• il y a 4 jours
Grands décryptages, débats politiques, grands entretiens, question qui fâche ...en cette année 2024 qui s'achève, toute l'équipe de ça vous regarde vous propose de voir quelques morceaux choisis de l'émission.

LE GRAND DÉBAT / Protection de l'enfance : les carences de l'Etat
- Isabelle Santiago, députée socialiste du Val-de-Marne
- Thomas Larrieu, responsable de plaidoyer pour le Groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux (GEPSo), co-auteur du rapport « Des enfants à protéger, 70 propositions pour agir vite »
- Antoine Marvier, co-fondateur de l'association « Les Ombres »
- Sara Després, avocate, ancienne enfant placée

LE GRAND ENTRETIEN / Gérard et Noémie Ejnès : « Noémie est en vie », ou l'enfer du harcèlement scolaire

- Grands invités : Noémie Ejnès, adolescente victime de harcèlement scolaire, et son père, Gérard Ejnès, co-auteurs de « Noémie est en vie » (Robert Laffont)

LA QUESTION QUI FÂCHE / Restauration de Notre-Dame : Macron en fait-il trop ?
- Bertrand Périer, avocat *
- Richard Werly, correspondant France/Europe pour « Blick » *

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00Bonsoir et bienvenue en cette année 2024 qui s'achève.
00:05Nous vous proposons, avec toute l'équipe de Savourgarde,
00:08de revoir quelques morceaux choisis de l'émission.
00:11Grands décryptages, débats politiques,
00:14grands entretiens d'actualité,
00:15et questions qui fâchent avec nos chroniqueurs.
00:18C'est tout de suite sur LCP.
00:20Générique
00:22...
00:31Dysfonctionnement, opacité, faillite morale,
00:35des mots qui reviennent sans cesse ces dernières années
00:38pour qualifier le système français de l'aide sociale à l'enfance.
00:41En cette journée mondiale, on va s'arrêter ce soir
00:44sur les enfants placés dans notre pays.
00:46Qu'est-ce qui a été fait ? Qu'est-ce qu'il faut encore faire ?
00:49L'eau est-il vraiment si noire ? Bonsoir, Isabelle Santiago.
00:54Merci d'être là.
00:55Députée socialiste du Val-de-Marne,
00:57c'est vous la rapporteure de la commission d'enquête
01:00sur la protection de l'enfance, dont les travaux ont repris
01:03depuis la dissolution. Vous avez fait une audition
01:06de Laurence Rossignol. Vous en sortez en direct ce soir.
01:09Bonsoir, Thomas Larieux.
01:11Bienvenue, responsable du plaidoyer pour le Gepso.
01:13C'est le groupe national des établissements publics sociaux
01:17et médico-sociaux.
01:18Vous êtes le co-auteur d'un rapport pour la fondation Jean Jaurès,
01:22des enfants à protéger,
01:2470 propositions pour agir vite.
01:28Bonsoir, Sarah Després.
01:29Bienvenue, avocate spécialisée dans la justice des enfants,
01:33ancienne enfant placée, vous-même.
01:35Enfin, bonsoir, Antoine Marvier.
01:37Vous êtes le cofondateur de l'association Les Ombres,
01:40qui accompagne les jeunes de l'ASE.
01:42Avant de vous entendre, mesdames, messieurs,
01:45le récap' de Bruno Donnec, on accueille tout de suite.
01:48Générique
01:50...
01:58Bonsoir, Bruno.
01:59Bonsoir, Myriam.
02:00Un oncle mort dans votre récap' ce soir, celui de La République.
02:04Et puis, une question aussi.
02:05La France manque-t-elle à ses devoirs lorsqu'il s'agit
02:08de protéger ses enfants les plus fragiles ?
02:11La question peut sembler incongrue,
02:13mais la réponse qu'apportent bon nombre de ceux
02:16qui ont été placés est toujours sans appel.
02:18-"Les lois de protection de l'enfance votées
02:21dans cette même enceinte peinent à être appliquées.
02:24Mesdames et messieurs les députés, je vous implore
02:26de ressentir au plus profond de votre être
02:29l'ampleur du désastre qui frappe les enfants placés."
02:32Le sujet est pourtant colossal.
02:34En chiffres, aujourd'hui, 75 000 enfants
02:37sont placés dans des familles d'accueil,
02:4072 300 dans des institutions spécialisées
02:43et, en tout, plus de 380 000 jeunes de moins de 21 ans
02:47bénéficient d'une des diverses mesures
02:50de l'aide sociale à l'enfance.
02:51Le problème, c'est qu'il n'y a pas suffisamment de contrôles.
02:55-"J'ai été dans une famille d'accueil
02:57qui me faisait dormir sur un morceau de polystyrène
03:00pendant deux ans, qui ne me nourrissait pas tous les jours,
03:03qui pouvait me frapper."
03:05Alors, ce garçon qui témoigne, vous l'avez entendu,
03:07Isabelle Santiago, ici même, à l'Assemblée nationale,
03:10au mois de mai dernier,
03:12lors de la commission d'enquête sur la protection de l'enfance,
03:16dont vous étiez la rapporteure.
03:17Cette commission s'est interrompue
03:19pour cause de dissolution de l'Assemblée nationale,
03:22mais les affaires de mauvais traitement, elles, ont continué.
03:26Le mois dernier, par exemple, un procès s'est tenu à Châteauroux,
03:30au cours duquel 60 victimes ont témoigné des violences,
03:33souvent insoutenables,
03:34qu'elles ont subies dans leur famille d'accueil.
03:38J'avais vraiment des difficultés à respirer.
03:40C'était très, très compliqué.
03:42Après, il a commencé à essayer... Il a baissé mon pantalon.
03:45Euh... Je l'ai remonté.
03:47Vous ne voyez pas mes parties génitales, heureusement.
03:50Après, c'est lui qui a baissé son pantalon et qui m'a uriné dessus.
03:54Cette affaire de Châteauroux est accablante,
03:56car elle a mis en évidence que des familles
03:59qui n'étaient agréées par personne et qui n'ont jamais été contrôlées
04:02par qui que ce soit,
04:04ont perçu plus de 630 000 euros d'argent public
04:07pour maltraiter des mômes âgés de 6 à 12 ans.
04:10Entre-temps, il y a une commission d'enquête,
04:12ici même, au Palais Bourbon, qui a repris ses travaux.
04:15C'est arrivé le 9 octobre dernier.
04:17Vous êtes toujours la rapporteure, Isabelle Santiago,
04:20de cette commission et vous souhaitez identifier
04:23les manquements de l'aide sociale à l'enfance,
04:26cibler les défaillances de la gouvernance
04:28et faire des recommandations
04:30sur les réponses législatives, réglementaires et budgétaires.
04:33On vous souhaite bon courage, car pour l'heure,
04:36l'opacité la plus totale règne dans le secteur,
04:39au point que le syndicat de la magistrature
04:42a carrément dénoncé un système qui craque de la coque au pont.
04:47Voilà pourquoi, au terme de ce tableau édifiant,
04:49une question, Myriam, se pose.
04:51Faut-il considérer l'Etat comme un parent défaillant ?
04:55Merci.
04:56Merci beaucoup, Bruno Donnet.
04:58Ce qui frappe quand on se penche sur ce dossier,
05:01évidemment, vous êtes les spécialistes,
05:03mais c'est l'opacité, l'opacité de l'aide sociale à l'enfance.
05:07Pourquoi est-ce un univers si peu transparent
05:09et si mal contrôlé, Isabelle Santiago ?
05:12Tout d'abord, je pense qu'on le voit
05:14dans la commission d'enquête,
05:16il faut reprendre avec l'historique.
05:18L'historique, c'est qu'en fait, pendant très longtemps,
05:21c'est une politique publique qui a été invisibilisée.
05:24Donc, la protection de l'enfance,
05:26il y a une part de génie, on ne veut pas savoir
05:28ce qui se passe parce que c'est insoutenable.
05:31Les images, ce que vous venez de dire,
05:33c'est insoutenable pour tout un chacun.
05:35Et donc, en fait, on se retrouve dans une situation
05:39où ces enfants n'ont pas de relais.
05:41C'est récent qu'ils ont un relais à travers la parole
05:44des comités de jeunes issus de la protection de l'enfance.
05:47Avant, il n'y avait personne qui portait leur parole,
05:50à part ceux qui essaient de se battre,
05:52et on est quelques-uns autour de la table à le faire,
05:55mais sinon, c'est une invisibilité des politiques publiques.
05:59Vous-même, d'ailleurs, comme législateur,
06:01à la tête de cette commission d'enquête,
06:03vous êtes heurtée à l'accès aux structures.
06:06Vous n'avez pas le droit. Ca veut dire quoi ?
06:09Ca veut dire que si vous voulez aller dans un foyer
06:12de façon inopinée, c'est niait.
