• il y a 4 jours
Invités cette semaine :
- Stéphane Le Rudulier, sénateur Les Républicains des Bouches-du-Rhône,
- Philippe Brun, député PS de l'Eure.

Un face à face de 26 minutes sur l'actualité de la semaine à l'Assemblée nationale et au Sénat : loi spéciale sur le budget, crise politique, accord de non-censure.

Parlement Hebdo est au coeur de l'actualité politique pour vous faire vivre cette année parlementaire inédite.
Chaque vendredi c'est le tour d´horizon complet d'une semaine au Parlement. Kathia Gilder (LCP-Assemblée nationale) et Alexandre Poussart (Public Sénat) passent en revue les événements et les discussions en séance ou en commission.
Cette saison, une nouvelle formule : un débat entre un député et un sénateur sur les grands sujets qui rythment la vie du Parlement.

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Transcription
00:00SOUS-TITRAGE SOUS-TITRAGE
00:02Générique
00:04...
00:09Bonjour à tous. Très heureux de vous retrouver
00:11pour ce nouveau numéro de Parlement Hebdo,
00:14qui revient sur les temps forts de la semaine au Parlement.
00:17Nous vous proposons un débat
00:19entre un député et un sénateur.
00:20Philippe Brun, bonjour.
00:22Vous êtes député socialiste de l'heure.
00:24Stéphane Laurudulier, bonjour.
00:26Sénateur LR des Bouches-du-Rhône, beaucoup d'actus pour vous.
00:29La motion de censure a interrompu l'examen du budget 2025
00:33d'ici à la fin de l'année.
00:35Une loi spéciale budgétaire a été examinée
00:37et votée en commission des finances à l'Assemblée nationale.
00:40Elle permet de reconduire le budget de l'année dernière
00:43et de percevoir les impôts pour éviter la paralysie du pays.
00:47Les sénateurs sont inquiets des conséquences
00:49pour les collectivités locales.
00:51Et comment le pays en est arrivé là au niveau budgétaire ?
00:54On viendra sur l'audition de Bruno Le Maire
00:57cette semaine à l'Assemblée nationale
00:59pour la commission d'enquête sur la dégradation des finances publiques.
01:03L'ancien ministre a défendu son bilan point par point.
01:06Parlons tout de suite des questions budgétaires
01:08puisque la loi spéciale a été votée en commission des finances
01:12de l'Assemblée nationale dans une amblance pour le moins houleuse.
01:15Explication de texte avec Stéphanie Despierre.
01:22Une semaine, jour pour jour, après la chute du gouvernement Barnier,
01:26les ministres démissionnaires sont de retour à l'Assemblée.
01:29La censure a interrompu les discussions budgétaires.
01:32Alors Antoine Armand et Laurence Amartin
01:34présentent une loi spéciale.
01:36C'est exceptionnel, c'est la deuxième fois seulement depuis 1958.
01:41La loi spéciale n'est pas là pour donner un cadre économico-financier au pays.
01:44Elle est là, empisalée, pour attendre l'adoption d'un budget
01:48qui est la seule loi qui permet de lever l'incertitude économique.
01:50Il n'y a pas de choix politique dans cette loi,
01:53dans les termes le plus simples.
01:54Il n'y a pas de choix politique du tout.
01:56C'est lever l'impôt et c'est lever de la dette, point à la ligne.
01:59Il ne faut pas que cette loi permette autre chose,
02:02sinon on ne serait pas conforme
02:05à notre Constitution et à notre loi organique.
02:08Et c'est bien le seul et unique débat.
02:11La gauche et l'ERN veulent y intégrer
02:13un changement du barème de l'impôt sur le revenu.
02:16Objectif, éviter que 380 000 foyers
02:19deviennent imposables au 1er janvier.
02:22Impossible, a dit le Conseil d'Etat.
02:25Pourtant, le président de la Commission des finances
02:27a accepté des amendements en ce sens,
02:30ce qui lui vaut les foudres du camp présidentiel.
02:32On voit bien, monsieur le président,
02:36que vous ne respectez pas la Constitution,
02:37que vous violez la Constitution, et je pèse mes mots,
02:40et je trouve ça extrêmement grave.
02:41J'avais noté que vous n'étiez plus rapporteur général,
02:43je n'avais pas encore noté que vous étiez président
02:45du Conseil constitutionnel.
