'on avait une trame de départ
00:32:34et après on utilisait
00:32:36ce qui se passait, les émotions qui circulaient
00:32:38les événements qui se déroulaient
00:32:40sur le tournage
00:32:42on les utilisait le lendemain pour
00:32:44en colorer les scènes
00:32:46ce qui
00:32:48c'est aussi tout le contraire finalement
00:32:50de
00:32:52de ce qu'on a appris par la suite
00:32:54Appris, c'est un bien grand mot
00:32:56enfin je rappelle que dans les années 90
00:32:58les inconnus avaient fait un sketch sur un réalisateur
00:33:00qui s'appelait Jacques Bouillon
00:33:02qui nous montrait comment il manipulait
00:33:04ses comédiens comme un vrai pervers
00:33:06sur le plateau
00:33:08donc c'était non plus un secret
00:33:10Et parmi la méthode
00:33:12Doyon et qui était aussi la méthode
00:33:14de Jacques O, il y avait l'idée que
00:33:16ben oui moi je suis obligée
00:33:18de faire rejouer 45 fois
00:33:20la scène pour obtenir
00:33:22l'authenticité
00:33:24voilà, ce genre de bullshit
00:33:26Alors il y a un autre terme
00:33:28de bullshit
00:33:30je vais faire l'avocat du diable
00:33:32c'est mon exercice favori
00:33:34mais en même temps est-ce que
00:33:36cette technique est totalement à rejeter
00:33:38est-ce que la manière
00:33:40dont on obtient
00:33:42l'émotion la plus sincère
00:33:44la plus tripale
00:33:46d'un comédien
00:33:48d'un comédien ou d'une comédienne
00:33:50n'est pas parfois de le pousser
00:33:52dans ses retranchements
00:33:54c'est aussi une question de talent
00:33:56j'entends
00:33:58moi je me souviens d'un film
00:34:00que j'avais apprécié
00:34:02mais qui m'avait choqué
00:34:04qui s'appelait Seul contre tous
00:34:06de Gaspar Noé
00:34:08dans lequel il y a une scène de meurtre
00:34:10de jeune fille qui est extrêmement éprouvante
00:34:12et
00:34:14dans l'interview j'ai demande
00:34:16j'insiste auprès du jeune
00:34:18parce qu'il débutait à l'époque
00:34:20c'était son premier long métrage
00:34:22Gaspar Noé lui dit
00:34:24mais comment on gère une comédienne
00:34:26sur une scène comme ça
00:34:28il ne faisait aucun doute que cette scène
00:34:30avait été traumatique
00:34:32pour la comédienne
00:34:34et Gaspar qui a une voix
00:34:36très douce
00:34:38intériorisée, très timide
00:34:40me raconte comment la comédienne
00:34:42a passé toute la journée à jouer
00:34:44avec une poire qui sert à faire gicler
00:34:46le sang de sa gorge
00:34:48ça l'amusait beaucoup
00:34:50elle arrosait les membres de l'équipe
00:34:52avec cette poire
00:34:54en voyant le film après je réalise
00:34:56que toute la violence
00:34:58qui m'avait pris
00:35:00elle était obtenue
00:35:02par des techniques
00:35:04cinématographiques
00:35:06par les mouvements de caméra
00:35:08oui peut-être qu'effectivement
00:35:10cette comédienne, cette journée
00:35:12n'avait été finalement pour elle
00:35:14qu'une sorte de jeu
00:35:16oui alors moi je demande
00:35:18le témoignage de la comédienne
00:35:20je refuse de prendre pour acquis
00:35:22en l'occurrence
00:35:24comment elle s'appelle
00:35:26parce que par la suite il va faire un film
00:35:28très médiatisé
00:35:30qui est irréversible
00:35:32et là tout d'un coup je perds le nom de Monica Bellucci
00:35:34avec cette fameuse scène
00:35:36de viol interminable
00:35:38qu'on a dans le film
00:35:40et quand on voit
00:35:42le making off de Monica Bellucci
00:35:44et du comédien
00:35:46qui joue son violeur
00:35:48on a l'impression que c'est en train de préparer une scène d'action
00:35:50ils sont dans une salle de gym sur des matelas
00:35:52des semaines avant que la scène
00:35:54n'ait lieu
00:35:56on voit des professionnels
00:35:58en train de préparer un combat
00:36:00physique
00:36:02et comment dire
00:36:04ces scènes elles sont très impactantes
00:36:06quand on les voit
00:36:08et très traumatisantes
00:36:10sans avoir a priori
00:36:12besoin de traumatiser
00:36:14le comédien ou la comédienne
00:36:16sur le plateau
00:36:18tu parles de Gaspard Noé
00:36:20je n'ai pas d'informations là dessus
00:36:22mais quelqu'un comme Catherine Breillat
00:36:24revendique le droit de maltraiter
00:36:26et l'a fait puisque
00:36:28là aussi Caroline Dusset
00:36:30a récemment
00:36:32publié un ouvrage
00:36:34Prédation non féminin
