Emmanuel Macron a nommé François Bayrou Premier ministre ce vendredi 13 décembre, après une dernière phase de doutes et au terme d’un délai qu’il a plusieurs fois reporté. Le maire de Pau est maintenant chargé de « former un gouvernement », selon le communiqué lapidaire de l’Élysée publié peu avant 13 heures.
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00:00Je savais depuis le premier jour, le 5 septembre,
00:04que le temps de mon gouvernement était compté,
00:07sous la menace d'une alliance improbable
00:12entre des forces politiques que tout oppose,
00:15mais réunies dans des circonstances,
00:20dans une volonté de blocage et de confusion.
00:24Ce temps très bref,
00:26nous avons essayé de l'utiliser au mieux,
00:30avec le gouvernement.
00:32Nous avons remis l'Etat en marche
00:34après les trois mois de turbulence
00:36qui ont suivi la dissolution de l'Assemblée nationale.
00:41Nous l'avons fait méthodiquement et sérieusement,
00:45dans tous les domaines,
00:46avec des ministres engagés, des fonctionnaires motivés,
00:52et en cherchant toujours le dialogue en particulier
00:55avec le Parlement.
00:57Nous avons lancé des chantiers
00:59et commencé à mettre en oeuvre des engagements pris
01:03pour les agriculteurs,
01:05pour la sécurité,
01:07pour l'hôpital et la santé mentale,
01:10dont j'avais proposé, dont j'ai proposé,
01:11qu'elle soit une grande cause nationale en 2025,
01:16pour la simplification administrative
01:19qui est tant attendue par tant d'entrepreneurs,
01:23pour l'environnement et la prévention des risques,
01:26qui se multiplient,
01:28pour la maîtrise de l'immigration
01:30et pour tant d'autres chantiers encore.
01:33Des engagements qui pourront, je l'espère,
01:35monsieur le Premier ministre, être confirmés,
01:38poursuivis, consolidés.
01:41Nous avons proposé un budget, un budget difficile,
01:45où tout était difficile, pour réduire notre déficit.
01:49Et avec une majorité de parlementaires,
01:51en particulier au Sénat,
01:53nous étions proches d'un accord équilibré.
01:58Ce déficit n'a pas disparu,
02:01comme par enchantement d'une motion de censure.
02:05On aurait tort d'oublier ce déficit
02:07et la dette qui l'accompagne,
02:10faute de quoi ils se rappelleront brutalement à nous tous.
02:15Une telle dette, un tel déficit,
02:18ce sont des impôts pour nos enfants.
02:22Nous avons enfin tenté de faire de la politique autrement,
02:27avec peu d'effets d'annonce,
02:30en parlant moins, en agissant plus,
02:34avec de l'écoute, du dialogue, du respect,
02:38notamment envers les organisations syndicales
02:41et professionnelles que je veux remercier,
02:45avec les élus locaux et tout simplement avec les Français.
02:50Je continue à croire que notre pays a besoin de vérité,
02:53d'apaisement, de dignité, de réconciliation.
02:58Notre pays a aussi besoin de justice.
03:02Trop de Français ont aujourd'hui le sentiment
03:04que leurs préoccupations quotidiennes
03:06ne sont pas prises en compte par les gouvernants.
03:10Ils ont le sentiment de ne pas être considérés,
03:13parfois même d'être oubliés.
03:15Oui, je redis ici ma conviction, qui est ancienne,
03:18que chaque homme, chaque femme est nécessaire
03:23et que chaque citoyen a une valeur ajoutée
03:26pour notre République.
03:29Je crois profondément et depuis toujours
03:31que la politique doit servir à construire
03:35un progrès collectif, souvent de petits progrès,
03:38parfois de grands progrès pour nos compatriotes.
03:42Cette politique, elle ne doit pas se réduire,
03:44elle ne peut pas se réduire à un champ de manoeuvre
03:47dans une sorte d'entre-soi
03:50d'où les citoyens sont exclus.
03:53Et pour cela, je le dis aux Français
03:55qu'ils vivent dans l'Hexagone,
03:58qu'ils vivent dans nos Outre-mer, qu'ils vivent à l'étranger.
04:02Je dis en particulier aux plus jeunes de nos compatriotes,
04:06il faut vous engager.
04:08Il faut vous engager au service de l'intérêt général.
04:12En politique, mais aussi dans une association,
04:16dans un syndicat, à travers le bénévolat,
04:20qui est le ciment essentiel de notre République.
04:24Voilà. Monsieur le Premier ministre,
04:25cher François, au moment de quitter Matignon,
04:28j'en remercie naturellement le président de la République,
04:30Emmanuel Macron,
04:32les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale,
04:35Gérard Larcher et Yael Brone-Pivet,
04:38les membres du gouvernement et leurs équipes,
04:41toutes leurs équipes.