02:47J'ai dû rater un épisode.
02:48Mais si, mais si, je vous réponds à peu près sur le ton
02:50où vous avez engagé cette polémique,
02:53qui vous permettrait de juger de manière quasiment scientifique
02:56ce qui est constitutionnel ou pas.
02:58Contre l'avis du gouvernement, l'amendement est voté.
03:01La loi spéciale est adoptée à l'unanimité en commission.
03:05Rendez-vous en séance lundi à l'Assemblée
03:07et mercredi au Sénat.
03:10Philippe Rhin, on l'a bien compris,
03:11cette loi spéciale, procédure rarissime,
03:14permet juste le minimum à pisaler, comme dit l'un des ministres.
03:18Est-ce qu'en votant la censure,
03:19vous n'avez pas fragilisé l'économie ?
03:21On le voit puisqu'on ne peut pas prendre de vraies mesures budgétaires.
03:24En vérité, un autre choix aurait pu être fait.
03:27Vous savez qu'on va faire un peu de technique ici,
03:29dans une émission d'information parlementaire.
03:31Il y a un article de la LOLF qui permet d'adopter le budget,
03:35seulement la partie recette avant la fin.
03:36La LOLF, c'est la Constitution financière.
03:38Donc on aurait pu, le gouvernement aurait pu,
03:40avant le 11 décembre, il aurait fallu qu'il le fasse,
03:42nous demander d'examiner la partie recette du budget,
03:44ce qui aurait permis d'éviter les difficultés
03:47que nous avons devant nous.
03:48Le choix qu'a fait le gouvernement, en vérité,
03:49le président de la République, de la loi spéciale,
03:51amène un certain nombre de problèmes.
03:53Les cercles de jeux, par exemple, vont devoir fermer
03:55au 1er janvier jusqu'au vote du budget.
03:59On a un problème sur le crédit d'impôt pour les agriculteurs.
04:01On a un problème sur le crédit d'impôt pour l'industrie textile,
04:05qui en a particulièrement besoin.
04:07On a, bref, tout un tas de mesures dont on avait besoin
04:09qu'elles soient adoptées avant la fin de l'année.
04:11Cela aurait été possible en appliquant, finalement,
04:14toutes les règles dont on dispose.
04:15Le président de la République, de manière assez solitaire,
04:17a fait un choix différent, celui de cette loi spéciale,
04:19qui est une cote, en vérité, très mal taillée.
04:21Stéphane Lerue-Dulier, cette loi spéciale,
04:23c'est la responsabilité du président de la République,
04:25qui, finalement, a un peu précipité les choses,
04:28alors que certains, notamment la présidente de l'Assemblée,
04:30affirmaient qu'on avait encore le temps de voter un budget 2025,
04:33notamment la partie recette,
04:35ou est-ce que c'est la responsabilité des députés
04:37qui ont censuré le gouvernement et provoqué cette loi spéciale ?
04:40Je pense que le président de la République
04:42et le Premier ministre démissionnaire
04:46ont eu une crainte absolue, c'est la pollution des débats
04:50et, malheureusement, l'enlisement des débats
04:52pour ne pas arriver à voter cette partie recette,
04:56d'où la loi spéciale.
04:59Encore une fois, on peut avoir des débats juridiques.
05:03Je rejoins ce qu'a dit le ministre de l'Économie et des Comptes publics.
05:08Attention, cette loi spéciale,
05:09elle est juste là pour la continuité de l'État,
05:11mais, comme vous l'avez dit très justement,
05:14des problèmes vont se poser dès le 1er janvier.
05:17Et il est clair qu'il y a urgence, aujourd'hui,
05:21à avoir un gouvernement qui puisse, dans les prochains jours,
05:25déposer une nouvelle loi de finances pour 2025,
05:30afin qu'elle soit étudiée dans les meilleurs délais
05:33à l'Assemblée nationale et au Sénat.
05:35Je vous rappelle qu'il y aura un temps programmé de 70 jours.
05:39Donc, là aussi, se pose le problème de responsabilité.
05:43J'imagine pas une motion de censure déposée et adoptée
05:48sur le budget 2025, en mars,
05:51puisque là, on est vraiment dans le chaos institutionnel
05:54et dans une impasse absolue.
