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Les Etats généraux de l’information se sont terminés en septembre 2024, après avoir été lancés en octobre 2023 par Emmanuel Macron. Ils formulent des recommandations non contraignantes, comme l’obligation pour un actionnaire de média d’informer la rédaction sur son intention de désigner un nouveau directeur de la rédaction. Le président de son comité de pilotage, également président d’Arte, Bruno Patino, est venu présenter ces conclusions devant les sénateurs de la commission de la culture le 4 décembre. Revivez leurs échanges. Année de Production :

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00:00:00Bonjour à tous, bienvenue dans 100% Sénat. Aujourd'hui, l'audition de Bruno Patino,
00:00:15président du comité de pilotage des États généraux de l'information. Quel bilan ? Retenir justement
00:00:21de ces États généraux 11 mois de travail, un rapport de 350 pages et 15 propositions pour
00:00:27permettre, selon Bruno Patino, de défendre des vérités factuelles face à des contre-vérités
00:00:32qui minent le débat public. Je vous propose de voir cette audition sur notre antenne.
00:00:35D'abord, une des premières choses qui me semblent importantes, c'est que ce dispositif
00:00:40qui a été voulu en 2023, qui a été lancé par le président de la République, l'inspiration de
00:00:51Christophe Deloire que vous avez mentionné était extrêmement forte. En fait, on voit que ce
00:00:56dispositif commence, si j'ose dire, soit de façon logique ou pas, à soit faire des petits ou soit
00:01:03avoir de l'écho. J'en veux pour preuve le rapport de la Chambre des Lords publié il y a quelques
00:01:08jours sur l'état de l'information aujourd'hui, les démarches qui sont en train d'être imaginées
00:01:15dans plusieurs pays d'Europe, voire plusieurs pays d'Amérique. Je pense à l'Amérique latine,
00:01:18à ce sujet-là. Ce qui montre bien que, à la question « mais qu'est-ce qui se passe avec
00:01:23l'information ? », c'est une question aujourd'hui assez universelle, importante et qui dépasse
00:01:28largement le cadre de nos frontières. C'est une question qui, en réalité, pose en filigrane la
00:01:41question de nos espaces publics, au sens voulu par Habermas, c'est-à-dire de la qualité de
00:01:49dialogue citoyen dans nos espaces publics, fondée sur une réalité partagée, donc sur des faits qui
00:01:55soient partagés et avérés, tant l'information permet ce débat autour d'une même réalité. C'est-à-dire
00:02:03que des opinions différentes puissent débattre autour d'une même réalité partagée. Et donc
00:02:08aujourd'hui, entre guillemets, ce qui se passe avec l'information inquiète bien au-delà du monde
00:02:18des médias ou du monde des journalistes. Ça inquiète de nombreux pays, parce qu'on sent bien que la nature
00:02:25même de l'espace public, aujourd'hui, est menacée par ce qui se passe autour de l'information.
00:02:32Alors le dispositif, vous en avez parlé, c'était un dispositif qui se voulait avant tout un dispositif
00:02:39de délibération commune, délibération à au moins deux ou trois niveaux. Le premier niveau, 50-60
00:02:46personnes qui, au sein de groupes de travail de provenance diverse, journalistes, éditeurs de médias,
00:02:55universitaires ou autres, débattent de questions précises. Chacun des groupes de travail étant
00:03:01évidemment un lieu de débat et d'audition autour de sujets particuliers. Il y avait cinq groupes de travail.
00:03:06Vous avez les rapports dans le rapport général. Chacun avait, si j'ose dire, un peu son sillon à creuser.
00:03:13Vous aviez les rencontres citoyennes aussi, dans lesquelles les citoyens, dans un espace de délibération,
00:03:21s'ouvraient aussi, questionnaient. Et puis le comité de pilotage qui essayait non pas de faire la synthèse de tout ça,
00:03:29mais de proposer... Non pas de valider ou d'invalider, mais de proposer ce qui pouvait être une vision
00:03:39relativement commune et structurée. Juste deux choses par rapport à ça. La première, c'est qu'au total,
00:03:50ce qui ressort de l'ensemble de ces auditions de travaux, c'est une inquiétude partagée, une inquiétude très profonde
00:03:58autour, aujourd'hui, de l'information. Mais avant cette inquiétude-là, vous dire quand même que beaucoup d'auditions
00:04:07montrent un rapport relativement dégradé de la confiance dans le monde informationnel à 3 niveaux.
00:04:14Si je prends les 3 niveaux qui sont les nôtres entre les journalistes professionnels, les citoyens et – on va dire –
00:04:20les éditeurs ou les patrons de médias, on constate quand même dans les auditions une confiance dégradée,
00:04:28quelquefois une défiance, j'allais dire, entre ces 3 acteurs-là. Ce qui veut dire qu'à un moment donné,
00:04:33pour rétablir quelque chose dans ce domaine, il faut donner des outils ou des instruments qui permettent de rétablir
00:04:42la confiance des citoyens envers l'information, la confiance des journalistes peut-être envers les patrons de médias,
00:04:48la confiance des patrons de médias envers les citoyens, les journalistes. C'est un triangle.
00:04:54Dans ce contexte général, vous avez aujourd'hui – on a essayé de les résumer comme ça – 4 phénomènes
00:05:01qui touchent le domaine informationnel. Le premier phénomène, c'est celui de la marginalisation de l'information
00:05:08dans l'ensemble – j'allais dire – des signaux, des images, des textes que nous pouvons lire, recevoir ou regarder.
00:05:15L'information a une part de plus en plus congrue – j'allais dire – de l'ensemble des signaux auxquels nous sommes confrontés.
00:05:24Ça paraît congrue dans les réseaux sociaux. Ça paraît congrue de plus en plus forte. Elle est marginalisée de façon assez importante
00:05:32dans l'espace médiatique qui est le nôtre. Le deuxième point important pour nous, c'est que vous avez des outils de polarisation
00:05:42qui sont à l'œuvre. Alors certes, la société peut se polariser à un moment donné. L'espace politique peut se polariser.
00:05:47Mais vous avez aussi des instruments – je pense en particulier aux instruments numériques, aux grandes plateformes numériques –
00:05:53qui accélèrent et amplifient le mécanisme naturel de cette polarisation. On pourrait aussi dire que le modèle économique
00:05:59accentue aussi les invitations à la polarisation. Alors je parle bien d'accentuation. Je ne parle pas de création ex nihilo de la polarisation,
00:06:07qui est évidemment quelque chose qui ressort de phénomènes plus importants, mais d'accentuation et d'amplification.
00:06:14Donc le deuxième point, c'est la polarisation. Le troisième point, c'est la décrédibilisation. Nous avons aujourd'hui un certain nombre
00:06:23d'acteurs qui sont à l'œuvre pour décrédibiliser toute tentative ou toute démarche informationnelle de réalité factuelle.
00:06:32Alors cette décrédibilisation peut venir de l'extérieur, de puissance extérieure, peut venir de l'intérieur, peut venir d'outils ou autres.
00:06:39Cette décrédibilisation est à l'œuvre. Et le quatrième point, qui n'est pas un détail – et vous l'avez mentionné, M. le Président,
00:06:45et je vous en remercie –, c'est la paupérisation du secteur, la paupérisation à double titre, la paupérisation d'abord de ceux qui ont
00:06:54comme activité principale l'information, donc des médias d'information, et la paupérisation aussi des journalistes,
00:07:01c'est-à-dire de ceux qui ont comme métier le fait d'informer. Et je me permets là – parce qu'on y reviendra quand j'aborderai
00:07:08les 3 points que vous avez abordés, M. le Président –, je voudrais juste souligner un point qui me paraît d'importance.
00:07:13Le modèle économique des médias, ça n'est pas la même chose que le modèle économique de l'information.
00:07:19C'est-à-dire qu'on peut tout à fait avoir des médias qui se portent très très bien avec une information qui se porte très très mal.
00:07:25Alors on peut avoir plus difficilement, à l'inverse, une information qui se porte très très bien avec des médias qui se portent très très mal.
00:07:33Mais je veux dire qu'il faut bien, quand on va parler des modèles économiques, bien dissocier ce qui est le modèle économique des médias
00:07:38en sens général, des modèles économiques de l'information. Les médias sont des acteurs économiques qui peuvent rentrer
00:07:46dans un phénomène concurrentiel classique. L'information a un aspect de bien public et philosophiquement de bien commun
00:07:54qui fait que son économie est plus complexe et justifie en raison de ses externalités positives, sans doute,
00:08:01une intervention d'aide publique ou des pouvoirs publics dans ce domaine. Donc ça, c'est les 4 domaines, paupérisation,
00:08:11décrédibilisation, marginalisation et polarisation, auxquels nous avons essayé de les confronter.
00:08:26Et du coup, en conséquence, ça implique une vision un peu holistique des actions qui sont à mettre en œuvre.
00:08:37C'est-à-dire que nous n'avons pas, il nous semble, en tout cas s'il y a un consensus au sein de toutes les personnes
00:08:42qui ont participé aux états généraux de l'information, c'est celui-ci, il faut un ensemble de mesures et non pas une mesure
00:08:48donnée dans un des secteurs donnés. Je pense que c'est ce qui était perçu au tout départ de la démarche états généraux
00:08:56de l'information. Et ça s'est conforté au fil du temps. Il faut un ensemble, un paquet de mesures holistiques
00:09:04qui abordent l'ensemble des problématiques. Et j'insiste sur ce point. Je pense pouvoir dire qu'il y avait un consensus
00:09:14sur cet aspect-là dans l'ensemble des acteurs des états généraux. Il y avait un très fort accord aussi sur le fait qu'il fallait
00:09:19à la fois avoir des actions – j'allais dire – à destination des citoyens, des actions à destination des médias et de leur gouvernance,
00:09:27des actions à destination évidemment de l'espace d'équilibre médiatique pluraliste et des actions envers les plateformes.
00:09:36Après, sur les modalités, il y a pu avoir des discussions. C'est pour ça que nous avons voulu être totalement transparents
00:09:42en publiant l'ensemble des rapports pour bien montrer que sur les modalités ou sur les modalités d'action,
00:09:49il pouvait y avoir de temps en temps des divergences, le plus souvent des nuances. Mais sur cet aspect général des choses,
00:09:56il y avait un accord. Alors la philosophie du comité de pilotage, elle a été... Et après, je vais aborder vos 3 points.
00:10:03Pardon, je suis un peu long. Elle a voulu respecter un équilibre entre 3 libertés. La première liberté, c'est évidemment
00:10:11la liberté pour le citoyen d'être informé sans être manipulé et de pouvoir l'être de façon pluraliste. Voilà. Liberté du citoyen.
00:10:21La deuxième liberté, c'est la liberté du journaliste de pouvoir informer à l'abri du maximum de pressions possibles,
00:10:30que ces pressions soient économiques ou qu'elles soient – j'allais dire – en termes de gouvernance à l'intérieur de sa propre structure.
00:10:36Et la troisième liberté – nous l'avons mentionné dans le rapport –, c'est la liberté d'entreprendre, c'est-à-dire
00:10:41qu'effectivement, un entrepreneur doit pouvoir avoir la liberté d'entreprendre dans l'entreprise qu'il possède à un moment ou un autre.