00:36:36dans lequel elle raconte
00:36:38comment elle a été violée
00:36:40sur le plateau de romance
00:36:42au vu et au su
00:36:44bien sûr de la réalisatrice
00:36:46et là
00:36:48je dirais un peu comme chez Doyon et Jacot
00:36:50il y a une revendication
00:36:52du droit de maltraiter
00:36:54les comédiens pour en extraire
00:36:56la substantifique moelle
00:36:58mais je veux dire
00:37:00d'un point de vue humain
00:37:02je conteste fortement
00:37:04ces méthodes
00:37:06aussi bien si elles sont faites d'un homme
00:37:08que d'une femme
00:37:10absolument, la maltraitance
00:37:12Caroline Dusset
00:37:14ça c'est des informations que j'ai par
00:37:16copains de copains
00:37:18son mec
00:37:20de l'époque
00:37:22a assisté au fait qu'elle a été
00:37:24d'une certaine manière kidnappée
00:37:26c'est à dire que Breillat l'a obligé à vivre
00:37:28auprès d'elle
00:37:30elle l'a prise sous son aile
00:37:32c'est une emprise totale
00:37:34il ne la reconnaissait plus
00:37:36et il y a une scène de romance
00:37:38dans laquelle elle est examinée par des étudiants
00:37:40en médecine
00:37:42qui mettent la main dans
00:37:44les orifices
00:37:46dont elle ne se souvenait plus
00:37:48ça veut dire qu'elle l'a complètement
00:37:50effacée
00:37:52après le trauma
00:37:56mais pareil
00:37:58dans le cas de Breillat
00:38:00il y avait un court métrage qui s'appelait Comédien
00:38:02qui était sorti à l'époque
00:38:04qui raconte les déboires d'un comédien qui passe
00:38:06de casting en casting
00:38:08et à un moment donné il y avait une scène terrible
00:38:10avec une femme incroyablement perverse
00:38:12dont tous ceux
00:38:14qui connaissent un peu le cinéma
00:38:16savaient que c'était Catherine Breillat
00:38:18qui était mise en scène
00:38:20la perversité
00:38:22c'est pour ça que je rejoins Geneviève dans cette idée
00:38:24du culte de l'auteur en France
00:38:26c'est qu'on ne se réveille pas tardivement
00:38:28la perversité
00:38:30de certains de ses auteurs
00:38:32et d'autrices
00:38:34en l'occurrence il y a plus d'auteurs que d'autrices
00:38:36mises en cause
00:38:38on la connait depuis longtemps
00:38:40– Mais elle était couverte et excusée
00:38:42et expliquée
00:38:44– Et même elle était perçue
00:38:46comme
00:38:48un gage
00:38:50de créativité
00:38:52c'est-à-dire que la perversité
00:38:54c'était la capacité à transgresser les normes
00:38:56bourgeoise bien entendu
00:38:58et donc il y avait une espèce de confusion
00:39:00entre
00:39:02la capacité
00:39:04de l'artiste à transgresser les normes
00:39:06narratives
00:39:08et la capacité de l'homme réalisateur
00:39:10à transgresser les normes morales
00:39:12en particulier
00:39:14à travers la violence contre les actrices
00:39:16– Alors autre film
00:39:18autre réalisateur problématique
00:39:20je voudrais qu'on dise un mot du film Nosse Blanche
00:39:22de Jean-Claude Brissot
00:39:24Jean-Claude Brissot
00:39:26mort lui en 2019
00:39:28réalisateur qui a été
00:39:30condamné par la justice
00:39:32pour agression sexuelle et pour viol
00:39:34à l'égard de plusieurs comédiennes
00:39:36et un de ses films les plus mémorables
00:39:38dont ce film s'appelle Nosse Blanche
00:39:40qui est donc
00:39:42mettant en scène
00:39:44l'homme mûr dans le rôle
00:39:46de l'homme mûr Bruno Kremer
00:39:48prof de philo
00:39:50un télo
00:39:52avec sa serviette
00:39:54et dans le rôle de la jouvencelle
00:39:56donc Vanessa Paradis
00:39:58élève
00:40:00problématique au début
00:40:02mais qu'il va s'efforcer de
00:40:04tirer vers le haut en lui donnant des cours particuliers
00:40:06lesquels cours particuliers
00:40:08à son initiative
00:40:10à elle puisque c'est elle qui prend l'initiative
00:40:12vont se transformer
00:40:14en intrigue amoureuse en extrait
00:40:18– Merci de vous être occupé de moi
00:40:20je vais pas dormir de la nuit
00:40:30– Je regrette de
00:40:32vous avoir fait pleurer ce matin
00:40:34– Oh mais c'était pas à cause de vous
00:40:36ça m'arrive parfois quand je pense à ma vie
00:40:50– Merci
00:41:06– Vous allez pas partir ?
00:41:08– Mais on m'attend chez moi
00:41:10– S'il vous plaît
00:41:12j'ai un peu peur de rester seule maintenant
00:41:14ça vous est jamais arrivé d'avoir besoin
00:41:16de parler à quelqu'un ?