05:55On n'y est pas encore, mais dans l'immédiat,
05:57la conséquence du vote de cette loi spéciale,
06:00c'est qu'elle ne permet pas des correctifs sur l'impôt.
06:03On ne peut rien bouger, notamment la base de l'impôt.
06:06380 000 foyers qui se retrouvent imposables si on ne fait rien.
06:10Alors, qu'est-ce que vous répondez ?
06:12Nous avons corrigé cela,
06:14puisque nous avons adopté un amendement
06:15en commission des finances pour indexer le barème de l'impôt.
06:18On a vu que ça risquait d'être pas constitutionnel.
06:22Je pense qu'il y a un président de conseil constitutionnel
06:25par député aujourd'hui,
06:26alors on va peut-être s'en remettre à la lettre de la Constitution.
06:29Je constate qu'en tout cas, il n'y a aucune règle aujourd'hui,
06:32aucune jurisprudence qui vient dire cela.
06:34Il y a une analyse du Conseil d'État,
06:36une histoire a montré qu'il n'était pas le Conseil constitutionnel.
06:39Le Conseil d'État est beaucoup plus prudent dans cette analyse
06:42que l'était à l'instant Jean-René Cazeneuve, qui est cité.
06:44Donc, nous allons voir ce qui va se passer.
06:46En tout cas, je crois que personne ne va saisir le Conseil constitutionnel,
06:50parce que nous sommes responsables,
06:52on a besoin d'indexer le barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation.
06:56Et finalement, cette loi spéciale, c'est une loi un peu exceptionnelle
06:58pour essayer de régler les problèmes créés à la fois par la censure
07:02et sur aussi la procrastination pour la nomination d'un Premier ministre.
07:04Moi, je le redis, on aurait pu adopter un budget avant la fin de l'année
07:07si le Premier ministre avait été nommé dans les 48 heures
07:09suivant les émissions de Michel Barnier.
07:11Stéphane Leraud-Ullier, après l'Assemblée nationale,
07:13cette loi spéciale viendra au Sénat.
07:15Est-ce que les sénateurs doivent aussi prendre le risque
07:17de mettre une mesure qui peut être inconstitutionnelle,
07:20c'est-à-dire indexer l'impôt sur le revenu sur l'inflation,
07:23mais cette mesure, elle fait consensus politiquement pour les Français ?
07:25Bien sûr, on en discutera effectivement
07:28s'il n'y a pas de jurisprudence,
07:30puisque c'est la première fois qu'on adopte une loi spéciale.
07:33Il y avait déjà eu, dans le passé, en 79,
07:37une loi ordinaire qui était venue, en fait,
07:39remplacer le projet de loi de finances,
07:41retoquée cette fois-ci par le Conseil constitutionnel.
07:45Mais il est vrai que nous n'avons pas de recul et pour autant,
07:48cette mesure est attendue par l'ensemble des Français.
07:51Donc, de deux choses l'une, soit on a cette volonté
07:56de ne pas plonger les Français une nouvelle fois
07:59dans l'incertitude fiscale, si j'ose dire,
08:02soit on est responsable et on vote l'amendement.
08:04On en discutera en réunion de groupe.
08:06Mais, ceci étant, ça n'enlève rien
08:10des difficultés que nous avons dès le 1er janvier.
08:13Vous l'avez évoqué, mais je pense notamment
08:16sur les tickets restaurants, incertitude.
08:19Je pense également sur le monde agricole,
08:21sur les exonérations, notamment, de charges,
08:25où ils traversent une crise sans précédent.
08:27Donc, ces réponses, il y a quand même urgence,
08:29dès lors, à déposer une nouvelle loi de finances
08:32pour pouvoir sortir de cette incertitude
08:34et de cette instabilité.
08:36Justement, Philippe Brun, pour rebondir
08:38sur ce que dit le sénateur, le budget 2025,
08:42qui a été interrompu par la censure,
08:43prévoyait beaucoup de moyens pour les policiers,
08:46les agriculteurs, pour un tas de professions,
08:48pour les armées aussi.
08:50Qu'est-ce que vous dites à ces professions,
08:52à ces secteurs qui attendaient ces crédits pour l'an prochain ?
08:55Qu'est-ce que vous leur dites ?