06:15C'est niait. Ca fera aussi partie des recommandations,
06:18en tout cas, que nous allons faire,
06:20c'est que les parlementaires puissent visiter les foyers.
06:23Comme c'est le cas pour les prisons.
06:25Exactement. Dans ce modèle-là.
06:27A l'inverse, moi, je suis une ancienne vice-présidente
06:30du département du Val-de-Marne,
06:32chargée de la protection de l'enfance pendant 12 ans,
06:35sur deux mandats de conseillère départementale,
06:37et à chaque fois qu'un parlementaire...
06:40C'est arrivé qu'on me demande de visiter un foyer,
06:42et j'ai toujours donné un accord.
06:44Donc, c'est possible.
06:46Il faut dire que c'est possible.
06:48Toutes les structures ne sont pas fermées.
06:50Je vais faire circuler la parole,
06:52mais vous avez fait un déplacement important,
06:55je crois, dans le puits de Dôme,
06:57et vous avez parlé de faillite morale collective.
07:00Oui.
07:01Qu'avez-vous découvert ?
07:03L'innommable.
07:04En fait, le sureffectif, on sait qu'actuellement,
07:07la France a le plus haut taux de placement des enfants en bas âge,
07:11entre zéro et six ans,
07:13mais dans les pouponnières, ils ont entre zéro et trois ans,
07:17donc quelques jours,
07:18et du sureffectif,
07:20ça veut dire qu'une pouponnière de 25 places,
07:22vous avez 45 enfants.
07:24Donc, il y a un moment,
07:26on est sur un décret qui régit,
07:28et c'est le seul décret qui régit l'organisation
07:31du nombre de personnes,
07:34qui date de Simone Veil, qui avait fait un plan pouponnière,
07:37à l'époque, qui date de 1974,
07:39et pour que chacun comprenne,
07:41eh bien, même en sureffectif,
07:43on est avec un décret qui concerne
07:46un ratio de un adulte
07:49pour six enfants le jour,
07:51un adulte pour 30 la nuit.
07:54On parle bien de bébé.
07:55Ce décret, et autant vous dire
07:59que je suis même choquée,
08:00que tous ceux qui ont pignon sur rue en protection de l'enfance
08:04et depuis des décennies ne se sont pas posés la question
08:07que ce ratio autour des besoins fondamentaux de l'enfant
08:10n'était pas au rendez-vous.
08:12On va venir sur la question des effectifs,
08:14de la formation des professionnels,
08:16de l'aide sociale à l'enfance.
08:18Sarah Desprez, sur les contrôles.
08:19C'est le département qui a la charge
08:22de délivrer d'abord les agréments
08:24et de financer aussi les structures,
08:26aussi bien ceux qui y travaillent
08:28et les moyens qui sont mis à disposition
08:30de, soit les foyers, soit les familles d'accueil.
08:33D'abord, pourquoi les conseillers généraux
08:35ne suivent pas concrètement ce qui se passe chez eux,
08:38alors que c'est eux qui, au fond, peuvent être contrôleurs,
08:41puisque c'est eux qui financent ou pas ?
08:44Il me semble qu'il convient de rappeler tout d'abord
08:46qu'en 1983, les départements ont obtenu cette compétence
08:50de la protection de l'enfance.
08:52Toutefois, à cette compétence s'ajoutent celles des personnes,
08:57l'ensemble des publics vulnérables.
08:59Finalement, ce qui est difficile aujourd'hui
09:01pour le personnel des conseils départementaux,
09:04c'est avant tout de pouvoir gérer l'ensemble de ces compétences,
09:08puisque la multiplication des compétences
09:10n'a pas été suivie par une multiplication
09:13des moyens en conséquence.
09:14Donc, pouvoir contrôler des foyers
09:16ou, plus globalement, des institutions collectives
09:19qui vont être placées des enfants,
09:21c'est avoir le personnel suffisant...
09:23Donc, ils n'ont pas les moyens de le faire.
09:25Ca n'est pas une volonté, quoi, d'opacité ?
09:29Alors, il peut y avoir en filigrane, en effet, cette opacité,
09:32puisque la question de l'indépendance des contrôles
09:35doit être posée.
09:36Si j'établis un parallèle avec des contrôles sanitaires,
09:40par exemple, si vous possédez un restaurant,
09:42il y a une compétence spécifique et indépendante
09:45de brigade sanitaire, pour simplifier les termes,
09:49qui va procéder au contrôle du restaurant
09:51pour vérifier si vous appliquez...
09:53Le département est jugé parti d'une certaine façon ?
09:56Absolument. On parlait tout à l'heure
09:58des compétences du CGLPL.
10:00Pas trop de sigles.
10:01Du contrôle général des lieux de privation de liberté.
10:04On a aujourd'hui ouvert la porte
10:06aux établissements pénitentiaires,
10:08mais plus récemment, aux locaux de garde à vue.
10:11Il me semble que c'est important que les parlementaires,
10:14notamment madame Isabelle Santiago,
10:16puissent contrôler et vérifier
10:18la bonne application du droit aujourd'hui.
10:21Une proposition, faire en sorte que les contrôleurs
10:24soient indépendants. Dernière question.
10:26Comment, très concrètement, je suis une jeune mineure,
10:30une jeune enfant dans un foyer,
10:32je suis maltraitée ? Très concrètement,
10:34vers qui je me tourne ?
10:36A mon sens, deux relais essentiels
10:38peuvent être mobilisés.
10:39D'une part, le personnel scolaire,
10:42puisqu'il s'agit d'un personnel accessible aux enfants,
10:45indépendant de la cellule familiale d'origine
10:47ou la cellule familiale recomposée,
10:49s'il s'agit d'une famille d'accueil.
10:51Par ailleurs...
10:53A l'école, l'infirmière.
10:54Ou le professeur principal,
10:56le professeur en qui on peut avoir confiance.
10:58D'autre part, on va avoir le personnel médical,
11:01qui va être un relais, notamment pour la prévention
11:04de toute forme de maltraitance.
11:05Vous dites, pas au sein du foyer.
11:07Il faut sortir de ça.
11:09Ca veut dire déjà pas mal de choses.
11:11Thomas Larieux, le cas extrême, c'est Châteauroux.
11:15Là, c'est très particulier.
11:17C'est peut-être pas exactement la réalité de tout un pays.
11:20Pardon, je me trompe.
11:22Oui, c'est pas grave, vous n'avez pas de soucis.
11:25Le Châteauroux, c'est l'arbre qui cache la forêt,
11:29pour vous, où il faut pas généraliser.
11:32Ce qui est très impressionnant,
11:34au-delà des sévices sexuels,
11:35au-delà des...
11:36Il y a eu des enfants qui ont eu du Valium de façon forcée,
11:39qui ont travaillé de façon forcée.
11:41C'est les enfants qui sont allés dire ce qui s'est passé.
11:46C'est pas l'Etat qui a réagi.
11:48Bien sûr, mais tout d'abord,
11:49je pense qu'on est tous d'accord autour de ce plateau
11:52pour dire que chaque dysfonctionnement,
11:55chaque scandale est vraiment un drame.
11:57Aujourd'hui, c'est collectivement, en tant que société,
12:00que quand la protection de l'enfance est incapable
12:03de venir protéger les enfants qui sont sous sa responsabilité,
12:06c'est que, collectivement, on n'y arrive plus aujourd'hui.
12:09La commission d'enquête pourra rendre ses travaux.
12:12Notre rapport, dont vous avez mentionné le nom tout à l'heure,
12:15le fait aussi.
12:16Cependant, je mettrais un peu de nuance.
12:18Il ne faudrait pas non plus penser,
12:20et c'est malheureusement le cas avec la régularité...
12:23Les scandales existent et on ne peut pas les nier.
12:26C'est très important qu'on puisse utiliser ces moments-là
12:29pour continuer d'alerter les pouvoirs publics,
12:31les politiques, pour leur dire qu'on vous l'avait dit,
12:34il y a des professionnels en difficulté,
12:37il faut remettre la machine en marche.
12:39Mais c'est aussi important de souligner
12:41qu'il y a des brebis égarées,
12:42mais il y a aussi sur le terrain de très nombreux professionnels
12:46qui, quand ils ont affaire à des scandales de ce type,
12:49ont du mal à se regarder dans la glace,
12:51alors qu'ils donnent leur maximum, ils sont dévoués.
12:54C'est important de souligner qu'il y a beaucoup de choses à changer.
12:57Nous, on le défend et on a fait un rapport
12:59avec 70 propositions sur le sujet.
13:01Sur la question des contrôles, vous êtes d'accord
13:04avec l'idée de dissocier le contrôleur
13:06du département.