00:10:50Et donc nous avons essayé... Après, est-ce que nous y sommes parvenus ? C'est une autre question. Mais nous avons essayé d'avoir
00:10:57un ensemble de mesures holistiques, donc 15 plus 2 – et j'expliquerai pourquoi les plus 2 – qui visent à avoir une notion d'équilibre
00:11:04entre ces trois libertés qui nous semblent assez essentielles. Et voilà quelle a été notre philosophie.
00:11:13Après, sur les 3 points que vous avez mentionnés et qui couvrent une grande partie, en fait, des problématiques que nous avons abordées,
00:11:25même si je me permettrais juste de souligner à quel point il nous semble... Et vous ne l'avez pas évoqué, M. le Président.
00:11:34Donc je me permets juste de mettre l'accent, parce que je ne voudrais pas que les premières propositions aient l'air d'être juste
00:11:43des propositions – j'allais dire – d'accompagnement traditionnel d'un rapport. Tout ce qui est à destination de l'éducation aux faits
00:11:50au niveau des citoyens nous semble d'une importance considérable. Alors ce sont des propositions étranges, parce qu'elles font toujours
00:11:57consensus quand on les exprime. Et en même temps, quand on essaye de les mettre en œuvre, elles se heurtent à des difficultés multiples
00:12:05auxquelles il ne m'appartient pas de répondre. Mais je me permets d'insister sans évidemment oublier les autres que cet aspect-là des choses...
00:12:17L'éducation à la réalité factuelle... Je n'ai pas dit l'éducation aux médias, mais apprendre dès le plus jeune âge ce que c'est qu'un fait,
00:12:24ce que c'est qu'une opinion, comment, à un moment donné, on peut être confronté à toutes sortes de messages de désinformation
00:12:30ou des messages humoristiques ou autres nous semble d'être d'une importance considérable, parce que, si vous voulez,
00:12:38nous n'arriverons pas, quel que soit l'état de la régulation, de l'économie ou de l'autodiscipline des acteurs...
00:12:44Il ne me semble pas que nous reviendrons en arrière sur la submersion des messages qui sont les nôtres ou sur notre exposition
00:12:52dès le plus jeune âge à des messages de toute nature. L'intelligence artificielle va accroître cet aspect-là des choses.
00:12:59Et donc il est, me semble-t-il, illusoire de penser que nous arriverons à protéger les plus jeunes ou l'ensemble de nos concitoyens
00:13:09des messages de désinformation ou autres. Et donc ce qu'on appelle chez nous le pre-banking, c'est-à-dire d'une certaine façon
00:13:15le fait à un moment donné d'armer – je mets des guillemets – le citoyen dans sa capacité de discernement,
00:13:22à savoir quand est-ce qu'il est en face d'une information ou quand est-ce qu'il est en face d'une démarche de désinformation,
00:13:27nous semble essentiel. Et ça passe vraiment par le développement dès le plus jeune âge d'une culture des faits qui nous semble très importante.
00:13:36Je ferme la parenthèse qui n'en est pas vraiment une, parce qu'encore une fois, je le redis, ce sont des propositions
00:13:42qui semblent consensuelles dans leur expression ou dans leur exposition et qui sont souvent de très grandes difficultés
00:13:50quant à leur mise en œuvre. Et elles nous semblent fondamentales aujourd'hui. Donc les trois propositions que vous avez évoquées,
00:13:56M. le Président – et je vous remercie de l'avoir fait – sur l'économie générale des médias ou plus exactement de l'information,
00:14:06cette conviction qui est la nôtre qu'aujourd'hui, d'une certaine façon, vous avez une économie générale des médias,
00:14:19des médias d'information qui est terriblement fragilisée. Un très grand nombre d'acteurs sont aujourd'hui dans une situation
00:14:30de très grande fragilité, des acteurs de presse régionaux, des acteurs de presse nationaux, des acteurs audiovisuels potentiellement à terme.
00:14:42Mais on voit cette fragilisation. Et cette fragilisation, on va dire qu'elle se traduit par deux choses.
00:14:53La première chose, c'est que nous avons vu comment, petit à petit, l'ensemble de la ressource publicitaire est aujourd'hui captée,
00:15:01j'allais dire de façon quasiment automatique et naturelle – naturelle, j'y reviendrai par les grandes plateformes –
00:15:09et que d'une certaine façon, à un moment donné, soit on arrive à faire diverger ce flux-là ou l'atténuer,
00:15:22soit on en rentre dans un mécanisme de distribution, mais que la ressource publicitaire, il n'y a aucune raison qu'à terme,
00:15:28on pense que naturellement, elle revienne vers les médias d'information. Et par ailleurs, les modèles d'abonnement,
00:15:34tels qu'on les voit aujourd'hui, sont plutôt réservés à une minorité d'acteurs et que si, en plus, ils devaient se généraliser,
00:15:42non seulement ils seraient réservés à une minorité d'acteurs mais sans doute aussi à une minorité de nos concitoyens.
00:15:48Et donc le fait de pouvoir informer, j'allais dire, la plus grande partie des citoyens de façon ouverte serait remis en cause.
00:15:58Alors ça justifie évidemment – et ça rentrait pas dans le périmètre des États généraux de l'information – le maintien d'un fort service public pour l'information.
00:16:06Mais en ce qui concerne le modèle économique, il nous a semblé qu'à un moment ou un autre, si on ne s'attaquait pas à la ressource publicitaire,
00:16:15nous n'arriverions pas à donner des perspectives d'indépendance économique pour les acteurs qui font de l'information.
00:16:21Donc deux propositions mentionnent ou plutôt adressent le problème. La première, qui est d'essayer d'atténuer la surprime aux plateformes
00:16:35en ce moment publicitaires par ce qu'on appelle la création de la responsabilité démocratique. Donc il s'agit de dire à un moment donné
00:16:41que les acteurs qui font de l'information – et on reviendra après sur la proposition de labellisation, parce que c'est comme un Rubik's cube.
00:16:48Nos propositions, elles se complètent les unes avec les autres – doivent pouvoir bénéficier d'une certaine façon de l'exercice par les acteurs économiques,
00:17:00qu'ils soient privés ou publics, de leur responsabilité démocratique. Et donc nous proposons que cette responsabilité démocratique
00:17:07s'ajoute à la responsabilité environnementale et sociale, et qu'il y ait une transparence, un véritable fléchage des investissements publicitaires
00:17:16de tout annonceur en disant « Voilà, cette année, X% de mes investissements publicitaires en tant qu'annonceurs ont été consacrés
00:17:23à l'exercice de ma responsabilité démocratique, donc sur des médias d'information ». Il n'y a pas de sanction prévue.
00:17:28Mais c'est... On va dire... Pour reprendre un terme anglais, c'est du « praise ». Mais on a vu que dans le terme de la RSE,
00:17:37ça avait véritablement des impacts positifs. J'ajoute quelque chose qui n'est pas mentionné dans le rapport.
00:17:46C'est que si, à un moment donné, on a une transparence sur le fléchage des investissements publicitaires,
00:17:56il faudra à un moment ou à un autre avoir une transparence sur les conditions tarifaires ou les expositions des publicités,
00:18:05ce qui amènera à un moment ou à un autre à une étude de la loi Sapin I qui, vous le savez d'une façon ou d'une autre,
00:18:12a tendance à – sans l'avoir voulu, évidemment – privilégier aujourd'hui l'investissement publicitaire sur les plateformes
00:18:17plutôt que l'investissement publicitaire dans les médias d'information. Et donc cet aspect-là des choses...
00:18:24C'est le premier étage de la fusée qui vise à dire à un moment donné « Mettons les acteurs économiques devant leurs responsabilités ».
00:18:31Participer à la responsabilité démocratique, donc au bien commun d'un secteur informationnel important, fait partie aussi de leur rôle.
00:18:39Le deuxième point – vous l'avez mentionné, M. le Président –, c'est de dire qu'à un moment donné, nous pensons...
00:18:44Et ça, c'est le comité de pilotage plus que les rapports, comme vous l'avez vu, que nous n'échapperons pas à un mécanisme
00:18:49de redistribution publicitaire. Nous ne sommes pas les seuls à y avoir pensé. Vous aviez une proposition de loi que nous mentionnons
00:18:55à un moment donné, qui a été faite au niveau californien, qui prévoyait une taxation au-delà d'un certain chiffre d'affaires de...
00:19:04Je crois que c'était 6,5% du chiffre d'affaires publicitaires des plateformes au-delà de quelques milliards de recettes publicitaires
00:19:12au bénéfice de l'écosystème informationnel. Et quand ils disaient « L'écosystème informationnel », nous avons repris ça.
00:19:17C'était pas forcément les médias de façon directe. C'était d'un côté l'éducation aux faits et l'éducation à l'information,
00:19:23et de l'autre les médias à partir du moment où ils embauchent des journalistes, c'est-à-dire un allègement de charges
00:19:29ou un allègement du coup d'embauche des journalistes, pour bien dissocier encore une fois ce qu'est l'économie des médias
00:19:34de ce qu'est l'économie de l'information. Mais je pense qu'à terme, nous n'échapperons pas à une nécessité de redistribution,
00:19:43parce que sinon, le modèle économique des médias à terme est menacé. J'ajoute un troisième point. Pardon, toujours sur le modèle économique.
00:19:51Vous m'en voudrez pas de rajouter ce point-là, qui est dans une autre proposition. C'est que peut-être parlerons-nous tous ensemble
00:19:58à un moment donné des droits voisins et de leur évolution. Mais ce qui est mentionné au sein des propositions à l'égard
00:20:06ou plutôt dirigées vers le secteur et non pas dirigées vers les pouvoirs publics, législateurs ou autres, ou régulateurs européens,
00:20:16il nous semble très important de bien pousser cette idée d'urgence qu'à un moment donné, les acteurs qui fondent l'information
00:20:26devront avoir une approche collective de la négociation et de la défense de leurs droits. Le droit voisin, c'est un droit qui est très fortement
00:20:39aspiré du droit d'auteur, c'est-à-dire c'est un modèle d'exposition. J'expose mon information à une paire d'yeux, comme on dirait aux États-Unis.
00:20:48Et donc j'ai rémunération, parce que ce contenu a été exposé à un moment ou à un autre. Alors on a vu... J'y reviendrai pas ici.
00:20:56C'est bien mentionné dans un des rapports la difficulté de le faire respecter, l'opacité de certains acteurs dans des négociations séparées,
00:21:05parce qu'encore une fois, les acteurs ne se sont pas unis au début pour avoir une négociation collective. Donc ils essayent de revenir en arrière un peu,
00:21:13de faire du « retro-engineering », si on peut dire, dans une approche collective. Ils ont raté le coche à ce moment-là.
00:21:22Ils m'en voudront pas, mes confrères et amis, de le dire sur une négociation collective au tout début des droits voisins.
00:21:29L'IA, l'intelligence artificielle, nous fait passer, à mon avis, d'un modèle économique d'exposition à un modèle économique, j'allais dire, de contribution.