08:57Vous, vous avez voté la censure.
08:58D'abord, j'ai voté la censure,
09:00mais j'ai aussi voté pour le budget.
09:02Un budget que vous aviez remanié.
09:03On n'avait rien enlevé aux policiers, aux gendarmes, etc.
09:06Moi, j'ai voté pour le budget.
09:08Il est arrivé au Sénat.
09:09Jamais, nous n'avons voté contre le budget.
09:12Le gouvernement a censuré sur la sécurité sociale,
09:14mais sur le budget, il était encore en cours.
09:17On pouvait continuer la discussion.
09:19On avait une réunion de 7 députés, 7 sénateurs,
09:21qui était prévue au Sénat lundi prochain.
09:23Mais vous l'avez interrompue.
09:25C'est un tort. Il aurait fallu continuer,
09:27y compris des missionnaires,
09:29la discussion budgétaire pour enfin adopter un budget.
09:32C'est d'ailleurs dans ce sens que nous avons voté la censure,
09:35car nous avions prévu toutes ces dispositions institutionnelles
09:38qui permettaient de faire un budget avant la fin de l'année.
09:41Le président de la République a fait un choix.
09:43Le choix de la loi spéciale, c'est le choix de l'arrêt
09:46d'un certain nombre de dispositions qui avaient fait consensus.
09:50C'est un mauvais choix pour vous ?
09:52Je crois que c'est un mauvais choix.
09:54J'espère que le futur Premier ministre,
09:56je l'espère, fera en sorte qu'on vote un budget
09:58ou un budget minimal avant la fin de l'année.
10:01Stéphane Leordelier a écouté Philippe Brun.
10:03Les députés de gauche qui ont fait tomber le gouvernement
10:06ne sont pas responsables de cette situation.
10:08C'est la censure qui a précipité la démission de Michel Barnier
10:14et plongé la France dans l'incertitude budgétaire.
10:18Mais au-delà de ça, le fait d'avoir choisi la loi spéciale,
10:22c'est aussi pour envoyer un message très fort.
10:25Le prochain Premier ministre doit imprimer sa marque
10:28et sa politique, sa vision sur le budget.
10:31On a tout le temps regretté au Sénat, par exemple,
10:34qu'il n'y ait pas assez d'efforts réalisés
10:36sur la baisse des dépenses publiques.
10:39D'ailleurs, on avait travaillé à corriger
10:41la copie de Michel Barnier
10:44par rapport à un rééquilibre
10:46entre l'augmentation des prélèvements obligatoires
10:49et la baisse de la dépense publique.
10:51C'est pas si anodin, ça.
10:53C'est une loi spéciale
10:54pour attendre la nomination d'un Premier ministre,
10:57c'est un choix du président de la République
10:59pour imprimer sa marque dès le projet de loi de finances.
11:03On va regarder ce que pensent la majorité des sénateurs,
11:06notamment la droite sénatoriale, de cette loi spéciale,
11:09avec des sénateurs qui sont inquiets
11:11des conséquences pour les collectivités locales.
11:18En découvrant le projet de loi spéciale
11:20et ses trois seuls articles,
11:21les sénateurs nourrissent des inquiétudes
11:24pour les collectivités territoriales, notamment.
11:27Les subventions de l'Etat,
11:28qui auraient dû leur permettre d'investir dès janvier 2025,
11:32ne figurent pas dans cette loi spéciale.
11:35L'Etat ne pourra engager
11:36aucune dotation discrétionnaire au profit des collectivités.
11:39On pourra assurer le paiement des engagements
11:42sous le régime des services votés.
11:43Absents aussi de la loi,
11:45les crédits d'impôt visant à inciter les entreprises
11:48à s'installer dans certains territoires.
11:50Le budget est finalement voté en 2025.
11:52Les risques pour nos entreprises ne seront pas rétroactifs.
11:56Pour une raison simple,
11:57si vous faites une fiscalité incitative,
11:59c'est pour qu'elle ait un impact sur un comportement donné,
12:03d'acteur économique ou social.
12:04Si vous le faites rétroactivement, le comportement a eu lieu.
12:08Par construction, vous ne pouvez pas le faire
12:10au nom de l'incitation, puisque c'est déjà déroulé.
12:13Un problème pour les sénateurs.
