Après les scandales des eaux en bouteille Perrier, au début de l’année 2024, au cours desquels le groupe Nestlé, propriétaire de Perrier, a été accusé par l’Agence régionale de santé d’avoir utilisé des techniques frauduleuses pour cacher l’insuffisance de la qualité de l’eau exploitée, le Sénat a décidé de lancer une commission d’enquête. Son objectif est de travailler sur les pratiques des industriels de l'eau en bouteille et les responsabilités des pouvoirs publics dans les défaillances du contrôle de leurs activités et la gestion des risques économiques, patrimoniaux, fiscaux, écologiques et sanitaires associés. Le 11 décembre, les membres de la commission entendaient Nicolas Marty, professeur des universités à l’Université de Perpignan, auteur de L'Invention de l'eau embouteillée, puis Guillaume Pfund, docteur en géographie économique, chercheur à l'université Lumière Lyon II. Revivez leurs échanges. Année de Production :
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00:00:02...
00:00:09Vous êtes sur Public Sénat, vous regardez 100 %,
00:00:12soyez les bienvenus.
00:00:13Un chiffre, un chiffre, un seul.
00:00:1430 %, comme la proportion des marques françaises
00:00:17d'eau minérale qui ont utilisé des traitements interdits
00:00:20pendant plusieurs décennies,
00:00:22selon un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales
00:00:25publié en début d'année 2024.
00:00:27A la suite de cette révélation,
00:00:29le Sénat a décidé de lancer une commission d'enquête.
00:00:32La semaine dernière, elle auditionnait
00:00:34le professeur d'histoire Nicolas Marti.
00:00:36Pour mettre ce scandale en perspective,
00:00:38on file en audition et on en reparle juste après.
00:00:41Je suis historien, donc il y a des enjeux forts aujourd'hui.
00:00:46Pour nous, les historiens, c'est vrai qu'on a beaucoup de mal
00:00:50à nous projeter vers le futur, mais on se retourne
00:00:52vers les trajectoires du passé pour comprendre ce qui se passe.
00:00:56C'est pas du tout un objectif qui est strictement descriptif,
00:00:59mais d'essayer de comprendre.
00:01:01La notion de trajectoire, je pense, est importante
00:01:03pour qu'on puisse pouvoir agir sur ces trajectoires.
00:01:06Et c'est, je pense, ce que vous faites aujourd'hui.
00:01:09Donc c'est très intéressant aussi pour moi
00:01:12de vous présenter quelques éléments.
00:01:15Alors, je voudrais, dans ce propos liminaire,
00:01:17évoquer 3 points.
00:01:19Le 1er, sur la consommation et l'image du produit,
00:01:23tel que vous l'avez un peu proposé
00:01:26dans votre introduction.
00:01:27Le 2e point, sur le type de marché qui existe en France
00:01:32et en le comparant très rapidement avec d'autres éléments.
00:01:34Et un 3e point, sur la trajectoire
00:01:37qui est liée à la longue durée de la régulation
00:01:39sur laquelle j'ai travaillé et qui explique, en fait,
00:01:40la situation aujourd'hui de ce qui se passe en France
00:01:44au regard de ce qui se passe ailleurs en Europe.
00:01:46Alors, la 1re chose, c'est sur la consommation.
00:01:50La consommation d'eau embouteillée est une consommation,
00:01:53essentiellement, qui a émergé de manière industrielle
00:01:56au 19e siècle, à partir des années 1840.
00:01:58Le 1er marché, c'est le marché britannique, en fait,
00:02:01qui a été le marché pionnier de ces eaux embouteillées.
00:02:04Ce qui fait qu'il y a de nombreux opérateurs industriels
00:02:07qui sont britanniques.
00:02:08Par exemple, ceux qui ont lancé la source Berry en France
00:02:10sont des britanniques.
00:02:11En dépit du nom français, c'est une boîte,
00:02:14une entreprise qui reste britannique jusqu'en 1947.
00:02:17C'est un...
00:02:20Le marché français, néanmoins, est un marché très important
00:02:22en Europe au 19e siècle.
00:02:23Et c'est un marché qu'on pourrait qualifier de fragmenté
00:02:26socialement et géographiquement.
00:02:28Fragmenté socialement parce qu'il concerne
00:02:30une petite partie de la population
00:02:32qui sont, en fait, des élites.
00:02:34C'est une consommation d'élite
00:02:36parce que c'est un produit qui coûte cher au 19e siècle
00:02:39et qui est consommé par peu de monde,
00:02:41mais qui donne un caractère de distinction
00:02:44pour cette consommation.
00:02:47La plupart des catégories populaires
00:02:49boivent des boissons hygiéniques
00:02:51ou de l'eau qui est de mauvaise qualité
00:02:53ou des boissons comme le vin, qui sont des boissons sûres.
00:02:57Alors que l'eau est peu sûre, en général.
00:03:01Voilà. Donc ça, c'est un point qui est important à souligner.
00:03:05C'est un marché aussi qui est fragmenté géographiquement
00:03:07parce qu'il y a des consommations sur des zones limitées
00:03:10où se trouvent les élites.
00:03:11Par exemple, la rivière française,
00:03:13la région parisienne, la Normandie
00:03:15et peu d'autres zones de consommation.
00:03:19Ensuite, il y a une forte croissance de la consommation
00:03:22qui est apparue au tout début du 20e siècle,
00:03:25mais qui a été ensuite bloquée par une longue période
00:03:27de grandes difficultés pour l'économie française
00:03:30entre 1914 et les années 1950.
00:03:33Une période de guerre et de crise
00:03:35qui bloquent, en réalité, l'essor de la consommation.
00:03:38Et l'essor réel de la consommation de ces produits,
00:03:41c'est essentiellement à partir des années 60 du 20e siècle,
00:03:48avec une très forte croissance.
00:03:50On est passé, en gros, d'une dizaine de litres par habitant
00:03:53à la fin des années 40
00:03:55à 130 ou 140 litres par habitant dans les années 1990.
00:04:00C'est un moment très particulier
00:04:03de l'histoire de la consommation en France,
00:04:07avec des grands changements dans les réseaux de distribution,
00:04:11une forte baisse de la consommation d'alcool,
00:04:13une forte augmentation de l'achat en grande distribution,
00:04:19une grande transformation des paysages,
00:04:23du rapport à l'environnement.
00:04:25Et les eaux embouteillées apparaissent comme des eaux
00:04:28qui permettent la sécurité, la santé,
00:04:33un rapport à la pureté, alors que tout change
00:04:35et qu'on a des transformations environnementales fortes.
00:04:39Et un dispositif qui est rassurant
00:04:42parce qu'il est appuyé sur des qualités
00:04:45assurées par les éléments, disons,
00:04:50qui portent l'aspect thérapeutique,
00:04:52c'est-à-dire, en gros, l'aspect médical, en fait, thérapeutique,
00:04:55qui est très fortement lié à ce produit.
00:04:59Aujourd'hui, la consommation en France,
00:05:01elle se situe à peu près à 130, 135 litres par habitant.
00:05:07On est au-dessus de la moyenne de l'Union européenne,
00:05:09qui est de 112, à peu près.
00:05:13Mais on est en dessous de 2 gros consommateurs,
00:05:15qui sont l'Italie et l'Allemagne,
00:05:17qui sont donc des consommateurs plus importants que la France.
00:05:21La consommation en France se concerne essentiellement
00:05:24des eaux plates, à peu près à 80 %,
00:05:26alors que, par exemple, en Allemagne,
00:05:27c'est l'inverse, à 80 % des eaux gazeuses.
00:05:32C'est...
00:05:34L'essentiel des eaux consommées sont des eaux minérales,
00:05:38de l'appellation eaux minérales,
00:05:3960 % environ pour 40 % d'eau de source.
00:05:43Alors...
00:05:45Le marché européen dans lequel on se situe
00:05:49est celui qui croit le moins, en fait, dans le monde actuellement.
00:05:52Il croit à hauteur de 0,2, 0,3 % par an,
00:05:56alors qu'il y a un marché asiatique
00:05:58qui croit à hauteur de 12 % par an.
00:05:59Donc on est à un marché mature, en fait, en Europe,
00:06:02qui évolue peu, alors qu'il y a d'autres zones du monde
00:06:06qui croissent très vite dans ce type de consommation.
00:06:09Alors, le 2e point que je voulais évoquer,
00:06:11c'était sur le type de marché.
00:06:13Une des caractéristiques du marché en France,
00:06:15c'est que c'est un marché qui est très concentré,
00:06:20que certains économistes pourraient appeler un oligopole, en fait.
00:06:23C'est-à-dire qu'il y a peu d'opérateurs, en réalité,
00:06:27et c'est un fait qui est ancien.
00:06:29Déjà, dans les années 1950,
00:06:31il y a eu 3 opérateurs qui étaient Perrier,
00:06:34le groupe Perrier, qui était un groupe
00:06:36qui n'était pas que l'eau minérale,
00:06:37Vitel et Evian
00:06:39disposaient déjà de 80 % environ du marché
00:06:42à 3 opérateurs dans les années 1950.
00:06:47Cet état de fait s'est confirmé dans les années 1980
00:06:51et encore en 1992 à la chute du groupe Perrier,
00:06:53qui a été obligé de se décomposer
00:06:56et qui a été racheté par Nestlé,
00:06:58à tel point que, lorsque Nestlé a racheté le groupe Perrier,
00:07:02l'autorité de la concurrence européenne
00:07:04a ouvert les portes de l'autorité de la concurrence européenne
00:07:06et l'autorité de la concurrence européenne
00:07:08a obligé à revendre une partie de ses actifs
00:07:11pour éviter une position de domination.
00:07:16Donc, c'est en 1992.
00:07:19Aujourd'hui, il y a 3 gros opérateurs
00:07:21qui sont donc Danone,
00:07:24Nestlé, pour Nestlé Waters,
00:07:26avec des rachats qui ont eu lieu,
00:07:28et le groupe Alma, qui sont essentiellement des autres sources,
00:07:32qui, à eux 3, maîtrisent à peu près 60 % du marché.
00:07:36En fait, derrière l'apparente diversité du rayon boisson
00:07:40dans les grandes surfaces,
00:07:41puisque, quand vous êtes dans un rayon boisson,
00:07:42vous voyez énormément de produits différents,
00:07:45en fait, il y a un véritable contrôle par peu d'opérateurs.
00:07:50Chaque groupe a une stratégie de gamme, en fait,
00:07:52qui lui permet d'avoir une gamme de produits
00:07:55qui le déclinent,
00:07:57des eaux gazeuses, des eaux fortement minéralisées,
00:08:00des eaux minéralisées, des eaux de sourd,
00:08:02des eaux aromatisées, etc.,
00:08:03mais qui, en fait, relèvent d'un seul opérateur.
00:08:06Ce qui n'est pas trompeur,
00:08:08puisqu'on ne trompe pas le consommateur,
00:08:11mais on a une apparente diversité
00:08:14qui, en réalité, est moins diverse que ce qu'on peut croire.
00:08:18Le marché français est un marché aussi
00:08:21qui est un marché national,
00:08:23ce qui est assez différent de ce qui se passe, par exemple,
00:08:25chez un gros consommateur, qui est l'Allemagne.
00:08:28C'est-à-dire que vous avez les gros produits phares
00:08:31qui sont Perrier, Evian, Volvic, etc.,
00:08:36se déplacent dans tout le territoire national.
00:08:39Ils sont vendus dans tout le territoire national,
00:08:41ce qui fait des déplacements et des coûts
00:08:45qui sont particuliers,
00:08:46ce qui n'est pas du tout le cas, par exemple,
00:08:47de ce qui se produit en Allemagne.
00:08:49En Allemagne, il y a des opérateurs
00:08:51qui sont des opérateurs locaux ou régionaux
00:08:53avec des produits qui circulent très peu, en fait,
00:08:56et par ailleurs, peut-être on y viendra,
00:08:58mais avec des produits, des emballages
00:09:00qui sont standardisés,
00:09:01et ce qui fait qu'ils peuvent facilement
00:09:03échanger leurs bouteilles
00:09:04pour éviter les coûts de transport.
00:09:07C'est un marché, par ailleurs,
00:09:09qui est marqué par le caractère d'exportation,
00:09:11puisqu'il y a environ 30 % du marché
00:09:12qui est à l'exportation en France,
00:09:15des opérateurs français qui le font à l'exportation.
00:09:18Alors, le 3e point que je voulais évoquer,
00:09:21qui me tient à coeur,
00:09:22parce que je pense qu'il permet de comprendre,
00:09:23c'est d'essayer de voir
00:09:25pourquoi on est dans cette situation,
00:09:28et dans cette situation de forte concentration,
00:09:29de fort prestige des eaux
00:09:32qui sont liées quand même à des qualités thérapeutiques
00:09:35ou favorables à la santé,
00:09:36ou en tout cas qui sont liées à la santé.
00:09:39J'ai essayé de comprendre comment c'était construit
00:09:40à partir d'un même produit,
00:09:42l'eau minérale, minéralwasser en allemand,
00:09:45mineral water en anglais,
00:09:47agua, agua minero medicinal en espagnol.