04:43Évidemment, mon cabinet, qui a été formidable,
04:45et tous les services de Matignon, que je salue collectivement,
04:49tous et chacun, vous pouvez être fiers de votre travail.
04:54J'ajoute peut-être, enfin, un mot plus personnel,
04:57de remerciement à mon épouse Isabelle,
05:01à mes enfants et à toute ma famille,
05:04qui a été solidaire.
05:06En ce qui me concerne, je reste un citoyen engagé
05:12pour la République, pour notre patrie,
05:14pour l'unité de l'Europe.
05:17Je reste et je resterai au service des Français
05:22et du côté des Français.
05:25Applaudissements
05:58...
06:19Monsieur le Premier ministre, cher Michel,
06:25vous avez dit que nous nous connaissions depuis longtemps.
06:27C'est absolument vrai.
06:30Notre premier engagement ensemble,
06:32c'était dans un mouvement qu'on appelait les Rénovateurs.
06:38Et en effet, c'est une tâche qui est encore devant nous aujourd'hui.
06:43Je veux commencer en vous exprimant un sentiment de gratitude.
06:51Gratitude de citoyens
06:54pour le risque que vous avez pris,
06:58de vous engager dans cette fonction,
07:02pour avoir affronté la difficulté des temps,
07:07et Dieu sait que cette difficulté des temps est importante,
07:12pour le désintéressement que vous avez manifesté,
07:19qui donne de l'engagement politique
07:23une image que vous et moi
07:26et beaucoup de millions de Français nous aimons.
07:28Et donc, je voulais vous dire merci pour cet engagement
07:31et pour ce risque.
07:33Alors, je ne serai pas très long pour ne pas m'exposer
07:37à des incidents
07:41que je redouterai, étant donné votre verbe.
07:47Je veux dire des choses très simples.
07:50La première de ces choses, c'est que nul plus que moi
07:55ne connaît la difficulté de la situation.
08:00J'ai pris des risques inconsidérés dans ma vie politique
08:06pour poser dans les élections les plus importantes,
08:10dans les échéances électorales essentielles,
08:13la question de la dette et des déficits.
08:18J'ai même conduit des campagnes présidentielles sur ce thème,
08:22et tout le monde, nous en disions un mot,
08:24avec le sourire, tout à l'heure,
08:26tout le monde disait qu'il est complètement fou,
08:29on ne fait pas une campagne sur la dette.
08:32Eh bien, je crois que cette question-là,
08:35déficit et dette,
08:37c'est une question qui pose un problème moral,
08:40pas un problème financier seulement,
08:43un problème moral,
08:45parce que se débarrasser de ses charges
08:49sur ses enfants,
08:51dans les pays comme les nôtres,
08:54dans les pays de montagne, d'enracinement,
08:58c'est très mal vu, à juste titre.
09:02Et donc, votre message sur la gravité de la situation,
09:08je le reçois et je le partage.
09:13C'est le premier point.
09:14Et c'est pourquoi,
09:16devant une situation d'une telle gravité,
09:21ma ligne de conduite sera de ne rien cacher,
09:25de ne rien négliger et de ne rien laisser de côté.
09:29Je sais que la tentation est dure.
09:31Écoutez, prenez un ou deux sujets,
09:34concentrez-vous là-dessus,
09:35et laissez faire le reste
09:39dans la médiocrité.
09:41Je ne choisirai pas cette ligne.
09:44Je pense que nous avons le devoir,
09:48dans un moment aussi grave pour le pays, pour l'Europe,
09:53et devant tous les risques de la planète,
09:56nous avons le devoir d'affronter,
09:59les yeux ouverts,
10:01sans timidité,
10:03la situation qui est héritée
10:08de décennies entières,
10:10dans lesquelles on n'a pas regardé
10:13comme nécessaire et urgent
10:16la recherche des équilibres
10:17sans lesquels on a du mal à vivre.
10:20Disons simplement que, les dernières années,
10:22l'accumulation de crises a été telle
10:25que les explications
10:28sont parfaitement compréhensibles.
10:35Je veux dire simplement que j'ai deux obsessions.
10:42La première obsession,
10:44qui est, pour moi, un des risques les plus graves,
10:48c'est le mur de verre qui s'est construit
10:52entre les citoyens et les pouvoirs,
10:56entre la base,
10:59les femmes et les hommes, les familles,
11:01ceux qui travaillent, ceux qui cherchent du travail,
11:04ceux qui sont à la retraite,
11:06ceux qui mènent la vie
11:10des Français
11:14dans le voisinage,
11:18ceux qui affrontent
11:22des difficultés dont ils ne voient pas le relais
11:26dans la vie publique.