00:41:18– Je vous invite à dîner
00:41:22– Au bateau
00:41:26– Téléphonez
00:41:34– N'ayez pas peur
00:41:36j'ai plus de larmes à verser
00:41:38vous avez été gentil avec moi
00:41:40ces derniers temps ça se faisait rare
00:41:48– Alors à différence de l'Audrèche
00:41:50de la fille de 15 ans
00:41:52là elle est clairement dans l'initiative
00:41:54c'est elle tout du long
00:41:56qui effectivement
00:41:58prend les choses en main
00:42:00mais enfin à cette
00:42:02petite différence près
00:42:04le schéma est le même
00:42:06c'est à dire la responsable c'est elle
00:42:08– Oui enfin on a vu que dans les films
00:42:10de Douillon et Jacot
00:42:12justement l'adolescente
00:42:14est ambiguë c'est à dire
00:42:16elle est autant
00:42:18– Pas là
00:42:20– Non non justement
00:42:22mais même dans les jeux d'hier
00:42:24c'est pas l'inverse
00:42:26dans un cas il y a une sorte de jeu
00:42:28un peu pervers
00:42:30où on sait pas si elle veut ou elle veut pas
00:42:32tout le monde sait que les femmes
00:42:34de toute façon ne savent pas ce qu'elles veulent
00:42:36et là en revanche effectivement
00:42:38le schéma est beaucoup plus clair
00:42:40la façon dont elle
00:42:42se met à poil devant son prof de philo
00:42:44c'est tout à fait clair
00:42:46et elle réitèrera
00:42:48la chose jusqu'à ce que
00:42:50elle est dans son lit
00:42:52– Alors ce qui est intéressant
00:42:54déjà par rapport au film
00:42:56qu'on a traité auparavant
00:42:58dans le cas de Noce Blanche à ma connaissance
00:43:00il n'y a pas eu de retour
00:43:02sur une confusion
00:43:04entre la vie privée et la vie
00:43:06publique du film, à ma connaissance
00:43:08Vanessa Paradis n'a jamais rien dit
00:43:10sur Brissot
00:43:12sa mère de Vanessa Paradis
00:43:14a expliqué ensuite
00:43:16sans porter plainte ni rien
00:43:18a assuré ensuite que Brissot
00:43:20pendant les essais, pendant le casting
00:43:22s'était masturbée devant Vanessa Paradis
00:43:24– Ah oui ça change un peu tout
00:43:26– Quand même, alors
00:43:28ceci dit justement Vanessa Paradis
00:43:30contrairement à Judith Godrej et Isile de Besko
00:43:32elle est très entourée
00:43:34elle est déjà une chanteuse
00:43:36elle est très entourée par sa famille
00:43:38et donc elle est protégée
00:43:40et je pense que c'est la raison pour laquelle
00:43:42rien ne s'est passé
00:43:44voilà
00:43:46dans ces histoires
00:43:48la question c'est
00:43:50de quelle protection
00:43:52peut espérer l'adolescente ?
00:43:54– Alors ce qui est intéressant
00:43:56c'est que dans ces films
00:43:58il n'y a pas seulement un homme et une femme face à face
00:44:00il y a tout un cadre
00:44:02il y a d'autres personnages
00:44:04non, non, non, je parle des personnages
00:44:06qu'on voit à l'écran
00:44:08je parle de la fiction
00:44:10on voit des personnages secondaires, on voit des situations
00:44:12on voit des cadres professionnels
00:44:14qui nous orientent aussi dans le regard
00:44:16qu'on porte sur le film
00:44:18alors moi j'ai vu Nose Blanche
00:44:20c'est une histoire classique
00:44:22le cadrage énerve
00:44:24la fille mineure
00:44:26mais alors la manière dont l'histoire d'amour
00:44:28quand elle se déclenche est romantisée
00:44:30là j'ai été absolument scié
00:44:32il y a une scène notamment
00:44:34on va la voir, dans laquelle on les voit
00:44:36les deux alors
00:44:38leur histoire s'étant enfin déclarée
00:44:40on les voit batifoler dans la nature
00:44:42on regarde
00:44:44...
00:45:12...
00:45:30alors là je me suis dit mais c'est pas possible
00:45:32c'est du second degré, il veut pas vraiment nous montrer
00:45:34ce qu'on voit là
00:45:36c'est pas du second degré
00:45:38oui mais...