13:07La première proposition, c'est de dire
13:09que l'Etat doit faire respecter la loi
13:11et qu'il y a une nécessité que l'Etat réinvestisse
13:14ses compétences régaliennes en matière de contrôle.
13:17Il faut faire des contrôles inopinés,
13:19développer plus d'éléments, c'est un point important,
13:22mais il faut aussi dire et le redire très clairement
13:25qu'il y a des professionnels qui tiennent...
13:28C'est important de rappeler que vous avez raison,
13:30le Val-de-Marne, ça marche.
13:32Antoine Marvier, pardonnez-moi, je me suis trompée dans les invités.
13:36Vous nous disiez, vous qui avez l'expérience de terrain,
13:39qu'il y a une carence affective béante
13:41quand on est dans cette situation,
13:43d'avoir à être placé.
13:45On manque de tout.
13:47Est-ce que ça veut dire qu'on a plus de chances
13:49d'avoir des problèmes psychiques, d'être déscolarisés ?
13:52Qu'est-ce que ça veut dire ?
13:54Est-ce qu'il y a un profil qu'on retrouve invariablement
13:57chez les enfants placés ?
13:59Il y a autant de profils qu'il y a d'enfants.
14:01C'est évident.
14:02Il y a autant de politiques,
14:04de protection de l'enfance qu'il y a de foyers.
14:06C'est toute la complexité.
14:08Je pense que c'est extrêmement important.
14:10Il y a des faits divers.
14:12Sur le terrain, on voit tous les jours l'innommable,
14:15des gens qui font un travail qui est fou,
14:17parfois sacrificiel, avec un manque de moyens qui est criant
14:20et un manque de cadre juridique et un abandon total de l'Etat.
14:23Les éducateurs spécialisés, les directeurs de foyers,
14:26j'ai vu pour le moment que des gens formidables
14:29et qui ont un courage.
14:30Je vous en prie.
14:32Ils y sont tous les matins avec les moyens qu'on leur donne.
14:35Sur les propositions, comment on avance ?
14:37C'est un amendement que vous aviez proposé
14:39dans la loi qu'on appelle taquet de février 2022,
14:42qui est de prolonger systématiquement
14:44l'accompagnement jusqu'à 21 ans avec le contrat jeune-majeur.
14:47C'est la sortie du cadre de l'aide sociale à l'enfance.
14:51Pour éviter les sorties dites sèches,
14:53être mis à la porte d'un foyer,
14:55ce qui explique pourquoi il y a une telle proportion
14:58d'anciens laseux parmi les 100 domiciles fixes.
15:00C'est un cadre d'accompagnement jusqu'à 21 ans,
15:03pour dire les choses le plus simplement possible.
15:05C'est fou que ça ne soit arrivé qu'en 2022.
15:08On a inscrit dans la loi, encore une fois,
15:10qu'il ne faut pas que ce soit systématique.
15:12Comment expliquer que dans 50 % des cas,
15:15les jeunes n'obtiennent pas ce contrat jeune-majeur ?
15:18Elle est appliquée sur le terrain, cette loi taquet ?
15:21Cet amendement de Santiago ? Non, ça ne marche pas ?
15:23Quand on n'a pas les ressources suffisantes,
15:26on est lâché dans la nature à 18 ans.
15:28Oui, mais pas que.
15:29Il y a aussi... On avait inscrit le droit au retour,
15:32parce qu'un jeune qui a fait un parcours
15:34en protection de l'enfance peut avoir envie de sortir,
15:37et qu'à 18 ans, il ne rentre pas
15:39dans ce dispositif qui lui est proposé.
15:41C'est pour ça que le droit au retour était important.
15:44C'est qu'à 18 ans, il ne participe pas à ce projet,
15:47mais par contre, s'il a besoin, il revient.
15:49Et ça ne marche pas pour plusieurs raisons.
15:52Déjà, il y a un effort. La loi est récente, tout d'abord.
15:55On s'inscrit dans la loi,
15:56tout d'abord.
15:57On s'inscrit sur la protection de l'enfance sur le temps long.
16:01La loi de 2007, la loi de 2016, la loi de 2022,
16:03elles ont toutes été votées sans budget.
16:06C'est bien de voter du...
16:08Moi, je suis un législateur.
16:10Mais s'il n'y a pas les budgets, il y a un problème
16:13d'application de la loi, et on est dans un écosystème
16:16tellement important.
16:17Avant que ça arrive au dernier kilomètre,
16:20en fait, il faut beaucoup, beaucoup, beaucoup de travail,
16:23et ça s'inscrit dans le temps long.
16:25C'est un écosystème qui est difficile à faire fonctionner.
16:29Aujourd'hui, tout le monde ne rentre pas dans ce dispositif.
16:33Pour certains, c'est par choix.
16:35D'autres, parce qu'ils ne rentrent pas
16:37dans le process qu'on leur propose.
16:39C'est-à-dire qu'ils doivent être motivés
16:41sur un projet scolaire, de formation professionnelle
16:44ou d'études supérieures.
16:46La difficulté, c'est que vous avez des jeunes
16:48qui sont pas très bien et qui ont des difficultés
16:51avec des problématiques de type d'addiction ou autre,
16:53et ces problèmes-là, liés aux carences éducatives,
16:56on a le droit à l'erreur, on a le droit de se tromper,
16:59on a le droit, d'ailleurs, de ne pas aller bien,
17:02et si on ne va pas bien, au contraire,
17:04on n'est pas disposés à rentrer dans un cursus très motivant,
17:07et en plus, il faut rajouter que ces jeunes-là,
17:10on leur demande de le renouveler tous les trois mois.
17:13C'est extrêmement complexe, et je pense qu'il y a beaucoup qui lèchent.
17:17Donc, on peut mieux faire dans l'application moyen
17:20et un peu moins de bureaucratie.
17:21Une fois placées en famille d'accueil,
17:24que se passe-t-il ? On y vient,
17:25les professionnels de l'ASE, dont on redit
17:28qu'ils ne sont pas tous à montrer du doigt.
17:32Anne-Lise est une petite fille de 17 mois.
17:34Après cinq mois passés en pouponnière,
17:36elle change de bras et découvre sa famille d'accueil.
17:39Regardez, c'est un extrait du documentaire LCP,
17:42bébé placé, la vie devant eux,
17:44tournée dans le Val-de-Marne, dans votre circonscription.
17:47Coucou.
17:48Bonjour.
17:50Bonjour.
17:52Toi, c'est Tata.
17:53Tata.
17:54Je suis venue te voir, c'est ton premier jour aujourd'hui.
17:58Je te disais, progressivement, tu vas apprendre à connaître Tata,
18:02pour finir, aller avec chez elle, mais pas tout de suite.
18:05Plusieurs dodo.
18:06Regarde, il y a des jeux, là-bas.
18:08Tu viens avec moi ? Parce que moi, je rentre.
18:10Moi, je rentre.
18:16Oui, c'est Tata.
18:18C'est ce qu'on disait, t'as besoin de t'appliquer.
18:21On a expliqué à Tata, c'est ça ?
18:23C'est qui, cette...
18:24On vient parler de toi.
18:27Je suis la Tata.
18:28Ce sera chouette, ce sera bien.
18:30Tu seras contente.
18:31Bah oui.
18:33Bah oui, vous allez apprendre à vous connaître.
18:35On va sortir, on va jouer.
18:38Tu vois, Tata, il est petit comme ça.
18:42Ah oui, c'est dur, hein ? C'est dur.
18:44Bah oui.
18:46Tu sais, ça va se faire progressivement.
18:48Bah oui.
18:50C'est pas facile.
18:52Et nous, on est contentes que tu viennes, Tata, tu sais.
18:55Ah oui, hein ?
19:01Hop là !
19:03Allez, lance.
19:04Tiens, lance, ballon.
19:07Ajoute tes doigts.
19:09Allez.
19:11Allez, monte, monte, là. Je reste là, tu vois.
19:14Je reste avec vous.
19:15Voilà.
19:17Allez.
19:18Ballon, ballon.
19:20Comme ça.
19:21Hum, hum.
19:22Allez.
19:23Viens.
19:25Viens.
19:26Tiens, tu fais calme.
19:29Tu fais calme.
19:30Oh, c'est beau.
19:32C'est beau.
19:33C'est très bien.
19:35Voilà, c'est le moment crucial d'un passage affectif à un autre.
19:39Sarah Desprez, vous-même, vous êtes une enfant placée.
19:42Vous n'avez pas le terme.
19:43Absolument, puisqu'on place des meubles,
19:45mais on confie des enfants, plutôt.
19:47Et je pense qu'il est beaucoup plus opportun
19:50d'utiliser le terme confier, aussi,
19:53pour se rappeler que l'Etat a, sous ses auspices,
19:57la bonne protection de ses enfants, avant tout vulnérables.
20:00Comme on le voit dans le reportage, dans le Val-de-Marne,
20:04ce...
