Ici, on élève des milliers de moustiques… dont certains sont infectés par des agents pathogènes qui peuvent tuer des humains. Ce labo pas comme les autres, c'est le Vectopôle de l’IRD à Montpellier. Le but de ces expérimentations et ces recherches, dont certaines sous haute sécurité : mieux comprendre ces insectes.
Alors, à quoi ressemble cet élevage peu commun et qu’est-ce que ça nous permet concrètement ?
Alors, à quoi ressemble cet élevage peu commun et qu’est-ce que ça nous permet concrètement ?
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00:00Ici, on est devant le I3, c'est hautement sécurisé,
00:03parce que c'est ici qu'on va voir nos moustiques qui sont infectés,
00:05soit par la dengue, le chikungunya ou autre.
00:08Donc, il faut s'équiper vraiment de la tête aux pieds
00:09pour éviter toute transmission et du coup de causer des maladies.
00:13Ce labo, pas comme les autres, il se situe à Montpellier.
00:16Ici, on élève des milliers de moustiques,
00:18dont certains sont infectés par des agents pathogènes
00:20qui peuvent tuer des humains.
00:22Donc, d'abord, on va casser les moustiques avec des billes.
00:27C'est parti.
00:32Ce labo, c'est le vectopôle de l'IRD.
00:34Ses expérimentations et ses recherches,
00:36dont certaines sous haute sécurité,
00:38visent à mieux comprendre ces insectes.
00:40À la fois pour tenter de mieux nous protéger d'eux,
00:42mais aussi pour mesurer certains services qu'ils peuvent nous rendre,
00:45vous allez voir.
00:45Alors, à quoi ressemble cet élevage peu commun ?
00:48Qu'est-ce que ça nous permet concrètement ?
00:50On vous explique.
00:54Ici, on est actuellement à l'IRD,
00:56donc à l'IRD de Montpellier,
00:57c'est un institut de recherche pour le développement.
01:02Le vectopôle, c'est une plateforme qui a trois niveaux de sécurité.
01:05Donc ici, c'est l'élevage de moustiques sensibles.
01:08On peut avoir environ une vingtaine de milliers de moustiques ici.
01:10On va s'occuper des moustiques,
01:12de leur tas de larvaires jusqu'à leur tas d'adultes.
01:16Donc, on a essentiellement trois espèces de moustiques.
01:18Le plus connu, qui est le moustique tigre,
01:21qui est Aedes albopictus.
01:23Et on a son cousin, qui est Aedes aegypti.
01:26Donc, ces deux espèces vont être vecteurs de nombreuses maladies.
01:30Petite parenthèse, le moustique tigre, il est originaire d'Asie.
01:33Et à partir de 2004,
01:35voici comment sa présence a évolué
01:37dans les départements de France métropolitaine.
01:39Ce moustique, il est étudié ici,
01:41car il peut être vecteur de maladies comme la dengue,
01:43le chikungunya ou le zika.
01:45Fin novembre 2024, en France métropolitaine,
01:48les autorités avaient recensé
01:49un épisode de transmission locale de chikungunya
01:52et onze de dengue, totalisant 84 cas.
01:54Et on a aussi, du coup, le moustique anophélès gambier,
01:57qui, lui, va être responsable du paludisme.
01:59Ici, j'ai une collègue qui est en train de récolter.
02:01En fait, elle aspire les moustiques adultes.
02:04Donc, c'est ce qu'on fait chaque jour, en fait,
02:06pour remplir nos cages,
02:07qui vont être soit utilisées pour la reproduction de l'insectarium,
02:10soit on va les utiliser, en fait, pour des cage-test
02:12pour faire nos expérimentations dans les autres salles.
02:17C'est la pièce où on a une mémerte.
02:18Donc, c'est une étuve dans laquelle on va stocker les moustiques adultes.
02:23Donc, on va avoir toutes nos cages.