00:09:50C'est le même produit, en fait,
00:09:52une eau qui sort de terre et qui a des vertus,
00:09:54certaines vertus,
00:09:55et comment c'est faite la régulation.
00:09:58Et c'est, en fait, l'idée
00:10:00que les marchés se construisent socialement
00:10:02avec des acteurs qui sont en rapport de force
00:10:04les uns avec les autres,
00:10:06des acteurs marchands, les producteurs, les consommateurs,
00:10:08mais aussi des experts qui interviennent
00:10:11pour réguler le marché,
00:10:13pour donner la définition de la qualité de ces produits.
00:10:16Et la définition de la qualité de ces produits
00:10:18n'a pas été la même, en fait,
00:10:19en fonction de différents pays,
00:10:22bien qu'on soit dans le monde occidental
00:10:24avec les mêmes techniques, etc.
00:10:27Donc ce qui s'est produit,
00:10:28c'est qu'ont émergé 3 modèles de régulation en Europe
00:10:33à la fin du 19e siècle jusqu'en 1980,
00:10:36au moment de la convergence des normes.
00:10:39Le 1er modèle, je le qualifierai de latin.
00:10:43Je ne sais pas si vous serez d'accord avec moi,
00:10:44mais enfin, je le prends pour ce positionnement.
00:10:46Pourquoi ? Parce qu'il rejoint la France,
00:10:49l'Italie et l'Espagne,
00:10:50ainsi qu'à une certaine période, la Belgique,
00:10:53qui a rejoint ce modèle.
00:10:54C'est un modèle qui s'appuie sur le caractère thérapeutique
00:10:57de l'eau embouteillée, de l'eau minérale,
00:11:00et qui s'appuie sur un élément fondamental.
00:11:02C'est une autorisation qui est faite
00:11:04pour autoriser cette eau à être mise sur le marché.
00:11:10C'est l'équivalent presque
00:11:11d'une autorisation de mise sur le marché.
00:11:13Donc n'importe qui ne peut pas produire de l'eau minérale.
00:11:16Il faut qu'il y ait un opérateur de santé
00:11:18qui ait validé cet aspect-là.
00:11:20Alors en France, c'est l'Académie nationale de médecine
00:11:22qui donne son avis,
00:11:23et ensuite, c'est différents ministères.
00:11:25Maintenant, ce sont les préfectures
00:11:26qui valident cet élément-là.
00:11:28En Espagne, ce sont des laboratoires
00:11:30ou des universités régionales.
00:11:33Mais le principe, c'est qu'il y a une autorisation préalable
00:11:36de mise sur le marché,
00:11:38ce qui fait qu'il y a peu d'opérateurs, en fait.
00:11:40Et ce qui explique la concentration,
00:11:42parce que petit à petit,
00:11:44il y a des coûts d'entrée dans le marché
00:11:45qui sont très élevés,
00:11:47avec quand même des surveillances,
00:11:50des coûts importants qui sont faits
00:11:53pour pouvoir rentrer sur ce marché.
00:11:55Plus on avance dans le XXe siècle,
00:11:57plus on demande de surveiller,
00:11:58d'amener des éléments concrets de surveillance.
00:12:02Donc ça limite très fortement
00:12:05le nombre d'opérateurs qui rentrent sur ce marché.
00:12:08Donc c'est une des raisons
00:12:09pour lesquelles on est dans un oligopole en France,
00:12:11parce qu'il y a cette forte concentration
00:12:13qui s'explique par le faible nombre de personnes
00:12:15qui peuvent participer à ce marché des eaux minérales.
00:12:19Les experts qui ont joué un rôle très important là-dedans
00:12:22sont les pharmaciens et les médecins,
00:12:24qui ont défendu ce principe de l'aspect thérapeutique
00:12:27et qui l'ont défendu
00:12:29alors que ce principe ne faisait pas du tout consensus,
00:12:32vraiment pas.
00:12:33Les archives de la Direction générale de la santé,
00:12:35de l'Académie de médecine
00:12:36sont remplies de rapports de l'inspection des fraudes,
00:12:40des contributions indirectes
00:12:41qui expliquent que cette régulation est absurde,
00:12:46parce que les produits ne sont pas vraiment des médicaments.
00:12:52Il n'y a aucune sécurité
00:12:53sur le fait que ce soit vraiment des médicaments.
00:12:55Et d'autre part, il y a aussi des contestations
00:12:57très fortes des ingénieurs des mines
00:12:58sur le fait que le produit de la station thermale
00:13:01n'est pas celui qui est dans la bouteille,
00:13:03parce qu'il y a des modifications,
00:13:05et ça, ça existe déjà dès le milieu du 19e siècle.
00:13:09Par exemple, la décantation.
00:13:11Une eau décantée n'est pas la même
00:13:13que celle qui sort de la source, puisqu'elle a été décantée.
00:13:16Donc il y a des contestations,
00:13:17mais les rapports de force
00:13:20entre les différentes catégories d'acteurs
00:13:21ont fait que les médecins ont réussi,
00:13:24parfois parce qu'ils avaient des intérêts
00:13:25dans les stations et dans les producteurs,
00:13:29notamment la compagnie fermière de Vichy.
00:13:30Il y a des médecins
00:13:32dans le conseil d'administration de la société,
00:13:34mais aussi parce que ça leur donne une forme de pouvoir
00:13:37et que je pense aussi qu'il y a une vraie sincérité,
00:13:40parce que la thérapeutique thermale
00:13:41est défendue en France de manière solide,
00:13:44est défendue aussi par les pharmaciens,
00:13:46ce système-là a fonctionné.
00:13:49Le 2e modèle,
00:13:52c'est un modèle sur lequel on va aller très vite,
00:13:53qui est très simple, c'est le modèle britannique,
00:13:55que je qualifierais de libéral,
00:13:57c'est le modèle du buyer beware.
00:14:00C'est à l'acheteur de faire attention à ce qu'il achète.
00:14:04Donc n'importe qui peut produire de l'eau minérale.
00:14:08Vous avez envie d'appeler votre produit eau minérale,
00:14:11vous l'appelez eau minérale.
00:14:12Il faut juste que le consommateur ne soit pas trompé
00:14:14et donc il faut qu'il y ait une étiquette
00:14:15qui explique ce qu'il y a dans votre eau minérale.
00:14:18Les consommateurs aiment le sucre, on met du sucre.
00:14:21Ils aiment les colorants, on met des colorants.
00:14:23Et on appelle ça le mineral water trade.
00:14:25C'est le commerce des eaux minérales.
00:14:26En fait, il n'y a aucune régulation ni définition du produit.
00:14:30Les acteurs qui ont joué un rôle là-dedans
00:14:32sont surtout des chimistes
00:14:34et qui contrôlent comme un produit alimentaire
00:14:36ces eaux minérales.
00:14:38Un exemple typique d'eau minérale britannique, c'est Schweppes,
00:14:41qui a fabriqué de l'eau artificielle,
00:14:43puis qui a mis du sucre, puis des choses diverses, etc.
00:14:46Ca, c'est typique de la régulation qui est...
00:14:51En fait, on ne définit pas la qualité,
00:14:53c'est au consommateur de faire attention à ce qu'il fait.
00:14:55Et on l'appelle comme on veut.
00:14:57Alors, après la Seconde Guerre mondiale,
00:14:58on les a appelés les soft drinks,
00:15:00parce qu'il y a eu une forte influence américaine,
00:15:02mais sinon, c'était le mineral water trade.
00:15:04Bon, et le troisième modèle de régulation,
00:15:07c'est le modèle germanique,
00:15:10qui est un modèle différent des deux précédents
00:15:13et qui s'est appuyé sur un système
00:15:16de compter les nombres de minéraux par litre.
00:15:20Alors, c'est un système de chimiste.
00:15:24On va qualifier d'eau minérale
00:15:26une eau qui passe un seuil de temps de minéraux par litre.
00:15:31En dessous, on n'est pas au minéral.
00:15:32En dessus, on est au minéral.
00:15:34Alors, ça ne s'est pas fait tout seul,
00:15:37parce qu'il y a eu...
00:15:38Je termine rapidement.
00:15:41Il y a eu une longue période de forts contentieux
00:15:47entre les différentes entreprises
00:15:49qui fabriquaient ces eaux en Allemagne,
00:15:51et ce sont des accords de branche
00:15:52qui ont abouti à cette décision, avec l'aide des chimistes,
00:15:55pour éviter les contentieux.
00:15:57Peut-être que c'est un point intéressant.
00:15:58Un contentieux très célèbre en Allemagne,
00:16:01c'est un opérateur important
00:16:02qui s'appelle Apollinaris Gesellschaft.
00:16:04C'est une société d'eau gazeuse importante,
00:16:07mais qui est moins connue que les grandes eaux françaises,
00:16:10et qui, en fait, se qualifiait d'eau minérale naturelle gazeuse.
00:16:15Or, elle procédait à une décantation,
00:16:18parce que pratiquement toutes les eaux gazeuses,
00:16:21si on ne les fait pas décanter,
00:16:22au bout de quelques semaines,
00:16:25vous avez un dépôt qui se pose à la fin,
00:16:27en fond de bouteille,
00:16:29qui fait que le produit n'est pas du tout attractif au consommateur.
00:16:32Il y a un espèce de dépôt un peu spongieux
00:16:34en bas de la bouteille.
00:16:35Donc, pour éviter ça, les opérateurs,
00:16:38c'est le cas aussi à Vichy, partout, en fait,
00:16:41font une décantation de l'eau.
00:16:44Donc, les minéraux se déposent.
00:16:46Ensuite, on réembouteille pour éviter qu'il y ait ce dépôt.
00:16:51Et ils ont été attaqués au début du XXe siècle
00:16:53par des eaux minérales artificielles
00:16:55qui disaient votre eau n'est pas naturelle, en fait,
00:16:58puisque c'est pas la même eau que celle qui sort de la source,
00:17:01puisque vous la faites décanter.
00:17:03Et c'est uniquement après ces contentieux très forts
00:17:05qui coûtaient très cher aux entreprises
00:17:08qu'ils sont arrivés à des accords de branche
00:17:11pour dire ce qu'était l'eau minérale
00:17:12à partir, donc, de ce caractère de minéralité de l'eau.
00:17:17Donc, dans les années 1970-1980,
00:17:22la communauté européenne a cherché à faire converger les normes,
00:17:26puisque vous comprenez qu'une eau minérale britannique
00:17:31ou une eau minérale allemande
00:17:33ne pouvait pas être vendue en France
00:17:35sous le caractère d'eau minérale
00:17:36parce qu'elle n'était pas autorisée par l'Académie de médecine.
00:17:38Donc, il devait absolument passer
00:17:40par les biais des opérateurs de santé.
00:17:43Certains ont tenté de le faire, l'ont fait,
00:17:45mais c'était quand même assez compliqué.
00:17:47De ce fait, il y a eu donc un grand travail
00:17:49qui a été fait dans les années 1970-1980
00:17:51pour arriver à la 1re directive européenne de 8777-CE,
00:17:55qui est la 1re directive qui a donné une sorte de compromis.
00:17:59Ca a été une longue discussion
00:18:00entre la version latine et la version germanique.
00:18:04Et c'est encore le résultat de la directive 2009
00:18:07qui a été mise à jour et qui a de plus en plus,
00:18:11si vous passez cette expression,
00:18:12cornerisé un peu le caractère favorable à la santé, thérapeutique,
00:18:16qui reste une opportunité potentielle,
00:18:18mais qui reste maintenant assez secondaire
00:18:21dans la définition de l'eau minérale.
00:18:26Maintenant, ce qui compte énormément
00:18:27dans la directive 2009,
00:18:28c'est le caractère de minéralité et de pureté originelle.
00:18:33Il y a une autre forme de convergence des normes
00:18:34qui a été faite par le biais de ce qu'on appelle
00:18:37le codex alimentarius,
00:18:39c'est-à-dire de se mettre d'accord sur la qualité des aliments,
00:18:42la définition des aliments tel qu'on peut les intégrer
00:18:46dans la discussion.
00:18:48Là, ça rejoint un point qui est soulevé encore aujourd'hui.
00:18:52C'est le fait que la vision européenne
00:18:55a heurté très fortement la vision anglo-saxonne,
00:18:58notamment américaine, sur le fait que la vision américaine
00:19:01défend l'aliment parfait, pur,
00:19:03qui n'a absolument aucun risque.
00:19:08Et donc une eau qui n'est pas traitée
00:19:10est une eau dangereuse pour les Etats-Unis.
00:19:12Ils ne peuvent pas considérer qu'on peut mettre ça
00:19:15dans les mains des consommateurs.
00:19:19Alors que c'est pas du tout la vision
00:19:20de l'eau minérale française ou de l'eau minérale européenne,
00:19:22parce qu'il y a des germes
00:19:25qui ne sont pas toxiques, enfin, dans des eaux minérales.
00:19:30Ça existe, mais c'est absolument un repoussoir pour les Etats-Unis.