12:14Qu'est-ce qu'on dit à nos collectivités territoriales,
12:17à nos communes, qui ont été rattrapées par le nouveau zonage ?
12:20Qu'est-ce qu'on dit à leurs entreprises qui veulent s'installer ?
12:24On ne peut pas demander aux chefs d'entreprise
12:26de différer de 3 mois pour que les dispositifs soient en place.
12:30Si les collectivités territoriales sont affaiblies,
12:32on a un problème de cohésion et d'harmonie sociale.
12:35Des sénateurs qui ne s'interdisent pas d'amender
12:38les 3 seuls articles de la loi spéciale
12:40avant son examen en séance la semaine prochaine.
12:43Stéphane Leroud-Denier, les communes, les départements, les régions
12:47se retrouvent affaiblies financièrement.
12:49Qu'est-ce que vous leur dites ?
12:51Affaiblies et dans l'incertitude.
12:53Plusieurs communes ont déjà voté leur budget 2025,
12:56dès le mois de novembre ou le mois de décembre,
12:59avec, comme trajectoire budgétaire,
13:02l'effort qui était demandé aux communes.
13:05On était parti de 5 milliards d'euros.
13:08On était arrivé, en atterrissage, à 1 milliard au Sénat.
13:13Donc, ça, c'est la 1re incertitude.
13:15Comment construire un budget sans avoir véritablement
13:18l'enveloppe de la dotation que l'Etat va vous donner
13:21pour fonctionner ?
13:22Et puis, la 2e inquiétude, c'est ce que disait le ministre,
13:26c'est sur l'investissement.
13:27Tout ce qui est subvention liée à l'investissement public,
13:30il y a un coup d'arrêt.
13:32Et ce coup d'arrêt, il aura lieu jusqu'au vote
13:36de la loi de finances 2025.
13:38Ca veut dire, clairement...
13:39-"Pas avant avril".
13:41Rappelez-vous ce qui s'était passé sous François Hollande
13:44entre 2013 et 2016.
13:47On avait demandé un effort considérable aux collectivités.
13:51Il y avait eu une baisse de 25 % de l'investissement public.
13:55C'était 0,6 à 0,7 points de croissance en moins.
13:59Voilà le risque de ce cercle vicieux
14:01qui, malheureusement, va pénaliser l'Etat et la société.
14:05Cette période d'incertitude budgétaire
14:07peut entraîner une baisse de l'investissement public
14:10de nos collectivités territoriales ?
14:12Oui, l'incertitude est mauvaise pour la France.
14:15Elle est mauvaise depuis la dissolution,
14:17pour nos taux d'endettement.
14:19Le jour de la dissolution,
14:20la différence des taux d'intérêt entre l'Allemagne et la France
14:24a bondi de 70 points.
14:25Finalement, nous n'avons jamais réussi à tomber sous cet écart.
14:29L'instabilité est mauvaise.
14:31J'ai proposé, dès le mois d'août, un accord de non-censure.
14:34Il y a un gouvernement, qu'on partage ou pas ses orientations,
14:37qui ait sa cohérence et qui signe avec l'opposition,
14:40un accord de non-censure, contre des concessions réciproques,
14:44car il n'y a pas de majorité à l'Assemblée.
14:46C'est dans une tribu du Monde, le 25 août.
14:48Aujourd'hui, c'est devenu la position officielle
14:51du PS, des communistes et des écologistes.
14:54C'est ce qu'il faut faire,
14:55quelle que soit la nomination du Premier ministre,
14:58l'ampleur du gouvernement.
15:00Il faut que les oppositions signent avec le gouvernement
15:03un accord de non-censure.
15:04Il va falloir négocier à fond dans les semaines qui viennent.
15:08Vous, LR, un accord de non-censure ?
15:10Nous, on le demande.
15:11Je veux dire, clairement...
15:13C'est possible, un accord large ?
15:15Moi, je considère qu'on est dans une tripartition
15:18qui est contraire à l'esprit de la Ve République.
15:21Ca a toujours été le fait majoritaire.
15:23Pour se sortir de cette tripartition
15:25et pour avoir une stabilité de nos institutions
15:28et d'un gouvernement, il doit être stable,
15:31eh bien, on peut se dire,
15:32voilà les lignes rouges que vous avez,
15:34voilà nos lignes rouges,
15:36et à partir de là, on bâtit un projet
15:39qui respecte, en fait, le Parlement, l'Assemblée,
15:43la composition de l'Assemblée actuellement.