00:45:40à l'époque de la sortie du film pour le coup
00:45:42j'ai pas de souvenirs d'un scandale
00:45:44il n'y a rien de scandaleux là
00:45:46c'est juste absurde
00:45:48c'est scandaleux esthétiquement
00:45:50oui oui
00:45:52c'est une naïveté
00:45:54on peut dire ce qu'on veut sur Jaco et Doyon
00:45:56au moins
00:45:58c'est pas romantisé
00:46:00oui et non
00:46:02dans la fille de 15 ans
00:46:04il y a les beaux paysages des bizarres
00:46:06enfin bon il y a plein d'éléments qui sont là pour romantiser
00:46:08on n'est pas à ce point là quand même
00:46:10on n'est pas à ce point
00:46:12de pub royal canin
00:46:14Brissot est moins malin
00:46:16que ses petits camarades
00:46:18c'est sûr
00:46:20pour que les gens
00:46:22sachent que la condamnation
00:46:24de Brissot
00:46:26c'est fait sur un film
00:46:28suivant qui s'appelait
00:46:30Choses secrètes
00:46:32pour lequel il avait effectivement fait
00:46:34un processus de casting
00:46:36qui avait duré des mois
00:46:38et auxquels il demandait
00:46:40aux comédiennes des choses
00:46:42voilà c'est ça
00:46:44il les filmait
00:46:46etc
00:46:48les raisons de la condamnation
00:46:50c'est ces castings
00:46:52il les menait seuls
00:46:54alors que théoriquement dans les règles de l'art
00:46:56le réalisateur n'est jamais seul pendant un casting
00:46:58il y a toujours au moins une personne
00:47:00et en fait
00:47:02après sa
00:47:04je sais pas si c'était après sa condamnation
00:47:06ou pendant le procès
00:47:08il s'est quand même permis de faire un film
00:47:10qui s'appelait Les anges exterminateurs
00:47:12dans lequel il mettait en scène
00:47:14un pauvre artiste
00:47:16accusé à tort
00:47:18il faut quand même rappeler Raphique
00:47:20que le banc et l'arrière banc
00:47:22de la cinéphilie et du milieu du cinéma
00:47:24l'a soutenu
00:47:26moi j'ai le souvenir
00:47:28d'avoir entendu parler des anges exterminateurs
00:47:30qui étaient passés à Cannes
00:47:32par deux journalistes
00:47:34qui travaillaient pour un gros média à l'époque
00:47:36sur Canal+, et qui étaient
00:47:38sortis de la salle justement
00:47:40parce qu'ils trouvaient que c'était dégueulasse
00:47:42absolument dégueulasse qu'un mec
00:47:44qui est condamné
00:47:46le Canal+, c'était pas la cinéphilie
00:47:48le coeur de la cinéphilie
00:47:50c'était Télérama, le Bougac
00:47:52ça s'appelait le journal du cinéma
00:47:54donc a priori on était quand même concerné par la chose
00:47:56en disant
00:47:58mais c'est abominable
00:48:00que ce vieux pervers se permette
00:48:02de faire un film comme ça
00:48:04vraisemblablement ils ont été plus ou moins les seuls à sortir
00:48:06mais le truc
00:48:08ils n'en ont pas parlé
00:48:10et en plus ils ont respecté le Verdun
00:48:12il y a un côté scandaleux
00:48:14qui est manifesté
00:48:16mais en même temps
00:48:18on ne se permet pas d'en faire quelque chose
00:48:20d'en faire un sujet
00:48:22donc ça couvre tout
00:48:24j'ai quelque chose dans les artifices de narration
00:48:26qui vise à justifier
00:48:28la relation entre
00:48:30esthétiser, valoriser, justifier
00:48:32le rôle de l'entourage
00:48:34par exemple Danos Blanche
00:48:36qui est prof de philo, il va la repêcher
00:48:38parce qu'effectivement au début de l'année
00:48:40quand elle arrive elle est en perdition
00:48:42et il y arrive
00:48:44tout à coup les notes se relèvent
00:48:46et il est donc félicité par ses collègues professeurs
00:48:48au revoir
00:48:50vous aviez raison
00:48:52Mathilde a fait des progrès exceptionnels
00:48:54en anglais
00:48:56c'est remarquable
00:48:58bravo
00:49:00au revoir
00:49:02monsieur Henault
00:49:04oui
00:49:06on voulait vous dire
00:49:08on est vraiment content de ce que vous avez fait pour Mathilde
00:49:10comment qu'est-ce que j'ai fait
00:49:12vous savez on avait tous peur
00:49:14on croyait vraiment qu'elle allait sombrer complètement
00:49:16et le surprise c'est grâce à vous
00:49:18c'est surtout grâce à elle
00:49:20oui, au revoir messieurs
00:49:22vous partez en vacances ?
00:49:24bonnes vacances tout de même
00:49:26voilà donc
00:49:28concert d'éloge
00:49:30et approbation sociale unanime
00:49:32ça te fait beaucoup rire, pourquoi ?
00:49:34parce que
00:49:36le film
00:49:38prend le spectateur pour un imbécile
00:49:40y compris
00:49:42parce que la prof d'anglais
00:49:44en l'occurrence
00:49:48alors on a appris que
00:49:50comment elle s'appelle dans le film ?