00:19:35Ce qui explique que le traitement, par exemple, de l'eau Perrier,
00:19:39ils peuvent très bien traiter leur eau
00:19:41et l'exporter aux Etats-Unis.
00:19:43Ils sont accueillis à bras ouverts comme étant très, très bien.
00:19:45Et c'est ce qu'ils font, d'ailleurs.
00:19:47Bon, donc, finalement,
00:19:51le Codex Alimentarius n'a pas abouti
00:19:54à une convergence complète,
00:19:55parce que les Etats-Unis conservent, bien sûr,
00:19:58notamment la Food and Drug Administration,
00:19:59conservent ces limites
00:20:01qu'on voit aussi dans d'autres produits,
00:20:03comme les fromages au lait cru, enfin, ce genre de choses.
00:20:07Et cette convergence fait qu'on est arrivés
00:20:12à maintenir quand même la place de la vision française,
00:20:18de la vision germanique
00:20:19dans le fonctionnement général de la régulation,
00:20:22qui est un compromis, en fait.
00:20:23Même la directive de 2009
00:20:26est un compromis entre les différentes formes de régulation.
00:20:30Pendant ces négociations,
00:20:32j'anticipe un peu, mais je suis trop long,
00:20:34je vous prie de m'excuser,
00:20:35la France a défendu ses minéraliers
00:20:38comme je qualifierais des champions nationaux, en fait.
00:20:42C'est-à-dire qu'elle a défendu cette vision de la régulation
00:20:46parce que la Chambre syndicale des eaux minérales la défendait,
00:20:49parce qu'il y avait des enjeux d'exportation
00:20:51très importants et de concurrence.
00:20:53Et bien qu'il n'y ait pas de consensus,
00:20:57en France,
00:21:00la négociation sur cette directive des années 80
00:21:03et jusqu'en 2009 a porté quand même cette vision
00:21:07de la régulation des eaux minérales,
00:21:11qui, dans la longue durée, a toujours été quand même contestée.
00:21:16Dès le 19e siècle, il y a plusieurs opérateurs,
00:21:19et notamment les contributions indirectes,
00:21:21qui considéraient qu'il faudrait une seule appellation,
00:21:24c'est eau de table,
00:21:25et ça permettrait de beaucoup simplifier.
00:21:28Pourquoi les contributions indirectes ?
00:21:29Parce qu'en fait, les eaux minérales ne payaient pas d'impôts
00:21:32et ne payaient pas l'octroi au 19e siècle.
00:21:35Et les agents des contributions indirectes
00:21:37voyaient qu'il y avait énormément de consommation
00:21:39qui n'était pas du tout thérapeutique.
00:21:42Et donc, ils disaient, c'est pas logique.
00:21:43Moi, je veux bien que les consommations thérapeutiques
00:21:45ne soient pas fiscalisées ou taxées,
00:21:48mais en revanche, tout ce qui est rafraîchissement,
00:21:50il n'y a pas de raison que ce ne soit pas taxé.
00:21:52Et donc, ils ont contesté, dès le départ,
00:21:54cette vision-là, voilà.
00:21:59Bon, voilà pour mon propos liminaire.
00:22:00Je vous prie de m'excuser d'être un peu long.
00:22:01C'était très intéressant, vos propos.
00:22:04Tiens, on vous en remercie.
00:22:05Je laisse tout de suite la parole à notre rapporteur.
00:22:08Merci, M. le Président,
00:22:10et merci beaucoup pour cet exposé
00:22:11qui vraiment nous a fait traverser le temps
00:22:14et l'appétition des eaux minérales à travers le temps.
00:22:17Peut-être pour ramener un peu d'histoire du temps présent,
00:22:18ne m'en veuillez pas quand même.
00:22:21Pour apprécier un petit peu
00:22:24comment vous considérez ce qui s'est passé
00:22:27avec les différents scandales sur les eaux embouteillées,
00:22:30quel effet sur ce marché que vous décrivez,
00:22:34au Ligo polistique, avec peu d'acteurs,
00:22:36quel effet vous avez perçu,
00:22:38et est-ce que ce qui s'est passé a des précédents
00:22:42dans l'histoire des embouteilleurs,
00:22:44des moments de choc de confiance négative
00:22:45tels qu'ils ont pu être rencontrés
00:22:48en raison de fraudes à la réglementation ?
00:22:50Peut-être cette 1re question.
00:22:52Si vous le voulez bien, on ira en cadence sur les questions
00:22:54pour qu'on puisse y réagir.
00:22:57Pour ma part, je n'ai pas été étonné par ce qui s'est passé,
00:23:00parce que, encore une fois,
00:23:03je pense que dans la longue durée,
00:23:07on voit que les opérateurs se sont toujours
00:23:11adaptés à des situations complexes
00:23:14et qu'ils ont utilisé la régulation
00:23:20pour des questions de réputation,
00:23:21parce que ce sont des produits qui ont une excellente réputation,
00:23:26parce qu'ils sont très régulés, parce qu'ils sont très surveillés,
00:23:28parce qu'ils sont accompagnés
00:23:30par des autorités administratives, médicales, etc.
00:23:33Mais ils se sont quand même souvent adaptés
00:23:36pour pouvoir...
00:23:38Je ne dirais pas nécessairement aussi brutalement contourner,
00:23:42mais je dirais qu'ils s'adaptent beaucoup à la situation.
00:23:48Bon, il y a eu une perte de confiance, je pense,
00:23:52déjà récemment dans les eaux minérales
00:23:54du fait de la diffusion très forte des emballages en plastique.
00:23:58Je pense qu'il y a déjà une perte de prestige
00:24:02du fait de cette utilisation massive du plastique.
00:24:05L'eau embouteillée est un des éléments
00:24:07qui diffuse massivement les plastiques à usage unique
00:24:10en France depuis la fin des années 60,
00:24:14alors que les opérateurs pourraient utiliser
00:24:17des bouteilles en verre consignées.
00:24:19Bon, ça, c'est un des...
00:24:20Parce que, par exemple, en Allemagne,
00:24:22c'est ce qui se fait très largement.
00:24:23Bon, ça, c'était un des éléments sur lesquels...
00:24:25Bon.
00:24:27Il a existé dans le passé des crises de confiance,
00:24:31notamment la grosse crise de la source Perrier en 1990,
00:24:37je crois que c'était, ou...
00:24:39Je me souviens plus exactement de la date.
00:24:41Comme un historien, je suis pas très...
00:24:44Je mérite pas les félicitations.
00:24:47Je me souviens plus de la date. Voilà.
00:24:48On fait rédamnation.
00:24:50Donc là, vous vous souvenez du benzene
00:24:51qui était dans les bouteilles de Perrier
00:24:54parce qu'il y avait des problèmes dans le système d'embouteillage.
00:24:57Et ça en donnait lieu à une crise de confiance très forte
00:25:00qui a donné lieu à une réaction de gestion de crise
00:25:05qui a été ensuite analysée beaucoup par Gustave Levin.
00:25:08C'est-à-dire qu'ils ont enlevé énormément de produits Perrier
00:25:11du marché.
00:25:12Bon.
00:25:14Mais ceci dit, le fonctionnement, par exemple...
00:25:17Maintenant, vous voyez que dans la régulation...
00:25:20Là, j'évoquais tout à l'heure la question de la décantation.
00:25:23La question de la décantation n'était pas autorisée
00:25:26pendant plus de 70 ans.
00:25:28Et pourtant, les opérateurs faisaient de la décantation.
00:25:32Au vu des ingénieurs des mines
00:25:33qui étaient chargés de regarder les sources,
00:25:36au vu des agents de la répression des fraudes
00:25:41qui signalaient.
00:25:43Et en fait, on retrouvait le même système.
00:25:46C'est-à-dire une sorte de gêne de l'administration,
00:25:50des opérateurs qui ne voulaient pas mettre en danger
00:25:54des produits qui sont quand même des produits sains.
00:25:57Ce ne sont pas des produits qui...
00:25:59Ce ne sont pas des éléments qui mettent en danger
00:26:01la santé des consommateurs
00:26:03puisque la décantation
00:26:04n'empêche pas la qualité sanitaire du produit.
00:26:07Elle crée une fiction
00:26:11qui est de faire croire que le produit
00:26:13que vous avez dans la bouteille, c'est exactement le même produit
00:26:15qu'il y a à la source, en fait.
00:26:16Ce qui est, en fait, une fiction.
00:26:20Donc là, la question du traitement, c'est pareil.
00:26:24Ce n'est pas a priori négatif pour le consommateur
00:26:27dans la mesure où il protège le consommateur
00:26:30de germes pathogènes,
00:26:32mais il entraîne une tromperie
00:26:36sur le fait que ce n'est plus de l'eau minérale, en fait,
00:26:38puisqu'il sort de la définition
00:26:43puisque l'eau minérale ne doit pas être traitée.
00:26:44Elle doit rester dans sa pureté originelle.
00:26:46Et de ce fait,
00:26:50les conséquences sur la réputation de ces eaux
00:26:54sont difficiles à évaluer.
00:26:57Pour l'instant, c'est très court.
00:26:59Comme la découverte de la décantation,
00:27:03bon, ça n'intéressait pas non plus énormément les gens,
00:27:05il faut reconnaître, dans les années 20 ou 30,
00:27:07mais n'a pas entraîné de pertes de confiance.
00:27:12La décantation, c'était surtout les eaux gazeuses,
00:27:14comme, par exemple, Vichy, Saint-Yorre, etc.
00:27:19Et donc, du coup, je me permets,
00:27:21dans le prolongement de ce que vous disiez,
00:27:24et là, je vous demande, au-delà même de l'historien,
00:27:26votre avis, justement, sur, disons,
00:27:28cette gradation entre eaux minérales naturelles,
00:27:32eaux de source, eaux de boisson,
00:27:34et le développement des eaux de boisson
00:27:36telles qu'on les connaît aujourd'hui,
00:27:37avec Maison Perrier, qui a été évoquée aussi,
00:27:40c'est-à-dire une eau qui est issue des sources Perrier,
00:27:44mais qui est traitée et qui est assumée comme étant traitée.
00:27:47Quel regard vous portez là-dessus ?
00:27:48Est-ce que vous trouvez qu'il y a une pertinence
00:27:50de cette gradation ?
00:27:52Ou est-ce que... Voilà.
00:27:53Quel regard vous portez aujourd'hui
00:27:55sur cette typologie qui existe ?
00:27:57Et puis une 2e question aussi.
00:27:58Vous avez évoqué la question du verre et du plastique.
00:28:00Quelle est l'histoire de la victoire du plastique
00:28:02sur le verre en France qui explique que nous en sommes là
00:28:05et pourquoi il y a d'autres histoires
00:28:06qui sont différentes, comme l'Allemagne,
00:28:08que vous évoquez ?
00:28:09Peut-être ces 2 points-là.
00:28:10Après, je passerai la parole à mes collègues.
00:28:12Merci. Je vais essayer de faire des réponses courtes,
00:28:14parce que là, vous m'envoyez sur des questions
00:28:16qui m'ont occupé beaucoup,
00:28:18donc, du coup, j'y suis trop long.
00:28:20La gradation ne me paraît pas absurde, en fait,
00:28:24entre les 3 niveaux.
00:28:30La difficulté, c'est de savoir
00:28:33à quel moment l'eau est une eau minérale
00:28:36et l'eau devient une eau de boisson
00:28:37parce qu'elle a été traitée,
00:28:38c'est-à-dire qu'il faut avoir une confiance complète
00:28:40dans le producteur,
00:28:42ou alors faire un travail de contrôle
00:28:45beaucoup plus élevé
00:28:47pour le vérifier.
00:28:48Voilà.
00:28:49Sachant que vous savez qu'il y a un enjeu
00:28:51quand même très fort sur ces produits,
00:28:53particulièrement sur Perrier,
00:28:54parce que Nestlé Waters,
00:28:56quand ils ont acheté la marque,
00:28:58ont eu, pendant assez longtemps,
00:29:00l'objectif de créer du Perrier ailleurs qu'à Vergès.
00:29:03Et donc, ils ont dit, nous, on a acheté une marque,
00:29:06et donc, je vais produire du Perrier en Égypte,
00:29:09je vais produire du Perrier en Indonésie.
00:29:12Et ça a donné un certain nombre d'années
00:29:16et ça a donné lieu à un contentieux
00:29:18qui a abouti au fait qu'ils n'ont pas eu la possibilité,
00:29:20parce que la source Perrier est devenue un nom de lieu
00:29:23et il y a eu un arrêt, effectivement,
00:29:24de la cour d'appel, je crois,
00:29:27de la cour administrative de Marseille,
00:29:28qui a confirmé le fait
00:29:30qu'on ne pouvait pas produire du Perrier ailleurs.
00:29:31Donc, de l'eau de boisson Perrier, finalement,
00:29:34est-ce que ça ne va pas donner la capacité à un opérateur
00:29:36de dire, de l'eau de boisson Perrier,
00:29:38en fait, ce n'est pas vraiment de l'eau minérale,
00:29:39donc, je peux la produire aussi en Indonésie, finalement ?