20:05Cette... Comment dire ?
20:07Le mot... Vous vous êtes confiée.
20:09Je cherche le nom du mot confier.
20:12C'est bien passé ?
20:13J'étais également issue du Val-de-Marne.
20:16Je pense que ce département est particulièrement représenté.
20:19Il est modèle, à certains égards,
20:22notamment d'un point de vue politique
20:25et d'un autre point de vue budgétaire,
20:27qui est l'un des départements qui soutient le plus
20:30la protection de l'enfance, malgré des budgets
20:32qui ne sont pas suffisants.
20:34Vous êtes avocate.
20:35En regardant un peu le dossier,
20:37je me rends compte que le parent biologique maltraitant,
20:41a une place très importante
20:43dans le système judiciaire des droits.
20:46Il y a deux choses qu'on vient de distinguer.
20:48Quelle place, précisément ?
20:50Le parent maltraitant,
20:52il y a deux procédures qui vont s'ouvrir.
20:55Vous avez en premier lieu la procédure
20:58devant le juge des enfants,
20:59qui va statuer sur l'opportunité ou non d'un placement de l'enfant,
21:04on dit encore placement, malheureusement,
21:06au niveau juridique,
21:07mais d'un placement de l'enfant auprès de l'aide sociale à l'enfance.
21:11Et on a, en second lieu, cette procédure pénale,
21:15s'il n'advient que des agissements susceptibles,
21:18notamment de revêtir la qualification
21:21de violences volontaires aggravées par la circonstance,
21:24qu'elles sont commises sur l'enfant dont il est le père ou la mère.
21:28Donc, vous voyez, il y a ces deux procédures-là
21:31qui vont être finalement assez indépendantes,
21:33comme des droits de parallèle.
21:35Est-ce que le parent biologique,
21:37qui a forcément une place, et le juge le rappelle régulièrement,
21:40l'enfant doit souvent, d'ailleurs, le rencontrer,
21:43ça peut être un obstacle à un déménagement
21:46de la famille d'accueil,
21:48est-ce que c'est une difficulté,
21:52par exemple, dans votre cas,
21:54qu'on vous ramène à lui ou pas ?
21:56Alors, pour reprendre peut-être des éléments plus personnels,
22:02je suis née en 1997,
22:04on était dans le paradigme, si vous voulez,
22:06le paradigme qui était suivi était uniquement celui
22:09de la préservation du lien entre l'enfant et ses parents biologiques.
22:13Aujourd'hui, on essaie de s'écarter de ce paradigme
22:16pour prendre en considération l'intérêt supérieur de l'enfant,
22:20puisque finalement, on se rend compte
22:22que les contacts récurrents avec les parents biologiques
22:25peuvent nuire au bon développement.
22:27Dans mon cas, c'était, de manière assez patente,
22:32cette hypothèse, puisque j'étais accueillie
22:35dans une famille d'accueil aimante, très stable,
22:38dans laquelle j'ai passé 18 ans
22:41et à l'issue, j'ai signé un contrat jeune majeur.
22:45Donc on se rendait bien compte, dans notre cas,
22:47parce que j'ai une soeur jumelle,
22:49que la famille d'accueil était tout à fait susceptible
22:52de devenir complètement une famille de substitution.
22:56Et donc on avait des contacts qui n'étaient plus nécessaires
22:59pour notre développement.
23:00Dans d'autres cas, on se rend compte
23:02que les enfants sont contraints, nous, c'était notre cas,
23:05de procéder à des visites en présence de tiers.
23:09Et la parole de l'enfant doit être écoutée,
23:11lorsqu'il est, évidemment, eu égard à son degré de maturité,
23:15lorsqu'il est capable de verbaliser sa pensée,
23:19dans le sens où l'enfant doit pouvoir être
23:22l'acteur de son enfance et de sa propre vie.
23:25Et souvent, on se dit que les parents ont une parole
23:29qui peut ou doit prévaloir par rapport à la parole de l'enfant.
23:32Je trouve ça tout à fait difficile, en effet,
23:35et tout ceci va se jouer dans le cabinet du juge des enfants,
23:38où les enfants doivent être assistés par des avocats
23:41pour qu'on porte leur voix.
23:44Je me rappelle d'audience devant le juge des enfants à Paris,
23:47où on était seul. On avait huit ans,
23:50on devait s'exprimer sur nos conditions de vie
23:52et ce qu'on souhaitait et nos aspirations.
23:55Il y a aussi un problème d'accompagnement juridique,
23:57présence de l'avocat pour les mineurs.
24:00J'aimerais qu'on parle des professionnels
24:03dans ces foyers et des familles d'accueil.
24:07Ca se passe bien et, il faut le dire,
24:11ça arrive que ça se passe bien.
24:13Ca arrive même souvent.
24:14Il y a la question de l'argent qui est là.
24:18Expliquez-nous comment ça se passe.
24:20Très souvent, peut-être que c'est un cliché,
24:22mais on pourrait imaginer que le fait
24:25que les familles d'accueil soient rémunérées
24:28puisse autoriser les dérives.
24:29Comment la question financière intervient ?
24:32Elle est majeure, la question financière.
24:34De toute façon, en fait, ce que je voudrais dire,
24:37c'est que la question financière, je la mets,
24:40elle est corrôlée, pour moi, à cet écosystème
24:43et à la formation des professionnels.
24:45Il y a une problématique qui est majeure,
24:47qui est que, très souvent, la formation des professionnels...
24:51Les éducateurs en foyer ou les familles d'accueil.
24:55Et d'ailleurs, elles sont souvent très seules,
24:58les familles d'accueil.
25:01Tous les départements n'organisent pas une forme.
25:04Comment ça se passe ?
25:05Vous avez quoi ? Des recrutements, des formations ?
25:08A quel niveau ?
25:09Si je prenais l'exemple de ce qu'on a vécu dans le Val-de-Marne,
25:12à un moment donné, il y a une baisse démographique
25:15dans ce métier, il y a beaucoup de départs à la retraite,
25:18on est en zone urbaine dense, il est très difficile de recruter
25:22parce qu'il y a des personnes qui proposent,
25:24ça ne convient pas au niveau du logement.
25:26Donc, il y a quand même des critères.
25:28Et ensuite, parce que nous sommes dans un milieu urbain,
25:31nous avons capacité à les nourrir au sens de formation
25:35et de développer un esprit de travail collectif.
25:40Ça participe à ce qu'il y ait moins de dérives,
25:43parce que les gens ne sont pas laissés seuls
25:46à une capacité de non-formation.
25:48Quand on est dans les foyers,
25:49aujourd'hui, la formation initiale est continue,
25:53et la formation initiale en particulier
25:55n'est pas de niveau par rapport à un métier
25:57qui s'appelle la protection de l'enfance.
26:00Il faut connaître les besoins fondamentaux d'un enfant,
26:03ça ne fait pas partie du programme.
26:05Peut-être juste dire très rapidement
26:07que quand on est éducateur spécialisé,
26:09et avec tout le respect que je porte à ces personnels,
26:12on peut travailler dans le handicap,
26:14on peut travailler auprès des personnes âgées,
26:16on peut être assistant social dans un cadre de bureau,
26:19et on peut être à la protection de l'enfance.
26:22Il faut que la formation soit faite.
26:24Sur ces formations, Thomas Darius,
26:26ce qui frappe aussi, c'est qu'il y a une crise de vocation.
26:29Oui, parfaitement.
26:30Il y a un sujet autour de l'attractivité de ces métiers.
26:33C'est un volet que nous, en tant que fédération,
26:36tous les acteurs du secteur travaillent d'arrache-pied,
26:39parce qu'aujourd'hui, ce sont des métiers
26:41qui ont beaucoup de mal à recruter.
26:43On estime qu'il y a à peu près 30 000 postes manquants,
26:4630 000 professionnels manquants,
26:48donc 1 poste sur 10 qui sont vacants en protection de l'enfance.
26:51Il y a un gros sujet autour des taux d'encadrement,
26:54à la fois des professionnels par des référents à eux,
26:57on parlait de l'isolement des assistants familiaux,
27:00c'est un vrai sujet.
27:01Un assistant familial, quand il est tout seul
27:04et qu'il voit une fois tous les 6 mois le référent à eux,
27:07avec qui il peut dialoguer, discuter, expliquer sa situation,
27:10ça vient miner l'attractivité de ces métiers.
27:13Dans les structures collectives,
27:15la question des taux d'encadrement et des normes,
27:17je rejoins parfaitement le sujet,
27:19il faut des professionnels formés.
27:22Je prends la métaphore qu'une des coautrices du rapport
27:25a pu utiliser en délégation des droits de l'enfant,
27:28ça choquerait tout le monde que demain,
27:30pour un enfant atteint d'une tumeur cérébrale,
27:33on fasse intervenir un médecin généraliste.
