Bienvenue dans Processus, la nouvelle émission de Konbini !
Dans Processus, Sandra Gomes, cheffe de la rubrique Musique chez Konbini, invite des artistes pour décortiquer leur parcours et leur processus créatif.
De leurs premiers pas dans la musique, leurs premiers succès, leur quotidien ou encore leurs inspirations : vous découvrirez les rouages qui ont construit musicalement ces derniers.
Dans ce premier épisode, Sandra Gomes reçoit okis. Jeune rappeur originaire de Lyon, okis a débarqué sans grandes ambitions dans le paysage rap français en postant en janvier 2022 l'EP "OK", carte postale de sa ville et réminiscence d'un rap old school sans compromis. Pas de chance pour ce garçon discret, il séduit instantanément un bon nombre de fervents auditeurs qui ont perçu ce nouvel arrivé comme un vent de fraîcheur.
"J'ramène l'espoir comme Licha floqué Kool Shen". Récit de son époque, vie quotidienne d'un gars qui ère sans faire de plan sur la comète mais avec un intérêt pour tout son environnement... C'est ainsi qu'on peut définir la musique sincère d'okis.
Deux EP et un album commun avec Mani Deïz, légende de l'underground français, plus tard, l'avenir semble radieux pour okis, même si avec lui, les rêves restent terre-à-terre et le public parfaitement prêt à accueillir sa musique.
Dans Processus, il nous parle du déclic qui l'a poussé à faire de la musique, ce qui l'inspire, ce qui lui fait peur et ce qu'il entrevoit pour la suite.
Processus est diffusé le mardi toutes les deux semaines sur YouTube et sur votre plateforme de podcasts préférée, abonnez vous pour ne rater aucun épisode : https://audmns.com/aCDfpTB
Dans Processus, Sandra Gomes, cheffe de la rubrique Musique chez Konbini, invite des artistes pour décortiquer leur parcours et leur processus créatif.
De leurs premiers pas dans la musique, leurs premiers succès, leur quotidien ou encore leurs inspirations : vous découvrirez les rouages qui ont construit musicalement ces derniers.
Dans ce premier épisode, Sandra Gomes reçoit okis. Jeune rappeur originaire de Lyon, okis a débarqué sans grandes ambitions dans le paysage rap français en postant en janvier 2022 l'EP "OK", carte postale de sa ville et réminiscence d'un rap old school sans compromis. Pas de chance pour ce garçon discret, il séduit instantanément un bon nombre de fervents auditeurs qui ont perçu ce nouvel arrivé comme un vent de fraîcheur.
"J'ramène l'espoir comme Licha floqué Kool Shen". Récit de son époque, vie quotidienne d'un gars qui ère sans faire de plan sur la comète mais avec un intérêt pour tout son environnement... C'est ainsi qu'on peut définir la musique sincère d'okis.
Deux EP et un album commun avec Mani Deïz, légende de l'underground français, plus tard, l'avenir semble radieux pour okis, même si avec lui, les rêves restent terre-à-terre et le public parfaitement prêt à accueillir sa musique.
Dans Processus, il nous parle du déclic qui l'a poussé à faire de la musique, ce qui l'inspire, ce qui lui fait peur et ce qu'il entrevoit pour la suite.
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MusiqueTranscription
00:00Moi, je préfère mille fois qu'il y ait des fachos qui m'écoutent plutôt qu'il y ait des fachos qui prennent le pouvoir.
00:04Même sociologiquement, je vois pas pourquoi je représenterais cette culture plus que quelqu'un d'autre.
00:07Il y a peut-être certaines relations qui s'abîment parce que je préfère rester sur ma MPC ou faire mes maquettes.
00:17Salut, je suis Sandra Gomez, chef de la rubrique musique chez Konbini.
00:21Vous écoutez le pilote de Processus, votre nouveau podcast musique
00:24qui révèle les rouages qui ont amené les artistes invités jusqu'à moi.
00:29Au sommaire de cet épisode, on va retracer les débuts dans la musique de mon invité,
00:33le moment charnière de sa carrière, à quoi ressemble le quotidien d'un artiste,
00:37ses inspirations et quelques surprises au milieu.
00:39L'artiste que je reçois aujourd'hui est un rappeur fraîchement débarqué dans le jeu
00:43mais qui a déjà sa page Wikipédia qui précise son bord politique
00:47et un album commun avec un gros nom du rap français.
00:49Salut Okis, comment ça va ?
00:50Ça va bien et toi ?
00:51Ça va au top, merci d'être là.
00:53Est-ce que tu es prêt à revenir sur tout le Processus qui t'a amené jusqu'ici ?
00:57Je suis prêt à me dévoiler, Sandra.
00:58Et on commence avec ça.
01:24Le morceau qu'on vient d'écouter, c'est Pas d'effort qui est sorti en janvier 2022
01:27et c'est ce qui apparaît comme ton premier son posté sur les plateformes.
01:31Est-ce que c'est bien le cas ?
01:32Oui, c'est le tout premier.
01:33C'est le premier EP que je sors.
01:35Quand tu sors ce titre, ça fait combien de temps que tu fais de la musique ?
01:38Alors que je fais de la musique, c'est une question un peu plus large
01:41parce qu'en fait, quand j'étais tout petit,
01:44on va direct partir sur l'enfance.
01:45C'est ça que je veux.
01:46Quand j'étais tout petit, j'ai voulu faire de la musique super tôt.
01:49À trois ans, j'ai dit à ma mère que je voulais faire un instrument
01:52parce qu'en fait, elle avait une pote qui avait un petit accordéon pour enfant.
01:56Et moi, quand j'allais chez sa pote, Evelyne, S.O. Evelyne, c'était là.
02:00J'avais une voisine qui s'appelait Evelyne aussi.
02:02Oui, c'est ça. C'était une ancienne voisine de ma mère.
02:04On allait souvent la voir, tout ça.
02:06Et quand je rentrais, je disais bonjour Evelyne.
02:08Et j'allais à un petit accordéon comme ça.
02:12Mais j'avais vraiment trois ans.
02:13J'aimais trop ça.
02:14Donc j'ai dit à ma mère, je veux faire un instrument.
02:17Sauf qu'à trois ans, c'est pas possible.
02:18Du coup, elle m'a emmené à l'éveil musical de Calure et Cuir.
02:21On tapait dans les mains en rythme.
02:23Et c'est là que j'ai commencé à faire la musique finalement.
02:25Donc c'était tout.
02:26OK. Et du coup, c'est toi, les références musicales à la maison.
02:30Est-ce que tu as grandi dans un environnement qui était quand même propice
02:33à cette carrière-là que tu vas avoir après ou pas ?
02:35Ma mère, elle écoutait des CD, mais on ne va pas dire que ce n'était pas des musiciens.
02:40Ouais. Ça écoutait quoi quand même à la maison ?
02:43Ma mère, elle aime bien des trucs genre Toto.
02:45Moi, je me souviens qu'un des premiers trucs que je me suis approprié dans ce qu'elle écoutait,
02:50c'était Elton John.
02:51OK.
02:52Le morceau, alors il y avait un morceau qui s'appelait Crocodile Rock.
02:55J'aimais bien qu'il se fasse nananana.
02:58Et j'aimais bien la mélodie, je la chantonnais comme ça.
03:01Et mon morceau préféré, c'était une reprise de Lucy in the Sky with Diamonds, des Beatles.
03:06Du coup, mon tout premier CD qu'elle m'a offert, c'était Sgt Pepper,
03:09l'album des Beatles où il y a le son en question.
03:12Pour qu'elle me dise en fait, ce n'est pas Elton John, c'était ça.
03:14OK. Et au moment où tu sors ce morceau, c'est sur l'EP qui s'appelle OK.
03:20À ce moment-là, est-ce que tu as une vision sur où tu veux aller avec la musique ?
03:25C'est quoi l'état d'esprit dans lequel tu es quand tu postes justement ce premier EP ?
03:29C'est plus un aboutissement.
03:30C'est-à-dire que pour moi, l'EP en lui-même, c'est le fait d'avoir un disque,
03:37quelque part dans l'histoire de la musique, tout ça, c'est ça l'essentiel.
03:40C'est-à-dire que je n'avais pas d'ambition, comme je le dis souvent.
03:44Donc quand je sors cette EP, c'est une fin en soi.
03:48C'est-à-dire que je suis content d'avoir fini le processus qui m'a amené à sortir un son sur les plateformes.
03:54C'est une fin d'un cycle où j'ai eu une carte son que m'ont offert mes potes.
03:59J'ai appris à m'enregistrer tout seul.
04:01C'est le moment où je considère que j'arrive à faire des sons que j'aime bien et je les sors.
04:06Mais après, c'est dur parce qu'il n'y a pas vraiment de latence.