00:29:42Ça peut être un risque.
00:29:46De ce type-là, voilà.
00:29:49Bon, ensuite, vous m'avez posé une autre question
00:29:51sur la trajectoire des emballages,
00:29:53qui m'a aussi beaucoup intéressé.
00:29:55J'ai écrit un article qui s'appelle
00:29:57The True Revolution of 1968,
00:29:59c'est-à-dire la vraie révolution de 1968.
00:30:01C'était un peu provocateur, je veux bien reconnaître,
00:30:03pour ce titre-là.
00:30:05En fait, c'est le Maxi Vittel
00:30:07qui est la première bouteille plastique de Vittel.
00:30:11En fait, les minéraliers français,
00:30:16enfin, les embouteilleurs français sont des opérateurs
00:30:18qui ont diffusé énormément la bouteille plastique en France
00:30:21et de ce fait, dans les mains des consommateurs,
00:30:27ça, c'est lié au caractère oligopolistique
00:30:31et au marché national.
00:30:32C'est-à-dire qu'en fait, on produit du Vittel
00:30:35qui va être consommé partout, dans toute la France.
00:30:38Et donc, les produits circulent beaucoup
00:30:41et il y avait des freins au système de la consignation
00:30:45puisqu'on fait revenir du Vittel quand on est dans les Vosges,
00:30:48ça va, quand on est au Pays basque,
00:30:53ça fait un peu plus long à revenir.
00:30:57Et je pense que ces opérateurs-là,
00:31:00ainsi que ceux qui ont fabriqué, par exemple, BSN,
00:31:05qui était un verrier,
00:31:07mais qui ensuite a produit aussi énormément de bouteilles en plastique,
00:31:11ce qui est devenu Danone aussi,
00:31:14ont été des acteurs qui se sont opposés, en fait,
00:31:17à la standardisation des bouteilles
00:31:19et à la standardisation
00:31:21comme pouvant représenter un frein à leur production.
00:31:24Or, c'est pas du tout ce qui s'est passé en Allemagne,
00:31:25mais c'est aussi parce qu'en Allemagne,
00:31:28les producteurs sont des producteurs locaux et régionaux
00:31:30et qu'ils se sont tous associés pour créer une bouteille
00:31:34qui s'appelle la Perlenflasche,
00:31:36la bouteille perlée, comme on dit en allemand,
00:31:39et qui est une bouteille standard en verre
00:31:43pour tous les producteurs d'eau minérale.
00:31:45Et ce qui fait que si, par extraordinaire,
00:31:48une bouteille de la Prusse
00:31:52est consommée en Bavière,
00:31:54elle reste en Bavière, elle ne retourne pas en Prusse,
00:31:56elle reste en Bavière parce qu'elle est réembouteillée en Bavière
00:31:59et on lui met une étiquette de l'eau de Bavière.
00:32:01Et ça, c'est un système qui est extrêmement vertueux, en fait,
00:32:05et que les opérateurs français ont toujours combattu
00:32:10parce qu'ils refusent de perdre
00:32:14ce qui fait leur caractéristique,
00:32:16comme Perrier, par exemple.
00:32:19Perrier a sa forme classique
00:32:22et il ne veut pas une standardisation de la bouteille.
00:32:24Donc ça, c'est un manque
00:32:28qui pourrait venir d'une décision politique.
00:32:30Je veux dire, on peut décider.
00:32:32A partir d'aujourd'hui, on standardise les bouteilles.
00:32:34Et puis voilà.
00:32:36D'accord.
00:32:37Je crois que vous avez terminé, monsieur le rapporteur.
00:32:39On va passer à nos collègues.
00:32:41Il y a trois personnes qui ont donné la parole.
00:32:42Donc la première, c'est Florence Lassarade.
00:32:47Oui, c'était justement à propos de Perrier.
00:32:49C'était pour rappeler à cette époque-là,
00:32:50ça avait été un formidable coup de com'
00:32:52de rappeler toutes les bouteilles.
00:32:54Et on avait vu les ventes de Perrier exploser derrière.
00:32:58Je me souviens de cette époque-là.
00:33:00Ca a été salué comme effectivement une gestion de crise réussie.
00:33:04On a également, sur l'histoire des consignes,
00:33:07on a pas mal travaillé
00:33:11il y a quelques années sur la consigne.
00:33:14Et ça a été complètement retoqué.
00:33:17Je me souviens dans l'hémicycle, d'ailleurs.
00:33:20La consigne des bouteilles de verre.
00:33:25C'est Martha Tsidrak qui l'avait portée.
00:33:29Vous avez une réponse ?
00:33:32Oui, je considère que la consigne
00:33:37telle qu'elle était prévue par la loi AJEC
00:33:39était une bonne solution.
00:33:42Et il y a des opérateurs qui travaillent en ce moment
00:33:44pour montrer que même sur le cycle de vie d'un produit,
00:33:48une bouteille recyclable
00:33:51est toujours moins vertueuse
00:33:54qu'un réemploi d'une bouteille en verre.
00:33:57Et la recyclabilité,
00:33:59je considère que c'est un piège d'une circularité faible,
00:34:03alors qu'il faudrait viser le réemploi, en fait,
00:34:06qui est véritablement circulaire.
00:34:09La recyclabilité, c'est moyennement circulaire.
00:34:14D'accord. On va rester dans le département de la Gironde
00:34:16avec Hervé Gillet.
00:34:18Oui, merci beaucoup pour cette mise en perspective historique,
00:34:23très intéressante au niveau des évolutions.
00:34:25Mais sur les évolutions, justement,
00:34:28il y a des évolutions sociétales importantes.
00:34:31Du coup, aussi sur l'acceptabilité,
00:34:33avec une bascule
00:34:35entre le côté thérapeutique
00:34:39et le côté sanitaire.
00:34:41Et donc, pour ce qui nous concerne, d'ailleurs,
00:34:44on est plus sur le volet sanitaire que thérapeutique.
00:34:47Donc la nature même de l'inquiétude de l'acceptabilité
00:34:51est forcément différente entre un dépôt qu'on laisse déposer
00:34:55et un risque sanitaire qui entraîne des filtrations,
00:34:58parce qu'on bascule bien du thérapeutique au sanitaire.
00:35:02Donc le niveau même d'appréciation
00:35:04et d'acceptabilité sociétale est forcément différent.
00:35:08Dans une société qui, aujourd'hui,
00:35:09et c'est là où je voudrais avoir votre avis dans l'évolution,
00:35:12qui est beaucoup plus exigeante
00:35:15par rapport au respect des normes et de la transparence.
00:35:17Donc on a une évolution sociétale
00:35:20qui est quand même aussi très significative.
00:35:22Donc ça m'intéresserait de savoir ce que vous en pensez.
00:35:26Et donc derrière cette acceptabilité,
00:35:29comme ça a été évoqué,
00:35:30il y a effectivement la question de la gestion de crise
00:35:32et de la capacité de bien la gérer ou pas.
00:35:36Donc l'exemple qui a été donné au niveau de l'Esselet
00:35:38avec le rappel massif a apporté effectivement une plus-value.
00:35:42En l'occurrence, dans la séquence que vous venez de vivre,
00:35:44c'est plutôt l'inverse.
00:35:46Donc ça serait intéressant aussi d'avoir votre point de vue.
00:35:48Et on aboutit aujourd'hui à des mouvements industriels
00:35:52quand même assez importants,
00:35:54même si vous avez souligné l'oligopole,
00:35:56puisqu'il semblerait que Danone aujourd'hui
00:35:59souhaiterait racheter San Pellegrino et Perrier à Nestlé.
00:36:03Donc on voit qu'il y a des mouvements quand même,
00:36:05des plaques tectoniques qui sont en train de bouger.
00:36:07Je ne sais pas si vous avez un avis sur le sujet.
00:36:10Peut-être. Il y a Mme Nicolette
00:36:11qui souhaite peut-être compléter la question
00:36:13de son collègue Hervé Gillet.
00:36:15Ça fera un binôme de questions.
00:36:16Tout à fait. Merci, M. le Président.
00:36:18En tout cas, la prolongée.
00:36:21Hervé Gillet parlait de l'acceptabilité
00:36:26sur le plan sanitaire.
00:36:28Il me semble qu'il y a une autre évolution notable
00:36:31qu'on sent bien à travers l'histoire
00:36:33que vous nous avez rappelée,
00:36:35qui est celle de la santé environnementale.
00:36:38On a commencé à évoquer les questions d'écologie,
00:36:40d'environnement en partant des emballages,
00:36:42mais plus généralement,
00:36:44et je n'apprends rien à personne ici,
00:36:46notre environnement se dégrade,
00:36:49en tout cas, se dégrade différemment
00:36:52de celui qui était...
00:36:55celui de nos concitoyens quand sont nées les eaux minérales.
00:36:58Ce que je veux dire par l'air,
00:36:59c'est que ce que vous nous avez finalement très bien raconté,
00:37:02c'est qu'à l'époque, l'eau minérale était finalement...
00:37:06Ce qu'il fallait démontrer,
00:37:08c'est qu'elle était meilleure pour la santé que l'eau courante,
00:37:13et ce qui conduisait certains à boire du vin
00:37:16quand ils n'avaient pas les moyens de s'acheter de l'eau minérale
00:37:19plutôt que de l'eau courante,
00:37:20et qu'aujourd'hui,
00:37:21y compris parce que les sols sont pollués différemment,
00:37:25on a certes réussi à améliorer la qualité de l'eau courante,
00:37:29y compris par le traitement,
00:37:32le paradoxe,
00:37:34mais dans le même temps,
00:37:35on a dégradé un certain nombre
00:37:38d'autres critères environnementaux, et notamment les sols,
00:37:40qui font qu'aujourd'hui,
00:37:41ce que les eaux minérales doivent finalement démontrer,
00:37:45c'est non plus qu'elles sont meilleures,
00:37:46mais qu'elles ne sont pas moins mauvaises que l'eau courante.
00:37:49C'est un peu ça, le paradoxe de cette situation.
00:37:53Donc comment vous...
00:37:56Voilà quel est votre sentiment sur cette question-là
00:37:58de, finalement, cette espèce d'inversion
00:38:01de la question de la santé environnementale
00:38:03par rapport à la naissance même des eaux minérales.
00:38:05Merci.
00:38:06Ce qui est sûr, c'est qu'elles sont plus chères, déjà.
00:38:09Beaucoup plus chères.
00:38:13Oui, donc, sur la question
00:38:15de passer de l'aspect thérapeutique à l'aspect sanitaire,
00:38:18c'est certain qu'il faudrait connaître,
00:38:23en fait, avec précision,
00:38:27le retour des consommateurs
00:38:31au regard de la méfiance
00:38:33qui existe aussi sur l'eau distribuée
00:38:37par les grands équipements,
00:38:43qui est, elle aussi, très fortement discutée, en fait,
00:38:47aujourd'hui.
00:38:48Et dans la hiérarchie des pertes de confiance,
00:38:53je crains que les distributions d'eau potable
00:38:58soient plus mises en question
00:39:01que les eaux embouteillées,
00:39:03qui continuent à avoir une confiance forte.
00:39:08Je...
00:39:10C'est possible.
00:39:13D'autre part, je pense qu'il faut garder en tête
00:39:15que ces consommations sont très...
00:39:18On a des visions globales.
00:39:21Par exemple, je vous ai donné des chiffres à l'échelle nationale,
00:39:22mais, en fait, régionalement, localement,
00:39:24il y a des disparités très fortes.
00:39:27Par exemple, les eaux embouteillées
00:39:29sont très fortement consommées dans le nord et l'ouest de la France
00:39:33et beaucoup plus faiblement
00:39:34dans les zones méditerranéennes et pyrénéennes et alpines,
00:39:39puisqu'on a plus confiance, en fait,
00:39:41dans les réseaux d'eau dans ces zones-là qu'ailleurs.
00:39:43Donc il y a quand même aussi...
00:39:44Il y a vraiment une articulation entre les deux qui est forte.
00:39:51Sur la gestion de crise,
00:39:54je...
00:39:56Je suis historien.
00:39:57Je n'ai pas d'avis à donner particulièrement sur la...
00:40:00Mais, visiblement, sur la manière
00:40:01dont les choses se sont produites,
00:40:06la gestion a été désastreuse, en fait.
00:40:09Je ne sais pas trop comment dire, mais...
00:40:13Puisqu'en fait, on apprend par la bande...
00:40:18Des choses qui auraient pu être, finalement, assez...
00:40:22En jouant garde sur table,
00:40:23auraient pu être tout à fait acceptables.
00:40:25On comprend qu'il y a des risques aujourd'hui.
00:40:27Donc je trouve qu'effectivement, ils ont quand même...
00:40:30Ces opérateurs-là n'ont pas été particulièrement brillants
00:40:33sur ce cas-là.
00:40:34Ensuite, je n'ai pas de leçons à donner.
00:40:35Moi, je ne suis pas en charge des entreprises
00:40:38aussi importantes.