27:35En protection de l'enfance, c'est de plus en plus le cas.
27:38Il y a de plus en plus de professionnels
27:41qui sont pas formés, pas compétents,
27:43et qui viennent faire ce qu'ils peuvent
27:45avec les connaissances cliniques qu'ils peuvent avoir.
27:48Il y a un vrai sujet pour mettre les moyens
27:50pour assurer la présence de professionnels en face des enfants
27:54et aussi d'avoir des professionnels de l'ASE
27:56qui viennent soutenir les assistants familiaux
27:58qui sont au contact au quotidien.
28:00C'est important, en sachant que la formation
28:03va de pair avec toutes les nouvelles dynamiques en cours,
28:06notamment la parole des premiers concernés.
28:08Il y a toute une logique de faire avec
28:10et de développer ce qu'on appelle la démarche de co-construction
28:14qui doit devenir de plus en plus prégnant
28:16et qu'il faut travailler dans les formations.
28:18C'est le métier de la protection de l'enfance.
28:21Il faut revenir sur la question financière.
28:23On est dans un monde où on marche sur la tête.
28:25Vous demandez, tout à l'heure,
28:27c'est quoi la différence statistique d'être un enfant confié.
28:30C'est une espérance de vie très fortement diminuée,
28:33c'est un quart des SDF qui sont passés par l'ASE,
28:36c'est 70 % de ces jeunes, on le voit,
28:38qui sortent sans diplôme, pas même le brevet,
28:40mais tout ça, si la société peut compenser les choses
28:43très froidement, c'est un coût énorme.
28:45Je ne comprends pas, pour citer un exemple médical,
28:48on a compris que le tabac faisait des cancers,
28:51ça tue et ça coûte cher à la Sécurité sociale.
28:53C'est dans l'intérêt financier de l'Etat.
28:55Il faut prévenir, il faut guérir.
28:57Même si on est très froid,
28:59parce qu'on nous sort des calculs financiers,
29:01financièrement, on marche sur la tête.
29:04Je ne viens pas de l'univers socio-éducatif,
29:06ni du droit, je viens du privé, de la société civile,
29:09de la finance, pour être précis,
29:11mais justement, je peux dire que le calcul financier
29:14est complètement débile et absurde.
29:16Même de ce point de vue, il n'y a pas d'argument...
29:19En mettant un peu plus de moyens,
29:21tout de suite, l'Etat gagnera de l'argent.
29:23Et ça se gagne assez vite.
29:24Isabelle Santiago.
29:26Je dis souvent qu'investir sur l'enfance,
29:28c'est investir l'avenir.
29:29Je l'ai dit en séance, ça a surpris beaucoup de monde.
29:32J'ai des amendements qui n'ont pas été pris dans le PLFSS,
29:36justement, pour travailler sur ce sujet
29:38de la protection de l'enfance.
29:40Quand je dis ça, c'est qu'investir,
29:42le chiffre, on le connaît.
29:43Céline Grégot a été auditionnée
29:45dans le cadre de la commission d'enquête.
29:47Très clairement, c'est public.
29:49L'étude de Lancet, ça coûte 38 milliards de dollars
29:53chaque année à la France de ne pas avoir investi
29:56sur les enfants au niveau de la santé,
29:59ce qui amène des pathologies de type diabète, cancer,
30:03ça peut être dépression, addiction et tout.
30:06Donc, 20 ans de vie en moins
30:10au potentiel des maladies qu'ils peuvent avoir.
30:12Voilà.
30:1330 milliards juste sur la santé.
30:15C'est pour ça que j'ai précisé.
30:17Vous avez dit beaucoup de choses.
30:19Le débat s'achève, touche à sa fin.
30:21On a parlé formation, on a parlé contrôle.
30:23Liesse Loufocq, qui était dans le récap de Bruno Donnet,
30:27qui aussi est devenu le visage
30:29des victimes du placement des enfants au foyer,
30:34dit qu'il faut tout repenser
30:36et sortir complètement la gouvernance,
30:39sortir complètement le département
30:40de la compétence protection de l'enfance.
30:43Vous n'êtes pas d'accord.
30:45Donc, on change les choses, mais on garde...
30:48L'Etat doit reprendre sa place.
30:50L'Etat doit reprendre aux côtés des départements,
30:53c'est indiqué dans la loi d'Adrien Taquet,
30:55c'est une coordination,
30:56mais l'Etat, concrètement, c'est éducation nationale,
30:59c'est santé, c'est justice,
31:01aux côtés des départements et avec des moyens.
31:04C'est ça, le vrai sujet, l'argent.
31:05Rendez-vous pour la remise du rapport.
31:08Je compte sur vous. Merci à vous.
31:10Merci d'avoir été parmi nous sur LCP.
31:14Si on vous invite, Noémie et Gérard Ejnes,
31:17c'est pour nous raconter un calvaire,
31:19celui de votre famille,
31:20confrontée à l'enfer du harcèlement scolaire.
31:24Un récit à trois voix,
31:25à commencer par la vôtre, Noémie,
31:27cible d'une rumeur circulant dans les couloirs du collège
31:31à propos d'une vidéo montrant une jeune fille nue,
31:34votre nom y est associé, à tort,
31:37et les insultes fusent.
31:38...
31:42Le début d'une spirale infernale,
31:44condamnée à croiser vos bourreaux chaque jour
31:47qui vivent en toute impunité,
31:48de plus en plus isolés, épuisés mentalement.
31:52Seul moyen de sortir du cauchemar, dormir, toujours plus.
31:56Vous commencez à déserter le collège,
31:58votre corps vous lâche, mal au dos, au ventre,
32:005 kg de perdus.
32:02Alerte rouge, vous abandonnez votre passion, le cheval,
32:05jusqu'à cette phrase qui terrifie votre mère.
32:08Elle m'a dit sur un ton très doux,
32:10je veux juste que tout s'arrête.
32:12Quand vous êtes maman et que votre fils
32:14se trouve dans un tel état de détresse,
32:16vous ne pouvez imaginer qu'un seul sens, le pire.
32:20-"Marie-Frédérique et vous, Gérard, êtes désemparés.
32:23Face à l'immobilisme de la principale du collège,
32:26incapable de sanctionner les coupables,
32:28face aux dysfonctionnements multiples,
32:31le 30-18, ce numéro spécial réservé aux cas de harcèlement
32:35qui ne rappellera jamais,
32:36délaissé malgré une plainte déposée à la gendarmerie,
32:40une véritable épreuve."
32:41-"Cela fait partie des moments de notre vie
32:44où la réalité est distanciée,
32:45où l'on a l'impression d'être hors sol.
32:48Ca n'arrive pas qu'aux autres."
32:49-"Une décision s'impose,
32:51changez Noémie d'établissement, la double peine,
32:54et la machine du harcèlement ne s'arrêtera pas.
32:57D'un collège à l'autre, les rumeurs vous suivent."
33:00-"Tu baisais avec plein de mecs dans l'autre collège ?"
33:02-"Aujourd'hui, Noémie, vous êtes en seconde,
33:05et l'un de vos camarades toxiques,
33:07le début, peut-être, d'une reconstruction."
33:12Bonsoir, Noémie.
33:14Merci beaucoup d'être là avec nous sur LCP.
33:17Et bonsoir, Gérard Régenès.
33:19Merci également d'être là.
33:22C'est pas évident, quand même, de voir un sujet comme ça.
33:25Alors, on s'accroche. C'est pas facile,
33:27mais qui a convaincu qui d'écrire ce livre,
33:30de raconter ça, de raconter son histoire publiquement ?
33:33En premier, mon père, qui est, de base, un écrivain.
33:36Donc, il a eu cette idée
33:39dans mes moments les plus bas,
33:41et il m'en a directement parlé
33:43et proposé cette idée d'écrire ce livre.
33:47Et vous, Gérard ?
33:48Comment est né ce projet ?
33:50Il fallait coucher sur le papier ce que vous avez traversé ?
33:53Oui. Alors, la première fois que j'en ai parlé à Noémie,
33:56c'était encore une illusion, ce livre,
33:58parce que Noémie était au plus bas de sa dépression,
34:02et on communiquait pratiquement plus avec elle,
34:04parce qu'elle ne nous entendait plus,
34:06elle était plongée dans son calvaire.
34:09Et je me suis dit que lui proposer ce livre,
34:12c'est-à-dire un projet d'avenir,
34:14c'était une façon de la maintenir en vie,
34:17parce que nous craignions pour sa vie à cette époque-là.
34:20Une manière de la maintenir en vie,
34:22de lui donner un espoir,
34:24non pas de...
34:26Si c'était possible, si on se sortait de tout ça,
34:28non pas de se venger,
34:31parce qu'il n'est pas question de vengeance,
34:33mais au moins pour elle, de prendre une petite revanche,
34:36parce qu'elle a été tellement salie et humiliée
34:39qu'il fallait qu'on lui rende sa fierté.