00:49:52je ne sais plus
00:49:54on a appris que Vanessa Paradis était en fait
00:49:56anglophone, Mathilde oui
00:49:58elle est anglophone et si elle ne fait rien
00:50:00en cours d'anglais c'est parce qu'elle trouve
00:50:02la prof d'anglais totalement nulle
00:50:04et bien entendu
00:50:06Bruno Kramer partage
00:50:08implicitement cette opinion
00:50:10et alors la façon dont il dit
00:50:12c'est grâce à toi chers collègues
00:50:14bon
00:50:16il s'agit de ridiculiser
00:50:18aussi de ridiculiser
00:50:20les femmes, les femmes professeurs
00:50:22qui ne comprennent rien à rien
00:50:24et qui sont totalement
00:50:26incompétentes
00:50:28c'était par rapport à la question
00:50:30aussi de la confusion
00:50:32vie privée, vie publique etc
00:50:34sur cette idée qu'il faut
00:50:36séparer l'âme de l'artiste
00:50:38pour préparer
00:50:40cette émission et ça je ne te remercie pas
00:50:42Daniel, je me suis tapé des interviews
00:50:44de Benoit Jacot
00:50:46tu savais que je me tape pour préparer
00:50:48certaines émissions, on pourra en parler au rendez-vous
00:50:50et j'ai été
00:50:52très très surpris
00:50:54de la fréquence
00:50:56de l'utilisation du mot intime
00:50:58il le conjugue
00:51:00à toutes les sauces
00:51:02effectivement lui il se voit
00:51:04comme un artiste qui
00:51:06cherche à percer l'intimité
00:51:08de rentrer dans l'intimité
00:51:10mais il y a toujours ce mouvement de rentrer
00:51:12dans quelque chose qui a priori
00:51:14est interdit
00:51:16un domaine, voilà
00:51:18parce que ça déborde on va dire
00:51:20de ce dont on a
00:51:22parlé parce que lorsqu'il fait jouer
00:51:24un couple
00:51:26à la ville
00:51:28comme Sandrine Kiberlin
00:51:30et Vincent Lindon
00:51:32ils les utilisent en tant que couple
00:51:34dans son film pour essayer de percer
00:51:36l'intimité etc
00:51:38il y a quelque chose
00:51:40vraiment de l'ordre de la confusion
00:51:42d'une posture
00:51:44de voyeur
00:51:46cette idée que le cinéma ça se fabrique
00:51:48en fait
00:51:50le cinéma est un instrument
00:51:52pour
00:51:54transgresser
00:51:56les limites de l'intimité
00:51:58des autres
00:52:00et d'ailleurs c'est ce qu'il dit dans l'émission
00:52:02de
00:52:04comment il s'appelle ?
00:52:06Gérard Miller
00:52:08le cinéma pour moi était une couverture
00:52:10pour pouvoir avoir accès
00:52:12à ces adolescentes et je voyais autour de moi
00:52:14que tout le monde m'en vient donc j'avais aucune raison
00:52:16d'arrêter
00:52:18tout dépend de ce qu'on appelle
00:52:20avoir accès à ces adolescentes
00:52:22est-ce que ça veut dire
00:52:24les tenir sous son emprise
00:52:26tu parlais de
00:52:28Kiberlin et Lindon
00:52:30je pense qu'il s'agit d'autre chose
00:52:32j'essaie de comprendre
00:52:34de prendre le point de vue
00:52:36du criminel
00:52:38qu'est-ce qu'il a lui dans la tête
00:52:40quand Isile Debesco parle de lui
00:52:42dans une émission
00:52:44que j'ai vue, elle essaie
00:52:46non pas de
00:52:48le disculper
00:52:50mais de comprendre
00:52:52comment ça se passait dans sa tête à lui
00:52:54quand il faisait ce qu'il faisait
00:52:56et elle aussi
00:52:58elle parle de cette confusion
00:53:00on va dire
00:53:02du fait qu'il ne se voit pas forcément
00:53:04comme un pervers manipulateur
00:53:06etc quoi
00:53:08bon je veux dire
00:53:10les faits sont là
00:53:12on s'en fout
00:53:14bien sûr qu'on s'en fout
00:53:16encore aujourd'hui
00:53:18quand Jaco parle
00:53:20Jaco dit c'est moi qui étais sous son emprise
00:53:22à propos de Godrej
00:53:24voilà ce qu'il dit
00:53:26sincère, pas sincère
00:53:28oui puis alors en plus
00:53:30à partir du moment où il renouvelait son geptel
00:53:32tous les 3 ans
00:53:34je veux dire ça va 2 minutes
00:53:36on n'est pas obligé d'être totalement dupe de ce genre de discours
00:53:38pour prendre un exemple
00:53:40Polanski est tout à fait au courant
00:53:42de ce qu'il a fait par exemple
00:53:44il a avoué son crime
00:53:46il le reconnait
00:53:48et il sait
00:53:50et il savait même au moment où il le faisait
00:53:52que c'était pas bien
00:53:54dans le cas d'un Jaco
00:53:56est-ce qu'il n'avait jamais eu conscience
00:53:58que ce qu'il faisait n'était pas bien
00:54:00c'est ça en fait ?