00:21:41C'est-à-dire que c'est parce que vos contenus informationnels, à un moment donné, auront contribué au travail d'une IA...
00:21:47Nous aurons tous un assistant personnel à qui nous dirons qu'est-ce qui s'est passé dans le monde aujourd'hui et qui nous fournira de façon
00:21:56auditive, audiovisuelle ou écrite l'information tout en travaillant sur un certain nombre de contenus fournis par des professionnels.
00:22:07Et donc il faudra à ce moment-là que la presse d'information... Quand je dis « la presse », c'est évidemment pas uniquement écrite.
00:22:13C'est au sens de la loi de 81 qu'il faudra que les organes d'information puissent être rémunérés pour la contribution qui aura été la leur
00:22:24quant à ces contenus qui seront générés par les IA. Donc évidemment que cette contribution soit volontaire. Je reviens pas sur l'opt-in ou l'opt-out.
00:22:31Mais que cette contribution soit rémunérée. Et il nous semble aujourd'hui que nous serons incapables d'avoir un modèle général contributif
00:22:41si tous les acteurs ne se mettent pas ensemble. Et c'est une question absolument essentielle. Dans chaque pays du monde, vous avez un acteur
00:22:50qui signe avec OpenAI. Et c'est tout. En France, on a un acteur qui a signé. Les autres sont dans la salle d'attente, si j'ose dire.
00:22:58Et quelquefois même, ils n'ont même pas été reçus dans la salle d'attente. Pardon de cette expression un peu légère. En Allemagne, c'est la même chose.
00:23:05Axel Springer a signé. Les autres téléphonent et ne rendent pas compte. Et donc si on veut avoir à un moment donné le pluralisme des médias d'information
00:23:16qui puissent bénéficier de ce modèle contributif à terme, il faut les encourager très fortement à se mettre ensemble pour avoir une négociation collective.
00:23:26Donc vous verrez que dans les propositions, le fait de contribuer à la création d'instruments collectifs fait partie des propositions importantes,
00:23:32me semble-t-il, des États généraux de l'information. Nous avons hésité en toute transparence à un moment donné. Il y avait des discussions
00:23:40qui avaient lieu entre nous, entre est-ce que c'est au pouvoir public de créer cet instrument collectif ou est-ce que c'est à la profession de le créer.
00:23:47Il nous a semblé que dans une philosophie proche de la loi de 81, c'était très difficile de demander au pouvoir public de les créer,
00:23:53de créer une sorte du CNC ou de centre national de la musique, de l'information, vu du côté de la presse et de ceux qui sont aujourd'hui les enfants de la loi de 1881.
00:24:07Ça serait difficile de le proposer. Mais néanmoins, cet accœur collectif nous semble très important. Sur deux autres points, je vais essayer d'être plus rapide.
00:24:18Pardonnez-moi ma longueur. Sur le statut de la société à mission. Le statut de la société à mission, ça parle à un moment donné d'un état de fait
00:24:27ou d'une conviction qui est nôtre. C'est que la question de la gouvernance des médias d'information est quand même très importante,
00:24:32notamment dans la question de la confiance telle que nous l'avons évoquée à un moment ou à un autre. Et que donc dans cette question de la gouvernance
00:24:39des médias d'information, comme vous l'avez vu, les rapports, notamment le rapport du groupe 3, ont des approches différentes
00:24:54quant à cette gouvernance-là. Il y a deux choses qui nous semblent très importantes. C'est qu'à un moment ou à un autre, la réflexion autour de la gouvernance
00:25:03des médias d'information est une réflexion essentielle. Donc nous avons proposé... Nous, non pas le comité de pilotage, mais le groupe 5,
00:25:12comme vous l'avez vu, propose la généralisation d'un droit de veto en cas de nomination d'un nouveau directeur de la rédaction.
00:25:19Nous avons, en ce qui concerne le comité de pilotage, préféré – j'allais dire – un approfondissement et un élargissement de la loi Bloche,
00:25:27c'est-à-dire un mécanisme qui vise à la généraliser à l'ensemble des médias, à prévoir des amendes réellement dissuasives en cas de non-respect
00:25:35et à en modifier la composition des comités d'éthique pour les rendre paritaires et avoir ce droit d'information.
00:25:43Cette question-là sur les modalités est ouverte. Mais nous avons aussi pensé qu'à un moment donné, avoir un statut spécifique
00:25:50dérivé de la société à mission pouvait être un modèle vertueux pour un certain nombre d'acteurs indépendants et que ce modèle vertueux
00:26:00pouvait à terme être destinataire d'un certain nombre d'aides à la presse dont nous proposons aujourd'hui de les revisiter.
00:26:09En tout cas, qui est une sorte de prime à la bonne gouvernance des médias d'information. Et c'est vrai que la société à mission
00:26:19vise à donner du pouvoir dans cette gouvernance à la fois aux rédactions mais également aux citoyens, à assurer une transparence vis-à-vis des citoyens
00:26:31sur les engagements, les chartes ou autres des différentes sociétés à mission. Donc ça nous semble une piste importante
00:26:39pour un très grand nombre de médias indépendants. Et ça nous semble une piste importante aussi pour les négociations qui peuvent avoir lieu
00:26:46un moment ou un autre dans le contexte de changements capitalistiques de médias d'information. Troisième point. Je sens que je suis trop long.
00:26:56Troisième point sur la concentration. Et je fais pas les 17 si je faisais les 17. Bon. Donc troisième point. On voit bien que l'information,
00:27:08c'est aussi un métier qui dépend de l'économie de l'attention. Et je suis en train de perdre l'économie de l'attention de cet ensemble.
00:27:20Je n'ai pas respecté les règles que je donnais toutes les 9 secondes, une relance. Moi, je suis parti pour toutes les 9 minutes, une relance.
00:27:26Et ça marche pas. Non. Le troisième point sur la concentration, c'est important. Pardonnez-moi. Parce que c'est peut-être une des clés de voûte aussi
00:27:35des EGI que nous proposons. Donc sur la concentration, comme vous le savez, là aussi, ne pas revenir sur – j'allais dire –
00:27:44le fait qu'il y a deux démarches qui se cumulent lorsqu'on regarde les opérations de concentration. Première démarche, c'est une démarche
00:27:54d'analyse de marché. Ça, c'est l'autorité de la concurrence. Et la deuxième démarche, c'est de savoir si une opération de concentration peut
00:28:05à un moment donné menacer ou pas le pluralisme de l'information. Alors vous l'avez bien compris, ce qu'on propose dans le modèle économique
00:28:12de l'information vise à rendre ces opérations de concentration moins subies et plus voulues que subies qu'elles ne le sont aujourd'hui
00:28:21par des fragilités économiques. Mais sur le pluralisme, très clairement, il nous est apparu que la loi de 1986 aujourd'hui,
00:28:28de la part de tous les acteurs, ne permettait plus aux régulateurs, et notamment à l'ARCOM, de garantir une étude réelle des impacts
00:28:37d'une opération de concentration sur le pluralisme. Dans l'ensemble aujourd'hui de l'espace informationnel, ça n'est plus la détention
00:28:48du nombre de radios. Enfin ça n'est plus, j'allais dire, le poids que vous avez sur un silo à un moment donné qui compte,
00:28:56mais le poids que vous pouvez avoir sur l'opinion avec plusieurs médias ou plusieurs instruments qui se font écho les uns avec les autres.
00:29:04Et donc tout le monde était là-dessus. Le consensus absolu des personnes, de tous ceux qui ont travaillé aux états généraux de l'information,
00:29:11c'est qu'il faut une approche holistique. C'est-à-dire à un moment donné voir comment on prend en compte le fait qu'un acteur,
00:29:18quel qu'il soit, puisse avoir des journaux, des radios, des médias numériques importants, à terme des intelligences artificielles importantes,
00:29:28des capacités d'affichage, du poids dans l'édition. En fait, tout ce qui concourt aujourd'hui à l'espace public en termes d'opinion et informationnel.
00:29:37Et donc là-dessus, deux modèles – et c'est là où on rentre sur les modalités – se sont présentés à nous. Un modèle qui nous semblait
00:29:43et qui nous semble toujours à terme extrêmement souhaitable, qui est le modèle britannique Ofcom, où clairement, à un moment donné,
00:29:50vous avez une autorité de régulation qui voit si une opération est « fit and proper » du point de vue du pluralisme et qui regarde
00:30:00sur ces lignes directrices extrêmement bien documentées auparavant l'analyse générale du secteur. Et le modèle allemand, lui...
00:30:12Alors c'était le modèle qui nous inspire, pas ces modalités, puisque ces modalités sont en train d'être révisées aujourd'hui.
00:30:18Le modèle allemand disait dans un premier temps... Comme il faut quand même se baser sur des chiffres, on va prendre des chiffres, j'allais dire...
00:30:26Alors le modèle allemand dit d'audience générale. Nous, on a dit de « rich », c'est-à-dire de votre capacité à atteindre de façon répétée
00:30:33la population en général sur un territoire donné. Donc le « rich » se calcule à peu près dans tout... La télévision le calcule, la presse le calcule,
00:30:42le numérique le calcule. Ce sont des choses qui se calculent aujourd'hui et qui laissent avoir quel est le poids à un moment donné...
00:30:51J'allais dire le poids que peut avoir un groupe, quel qu'il soit, dans... J'allais dire auprès d'une population donnée.
00:31:01Donc les modalités de concentration telles qu'on les a vues, nous proposions, comme vous voyez dans le comité de pilotage...
00:31:09Le groupe 5 proposait le modèle allemand. Le comité de pilotage proposait le modèle allemand dans un premier temps,
00:31:15avant d'arriver au modèle off-com, britannique, une fois que l'ARCOM, le régulateur, aurait discuté et fait ses lignes directrices.
00:31:24Maxence Langlois-Bertelot vous en parlera peut-être. Il y a, à notre connaissance aujourd'hui, un projet de loi à l'étude qui se penche
00:31:34plutôt fortement aujourd'hui sur le modèle britannique off-com plutôt que sur le modèle du « rich ». Mais finalement, c'est des points de détail.
00:31:43L'essentiel est une approche holistique du poids, à un moment donné, d'un groupe, quel qu'il soit, sur l'opinion au vu de tous les instruments
00:31:52qu'il détient et non pas d'une catégorie de médias par rapport à une autre. Pardonnez-moi d'avoir été beaucoup trop long. Merci beaucoup.
00:31:59— Merci, M. le Président. Alors nous allons commencer par une première série de questions de Michel Logier, qui est le rapporteur
00:32:07des crédits budgétaires pour la presse, pour notre commission. — Merci, M. le Président. Permettez-moi tout d'abord d'avoir une pensée
00:32:14pour Christophe Deloire, que j'ai auditionné à plusieurs reprises et qui lui-même m'avait auditionné dans le cadre des EGI. Voilà.