02:27On connaît surtout le moustique,
02:29parce que ça va être un insecte, un arthropode,
02:31qui va venir nous piquer
02:32et, du coup, qui va nous causer des boutons,
02:33qui va nous démanger,
02:35qu'on va, du coup, détester.
02:36Et, en fait, du coup, pendant cette piqûre,
02:39il va être capable de nous transmettre des maladies.
02:41Ici, on va avoir des moustiques sains.
02:42Donc, c'est-à-dire que les moustiques ne sont pas porteurs de maladies.
02:44Ils ne naissent pas avec une maladie.
02:46En fait, ils attrapent une maladie en piquant un animal
02:48ou un individu qui va être porteur de cette maladie.
02:52Donc, c'est durant le repas de sang, en fait,
02:54c'est dans la salive du moustique
02:56qu'il va, du coup, transmettre la maladie.
02:57Les moustiques qui sont transmetteurs de maladies,
03:00c'est seulement les femelles.
03:01Elles ont besoin de nous piquer, en fait, pour avoir le sang.
03:04Et dans ce sang, en fait, il y a des protéines
03:05qui vont être nécessaires pour pouvoir pondre.
03:07Là, je suis en train de disséquer le cerveau d'un moustique.
03:10Le but de cette manip, en fait,
03:12c'est de pouvoir comparer ce cerveau de moustique
03:15à d'autres espèces,
03:16voir s'il est similaire ou non.
03:18Et on va aussi regarder selon le stade d'infection.
03:22Et l'âge du moustique, les différentes zones qui s'activent.
03:25À la fin, là, ce que j'obtiens, c'est, du coup, la dissection du cerveau.
03:28Donc là, on voit l'entièreté du cerveau mis à nu après la dissection.
03:31On est devant le I3.
03:33Donc, c'est ici qu'on va faire les infections expérimentales.
03:36Donc, pour y rentrer, on doit faire une identification.
03:39En fait, du coup, en recherche, ce qu'on va faire,
03:40c'est qu'on va venir se poser des questions.
03:42Donc, de ce fait, on va réaliser des expériences.
03:44Ça peut être soit, du coup, dans le SAS d'insecticide,
03:47donc le premier niveau de sécurité.
03:49Soit, du coup, si on veut pousser plus loin
03:51et comprendre, du coup, la transmission des pathogènes.
03:54Eh bien, du coup, on va aller dans le I3,
03:55parce qu'ici, on va pouvoir les infecter.
03:57Alors, maintenant, nous allons voir une collègue
03:58qui travaille sur les relations moustiques-plantes.
04:03Tout simplement, en fait, ce que je fais,
04:04c'est que j'ai une cage dans laquelle j'ai mis des moustiques.
04:06Je vais introduire un bouquet de fleurs.
04:08Et normalement, on va toutes les voir venir dessus.
04:13Alors là, en fait, j'essaie de voir si j'ai des moustiques qui se gorgent.
04:16Donc, si elles prennent du nectar ou pas.
04:19Il faut savoir qu'en fait, les femelles, comme les mâles,
04:22elles vont avoir besoin de prendre du nectar sur des fruits ou sur des fleurs
04:28pour avoir l'énergie nécessaire au vol,
04:30pour leur survie et pour leur fécondité.
04:32On l'étudie tout simplement parce qu'on a montré au Burkina Faso
04:36qu'en fait, selon les espèces de plantes sur lesquelles les moustiques se gorgeaient,
04:40on avait une influence sur la transmission du paludisme.
04:43Donc nous, c'est ce qu'on essaye d'étudier à Montpellier.
04:46Et donc, en fait, on gorge nos moustiques sur différentes espèces de fleurs
04:50qu'on va trouver ici.
04:51Et derrière, je les infecte avec du virus, soit du chikungunya, soit de la dengue.
04:55Et j'observe l'effet, du coup, sur la transmission de ces maladies.