34:41Il vous convient ce mot de revanche, Noémie ?
34:44Je pense que oui, parce qu'une vengeance,
34:47on ne peut pas se venger,
34:48mais une revanche personnelle, je suis d'accord,
34:51parce que je pense que ce livre m'a beaucoup aidée
34:54et va, par la suite, beaucoup m'aider.
34:56Il sort aujourd'hui. Ca libère aussi de quelque chose.
34:59Oui, ça fait assez spécial, quand même,
35:02de savoir qu'un livre sur moi-même sort,
35:05mais ça m'a beaucoup aidée et ça va beaucoup m'aider.
35:08-"C'est un livre à trois voix", ça fait son originalité
35:11et sa sincérité, sa force aussi.
35:14Il y a la mère, il y a le père,
35:16il y a la fille qui parle, chapitre après chapitre.
35:19C'est un livre qui s'ouvre sur une scène édifiante,
35:22une matinée de grisaille, on est début mars 2024,
35:25vous êtes tous les trois, avec votre mère Noémie,
35:29au volant de la vieille Clio familiale,
35:31en route vers le nouveau collège,
35:33puisqu'il a fallu, contraintes et forcées,
35:36changer de collège.
35:37Et là, je sais pas si c'est le sort qui s'acharne,
35:41mais vous allez devoir, le premier jour,
35:43alors que c'est le début de la fin du calvaire,
35:46être confrontée à voir ce que racontait Noémie.
35:51Noémie ?
35:52Le théâtre, la pièce de théâtre.
35:55Le théâtre, du coup, déjà...
35:58Bon, j'y vais comme une nouvelle élève,
36:00donc je suis assez seule,
36:02mais je pense que ça peut être pas mal
36:04de commencer par une sortie avec sa classe,
36:07mais elle aurait été beaucoup mieux
36:10si j'aurais pas eu à voir toutes les personnes
36:14de mon ancien collège,
36:16parce que, du coup, c'était une pièce de théâtre
36:18où les deux collèges de la ville étaient réunis.
36:21Donc...
36:23Et les élèves de 3e, qui vous avaient harcelé,
36:25se retrouvaient. C'est quand même incroyable.
36:28Les conséquences malicieuses, vous appelez ça.
36:30Je l'écris dans le livre. Je crois pas au hasard,
36:33mais à des forces qui nous guident.
36:35Elles doivent nous amener...
36:37Elles le savent, nous, on sait pas,
36:39mais, effectivement, sa première matinée,
36:41elle se retrouve confrontée à tous ces anciens condisciples
36:45du collège qu'elle vient de quitter,
36:47dont ces harceleurs,
36:48et qui sont eux-mêmes un peu surpris, d'ailleurs,
36:51pour beaucoup, parce qu'ils ne le savaient pas.
36:54C'était la première matinée après les vacances
36:56qu'elle avait changé de collège.
36:58Du coup, elle se retrouve sous les regards
37:00des élèves de son nouveau collège
37:02et des regards des élèves de son ancien collège.
37:05C'est un moment extrêmement compliqué.
37:08Cette scène inaugurale permet de mieux comprendre
37:10la hantise de les revoir,
37:12la hantise qui vous accompagne
37:14pratiquement tout le temps.
37:16Le harcèlement, il commence dès la 6e.
37:18Vous êtes accusé à tort par une amie,
37:20en fait, ce n'est pas du tout une amie,
37:22en 6e. Après, c'est l'enfer de la 3e.
37:24Je vais un peu vite.
37:26En début d'année, il y a cette vidéo,
37:28on le voyait dans le sujet,
37:30une femme nue, ça n'est évidemment pas vous,
37:32mais il y a celui que vous nommez Arthur,
37:35Gérard Regnès, dans ce livre,
37:36qui va diffuser cette vidéo.
37:38Le poison de la rumeur se diffuse
37:41et vous êtes salie.
37:42Vous êtes d'abord terriblement gênée.
37:45Vous vous tournez vers qui au tout début ?
37:47C'est pas tout de suite vers les parents.
37:49Du coup, non, au début,
37:51je ne me tourne absolument pas par mes parents.
37:53C'était pas possible ?
37:55C'est compliqué et je pense, encore aujourd'hui,
37:57que si quelqu'un ne m'aurait pas aidée,
38:00j'en aurais jamais parlé à mes parents.
38:02Il y a un sentiment de gêne, de honte.
38:04Et de honte.
38:05Oui, totalement.
38:06Et du coup, une des premières personnes informées,
38:10du coup, ça a été mon amie,
38:12qui a elle-même aussi été harcelée.
38:14Celle qu'on appelle Alice ?
38:16Oui. Du coup, on a essayé
38:18de se battre toutes les deux.
38:20Et la CPE a très vite été mise au courant.
38:23Voilà. Alors, c'est vrai qu'elle fait le boulot.
38:26Il y a une surveillante qui repère votre détresse
38:30et la CPE qui va vous conduire
38:34à appeler le 2-30-18.
38:35C'est quand même aussi édifiant.
38:37Encore aujourd'hui, j'entendais, en cette Journée nationale,
38:40vanter les mérites de ce numéro.
38:42Gérard, il n'a pas été utile, il n'a servi à rien.
38:45Alors, il faut faire ses intentions.
38:47Je voudrais pas que notre cas particulier
38:49soit confondu avec le cas général.
38:51C'est-à-dire que, dans le harcèlement de Noemi,
38:55rien de ce qui aurait dû être fait n'a été fait
38:59par les gens qui avaient pouvoir d'agir, évidemment.
39:02La CPE, elle n'a pas de pouvoir.
39:04Une proviseure, une responsable d'établissement,
39:07elle a un pouvoir.
39:08A l'académie, il y a des gens qui ont du pouvoir,
39:11au rectorat, il y a des gens qui ont du pouvoir.
39:13Mais donc, on s'est retrouvés face à...
39:17Une situation complètement bloquée,
39:20c'est-à-dire de voir Noemi plonger.
39:22Et en face, on avait, dans toute sa splendeur,
39:26le pas de vague, le célèbre pas de vague.
39:29C'est exactement ce qui nous est arrivé.
39:31Tout a été fait à l'envers.
39:33Le 30-18...
39:34-...et les autres parents d'élèves non plus.
39:36C'est frappant.
39:38Les autres parents, ils sont au courant ou pas au courant.
39:41Pour nous, c'est difficile,
39:42on n'avait pas de contact avec les autres parents.
39:45En revanche, le 30-18, on l'a tout de suite fait.
39:48Noemi l'a fait.
39:49Donc...
39:51Dans toutes les directives qu'ont les gens du 30-18,
39:56il faut, dans les 48 heures, alerter l'académie.
39:59Quand une proviseure,
40:01une principale d'établissement, de collège,
40:04apprend un cas avéré, bien sûr, de harcèlement,
40:07elle doit, dans les 48 heures, prévenir l'académie.
40:10La fait...
40:11Vous, vous n'avez rien vu venir, honnêtement.
40:14Il y a aussi ces très jolies pages, dans ce livre,
40:16où vous dites qu'au fond, depuis longtemps,
40:19depuis des années, votre fille vous met à distance,
40:22elle parle davantage avec sa maman.
40:24Vous tombez des nus, quand vous comprenez ce qui se passe ?
40:27On a l'impression que c'est pas à nous que ça arrive,
40:30c'est une histoire qu'on lit dans le journal.
40:32C'est votre propre histoire.
40:34Bien sûr, avec Noemi,
40:35il faut le dire, entre Noemi et moi,
40:37ça a toujours été un peu compliqué.
40:39La relation a un caractère très fort.
40:41Et moi, je suis un vieux papa.
40:44Vous voyez, nous avons 58 ans d'écart, imaginez-vous.
40:47Mais c'est pas comme au XIIIe ou au XIVe siècle,
40:5058 ans d'écart.
40:51Vous voyez d'où je viens ?
40:53Je viens du milieu du XXe siècle.
40:54Ca n'a rien à voir avec aujourd'hui.
40:57On n'est pas du même monde.
40:58Et toute petite, déjà, au début de l'école primaire,
41:01les gens, les élèves, les élèves qui étaient avec elle,
41:04se moquaient un peu d'elle,
41:06parce qu'au début, ils pensaient que c'était son papi.
41:08Mais on sent que ce texte vous a beaucoup rapproché, non ?
41:13Noemi, il faut expliquer aussi la plainte.
41:17Parce que c'est intéressant de voir
41:19qu'à aucun moment, vous n'avez hésité à dénoncer.
41:22Vous étiez d'accord pour porter plainte.
41:25C'était une épreuve d'aller à la gendarmerie.