04:09C'est-à-dire qu'en deux jours, toi, tu m'avais envoyé un message,
04:13Plavas m'avait soutenu. En trois jours, Mindy Days me contactait.
04:16Donc je n'ai pas eu vraiment le moment où je me posais la question
04:19« Où est-ce que je veux aller ? »
04:21Parce qu'en fait, je ne voulais aller nulle part.
04:23Et qu'en trois jours, je me suis dit « Je veux être rappeur. »
04:26Ça allait super vite.
04:27Mais ce n'est pas le projet en soi, c'est plus la réaction qui l'a déclenché.
04:30Oui, tu n'as même pas eu le temps de te dire « Est-ce que ça va marcher ? Est-ce que je continue ou pas ? »
04:34Tu as été un petit peu poussé par les gens aussi.
04:36Oui, en fait, j'ai eu trop de chance.
04:38C'est-à-dire que moi, je n'avais pas prévu de faire des efforts.
04:42Il faut se dire qu'à dix jours de la sortie, ma cover, c'était une photo du Nouvel An.
04:47J'étais flou, j'avais du noir sur les dents à cause du vin rouge.
04:52Il n'y avait pas de plan.
04:53Et puis je me suis dit « Tiens, je vais demander à Léonard, qui est un poto avec qui j'étais au lycée,
04:57qui prenait toujours des photos dans le quartier.
04:59Je vais lui demander de faire une photo, ça peut être peut-être plus stylé.
05:02Au final, je la trouve trop cool et tout.
05:04Mais j'ai demandé à mon pote William de faire les EQ.
05:08Si j'avais su qu'il n'y avait que 200 personnes qui allaient l'écouter,
05:11je me serais beaucoup plus cassé la tête sur le mix, sur le master.
05:14J'ai fait les trucs moi-même, je n'avais jamais fait.
05:16Et donc, tu as un peu de mal à réécouter aujourd'hui ?
05:19En fait, non, parce qu'il y a la petite charge.
05:22Des fois, je me dis quand même « C'est quand même pas mal par rapport à ce que j'ai fait.
05:25D'où ça sonne quand même aussi bien ? »
05:27Alors que je n'avais aucun skill en mix et tout.
05:29Mais il y a une fois, on était chez un rappeur que je kiffe,
05:32qui a un peu une vibe ingé son et tout ça.
05:36Et Manny lui fait écouter pas d'efforts.
05:39On était dans un studio, mais avec des enceintes de ouf et tout.
05:41Il était là genre « Franchement, on a fait un album Manny.
05:44Pourquoi tu ne l'écoutais pas d'efforts ? »
05:46J'entendais tous les défauts du truc.
05:48Mais bon, ça fait le charme.
05:49Je me dis que s'il n'y avait zéro défaut, peut-être que ça n'aurait pas marché des fois.
05:52C'est la vie.
05:53Justement, tu parlais de Manny.
05:54Maintenant, je vais te parler moi de ce que je considère
05:56comme étant un moment charnière dans ta carrière.
05:59Et j'aimerais bien que tu me dises toi ton point de vue par rapport à ça.
06:02Si tu considères que c'est un moment déterminant aussi selon toi
06:05et si au contraire, il y en a d'autres qui sont plus déterminants.
06:07Pour ça, on va écouter un autre extrait.
06:35J'ai choisi de te parler de ce morceau parce que selon moi,
06:39avant de le sortir, t'es un jeune rappeur qu'on n'identifie pas tellement en fait.
06:44Et qui effectivement, tu le disais tout à l'heure,
06:46suscite de l'intérêt auprès des fans hardcore de Boombap
06:50et des fans de l'Olympique Lyonnais sur Twitter.
06:52Mais tu restes dans quelque chose d'assez restreint en termes d'audience.
06:57Et avec ce morceau-là, t'arrives avec une connotation
07:02Et avec ce morceau-là, t'arrives avec une connotation
07:05avec un nom important du patrimoine du rap français qui est Manny Days.
07:08T'en parlais tout à l'heure.
07:10Et c'est un morceau qui est également radicalement différent
07:12de ce que t'as pu sortir auparavant.
07:14Déjà dans le thème, tu parles d'amour.
07:16C'est pour la première fois que tu le fais aussi franchement.
07:20Et c'est un morceau qui a beaucoup d'élégance aussi
07:22par rapport à OK qui était beaucoup plus brut, beaucoup plus terrien.
07:26Là, t'arrives avec quelque chose d'une atmosphère beaucoup plus sophistiquée.
07:30Et j'ai l'impression que c'est ce moment-là où on va te prendre un peu plus au sérieux.
07:34Ouais, il y a pas mal de choses qui se jouent.
07:36Déjà effectivement, Manny Days, c'est assez surprenant.
07:39Moi, je m'étais fait à l'idée parce qu'on avait fait l'album depuis quand même.
07:43Mais forcément, moi je me posais la question
07:47comment les gens vont réagir quand ils vont voir que je fais déjà des morceaux avec Manny etc.
07:52Et je pense que c'est marrant, il y a un step qui est passé
07:55ne serait-ce que par la qualité de la prod
07:58parce qu'avant, c'était des licences de prod achetées sur YouTube.
08:01Là, c'est la première fois que je me construis un univers musical.
08:04Je dis souvent aux gens au Rêve d'un Rouilleur, c'est vraiment le début de ma musique.
08:07C'est-à-dire qu'avant, je rappe sur des prods d'internet.
08:10Là, je me suis révenu avec quelqu'un et je décide de quel drum utiliser,
08:14de quel sample on va choisir, comment on va le pitcher.
08:17Ouais, tu composes vraiment avec quelqu'un.
08:19Ouais, c'est Manny qui compose, mais moi je suis derrière et je le soûle.
08:22Comment ça se fait justement pour introduire un petit peu Manny Days ?
08:26Comment la connexion, elle se fait, vous deux ?
08:29Eh bien, lui, du coup, il m'envoie un message au bout de trois jours sur Twitter.
08:33Il me dit « show l'EP », le premier EP que j'avais sorti quoi.
08:37Je devais être vraiment à 250 écoutes.
08:42Et il me dit « au bout de 30 minutes, si tu veux, je te produis ».
08:44Moi, c'était un truc de dingue parce que c'était un des mecs sur lesquels
08:47j'ai le plus écrit et puis un gars que j'ai beaucoup écouté.
08:50Au-delà de ce qu'il représente aussi dans l'underground français.
08:53Ouais.
08:55Et lui, au bout de six mois, on s'est vus.
08:56Mais ce qui est marrant avec ce morceau-là que tu m'as montré,
08:59c'est qu'il m'a envoyé des premières prods un peu à distance pour voir ce que ça donne.
09:04Et moi, la première fois qu'il m'a envoyé une prod,
09:06je lui renvoie directement ce que je pensais être mon meilleur texte,
09:08pour être sûr qu'il ne s'était pas trompé de numéro entre guillemets.
09:10Je lui envoie mon meilleur son sur la prod et c'était le texte de textile qui existait.
09:14Donc, bien avant au cas, en fait, c'est un truc à quelques années.
09:17Trop bien.
09:18Et du coup, je lui envoie le texte de textile.
09:19Ce n'était pas sur cette prod.
09:20On a fini par les prods, quasiment tout ce qu'on a fait avant.
09:22Et du coup, je lui envoie ça en mode.
09:23Et puis, il a kiffé.
09:24Et il a pris la cab de textile et il a créé la prod du morceau qui est devenu « J'arrive ».
09:28Et du coup, c'est marrant que ce soit aussi le premier son qui est sorti
09:32parce que c'est le premier texte que je lui ai envoyé.
09:35Et après, on s'est vus chez lui.
09:37Et puis, la magie a opéré.
09:38C'est-à-dire que ça allait très vite.
09:40On a composé ensemble.
09:41Ouais.
09:42J'avais quasiment tout écrit, mais...
09:43OK.
09:44Et toi, est-ce que tu vois un autre moment qui est un peu déterminant comme ça,
09:49comme ce morceau textile ?
09:51Dans ta carrière, ça peut être un concert, une rencontre.
09:53Est-ce qu'il y a quelque chose où tu sens que tu as passé un cap ?
09:57On parlait de Manny Days qui est, du coup,
09:59pour ceux qui ne le savent pas, un compositeur, un beatmaker français
10:04qui est actif depuis une vingtaine d'années, je crois.
10:07C'est ça.
10:08Ouais.
10:09Il me semble qu'il commence le son en 98, selon ce qu'il raconte dans son album solo.
10:15Donc, ça fait un moment.
10:17C'est quand je suis né.
10:18Quand tu es né, tout simplement.
10:19C'est un peu une légende de l'underground français
10:22qui n'a peut-être pas un nom avec une rayonnance aussi forte
10:28que d'autres noms qu'on entend beaucoup,
10:31mais qui est très important pour une poignée de rappeurs français
10:35qu'il a accompagnés et qui a sorti de nombreux projets,
10:39quelques projets solos aussi.