15:45Je suis ravi que le PS, que vous teniez ces propos-là,
15:49et vous avez été un des premiers à tenir ces propos,
15:52parce que le fait d'être allié à la France insoumise
15:57et d'être dans une position assez extrême
15:59entre l'extrême gauche et l'extrême droite,
16:02on voyait bien que c'était ingouvernable.
16:04Que ce soit le gouvernement qui arrive demain,
16:07forcément, il y a l'épée de Damoclès.
16:09Si au moins, les forces de l'arc républicain
16:12peuvent se mettre autour d'une table
16:14pour discuter des lignes rouges
16:16et obtenir cet accord de non-censure,
16:19je pense que ça serait bien, d'une part, pour la France,
16:22mais aussi pour les Français.
16:24On est aux portes d'une crise agricole sans précédent,
16:27d'une crise industrielle sans précédent,
16:29d'une crise de la dette publique sans précédent.
16:32Les Français attendent aussi des mesures concrètes,
16:35et là, on peut se mettre autour d'une table
16:38pour répondre, à minima, à ces crises.
16:40Une question sur le 49-3, Philippe Brun.
16:42Pour faire réussir ce pacte de non-censure,
16:45le futur gouvernement doit s'engager à ne pas utiliser le 49-3 ?
16:49Ne pas l'utiliser sur les lois ordinaires, c'est évident.
16:52Sur le budget, je suis plus réservé.
16:54Là, on parle de la situation dans laquelle nous sommes.
16:57Si le budget, on met 70 jours à le discuter,
17:00ça veut dire que, pour nos agriculteurs,
17:02pour nos entreprises, pour les collectivités locales,
17:05il va falloir attendre le mois de mars
17:08pour savoir la situation,
17:09avec tous les problèmes juridiques que nous avons
17:12sur la rétroactivité,
17:13on entendait le ministre Armand à l'instant.
17:16Je crois qu'il faut aller vite.
17:17Pour ce budget-là, on ne va pas pouvoir se passer de 49-3.
17:21Je le dis en sincérité.
17:23Dire qu'on ne va pas faire de 49-3 sur ce budget,
17:26c'est irresponsable.
17:27Sur les autres, oui, on ne fera plus de 49-3.
17:30Mais sur celui-là, celui qu'on doit faire très urgentement
17:34pour permettre la continuité économique du pays,
17:36je le dis en responsabilité, il faudra sans doute un 49-3.
17:40Je vous ai vu sourire, vous êtes d'accord ?
17:42Pas de 49-3 pour ne pas avoir de gouvernement affaibli
17:46et pour voter le budget ?
17:47Non, de toute façon, il faudra actionner le 49-3
17:51dès lors qu'il y a des enjeux et des urgences à gérer.
17:55Maintenant, en revanche, il est vrai que sur les lois ordinaires,
17:58force est de constater que là,
18:00on peut poursuivre le débat parlementaire
18:03ad vitam aeternam.
18:04Je pense qu'il faut aussi laisser le temps au Parlement.
18:07On l'a vu, dès le mois de juillet,
18:10on a dit qu'il y avait une bascule de l'exécutif
18:14vers le Parlement.
18:16C'est ce qu'on avait dit avec cette assemblée
18:19assez totalement hétérogène.
18:22Je pense qu'il faut respecter l'esprit de la Ve République
18:27en disant que quand on n'a pas un exécutif fort,
18:29c'est au Parlement de prendre ses responsabilités.
18:32Si on arrive sur le fond de ce futur budget
18:35en début d'année 2025,
18:36Philippe Brun, quels compromis la gauche et les socialistes
18:40peuvent faire avec le Bloc central, la droite, sur le fond ?
18:43On n'a pas encore ouvert la discussion.
18:46D'abord, il faut une méthode, l'accord de non-censure,
18:49et ça rassemble. J'en suis très heureux.
18:52J'appelle à des dialogues de l'ACL,
18:54l'hôtel de l'ACL de l'Assemblée nationale,
18:56qu'on s'enferme avec le nouveau Premier ministre,
18:59et qu'on essaie de trouver des accords sur certains sujets.