11:29Ce mur de verre, cette séparation, cette rupture,
11:33pour moi, c'est un ennemi à combattre,
11:36et notamment la compréhension de ce que nous disons,
11:42les mots qu'on utilise pour décrire la situation,
11:45les éléments de langage qu'on dit.
11:49Si je peux,
11:50j'ai une absolue conscience de la difficulté de la tâche,
11:54si je peux,
11:56j'essaierai de débarrasser notre vie publique
12:00et nos débats des paroles artificielles,
12:05des mots dont on a le sentiment
12:07qu'ils étaient écrits bien avant qu'on les prononce,
12:10et d'ailleurs qu'on aurait pu deviner à l'avance
12:13ce que ce qui les prononce allait dire.
12:17Ca, c'est le premier point.
12:18Et le deuxième point,
12:20qui était l'essentiel de la promesse
12:24du président de la République élu en 2017.
12:29Ce que le président de la République élu
12:33avait porté devant les Français,
12:36c'était l'idée qu'on ne pouvait pas
12:40se trouver devant un destin dont on n'était plus maître
12:43et dans lequel on n'avait aucune chance de progression.
12:50Et c'est pourquoi, naturellement, je pense à l'école,
12:53dont je me suis occupé pendant des années
12:57et qui n'a pas cessé d'être, dans ma vie, un point fixe.
13:04L'idée que, parce qu'on est né dans un quartier
13:09ou dans un village,
13:11on aurait tort d'oublier les villages,
13:13parce qu'on est né dans un quartier, dans un village,
13:16parce qu'on porte un nom,
13:20parce qu'on pratique une religion
13:23ou qu'on est attaché à cette religion,
13:27l'idée que, en réalité,
13:30les portes ne sont pas ouvertes pour vous.
13:33L'idée que c'est ceux qui ont les codes
13:39qui savent comment se diriger.
13:43Ceux-là connaissent la carte
13:47et ont la boussole pour se diriger dans la vie.
13:52Et si vous ne les avez pas, cette carte et cette boussole,
13:57ces connaissances, ces réseaux, ces moyens,
14:01alors, vous vous trouvez, aujourd'hui,
14:03je le crains, dans une situation qui est moins ouverte
14:07qu'elle ne l'était il y a quelques décennies.
14:10Et pour moi, ceci est insupportable.
14:15Je viens de là.
14:18Je viens au pied des Pyrénées bleues.
14:23Je viens de milieux sociaux et de villages.
14:29Et j'ai fait toute ma vie sans les quitter.
14:33Je viens de milieux sociaux et de villages
14:34qui n'ont pas la chance d'être protégés, favorisés.
14:41Je trouve que notre devoir
14:46de citoyen, de père de famille,
14:49notre devoir de républicain,
14:53c'est que nous soyons obsédés
14:58pour rendre des chances à ceux qui n'en ont pas.
15:02C'est, pour moi, un devoir sacré.
15:07Et je n'ai pas l'intention de le négliger.
15:10C'était la promesse du président de la République
15:13et c'est à cette promesse que je compte être fidèle
15:18dans les fonctions si difficiles que vous me transmettez.
15:23Je sais que les chances de difficultés
15:30sont beaucoup plus importantes que les chances de succès.
15:35Je n'ignore rien de l'Himalaya qui se dresse devant nous,
15:41de difficultés de toute nature,
15:43la première est budgétaire, naturellement,
15:45puis politique,
15:47et puis de l'éclatement de la société où nous sommes.
15:50Je sais tout ça. Je pense qu'il faut essayer.
15:53Et je pense que si on essaie,
15:56peut-être pourra-t-on trouver un chemin inédit.
16:01Et ce chemin, en tout cas, je sais de quoi il est marqué.
16:04Il est marqué de la volonté de réconciliation.
16:09Il se trouve que, comme tout le monde l'a noté,
16:12c'est aujourd'hui l'anniversaire
16:15de la naissance d'Henri IV.
16:18Comme vous le savez, c'est un ami pour moi.
16:22Un des seuls amis que j'ai eus toute ma vie
16:25et un des seuls qui m'est vraiment donné un coup de main.
16:30Je lui ai consacré beaucoup de livres
16:33et c'est une figure très importante.
16:38Il a fondé sa rencontre avec la France
16:42dans des temps aussi difficiles et plus difficiles
16:44que ceux que nous vivons aujourd'hui.
16:47Il a fondé cette rencontre sur la nécessité
16:52de sortir des guerres stupides ou des guerres secondaires
16:56pour se retrouver sur l'essentiel qui est l'avenir du pays.
17:00Si je peux, à mon tour,
17:03j'essaierai de servir cette réconciliation nécessaire.
17:07Et je pense que c'est là
17:09le seul chemin possible vers le succès.
17:13Merci de votre présence et de votre amitié.