10:41Donc, voilà, quelqu'un d'important.
10:43Là, je te parlais justement de ce morceau-là qui a été pour moi déterminant.
10:47Est-ce que toi, il y a un autre moment dans ta carrière que tu trouves déterminant ?
10:51Du coup, franchement, cette rencontre avec Mani,
10:55elle est tellement importante que je n'arrive pas à trouver quelque chose qui équivaut.
11:01Après, je dirais que vis-à-vis des gens,
11:03l'autre truc que Proud Mani Day, ce qui m'a vraiment étonné,
11:07c'est sûrement l'annonce de la tracklist de Rêves d'un Rouilleur
11:11avec Limsa dessus.
11:14Limsa dans le nez, du coup.
11:15Pareil, ça a fait le même effet.
11:16C'est-à-dire que les gens me disent « Mais quoi ? ».
11:18Ok.
11:19Et je pense que ça, vis-à-vis des gens, entre guillemets,
11:21ils se sont dit « Ah, mais ça change de dimension ».
11:24Alors qu'en fait, non.
11:25En fait, on a fait juste un autre album.
11:27Mais c'est intéressant parce que justement,
11:29ces petites choses qui, toi, te semblent anodines,
11:32où tu as l'impression que ce n'est pas vraiment du tout le truc le plus important
11:35que tu es en train de faire dans ta carrière,
11:37qui parfois va aider le public à te mettre dans une catégorie un peu supérieure
11:44par rapport à ce que tu étais avant, tu vois,
11:45alors que tu fais exactement la même musique.
11:47Après, je ne vais pas mentir, c'est pas réellement anodin.
11:50C'est-à-dire que même pour moi, Mani c'est gigantesque,
11:52Limsa c'était gigantesque, Cassius Belli,
11:54qui est une légende à Lyon.
11:56C'est des choses qui, symboliquement, m'importent aussi beaucoup à moi.
11:59C'est-à-dire que je m'en rends plus compte au bout d'un moment,
12:03mais au début, j'ai la même réaction qu'eux.
12:05C'est de me dire « Mais non ».
12:08Comment ça se fait d'ailleurs la connexion avec Limsa ?
12:10Limsa, du coup, il est déjà connecté musicalement avec Mani Day,
12:13ce qui a fait la prod de 4 décembre, de Starting Block notamment.
12:17C'est peut-être ses plus grands titres, on peut le dire.
12:19Tout simplement, pour moi aussi, ça fait partie de ses meilleurs sons.
12:22Il y a « Comme la lune » que je kiffe aussi.
12:23Il me semble que c'est « The Eye ».
12:28Donc la connexion, elle se fait via…
12:29Non, c'est Jean Jass, en fait.
12:30Jean Jass.
12:32Mais bon, pour moi aussi, c'est le top 3 des sons de Limsa.
12:36Donc la connexion, elle s'est faite comme ça.
12:39Ce qui est marrant, c'est que c'est lui qui m'a dit
12:41« Bon, pour l'album, tu verrais qui en feed ? »
12:44« Si tu devais rêver, n'importe qui. »
12:46Je lui envoie 15 rappeurs, je ne vais pas faire la liste,
12:48mais en gros mes rappeurs préférés.
12:51Il me dit « Si tu devais en garder qu'un ? »
12:53Et je lui dis « Limsa Delaney ».
12:55Et il m'a dit, c'est marrant, moi je pensais à lui aussi.
12:57Et vu que je le connais, je vais lui demander tout simplement.
12:59C'est comme ça que ça s'est fait.
13:01Ça s'est fait aussi facilement que ça ?
13:03Ouais, après il a écouté, il a kiffé visiblement.
13:07J'espère.
13:09On en reparlera peut-être après de ce morceau-là.
13:11Je t'ai dit dans l'intro que dans Processus,
13:13il y avait des petites surprises.
13:15Et on a une messagerie,
13:17et il y a quelqu'un qui voulait te laisser un message.
13:21Je t'invite à le découvrir.
13:23Mais non.
13:27Ça va ou quoi ?
13:29J'aimerais bien que tu nous parles un petit peu
13:31de ta découverte du beatmaking
13:33depuis la chatte à MPC One.
13:36Je veux savoir, c'est quoi ton rapport à ça ?
13:38Vas-y, bim !
13:40Ça me fait plaisir, ça.
13:42Alors, Mani qui nous révèle
13:44tes débuts dans le beatmaking.
13:46Ouais.
13:48Bah en fait,
13:50Mani, la première fois que je suis chez lui,
13:52je le vois travailler sur sa machine,
13:54il touche pas.
13:56La deuxième fois, des fois il fait des siestes,
13:58je commence à toucher un peu les boutons.
14:00Et puis une fois, au moment de la sortie de Rêve d'un rouilleur,
14:02on avait une date en Suisse,
14:04donc il est venu une semaine à la maison.
14:06Et là, je lui ai juste pas laissé sa machine.
14:08Ok.
14:10J'étais sur la MPC One
14:12et je faisais des prods. En fait, c'est trop addictif de sampler.
14:14Ok.
14:16Du coup, janvier dernier, je me suis acheté une MPC One
14:18et je fais ça tout le temps.
14:20Genre, c'est une obsession.
14:22Je fais ça plus qu'écrire et rapper.
14:24Là, en ce moment, c'est ça que tu fais le plus ?
14:26Et c'est un truc que t'as vraiment envie de prendre au sérieux
14:28pour ta musique, composée pour toi ?
14:30J'ai envie de le prendre de la même manière,
14:33parce que quand je serais content vraiment de ce que je fais,
14:35en mode ça, même moi, je trouverais que c'est une bonne prod
14:37et pas parce que c'est moi.
14:39Là, je commencerais à les sortir.
14:41Ok, c'est fou.
14:43Peut-être que t'auras plus besoin de Mani bientôt.
14:45Ouais, j'ai quand même vachement besoin de Mani.
14:47En vrai, son téléphone, il sonne, je lui pose des questions,
14:49je lui envoie tous mes profs, je lui demande des conseils.
14:51Et voilà, j'essaie de progresser,
14:53mais c'est trop kiffant.
14:55Et t'aimerais, il y a déjà des artistes que t'as en tête
14:57que t'aimerais composer pour eux ?
14:59Franchement, ça dépend de la prod.
15:01Là, l'autre jour, j'ai fait une prod,
15:03je n'ai pas encore osé lui envoyer,
15:05mais je pensais à Eloquence dessus, par exemple.
15:07Mais en vrai, il n'y a pas...
15:09Non, c'est à la prod un peu.
15:11Il y a des prods qui t'inspirent des rappeurs.
15:13Ça me fait pareil avec les feats,
15:15c'est un peu comme ça que je fonctionne souvent.
15:17C'est genre, cette prod, je verrais trop lui.
15:19Vas-y, je l'appelle.
15:21Bon, on va suivre tes débuts dans le beatmaking.
15:23Je n'étais pas au courant de cette nouvelle vie.
15:25Ça pourrait mettre des années avant que je sois vraiment content
15:27de ce que je fais.
15:30Si tu devais produire sous ton vrai nom,
15:32tu vas trouver un alias, tu vas faire comment ?
15:34Non, je pense produire sous le nom Okiss.
15:36Très bien, on va suivre ça.
15:40Pour revenir au rap pur et dur,
15:42est-ce que tu as une routine de création
15:44quand tu dois faire de la musique ?
15:46Il y a rarement des moments
15:48où je dois faire de la musique, fort heureusement.
15:50C'est-à-dire que
15:52je me sens rarement obligé.
15:54Ma routine, en vrai,
15:56c'est malgré tout d'en faire
15:58parce que c'est ma passion.
16:00Comme je te disais, ma routine,
16:02en ce moment, c'est plus le beatmaking.
16:04Je me lève, je fonce vers ma MPC
16:06et puis ça peut durer des heures.
16:08Quand je veux écrire,
16:10principalement, il faut que je sois en déplacement.
16:12Enfin, en mouvement.
16:14Que ce soit dans un bus, un train ou à pied.
16:16Même chez moi,
16:18si vraiment je peux écrire chez moi,
16:20je fais les 100 pas naturellement.
16:22Ça, ça fait partie de ma routine.
16:24Après,
16:27il faut un peu varier les manières d'écrire.
16:29Justement, la rencontre d'Eloquence,
16:31ça a été un moment super important.
16:33Ça, je peux en parler comme d'un moment important.
16:35Eloquence, qui est aussi
16:37un nom important dans le rap français
16:39qu'on a connu dans les années 90
16:41avec des très gros succès,
16:43qui a été un peu plus discret ensuite,
16:45qui a été notamment auteur
16:47pour d'autres artistes,
16:49dont Tony Parker, on peut le dire.