00:32:22M. le Président Patineau, le rapport des EGI évoque la question de la réforme des aides à la presse. En particulier, vous proposez de les utiliser
00:32:31comme levier pour inciter les entreprises de presse à adopter le statut de société à mission, comme vous l'avez expliqué, et à donner en conséquence
00:32:39des garanties d'indépendance. Vous suggérez également de basculer une partie des aides à la diffusion vers des aides à la transition
00:32:46et de l'abonnement numérique, en notant que ce mode d'achat ne bénéficie actuellement d'aucun soutien. Je dois dire que je suis en plein d'accord
00:32:55avec ces positions. Mais je voudrais savoir, premièrement, est-ce que vous avez pu tester ces idées auprès des éditeurs, parce que c'est une réforme
00:33:06avec une enveloppe constante qui fera des gagnants mais aussi des perdants ? Deuxièmement, est-ce que vous avez senti une volonté du gouvernement
00:33:14de progresser dans cette direction ? Pas intéressant de revenir. On l'a déjà évoqué, le sujet, bien sûr, des droits voisins.
00:33:23Donc votre rapport établit clairement qu'ils ne seront pas une source suffisante de revenus pour équilibrer la relation entre les éditeurs
00:33:30et les plateformes. Vous proposez alors de créer des conditions d'une négociation plus équilibrée, une tâche à laquelle notre collègue
00:33:38Sylvie Robert a déjà commencé à s'attaquer avec l'article 7 de sa proposition de loi sur la dépendance des médias. Vous avez évoqué,
00:33:46il y a quelques minutes, des accords collectifs. Mais est-ce que vous pouvez aussi nous développer les leviers que vous estimeriez utiles à mettre en place ?
00:33:56Et en fait, dernière question beaucoup plus large sur le contexte informationnel. Quelles seront, selon vous, les conséquences de l'élection de Donald Trump ?
00:34:06Je pense notamment à la place du réseau X Twitter, mais également à une potentielle tentative de fragiliser les législations européennes. Merci beaucoup.
00:34:17— Je vais laisser répondre à ces trois premières questions dans une troisième à un côté très journalistique propre à Michel Leger.
00:34:25Je vais essayer d'être rapide et franc. Comme vous le savez, les éditeurs ne sont pas toujours unis sur l'ensemble des questions,
00:34:43et notamment, si vous voulez, sur l'évolution des aides à la presse. Mais néanmoins... Donc oui, bien sûr, si votre question, c'est
00:34:56« Est-ce que vos propositions font l'unanimité au sein des éditeurs ? », si je vous faisais une réponse positive, ça vous surprendrait.
00:35:03Et vous me demanderiez de détailler un peu mon propos pour pouvoir vous en apporter la preuve. Non, je pense qu'effectivement,
00:35:11l'ensemble des positions ne sont pas forcément alignées. Il n'en reste pas moins que je pense que sur 3 points, ces derniers mois ont fait évoluer,
00:35:23me semble-t-il, la position d'un grand nombre d'éditeurs. La première chose, dans les faits mêmes, je pense que plus aucun éditeur aujourd'hui
00:35:39ne se dit qu'il s'en sortira sans abonnements numériques, clairement. Vous m'auriez posé la question il y a 3 ans ou 4 ans, j'aurais pas forcément
00:35:49fait la même réponse, et qu'aujourd'hui, tout le monde, aujourd'hui, essaye de voir comment, à un moment donné, réussir à développer,
00:35:58déployer ses abonnements numériques. Et le complément... On voit bien que les modèles économiques de journaux, notamment,
00:36:08s'orientent vers un triple modèle, qui est un peu de publicité – j'espère la publicité –, des abonnements numériques à terme le plus possible, si possible,
00:36:19et troisièmement ce qu'on pourra appeler du B2B. Alors pour certains, ça sera de l'événementiel. Pour d'autres, des courses sportives.
00:36:26Pour troisièmes, des concerts. Pour les quatrièmes, des conférences, etc. Mais on voit bien le modèle, si vous voulez, qui arrive sur un modèle
00:36:33un peu s'équilibrer comme ça. Donc je pense qu'il y a une grande prise de conscience des éditeurs aujourd'hui sur la nécessité de déployer,
00:36:39de développer l'abonnement numérique. Après, sur les aides à la presse, vous le savez bien – et je sais que je suis filmé ici –,
00:36:46souvent, les éditeurs sont beaucoup plus favorables aux aides à la presse quand elles s'ajoutent les unes aux autres plutôt que
00:36:53quand elles se substituent à des aides existantes. Et donc évidemment, si demain, la question, c'était « Est-ce qu'une aide supplémentaire
00:37:03pour la société à mission est bienvenue de la part des éditeurs ? », je vous dirais qu'on fait l'unanimité sur des principes de substitution au moins.
00:37:10Néanmoins, je le redis, je pense qu'à un moment donné, voilà, on n'est pas rentré dans le détail, dans le périmètre des aides à la presse.
00:37:20Effectivement, qu'on puisse prendre en compte la nature de la gouvernance d'un média d'information me semble important.
00:37:25Mais oui, je dois vous avouer, nous ne faisons pas l'unanimité. Sur le deuxième point, qui était celui du gouvernement,
00:37:34je laisserai peut-être Maxime vous dire un peu ce qu'il en est dans la proposition de loi aujourd'hui.
00:37:41Mais il ne me semble pas que pour l'instant, le chantier vraiment de détourage des aides à la presse ait été abordé.
00:37:49Moi, je souhaiterais qu'il le soit. Mais pour le moment, à ma connaissance... Et encore une fois, les EGI ne sont ni législateurs,
00:37:55ni régulateurs, ni rien d'autre. C'était juste un moment de collaboration. Et sur les droits voisins, les modalités, nous, qu'on a choisies...
00:38:06Parce qu'on n'a pas parlé ici de tout un aspect très important. C'est de rééquilibrage des relations vis-à-vis des plateformes.
00:38:13On en a parlé d'un point de vue économique. Mais on n'en a pas parlé, alors que les EGI en parlent, du point de vue du pluralisme des algorithmes,
00:38:22de l'obligation d'affichage. Je pense que sur les droits voisins, ce qu'on propose, nous, c'est de tirer le fil de quelque chose
00:38:30qui s'appellerait un data safe, c'est-à-dire dire à la profession à un moment donné « Mettez-vous ensemble pour collecter et mettre à l'abri
00:38:38vos données qui vous permettent de négocier avec les plateformes ». Et puis à un moment donné, « Mettez-vous ensemble pour négocier ».
00:38:45Mais c'est plutôt de l'encouragement. Ça peut être perçu comme insuffisant. Là aussi, c'est une évaluation du secteur.
00:38:52Moi, je me dis, mais peut-être à tort... Les droits voisins, ils sont tous partis séparés. Aujourd'hui, ils font appel à l'ASSEM
00:38:59pour les aider dans la négociation. Donc je pense que la progression de la nécessité de jouer collectif, là, auprès des éditeurs,
00:39:07est extrêmement importante. Sur l'arrivée de Donald Trump, je ne sais pas. A juste dire, on voit aujourd'hui...
00:39:16Si vous voulez, je vais vous répondre seulement en partie. La grande différence par rapport aux réseaux sociaux entre 2016 et 2024,
00:39:27c'est que d'une certaine façon, les réseaux sociaux ont aidé sans le vouloir Donald Trump en 2016 dans son accession au pouvoir
00:39:35en étant instrumentalisés dans l'économie de l'attention qui pouvait être la leur. Et on a vu ce que ça donnait quand, en 2024,
00:39:41l'un a décidé de le faire volontairement. Donc ça, on voit bien que dans les critères d'action des réseaux sociaux, entre ce qu'on souhaite,
00:39:52nous, c'est-à-dire qu'une régulation qui les empêche – j'allais dire – d'accélérer ou d'amplifier de façon involontaire
00:39:59à cause de leurs mécanismes économiques, des mécanismes de polarisation, il faut aussi voir que de temps en temps,
00:40:05ils peuvent le vouloir volontairement. Et dans ces cas-là, ça ouvre effectivement de façon vertigineuse la question du contrôle de ces réseaux.
00:40:16— Je vais prendre maintenant l'ensemble de vos questions en vous demandant bien sûr de respecter les 3 minutes. Je commence par Sylvie Robert.
00:40:27— Merci, M. le Président. Moi aussi, j'aurais une pensée pour Christophe Deloire, que je connaissais bien.
00:40:34Et je voudrais, M. Patineau, vous remercier pour le travail que vous avez repris et entrepris pour arriver jusqu'au bout de ces EGI qui,
00:40:45je dois l'avouer, m'ont d'ailleurs beaucoup inspiré lorsque j'ai déposé ma proposition de loi. Ce que j'ai trouvé extrêmement intéressant
00:40:52dans le processus, c'est – et vous l'avez dit – l'approche holistique qui en a été faite, c'est-à-dire d'avoir vraiment une vision très large
00:41:01jusqu'aux influences étrangères, puisque avec Catherine Morin de Sailly, nous faisions partie de la commission d'enquête
00:41:06« Influences étrangères ». Et vous avez vu que dans nos préconisations, nous avons intégré toute la dimension médias,
00:41:12informations et souveraineté. Donc ça va très très loin. Alors c'est vrai qu'en vous entendant, puisque nous avons
00:41:21avec mes collègues au Sénat déjà débattu beaucoup des questions que vous avez abordées ce matin par l'examen de ma proposition de loi...
00:41:33Bon, vous le savez, certaines dispositions ont été retenues, beaucoup modifiées. D'autres ont fait l'objet de débats très tendus.
00:41:41Je n'y reviendrai pas. Mais ça reste un véhicule législatif. Mais comme on nous a annoncé un grand projet de loi sur les EGI qui justifiait
00:41:50le fait de ne pas prendre pas mal de la disposition de ma proposition de loi, je voudrais d'ores et déjà vous demander
00:41:56si vous avez été associé ou en tout cas pour travailler ce projet de loi. Que nous attendons, que nous attendions ?
00:42:06Enfin pour l'instant, je ne sais pas ce qu'il va en être. Vous avez commencé – donc je serai très rapide – par l'éducation aux faits,
00:42:15à la réalité factuelle. Vous n'avez pas parlé d'éducation aux médias. Très intéressant. Alors s'il vous plaît...
00:42:25On parle beaucoup d'éducation aux médias. On se dit avec beaucoup de collègues qu'on l'a votée. Ça n'avance pas.
00:42:32Alors même que je pense que nous considérons aujourd'hui que cette éducation à l'esprit critique et aux médias est absolument essentielle
00:42:41dans notre société contemporaine et dans le monde géopolitique très très compliqué que nous vivons. J'aimerais du coup,
00:42:51puisque vous parlez éducation aux faits, un peu à la Géraldine Mühlmann. Sur son ouvrage, c'était vraiment la question factuelle.
00:42:59Je voudrais savoir si vous avez eu un retour de la part de l'éducation nationale et surtout comment vous envisagez vraiment cette éducation ?
00:43:06Est-ce que ce serait un parcours ou alors une éducation obligatoire à l'école comme dans certains pays aujourd'hui ?
00:43:13Quelle place vous accorderiez aux journalistes, aux associations, aux membres de la société civile dans le dispositif ?
00:43:19Finalement, on parle beaucoup de cette éducation aux médias. Mais on n'a absolument aucune évaluation aujourd'hui.