00:40:39Sur l'achat par Danone de San Pellegrino et Perrier,
00:40:46je...
00:40:47Il faudrait voir ce que dit l'autorité de la concurrence.
00:40:49Il faudrait voir ce que dit l'autorité de la concurrence,
00:40:52parce que c'est quand même de grosses marques
00:40:54qui pourraient peut-être grossir à nouveau Danone.
00:41:00Je ne sais pas trop s'il y aura des retours là-dessus.
00:41:04J'ai envie que je...
00:41:07Bon, je n'ai pas énormément de choses à dire là-dessus.
00:41:09D'accord.
00:41:10Il y avait M. Jacquet pour terminer.
00:41:13Merci, président.
00:41:14J'apprécie particulièrement
00:41:16cette mise en perspective historique
00:41:19qui donne un relief particulier
00:41:21à la situation qui nous intéresse.
00:41:23Si j'ai bien compris votre propos
00:41:25autour de la décantation,
00:41:26l'exemple extrêmement intéressant,
00:41:28où pendant des décennies,
00:41:29cette pratique a été effective
00:41:32sans être acceptée par l'administration,
00:41:35vous concluez votre propos en disant
00:41:36mais finalement, il n'y a pas de danger pour le consommateur.
00:41:39Est-ce que vous êtes en train de nous laisser entendre
00:41:42que pour les pouvoirs publics,
00:41:43il y aurait un statut particulier autour de ce produit
00:41:47qui fait que, ma foi,
00:41:48si les règles ne sont pas totalement respectées,
00:41:51il n'y a pas un drame absolu ?
00:41:53Est-ce qu'on peut faire ce raccourci
00:41:55avec la crise actuelle ?
00:41:59Je ne sais pas si ma question était assez précise.
00:42:01C'est très précis.
00:42:04Moi, je l'ai trouvée précise.
00:42:07Oui, écoutez,
00:42:08je confirme que pendant des décennies,
00:42:12la décantation n'était pas autorisée
00:42:14et pourtant, elle avait lieu.
00:42:15Et aujourd'hui, elle est dans les régulations.
00:42:19La décantation est autorisée, elle est connue
00:42:22et on continue à être une eau minérale naturelle
00:42:24bien qu'on fasse une décantation de l'eau.
00:42:26Donc l'administration a fermé les yeux
00:42:30pendant très longtemps sur cet aspect-là
00:42:33parce qu'effectivement, ça ne mettait pas en danger
00:42:35la vie des consommateurs
00:42:37et que ça protégeait
00:42:41un système qui était plutôt vertueux
00:42:45disons, globalement,
00:42:47parce que l'eau minérale est un produit
00:42:48qui n'est pas alcoolisé, qui n'est pas sucré,
00:42:50donc qui est quand même un bon produit.
00:42:53Et en dépit des hauts cris,
00:42:57je pourrais vous transmettre
00:42:59des archives de la répression des fraudes
00:43:04qui est vent debout contre ces pratiques,
00:43:07mais qui ne dépassent pas le cadre de rapports
00:43:10qui dorment dans les archives
00:43:11de la Direction générale de la santé.
00:43:13Il me semble que ce qui s'est produit depuis 2022
00:43:18se rapproche quand même beaucoup
00:43:19de cette question de la décantation
00:43:20parce que visiblement,
00:43:22les autorités qui auraient dû alerter
00:43:27ont plutôt accompagné qu'alerté.
00:43:31Je ne sais pas trop comment expliquer
00:43:33comment dire de manière précise ce qui s'est produit,
00:43:36mais les alertes n'ont pas été aussi rapides
00:43:40qu'elles auraient dû l'être, en fait.
00:43:43Bien que... Voilà, je pense...
00:43:45C'est clair.
00:43:47On est sur le sanitaire, voilà.
00:43:48Mais le traitement est interdit
00:43:53dans les eaux minérales.
00:43:55On pouvait toujours songer
00:43:59à les baisser provisoirement à haute source, par exemple,
00:44:02ou ce qui était possible.
00:44:04Par exemple, Volvic, je ne sais pas si vous le savez,
00:44:07a été en file d'attente
00:44:08pendant plusieurs... Presque une décennie.
00:44:12Ce qui était haute source
00:44:13avant qu'ils obtiennent le statut d'eau minérale.
00:44:16Ils ont lancé leur première vie en tant qu'eau de source.
00:44:21Et puis, ils ont obtenu, par la reconnaissance d'eau minérale,
00:44:25et maintenant, ils sont minérales.
00:44:27Donc on pourrait songer, peut-être,
00:44:29qu'il ne serait pas absurde de dégrader
00:44:30pendant quelques mois s'il y a des risques,
00:44:33une eau minérale à haute source ou à haute boisson,
00:44:36et puis ensuite, à l'upgrader.
00:44:37Je ne sais pas comment on dit, pardon,
00:44:40en mauvais français,
00:44:43quand la situation est bonne.
00:44:45Ça ne pourrait pas être absurde.
00:44:48Prendre les consommateurs pour des adultes aussi, quand même,
00:44:51je pense. Ce serait intéressant.
00:44:53Donc il y avait Antoinette Gull, et après, pour terminer,
00:44:57je crois que notre rapporteur aura une dernière question,
00:44:59sachant que je vous donne mes chers collègues,
00:45:02et je me suis rendu compte qu'à Écart,
00:45:04nous avions terminé pour respecter l'heure
00:45:06parce qu'il y a quelqu'un de visuel qui nous attend.
00:45:10Bonjour et merci pour cet exposé passionnant.
00:45:14Moi, j'aimerais revenir sur les Etats-Unis,
00:45:17enfin, ce que vous évoquiez sur les Etats-Unis,
00:45:19parce que c'est un sujet qui est important.
00:45:22Vous nous avez dit qu'on était de grands exportateurs
00:45:25d'eau minérale naturelle
00:45:26et que les règles étaient différentes ailleurs.
00:45:30Donc, je vois bien à quoi vous faites allusion,
00:45:35puisque dans la séquence qui nous a intéressé
00:45:37là autour de Nestlé Water,
00:45:38c'était un des sujets, en fait.
00:45:40C'est la fabrication...
00:45:42Quelle production pour le marché américain ?
00:45:46Ma question est la suivante.
00:45:47Est-ce que tous les minéraliers
00:45:49ont une marque spécifique pour les marchés américains ?
00:45:54Parce que comme j'avais demandé à la patronne de Danone
00:45:58si Évian était vendu aux Etats-Unis,
00:46:00elle me disait qu'Évian n'était vendu que dans les pays
00:46:05où de l'eau minérale naturelle non traitée était acceptée.
00:46:09Donc, ça veut dire quand même qu'on peut avoir,
00:46:12s'il y a du Perrier américain,
00:46:17qui serait du Perrier traité,
00:46:19et par contre, il n'y a pas d'eau d'Évian américaine,
00:46:25puisqu'ils n'ont pas accepté de faire cette dégradation.
00:46:31Le Perrier est français, ma chère collègue.
00:46:34Oui, je sais bien. Vendu aux Etats-Unis, je voulais dire.
00:46:37Oui, on le sait bien, on en est assez fiers.
00:46:40De toutes nos eaux minérales, c'est quand même
00:46:42la grande fierté française.
00:46:43Tout à fait. Monsieur Marty.
00:46:45A juste titre.
00:46:46Vous êtes avec ma collègue.
00:46:48C'est une fierté, je pense, à juste titre.
00:46:50Ce sont de belles entreprises et un bon produit, globalement.
00:46:53Vous me posez une question à laquelle je ne sais pas répondre.
00:46:57Évian a vendu beaucoup aux Etats-Unis
00:47:00à la fin des années 1960, au début des années 70.
00:47:04Une Évian qui n'était pas traitée,
00:47:06parce que c'était l'eau minérale française.
00:47:09Ils ne produisaient pas un produit spécifique
00:47:11pour les Etats-Unis, en fait.
00:47:13Sinon, c'était une bouteille en verre qui ne revenait pas.
00:47:16Bon.
00:47:17D'accord.
00:47:19Mais...
00:47:21En fait, cette question s'est posée essentiellement
00:47:23au moment où on s'est posé la question
00:47:26de la définition des produits
00:47:29dans le cadre du Codex Alimentarius,
00:47:31et qui était, en fait, assez important,
00:47:33parce que c'était associé aux négociations
00:47:36de l'Organisation mondiale du commerce.
00:47:38C'est-à-dire qu'est-ce qu'on allait pouvoir échanger
00:47:40sous quelle qualité, en fait.
00:47:43Et c'est à ce moment-là que les...
00:47:47Cette question s'est posée pour les Etats-Unis.
00:47:49Et je pense qu'en effet, il me semble
00:47:52que Nestlé Waters vend des eaux traitées aux Etats-Unis,
00:47:55parce que là, il n'y a absolument aucune ambiguïté
00:47:57sur le fait que ce sera accepté
00:47:59par la Food and Drug Administration.
00:48:01Pour Evian, j'avoue que je ne sais pas du tout.
00:48:04D'accord.
00:48:05Ou d'autres marques.
00:48:07Ou d'autres marques, oui.
00:48:08Et je vais laisser pour la dernière question,
00:48:11légitimement, la parole à notre rapporteur.
00:48:14Merci, merci, M. le Président.
00:48:16Ma dernière question, elle porte sur aussi
00:48:18les recommandations dont cette commission de requête,
00:48:19elle doit établir un certain nombre de faits,
00:48:21mais elle doit aussi faire un certain nombre de recommandations.
00:48:23Et je voulais avoir votre avis
00:48:25sur l'état de connaissance de l'opinion
00:48:29sur, justement, qu'est-ce qu'une eau minérale naturelle
00:48:32par rapport à une autre source ?
00:48:33Qu'est-ce qu'une autre source par rapport à une autre boisson ?
00:48:36Est-ce que ces éléments-là vous semblent connus
00:48:39de la part de l'opinion ? Première question.
00:48:41Est-ce que vous pensez que pour des raisons de lisibilité
00:48:45sur un marché extrêmement concentré
00:48:47qu'on vient d'évoquer,
00:48:49est-ce que vous ne pensez pas qu'il faudrait qu'on aille
00:48:50vers des systèmes comme le Nutri-Score existe,
00:48:54comme un certain nombre de choses existent,
00:48:55simples et repérables sur les eaux minérales
00:48:58avec un système d'étoiles ou que sais-je,
00:49:00pour simplifier, mais pour avoir cet aspect stimulant ?
00:49:03C'est-à-dire que si vous êtes une eau minérale naturelle,
00:49:04c'est-à-dire que vous devez atteindre un certain nombre
00:49:06de qualités, ce qui, du coup, vous donnera un certain prix.
00:49:08Et à l'inverse, si vous avez une qualité
00:49:10qui commence à se dégrader, etc., vous vous tombez,
00:49:13je ne sais pas si ça s'appelle eau minérale traitée,
00:49:14eau de source ou que sais-je, ou eau de boisson,
00:49:16mais vous vous tombez dans quelque chose de différent
00:49:18qui, quelque part, vous incite à soit remonter,
00:49:21soit à accepter les choses.
00:49:23Parce que la situation à laquelle nous sommes,
00:49:25je reviens sur ce qu'a dit Hervé Gillet
00:49:26sur la question des tests sanitaires,
00:49:28c'est que nous avions des industriels,
00:49:30nous avons peut-être encore des industriels qui trichaient
00:49:33ou qui trichent pour atteindre une certaine qualité sanitaire.
00:49:36C'est ça, le paradoxe.
00:49:37C'est-à-dire que pour ne pas être déclassés,
00:49:39ils essayent, ils trichent pour atteindre
00:49:42une certaine qualité sanitaire et une certaine sûreté du produit.
00:49:45Donc on se retrouve dans cette injonction paradoxale,
00:49:47vous voyez, où à la fois, eux, ils veulent évidemment
00:49:50conserver leur caractère d'eau minérale naturelle,
00:49:52l'Etat ne les a pas déclassés,
00:49:54et où, par contre, peut-être qu'il leur a fallu le faire
00:49:55pour au moins être sûrs sur les questions sanitaires.
00:49:57Donc, vous voyez, on se retrouve dans cette situation-là.
00:49:59Je voulais voir un peu aussi les sorties,
00:50:00les points de sortie que vous vous imaginez
00:50:02et que vous voyez sur ce sujet.
00:50:06Une minute trente, si possible.
00:50:10Bon. Le 1er point qui était sur la question de l'opinion
00:50:14et sa connaissance...
00:50:17Je pense qu'il y a une connaissance globale intuitive
00:50:21du fait des prix, en fait, des prix, tout simplement.
00:50:25L'eau minérale est plus chère que l'eau de source,
00:50:26et donc, naturellement, je pense que les consommateurs
00:50:29se disent que des eaux minérales
00:50:31sont de meilleure qualité que des eaux de source.
00:50:36Elles ne le sont pas nécessairement, d'ailleurs.