19:02Il y a, évidemment, la question des hausses d'impôts,
19:05les hausses des taxes d'électricité.
19:07Il faut revenir sur cette hausse.
19:09Elle était massivement rejetée.
19:11Il y a eu un débat à l'Assemblée sur le budget.
19:14Il y a eu des amendements qu'il faut reprendre.
19:16Nous, les socialistes, on a fait une liste
19:19qu'il fallait reprendre pour que le budget soit votable.
19:22Il y a des compromis qui peuvent être trouvés.
19:24J'en suis convaincu.
19:26Il y aura des discussions plus importantes
19:28sur le programme du gouvernement.
19:30Sur les impôts, quels compromis vous pouvez trouver ?
19:33Quels compromis les LR peuvent-ils trouver avec les socialistes ?
19:36C'est ce qu'on essaie de faire au Sénat.
19:40C'est-à-dire, effectivement,
19:43on se dit des prélèvements obligatoires,
19:45plus de justice sociale,
19:47notamment pour les personnes les plus aisées,
19:50mais dans le même temps,
19:52il faut donner un signal fort sur nos dépenses publiques.
19:55Il faut véritablement qu'on puisse faire une réforme de l'Etat.
19:58Je pense notamment aux agences gouvernementales.
20:0185 milliards d'euros sur ces seules agences, je pense...
20:06Vous êtes d'accord pour augmenter la taxation
20:09sur les plus riches, les superdividendes ?
20:11C'est un curseur qu'il faut qu'on négocie ensemble.
20:14De toute façon,
20:16il viendra le temps des réformes structurelles de l'Etat.
20:18Moi, je milite pour qu'on ait un ministre sur la réforme de l'Etat.
20:22De qu'est-ce que, en fait, l'Etat...
20:25Quel est son périmètre d'intervention ?
20:27Et là, je pense qu'on peut se rejoindre avec la gauche,
20:30une grande vague de décentralisation.
20:33Vous savez, des agences,
20:34comme l'Agence nationale de la cohésion des territoires,
20:37qui distribue des subventions, pourquoi pas se dire
20:40que c'est au préfet, dans chaque département,
20:43d'instruire ces subventions ?
20:45On fait plus de proximité et on peut s'entendre
20:48avec la gauche sur la réorganisation de l'Etat
20:50et une vague de décentralisation.
20:52Après les sénateurs, Bruno Le Maire,
20:54c'est l'autre parti de cette émission,
20:56était face aux députés devant la Commission des finances
20:59qui enquête sur les dérapages du déficit public.
21:02L'ex-ministre a été très offensif lors de cette audition,
21:05il a défendu ses choix et refusé d'endosser seul
21:08la responsabilité de cette dégradation des coûts.
21:11Écoutez.
21:12C'est très facile de faire porter sur mes seules épaules
21:16la responsabilité de la dégradation des comptes publics
21:18en 2023 et en 2024.
21:21Si facile que tout le monde, ou presque,
21:24depuis mon retrait de la vie publique,
21:27a emprunté ce chemin
21:29dans un unanimisme suspect, indigne de notre démocratie.
21:34Facile, mais faux.
21:36La dégradation brutale des comptes publics
21:38en 2023 et en 2024 tient avant tout,
21:41et vous le savez tous,
21:42à une erreur de prévision des recettes
21:44liée à la crise du Covid et à la crise inflationniste.
21:47Nous avons réagi vite, nous avons réagi fort,
21:51la plupart du temps, contre vous.
21:53Philippe Brun,
21:54vous entendez l'argument de Bruno Le Maire
21:56qui dit que le déficit s'est dégradé
21:58car le gouvernement a dû faire face à des crises importantes,
22:01coûteuses, comme le Covid, l'inflation.
22:04Est-ce que ce n'est pas un peu facile
22:06de tout mettre sur le dos de Bruno Le Maire ?
22:08Oui, mais c'est aussi facile de tout mettre sur le dos du Covid.
22:11La Cour des comptes a démontré
22:13que l'aggravation de la dette publique
22:15relève seulement pour un tiers du Covid,
22:17deux tiers sur la politique qui était celle du gouvernement.