16:51Qui a été dans la B.O. de Taxi.
16:53Un gros rappeur du 91.
16:55Encore 97, lui, pour le coup.
16:57Voilà.
16:59Et qui a sorti ces dernières années,
17:01qui revient au rap
17:03et à une forme plus,
17:05on va dire, originelle.
17:07Celle qu'on lui connaît à ses débuts, en tout cas.
17:09Et qui a reçu
17:11de très bons succès critiques.
17:13Donc, tu collabores
17:15avec lui dernièrement sur un feat.
17:17Comment ça se fait, ça aussi ?
17:19Alors, ça s'est fait en
17:21plusieurs temps.
17:24J'avais kiffé la prod de Textile.
17:26En fait, la première chose,
17:28c'est que quand j'ai rencontré Mani,
17:30il m'a dit, t'écoutes quoi en ce moment ?
17:32Je lui ai direct mis Maisons Suaves.
17:34C'est le premier truc que j'ai fait écouter à Mani,
17:36pour lui dire ce que je kiffais écouter en ce moment.
17:38Ça venait de sortir, tu vois.
17:40Et puis, ce qui est marrant,
17:42c'est que, sans aucun lien avec ça,
17:44Eloquence, il a mis un tweet en mode
17:46prod de l'année pour la prod de Textile,
17:48quand elle est sortie.
17:50Et Mani, qui kiffe aussi Eloquence,
17:52même s'ils connaissaient depuis bien plus longtemps,
17:54excuse-moi.
17:58Du coup, Mani,
18:00ça lui plaisait aussi de travailler avec Eloquence.
18:02Une fois, on devait faire
18:04une session avec un autre rappeur
18:06qui se trompait de semaine.
18:08Et le midi, t'étais là ?
18:10Le midi, il me dit, je peux pas
18:12venir, je me suis trompé de semaine.
18:14On donnera pas son nom,
18:16parce qu'on veut en parler autrement un autre jour.
18:18Mais on l'aime.
18:21Et du coup, on a une session libre,
18:23qu'est-ce qu'on peut appeler ? On a pensé à Eloquence.
18:25Et en fait, c'est un moment qui m'a marqué,
18:27parce qu'il a une mentale
18:29super intéressante.
18:31Vraiment, il m'a pas mal conseillé.
18:33Depuis, on s'est revus quelques fois
18:35un conseil.
18:37On s'entend bien musicalement et surtout,
18:39il a un rapport à la spontanéité dans la création,
18:41dans l'écriture, qui est super intéressant.
18:43Moi, j'avais tendance à beaucoup peaufiner,
18:45laisser peu d'espace, etc.
18:47Lui, c'est l'inverse, il écrit avec sa tête.
18:49J'écris, en fait,
18:51il fait comme ça, et il a écrit.
18:53Et après, il va dans la cabine,
18:55et il pose un 16 barres
18:57impressionnant,
18:59super philosophique, tout ça.
19:01Ça t'a aidé aussi, toi,
19:03à revoir un peu ton processus ?
19:05Ce jour-là, j'ai pas écrit dans ma tête,
19:07mais j'écrivais tout ce qui me passait par la tête,
19:09et ça a fait mon couplet.
19:11Du coup, j'essaie de varier un peu.
19:13Des fois, j'étais avec un Gémen,
19:15un peu en ex-gène, qui écrit pas mal en studio.
19:18J'étais là, vas-y, j'écrivais, pareil, en studio.
19:20J'essayais toujours de me donner
19:22des nouvelles manières d'écrire,
19:24pour voir ce que ça donne.
19:26Et justement, tout à l'heure, tu disais que t'es jamais
19:28vraiment contraint à créer,
19:30t'as pas vraiment besoin de routine.
19:32Ça va aussi avec un autre aspect,
19:34c'est celui d'être artiste, c'est aussi de considérer
19:36ce qu'on fait comme un métier.
19:38Est-ce que toi, aujourd'hui, t'as l'impression que ce que tu fais,
19:40c'est un métier ?
19:42En fait, j'ai décidé de me mettre un peu dans la mentale,
19:44c'est un métier.
19:46D'être actif, parce que je veux pas de regrets.
19:48Je veux pas me dire, j'ai laissé couler le truc,
19:50et maintenant, je me retrouve dans des taffs
19:52où je me fatigue pour des patrons et tout.
19:54Là, j'ai eu la chance d'être intermittent du spectacle
19:56depuis un mois,
19:58ça va pas durer éternellement,
20:00donc j'en profite pour faire comme si c'était un taff.
20:02Après,
20:04ça, pour moi, ça veut pas dire
20:06s'obliger à écrire.
20:08C'est juste s'obliger
20:10à faire des choses,
20:12liées à la musique,
20:15à se structurer, à essayer de tourner.
20:17C'est essayer de profiter.
20:19Capitaliser,
20:21c'est peut-être pas le bon mot,
20:23mais aller au bout de tout ce que tu peux faire
20:25actuellement, par rapport aussi,
20:27tu t'en parlais tout à l'heure,
20:29aux chances que tu as, dans une très jeune carrière,
20:31d'avoir un très bel entourage musical,
20:33des gens qui sont intéressés par ce que tu fais, etc.
20:35Et il y a un monde
20:37où je me sentirais obligé d'écrire, je pense,
20:39si j'avais pas, entre guillemets, la productivité
20:41qui me permet d'avoir de l'avance
20:43C'est-à-dire que quand j'ai sorti Rappeur de Lyon,
20:45j'avais déjà commencé à faire
20:47Rêve d'un rouilleur, même on avait une grosse partie
20:49de Rêve d'un rouilleur,
20:51mon deuxième EP.
20:53Là, quand la suite va sortir,
20:55je serai déjà sur le truc d'après.
20:57T'as toujours pas mal d'avance quand même
20:59sur ce qui sort.
21:01Peut-être que si j'avais sorti mon dernier projet et que j'avais même pas un son sous la main,
21:03ça me foutrait un stress et que je me sentirais obligé d'écrire.
21:05Je suis pas sûr que ça marcherait d'ailleurs.
21:07C'est pas trop sur la demande
21:09en général.
21:12Est-ce que tu t'es déjà posé la question
21:14de pourquoi tu faisais de la musique ?
21:16Pour qui ?
21:18Est-ce que tu t'es déjà senti porté
21:20d'une sorte de mission ?
21:22Ou pas du tout, c'est quelque chose de très personnel ?
21:24Justement, je me suis déjà posé la question
21:26mais c'est vrai que je suis arrivé à la réponse
21:28que je le faisais pour moi.
21:30J'ai toujours dit ça avec la musique.
21:32Après, forcément,
21:34maintenant qu'il y a un public,
21:36j'ai envie de penser un peu autrement
21:38mais je pense qu'il faut pas.
21:40Il est venu et il kiffe
21:42alors que moi, je le faisais juste pour moi.
21:44Il faut que je continue à le faire pour moi
21:46et essayer de faire abstraction du fait
21:48qu'il y a des centaines de milliers de personnes
21:50derrière mon épaule qui vont peut-être écouter ce que je fais.
21:54Même si t'es au tout début de ce que tu fais,
21:56même si t'as l'impression de le vivre pour toi,
21:58tes sorties sont quand même commentées,
22:00on voit quand même ce que les gens
22:02pensent de ce qu'on fait.
22:04C'est quoi ton rapport à la critique ?
22:06Je me sens épargné
22:09Pour être honnête, j'ai l'impression que
22:11en deux ans et demi, il y a un mec
22:13sur Twitter qui a fait une vanne.
22:15C'était quoi ?
22:17C'était le Hugo TSR asthmatique
22:19Okiss, personne t'écoute à Lyon
22:21C'était trop drôle. À l'époque, je travaillais
22:23en tant que surveillant d'une vie scolaire
22:25ça l'avait mis en fond d'écran, ça l'avait imprimé.
22:27Tous les matins, je me levais, il y avait marqué
22:29Okiss, personne t'écoute à Lyon,
22:31la version asthmatique du Hugo TSR.
22:33Ça m'avait fait rire.
22:35Il était premier degré ou pas ?
22:37Il avait fait d'autres tweets sur moi.
22:39J'étais une de ses cibles avec Rof.
22:41Il avait trois cibles, c'était Rof, moi
22:43et les juifs.
22:45Pas très équilibré,
22:47j'ai l'impression, le garçon.
22:49Ça ne me blessait pas trop.
22:51Mais on peut saluer l'image.
22:53Le Hugo TSR asthmatique,
22:55c'est un peu de poésie là-dedans.
22:57Ça me fait rire en vrai.
22:59C'est une bonne description en vrai.
23:01Regarde-moi là.
23:03Il n'a pas complètement tort.
23:06Mais à part ça, j'ai un rapport
23:08qui est à la critique.