00:43:24Et personne ne dessine de chantier très précis sur ce qu'elle pourrait être et surtout sur ce qu'elle devrait être.
00:43:34Vous avez – deuxième question, j'irai très vite parce que vous en avez parlé – cette contribution obligatoire des plateformes numériques
00:43:41ciblées sur la publicité digitale. Et vous avez raison. Ça participe de la « consolidation économique » qu'on pourrait imaginer pour les médias.
00:43:55Est-ce qu'il faut privilégier, pensez-vous, une approche européenne sur le sujet ou faut-il immédiatement que nous, au niveau national,
00:44:02nous nous emparions de ce sujet ? Et deuxième question, vous avez parlé de la loi californienne.
00:44:08Vous parlez aussi dans vos travaux de la loi canadienne. J'aimerais que vous nous expliquiez pour vous quel serait finalement
00:44:17le chemin que nous pourrions emprunter et d'aventure au niveau national. Et enfin, vous parlez du secret des sources.
00:44:26Vous restez très prudent. Et je le comprends tout à fait. Nous avons été prudents sur la protection du secret des sources ici au Parlement,
00:44:33même si l'article est resté. Pensez-vous que conférer une pleine portée au principe de protection des sources sans ouvrir le dossier du secret des affaires
00:44:49ou du secret des fences, de cette pluralité des secrets, est-ce que vous savez si un travail interministériel a été déjà engagé,
00:44:56si cette question qui est extrêmement importante est déjà en tout cas prise en charge par les ministères, peut-être en vue de ce fameux projet de loi ?
00:45:09J'aimerais finalement savoir où on en est aujourd'hui sur cette question importante, mais que je considère très sensible et très délicate. Je vous remercie.
00:45:17— Catherine Morin, de Sailly. — Merci, M. le Président. Je ne peux que me joindre aux propos de mon collègue Michel El-Jougy,
00:45:25de mon collègue Sylvie Robert et avoir une pensée pour Christophe Deloire qui, je dois le dire, travaillait de très longue date avec le Sénat.
00:45:36Je vous récite aussi les travaux qu'il a accompagnés de notre Commission des affaires européennes dans l'élaboration des textes de régulation
00:45:45des réseaux sociaux et bien antérieurement à cela la vision qu'il avait du nouveau numérique dans lequel nous étions entrés.
00:45:55D'abord, me réjouir des conclusions de ces états généraux, de l'information où j'ai eu le plaisir, où j'ai pu participer aux conclusions,
00:46:07ce qui était extrêmement instructif avec plusieurs collègues ici présents. Saluer la démarche qui a eu le mérite, je trouve, de, en quelque sorte,
00:46:19faire la synthèse de très nombreux travaux divers et variés qui avaient été réalisés par des parlementaires de plusieurs commissions, des deux assemblées
00:46:28et, en quelque sorte, mettre les choses en perspective, ce dont nous avions besoin. Donc je rejoins l'approbation de cette vision holistique du sujet.
00:46:41Et on voit qu'il y a plusieurs chantiers qu'il convient de continuer à mener. Parmi ces chantiers, il y a ce qui est évoqué qui est d'approfondir
00:46:52la législation européenne en la matière. Je veux citer ici notamment le DSA, le statut des plateformes, qui, pour l'instant, n'ont toujours pas de statut officiel.
00:47:03C'était le combat d'ailleurs de Christophe Deloy, faire en sorte que les plateformes disposent d'une véritable responsabilité, de redevabilité,
00:47:10un statut amichement entre hébergeurs et éditeurs. Ça fait partie des préconisations du rapport. Sachez que la Commission des affaires européennes,
00:47:20dont nous sommes deux co-rapporteurs ici, a bien entendu, dans ses propositions de résolution, dans l'analyse qu'elle a faite du DSA, a proposé,
00:47:30avait déjà formulé ses propositions. Donc nous sommes bien sûr dans le suivi de l'application aujourd'hui du DSA, extrêmement attentifs.
00:47:38À tout moment, comment on pourrait l'améliorer ? Tout comme nous sommes dans le suivi de l'application aussi de l'acte sur la liberté des médias.
00:47:46D'ailleurs, ce n'est pas un hasard. Ces travaux ont été menés au niveau européen au moment où, en France, on se questionne aussi sur le devenir
00:47:53de nos médias, de nos démocraties, de l'avenir du pluralisme de celle-ci. Moi, ce qui me préoccupe beaucoup – et je rejoins les questions formulées
00:48:05par les précédents orateurs –, c'est le pouvoir immense conféré aux plateformes qui deviennent les agents, en réalité, de certains États
00:48:16qui ne veulent pas du bien. J'en veux pour preuve la plainte que RSF a déposée contre le réseau X, accusé d'avoir laissé en ligne de la propagande russe
00:48:29en usurpant l'identité de RSF. Donc les choses sont assez graves. Et les faits se sont démultipliés ces dernières semaines.
00:48:37Je vous récitais bien sûr la manipulation des élections en Roumanie, rendue possible par TikTok. Bien entendu, le défi et la provocation continue
00:48:51d'un Elon Musk par rapport à l'application du DSA pour Twitter. Et enfin, Google, qui est poursuivi par la justice française pour non-application
00:49:03des droits voisins. Donc ça fait beaucoup, quand même, ces dernières semaines, comme l'actualité, je trouve, qui nous démontre que, finalement,
00:49:09la question de la régulation des plateformes, elle n'est certainement pas terminée. Et qu'il va falloir, au-delà de la question de la juste redistribution
00:49:19de la publicité, qui est bien entendu un combat qu'il faut que nous menions ensemble, il y a ce sujet de l'application de la réglementation européenne.
00:49:29Je voulais particulièrement insister là-dessus. Le deuxième sujet sur lequel je voulais insister, c'est l'éducation aux médias, qui est un peu le serpent de mer.
00:49:35C'est-à-dire que depuis des années, ici, au sein de cette commission Tout le monde confondu, on ne fait que redire l'importance de l'éducation aux médias.
00:49:43Et finalement, on a du mal à voir... On sait que les équipes sont ténues. Le Clémy, c'est pas beaucoup de personnes. Bon. Mais comment on peut en faire
00:49:53vraiment un enjeu important au sein de l'éducation nationale, à la limite transdisciplinaire, parce que je pense qu'il revient à chaque enseignant de pouvoir aussi,
00:50:01à tout moment, alerter ses élèves et souligner que cette éducation aux médias, en fait, elle se conjugue à l'éducation au numérique, en réalité,
00:50:11parce que quand on ne sait pas comment l'écosystème fonctionne et comment on peut se prémunir des abus constatés sur les plateformes, c'est difficile aussi
00:50:20d'avoir cette sensibilité aux médias et aux avis factuels. Donc moi, je pense que peut-être notre commission, M. le Président, aurait intérêt
00:50:30à faire peut-être une formation sur ce sujet pour qu'on en finisse et qu'on trouve enfin les propositions à faire dans l'exigence aussi des réponses
00:50:39qu'on n'a jamais quand on demande où est-ce qu'on est la formation des formateurs à cet égard. Je vous remercie.
00:50:44Pierre Osuyas. — Merci, M. le Président. Vous avez raison, M. le Président. Dans une journée qui va être riche en émotions et en prises de positions
00:51:00un peu diverses, il est important que la Commission de la culture du Sénat reste sur l'essentiel et sur le travail de fond,
00:51:09quels que soient les aléas de la journée, c'est le travail que nous faisons ici qui restera. Et je voulais vraiment saluer l'importance de votre réflexion,
00:51:20M. Patineau. J'ai lu avec plaisir vos écrits. Alors le Régis naburgien que je suis salue aussi un voisin. Mais ça, ça reste privé.
00:51:35Mais ce que je salue surtout dans votre parcours, c'est celui d'un grand comité de l'État, parce que j'ai la certitude qu'il existe
00:51:44un service public de l'information. Et vous avez été et vous êtes encore au service de cet audiovisuel public qui essaye de donner du sens
00:51:55à l'information. Je pense que c'est fondamental. Vous avez cité Habermas. Et je vous suis totalement. Il peut pas y avoir de démocratie
00:52:05sans s'entendre sur un minimum de règles de la constitution de ces informations. Et c'est bien, à mon avis, l'enjeu philosophique du moment.
00:52:14Et qu'il y a... On a parlé de Trump et de Elon Musk. Il y a la réussite d'un modèle qui considère avec une vision très libertarienne
00:52:25du monde qu'il est interdit d'interdire, c'est-à-dire qu'on doit offrir à certaines plateformes la totalité des pouvoirs dont elles disposent
00:52:38sans aucune règle, sans aucune règle déontologique, sans aucune régulation, sans aucun État, sans rien. Et ça, ça met en difficulté
00:52:47notre vision du monde et notre système républicain, parce que ça touche finalement au fond le statut de la vérité et qu'il n'y a plus
00:52:59de possibilité pour un citoyen de mesurer les différents statuts de vérité de l'information. Tout se vaut. Tout se vaut.
00:53:09Et il y a une forme de crise de la raison critique qui est générale. Et je pense que revenir par la pédagogie au sein des cours
00:53:21est une très bonne chose. Mais malheureusement, c'est insuffisant, parce que ça doit concerner une démarche collective.
00:53:28On a besoin d'un nouvel humanisme pour faire face à une déferlante qui est triomphante et qui va pas s'arrêter à l'Atlantique.
00:53:38C'est évident qu'Elon Musk et Trump vont mener une lutte acharnée contre ce que nous considérons, nous, comme des formes de régulation
00:53:48qui sont constitutives de notre démocratie. « Information », ça vient du latin « informare », qui veut dire « donner de la forme ».
00:53:58Et je considère qu'on peut pas donner de forme sans accepter un minimum de règles. Et je pense que c'est l'enjeu fondamental de la période.
00:54:09Pour en revenir à l'intelligence artificielle, parce que je crois que c'est en effet très intéressant de se questionner sur ce qu'elle est,
00:54:18l'intelligence artificielle a un modèle algorithmique, statistique qui ne différencie pas la bonne information de la mauvaise information.
00:54:27C'est-à-dire qu'elle ne donne aucune valeur à la constitution d'une information vérifiée. L'information vérifiée, l'information non vérifiée ont la même valeur.
00:54:37Et c'est sur cette base-là que les prix se font. Donc on est face à quelque chose qui est redoutable. Moi, j'ai très peur qu'on soit emportés
00:54:49par un modèle qui nous vient de l'Atlantique. Et je crains que la France soit très seule pour s'opposer à ce mouvement-là.
00:54:59Je n'imagine pas qu'on puisse opposer à ce qui se passe autre chose qu'une réponse européenne. Et c'est le sens de ma question.
00:55:11Comment on peut, sur la base des travaux et de votre bilan partagé, aujourd'hui, essayer de fédérer un certain nombre d'États européens
00:55:21pour aller plus loin dans la régulation ? Parce qu'on a besoin de règles. Et quand je dis des règles, c'est pas uniquement des règles normatives.
00:55:28C'est des règles déontologiques et c'est des règles philosophiques. Et je pense qu'il faut revenir aussi au droit, et que le droit peut être
00:55:37un bon moyen d'opposer un certain nombre de règles. J'en finis là, M. le Président. Et je crois que la responsabilité des plateformes, aujourd'hui,
00:55:47c'est un objectif à court terme qui est tout à fait social. Merci, M. le Président.