00:50:39Mais à vrai dire, je pense que personne ne comprend rien
00:50:43à la régulation et à la différence
00:50:45entre ces trois catégories de boissons,
00:50:48à part qu'intuitivement,
00:50:51les grandes marques d'eau minérale sont plus chères,
00:50:53donc ça doit être mieux que les eaux de source
00:50:55qui doivent être moins bien.
00:50:57C'est un petit peu basique comme point de vue,
00:50:59mais d'autre part, sur les ports de sortie,
00:51:05je pense qu'il est tard maintenant
00:51:08pour supprimer l'appellation eau minérale, en fait,
00:51:11qui est maintenant bien installée dans la vision des consommateurs.
00:51:16En revanche, peut-être que donner un accès plus complexe
00:51:19et peut-être parfois même temporaire à des opérateurs
00:51:23qui pourraient aussi faire le choix, ils auraient pu le faire,
00:51:25de produire moins et de vendre plus cher,
00:51:28c'était peut-être pas la bonne chose,
00:51:31mais puisqu'ils ne peuvent pas produire de l'eau minérale,
00:51:34ils pouvaient s'arrêter aussi de la produire.
00:51:37C'est pas un caractère absurde.
00:51:41Bon, Coca-Cola dans le monde vend une eau de boisson
00:51:44qui est d'Azani, qui est la même partout,
00:51:47et c'est pas une eau minérale,
00:51:48mais ils ont leur force de vente, leur marketing,
00:51:51qui fait qu'ils arrivent quand même à survivre.
00:51:54Donc je vous donne un point de vue confus
00:51:58parce que je ne sais pas très bien...
00:52:00Il me semble que cette hiérarchie, elle a fait ses preuves
00:52:03et que l'eau minérale naturelle,
00:52:06avec ses caractères purifiés,
00:52:07certains caractères favorables à la santé,
00:52:11mérite quand même de se maintenir, je pense.
00:52:16Voilà donc pour cette audition du professeur d'Histoire Nicolas Marti.
00:52:19On enchaîne avec une autre audition.
00:52:21Les sénateurs voulaient en effet également avoir l'avis
00:52:24d'un docteur en géographie économique.
00:52:27On file en audition, on en reparle juste après.
00:52:30J'ai réalisé mon travail de thèse sur les eaux thermominérales
00:52:36avec la particularité du double usage en France et en Belgique.
00:52:42Et donc effectivement,
00:52:45il y a un certain nombre de dysfonctionnements
00:52:48au-delà de vos questions auxquelles je vais répondre,
00:52:51naturellement, un certain nombre de dysfonctionnements
00:52:54dont je souhaitais vous éclairer.
00:52:58Donc on le fera au travers des questions,
00:53:01mais pour aller droit au but,
00:53:03effectivement,
00:53:05les modifications réglementaires faites à court terme
00:53:13au regard du problème par le gouvernement
00:53:17sont effectivement une gestion à court terme.
00:53:20Néanmoins, à mon sens,
00:53:24cela nécessiterait une réforme de l'appareil réglementaire
00:53:31qui est aujourd'hui vieillissant.
00:53:33Sur les eaux minérales naturelles, j'entends.
00:53:36Donc ça, c'est le premier dysfonctionnement
00:53:40dont il faudrait, à mon sens,
00:53:43finalement, une envergure et une volonté politique,
00:53:49notamment sur les périmètres de protection,
00:53:53pour renforcer la protection des gisements de MN,
00:54:01mais de manière exhaustive,
00:54:04ce qui n'est pas le cas aujourd'hui,
00:54:06puisqu'on a un outil réglementaire aujourd'hui
00:54:09qui a été bâti pour répondre à une problématique
00:54:13quantitative de la ressource en eau au XIXe siècle jusqu'à 1930.
00:54:21Et aujourd'hui, on a une problématique
00:54:24de qualité de la ressource en eau.
00:54:26Donc on a aujourd'hui un outil, un appareil réglementaire
00:54:31qui ne répond pas forcément aux objectifs et qui pose souci.
00:54:37Donc une réforme, me semble tout indiquer,
00:54:41par rapport à ces problématiques de qualité des EMN
00:54:46et de protection des gisements de manière durable.
00:54:49Donc ça, c'est le premier point important.
00:54:53Le second point, c'est qu'effectivement,
00:54:57à ma connaissance aujourd'hui,
00:54:59il n'y a plus d'inventaire exhaustif
00:55:01des émergences d'eau souterraine, d'eau minérale,
00:55:05qui étaient auparavant agrémentées par le BRGM
00:55:11jusqu'à la décentralisation.
00:55:13Aujourd'hui, c'est les ARS qui doivent implémenter
00:55:17cette base de données, les 18 ARS.
00:55:21Et ça se fait un petit peu de manière hétérogène, dirons-nous,
00:55:26par manque de moyens, parfois de compétences,
00:55:30puisqu'il n'y a plus d'hydrogéologues dans les ARS.
00:55:33Donc c'était un point qui était souligné déjà en 2016
00:55:38à l'Assemblée nationale,
00:55:40et qui pose tout de même un problème
00:55:44au regard du maintien du pouvoir régalien de l'État,
00:55:48puisque la ressource en eau souterraine a été reconnue juridiquement
00:55:52dès le 18e siècle comme un bien d'État.
00:55:57Et enfin, le dernier dysfonctionnement
00:56:00qui est lié au premier point dont je vous ai parlé,
00:56:03c'est le manque de connaissances hydrogéologiques
00:56:06sur le fonctionnement des gisements,
00:56:08qui a un impact finalement sur les problématiques
00:56:12qu'on retrouve derrière, puisque quand on connaît mal
00:56:15les gisements hydrominéraux, on ne peut pas les protéger.
00:56:20Donc aujourd'hui, les connaissances hydrogéologiques
00:56:23se concentrent sur les sites à fort enjeu industriel,
00:56:26donc d'embout de minéralier, un type Evian, Vitel,
00:56:30mais la majorité des sites en France sont très mal connus,
00:56:34et donc on a des risques forcément derrière
00:56:38qui sont écologiques et qui sont économiques.
00:56:42Donc le développement du savoir hydrogéologique
00:56:49pour, derrière, protéger, également à fort enjeu,
00:56:52d'ailleurs, c'était une des quatre pistes d'amélioration
00:56:57du rapport du sénatorial d'octobre 2024,
00:57:01qui était d'accroître les connaissances en hydrosystèmes
00:57:04et les niveaux de pollution.
00:57:09Voilà un petit peu, j'ai essayé d'être synthétique
00:57:11sur les différents points à apporter à votre connaissance.
00:57:15Hors question.
00:57:18D'accord, on va laisser la parole tout de suite
00:57:20à notre rapporteur.
00:57:21Merci beaucoup.
00:57:23Peut-être pour rentrer dans le sillage
00:57:26de ce que vous avez commencé à nous exposer
00:57:28et aller dans le détail de ce que vous disiez,
00:57:32quand vous évoquez un appareil réglementaire vieillissant,
00:57:35est-ce que vous pouvez nous aller
00:57:37dans la vitesse institutionnelle de ce que vous observez ?
00:57:41C'est-à-dire qu'est-ce qui, pour vous,
00:57:42acteur par acteur, est défaillant
00:57:44et quelle piste de solution,
00:57:46puisque notre commission d'enquête
00:57:47cherche aussi à faire des propositions
00:57:50sur l'appareillage réglementaire ?
00:57:51Un des sujets importants de la commission,
00:57:53c'est la réponse publique face à un scandale industriel.
00:57:58Et donc, est-ce que vous pouvez revenir
00:57:59sur ce qui, pour vous, permettrait au système de fonctionner ?
00:58:03J'entends une forme de reconcentration
00:58:05au niveau du BRGM ou de recentralisation
00:58:07sur, en tout cas, l'inventaire qui peut être fait.
00:58:10Enfin, est-ce que vous pouvez rentrer dans le détail
00:58:12des préconisations que vous avez
00:58:14sur l'appareil réglementaire, s'il vous plaît ?
00:58:18Oui, bien sûr.
00:58:19Aujourd'hui, l'appareil réglementaire,
00:58:21il faut voir que c'est un peu l'héritage
00:58:24d'une agrégation faite depuis le XVIe siècle.
00:58:29Donc, l'essentiel de l'appareil réglementaire,
00:58:33aujourd'hui, sur la protection,
00:58:35il a été fait au XIXe et jusqu'aux années 1930.
00:58:40Aujourd'hui, ça s'articule en deux points.
00:58:43On a ce qu'on appelle le périmètre sanitaire d'émergence.
00:58:48Finalement, c'est le périmètre très restreint
00:58:50autour de chacune des émergences.
00:58:53Et on a le périmètre obligatoire.
00:58:56Normalement, chaque émergence doit avoir son PSE à jour obligatoire.
00:59:02Le premier point, c'est que ce PSE,
00:59:06malgré la contrainte réglementaire
00:59:13et la sanction prévue par la loi,
00:59:15aujourd'hui, à ma connaissance, les embouteilleurs respectent cela.
00:59:20Par contre, dans le secteur thermal,
00:59:23les PSE ne sont pas à jour.
00:59:25C'est-à-dire, la quasi-totalité date du XIXe au début du XXe siècle
00:59:32et n'ont pas été mis à jour.
00:59:33C'est un point également relevé à l'Assemblée nationale.
00:59:40C'est le premier point.
00:59:41Le deuxième point, qui est plus important,
00:59:44c'est le périmètre de protection.
00:59:47C'est le deuxième outil juridique.
00:59:50Le périmètre de protection, c'est un outil
00:59:54qu'il est possible de mobiliser par les propriétaires de la ressource en eau
01:00:01et ou l'exploitant.
01:00:03Il n'est pas obligatoire, c'est sur base de volontariat.
01:00:07Ce périmètre de protection est beaucoup plus large,
01:00:11qui prend en compte, normalement,
01:00:14une partie du gisement d'eau minérale naturelle.
01:00:17Le gisement est composé de, pour votre bonne connaissance,
01:00:20trois entités.
01:00:21Il y a la zone des émergences, qui est en surface,
01:00:25la zone souterraine, où c'est toute la zone de transit
01:00:28des eaux minérales naturelles,
01:00:30qui descendent, qui remontent au travers des roches
01:00:34et qui se chargent en minéraux.
01:00:36Et puis, la zone des impluviums,
01:00:41c'est là où toutes les eaux de pluie pénètrent dans le sol.
01:00:46Un gisement est fait de ces trois caractéristiques.
01:00:50Il convient de protéger chacun de ces espaces-là,
01:00:54notamment les zones des émergences
01:00:56et les zones de l'impluvium qui sont vulnérables
01:00:59à des formes de pollution anthropique d'origine humaine.
01:01:04Pour en revenir au périmètre de protection,
01:01:07le périmètre de protection, outil juridique facultatif,
01:01:13ne correspond pas aujourd'hui à 100% du gisement,
01:01:18que ce soit l'impluvium ou la zone des émergences.
01:01:21On a un décalage, finalement,
01:01:24entre l'outil juridique et la surface,
01:01:28le territoire de la filière à protéger.
01:01:31Ce périmètre de protection, aujourd'hui,
01:01:33c'est un outil qui impose aux tiers
01:01:38des limitations d'activité.
01:01:42C'est un outil assez fort pour un exploitant
01:01:45ou un propriétaire de la ressource en eau
01:01:49qui vient contraindre un certain nombre d'activités pour protéger.
01:01:53Néanmoins, cet outil est vieillissant
01:01:57et au regard d'autres pays européens,
01:02:00la France qui a été, pendant longtemps,
01:02:03une référence en matière d'appareil réglementaire,
01:02:07aujourd'hui, fait un peu pâle figure, si j'ose dire,
01:02:11dans le sens où la Belgique a changé sa législation en 1991
01:02:18pour s'adapter à la perception des risques.
01:02:23Au début du XXe siècle, on avait ce risque qualitatif
01:02:27où on avait peur que la surexploitation des forages
01:02:30diminue les débits,
01:02:32mais on n'avait pas d'appréciation de la qualité de l'eau
01:02:36avec des pollutions anthropiques.
01:02:38Aujourd'hui, on a cette appréhension-là.
01:02:41La Belgique a modifié son appareil réglementaire en 1991
01:02:47avec, notamment, différents périmètres de protection.
01:02:53Ils restent facultatifs,
01:02:56mais ils ont été redéfinis avec des hydrogéologues
01:03:00en fonction du temps de parcours de l'eau
01:03:02et chaque site, notamment, d'embouteillage,
01:03:06a des différentes zones.
01:03:08En tout, il y a quatre zones qui sont définies au cas par cas
01:03:12avec des hydrogéologues
01:03:13et qui protègent davantage les gisements dans leur ensemble,
01:03:19mais également qui vont plus loin en termes de protection
01:03:23et de contrainte des tiers,
01:03:25notamment par rapport aux activités agricoles,
01:03:28sur l'éplantage de produits phytosanitaires et pesticides.
01:03:35Néanmoins, l'appareil réglementaire belge date de 1991,
01:03:39il y a tout de même un bon moment.
