• l’année dernière
Après un an d’expédition, les chercheurs d’OceanoScientific présentent aux lycéens le résultat de leurs pêches miraculeuses. Où l’on s’aperçoit que la Méditerranée va moins mal qu’on le dit.
Manque de chance, Love of the Ocean, leur catamaran de 17 mètres, n’a pu venir jusque Port-Saint-Louis-du-Rhône, bloqué par les intempéries de cette mi-octobre dans le Var. Dommage, il aurait retrouvé son port d’attache en Méditerranée. Là, où, après une première vie suédoise, il est devenu, après un ravalement complet, le porte-étendard d’OceanoScientific. La grisaille et le vent n’ont pas empêché Cécile d’Estais et Justine Camus, vice-présidente et coordinatrice des expéditions de cette association scientifique, de rejoindre le lycée Henri-Leroy, à Port-Saint-Louis, où quelques palanquées d’ados en quête d’un métier posent leurs mines curieuses ou endormies. "L’océan absorbe 30 % des émissions de CO2 et produit de l’oxygène, indique la première. Seuls 1 à 3 % des organismes marins sont connus. Notre idée est de vous guider vers les nouveaux métiers de l’économie bleue." Ils foisonnent et font rêver.

L’objectif de la visite pour OceanoScientific n’est donc pas de présenter uniquement leurs étonnants travaux. Certains élèves reconnaissent timidement s’intéresser aux métiers de la mer et pêcher régulièrement. Un lycéen lève la main, il aimerait être entomologiste. Sauf qu’ici, il ne s’agit pas d’insectes, mais de poissons, voire d’éponges et d’invertébrés. Les mêmes que les scientifiques sont allés traquer en 2023, avant de recommencer cet été, non loin de nos côtes, dessinant un trait de Menton, près de la frontière italienne, à Banyuls, en Catalogne, en passant par la Corse.

"270 espèces de poissons différentes, dont 17 sont en voie d’extinction"
Sur une cinquantaine de sites long d’un mile nautique, soit près de deux kilomètres, ils ont plongé un filtre pendant trente minutes à des profondeurs variant de quinze à trente mètres. "C’est ainsi qu’on a pu récupérer l’ADN issu des écailles, des épines, du mucus ou des sécrétions des poissons passés par cette zone les vingt-quatre heures précédentes, explique Justine Camus, par ailleurs plongeuse professionnelle. On a identifié, au total de l’expédition, 270 espèces de poissons différentes, dont 17 sont en voie d’extinction, selon l’UICN." Un inventaire inédit. "L’ADN est plus exhaustif, plus précis, plus facile à mettre en œuvre que les méthodes classiques, il a permis de tracer six fois plus d’espèces qu’avec des plongeurs", explique le chercheur montpelliérain David Mouillot, directeur scientifique de l’expédition.
Transcription
00:00On a eu de jolies découvertes, notamment le requin à peau bleue,
00:04qui est un requin qui a été recensé 11 fois au total dans le cadre de la mission BiodiveMed,
00:09et notamment une fois lors d'un transect réalisé dans le cadre de notre expédition,
00:16en juillet 2023, à proximité de CET.
00:19Donc c'était une grande première de le retrouver dans cette zone de la Méditerranée.
00:24C'est une expédition réalisée dans le cadre de la mission BiodiveMed,
00:28et dans le cadre de cette expédition, on vient collecter de l'ADN environnemental
00:32le long du littoral méditerranéen français.
00:39L'ADN environnemental, c'est tous les brins de particules d'ADN que les organismes marins,
00:44et nous on s'intéresse particulièrement aux poissons,
00:46ils viennent relâcher dans leur environnement aquatique,
00:50donc ça va être du mucus, de la peau, des excrétions, ça peut aussi être des écailles,
00:55et tous ces brins d'ADN, ça va nous permettre de réaliser un inventaire des espèces
00:59qu'on retrouve sur les sites sentinelles de biodiversité marine,
01:02sur lesquels on vient filtrer l'eau.
01:10Cet inventaire, il nous permet de mieux connaître la biodiversité marine
01:14le long de notre littoral méditerranéen.
01:16Donc on peut par exemple mieux connaître les espèces présentes sur un site,
01:20et sur des espèces qui sont protégées ou qui ne le sont pas,
01:24on va venir créer de nouvelles aires marines protégées, de nouvelles zones protégées,
01:28pour mieux préserver notre biodiversité.
01:30L'idée, c'est de revenir chaque année sur les mêmes sites,
01:32ils sont au total de 60 le long du littoral méditerranéen français,
01:36et revenir sur ces sites, et on va essayer de les protéger.
01:46On est sur ces sites pour étudier l'évolution de la biodiversité marine,
01:49donc est-ce qu'on a de nouvelles espèces ?
01:51Parmi ces espèces nouvelles qu'on recense, est-ce que certaines sont en déclin ?
01:56Est-ce que certaines sont des espèces dites invasives ?
02:03Pour le moment, on a accès aux résultats des prélèvements de 2023,
02:07les résultats de 2024 auront lieu en juin 2025, il y a un petit temps de séquençage,
02:12c'est sur les 700 prélèvements au total qui ont été réalisés en 2023,
02:16dont 104 par l'association aux sateaux scientifiques.
02:19On a eu plus de 170 espèces de poissons qui ont été recensées.
02:23Parmi ces 170 espèces de poissons, on a 17 poissons qui sont présents sur les listes IUCN
02:29parce qu'ils ont un danger critique d'extinction.
02:32Et sur ces résultats, on a eu de jolies découvertes,
02:35notamment le requin à peau bleue,
02:38un requin qui a été recensé 11 fois au total dans le cadre de la mission BiodiveMed,
02:43et notamment une fois lors d'un transect réalisé dans le cadre de notre expédition,
02:49en juillet 2023, à proximité de CET.
02:53Donc c'était une grande première de le retrouver dans cette zone de la Méditerranée.
02:58C'est également le cas du requin-ange qui a été retrouvé sur 9 occurrences sur la côte ouest de la Corse.
03:06C'est des bonnes nouvelles parce que c'est des espèces de poissons,
03:09ces requins qui étaient d'abord en voie d'extinction,
03:13mais aussi qui étaient pu recenser sur la Méditerranée française,
03:18et donc on est vraiment ravis de ces résultats.
03:25En Méditerranée, il y a certaines espèces dont on sait qu'elles sont endémiques,
03:28qu'elles sont nulles par ailleurs, qu'elles sont propres à la Méditerranée,
03:31mais aussi des espèces qui sont nouvelles, et notamment des espèces qui sont dites invasives,
03:38comme la dorade coryphène, comme le crabe bleu, ou encore comme le poisson lapin.
03:43Ces espèces-là, on va aussi pouvoir les recenser grâce à l'ADN environnemental.
03:48Et c'est des espèces qui vont être importantes de recenser en amont au début de leur arrivée,
03:52soit par le détroit de Gibraltar, soit par le canal de Suez,
03:55parce que c'est au début de leur arrivée qu'il est important d'agir,
03:58également pour les pêcheurs, d'adapter leurs techniques de pêche,
04:01ou de savoir qu'elles sont présentes, et si possible de les pêcher pour éviter leur multiplication.

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