04:59Sachant que pour le paludisme, on va avoir des fleurs qui vont augmenter la transmission,
05:03d'autres qui vont la diminuer.
05:04Donc, on essaie de voir si on observe la même chose ici.
05:09Ah oui, ça va être l'animal le plus meurtri au monde.
05:12Donc, par exemple, on va avoir plus d'un demi million de morts
05:15qui va être causé, en fait, par le paludisme.
05:17Donc, c'est la maladie qui est transmise par le moustique.
05:20Et on va avoir aussi une augmentation de la possibilité
05:24d'être impacté par la dengue, qui a augmenté deux fois trente entre cinq et dix ans.
05:31Alors là, en gros, dans mon tube, ce que j'observe, c'est un mâle que j'ai prélevé dans ma cage.
05:36Donc, en fait, ce qu'on peut voir, c'est que son abdomen est un petit peu distendu.
05:41Et en gros, c'est tout simplement le nectar qu'il a ingéré
05:44pendant le contact avec le bouquet.
05:47En termes d'application, du coup, avec nos travaux,
05:49imaginons, en fait, on trouve une espèce de plante qui diminue la transmission de virus.
05:54Il serait tout à fait envisageable de planter en masse cette espèce de fleur.
05:57Ça peut aussi servir dans les pièges qui fonctionnent avec du sucre.
06:03En gros, dans ces pièges qui fonctionnent avec du sucre,
06:04on pourrait imaginer de rajouter du nectar issu d'une plante qui les attirerait
06:09afin d'attirer plus de moustiques.
06:11En fait, sur la gauche, t'as les salles des thermocycles armés.
06:13Du coup, on va commencer par la salle d'extraction.
06:19La machine secoue très fort les tubes et donc les billes qui sont à l'intérieur du tube
06:22vont casser et réduire les moustiques en bouillie.
06:28On va du coup obtenir l'ADN.
06:30En fait, l'objectif, c'est de comprendre sur quoi se nourrissent les moustiques dans la nature.
06:35Le caractère de nourriture de sang, c'est juste les femelles qui vont le faire
06:39et c'est uniquement pour la maturation des œufs.
06:41C'est pas le sang qui va apporter l'énergie aux moustiques pour qu'ils volent.
06:44L'énergie du moustique est apportée par des plantes.
06:48Tout à l'heure, je vous avais montré l'ADN.
06:50Là, on fait la PCR.
06:52Ça veut dire que dans une plaque comme ça,
06:54dans chaque petit puits, on a mis notre ADN.
06:57Le metabarcoding va permettre de dresser un inventaire
07:01sur les plantes sur lesquelles se nourrissent les moustiques.
07:04À partir du moment où on aura cet inventaire,
07:06on pourra voir si le moustique a un impact ou pas sur cette pollinisation.
07:10Ça, c'est une capture d'écran de ce qu'on peut obtenir après séquençage.
07:14Chaque ligne correspond à une séquence d'ADN.
07:18Chaque séquence, on va les confronter à une base de données
07:23où sont répertoriées les marqueurs pour la plante.
07:27Là, on voit que l'espèce identifiée, c'est Mantaspicata.
07:29Mantaspicata, c'est de la menthe.
07:31Le moustique n'est pas forcément un insecte pollinisateur.
07:33Le fait qu'il y ait une très grande densité
07:36peut faire qu'il ait un rôle dans la pollinisation.
07:39Le moustique a un rôle dans l'environnement,
07:42mais encore faut-il qu'on sache exactement lequel.
07:45C'est pour ça que quand on fait des campagnes d'éradication des moustiques,
07:49il faut aussi veiller à ce qu'en voulant débarrasser la population d'un problème,
07:53on n'en crée pas un autre en créant des déséquilibres.
07:57Ici, on va réaliser une manip sur le comportement.
08:01On va se demander si on lui propose différents sucres
08:04qui peuvent être présents dans des plantes,
08:06est-ce qu'il va avoir la capacité de choisir ?