23:10C'est dingue la force que les gens t'envoient.
23:12Moi, ce n'est pas la critique négative.
23:14Mon rapport,
23:16c'est de me dire que c'est énorme.
23:18J'ai été touché,
23:20énormément touché par plein d'artistes.
23:22Je n'aurais jamais envoyé un message.
23:24Il doit y avoir un mec sur 100 qui envoie un message.
23:26Et pourtant, je reçois plein de messages.
23:28À chaque fois, je me dis que c'est dingue.
23:30Ça veut dire que je touche vraiment des gens.
23:32Comme dit Mani, on ne se rend jamais compte
23:34à quel point notre musique est le voyage.
23:36C'est vrai.
23:38La plupart des gens commentent quand c'est négatif
23:40et ne prennent pas ce temps-là
23:42pour délivrer du positif.
23:44Mais moi, j'ai l'impression
23:46qu'il y a toute cette bienveillance
23:48jusqu'au moment
23:50où tu passes un certain step
23:52en termes d'audience.
23:54J'ai l'impression que les gens sont très bienveillants
23:56par rapport à une scène émergente.
23:58Mais à partir du moment où tu auras ton plus gros succès,
24:00tu vas avoir un truc qui va énormément tourner,
24:03tu redoutes un peu ce moment-là
24:05où on va retourner un peu sa veste
24:07et te dire « ok, c'est surcoté ».
24:09Un petit peu.
24:11Je le redoute parce que je ne l'ai pas vécu.
24:13Je pars quand même du principe
24:15que je vais le supporter
24:17et que je vais réussir à faire la part des choses.
24:19Mais en vrai, est-ce que je suis prêt
24:21à être insulté de partout sur Internet ?
24:23Je ne sais pas.
24:25Je pense que ça ne va pas me faire arrêter la musique.
24:27C'est sûr que j'ai assez de confiance en moi
24:29et assez de retours positifs
24:31que j'estime artistiquement pour me dire
24:33que je ne dois pas non plus faire n'importe quoi.
24:35Après forcément, vu que je ne l'ai pas vécu,
24:37je ne peux pas dire comment je vais réagir.
24:39Je pense que j'ai l'impression que personne
24:41ne prend du plaisir à être insulté.
24:43Insulté, c'est sûr.
24:45Mais même la place de la critique aujourd'hui,
24:47c'est quand même une question dans la musique
24:49et j'ai l'impression spécifiquement dans le rap aussi.
24:51On a de plus en plus de mal à...
24:53Les artistes ont du mal à accueillir la critique
24:55peut-être parce qu'elle n'existe pas assez.
24:57C'est vrai que c'est intéressant.
25:00C'est ces retours-là qui peuvent être faits.
25:02Ce qui fait la diff, c'est s'il y a analyse.
25:04C'est-à-dire que moi, j'aime bien
25:06qu'on analyse la musique, les paroles, tout ça.
25:08Plus que...
25:10Juste qu'on félicite, qu'on dit c'est top et tout.
25:12J'aime bien qu'il y ait une analyse.
25:14Si l'analyse, elle est néga...
25:16Enfin, le mec, il n'aime pas, mais il analyse.
25:18Moi, ça m'intéresse, tu vois.
25:20Ok. Tu restes dans le truc constructif.
25:22J'ai un autre message pour toi.
25:24C'est le message d'un fan, justement.
25:26On parlait des retours critiques.
25:28Et la même question pour toi.
25:30Bonjour Okis.
25:32C'est celle de là.
25:34D'ailleurs, je sors du cinéma, j'ai vu ton grand-oncle,
25:36Aznavour, sur la toile.
25:38D'ailleurs, ils n'arrêtent pas de dire Okis dans le film.
25:40Donc j'ai découvert que ça veut dire
25:42chéri, je crois, en arménien.
25:44Mais rien à voir, je te pose une question.
25:46Parce qu'on m'a obligé à poser cette question.
25:48Euh... Non.
25:50Quand tu as rencontré ton public,
25:52est-ce que
25:54ça t'a
25:57fait revoir ta musique ?
25:59Est-ce qu'en voyant ton public,
26:01tu vois différemment ta musique ?
26:03Voilà.
26:05C'est marrant comme question.
26:07La bise à Saïd, déjà.
26:09Et on précise qu'Aznavour n'est pas vraiment ton grand-oncle.
26:11Vous êtes juste tous les deux arméniens.
26:13Justement, je ne te l'ai jamais dit.
26:15Non, non.
26:17Mais...
26:19Il me semble qu'il y avait peut-être des liens de voisinage
26:21avec la famille. C'est n'importe quoi.
26:23On écrira la légende.
26:25Ouais, c'est ça.
26:27C'est une bonne question.
26:29C'est-à-dire que moi, je me dis toujours que non.
26:31Que ma musique, je me pose toujours la question
26:33au moment M, qu'est-ce que je préfère ?
26:35Moi, comme je disais, je fais de la musique pour moi,
26:37pas pour le public.
26:39Par contre, à travers mon public,
26:41le regard que ça donne sur ma musique, c'est toujours
26:43qui c'est qui m'écoute,
26:45où est-ce qu'on me reconnaît, etc.
26:47Et un des trucs qui me rassure, entre guillemets,
26:49c'est qu'on me reconnaît pas mal en manif sauvage, etc.
26:51Presque plus.
26:54Dans des concerts de rookies,
26:56ou des rappeurs vraiment next-gen,
26:58où c'est pas trop le même public,
27:00je pense qu'on me reconnaît moins qu'en émeute.
27:02Et, entre guillemets,
27:04j'aime bien l'idée que ça donne de mon public.
27:08C'est des jeunes gauchistes et tout.
27:10C'est vrai ?
27:12Ouais, il y a une sorte de...
27:14Moi, je suis content des gens qui m'écoutent,
27:16des gens qui me croisent dans la rue,
27:18j'ai l'impression que c'est des bons.
27:20Après, c'est pas que des bons, j'imagine.
27:22Je pense que t'es aussi préservée sur ce truc-là,
27:24parce qu'il y a pas mal de rappeurs
27:26qui se dédouanent aussi du public,
27:28parce qu'ils ont l'impression d'être suivis
27:30et d'être écoutés par des gens
27:32qui partagent pas du tout les mêmes valeurs.
27:34Je pense que c'est aussi la particularité
27:36de ta musique, c'est qu'elle est engagée,
27:38si je puis dire.
27:40En tout cas, tu donnes de la substance
27:42par rapport à tes opinions,
27:44par rapport à tes valeurs.
27:46Tu marques vraiment les frontières
27:48de ce que tu es,
27:51ça m'étonne pas que les gens qui te reconnaissent
27:53c'est des gens qui partagent ce truc-là.
27:55C'est vrai que moi,
27:57je suis moins subtil que d'autres
27:59dans la manière dont j'amène mes idées.
28:01Comme je sais que tu le penses aussi,
28:03il y a plein de rappeurs
28:05qui sont très politiques
28:07sans avoir ce discours militant.
28:09Moi, j'ai un passé militant
28:11qui fait que je dois avoir un vocabulaire
28:13qui parle aux gens vraiment militants.
28:15Mais je suis pas, entre guillemets,
28:17plus politique que d'autres.
28:19Mais après, le côté être écouté par des faves,
28:21parce que c'est de ça qu'on parle,
28:23c'est un peu inévitable.
28:25Même moi,
28:27je me suis retrouvé,
28:29juste parce que j'avais fait la vanne dans le Progrès
28:31de dire qu'il faut que la gauche revienne à l'Olympique Lyonnais
28:33parce que je trouvais qu'il y avait un raisonnement
28:35très entrepreneurial, très capitaliste.
28:37C'était pour la vanne.
28:39Il y a un mec, drapeau bleu-blanc-rouge,
28:41qui dirait que j'arrête de l'écouter sur Twitter.
28:43C'est sûr qu'il y en a.
28:45Des gens qui me disent
28:48ce que je dis.
28:50Ceux qui veulent voter, je vous conseille de voter
28:52Nouveau Front Populaire.
28:56On s'en fout de tes idées personnelles.
28:58Reste dans la musique.
29:00Oui, il y en a.
29:02C'est une sélection naturelle aussi.
29:04Ceux qui vont s'éloigner de ta musique
29:06parce que ça ne correspond pas
29:08à ce qu'ils ont envie d'entendre.
29:10Tant mieux.
29:12Franchement,
29:14c'est ma préoccupation première.
29:16Les gens en général,
29:18est-ce qu'ils ont un petit peu d'embattis ?
29:20Est-ce qu'ils ont un peu de conscience politique ?
29:22Pour ne pas se faire marcher dessus.
29:24Moi, je préfère mille fois qu'il y ait des fachos
29:26qui m'écoutent plutôt que des fachos qui prennent le pouvoir.