41:27Vous y êtes allés tous les deux,
41:29sans avoir les mêmes éléments.
41:31Comment ça s'est passé ?
41:32Il faut savoir que quand mon père m'a proposé,
41:35j'ai tout de suite dit oui,
41:36parce qu'on était donc au début de l'histoire,
41:40mais je trouvais ça déjà important.
41:42Et c'était pour moi une...
41:46Une certe de...
41:47Une manière de dire que ça n'est pas bien ce qui se passe.
41:50Et surtout, me dire que j'en parle,
41:52et me dire que j'ai fait mon travail,
41:54que je pouvais faire de mieux, c'est-à-dire porter plainte.
41:58Mais...
41:59Mais malgré la plainte,
42:00et donc l'enquête qui va commencer à s'ouvrir,
42:03eh bien, rien ne se passe.
42:04Et la principale de collège a bien du mal à sanctionner les coupables.
42:09Et là, c'est le début de la descente aux enfers.
42:12Bien sûr, elle a plus que du mal.
42:14Je saute quelques étapes.
42:16L'année scolaire s'est terminée,
42:18avec changement d'établissement pour Noemi,
42:21qui a été rattrapé par la rumeur dans ce nouvel établissement,
42:24et aucune sanction contre les harceleurs,
42:26qui sont totalement identifiés,
42:28puisque lorsqu'on a déposé plainte,
42:30et on était au mois de décembre 2023,
42:32nous avons déposé des plaintes nominatives,
42:35car nous avions les noms.
42:36Donc, tout le monde les connaissait,
42:38ces noms et ces élèves.
42:40Or, ils ont terminé l'année sans jamais être sanctionnés.
42:43C'est ça, le pas de vague,
42:45parce que des sanctions, ça oblige à en référer
42:47à l'échelon supérieur,
42:49et donc, moins on en parle,
42:51et mieux c'est pour certains responsables d'établissement,
42:54pas pour tous.
42:55C'est le plus dur à vivre,
42:57de voir que les sanctions ne tombent pas.
42:59Comment avez-vous traversé tout ça ?
43:01C'était compliqué.
43:02Après, moi, la sanction...
43:04J'aurais pas voulu qu'elles tombent
43:06juste pour dire qu'ils sont sanctionnés,
43:08mais vraiment juste pour, moi, envers moi,
43:11qu'on comprenne que c'est pas normal
43:13qu'ils n'ont pas à faire ça.
43:15Donc, pour moi, les sanctions,
43:17elles étaient plutôt là pour moi me rassurer,
43:19me dire, OK, on m'écoute, on me croit,
43:22on m'aide et on fait ce qu'on peut
43:24pour éviter ce harcèlement,
43:25mais ce qui n'a pas été le cas.
43:27Donc, j'avais l'impression d'être laissée dans le vide
43:30et être laissée face à moi-même dans ces histoires.
43:33-"Laisser face à soi-même",
43:35vous avez cette phrase qui crée une forme de panique
43:37auprès de vos parents.
43:39Je veux juste que tout s'arrête.
43:41Vous dormez beaucoup, vous désertez le collège.
43:43Du coup, pour moi, le sommeil est une forme d'oubli total,
43:47parce que c'est les seuls moments
43:50où je ne vis pas ce que je vis au collège.
43:54Et du coup, je dors tout le temps, je ne me nourris plus
43:58parce que je n'avais pas la force,
44:00je ne sortais pas de ma chambre, je ne faisais rien.
44:03C'était vraiment pour me renfermer sur moi-même
44:05et essayer d'oublier le plus possible.
44:08Vous avez pensé au pire ?
44:10Penser à le faire, non, mais y penser,
44:12malheureusement, on y pense, parce que c'est...
44:15Quand on y réfléchit, on trouve que cette solution
44:18pour mettre fin à tout ce qui nous arrive.
44:21Aujourd'hui, c'est le lycée.
44:23Après ce collège, d'ailleurs, c'est toujours comme ça,
44:25la double peine, c'est la victime qui part,
44:28et souvent à 4 km, parce que c'est, évidemment,
44:31beaucoup plus simple pour ceux qui restent.
44:34Il y a des lois qui ont été mises en place,
44:37ici même, à l'Assemblée nationale.
44:39Elles ont été votées, ces propositions de lois.
44:41Il y a un travail sur les réseaux sociaux.
44:44Dans le cas de Noémie, il y a cette application de Snapchat,
44:47où les auteurs des messages disparaissent.
44:50Et Instagram, normalement, les coupables,
44:52on leur sanctionne leur téléphone portable,
44:55rien de tout cela.
44:56Qu'est-ce que vous attendez, très concrètement,
44:58comme papa de Noémie, après tout ça ?
45:01Alors, ce qu'on attend, c'est que ce livre serve à quelque chose
45:05et que le calvaire de Noémie n'est pas servi à rien.
45:08Si vous voulez, les statistiques disent,
45:11même si c'est assez flou, parce que c'est pas un sondage,
45:14que 700 000 élèves,
45:17par an, sont harcelés,
45:19à des titres divers et variés, vous imaginez bien.
45:22700 000, ça veut donc dire 1,4 million par an.
45:27Donc, il y a déjà les gens qui ont vécu ça.
45:32En face, il y a des harceleurs.
45:34C'est un phénomène de meute, de bande.
45:37Et donc, il y a 5, 6 personnes, au moins, à chaque fois.
45:405, 6 personnes par rapport à 700 000 harcelés,
45:43on est quand même à 7 millions par an de harceleurs en France,
45:47de CM1 ou CE2 jusqu'à la terminale.
45:52Mais c'est pas facile non plus d'être parent de harceleur.
45:55Et à un moment, quand elle est sortie...
45:58-...pour rencontrer des parents d'Arthur.
46:00-...oui, mais là, bon, c'est...
46:02J'ai été amené à rencontrer la mère d'un harceleur
46:05à la demande de la principale du collège,
46:08qui ne nous demandait jamais des nouvelles de Noémie,
46:11d'ailleurs, quand on la voyait.
46:13On la voyait assez rarement.
46:14De toute façon, elle ne nous a jamais téléphoné
46:17pour parler de cet harceleur.
46:19...de savoir si c'est Noémie sur cette vidéo,
46:21ce qui rend insupportable.
46:23Et donc, cette personne croyait encore,
46:25cette mère d'élève, que c'était Noémie sur la vidéo.
46:28Ma dernière question est pour vous, Noémie.
46:30Le titre, c'est Noémie est en vie.
46:32Est-ce qu'elle va bien, aujourd'hui ?
46:34Alors, forcément, je vais beaucoup mieux.
46:37Si on parle de quand j'étais au plus bas,
46:40je ne pense pas que je pouvais l'être encore plus.
46:43Je ne pouvais pas aller plus mal que ce que j'étais déjà,
46:47mais aujourd'hui, forcément, ça va mieux,
46:50parce que je ne les croise plus en ville,
46:53mais bon, ça, on ne peut rien y faire,
46:55on habite dans la même ville,
46:57mais je ne les croise plus dans un cadre scolaire
46:59et je ne me fais plus embêter directement.
47:03Merci beaucoup.
47:04Merci à vous d'être venus dans cette émission.
47:07Noémie est en vie, c'est à lire aux éditions.
47:10Robert Laffont, une famille dans l'enfer du harcèlement scolaire.
47:13Dans la question qui fâche, la vedette du jour, c'est Notre-Dame.
47:17Enfin, plutôt, Emmanuel Macron,
47:20au centre des célébrations de la réouverture de la cathédrale,
47:24le président, au milieu de ses fidèles...
47:26Pardon, au milieu des compagnons qui ont oeuvré à la reconstruction,
47:31fier d'avoir tenu sa promesse.
47:33En avril 2019, nous avions décidé que cela prendrait 5 ans.
47:37Vous l'avez fait, vous avez réussi ce que l'on pense impossible.
47:41Paris remporté, un miracle que n'est ni, selon ses proches,
47:45qui salue plutôt la force de volonté du président.
47:48Après tout, c'est lui qui a choisi le bon casting.
47:51Le général Georges Lain, puis Philippe Jost pour diriger les travaux,
47:55lui encore qui a fait voter une loi d'exception
47:58pour accélérer les procédures administratives,
48:00s'improvisant même chef de chantier, cette visite en 5 ans.
48:05Pour un résultat à couper le souffle,
48:07feu d'artifice de couleurs, vue saisissante et merveillement,
48:11l'Elysée ne lésigne pas sur les superlatifs,
48:13avec au passage un peu de communication sur les réseaux.
48:17Voilà pour toi, Paris s'enroule
48:20S'enroule comme un escargot
48:24L'Elysée, qui prévoit une inauguration XXL le week-end prochain,
48:28des dirigeants du monde entier,
48:30une messe à laquelle assistera le président
48:33et une nouvelle prise de parole sur le parvis de la cathédrale,
48:37espère-t-il en tirer profit ?