00:55:51— Monique de Marco. — Merci. Merci, M. Patineau. Je dois dire que j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt les EGI.
00:56:01Au départ, j'étais très très sceptique. Mais au final, je vois qu'il y a eu un travail de concertation, un travail d'analyse, et très très intéressant.
00:56:12C'est que beaucoup de propositions des groupes de travail sont aujourd'hui sur la table. Je dois dire que les recommandations que vous avez faites,
00:56:19certaines rejoignent donc ce qui est issu de la commission d'enquête sur la concentration des médias que nous avions faite ici au Sénat.
00:56:26Je ne vais pas revenir sur le constat, parce qu'il faut qu'on avance. Mais j'ai quand même certaines choses à dire concernant donc les EGI,
00:56:34qui ont donné une feuille de route claire pour protéger, comme vous le dites, et développer le droit à informer.
00:56:40Et je m'étonne – là, je me permets de faire quelques remarques – vraiment que, face à l'urgence de la situation, nous n'avons pas su saisir ici,
00:56:48à la commission et au Sénat, toutes les opportunités parlementaires pour avancer sur ce sujet. Je pense en particulier à la proposition
00:56:55de ma collègue Sylvie Robert. Elle aurait pu servir de véhicule législatif pour passer un certain nombre de propositions issues justement des EGI.
00:57:04C'est le cas, semble-t-il, de la lutte contre les procédures Bayon, amendement qui a été déclaré irrecevable, car sans lien avec le texte.
00:57:13C'est le cas aussi de la liabilisation des influenceurs, également. C'est le cas de la réforme de la gouvernance des médias,
00:57:20la question de la personnalité juridique et des droits des rédactions. Je reviens aussi sur votre première proposition des EGI.
00:57:29Certains en ont parlé, qui était de faire de l'éducation à l'esprit critique et aux médias et aux faits une priorité pour l'école.
00:57:37J'ai été précédemment enseignante, et je connais vraiment tous les efforts qui ont été déployés par mes collègues enseignants sur ce sujet.
00:57:44Et je dois dire que l'éducation au numérique, qui devrait être indispensable dès la rentrée en 6e, a été, par une réforme précédente,
00:57:54il y a 2 ans, dans la technologie, réforme de technologie en 6e, totalement éliminée. Ayant été par ailleurs enseignante en technologie,
00:58:02c'était la première mission que j'avais par rapport aux élèves de 6e, c'est-à-dire de leur enseigner justement l'accès au numérique.
00:58:10Et je pense que ce serait quelque chose qu'il faudrait reconsidérer aussi au sein de la Commission, comment on peut faire rentrer justement l'éducation aux faits,
00:58:17l'éducation aux médias, dans justement l'enseignement, peut-être même avant dans le primaire, mais déjà en 6e.
00:58:23Je trouve qu'au niveau du collège, ça serait quelque chose d'insuspensable à pouvoir réintroduire en lien avec l'éducation nationale.
00:58:32Toujours est-il que, justement, il y avait dans des crédits de transformation pour l'audiovisuel public qui étaient prévus dans ce programme.
00:58:40Il y a un abonnement que nous n'avons peut-être pas discuté donc vendredi matin lors du PLF supprimer justement les crédits pour justement l'éducation aux médias.
00:58:58Donc je pense que nous avons aussi à montrer comment on peut soutenir ces propositions-là et non pas supprimer des crédits qui étaient donc consacrés à ce sujet.
00:59:08Je voudrais revenir sur l'avenir de l'audiovisuel public qui n'a pas été discuté dans le sein des EGI. Et je m'interrogeais sur votre avis personnel sur le manque de financement retenu.
00:59:23Dans les débats, les choses ont été souvent présentées de façon réductrice, à mon avis, en opposant le financement par fraction de TVA à une nouvelle forme de redevance.
00:59:33Et je sais qu'Arte était un cas particulier qui a été également discuté. J'aurais bien aimé avoir votre avis.
00:59:41Je regrette également que nous ne soyons pas allés plus loin. Vous avez peut-être des pistes. Que pensez-vous, justement, du financement par une taxe sur les fournisseurs d'accès Internet,
00:59:54qui me semble peut-être une des pistes à envisager ? Vous avez parlé bien sûr des recettes publicitaires, etc., les plateformes GAFAM, etc.
01:00:03Mais les fournisseurs d'accès Internet, j'aurais voulu avoir votre avis. Voilà. Je vous remercie.
01:00:09— Bernard Fialaire. — Merci, M. le Président. Merci, M. Patineau, pour vos exposés.
01:00:18Moi, j'ai assisté effectivement aux rendus des EGI au CESE. J'avais été quand même assez surpris de la modération, la sagesse.
01:00:29Je trouvais que ça décoiffait pas beaucoup et qu'il y a des points où on peut peut-être... Je m'attendais à avoir des pistes qui aillent un petit peu plus loin.
01:00:38Je reviens sur la proposition 4, sur la gouvernance des médias, le prolongement de la loi Bloch. Alors on parle d'une rédaction,
01:00:47d'une charte déontologique entre la direction et la rédaction. C'est quand même bien sage. On parle aussi de comité d'éthique.
01:00:54Chaque direction, c'est-à-dire de l'éthique à géométrie variable. Pourquoi on va pas jusqu'au code de déontologie des journalistes
01:01:02avec un ordre pour l'édifier ? On sait, les sondages, qu'ils rassurent les citoyens sur l'information, qu'ils protègeraient les journalistes
01:01:16et qui, surtout, permettraient par exemple de délivrer une carte de journaliste qui soit pas basée sur des critères purement économiques,
01:01:24de savoir si en tout, on a moins de 50% de ses revenus et en plus, qui sont d'ailleurs attribués actuellement à la fois par les journalistes
01:01:34et en même temps par les employeurs. Je trouve qu'il faut vraiment quand même qu'on ose un jour peut-être franchir le pas pour, je vous dis, rassurer,
01:01:45peut-être sauver même cette profession. Après, j'ai entendu vos... Je voudrais revenir sur la formation à l'esprit critique, l'EMI.
01:01:55On a des sondages qui montrent que la très grande majorité des jeunes se souviennent avoir eu des cours d'EMI et ont même conscience
01:02:07qu'ils peuvent être manipulés par les plateformes. Ils en ont tous conscience. Si je fais une analogie, moi aussi, je sais exactement ce qu'il faudrait pour avoir
01:02:16une diététique saine. C'est pour ça qu'à midi, je reprendrai peut-être pas un dessert ou un deuxième verre de Beaujolais nouveau alors que je sais que seul le premier
01:02:26est très bon pour ma santé. Ça veut dire qu'il y a aussi des moyens. Il y a l'information. Et après, il y a la résistance à finalement cette tentation qu'on peut avoir
01:02:40et une forme aussi peut-être de paresse parfois intellectuelle qu'on a à se laisser séduire. Et enfin, je suis... Là, j'ai découvert ce que vous avez dit
01:02:53sur l'intelligence artificielle et ce passage de finalement de l'exposition à la contribution. Mais ça nous interroge un petit peu plus loin parce qu'il y a aussi
01:03:02des contributions aux journalistes. Donc jusqu'où remonte-t-on la contribution ? Donc je pense que c'est pas une mécanique économique qu'il faudra faire.
01:03:14Je pense qu'il y a une information qui doit être aussi un peu open source que d'autres peuvent utiliser. Et il faut voir à quel moment, effectivement, la valeur du travail produit
01:03:27est rémunérée et protégée. – Laure Darkos. – Oui, cher Bruno, à mon tour de vous féliciter et saluer les travaux issus des EGI et avec une pensée aussi pour Christophe.
01:03:42Et je suis contente qu'Antoine Bernard, à la tête du RSF, puisse reprendre le relais, et vous-même pour les travaux des EGI.
01:03:53Ça a été très approfondi, sérieux, loin des idées reçues. Et je pense que vraiment, ces travaux ont eu l'avantage de reconnaître le rôle majeur de la presse,
01:04:04mais également ses grandes difficultés économiques, qu'il s'agisse du format papier ou numérique.
01:04:09Nous ne sommes pas législateurs. Nous ne sommes pas membres du gouvernement. Mais néanmoins, vous partagez les informations qui sont les nôtres.
01:04:18Sur le projet de loi, je laisserai peut-être maissance Langlois-Bertelot vous en parler. Nous avons été effectivement reçus par la ministre de la Culture,
01:04:30qui nous a dit son souhait d'élaborer un projet de loi s'inspirant des états généraux de l'information, parlant d'un certain nombre de points,
01:04:43de domaines, d'un très grand ensemble de domaines, en fait, sachant qu'une des questions – et j'y reviendrai après – récurrentes,
01:04:52c'était « qu'est-ce qui appartient totalement à l'espace européen et qu'est-ce qui peut être du domaine de la loi ? ».
01:04:58Et ça, c'est une question juridique, évidemment, et politique aussi extrêmement importante. Nous avons été informés de ça.
01:05:06Et de temps en temps, ma excellence Langlois-Bertelot, Anne Perroux ou moi-même, mis à contribution pour répondre à des questions qu'avait voulu vous dire
01:05:16en disant ça, à votre avis, etc. Maintenant, nous ne sommes pas dans la rédaction, comme vous imaginez bien, du projet de loi.
01:05:24Et à ce jour, nous ne connaissons pas les détails. Mais il nous a semblé – en tout cas, moi, il me semble – que, pour le moment,
01:05:33ce projet de loi reprenait effectivement... La volonté de la ministre était de reprendre le plus grand nombre de points possibles des EGI,
01:05:42y compris – j'y reviendrai après – en ce qui concerne le secret des sources. Voilà. Donc ça, c'est notre degré d'information aujourd'hui, de cette traduction-là.
01:05:56Je me permets – parce que je parlerai d'éducation à la fin. Vous en avez tous parlé – en ce qui concerne les plateformes, la régulation européenne.
01:06:07C'est un point central du rapport. Vous avez vu, il est articulé en deux parties, qui parlent de l'espace public français et de l'espace public européen.
01:06:17Et très clairement, je voudrais pas qu'on croit que les EGI se limitent à dire que les plateformes devront payer ou devront contribuer.
01:06:25Clairement, la question de l'écosystème informationnel que proposent les plateformes est abordée de façon, à mon avis, extrêmement détaillée.
01:06:35Prenons – j'allais dire – deux éléments que vous avez mentionnés au travers de vos questions. Premier élément, le fait que ces plateformes,
01:06:46à un moment donné, contribuent – on va dire – à une polarisation tantôt involontaire, tantôt voulue, à l'aide des informations ou autre.
01:06:55La proposition qui me semble extrêmement importante et que nous aimerions voir aussi, à un moment donné, évoquée de façon juridiquement possible
01:07:05dans le projet de loi, c'est celle de pluralisme des algorithmes. Alors c'est une montagne. C'est un Everest. Aucune des plateformes n'en veut, évidemment.