00:54:02ça n'a rien à voir, Polanski n'a jamais fait tourner
00:54:04la jeune fille qui l'a sodomisé
00:54:06par rapport à quelqu'un
00:54:08qui aurait été condamné pour un acte
00:54:10délictueux envers une jeune fille
00:54:12il est clair que
00:54:14comme dans les procès de Mazan
00:54:16la stratégie principale
00:54:18des agresseurs
00:54:20et des violeurs
00:54:22c'est de mentir
00:54:24jamais, jamais avouer
00:54:26que
00:54:28non elle était consentante
00:54:30oui c'est elle, j'étais sous son emprise
00:54:32enfin je veux dire
00:54:34le principe c'est
00:54:36le principe de défense
00:54:38– Geneviève est-ce qu'on peut mettre dans le même cas
00:54:40les violeurs de Mazan
00:54:42qui sont arrivés dans une maison
00:54:44devant une femme endormie
00:54:46et qui ensuite
00:54:48l'ont violée
00:54:50ou ne l'ont pas violée
00:54:52et les couples
00:54:54qui ont formé ces réalisateurs et ces comédiennes
00:54:56qui ont parfois été des couples durables
00:54:58mais bien sûr que si
00:55:00les relations ont parfois duré
00:55:02des années et des années
00:55:04il y a eu des vraies vies de couple
00:55:06Godrej et Jaco
00:55:08ont acheté un appartement ensemble
00:55:10– Jaco a acheté un appartement
00:55:12grâce à l'argent de Godrej, il vaudrait mieux le dire comme ça
00:55:14– Ils ont acheté un appartement et ils ont vécu dans cet appartement
00:55:16– Oui, jusqu'à ce qu'elle s'en aille
00:55:18parce qu'elle n'en pouvait plus
00:55:20– Est-ce qu'on peut faire une équivalence
00:55:22Jaco Godrej-Mazan ?
00:55:24– Non, je parle du système de défense
00:55:26des prédateurs
00:55:28– D'accord
00:55:30– Je considère Doillon et Jaco comme des prédateurs
00:55:32le système de défense
00:55:34consiste systématiquement
00:55:36à nier
00:55:38comment dirais-je
00:55:40la prédation justement
00:55:42y compris en l'inversant
00:55:44en disant oui j'étais sous son emprise
00:55:46c'est un moyen de défense
00:55:48c'est un moyen de défense
00:55:50et donc le rapport que je fais c'est
00:55:52tous ces types
00:55:54qui bien entendu n'ont pas du tout l'intelligence
00:55:56de Jaco et Doillon
00:55:58qui sont des gens nettement plus frustres
00:56:00et qui se contentent de nier
00:56:02– Je voudrais qu'on écoute
00:56:04en tant qu'à essayer de savoir s'ils ont dans la tête
00:56:06je suis tombé sur un extrait
00:56:08en préparant l'émission aussi d'une interview
00:56:10de Jean-Claude Brissot à propos de Noces Blanches
00:56:12donc il parle à la télévision suisse
00:56:14et on lui demande comment il a choisi
00:56:16Vanessa Paradis
00:56:18je voudrais qu'on écoute sa réponse
00:56:20– J'ai accepté de voir La Petite Paradis
00:56:22pour une raison simple – Pas avec enthousiasme
00:56:24d'après ce que tu sais – Non pas du tout parce que je pensais
00:56:26que c'était une erreur de casting, je pensais que cette fille avait la présence
00:56:28mais je pensais vraiment que c'était une erreur de casting complète
00:56:30– La présence elle l'a – Et
00:56:32j'ai vu Lisa qui travaille avec moi
00:56:34et qui monte avec moi
00:56:36m'a dit
00:56:38je l'ai vue à la télévision, elle a dansé
00:56:40– Non non mais Jean-Claude Brissot
00:56:42allez raccourcissons, vous avez été la voir
00:56:44elle vous a séduit dans la discussion
00:56:46– Non c'est pas, vous vous trompez, quand je dis ça c'est sérieux
00:56:48– C'est écrit partout
00:56:50– Excusez-moi, non mais c'est vrai
00:56:52mais avant j'avais besoin de quelqu'un
00:56:54dont je savais qu'il serait capable de tenir le coup sur le tournage
00:56:56c'est-à-dire de ne pas avoir quelqu'un qui allait me
00:56:58vous savez tourner c'est crevant
00:57:00et j'ai besoin de quelqu'un qui soit un minimum
00:57:02qui ait un minimum de discipline
00:57:04– A quel moment vous avez senti
00:57:06que ça serait elle qu'elle pouvait le faire ?
00:57:08– Quand je l'ai rencontrée au bout de 10 minutes
00:57:10mais je savais aussi qu'elle avait dansé
00:57:12– Alors ce qui m'intéresse là c'est le mot discipline
00:57:14et la passion avec laquelle
00:57:16il prononce ce mot discipline
00:57:18alors je ne sais pas si c'est la seule clé de l'emprise
00:57:20mais il me semble qu'on a là peut-être
00:57:22dans la relation qui peut se jouer
00:57:24entre un metteur en scène
00:57:26et une jeune collègue
00:57:28c'est-à-dire qu'il y a une relation
00:57:30entre un metteur en scène
00:57:32et un metteur en scène
00:57:34c'est-à-dire qu'il y a une relation
00:57:36entre un metteur en scène
00:57:38et un metteur en scène
00:57:40et une jeune comédienne
00:57:42une explication parmi d'autres
00:57:44du mécanisme d'emprise
00:57:46– Ce qui est sûr c'est que
00:57:48comme le dit Sarah Forestier
00:57:50dans le témoignage récent qu'elle a fait
00:57:52devant la commission
00:57:54de l'Assemblée Nationale
00:57:56chaque fois que
00:57:58on leur demande des choses
00:58:00épuisantes
00:58:02humiliantes etc.