08:09Par exemple, ici, on a réalisé un gobelet qui va être individuel.
08:12On va mettre deux solutions différentes,
08:14par exemple de glucose et de fructose.
08:19Ici, on peut voir que les moustiques n'ont pas fait le même choix.
08:24Ici, ça a plus choisi la solution identifiée sous la couleur rouge
08:29et ici sous la couleur bleue.
08:31D'accord.
08:32Ils n'ont pas la même couleur.
08:34Plus de bleu ou plus de rouge ?
08:35Plus de bleu.
08:36Plutôt fructose, en fait.
08:37C'est ça.
08:38On peut envisager plusieurs applications possibles.
08:40L'idée, ce serait de déployer des petites stations mobiles
08:44remplies de jus sucrés et à l'intérieur de ces jus sucrés,
08:47de ces appâts qui vont attirer les femelles,
08:49placer soit des insecticides,
08:51donc la femelle va venir prendre le jus sucré
08:54et ingérer l'insecticide et mourir dans les minutes, les heures qui suivent,
08:58ou on peut également imaginer des molécules antiparasitaires
09:02qui vont protéger les femelles de l'infection
09:04et donc empêcher la transmission à l'homme.
09:06Maintenant, on va aller voir un autre collègue
09:09qui travaille sur la pollution lumineuse
09:12pour voir les adaptations du moustique dans notre environnement.
09:18Salut !
09:19Ça y est.
09:20Là, on va juste prendre les femelles.
09:24Maintenant, on peut placer nos moustiques dans les canaux des moniteurs
09:29avec notamment des capteurs infrarouges au centre.
09:31En fait, ça permet de mesurer l'activité de vol des moustiques
09:34en rapport avec la lumière.
09:36Maintenant, on va tout incuber dans l'enceinte climatique.
09:41Ce sont des environnements qui vont nous permettre
09:43de manipuler les facteurs environnementaux,
09:45dont la lumière notamment.
09:47On a eu à faire l'expérience avec ces moustiques aériens de Séjoukti
09:50qui sont des moustiques durs,
09:52c'est-à-dire que leurs activités existent pendant la journée
09:55et on les a exposés à la lumière artificielle pendant la nuit
09:58et résultat, on a pu constater qu'ils sont un peu perturbés
10:03et qu'ils déclenchent une activité pendant la nuit.
10:06Comme conséquence, ça peut augmenter les risques de transmission d'agents pathogènes,
10:09notamment les risques de la dengue, le zika ou le chikungunya.
10:12Dans une situation où l'urbanisation de plus en plus progresse,
10:15il est fondamental de pouvoir faire des recherches d'abord au labo
10:19et de pouvoir alerter les gens par rapport à l'impact ou aux conséquences
10:23que cette lumière peut avoir sur l'activité de ces moustiques
10:26et par rapport également à la santé publique.
10:29Ici, ce qu'on va faire, c'est qu'on va mettre en place l'ensemble de nos protocoles,
10:32ça veut dire qu'on va acquérir plus de connaissances, plus de réponses à nos questions
10:36et ces réponses vont mener à des publications
10:39et ces publications peuvent mener par exemple dans les villes,
10:43on peut mettre en place des trappes pour essayer d'attirer le moustique,
10:49on peut aussi demander d'un point de vue plus vulgarisation et communication,
10:53c'est-à-dire on peut maintenant montrer au grand public
10:56qu'en laissant traîner par exemple dans nos jardins, on peut laisser traîner les soucoupes,
11:00de montrer qu'en vidant l'eau, on empêche les femelles de pondre,
11:04donc ça peut toucher tout un type de public.
11:07J'espère que cet épisode des Doc Nature vous aura intéressé.
11:10Un grand merci à Florian pour le reportage dans le labo.
11:13Vous pouvez retrouver d'autres épisodes des Doc Nature sur la chaîne YouTube de Brut.
11:17A bientôt !