29:30A choisir, tu préfères avoir des fachos fans de Kiss
29:32plutôt que des fachos qui votent ?
29:34Oui, franchement, c'est ça.
29:36C'est tellement inévitable.
29:40Si je pouvais ne pas prendre leur sou
29:42et pouvoir mettre des barrières, je le ferais.
29:45Mais au final, ils sont un peu de partout.
29:47Si c'est des jeunes faves de 12 ans
29:49qui tombent sur ma musique
29:51et qui deviennent de gauche,
29:53peut-être qu'au final,
29:55il vaut mieux qu'ils écoutent.
29:57Mais justement, sur ce sujet-là,
29:59est-ce que tu as l'impression
30:01que c'est une bonne chose quand même
30:03qu'il y ait de plus en plus de rappeurs
30:05qui prennent position ?
30:07Et on le voit de plus en plus là dernièrement
30:09parce qu'il y a eu des événements
30:11qui ont fait qu'on a appelé aussi
30:13Est-ce que tu penses que c'est un bon move
30:15d'intégrer un peu
30:17de cet engagement,
30:19même si ce n'était pas naturel à la base ?
30:21Pour moi, que ce soit les artistes, les sportifs,
30:23il ne faut pas qu'ils s'en empêchent.
30:25C'est plus ça.
30:27Que leurs paroles soient plus valorisées
30:29que celles d'un autre, je dirais que ça n'a pas trop de sens.
30:31Mais c'est un peu la loi
30:33des célébrités, j'ai envie de dire.
30:35C'est plus la résonance que ça va avoir.
30:37C'est un peu la loi de l'influence
30:39qui fait que c'est dommage
30:42Mais après,
30:44le bon move, entre guillemets,
30:46ça donne un peu l'impression que je fais le move.
30:48C'est-à-dire que c'est un move aussi,
30:50il y a une partie de communication,
30:52tu peux capitaliser là-dessus
30:54alors que tu t'en fous.
30:56Je dirais que l'obligation,
30:58il ne faut pas que ce soit une obligation,
31:00il faut que ça soit sincère.
31:02Mais bien sûr que je trouve que c'est positif
31:04que les artistes donnent leur avis
31:06parce que souvent c'est quand même le bon
31:08et il n'y a pas beaucoup d'artistes qui donnent le mauvais.
31:10Dans ce sens,
31:12avant l'émission, je t'ai demandé
31:14de choisir un moment pop culture
31:16qui t'a marqué,
31:18qui t'a influencé
31:20dans ton parcours,
31:22dans ton processus.
31:26J'ai un extrait,
31:28tu nous racontes après.
31:34C'est le moment un peu émotion.
31:40Je ne me souviens plus
31:42la dernière fois que nous étions tous ensemble.
31:44L'année dernière,
31:46sur ce stupide spécial Edna.
31:48Et un 1, et un 2, et un 3.
31:52Baby, je suis fatigué.
31:56Comment je suis fatigué.
31:58J'ai mis ce signe
32:00sur la fenêtre de mon voiture.
32:02Bonjour,
32:04Human Fly ici.
32:06Allez,
32:09Je suis fatigué,
32:11j'ai dormi toute la nuit,
32:13j'ai cassé mes vêtements.
32:15Extrait, extrait,
32:17B-Sharp chante sur le toit.
32:19Donne moi un de ces.
32:21Attends une minute,
32:23il n'y a rien ici sur les B-Sharps.
32:25Reviens ici.
32:31C'est fait.
32:33C'est fait, Lou.
32:35C'est fait.
32:37Prends le gaz lacrymogène.
33:03C'est ce que tu me disais tout à l'heure
33:05quand tu disais
33:07ok, je l'ai balancé pour que ça existe.
33:09Pour que ça existe.
33:11En gros,
33:13pour que ça existe.
33:15Pour que ça existe.
33:17Pour que ça existe.
33:19Pour que ça existe.
33:21Pour que ça existe.
33:23Pour que ça existe.
33:25Pour que ça existe.
33:27Pour que ça existe.
33:29Pour que ça existe.
33:32Juste pour avoir cette possibilité-là
33:34qu'un jour je tombe sur le truc,
33:36ça se trouve j'ai des gosses, des petits-enfants,
33:38je souffle dessus, je fais
33:40ouais, regardez, papy il a fait un disque, je vous jure.
33:42Avant j'étais rappeur.
33:44Parce qu'il peut se passer plein de choses dans la vie,
33:46ça ne dure pas longtemps une vie d'artiste.
33:50Tu vois, ça peut durer 20 ans,
33:52mais c'est quand même super rare.
33:54Et en fait, il y a trop ce truc-là,
33:56j'avais trop envie d'avoir une pierre
33:58quelque part dans
34:00l'histoire de la musique et à la base c'était juste
34:02dans un coin de Spotify,
34:04maintenant c'est devenu un disque
34:06et Rêve d'un rouilleur
34:08pour le fait de l'avoir pressé en vinyle et en disque
34:10de la même manière que
34:12OK, à l'époque, le fait de
34:14poser un bout de ma musique dans un coin
34:16de ce qui est la plus grande
34:18bibliothèque musicale possible
34:20tu vois, Spotify.
34:24Cette scène-là, elle m'a toujours symbolisé,
34:26elle m'a toujours marqué
34:29de pouvoir dire, j'ai fait ça.
34:31C'est fou, c'est Homer Simpson qui a influencé ta carrière.
34:33Je ne m'y attendais pas.
34:35Je pense que j'aurais eu l'idée de faire
34:37un disque quand même, mais c'est-à-dire que
34:39pour avoir cette émotion
34:41de la transmission
34:43c'est un truc qui meurt
34:45jamais en fait.
34:47J'espère que tu ne finiras pas dans une usine nucléaire
34:49tu vois.
34:51Dans 30 ans, tu te réveilleras
34:53et tu diras, putain, vous vous rappelez de Rêve d'un rouilleur.
34:55Sans aucune transition,
34:57parce que là, on va parler d'autres artistes.
34:59Tu as une liste de feats
35:01qui est assez statutaire, je dirais.
35:03On parlait de Limsa Dolnet
35:05tout à l'heure, qui a un nom important, on parlait d'éloquence.
35:07Samir Hamad aussi, qui fait partie
35:09de cette écurie,
35:11de cette école très exigeante
35:13du rap français et qui est un peu le
35:15chouchou des passionnés
35:17de rap et qui n'a pas
35:19lui non plus eu
35:21une extrême résonance en termes
35:23de chiffres de ventes, de notoriété
35:26mais qui est un rappeur qui est unanimement
35:28respecté pour ce qu'il fait
35:30et tu as eu un feat avec lui justement.
35:32Tous ces anciens qui te valident
35:34et qui ont
35:36cette même spécificité
35:38d'être très exigeant dans leur rap,
35:40est-ce que ça te donne l'impression
35:42de faire partie d'une scène en particulier ?
35:44De leur scène ou d'une scène
35:46à part entière ?
35:48Question intéressante parce que
35:50c'est quand même des artistes dont j'ai
35:52une forme d'héritage.
35:54Ça a été par exemple une inspiration
35:56sur « Rêve d'un rouilleur ».
35:58Ça fait partie des inspits,
36:00dans les inspits récentes.
36:02Ça me rappelle une fois,
36:04je me suis retrouvé sur une photo avec Joe Lucas
36:06et Samir Hamad.
36:08Est-ce que j'appartiens justement à cette scène ?
36:10Je ne pense pas en vrai.
36:12C'est générationnel en fait.
36:14Je pense que je fais partie d'une scène...
36:16J'ai quand même mon âge
36:18et il se trouve
36:20que je me retrouve à faire pas mal de feats avec ces mecs-là.
36:23Ouais, t'es la génération après,
36:25après eux directement. T'as quel âge aujourd'hui ?
36:2725 ?
36:29J'ai 26.
36:33Les rappeurs que j'écoutais
36:35quand j'étais au collège, c'est les rappeurs de leur génération.
36:37Je me vois pas de cette scène-là parce que
36:39il y a ce gap générationnel.
36:41Je pense qu'il y a quand même ce truc de la temporalité
36:43qui fait que vous partagez pas
36:45exactement la même scène.
36:47On fait la même chose.
36:49On fait partie sûrement de la même famille
36:51esthétique.
36:53Mais moi je me vois pas dans une scène
36:55en particulier. J'ai envie encore
36:57de me dire que je fais pas...
36:59Je suis pas old school entre guillemets.
37:01Ouais, parce que c'est souvent ce qu'on va te dire.
37:03On va souvent mettre justement
37:05tous ces artistes que j'ai cités là dans la catégorie
37:07rap à l'ancienne qui veut pas dire
37:09grand chose parce que dans le rap à l'ancienne
37:11il y a aussi des trucs qui ressemblent pas du tout à ça.