01:03:42C'est un modèle,
01:03:44mais peut-être qu'il y a quelque chose de mieux à construire en France.
01:03:50En tout cas, on peut s'inspirer du modèle réglementaire
01:03:54en région wallonne,
01:03:56tout en allant peut-être un peu plus loin
01:03:58au regard des analyses des enjeux tels qu'on peut les avoir aujourd'hui.
01:04:06Merci beaucoup, c'est très clair.
01:04:09Peut-être vous poser une deuxième question.
01:04:11Sur...
01:04:13Dans votre article de conversation de 7 octobre 2024,
01:04:19vous évoquez le fait que seuls les grands sites,
01:04:22quelque part, industriels, les grands gisements,
01:04:25les grandes exploitations,
01:04:27vous citez, je crois, Evian, Vitel, notamment,
01:04:30se sont donnés les moyens de réaliser des recherches approfondies.
01:04:33Et le paradoxe, en tout cas apparent pour nous,
01:04:36c'est que c'est dans des grandes marques connues
01:04:39qui ont survu, en tout cas par ces marques,
01:04:43que le scandale des eaux embouteillées est arrivé.
01:04:47Et c'est finalement sur ces zones
01:04:48où des traitements illégaux ont eu lieu
01:04:50pour faire face, justement, à la dégradation,
01:04:52encore une fois, de la qualité de la ressource.
01:04:54Et donc, je voudrais avoir votre analyse,
01:04:57puisque d'un côté, vous nous dites que c'est finalement là
01:04:59que la ressource est la mieux connue,
01:05:00la mieux identifiée, la mieux appréhendée,
01:05:02et en même temps, là où, en tout cas,
01:05:03il y a eu une dégradation qui a conduit
01:05:05à des pratiques illégales pour y faire face, quelque part.
01:05:09Oui, très bien.
01:05:11Alors, en fait, il faut comprendre que dans les gisements,
01:05:17en fait, chaque gisement,
01:05:18c'est un petit peu une entité particulière.
01:05:21Donc, le fonctionnement est différent d'un site à l'autre.
01:05:24Il y a la théorie, et puis dans la pratique,
01:05:26chaque gisement est différent.
01:05:27Donc, forcément, un gisement de type Evian
01:05:31où l'impluvium est dans les hauteurs,
01:05:34sur les massifs,
01:05:38et les zones d'émergence sont déconnectées,
01:05:40sont plutôt dans la plaine.
01:05:42Du coup, on va avoir un gisement qui se caractérise
01:05:45par, finalement, un impluvium qui est plutôt protégé,
01:05:50parce qu'on n'a pas d'activité humaine,
01:05:52et une zone de plaine des émergences plutôt restreinte
01:05:55où les activités agricoles, notamment, sont de petites surfaces.
01:05:59Donc là, au niveau de la protection du gisement,
01:06:05on va dire qu'on a un niveau de risque déjà pas très élevé,
01:06:10et du coup, la protection du gisement est un petit peu plus facilitée.
01:06:17Donc, je vous parlais, effectivement,
01:06:19de la carence réglementaire liée aux périmètres de protection.
01:06:23Au regard de ces carences,
01:06:25les grands embouteilleurs ont développé
01:06:29ce qu'on appelle des gouvernances partenariales,
01:06:33justement, pour gérer ce risque de pollution anthropique d'origine agricole.
01:06:37Donc, vous en avez deux, de toute façon, deux majeures.
01:06:41La première, c'est, effectivement, l'APM à Évian.
01:06:46Et donc, sur base de volontariat,
01:06:48ils ont fait un certain nombre de recherches
01:06:52avec des actions ciblées avec les agriculteurs
01:06:58pour limiter ce risque.
01:06:59Mais étant donné que les surfaces sont petites
01:07:01et on a un faible nombre d'agriculteurs,
01:07:04le risque est plus facilement gérable.
01:07:08Dans le cas, par exemple, de Vittel contre Excevil,
01:07:11on a une configuration complètement différente.
01:07:12On est en plaine,
01:07:14les zones des émergences sont compris dans la zone des impluviums.
01:07:19Et, vous l'avez compris, comme on est en zone de plaine,
01:07:22on a des grands espaces avec beaucoup d'agriculteurs.
01:07:26Donc, c'est plus compliqué à gérer.
01:07:28Donc, là aussi, il y a eu une politique de gouvernance partenariale
01:07:33qui a été mise en place, pas sur le même modèle.
01:07:38Et donc, forcément, comme c'est sur base de volontariat,
01:07:42aujourd'hui, il y a 70 % des agriculteurs
01:07:46qui adhèrent à cette gouvernance-là.
01:07:49Il y a eu des actions menées à partir de 92,
01:07:53en même temps que Danone, à Évian,
01:07:57sur Vittel, notamment, et contre Excevil.
01:07:59Il y a eu des actions de rachat massif de terres à des agriculteurs
01:08:04et de location de ces terres
01:08:06sous signature d'une charte agricole,
01:08:09avec des pratiques agricoles,
01:08:11avec 100 phytosanitaires et engrais.
01:08:19Avec une régulation même des fumures,
01:08:21puisque Nestlé Water, la filiale agri-vert,
01:08:26est partie prenante même de la gestion
01:08:33de tout ce qui est fumure pour respecter les doses restreintes
01:08:39dans les zones sensibles du gisement d'eau minérale.
01:08:44Pour autant, c'est facultatif.
01:08:46Ça veut dire qu'il n'y a que 70 % des agriculteurs qui adhèrent,
01:08:50donc, quelque part, il reste 30 % du problème.
01:08:53On est sur un gisement où les émergences
01:08:57ne sont pas forcément à une très grande profondeur.
01:09:00On a une protection naturelle qui n'est pas forcément exceptionnelle
01:09:04sur ces gisements à Vittel contre Excevil.
01:09:08On n'a pas tous les agriculteurs qui adhèrent,
01:09:10donc, forcément, on va retrouver des traces de pollution
01:09:13anthropique d'origine agricole sur ces gisements-là.
01:09:21Malgré les actions de l'embouteilleur,
01:09:25il va rester des traces de cette activité-là, malheureusement.
01:09:29Et on constate quand même une amélioration dans les chiffres
01:09:33que vous avez.
01:09:34Est-ce que vous avez des chiffres qui permettent de piquer le contrat
01:09:37où a été mis en place que 70 %, ce n'est pas non plus tout à fait neutre,
01:09:40qui sont rentrés dans la démarche ?
01:09:42Est-ce qu'on a une amélioration de la situation ?
01:09:44Le problème, c'est que c'est l'indicateur.
01:09:49À ma connaissance, le seul indicateur qui a été suivi par le minéralier,
01:09:53c'est le taux de nitrate.
01:09:54Le taux de nitrate, il était de 8,8 mg par litre
01:10:00avant le lancement du programme en 92,
01:10:04donc dans les années 85, dans les années 80.
01:10:07Et il est tombé actuellement à 4 mg par litre.
01:10:11Donc, il a tout de même été plus que divisé par deux.
01:10:15Par rapport aux risques sanitaires,
01:10:19on est bien en deçà du seuil réglementaire qui est de 15 mg par litre.
01:10:25Le problème a été pris à bras-le-corps par les minéraliers au sens large
01:10:30pour juguler ce risque-là,
01:10:32puisqu'il y a un fort enjeu économique pour eux derrière.
01:10:36Pour autant, dans le cadre de ma thèse,
01:10:39les entretiens que j'ai pu faire, notamment avec le directeur d'Agriver,
01:10:45il m'avait indiqué tout de même
01:10:48qu'il y avait une tendance à la hausse de ce taux-là,
01:10:55puisque finalement,
01:10:57même les agriculteurs qui signaient cette charte-là
01:11:02avaient tendance à faire revenir des intrants,
01:11:05puisque les exploitations agricoles
01:11:08sont tout ou partie sur les terres achetées par Nestlé Water.
01:11:13Donc quand on est en limite du gisement
01:11:15ou hors des terres achetées par Nestlé Water,
01:11:18ou auquel cas l'agriculteur a signé sa charte,
01:11:22il peut faire ce qu'il veut sur les autres terres mitoyennes,
01:11:29et du coup on revoit apparaître à priori des intrants phytosanitaires,
01:11:37engrais, etc.
01:11:38Donc avec des pratiques agricoles qui sont évolutives,
01:11:43ça restait de la déclaration orale,
01:11:47mais c'est vrai que ça avait été cité dans la conversation.
01:11:50Donc le décalage entre des gros embouteilleurs
01:11:57qui ont mis de la gouvernance partenariale en place,
01:12:01qui ont des périmètres de protection qui ne couvrent pas tout,
01:12:06ça s'explique aussi par le fait
01:12:10qu'il n'y a pas aujourd'hui d'obligation réglementaire
01:12:15pour limiter un certain nombre d'activités agricoles,
01:12:21ou en tout cas de certaines pratiques agricoles ou autres,
01:12:25et que ces taux-là puissent apparaître,
01:12:31même s'ils restent en deçà du seuil réglementaire.
01:12:34D'accord. Donc si je résume un peu ce que vous nous dites,
01:12:36vous nous dites qu'il faut travailler notamment
01:12:38sur le périmètre de protection,
01:12:39ce que je retiens, pour moderniser l'outil de régulation.
01:12:43On est d'accord ? C'est ce que vous disiez il y a quelques instants.
01:12:46Élargir le périmètre de protection à l'ensemble des gardements,
01:12:51et du coup le muscler par rapport notamment aux contraintes des tiers
01:12:57sur les activités, notamment d'origine agricole,
01:13:01mais pas que, pour mieux protéger toute la surface du gisement.
01:13:06D'accord. Et je vous pose une érection avant de passer la parole à mes collègues.
01:13:09Hier, nous auditionnions le BRGM,
01:13:11qui nous disait qu'il y avait 2 sources, finalement,
01:13:14de pollution anthropique possibles sur ce type de zone.
01:13:20La 1re est celle que vous avez décrite
01:13:21par l'activité humaine qui s'y joue,
01:13:24et la 2e, ils évoquaient la question des forages eux-mêmes,
01:13:27qui peuvent être des points d'entrée de pollution
01:13:30qui viennent attaquer justement la question
01:13:33d'une nappe réactive ou non,
01:13:35mais qui, justement, sont des points potentiels d'entrée.
01:13:37Est-ce que là-dessus, vous avez des éléments
01:13:39sur des risques liés à des forages plus ou moins bien faits,
01:13:43bien ou pas gérés ?
01:13:46Est-ce que vous avez là-dessus des éléments ?
01:13:49En fait, sur les émergences, il y en a de plusieurs types.
01:13:53Les plus récents, c'est les forages,
01:13:56c'est ceux qui présentent le moins de risques, on va dire.
01:13:59Ensuite, on a d'autres types d'ouvrages plus anciens
01:14:04qui sont toujours en exploitation
01:14:06et qui présentent des risques.
01:14:10C'est le cas, par exemple, du forage à Bagnères-de-Luchon,
01:14:18qui appartient toujours à la commune
01:14:22et qui a été exploité par Intermarché pour l'embouteillage.
01:14:27Et finalement, cet ouvrage ancien, qui était un puits,
01:14:30n'était pas assez profond et était fait d'athées.
01:14:35Jusqu'au jour où il y a eu des variations
01:14:40de compositions physico-chimiques dans le temps,
01:14:44qui faisaient craindre une perte de l'appellation.
01:14:51Et au final, cet ouvrage ancien n'a pas pu être remplacé
01:14:55faute de connaissances hydrogéologiques.
01:14:57Ils n'ont pas retrouvé, même s'ils ont fait trois forages nouveaux,
01:15:01une eau minérale naturelle,
01:15:03une eau qui pouvait avoir des caractéristiques adéquates
01:15:07à un agrément EMN.
01:15:10Et donc, l'activité s'est arrêtée.
01:15:12Mais des ouvrages comme ça, qui sont anciens
01:15:15et qui peuvent être sujets à des pollutions,
01:15:19ou des interventions anthropiques,
01:15:22ou en tout cas, sujets à des mélanges avec des eaux de surface,
01:15:27il y en a plusieurs, effectivement, en France.
01:15:31Bon, merci beaucoup.
01:15:32Il y a deux de nos collègues qui souhaitent également
01:15:34poser des questions, et je commence par la première.
01:15:37Audrey Lincolnhead.
01:15:39Merci. Bonsoir. Audrey Lincolnhead,
01:15:41sénatrice du Nord.
01:15:42Merci beaucoup pour toutes ces précisions
01:15:45qui éclairent utilement l'audition, en effet,
01:15:48que nous avons eue précédemment avec le BRGM.
01:15:52Deux questions.
01:15:54La première sur les périmètres de production
01:15:59et les périmètres de protection.
01:16:01Vous avez dit qu'il vous semblait nécessaire de les élargir.
01:16:05Est-ce que ça veut dire par là que vous souhaitez
01:16:07qu'ils soient rendus obligatoires ?
01:16:09Puisque j'ai compris qu'ils étaient facultatifs.