00:58:04on leur dit c'est pour l'amour de l'art
00:58:06et d'ailleurs c'est ce que
00:58:08disait Lubersco si elle ne voulait pas
00:58:10se mettre nue, elle a fini par le faire
00:58:12pour l'amour de l'art parce que
00:58:14elle se sent redevable
00:58:16vis-à-vis d'un artiste
00:58:18qui a l'air de considérer que c'est indispensable
00:58:20pour
00:58:22l'épanouissement de son oeuvre
00:58:24elle est là
00:58:26elle est là l'emprise
00:58:28c'est que la discipline auquel
00:58:30ils soumettent effectivement ces adolescentes
00:58:32c'est
00:58:34l'art pour l'art, c'est en vertu
00:58:36qu'elle se dévoue
00:58:38en quelque sorte à l'art
00:58:40donc l'art
00:58:42je voulais revenir sur cette idée
00:58:44que tu disais que
00:58:46à propos de Jaco
00:58:48Jaco
00:58:50dans l'entretien
00:58:52qu'il a fait avec Gérard Miller
00:58:54est extrêmement explicite sur le fait
00:58:56que ça fait très bien que ce qu'il faisait
00:58:58était totalement illégal
00:59:00après il a
00:59:02parce qu'en fait
00:59:04pas immoral
00:59:06illégal et immoral les deux
00:59:08oui oui les deux
00:59:10il savait très bien que
00:59:12ce qu'il faisait était mal
00:59:14mais il avait également vu que tout le monde
00:59:16l'enviait de pouvoir le faire
00:59:18et quand il dit
00:59:20le cinéma me servait de couverture
00:59:22comme l'on dirait pour la mafia
00:59:24je veux dire c'est très explicite
00:59:26alors après
00:59:28en fait il s'est fait avoir par Gérard Miller
00:59:30parce que Gérard Miller a été capable
00:59:32de créer un climat
00:59:34qui a fait qu'il a dit
00:59:36les choses vraies
00:59:38et depuis
00:59:40il s'est fait piéger
00:59:42c'est d'ailleurs la seule chose qu'il se reproche
00:59:44aujourd'hui
00:59:46c'est cette interview
00:59:48sa sincérité dans cette interview
00:59:50qui a été effectivement l'élément déclencheur de la plainte de Judith Godrej
00:59:52c'est quand elle a vu
00:59:54qui était tombée dans l'oubli
00:59:56ça date de 2011
00:59:58quand elle a vu cet extrait elle a été tellement
01:00:00scandalisée qu'elle est allée porter plainte
01:00:02ce qu'elle n'avait pas fait jusqu'à maintenant
01:00:04donc il s'est fait piéger littéralement
01:00:06mais pour une fois où il s'est fait piéger
01:00:08après il a mis en place un discours
01:00:10mais non mais non c'est moi qui étais sous son emprise
01:00:12mais c'est bon
01:00:14– Parce que je me posais la question
01:00:16pour être parvenu à embobiner
01:00:18d'une certaine manière quand même pas mal
01:00:20le monde critique avec des films
01:00:22qui j'insiste là-dessus moi il me semble
01:00:24vraiment particulièrement intelligent
01:00:26sur un plan cinégénique
01:00:28est-ce qu'il ne faut pas qu'eux-mêmes
01:00:30y croient à fond à ce qu'ils font
01:00:32c'est-à-dire au fait qu'effectivement
01:00:34ils ont fait de l'art pour l'art
01:00:36que de pousser les comédiennes dans leur dernier retranchement
01:00:38c'était totalement justifié
01:00:40parce que le résultat est à l'écran
01:00:42vous pouvez le voir
01:00:44c'est éclatant
01:00:46– Là tu parles bien sûr
01:00:48mais non tu parles des critiques ou tu parles des réalisateurs ?
01:00:50– Les réalisateurs
01:00:52ils peuvent à la fois comme dit Geneviève
01:00:54avoir une pleine conscience
01:00:56de l'immoralité de leur conduite
01:00:58et se l'auto-justifier
01:01:00en se disant c'est pour l'art
01:01:02– C'est l'art absolument
01:01:04et quant aux critiques
01:01:06et ça rejoint
01:01:08l'aveu
01:01:10de Jacoche et Miller
01:01:12quant aux critiques
01:01:14en fait ils sont en admiration
01:01:16y compris qu'ils s'identifient
01:01:18à
01:01:20ces figures de réalisateurs
01:01:22qui s'autorisent y compris
01:01:24des comportements
01:01:26de séducteurs compulsifs
01:01:28comme le dit Wikipédia
01:01:30à propos de Truffaut
01:01:32qu'eux n'osent pas
01:01:34parce qu'ils n'ont pas le pouvoir social
01:01:36qui leur permet de le faire
01:01:38– Tout les critiques sont défrustrés alors
01:01:40– Non ils ne sont pas défrustrés
01:01:42ils sont dans un contexte
01:01:44où ce type de comportement
01:01:46est valorisé
01:01:48on sait bien qu'en France
01:01:50un homme un vrai c'est un séducteur
01:01:52alors un artiste est un séducteur
01:01:56multiplié
01:01:58– C'est quelque chose que je ne retrouve pas
01:02:00chez des
01:02:02des cinéastes
01:02:04dits
01:02:06je mets des guillemets virils
01:02:08on n'entend pas parler
01:02:10de ces histoires-là par rapport à des John Ford
01:02:12ou des Andrew McLaglen
01:02:14ou même des James Cameron
01:02:16etc.