01:07:15Mais les trois niveaux de pluralisme des algorithmes qui sont proposés, notamment par le groupe 1 et qui ont été reprises in extenso par le comité de pilotage,
01:07:24ça veut dire qu'en gros, chaque réseau ou chaque plateforme devrait devenir pluraliste, c'est-à-dire avoir une sorte de pluralisme interne,
01:07:34si j'ose dire, à chaque réseau. Ça veut dire que quand vous êtes Le Monde, Le Figaro, vous pouvez proposer un algorithme qui oriente ou articule,
01:07:43organise votre fil X ou votre fil TikTok ou autre. Et donc ce pluralisme-là... En tout cas, essayer au niveau de la législation européenne
01:07:54de prendre les quelques ouvertures qui semblent exister dans le fait de pouvoir l'imposer au niveau européen et de pouvoir en tout cas l'encourager
01:08:04au niveau français nous semble absolument essentiel. La deuxième chose, c'est le devoir d'affichage. C'est ici que je vais rappeler
01:08:12qu'une des garanties du pluralisme est donc d'essayer d'avoir un citoyen de moins en moins manipulé. Au niveau de la presse, la loi Bichet,
01:08:22si ma mémoire est bonne, du 2 avril 1947, c'était une loi qui imposait au kiosque, au marchand de presse, de devoir prendre tous les journaux distribués,
01:08:33et au distributeur de distribuer tous les journaux bénéficiant d'un numéro de commission paritaire pour justement assurer une absence de barrière à l'entrée,
01:08:44qu'elle soit économique ou qu'elle soit politique, existant chez le distributeur ou chez le point de vente. Et donc d'une certaine façon,
01:08:51ce devoir d'affichage, qui est plutôt une absence de droit de ne pas afficher – on va dire ça comme ça –, c'est une sorte de loi Bichet
01:09:01à l'univers numérique des institutions des plateformes. On sait très bien aujourd'hui qu'un certain nombre de plateformes disent
01:09:06« Moi, non seulement je pénalise l'information dans ma structure économique, parce que le message informationnel ne m'apporte pas beaucoup d'argent,
01:09:15et donc de toute façon, je le pénalise dans les processus d'accélération et d'amplification, mais de temps en temps même, je ne les affiche plus ».
01:09:23Et nos concitoyens, qu'on le veuille ou non, surtout les plus jeunes, mais pas seulement les plus jeunes, passent énormément de temps à s'informer,
01:09:31se divertir, se cultiver au sein de ces plateformes-là. Et donc si l'information est marginalisée de façon volontaire, ça pose un problème de pluralisme.
01:09:39Ça, c'est extrêmement clair. Et donc pour nous, vraiment, tout ce qui a trait au pluralisme des algorithmes, à l'obligation d'affichage,
01:09:49on va dire à l'exercice ou l'extension d'une forme de responsabilité, sont des choses qui ont lieu au niveau européen, mais qui doivent être encouragées
01:09:56ou déjà être mentionnées dans la loi française. L'autre point sur les plateformes, c'est qu'encore une fois, aujourd'hui, c'est là où on en revient à ce que disait...
01:10:15J'ai beaucoup aimé cette question du fait de dire « Le Beaujolais est mauvais pour moi. J'en prends 3 verres ». Enfin 2, vous aviez dit.
01:10:23— C'est un sénateur du Beaujolais. — Mais en tout cas, l'abus n'est pas forcément bon. Oui, enfin on a tous l'exercice de notre propre liberté.
01:10:33Déjà, savoir que c'est pas forcément bon ou savoir qu'on est manipulé et y céder, moi, je pense que... Alors il y a 2 niveaux de réponse.
01:10:43La première réponse, c'est quand même diminuer le degré de manipulation. Nous savons aujourd'hui – je vais pas revenir sur même des écrits anciens –
01:10:51à quel point la structure même de fonctionnement de ces plateformes – et c'est pour ça qu'à un moment donné, on propose le pluralisme, etc. –
01:10:59accentue l'accélération et l'amplification des messages les plus émotionnels, donc la plupart du temps des messages de désinformation ou des messages de mésinformation.
01:11:08Ça, c'est la première chose. Et donc tout ce qu'on appelle le dark design, l'amplification algorithmique des messages émotionnels,
01:11:16auxquels d'ailleurs se confrontent le DSA et le DMA au niveau européen en proposant que seuls les algorithmes publicitaires ne soient pas
01:11:24organisateurs des réseaux sociaux ou autres. Alors on voit comment ils ont tourné ça après. Mais si vous voulez, il y a évidemment
01:11:32à la structure de fonctionnement de ces plateformes qu'il faut réguler. Mais la deuxième chose aussi, c'est que je pense que
01:11:37quand on informe bien ou quand on forme bien nos concitoyens au fait qu'ils sont manipulés à un moment donné, on diminue peut-être pas
01:11:44leur exposition aux messages de désinformation. On diminue peut-être même pas le fait d'y avoir recours de temps en temps.
01:11:51Mais je pense qu'on diminue la crédulité et qu'en tout cas, ce travail, si vous voulez, sur la résistance à la crédulité... Moi, il m'arrive d'aller
01:12:00dans des fast-foods. Mais je sais que c'est mauvais pour moi. Après, c'est l'exercice de ma propre liberté. Et je ne rentre pas chez moi en disant
01:12:07« J'ai fait un repas formidablement bien équilibré ce midi ». Je sais que c'est pas le cas. Après, c'est comme ça. Et je pense que quand même,
01:12:14dans cette démarche-là, il me semble qu'elle est importante, notamment sur le travail de la crédulité. Donc sur les plateformes et la régulation
01:12:23des plateformes, c'est évidemment quelque chose d'extraordinairement important. Ce qui m'amène à l'IA... Pardon, à l'intelligence artificielle.
01:12:32Alors j'entends la frustration qui peut être la vôtre du fait qu'on n'est pas totalement abordés. Je rappelle que les EGI ont été lancées en octobre 2023
01:12:41et qu'aujourd'hui, les IA génératives nous semblent faire partie du périmètre habituel ou de notre environnement habituel. Ça n'est que le début.
01:12:51Il y a deux pistes, presque trois, qui permettent peut-être d'apporter des éléments de réponse aux questions qui ont été posées.
01:13:01La première, c'est que vous le savez, le débat n'est pas uniquement français autour de l'IA de confiance. C'est un débat qui est porté au sein de l'UE
01:13:12par plusieurs acteurs, par le Parlement européen, par des spécialistes. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, on peut pas reprocher à chaque GPT de ne pas dire la vérité.
01:13:21Ça fait pas partie de son boulot. Son boulot, c'est de deviner un mot qui viendra après le mot précédent. Donc c'est une démarche statistique.
01:13:30Et on peut pas demander à une démarche statistique de dire la vérité. La démarche statistique, c'est une démarche statistique.
01:13:36Et donc si vous voulez, l'ambiguïté ou le malentendu qui fait de dire qu'on pourrait « s'informer » par chaque GPT, qui est un outil qui n'a jamais
01:13:45prétendu informer qui que ce soit ni même former qui que ce soit, est un malentendu. Et là, on en revient sur la formation.
01:13:52Donc on va arriver vers des questions d'IA à un moment donné spécialisées ou pas dans la formation autour des assistants personnels, des IA labellisées.
01:14:03Donc on va retrouver cette double question de labellisation un moment ou un autre. Et donc quand on propose et quand on demande même
01:14:10à la profession d'un moment donné d'avoir des critères de labellisation justement pour parler de la confiance en disant on va devoir labelliser les choses
01:14:17quand les gens font de l'information et même quand c'est des influenceurs d'information, puisqu'on le propose, donc quand ils exercent
01:14:23une responsabilité éditoriale, on va devoir les labelliser. Donc on aura, on espère, des IA à un moment donné labellisées d'information
01:14:30où il va y avoir des IA ou des assistants personnels auxquels on va demander à un moment donné de nous informer.
01:14:35Et c'est là toute la question de l'équilibre très ténu et très profond de ce qui se joue aujourd'hui, parce que vous voyez bien
01:14:42qu'entre la discussion économique, comment les médias d'information, à un moment donné, sont rémunérés pour leur contribution
01:14:49à l'entraînement des IA qui nous informent. C'est une chose. Et donc elles ont un intérêt, si j'ose dire, à fermer le robinet si à un moment donné...
01:14:58Pardon, je suis un peu grossier dans mon expression, mais à fermer l'accès si jamais, j'allais dire, leurs droits économiques ne sont pas respectés.
01:15:06Mais de l'autre, l'intérêt général, c'est que ces médias d'information soient sources de l'entraînement des IA qui vont nous informer plus tard
01:15:15pour que, justement, ces IA s'entraînent et nous proposent quelque chose à base de quelque chose de confiance et qui a été fait par des professionnels.
01:15:23Et c'est là où, à mon avis, vient le législateur et l'Europe, c'est-à-dire d'assurer, justement, qu'il n'y ait pas d'antinomie entre les deux démarches.
01:15:33C'est-à-dire qu'à un moment donné... Parce qu'aujourd'hui, si demain, vous avez toutes les IA génératives qui disent « Nous, tant pis, on passe pas par un système de rémunération »,
01:15:44et donc tous les médias d'information exercent – et c'est normal d'un point de vue économiste – leur droit qu'on appelle « doped out » et que demain,
01:15:52les IA s'entraînent sur des choses approximatives, conspirationnistes ou autres pour nous informer, alors l'espace informationnel va connaître
01:16:01une dégradation bien plus importante qu'il ne le connaît aujourd'hui. Donc on peut avoir des modèles. Moi, si vous me demandez un avis,
01:16:08mais nous n'en avons pas discuté au sein des EGI, nous le mentionnons juste dans une phrase, parce que c'était « dans le terme de calendrier ».
01:16:14Je pense que l'avenir, c'est celui d'une licence légale pour les médias d'information au sein de l'IA. Mais c'est un avis qui ne saurait engager
01:16:22l'ensemble des EGI, puisque nous ne l'avons pas discuté au sein des EGI. Mais c'est un avis personnel. On va être sur ce système de licence légale
01:16:29à un moment ou à un autre. Voilà. Pardon, j'essaie d'aller un peu plus vite. Et clairement, oui, je sais bien que tout journaliste a une source.
01:16:36La source, c'est l'événement, etc. Mais à un moment donné, si vous voulez, si on parle d'un point de vue purement professionnel en disant
01:16:43« un contenu journalistique », qu'est-ce que c'est ? C'est une relation des faits, certes, mais une relation des faits qui, à un moment donné,
01:16:48est vérifiée. Donc il y a un processus professionnel de vérification qui est « désintéressé », c'est-à-dire fait de façon indépendante,
01:16:55en dehors du propre intérêt personnel, qu'il soit économique, politique, social, familial, de la personne qui évoque ça,
01:17:02et qui engage la responsabilité de la personne qui le fait. Donc les fameuses 3 lettres. Si on part de ce principe-là, si vous voulez,
01:17:10on voit bien comment un média d'information, à un moment donné, engage sa propre responsabilité. Et c'est cet engagement dans la responsabilité
01:17:16qui fait que – je veux dire – la barrière de la contribution, à un moment donné, peut être fixée à ce moment-là.