01:16:12Et deuxième question sur les périmètres sanitaires
01:16:16d'émergence.
01:16:17Est-ce que j'ai bien compris
01:16:21que lorsque certains embouteilleurs
01:16:24ferment des forages parce que la qualité de l'eau
01:16:28n'est plus suffisamment au rendez-vous
01:16:30et ont l'autorisation d'en ouvrir d'autres,
01:16:33est-ce qu'à cette occasion-là,
01:16:35ils doivent refaire leur périmètre sanitaire d'émergence
01:16:40ou en tout cas le faire évoluer ou pas,
01:16:43dans la plupart des cas, en tout cas ?
01:16:46Est-ce que vous avez des éléments là-dessus ?
01:16:48Est-ce que vous pouvez, du coup, nous dire
01:16:49comment évolue le nombre de périmètres sanitaires
01:16:53d'émergence en France ?
01:16:54Est-ce qu'ils sont stables ?
01:16:55Est-ce qu'ils évoluent à la hausse ou à la baisse ?
01:16:57Et enfin, dans l'article
01:17:01qu'a mentionné le rapporteur Alexandre Ouisy tout à l'heure,
01:17:04que j'ai lu également,
01:17:06vous mentionnez le fait que, dans certains cas,
01:17:09l'application de ces PSE est difficile à contrôler,
01:17:13notamment dans les milieux urbains.
01:17:16Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus là-dessus ?
01:17:18Et qui donc est confronté à ces difficultés ?
01:17:21Est-ce que ce sont, dans ce cas-là,
01:17:22les agences régionales de santé
01:17:24ou est-ce que c'est d'autres intervenants
01:17:27qui se trouvent face à cette difficulté ?
01:17:30Et comment pourrait-on la surmonter
01:17:33si on devait vouloir faire évoluer la réglementation ou les pratiques ?
01:17:36Merci.
01:17:39D'accord.
01:17:40Effectivement, quand j'évoquais l'appareil réglementaire,
01:17:43c'était à la fois les PSE et les périmètres de protection.
01:17:48En fait, il faut, à mon sens,
01:17:50une réforme globale et une réflexion globale
01:17:54pour voir avec des hydrogéologues compétents en la matière
01:17:58la redéfinition.
01:18:00Ce ne sera peut-être pas deux zones,
01:18:01mais peut-être quatre zones par rapport à la réglementation belge
01:18:04et sur d'autres critères, etc.,
01:18:06pour englober la totalité du gisement.
01:18:11Voilà.
01:18:12Sur le périmètre de protection,
01:18:15effectivement, l'intuition que j'ai,
01:18:19c'est effectivement d'avoir un outil réglementaire obligatoire.
01:18:24De manière à être exhaustif sur tout le territoire français
01:18:29pour les eaux minérales naturelles,
01:18:31ce qui ne représente pas non plus, je pense,
01:18:34une montagne dans le sens où on a un nombre limité de sites.
01:18:45Donc, voilà.
01:18:47Ça va aussi dans le sens d'une réglementation
01:18:53qui soit au plus juste pour tous les territoires,
01:18:56puisque la problématique d'un outil facultatif,
01:19:00c'est que par essence, il est mobilisé que par les acteurs volontaires
01:19:05qui ont des forts enjeux économiques
01:19:08et qui, finalement, n'est pas mobilisé par les autres acteurs.
01:19:11Donc, on a finalement une réglementation à double vitesse
01:19:15qui crée une asymétrie entre les territoires,
01:19:18ce qui ne semble pas forcément être une justice sociale équitable.
01:19:24Donc, effectivement, à mon humble sens,
01:19:28un outil obligatoire pour tous les sites
01:19:30permettrait de juguler les risques écologiques et économiques
01:19:36de manière exhaustive.
01:19:38Sur les PSE, effectivement, chaque émergence,
01:19:42chaque forage doit avoir son périmètre.
01:19:46Donc, un PSE, c'est quelques mètres autour du forage.
01:19:50Ça se présente sous la forme d'un ouvrage fermé
01:19:54et puis d'un espace grillagé de quelques mètres tout autour.
01:19:58Donc, effectivement, quand un embouteilleur
01:20:01ou un établissement thermal ferme
01:20:04n'utilise plus un ouvrage, il doit le condamner.
01:20:08Il a un PSE spécifique pour un type d'ouvrage.
01:20:14Quand il fait un nouveau forage, il doit avoir un nouveau PSE
01:20:18avec un nouveau périmètre PSE.
01:20:22Donc, ça, c'est vraiment pour chaque point d'émergence.
01:20:27Merci.
01:20:28Ah, pardon, oui ?
01:20:29Excusez-moi, vous ne m'avez pas répondu
01:20:31sur la difficulté de contrôle de l'application des PSE.
01:20:35Oui.
01:20:36Oui, tout à fait.
01:20:38Auparavant, les PSE, en fait,
01:20:42ça revient à la question de la base des ouvrages souterrains.
01:20:50Auparavant, toutes les déclarations étaient centralisées par le BRGM,
01:20:54qui avait leurs hydrogéologues.
01:20:55Donc, c'était exhaustif et à la fois assez simple
01:20:59vu qu'ils avaient des compétences en interne.
01:21:00Aujourd'hui, c'est les 18 ARS qui doivent faire ce travail.
01:21:04Forcément, ils n'ont pas d'hydrogéologue.
01:21:06Et les renseignements intégrés pour ces PSE
01:21:12ne sont pas exhaustifs.
01:21:15Donc, il y a des carences, très clairement.
01:21:19Il n'y a pas toutes les indications.
01:21:21Donc, il y a beaucoup moins de données qu'auparavant
01:21:25sur tous les éléments-là.
01:21:27Et forcément, en termes de contrôle des PSE,
01:21:33ce ne sont plus les mêmes personnes, forcément, derrière.
01:21:36Donc, j'imagine qu'il doit y avoir des problèmes de moyens humains
01:21:40et de compétences derrière au niveau des ARS.
01:21:46OK, merci beaucoup.
01:21:48Donc, il nous reste encore deux personnes
01:21:50à vous poser des questions.
01:21:52Ce que je vous propose, mes chers collègues,
01:21:53c'est que vous posez vos questions et puis, je suppose,
01:21:55vous y répondrez.
01:21:56Donc, il y a Mme Gull d'abord et Mme Rousseau ensuite.
01:21:59Donc, Mme Gull.
01:22:01Oui, bonjour, et merci pour vos interventions.
01:22:05Je voulais, moi, revenir sur ce que vous évoquiez
01:22:09sur Vittel contre Rex.
01:22:11Alors, vous n'avez pas parlé d'épargne,
01:22:12mais sur Vittel et contre Rex,
01:22:15en disant qu'il y avait là, effectivement,
01:22:18une protection assez bonne,
01:22:22ou en tout cas très travaillée,
01:22:24une gouvernance partenariale que vous avez expliquée
01:22:27et qui fait qu'il y a eu une progression
01:22:30assez importante dans la qualité.
01:22:33Donc, moi, je m'étonne quand même,
01:22:34je comprends ce que vous dites, vous n'êtes pas le premier,
01:22:36d'ailleurs, à le dire, puisque le BRGM a dit la même chose
01:22:39hier, mais je m'en étonne quand même,
01:22:41puisque, en fait, les eaux concernées,
01:22:44Vittel contre Rex et Epargne,
01:22:46sont les eaux qui sont traitées,
01:22:50et on sait qu'elles sont traitées depuis très longtemps,
01:22:52parce que l'émergence présente des pollutions.
01:22:57Donc, est-ce que vous aviez, vous, connaissance
01:22:59ou vous avez connaissance de ces pollutions ?
01:23:04Ça, c'est ma première question.
01:23:06La deuxième, c'est sur la question
01:23:08de la gestion de la ressource.
01:23:10Vous avez beaucoup écrit sur la gestion raisonnée
01:23:14de la ressource, enfin, c'est pas tout à fait comme ça
01:23:16que vous le dites, mais en tout cas,
01:23:19sur le fait de ne pas prélever, de modérer les prélèvements
01:23:22pour pouvoir protéger la ressource.
01:23:24Ça n'a pas été le cas, justement, sur ces nappes phréatiques,
01:23:27et en particulier sur Epargne, puisqu'on sait
01:23:29qu'il n'y a plus suffisamment d'eau
01:23:33pour pouvoir assurer la consommation,
01:23:36pour pouvoir assumer le marché qui existe sur l'eau d'épargne.
01:23:41Donc, tout ça me laisse un peu dubitatif
01:23:45sur la qualité à la fois de cette gouvernance participative
01:23:49et des décisions prises,
01:23:52puisque, un, on voit que ça a échoué
01:23:54sur la question de la pollution,
01:23:56et deux, ça a échoué sur la question
01:23:57de la quantité de prélèvements.
01:23:59Voilà, je voulais juste avoir votre réaction là-dessus.
01:24:04Alors, effectivement, si on rentre un petit peu plus
01:24:07dans le détail sur la gouvernance, les formes de gouvernance,
01:24:11je vous ai dit qu'effectivement, il y avait deux types de gouvernance,
01:24:15une à Evian, une à Vitel contre Axevil.
01:24:21Ces gouvernances-là, elles sont différentes l'une de l'autre.
01:24:26C'est-à-dire qu'à Evian,
01:24:30la gouvernance est de type mixte.
01:24:34C'est-à-dire qu'il y a une association qui s'appelle l'APM
01:24:36qui a été créée en 92.
01:24:37Dedans, on retrouve la SAEME, donc l'embouteilleur,
01:24:41les quatre communes d'émergence et les neuf communes de l'impluvium.
01:24:45Donc, c'est une gouvernance publique-privée
01:24:49où on a des actions par projet qui sont financées à deux tiers
01:24:52par le groupe Danone et un tiers par les quatre communes d'émergence
01:24:57qui perçoivent la surtaxe d'embouteillage.
01:25:00Donc, ça, c'est une gouvernance publique-privée
01:25:04qui est finalement possible
01:25:07au regard des rapports de force des acteurs au local.
01:25:09C'est-à-dire qu'au local, en termes de mode d'exploitation,
01:25:16on a un modèle de concession unique
01:25:18qui est permis par un contrôle de l'accès à la ressource au minéral
01:25:24qui est assuré par la ville, notamment, d'Evian-les-Bains
01:25:28et la commune de Publiez également.
01:25:30Mais c'est un contrôle public,
01:25:32c'est-à-dire que le modèle concessif unique,
01:25:35la ville d'Evian dit que tous les usages de l'eau minérale
01:25:41doivent être gérés par...
01:25:44Là, ils ont attribué le contrat à Danone pour un certain nombre d'années.
01:25:48Donc, ils assurent l'exploitation thermale, l'embouteillage,
01:25:50la gestion de l'hôtel des thermes et le casino.
01:25:53Forcément, ça structure un petit peu les rapports de force
01:25:57et l'apparition d'une gouvernance mixte.
01:26:03Ce modèle-là, ils ont essayé de le dupliquer sur d'autres sites.
01:26:06On le retrouve à Volvic depuis 2006,
01:26:08à Saint-Galmier, c'est Badoit, depuis 2010
01:26:11et à Salvetà-sur-Agoût depuis 2012.
01:26:15Sur Vitel contre Exevil, c'est complètement différent.
01:26:19On a finalement un contrôle de la ressource en eau
01:26:25qui est historiquement privé.
01:26:30Ce qui a été mis en place en termes de gouvernance,
01:26:33c'est plutôt une gouvernance à dominants privés.
01:26:36C'est-à-dire que c'est la SARL filiale de Nestlé Water Agrivert
01:26:39qui gère la gouvernance partenariale
01:26:43qui est centrée sur notamment les actions avec les agriculteurs.
01:26:48Finalement, les collectivités locales
01:26:51qui sont des communes d'émergence ou des communes de l'impluvium
01:26:58ne sont pas forcément associées à toutes les actions,
01:27:02mais parfois à certaines en fonction des projets.
01:27:05Néanmoins, par exemple, la commune de Vitel
01:27:11a des accords avec Nestlé Water,
01:27:15notamment quand ils ont voté l'augmentation
01:27:18de la surtaxe d'embouteillage en conseil municipal.
01:27:22Ils ont pris un accord avec Nestlé Water
01:27:24de participer notamment à l'entretien du parc thermal
01:27:28qui est ouvert au public, mais qui appartient à Nestlé Water.
01:27:31Ils ont essayé également de dupliquer ce modèle à Vergès
01:27:36sur l'usine d'embouteillage Perrier.
01:27:38Mais ça reste toujours une gouvernance privée
01:27:43qui associe d'une certaine manière les acteurs publics du visement.
01:27:48Voilà donc pour cette série d'auditions
01:27:51dans le cadre de la commission d'enquête
01:27:53sur le scandale des eaux en bouteille.
01:27:55Le Sénat va maintenant poursuivre ses travaux.
01:27:58On suivra ça bien évidemment avec beaucoup d'attention sur Public Sénat.
01:28:02Voilà, c'est la fin de cette émission.
01:28:04Restez avec nous, la formation politique continue sur notre antenne.