01:02:18dans leur rapport aux femmes
01:02:20c'est quelque chose
01:02:22– C'est quelque chose qu'elle ne parlait pas
01:02:24– Non mais ce que Geneviève
01:02:26a point du doigt aussi
01:02:28dans ce cinéma d'auteur
01:02:30c'est justement cette figure
01:02:32du réalisateur fragile
01:02:34qui du coup recourt à la perversité
01:02:36pour établir
01:02:38son pouvoir sur la femme
01:02:40au lieu justement de passer par un pouvoir de séduction
01:02:42plus traditionnel on va dire
01:02:44– Sans doute l'écart
01:02:46qu'on voit effectivement
01:02:48des grands classiques hollywoodiens
01:02:50enfin laissons Hitchcock de côté parce que lui
01:02:52dans la perversion il était assez bon
01:02:54– Oui mais alors physiquement c'était pas non plus
01:02:56– Oui mais justement il utilisait le cinéma
01:02:58comme moyen d'emprise
01:03:00sur T.P. Edron en particulier
01:03:02mais quand on évoque John Ford
01:03:04évidemment la grande différence
01:03:06c'est que le cinéma d'auteur
01:03:08met au poste de commande
01:03:10les fantasmes du réalisateur
01:03:12alors que John Ford
01:03:14il raconte l'épopée de l'Amérique
01:03:16et même Scorsese
01:03:18il raconte l'épopée de l'Amérique
01:03:20donc c'est aussi
01:03:22le problème
01:03:24de ce cinéma français intimiste
01:03:26qui en fait
01:03:32se limite
01:03:34à répéter film après film
01:03:36les fantasmes
01:03:38du réalisateur
01:03:40– Petit bourgeois
01:03:42– Ah oui alors petit bourgeois
01:03:44les villas, les appartements
01:03:46les moulures
01:03:48– Capris
01:03:50– Les appartements de 180 m²
01:03:52– Ibiza, Capri, la Provence
01:03:54c'est beau
01:03:56c'est chic
01:03:58bon et aujourd'hui
01:04:00l'équivalent c'est Emmanuel Mouret
01:04:02où tout se passe dans des maisons
01:04:04maisons et jardins dans des revues de déco
01:04:06– Emmanuel Mouret sanctifié
01:04:08par la critique d'aujourd'hui
01:04:10– Ben c'est d'ailleurs ça
01:04:12– Non mais il y a une continuité
01:04:14pourquoi ? Parce qu'il ne parle que
01:04:16il ne parle que d'histoire d'amour
01:04:18surtout aucun
01:04:20ancrage social
01:04:22– Moi je suis allé récemment
01:04:24voir le dernier film d'Emmanuel Mouret
01:04:26son nom m'échappe puis j'en ai vu un ou deux précédents
01:04:28je veux dire
01:04:30moi j'ai été frappé par les appartements par exemple
01:04:32ces gens là claquent des doigts
01:04:34et un appartement
01:04:36et un appartement
01:04:38j'ai cherché si les critiques des films
01:04:40ils faisaient allusion d'une manière ou d'une autre
01:04:42mais personne jamais
01:04:44– C'est un trope comique
01:04:46de ce cinéma d'auteur français
01:04:48et d'ailleurs pour l'avoir discuté
01:04:50l'appartement de 250 m²
01:04:52quand on a étudié en philo
01:04:54mais il y a aussi la question
01:04:56je ne sais plus si c'est encore le cas
01:04:58aujourd'hui mais à une époque
01:05:00de la vente à l'étranger
01:05:02toute l'hypocrisie qui entoure
01:05:04ce cinéma d'auteur
01:05:06puisque ce qui était réclamé
01:05:08par les acheteurs étrangers
01:05:10de ces films d'auteur c'était
01:05:12est-ce que la crise a les seins nus
01:05:14et est-ce qu'on voit la tour Eiffel
01:05:16mais littéralement
01:05:18c'est-à-dire que dans les rues à Cannes
01:05:20c'est comme ça que ces films sont discutés
01:05:22et de temps en temps effectivement
01:05:24ils se permettent un joli appartement haussmanien
01:05:26parce qu'il y a des grandes vitrées
01:05:28– Ou une maison avec un délicieux jardin
01:05:30et des arbres en terre
01:05:32– Et on peut voir un monument bien identifié
01:05:34à travers la fenêtre
01:05:36– Allez on a réglé le compte du cinéma français
01:05:38on changera de sujet la prochaine fois
01:05:42merci à tous les deux
01:05:44merci de nous avoir suivis
01:05:46au prochain Post-Pop