22:21Avec cette question du stock de dette,
22:23c'est un autre débat,
22:24Bruno Le Maire a été auditionné
22:26sur le trou de 50 milliards sur cette année,
22:29qui relève pas seulement de mauvaise gestion,
22:31mais de très mauvaises prévisions.
22:33On avait prévu des recettes
22:35qui se sont révélées bien inférieures
22:37à ce que pensait le gouvernement.
22:39Nous avions pourtant tiré la fenêtre d'alarme.
22:41Vous savez, il y a une instance de concertation
22:44qui s'appelle les dialogues de Bercy.
22:45J'ai été aller avec les socialistes dire,
22:47j'ai rencontré mes directeurs de supermarché,
22:49ils me disent que malgré la hausse des prix,
22:51le chiffre d'affaires baisse,
22:52parce qu'il y a un phénomène de déconsommation.
22:54Il n'y a pas de magie, quand les prix augmentent
22:56et que votre salaire n'augmente pas, vous consommez moins.
22:59Vous passez de la marque à la marque distributeur,
23:01de la marque distributeur à la marque premier prix,
23:03et qu'est-ce qui se passe à la fin ?
23:04Des recettes de TVA qui plongent,
23:05et puis un chiffre d'affaires qui baisse,
23:07et donc un IES, un poste de société qui baisse aussi,
23:11donc un vrai problème de prévision des recettes.
23:13Donc la faute à l'administration de Bercy
23:14qui a mal anticipé les recettes ?
23:16Non, en 2023, on avait déjà eu un taux de lien des recettes
23:20avec la croissance seulement de 0,4,
23:23et là, ils avaient fait une prévision à 1,3.
23:25En vérité, on savait très bien que ça n'allait pas fonctionner.
23:27Donc la vraie question, c'est le mensonge
23:29sur le projet de loi de finances pour 2024,
23:32et c'est là-dessus que nous auditionnions Bruno Le Maire.
23:34Stéphane Lerudulier, pour reprendre ce qu'a dit Philippe Brun,
23:37c'est un peu facile de tout mettre sur le dos du Covid.
23:39Bruno Le Maire était aux affaires, aux responsabilités pendant 7 ans.
23:42Il est aussi comptable de ce bilan ?
23:44Il est comptable de 1 000 milliards de dettes.
23:47Bon, il a forcé de constater qu'il est vrai que la Cour des comptes
23:53a bel et bien dit un tiers, deux tiers,
23:55donc deux tiers liés à d'autres phénomènes que le Covid.
23:59Je vous rejoins là-dessus.
24:00Après, le Sénat avait alerté.
24:03Dès le mois de janvier, février et l'année dernière.
24:05Rappelez-vous du contrôle sur place et sur pièce
24:09du rapporteur général qui découvre que les services,
24:14vous parliez de l'administration de Bercy,
24:16que les services de Bercy avaient alerté le politique,
24:20c'est-à-dire Bruno Le Maire, dès le mois de février 2024.
24:24Et ce que je déplore, c'est la non-réaction du pouvoir politique
24:29à des fins électorales.
24:31Très clairement, ils avaient en ligne de mire les Européennes.
24:35À partir de là, ils ont mis le mouchoir sur cette problématique
24:39pour éviter de faire un projet de loi de finances rectificatif
24:42pour réévaluer les recettes à la baisse
24:46et aller chercher des marges de manœuvre au niveau des dépenses.
24:48Est-ce qu'Emmanuel Macron a laissé filer les comptes
24:51pour essayer de gagner les élections européennes cette année ?
24:54Bon, ça n'a pas fonctionné.
24:55Oui, il y a eu cette tentation, évidemment,
24:57parce qu'il y a eu des alertes.
24:58Même Bruno Le Maire lui-même a dit à un moment
25:00qu'il faut faire un projet de loi de finances rectificative.
25:03Donc, moralité, il y a 50 milliards de trous dans la caisse.
25:06Moi, ce qui m'inquiète, c'est que ça va être encore plus cette année
25:08avec les conséquences de l'instabilité politique.
25:11Donc là, il est temps qu'on se mette autour de la table
25:13pour réparer tout ce qui a été détruit.
25:15Place au dialogue. Ce sera le mot de la fin.
25:17On a quand même réussi à vous mettre d'accord sur certains points.
25:20Merci d'avoir participé à ce débat.
25:22On se retrouve la semaine prochaine. Ciao, ciao.

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