37:13Mais moi je parlerais plutôt
37:15d'une certaine exigence,
37:17d'un certain respect de certains codes
37:19esthétiques, mais pas plus que ça.
37:21Et d'un autre côté, tu vois,
37:23la nouvelle génération, on parle pas mal
37:25de new gen, next gen, etc.
37:27J'arrive pas à te mettre dans cette catégorie
37:29non plus, parce que justement dans la new gen
37:31j'ai l'impression qu'il y a une esthétique
37:33très digitale en commun,
37:35chose que t'as pas du tout.
37:37C'est ça, c'est-à-dire que moi je suis dans
37:39une école du sample encore.
37:43Parce que tu peux sampler
37:45et faire de la musique digitale, ça dépend à quel point
37:47tu le défonces le sample.
37:49Mais sampler et rapper surtout.
37:51C'est ça qui va te donner un peu le truc boom bap
37:53old school machin, c'est quand
37:55c'est souvent pas trop chanté
37:57ou peu d'autotune.
37:59Donc ça c'est vrai, c'est mon école.
38:01Moi je préfère beaucoup
38:03rapper, mais en fait
38:05j'ai fait trois EP, enfin j'ai fait deux EP,
38:07un album, j'ai deux ans et demi de carrière.
38:09Tu te fermes pas
38:11à la porte de mettre des glitchs,
38:13de faire des refrains autotunés,
38:15peut-être que ça arrivera un jour.
38:17Absolument pas. Après moi, comme je disais,
38:19je travaille toujours en me disant qu'est-ce que je préfère écouter à l'instant.
38:21Et j'ai quand même
38:23beaucoup plus écouté, je vais pas mentir,
38:25des mecs qui rappent plus,
38:27tout ça machin. En vrai, moi
38:29j'ai kifferait
38:31inviter Osiris Jack sur un album.
38:33C'est mon rêve.
38:35Les gens ils se rendent pas compte, ils ont l'impression
38:37que j'écoute justement que Joe Lucas.
38:39C'est ma prochaine question.
38:41C'est qui les artistes que t'écoutes
38:43aujourd'hui qui t'inspirent ?
38:45Ou même juste que t'écoutes en te disant
38:47j'aurais aimé le faire ?
38:49J'aurais aimé le faire ? Bah justement,
38:51c'est marrant parce qu'on va retomber
38:53sur lui, c'est un peu dommage.
38:55Mais en même temps, félicitations à lui.
38:57C'est Samir Hamad. Quand j'écoutais
38:59Fendi, je me disais
39:01c'est vraiment des sonorités, c'est ça que j'aimerais bien
39:03faire. C'est pour ça que
39:05c'est ce que j'ai voulu faire pour Rêve d'un rouilleur.
39:07Et dans la nouvelle génération,
39:09peut-être il y en a qui te...
39:11Tout à l'heure, je parlais en off,
39:13je t'ai évoqué Witte, par exemple,
39:15son dernier album. Dans le genre, pas du tout
39:17comme j'ai fait, moi j'ai sûr kiffé son album.
39:19Witte, rappeur du sud
39:21de Toulouse,
39:23qui est dans la nébuleuse de Lello,
39:25qui a sorti pas mal de
39:27P et qu'on attend
39:29de pied ferme. On attendait ce retour-là, il a sorti
39:31un album il n'y a pas longtemps. Et ouais, il fait
39:33partie de ces artistes qui ont une vraie personnalité,
39:35qui arrivent à faire un truc un peu différent.
39:37Justement, moi c'est plus dans cette catégorie-là
39:39que j'aimerais que
39:41tu sois classé, parce que
39:43dans ce rap à l'ancienne, j'ai l'impression
39:45qu'on fout un peu tout là
39:47dedans, quand ça rappe un peu
39:49au kilomètre, quand il n'y a plus
39:51de couplets, ou quand il n'y a pas
39:53de refrain, tu vois. Et c'est un peu
39:55dommage d'avoir ce truc-là, alors qu'au final,
39:57je pense que la new
39:59gen pour moi, c'est plus
40:01le fait d'avoir des artistes
40:03qui assument une direction un peu
40:05radicale. Ouais, et puis d'autant plus que
40:07les morceaux next-gen, entre guillemets,
40:09ne sont pas beaucoup plus structurés.
40:11C'est pas
40:13des structures un peu classiques. Dans un morceau
40:15d'Ouérenois, ça va être dur de ne pas trouver
40:17de refrain, machin. Mais les rappeurs
40:19next-gen, moi quand je pense à rappeurs next-gen,
40:21je pense à plus des mecs, au final, qui vont avoir tendance
40:23à déstructurer leurs morceaux.
40:25Tu n'auras pas forcément des refrains, tu auras des trucs...
40:27C'est ça, c'est la liberté
40:29que ça peut vous offrir. Ouais, voilà.
40:31Donc en fait, ce qui va jouer, c'est l'esthétique des
40:33prods, c'est-à-dire que
40:35est-ce que Jungle Jack
40:37est next-gen parce qu'il met de la
40:39trap dans ses
40:41drums ? Moi, je pense pas.
40:43Next-gen, pour moi, il y a quand même une affiliation un peu plus
40:45aux sonorités de la musique électronique
40:47aussi. Ouais.
40:49Il y a un côté vraiment plus libre aussi
40:51avec l'interprétation, c'est-à-dire que
40:53on va pas que rapper, on va écrire comme
40:55des rappeurs, mais chanter. C'est vrai.
40:57Next-gen,
40:59ça veut tout dire.
41:01Ça veut tout dire, ça veut rien dire.
41:03Il y a aussi un petit problème
41:05en vrai de comment on parle de la musique
41:07en France. On a un peu du mal à
41:09mettre des mots
41:11sur des genres, mais c'est aussi
41:13dû à une hybridation des genres
41:15qui a eu lieu ces dernières années que je trouve
41:17hyper créative, mais justement
41:19moi, j'aimerais toujours quand même de faire attention
41:21à ça. Je le disais en intro,
41:23je suis toujours à la recherche du son de demain,
41:25mais le son de demain, c'est pas forcément quelque chose
41:27qui n'a jamais existé. Je pense que
41:29avec 40 ans d'historique de rap français,
41:31on a fait pas mal de choses
41:33et le fait que le rap aujourd'hui s'auto-référence,
41:35c'est un peu inévitable.
41:37Et c'est plus dans...
41:39C'est pas forcément dans l'esthétique qu'on va trouver quelque chose de nouveau,
41:41c'est plus dans le récit,
41:43le récit d'une époque en fait. Et j'ai l'impression
41:45que t'es complètement dans un
41:47récit ultra actuel,
41:49ultra moderne en fait.
41:51Donc finalement, tu peux utiliser des samples,
41:53tu peux avoir cette
41:55chaleur dans la façon,
41:57dans l'esthétique que tu vas apporter,
41:59sur tout ce que tu racontes qui va être important, j'ai l'impression.
42:01Ouais, et puis alors si je peux rajouter
42:03aussi que, bon, c'est un
42:05classique, mais je partage l'opinion
42:07comme quoi, esthétiquement,
42:09en France, on reproduit
42:11pas mal ce qui a été fait dans un premier temps aux Etats-Unis.
42:13Et
42:15il y a plein de rappeurs
42:17entre guillemets. Il y a une scène mainstream
42:19drumless, samplée,
42:21qui existe aux Etats-Unis.
42:23Donc c'est des parties prises,
42:25c'est une forme de militantisme aussi,
42:27dans des samples, dans des drums
42:29plus acoustiques, etc.
42:31Dans des schémas assez simples, et tout, sur les morceaux.
42:33C'est un parti pris, c'est mon école,
42:35ça veut pas dire que ça va faire un truc old school.
42:37Demain, ce sera peut-être le mainstream,
42:39et du coup, ce sera peut-être ça, la next-gen,
42:41entre guillemets. Si je prends des flows
42:43style le double sur des
42:45prods de la Réjune, tu vois,
42:47est-ce que c'est next-gen ou est-ce que c'est old school ?
42:49C'est vrai. Et pourtant, c'est possible.
42:51En fait, la question se pose pas vraiment.
42:53Je pense qu'à un moment, il y a eu une nouvelle génération
42:55qu'il fallait nommer, qui faisait plein de trucs différents,
42:57et on a appelé ça la next-gen, parce que c'était
42:592020 à peu près,
43:01c'est à ce moment-là qu'il y a eu une explosion
43:03de plein d'artistes différents,
43:05et on a pas su bien
43:07la nommer, mais on est aussi là pour ça,
43:09pour parler justement de toutes ces références
43:11qui composent la nouvelle génération d'artistes
43:13à laquelle tu fais partie.
43:15Et on arrive
43:17bientôt à la fin. J'ai besoin
43:19que tu me décryptes
43:21des lyrics,
43:23mes lyrics préférés.