01:17:22J'en reviens – parce que je terminerai sur l'éducation aux médias – à deux autres questions, et j'espère ne pas oublier.
01:17:31Sur deux autres questions qui ont été posées. Le premier, sur qu'est-ce qu'être journaliste en 2024 et cette frustration.
01:17:36J'entends bien. On a publié une étude, malgré tout, qu'on a faite avec l'IFOP, alors qu'il y a pris peut-être plus de temps que prévu
01:17:43pour être mis à bien. Nous avons publié il y a quoi, 3 jours ? – Oui, c'est ça, la semaine dernière. – La semaine dernière.
01:17:48Une étude sur le ressenti actuel... Alors c'est pas totalement qu'est-ce qu'être journaliste en 2024, mais le ressenti actuel des journalistes
01:17:56dans leur façon de faire, dans leur métier. Est-ce qu'ils se sentent menacés ou pas ? Et donc je reviens pas sur l'ensemble des conclusions.
01:18:03Mais il y a une conclusion qui m'a semblé intéressante. C'est-à-dire que les journalistes, quand on leur pose la question
01:18:10« Est-ce que vous avez l'impression que les gens pensent que vous ne travaillez pas de façon indépendante ? »,
01:18:17ils disent oui à la très grande majorité. Et « Est-ce que vous ne travaillez pas de façon indépendante ? », ils disent non à la majorité.
01:18:26Donc on voit bien cette question, mais qui est une question centrale dans le schéma institutionnel et informationnel qui est le nôtre,
01:18:34de la perception croisée des 3 acteurs dont je parle... Enfin 3 acteurs, des citoyens, des patrons de presse et des journalistes,
01:18:41et de la réalité factuelle de l'exercice de leur pouvoir. Ce qui me permet de revenir sur votre frustration en termes de gouvernance.
01:18:50On va se dire... Je ne souhaiterais pas, mais je l'ai dit à beaucoup d'interlocuteurs, que l'arbre du droit d'agrément
01:19:00cache la forêt de la gouvernance des médias. Donc effectivement, il y a eu des débats internes très forts au sein des EGI sur
01:19:10« Est-ce qu'il faut un droit d'agrément ? », des rédactions sur leurs patrons. Est-ce que si nous ne prenons pas ce droit d'agrément,
01:19:16les EGI partent à la poubelle parce qu'en fait, ils ont loupé la principale décision qui devait être prise pour réformer
01:19:22l'espace informationnel qui est le nôtre, et finalement, c'est le seul défi auquel nous sommes confrontés aujourd'hui,
01:19:27et c'est le seul truc important ? Ou est-ce qu'on peut, à un moment donné... Bon. On a été totalement transparents.
01:19:34Et je l'ai été même lors de la restitution au CESE, où nous savions bien que nous allions être attendus par un certain nombre de confrères
01:19:42sur cette question. Le groupe 5 propose un droit de veto. Le groupe 3 propose qu'au contraire, d'autres modalités soient faites,
01:19:50y compris une protection des patrons de SDJ. Enfin des choses qui ne sont pas... J'entends vous dire « comité d'éthique », machin, machin.
01:19:57C'est pas du détail, monsieur le sénateur. Pardon de vous le dire. C'est-à-dire qu'à un moment donné, le...
01:20:05Alors après... Donc voilà. On propose ça, les modalités différentes. Nous ne sommes pas encore une fois ni législateurs ni membres du gouvernement.
01:20:12Donc après, la décision vous appartient. Nous pensons, je pense, que la décision a été équilibrée.
01:20:18Si vous regardez aujourd'hui le nombre de rédactions qui exercent le droit d'agrément sur les 32 000 ou 33 000 cartes de presse aujourd'hui en France,
01:20:25c'est une toute petite minorité. Est-ce qu'il faut généraliser ça au prix de fragilisation des petites structures et dans la différence...
01:20:33Je ne tranche pas. Je sais cette question-là. Et je ne veux pas faire d'un choix du comité de pilotage en disant « c'est l'alpha et l'oméga ».
01:20:43Vous savez. Néanmoins, sur une chose qui me semble importante, ce qui est votre question de « est-ce qu'à un moment donné, il faut cette vieille question ?
01:20:56Est-ce qu'il faut un comité de déontologie central ? ». C'est une discussion qui existait aussi pendant les États généraux de la presse écrite
01:21:07auxquelles j'ai participé – je crois que c'était en 2008 –. Je présidais à l'époque le pôle dit numérique. C'était Bruno Frappa qui avait été
01:21:15mon patron au monde, qui présidait le pôle déontologie et qui s'était posé la question aussi. C'est une question récurrente qui divise extraordinairement la profession.
01:21:24D'abord parce que nous avons tous un texte unique. La charte de Munich, vous verrez visiter après les chartes qui existent.
01:21:32C'est des chartes, si vous voulez, qui sont le serment d'Hippocrate de chaque médecin. Nous avons notamment une charte unique déontologique.
01:21:39Donc cette charte, elle existe déjà. Et je ne connais aucune rédaction qui n'en fasse pas mention. Alors après, vous avez des rédactions qui les complètent.
01:21:50Mais à ma connaissance, vous n'avez pas de rédactions qui ne les adoptent pas. Donc normalement, quand vous avez votre carte de presse,
01:21:57vous êtes censé, j'allais dire, adhérer à cette charte-là qui est l'alpha et l'oméga de votre déontologie. Après, est-ce qu'il faut un organe centralisé
01:22:08qui décide à un moment donné de qui est journaliste, qui ne l'est pas – vous avez mentionné les critères de la carte de presse – et qui, à un moment donné, suit ?
01:22:18Vous le savez, il y a un organe qui a été créé. Certains médias décident de l'écouter. D'autres décident de ne pas l'écouter.
01:22:32On va dire la discussion est là. Elle divise le métier, comme vous le savez, très fortement. Vous avez ceux qui disent... Voilà.
01:22:40Il faut pas un Conseil de l'ordre central, parce que l'information, c'est avant tout un pluralisme et l'exercice d'une liberté avec une déontologie partagée.
01:22:46Vous avez d'autres qui sont sur d'autres points. Vous avez par exemple le modèle belge ou le modèle espagnol, où vous avez effectivement
01:22:53des commissions de déontologie, mais qui sont uniquement consultatives, c'est-à-dire qui n'ont pas de pouvoir décisionnel. Voilà. Là aussi, nous sommes transparents.
01:23:03Le dernier point, j'en finis là. Sur l'audiovisuel public, vous comprendrez que c'est très compliqué, étant écouté comme président du comité de pilotage,
01:23:14d'utiliser mon temps de parole pour avoir un plaidoyer pour Arte. Je ne le ferai pas, même si vous connaissez tous mon plaidoyer pour Arte.
01:23:26En revanche, je ne vous rappellerai pas qu'Arte est en... Comment dire ? Fruit d'un traité international. Il est différent.
01:23:38C'est une entreprise différente par sa nature des autres entreprises d'audiovisuel public. Vous connaissez ça. Et je ne prendrai pas ce temps de parole
01:23:45pour vous le rappeler. C'est fait. Qu'en revanche, un financement, j'allais dire, indépendant de l'audiovisuel public soit perçu par le Conseil constitutionnel
01:24:03manifestement mais aussi dans l'ensemble de l'écosystème comme une condition d'exercice de son métier, ça, ça me paraît une évidence.
01:24:12Et donc d'une façon ou d'une autre, le fait d'avoir – et nous vous en remercions – échappé à la budgétisation nous semble quelque chose
01:24:21d'extraordinairement positif. Voilà.
01:24:24— Vous n'avez pas posé la question de la hausse du prix et de la fusion ? Parce que vous, c'était pas le milieu du débat.
01:24:28— Ah non, non, mais oui. Et je ne pensais même pas y répondre. Donc merci beaucoup.
01:24:35— Chaque chose en son temps. Merci, M. le Président. Merci, M. Mercelot, de vos réponses et de vos échanges. On voit bien que...
01:24:45— Ah, l'éducation. — Ah, l'éducation. Mais il y a... Oui, oui, c'est vrai que vous...
01:24:48— L'éducation, pardon. J'ai dit que je le gardais pour la fin. Et en fait, le dessert n'est jamais arrivé. Donc pardon. Non, non. Alors excusez-moi.
01:24:56Donc l'éducation en médias, je l'avais gardée pour la fin, parce que oui, ce que vous avez mentionné... Alors nous avons plaidé,
01:25:03effectivement, pour qu'il y ait cette capacité de mesure d'impact qui soit interministérielle. Nous avons plaidé.
01:25:11Mais nous ne sommes pas les organisateurs des pouvoirs publics ou des portefeuilles ministériels dans ce pays.
01:25:20Il est essentiel, effectivement, pour nous, quoi qu'il arrive, ce à quoi nous avons plaidé, pour que l'éducation aux médias
01:25:27ne soit pas le truc rajouté à un moment donné en plus. Vous avez mentionné à juste titre le modèle finlandais.
01:25:35Nous l'avons beaucoup étudié ainsi que d'autres. Le modèle finlandais nous semblait important, parce qu'il était pluridisciplinaire.
01:25:42Et c'est-à-dire qu'il ne demandait pas le fait d'embaucher énormément de monde, de libérer 3 heures précises toutes les semaines
01:25:53dans des maquettes déjà surchargées. Et puis par ailleurs, il nous semblait donner des pistes pour résoudre à un moment donné
01:26:03la pénurie de moyens qui peuvent être celles du Clémy ou même des gens qui interviennent et qui font un travail formidable
01:26:10lorsqu'ils interviennent. Mais si vous voulez, ça dépend tellement de ce qui nous semble. Moi, je suis intervenu plein de fois au Clémy.
01:26:21Si vous voulez, au regard du nombre d'élèves, du nombre de classes, du nombre d'établissements, le fait de ne pas avoir
01:26:29un programme donné bien normé, évolutif suivant les niveaux et qui puisse montrer comment on passe petit à petit de l'éducation aux faits
01:26:40à l'éducation au libre-arbitre à ensuite l'enseignement de ce qu'est l'écosystème informationnel et la façon dont vous pouvez
01:26:46être manipulés, donc avec plusieurs étapes, nous semble effectivement arriver sur cette progressivité fait, libre-arbitre,
01:26:57l'écosystème informationnel qui nécessite à la fois d'être pluridisciplinaire et d'être donc sur plusieurs années,
01:27:05effectivement, appelle une démarche interministérielle. Alors souvent, on nous pose quelques questions.
01:27:14Nous avons été voir aussi lorsqu'on était encore en travail aux EGI, les directions de cabinet du ministère de l'Éducation nationale ou autres.
01:27:27On voit bien que la question, c'est la modalité, c'est comment on fait ça. Et donc à un moment donné, ça nécessite effectivement...
01:27:34Ça nécessite un accord interministériel et sans doute une volonté politique exprimée au plus haut niveau.
01:27:39Merci d'avoir suivi cette audition. Audition que vous pouvez retrouver sur notre site internet public senat.fr.
01:27:47Restez bien avec nous sur notre antenne.
01:27:57Sous-titrage Société Radio-Canada

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