48:39C'est notre question qui fâche.
48:41Emmanuel Macron en fait-il trop ?
48:45On commence avec Bertrand Pagnet.
48:47Il y a deux dimensions, je crois.
48:49Il y a une dimension patrimoniale et une dimension religieuse.
48:52Dans la dimension religieuse, on a souvent dit
48:55qu'Emmanuel Macron en faisait trop.
48:57Au tout début de son quinquennat premier, en 2018,
49:00il avait fait ce fameux discours au Bernardin
49:03devant la conférence des évêques où il avait dit
49:05qu'il y avait un lien entre l'Etat et l'Eglise
49:08qui avait été abîmé.
49:09On avait considéré que c'était très fort
49:12et qu'il y avait une sorte d'atteinte à la laïcité
49:15de la part de quelqu'un qui a un rapport au religieux
49:18qui est tout à fait particulier.
49:20Emmanuel Macron a demandé le baptême à l'âge de 12 ans.
49:23Il dit qu'il est agnostique, mais c'est quelque chose
49:26avec lequel il a un lien très fort, la religion.
49:28Ce n'est pas anodin qu'il vienne à l'intérieur de la cathédrale,
49:32ce qui n'est pas absolument prévu.
49:35Il parle de messénieurs, de notre cathédrale,
49:37dans son discours de cet après-midi.
49:40Il y a une dimension religieuse très forte.
49:42Et puis, il y a aussi une dimension patrimoniale.
49:45On se souvient qu'à l'origine, au moment de l'incendie,
49:48c'est quand même lui qui prend la décision,
49:50on l'a même documenté, d'envoyer les pompiers
49:53au péril de leur vie pour sauver les deux beffrois
49:56et prendre le risque aussi que les pompiers décèdent
49:59dans cette intervention.
50:01Il y a une sorte de dividende, presque,
50:03de cet acte de courage premier,
50:05avec, au-dessus encore de ces deux dimensions patrimoniales
50:08et religieuses, en surplant une dimension politique,
50:11une façon de faire une pause dans un climat extrêmement houleux
50:15et de prendre une forme de hauteur spirituelle
50:18par rapport au jeu politique.
50:19Vous avez vu la Une de Libération,
50:21seul en Seine, CENE,
50:24qui accuse un peu le président
50:26de s'approprier la réouverture de Notre-Dame.
50:29Il faut dire que cinq ans, c'est fait.
50:31Le délai, il est tenu.
50:33Cinq ans, c'est fait, c'est un chantier réussi,
50:35dans lequel il a une part, il a eu la responsabilité
50:38de fixer ce délai.
50:39A l'époque, c'était controversé de dire cinq ans.
50:42Je crois qu'il aurait voulu que ça coïncide
50:45avec les Jeux olympiques.
50:46Aujourd'hui, ce qui m'a frappé,
50:48je craignais qu'il en fasse trop dans ses propos,
50:51car assez souvent, c'est la spécialité
50:53d'Emmanuel Macron, ne serait-ce qu'en longueur.
50:56Ca n'a pas été le cas aujourd'hui.
50:58Il s'en est tenu à un discours de remerciement...
51:01Il n'en a pas fait trop dans le discours,
51:03mais alors, ça a mis quand même quatre heures à la télévision.
51:06Dix étapes, du parvis au coeur, en passant par la nef,
51:09la charpente, ça a duré longtemps, mais c'est magnifique.
51:12La mise en scène, et la une de libération,
51:15c'est de dire la mise en scène avec C-E-N-E
51:17en enlevant le S, là, je crois qu'il y en avait un peu trop.
51:20Et puis, je ne dirais pas que c'est choquant,
51:23le mot ne convient pas, mais avoir le président,
51:26son épouse et la ministre de la Culture
51:28guidées tous les trois pendant quatre heures dans cet édifice,
51:31on se demande quand même, est-ce que le groupe
51:34aurait pas pu être un petit peu plus grand ?
51:36Est-ce qu'il aurait pas pu jouer un peu plus collectif ?
51:39J'aurais trouvé normal que le Premier ministre
51:42soit associé. Ca m'aurait semblé normal.
51:44Il a pas mal de choses à faire en ce moment.
51:47Il y a le week-end prochain pour l'inauguration.
51:50Le décor, la visite, la mise en scène m'a semblé un peu beaucoup,
51:53et la place que lui ont accordé certains médias,
51:56certaines télévisions, mais il faut reconnaître
51:59que c'était l'occasion de revoir la cathédrale,
52:01et l'acteur principal, c'était Notre-Dame.
52:04Il y a cette idée, bien sûr,
52:05il y a cette idée d'excellence française.
52:08Et on sent qu'il y a une volonté, au fond,
52:10de retrouver la magie des Jeux olympiques
52:13et de montrer qu'à travers la fierté du bâtiment,
52:16absolument magnifique, les images sont somptueuses,
52:19il y a aussi une manière de revenir
52:21avec un peu plus de gain politique pour un président
52:24qui est quand même très, très affaibli.
52:26Oui, c'était un défi un peu fou, et le pari a été gagné.
52:29Et ça n'est pas tous les jours,
52:31ça a été un peu le cas avec les Jeux olympiques,
52:34on avait l'impression de quelque chose qui était chimérique,
52:37qui était au-dessus de nos forces, et en effet, on l'a fait.
52:40Et on l'a fait comme cela, ce délai de 5 ans
52:43qui avait été assigné par le président de la République,
52:46et en effet, il a beau jeu aujourd'hui,
52:48et le réel lui donne en quelque sorte raison de dire
52:51que ça n'était pas aussi fou que ça, et j'ai bien fait,
52:54cette déambulation l'a emmené aussi en hauteur,
52:57il a vu la charpente, il a rendu hommage aussi
52:59à un ouvrier qui est décédé au cours des travaux,
53:02donc on voit bien qu'il y a effectivement
53:04une mise à l'honneur de, en quelque sorte,
53:07ceux de Notre-Dame, comme vous le disiez,
53:09avant la semaine prochaine, d'avoir quelque chose
53:12de plus institutionnel sur le parvis,
53:14comme c'est le rituel républicain,
53:16on a l'impression d'une visite privée très large.
53:19-"Visite privée à travers les yeux du président de la République",
53:22c'est ce qu'il a dit.
53:23C'est vrai qu'il a fait un pari, parce qu'il y a cinq ans,
53:27effectivement, il y a peu de gens, j'y connais rien,
53:29à l'architecture en général et à celle de Notre-Dame en particulier,
53:33mais la majorité des gens disaient
53:35qu'il n'y arriverait jamais, pourquoi il a dit ça, etc.
53:38Donc, de ce point de vue-là, il a réussi.
53:41J'ai trouvé ça un peu long, ce matin,
53:43ça aurait peut-être été mieux s'il avait eu
53:45quelques compagnons du devoir autour de lui,
53:48voilà, s'il n'y avait pas, voilà,
53:50mais pour reprendre ce que disait...
53:52-"Vous étiez autour de lui."
53:54-...dans la visite en permanence, je veux dire.
53:56Pour reprendre ce que disait Bertrand,
53:59il y a un côté religieux, oui,
54:00il y a un côté politique et patrimonial, effectivement.
54:03Je pense qu'il y a un côté mystique chez lui.
54:06Petite anecdote, sa première campagne présidentielle,
54:10en 2017, les journalistes qui...
54:12Je n'en faisais pas partie, mais il y avait une quarantaine
54:15de journalistes qui suivaient toute la campagne,
54:18jour après jour, tous les métis, etc.,
54:20et il lui avait donné un surnom, c'était The Young Pop.
54:23C'était une série italienne extraordinaire,
54:25parce qu'il trouvait qu'il ressemblait...
54:28-"Paolo Sorrentino", excellente série.
54:30Il allait régulièrement, d'ailleurs, à la Basilique Saint-Denis.
54:34Entre Dieu et le roi, le mystique était là.
54:37-"Le jour où il a annoncé sa candidature, en 2017,
54:41il est allé tout seul, incognito,
54:43dans la crypte de la Basilique de Saint-Denis."
54:45L'événement dépasse les catholiques
54:49et dépasse la religion.
54:50-"Notre-Dame", c'est Victor Hugo.
54:53C'est d'une certaine façon Victor Hugo et la France.
54:56Merci, merci beaucoup, Michel Cotta,
54:58de m'avoir accompagné pour cette émission.
55:01Merci à vous.
55:03Plongez dans ce livre,
55:04le deuxième tome des mémoires de la cinquième de Michel Cotta.
55:08Prosomite Terran, Jacques Chirac,
55:10les derniers grands, c'est-à-dire Cheplon.
55:12Profitez bien. A la semaine prochaine.
55:15SOUS-TITRAGE ST' 501

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