43:25J'en ai beaucoup, mais j'en ai sélectionné une,
43:27parce que je trouve qu'elle raconte un petit peu quelque chose de toi.
43:29Je fais ça pour la fêta,
43:31pas trop pour la culture.
43:33C'est sur le morceau Islam Slimani,
43:35dont on parlait tout à l'heure avec Limsadonnae.
43:37Pourquoi ?
43:39Ça, c'est marrant, parce que
43:41mon pote et manager, Jules,
43:43me dit toujours que ça le fait trop rire,
43:45parce que tous les rappeurs, quand tu parles de fromage, ils parlent de thune.
43:47C'est vrai ?
43:49Moi, je parle de fêta, genre vraiment premier degré.
43:51Tu parles de bouffe régulièrement.
43:53Je fais ça pour la fêta,
43:55pas trop pour la culture.
43:59Je fais ça pour le kiff.
44:01La fêta, c'est ce que je mets dans tout.
44:03C'est vraiment mon petit plaisir.
44:05C'est ton ingrédient ultime.
44:07C'est un peu original.
44:09Oui, mais il y a le côté arménien.
44:13En vrai, il y a pas mal de fêta dans la cuisine arménienne.
44:15Et justement,
44:17le fait de ne pas le faire pour la culture,
44:19pour moi, c'est un contre-pied
44:21à ce qu'on attend d'un rappeur
44:23à l'ancienne.
44:25Parce qu'un rappeur à l'ancienne,
44:27on attend à ce qu'il défende des valeurs du hip-hop, etc.
44:29Et pour la culture,
44:31c'est quelque chose qui est assez revendiqué.
44:33J'ai l'impression que c'est un contre-pied à ça.
44:35Oui.
44:37Moi, je me sens
44:39porte-parole de rien.
44:41Ça, c'est super important pour moi.
44:43Cette culture, je ne la représente pas mieux
44:45que quiconque.
44:47Les gens me disent que je fais du vrai rap
44:49par rapport à eux.
44:51Je n'ai pas fait exprès.
44:53C'est juste ce que je préfère.
44:55Comme je disais, je fais de la musique pour moi avant tout.
44:57C'est parce que c'est très égoïste.
44:59C'est vraiment du plaisir que je prends à faire ça.
45:01Du coup, je le fais.
45:03Et des fois, au détriment d'autres choses.
45:05Il y a peut-être certaines relations
45:07qui s'abîment parce que je préfère rester
45:09sur ma mpc ou faire mes maquettes.
45:11Mais je fais ça pour mon plaisir.
45:13C'est égoïste.
45:15Je ne vais pas faire genre
45:17pour la culture, pour la faire avancer.
45:19J'ai l'impression de ne rien inventer.
45:21Comme esthétiquement ou quoi.
45:23Que ça plaise à des gens.
45:25C'est con, mais il faut aussi que j'assume
45:27que je n'ai pas grandi dans un château.
45:29Je ne suis pas vraiment
45:31le petit-fils d'Aznavour.
45:33Mais je suis quand même
45:35de la Croix-Rousse.
45:37Peut-être qu'il y a 15 ans,
45:39je n'aurais pas fait du rap.
45:41Si j'avais 15 ans de plus,
45:43peut-être que je n'en aurais pas fait.
45:45Même sociologiquement,
45:47je ne vois pas pourquoi je représenterais
45:49cette culture plus que quelqu'un d'autre.
45:51Il faut quand même que je me remette à ma place.
45:53Moi, ma place de faire mon kiff,
45:55ça me va.
45:57On va terminer sur le morceau
45:59que tu préfères de ta discographie.
46:01On va lancer ça maintenant.
46:09...
46:33Si j'arrive sur l'album
46:35Rêve d'un rouilleur, sorti en
46:37novembre 2023,
46:39pourquoi ce titre en particulier ?
46:41Pourquoi c'est ton préféré ?
46:43Pour moi, il est hors catégorie.
46:45Je le trouve mieux que les autres,
46:47genre de fait.
46:49Le texte, la prod, ça vient d'où ?
46:51Tout simplement parce que
46:53je crois qu'il n'y a pas d'autre son
46:55qui produit
46:57la même émotion
46:59à tout le monde, tout le temps,
47:01chaque fois que je l'écoute.
47:03Il a un statut particulier.
47:05En gros, comme je disais,
47:07je lui ai envoyé un son à Mani quand on a
47:09commencé à travailler. Je lui ai envoyé mon meilleur texte.
47:11Il a pris la voix de ma
47:13maquette. On a fait une prod et c'est devenu
47:15la prod de J'arrive.
47:17Il m'a envoyé ça et là je me suis dit
47:19je vais écrire dessus.
47:21C'est bon, maintenant qu'il m'a validé.
47:23Et j'ai écrit ce morceau-là, deux semaines après
47:25sortie d'OK, en me rendant compte de ce qui
47:27se passait, que j'allais être épi
47:29par un public, que je n'allais plus écrire que pour moi.
47:31Donc
47:33c'est une nuit complète de 21h
47:35à 11h du mat.
47:37J'ai écrit 8 minutes de texte.
47:39Tout ce qui me passait par la tête,
47:41c'était une explosion de ouf.
47:43Le son faisait 3 fois la prod.
47:45Je lui ai demandé de me la rallonger.
47:47Et je l'ai fait tenir au final
47:49dans les 5 minutes. J'ai travaillé un mois
47:51un petit peu au fond.
47:53Pas un mois à temps plein, tu connais.
47:55J'ai pris le recul pour vraiment
47:57qu'il soit bien.
47:59J'avais jamais écrit de manière aussi décousue.
48:01Dans les flots.
48:03C'est un morceau où tu te livres
48:05énormément aussi. J'ai l'impression que tu
48:07vides ton sac aussi sur plein de choses.
48:09C'est tout ce qui me passe par la tête. C'est aussi une manière
48:11de me forcer. C'est-à-dire que j'avais peur que
48:13justement, tu vois ça revient à la question
48:15de Saïd, j'avais peur que le public
48:17me fasse... Le fait qu'il y ait un public
48:19qui aurait pu être moi, parce qu'en plus c'était
48:21le public de Mani aussi.
48:23J'avais peur que ça me fasse
48:25arrêter de me confier. Parce qu'avant j'avais cet aspect
48:27un peu journal intime, vu que personne n'allait écouter mes textes.
48:29Donc je m'en foutais. Donc là tu avais un peu la
48:31pression de te dire, ah peut-être que j'ai plus réussi.
48:33Je me suis dit, je suis obligé. Maintenant que je leur ai dit ça, de toute façon
48:35je suis les deux pieds dedans, entre guillemets.
48:37Et un peu ce truc-là.
48:39Et après, dès que
48:41j'ai commencé à montrer le texte,
48:43il y avait toujours 3-4
48:45secondes de silence à la fin. Ouais, je te
48:47confirme. Je te confirme, ça fout
48:49l'ambiance.
48:51De toute évidence, il n'y aura pas deux sons
48:53comme ça, parce que c'est le premier son que j'ai écrit sur
48:55une protomane. C'est ma rencontre avec le public.
48:57Magnifique.
48:59C'est une très belle façon de conclure
49:01cette émission. Moi, personnellement,
49:03j'ai confectionné une playlist qui regroupe
49:05tes essentiels selon moi,
49:07tire à voir, et tous les
49:09morceaux aussi dont on a parlé dans cette
49:11émission, que vous pourrez retrouver
49:13dès maintenant au moment où vous écoutez
49:15ça, sur toutes les plateformes d'écoute.
49:17Et c'est ce que je ferai pour chaque épisode.
49:19Merci d'avoir été là.
49:21Merci d'avoir partagé
49:23ton Processus avec moi.
49:25C'est quoi la suite pour toi ?
49:27Tu peux dire quelque chose ? D'annoncer ?
49:29Je ne sais pas. C'est parfaitement secret.
49:31Surveiller le ciel, comme on dit.
49:33Allez, très bien. Je vais faire comme
49:35si je n'étais pas au courant. C'était Processus,
49:37le nouveau podcast musique de Konbini.
49:39Disponible sur toutes les plateformes d'écoute
49:41et sur Youtube. Abonnez-vous.
49:43Faites vos retours en commentaire et dites-nous
49:45qui on doit absolument inviter.
49:47On se retrouve dans deux semaines pour un nouvel épisode.
49:49Salut !
49:53Et ne partez pas tout de suite.
49:55Cet épisode de Processus est maintenant terminé.
49:57J'espère que vous avez passé un bon moment avec nous.
49:59La bonne nouvelle, c'est qu'on vous livre
50:01un nouvel épisode dans deux semaines.
50:03Parce que Processus, c'est tous les 15 jours.
50:05Un mardi sur deux.
50:07Abonnez-vous et mettez des cœurs en commentaire.
50:09Bye !